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127 CHAPITRE VII DISCUSSION GENERALE CONCLUSIONS GENERALES ET PERSPECTIVES

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CHAPITRE VII

DISCUSSION GENERALE CONCLUSIONS GENERALES

ET PERSPECTIVES

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VII. DISCUSSION GENERALE, CONCLUSIONS GENERALES ET PERSPECTIVES VII.1 Discussion de la méthodologie d’étude

VII.1.1 Principales méthodes de collecte des données

La technique des relevés a permis la collecte des données sur la flore globale de la forêt de Kigwena en s’appuyant sur la méthode sigmatiste de Braun-Blanquet (1932). Cette dernière repose sur le principe de discontinuité de la végétation dont les caractéristiques et les distributions sont basées sur des facteurs écologiques et phytocoenotiques conduisant à la présence des espèces dites caractéristiques (Gounot, 1969) ; ce qui permet de faire des relevés dans des zones de végétation relativement homogène.

L’application de la méthode sigmatiste de Braun-Blanquet a déjà fait l’objet de nombreuses critiques formulées notamment par Aubreville (1951), Chevalier (1953) et Devred (1961). Selon ces auteurs, cette méthode exige le caractère zonal de la végétation à étudier. En outre, elle ne tient pas compte des caractéristiques des différentes strates de la végétation en présence, surtout lorsque l’étude se déroule en milieux forestiers tropicaux. Ainsi, lors de ses recherches méthodologiques pour la typologie de la végétation et la phytogéographie des forêts denses d’Afrique tropicale, Senterre (2005) a proposé l’utilisation de la méthode synusiale ou méthode des relevés synusiaux (relevés stratifiés). Cette technique de la phytosociologie synusiale a déjà été utilisée par Nshimba (2008). Malgré ces critiques formulées, nous avons jugé la méthode sigmatiste de Braun-Blanquet convenable pour la forêt de Kigwena où la zonation de la végétation était claire : zone de savane arborée dans la partie Nord, zone de lisière à l’Est le long de la RN3, zone de forêt dense dans le noyau central et zone de végétation semi- aquatique à l’Ouest au bord du lac Tanganyika. De plus, vus les objectifs poursuivis par notre étude notamment au niveau de la composition floristique, cette méthode a facilité l’inventaire de la flore globale de la forêt de Kigwena sans devoir tenir compte de la stratification verticale de la végétation. Comme le concèdent également Duvigneaud (1949), Léonard (1952), Mullenders (1954), Adjanohoun (1962), Schmitz (1963), Troupin (1966) et Senterre (2005), la méthode sigmatiste de Braun-Blanquet reste donc d’application suivant le milieu et les objectifs visés.

Dans la forêt de Rumonge, la collecte des données floristiques a été réalisée par la méthode des transects tracés plus ou moins perpendiculairement au réseau hydrographique principal de la région (le lac Tanganyika) et de manière à traverser les diverses conditions topographiques (Lejoly, 1993) de chaque colline considérée. Un échantillon stratifié de 12 collines a été retenu. Les inventaires se sont faits par la mesure du dhp (diamètre à hauteur de poitrine) suivant les instructions de Dallmeier (1992) pour les individus d’arbres de la classe de dhp ≥ 10 cm. Les individus de la classe de dhp < 10 cm ont été inventoriés par simple comptage jusqu’à la limite inférieure d’un individu dont la première paire de feuilles après les feuilles dicotylédonnaires permettaient son identification. Nous avons estimé que cette technique de mesure du dhp, telle qu’elle est appliquée par les forestiers, était non exhaustive car elle concernait uniquement les taxons d’arbres de la forêt. Ainsi nous avons

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dû compléter les inventaires par la notation à la volée de toutes les espèces du sous-bois se trouvant le long du transect et même en dehors de celui-ci. Dans la présente étude, cette technique a été utilisée parce qu’elle permettait de quantifier la représentation des taxons d’arbres présents dans la forêt (Lejoly, 1993). La même méthode a déjà été utilisée par d’autres chercheurs comme White en 1992 dans la forêt de la Lopé au Gabon et par Kouka (2000) dans le Parc National d’Odzala au Congo-Brazzaville.

Dans le but de rendre possibles les comparaisons au niveau des taxons d’arbres entre les forêts de Kigwena et de Rumonge, un transect unique a été tracé dans le noyau central de la forêt de Kigwena comme le propose dans certains cas la Cellule de Coordination du Projet ECOFAC (Ecosystèmes Forestiers de l’Afrique Centrale) (Lejoly, 1993). Le transect a été orienté suivant une ancienne piste abandonnée autour de laquelle la densité de la végétation a permis de réaliser les mesures de dhp sur chaque arbre de la classe de dhp ≥ 10 cm, ce qui nous a fourni des données utiles sur les espèces d’arbres de la forêt. Cependant, les informations recueillies le long de l’unique transect n’ont pas permis de tester statistiquement le modèle de distribution spatiale horizontale des arbres dans cette forêt par la méthode de Dajoz (2000) qui requiert plusieurs prélèvements ou dénombrements d’individus. En outre, nous doutons que le fait d’avoir fait passer ce transect unique par une ancienne piste abandonnée pourrait avoir occasionné un certain biais dans les données recueillies relatives aux individus et espèces d’arbres recensés dans la forêt dense de Kigwena.

Pour la collecte des données sur les individus et les espèces d’arbres, nous avons choisi d’appliquer le seuil habituellement utilisé dans les études de structure forestière, soit dhp ≥ 10 cm (Hallé et al., 1978 ; Pélissier, 1995 ; Blanc, 1998 ; Riéra et al., 1998). Ce choix s’est avéré conforme à nos observations de terrain et à nos objectifs d’étude. Il convient toutefois de signaler que ce seuil peut être rabaissé, comme à l’occasion des études portant sur des essences ligneuses de très petit diamètre et/ou visant l’analyse approfondie des potentialités de leur régénération. Il peut aussi être au contraire rehaussé, notamment lorsque les études portent sur des sites avec des essences forestières de très gros diamètres et/ou visant essentiellement l’analyse de l’exploitabilité des arbres. Cela peut donc avoir comme conséquences d’accroître ou de diminuer non seulement la durée d’échantillonnage et d’analyse des données, mais également les effectifs des individus d’arbres recensés (densité) ou des espèces d’arbres identifiées (liste floristique). Les valeurs de la surface terrière des espèces d’arbres ou du peuplement forestier global ainsi que la distribution spatiale des individus d’arbres observées en sont également affectés. Il est donc clair que si nous avions considéré un seuil de dhp différent de 10 cm, les résultats que nous aurions obtenus auraient différé de ceux présentés dans cette étude.

A l’occasion de recherches ultérieures se déroulant sur plusieurs forêts ou plusieurs sites, il serait plus intéressant d’appliquer strictement la même méthodologie pour minimiser autant que faire se peut le biais qui affecterait les données en cas d’application de méthodes différentes. En outre, la délimitation de superficies identiques pour tous les inventaires faciliterait l’analyse et la comparaison des données observées sur les sites d’études.

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Pour les informations relatives aux ressources végétales naturelles prélevées dans les forêts de Kigwena et de Rumonge, la collecte des données a été réalisée au moyen des entretiens semi-structurés avec des personnes adultes (âge ≥ 18 ans) résidant dans les villages riverains. L’avantage de cette méthodologie est qu’elle instaure une forme de dialogue entre le chercheur qui pose des questions et l’interlocuteur qui fournit les informations. La stratégie consiste à partir des problèmes ou des difficultés de la vie quotidienne des populations vers les remèdes constitués par les plantes et autres ressources ou services en provenance des forêts (Lejoly, 1993).

Cette méthodologie avait déjà été utilisée par l’équipe de chercheurs qui poursuivait un programme de recherche appliquée sur la médecine populaire en Caraïbe (Robineau, 1999) et par Dan (2009) au Bénin.

Cependant, la manière de procéder ne nous a pas permis d’avoir des informations sur l’ampleur ou la fréquence de citation ni des espèces prélevées et des organes visés, ni des usages réservés aux ressources végétales naturelles prélevées. Pour y arriver, il serait pertinent de confectionner une fiche individuelle pour chaque répondant afin de pouvoir statistiquement analyser le poids des réponses plus fréquentes. En outre, l’idéal serait de disposer des données démographiques des villages riverains aux deux forêts étudiées, et de s’y référer pour bien fixer dès le départ un échantillon de répondants réellement représentatif et bien stratifié.

VII.1.2 Regard critique sur la qualité des identifications taxonomiques

La détermination des noms scientifiques des taxons (familles, genres et espèces) a été effectuée sous la supervision du Professeur Jean Lejoly (Université Libre de Bruxelles) et du Professeur Marie-José Bigendako (Université du Burundi). Elle s’est référée au système de classification de Lebrun & Stork (1991-1997) parce qu’en 2004, année de début des identifications, c’était encore le seul système nomenclatural fiable et adapté aux observations des caractères morphologiques des plantes. En effet, le modèle moléculaire de laboratoire APG II (2003) (Angiosperm Phylogeny Group) qui venait d’être élaboré comportait encore des lacunes, ce qui a motivé et conduit à sa révision pour aboutir à une nouvelle version (APG III, 2009). Celle-ci a été publiée longtemps après nos identifications alors que les analyses floristiques et statistiques des données étaient déjà presqu’au bout. Actuellement encore, une nouvelle version (APG IV) serait en cours d’élaboration.

Or, si l’on se réfère au nouveau système nomenclatural représenté par la nouvelle base de données des plantes à fleurs d’Afrique régulièrement renouvellée en ligne (http://www.ville-ge.ch/musinfo/bd/cjb/africa/), des modifications sont chaque fois effectuées à plusieurs niveaux taxonomiques. De manière générale, les cas les plus importants à relever concernent des espèces qui ont changé de nom ou qui ont disparu parce qu’elles sont tombées en synonymie avec d’autres. De plus, certaines espèces ont non seulement changé de nom, mais également de famille. C’est le cas de Chlorophytum campanulatum devenue Chlorophytum colubrinum et Chlorophytum bequaertii devenue Chlorophytum gallabatense qui sont toutes les deux passées de la famille des Liliaceae à celle des Asparagaceae. De même, l’espèce Smilax kraussiana devenue Smilax anceps est passée de la famille des Liliaceae à celle des Smilacaceae. Plusieurs autres familles ont aussi fusionné en une seule.

Par exemple, les familles des Caesalpiniaceae, des Fabaceae et des Mimosaceae forment actuellement une

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seule famille des Fabaceae ou Leguminoseae comprenant trois sous-familles : les Caesalpinioideae, les Faboideae et les Mimosoideae. La qualité des identifications scientifiques réalisées a donc été affectée par cette problématique de révision constante de la base nomenclaturale moléculaire ou génétique. Les modifications intervenues par rapport à nos identifications scientifiques ont été reportées à l’annexe 1.

En outre, la taxonomie végétale n’est pas encore maîtrisée à cent pour cent. L’identification de certains groupes végétaux, par exemple les Commelinaceae, les Cyperaceae, les Orchidées, etc. ne repose pas encore sur des clés de détermination bien définies. Cela est à l’origine de l’inflation taxonomique par laquelle plusieurs noms différents peuvent être retenus alors que ces derniers seraient probablement des synonymes qui désignent un seul et même taxon ; ce qui peut aboutir à l’exagération et à l’allongement de la liste des taxons.

VII.1.3 Principales méthodes d’analyse des données

L’analyse des données sur la flore globale des forêts de Kigwena et de Rumonge s’est focalisée sur la diversité taxonomique, les adaptations des espèces et leurs systèmes d’ancrage au milieu (Raunkiaer, 1934 ; Lebrun, 1966 ; Schnell, 1977) ainsi que sur leur aire de distribution (Duvigneaud, 1953 ; Aubreville, 1962 ; White, 1979, 1983, 1986).

La différenciation des groupements végétaux dans les forêts de Kigwena et de Rumonge a été réalisée par la méthode UPGMA (Unweighted Pair Group Method with Arithmetic mean) (Sokal & Michener, 1958 ; Bangirinama, 2010) contenue dans le programme informatique MVSP (MultiVariate Statistical Package ; Kovach, 1997). Le choix de cette méthode se justifie par ses qualités. En effet, non seulement elle se place au juste milieu entre la méthode du voisin le plus proche (Nearest neighbour method) et celle du voisin le plus éloigné (Farthest neighbour method), mais elle concilie également la manière d’insertion d’un sous-groupe dans un groupe et la cohérence interne des sous-groupes (Legendre & Legendre, 1984). Le fait que cette méthode accorde le même poids (unweighted) aux objets (collines ou relevés) a milité pour son utilisation afin de remédier à la différence de tailles des données receuillies dans des relevés de superficie différente et le long des transetcs de longueur également différente. Dans l’application de la méthode UPGMA, l’indice de SØrensen a été aussi le mieux adapté aux données binaires en présence-absence des espèces sur les collines prospectées. Nous ne pouvions pas utiliser ni l’indice de Bray-Curtis (1957), ni la distance euclidienne (Euclidean distance) (Kovach, 1997) qui sont respectivement requis en cas de données en abondance-dominance et de données de fréquences.

Pour la forêt de Kigwena, la mise en évidence des relations entre les unités de végétation a été réalisée par l’utilisation de l’ACP (Analyse en Composantes Principales). Cette méthode s’est avérée appropriée et adaptée à nos données regroupées en un tableau phytosociologique synthétique, avec en colonnes les numéros de relevés, en lignes les noms des espèces et à leurs intersections les coefficients d’abondance-dominance.

L’avantage de cette méhode est qu’elle permet de mettre en évidence de manière indirecte les paramètres ou les gradients environnementaux surtout que le protocole de travail de terrain n’avait pas prévu la mesure de leurs

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valeurs. Comme le nom de la méthode l’indique, le poids a été donné aux espèces les plus abondantes (composantes principales). Pour ce faire, la partie contenant beaucoup de zéros dans le tableau phytosociologique ordonné n’a pas été prise en compte. L’ACP a été préférée par rapport à l’autre méthode d’analyse indirecte des gradients écologiques, l’AC (Analyse des Correspondances), car cette dernière nécessite préalablement la certitude de la réponse unimodale des espèces aux facteurs écologiques en présence. Or, nous n’avions pas pu tester cette réponse par manque de valeurs environnementales mesurées. La ségrégation des relevés autour des axes 1 et 2 de l’ACP a été satisfaisante et nous a semblé conforme aux réalités des caractéristiques du site d’étude.

Le choix des indices et tests statistiques a également été guidé par les caractéristiques des données dont nous disposions et par le souci permanent de minimiser le biais qui se serait glissé dans les données issues d’échantillons de taille différente. Ainsi, pour tester le modèle de distribution spatiale des arbres dans la forêt claire de Rumonge, le test de Dajoz (2000) s’est avéré adapté à la taille de notre échantillon (n = 12 collines).

Cette taille ne pouvait pas permettre par exemple l’application du test de Clark & Evans (1954) car celui-ci requiert un échantillon de taille plus grande (n ≥ 100). Le test χ2 a également été utilisé notamment pour confirmer la prédominance d’un élément par rapport aux autres (Scherrer, 2007) ou pour la comparaison des proportions des éléments entre les forêts de Kigwena et de Rumonge. Pour tester la significativité de l’effet de la densité des arbres de la classe de dhp ≥ 10 cm sur le nombre d’individus de la classe de dhp < 10 cm, le test signé de Wilcoxon a été le mieux adapté à nos données appariées. Pour ce cas, l’ANOVA (ANalysis Of VAriance ou analyse de la variance) ne pouvait pas être d’application car nos données ne répondaient ni à la loi normale (distribution plus ou moins semblable des valeurs autour de leur moyenne), ni à la condition d’homoscédasticité (même variance) (Scherrer, 2007). Nous pensons aussi que le mode d’échantillonnage apparié dans des placeaux de forte et de faible densité pourrait avoir induit un biais dans les données. En effet, non seulement ces deux placeaux ont été choisis comme tels à l’avance, mais aussi ils n’ont pas gardé les mêmes positions pour tous les 12 transects échantillonnés. Il serait probablement plus pertinent d’analyser tout simplement la relation entre la densité des individus d’arbres de dhp ≥ 10 cm et le nombre des individus de dhp < 10 cm, à travers une courbe qui serait basée sur les effectifs des individus d’arbres de dhp < 10 cm recensés en fonction de la densité des individus d’arbres de dhp ≥ 10 cm, et ce, dans l’ensemble de tous les placeaux délimités sur l’entièreté de la longueur de chacun des 12 transects prospectés.

VII.2 Discussion des résultats

VII.2.1 Diversité taxonomique globale des forêts de Kigwena et de Rumonge

Du point de vue taxonomique, les forêts de Kigwena et de Rumonge ont une faible similitude floristique même si elles sont géographiquement proches (Chapitres III et IV). Cette particularité floristique des deux forêts se remarque également lorsqu’on tient compte du bilan global de la flore nationale du Burundi (Lewalle, 1972 ; Reekmans, 1980, 1981, 1982 ; Ndabaneze, 1983). La diversité taxonomique est un critère clé dans l’évaluation

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écologique des territoires (Berthoud & Econat, 1989). D’après Frontier & Pioche-Viale (1995), la notion de diversité comprend deux aspects : le nombre de catégories et le nombre de taxons différents. Ainsi, les résultats obtenus sur la diversité générique et sur la diversité spécifique contribuent à rendre compte non seulement de la richesse floristique des forêts étudiées, mais aussi des conditions desquelles ces dernières ont évolué et du degré de leur isolement ou de leur connection avec d’autres territoires (Gounot, 1969).

Les résultats de l’analyse des types biologiques dans les forêts de Kigwena et de Rumonge corroborent ceux d’Evrard (1968), Richards (1952), Germain & Evrard (1956), Nanson & Gennart (1960) et Schnell (1971). Selon ces auteurs, il est de règle qu’en forêt les phanérophytes forment la quasi-totalité du cortège floristique et que les autres types biologiques soient faiblement représentés. La représentation des chaméphytes dans les forêts de Kigwena et de Rumonge est liée au fait que les deux sites connaissent périodiquement un stress hydrique dû aux inondations suivies de dessication ou sécheresse du sol. Ce type biologique répond donc à la stratégie de tolérance au stress (Julve, 1989 ; Grime, 1977 in Bouzillé, 2007). Ces auteurs affirment que les thérophytes ont une stratégie dite rudérale qui leur permet de se développer et de se reproduire pendant la période favorable seulement pour mener ensuite une vie ralentie sous-forme de graines pendant la saison défavorable. Cette stratégie permet donc à ces végétaux de résister aux diverses perturbations qui s’exercent avec acuité sur les forêts de Kigwena et de Rumonge. L’éventail des types biologiques constitue finalement une expression synthétique de la composition morphologique de la flore des forêts de Kigwena et de Rumonge et traduit par là les stratégies d’adaption aux conditions climatiques ou mésologiques prévalant sur les deux sites.

Dans la forêt dense de Kigwena, certains arbres développent des racines contreforts (Photo VII.1a) ou des racines-échasses (Photo VII.1b) pour renforcer leur ancrage dans un sol périodiquement inondé et résister aux brises en provenance des collines et du lac Tanganyika. Dans la forêt claire de Rumonge, la réduction de la surface foliolaire et la perte de la quasi-totalité des feuilles par les plantes (Photos VII.2a, b) leur permettent de résister particulièrement à la saison sèche et de maintenir leur vie sur un sol sec et caillouteux. La collecte de données précises sur ces formes particulières développées par les plantes en guise d’adaptation au milieu pourrait fournir davantage d’informations complémentaires aux types biologiques des espèces. Selon Lebrun (1966), ce sont surtout les conditions extrêmes du milieu qui déterminent les limites de survie ou de prospérité des êtres vivants, tout comme elles constituent aussi de puissants facteurs de modifications génomiques. Il apparaît clairement que c’est la saison défavorable qui conditionne la croissance des végétaux conduisant ainsi à différents types biologiques également appelés « formes de vie », traduisant leur adaptation au milieu où ils vivent (Lebrun 1947 ; Bellefontaine et al., 1997).

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Photo VII.1 Formes d’adaptation des arbres aux inondations et aux vents dans la forêt dense de Kigwena. a : racines contreforts ; b : racines-échasses. Photos : P. Hakizimana, 2006

Photo VII.2 Adaptation des arbres à la saison sèche dans la forêt claire de Rumonge. a : les arbres de la canopée ont déjà entièrement perdu leurs feuilles ; b : une litière relativement abondante, constituée par les feuilles tombées. Photos : P. Hakizimana, 2007

a b

a b

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L’analyse de la distribution géographique des espèces recensées a mis en évidence la catégorie des éléments africains ou éléments à distribution africaine et les éléments à large distribution ou éléments à large amplitude géographique. Ce résultat confirme les observations de Porembski & Brown (1995) qui considèrent que les espèces à distribution soudanienne et les espèces à distribution soudano-zambézienne appartiennent à une seule et même région phytogégraphique. Par contre, se basant sur les subdivisions phytogéographiques de White (1983), Oumorou (2003) a reconnu et maintenu trois catégories d’éléments, à savoir l’élément phytogéographique base comprenant les espèces à distribution soudanienne, l’élément à distribution continentale dans lequel il a regroupé les espèces à distribution soudano-zambézienne, guinéo-congolaise, afro-tropicale, plurirégionale africaine et afro-malgache, ainsi que l’élément à large distribution rassemblant les espèces à répartition paléotropicale, pantropicale afro-américaine et cosmopolite. Dans les forêts de Kigwena et de Rumonge, l’importance de l’ensemble des éléments africains par rapport aux éléments à large distribution géographique en général et celle de l’élément soudano-zambézien en particulier s’expliquerait par le fait que les deux forêts font partie de la mosaïque régionale du lac Victoria, plus précisément dans la partie que Lebrun (1956) cité par Habiyaremye (1997) appelle « dorsale orientale ». Cette position conduirait par conséquent à une prédominance des espèces orientales. Le même argument expliquerait le pic observé pour la forêt de Rumonge étant donné que celle-ci est localisée plus à l’est par rapport à la forêt de Kigwena. L’élément de liaison soudano- zambézienne et guinéo-congolaise est représenté plus dans la forêt de Kigwena que dans la forêt de Rumonge.

Cela serait l’effet de l’influence climatique guinéenne qui s’exerce directement sur la forêt de Kigwena au travers du lac Tanganyika. Ce qui a valu la qualification de « forêt péri-guinéenne » accordée à cette forêt (Lewalle, 1972). Cependant, les espèces à distribution guinéo-congolaise n’y sont pas abondantes ; ce qui montre que finalement le déterminisme des espèces de cette forêt ne serait pas seulement et strictement d’ordre climatique.

La faible représentation des espèces endémiques dans les forêts de Kigwena et de Rumonge montre quant à elle que la région de la dorsale orientale n’a pas connu d’isolement géographique de ses populations constitutives. Comme Oumorou (2003) l’avait déjà souligné, le processus de différenciation des espèces endémiques dans cette région n’est pas important.

La distribution diamétrique des individus est l’une des caractéristiques essentielles d’un peuplement d’arbres (Knight, 1975 ; Desanker et al., 1997 ; Salomão & Matose, 2007 ). En effet, la manière dont les individus d’arbres sont répartis dans différentes classes de diamètre peut renseigner notamment sur l’histoire, le degré de perturbation et le degré de régénération du peuplement concerné (Chidumayo, 1987, 1999 ; Ernst, 1988 ; Apema, 1995 ; Jumbe et al., 2005). L’allure générale de la distribution diamétrique observée dans les forêts de Kigwena et de Rumonge (Chapitre III, Figures III.7 et III.8) montre qu’il y a moins d’individus de diamètre élevé.

La prépondérance des individus d’arbres de dhp < 10 cm s’expliquerait par l’existence de conditions naturelles favorables à la régénération naturelle durant les dernières années pour les espèces observées (Doucet &

Kouadio, 2007).

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Le dhp et partant la surface terrière des espèces d’arbres sont également des paramètres importants en sylviculture (Uhnl & Murphy, 1981 ; Reitsma, 1988 ; Lejoly, 1995 ; Doucet et al., 1996 ; Kouka, 2000). Les valeurs de ces paramètres sont le résultat des effets combinés de la densité et de l’âge des arbres, des conditions environnementales et des caractères de la croissance secondaire (Malaisse, 1984 ; Sokpon, 1995 ; Nshimba 2008). Généralement, mais pas toujours, le dhp et la surface terrière sont inversement proportionnels à la densité des individus d’arbres. Plus la densité des arbres est élevée, moins le dhp et la surface terrière sont grandes (Heinsdijk, 1965 ; Riéra et al., 1990 ; Gesnot, 1994 ; Dale, 2000 ). Cela peut être dû à une importante compétition pour les ressources du sol et pour la lumière ou alors les espèces en présence correspondent au type d’essences ligneuses qui n’atteignent pas de gros diamètres (Rollet, 1969, 1974, 1979 ; Forman & Godron, 1986 ; Koubouana, 1993 ; Nshimba, 2008).

VII.2.2 Comparaison de la physionomie de la forêt claire de Rumonge à celle des forêts claires de l’Est du Burundi et des régions sud-zambéziennes

Au Burundi, les forêts claires se rencontrent dans la région du Sud-Ouest et dans les dépressions du Kumosso, à l’Est du pays juste à la frontière avec la Tanzanie. Dans toutes les régions, ces forêts claires gardent le même fond floristique (noyau d’espèces communes) et présentent le caractère commun de la présence de nombreuses termitières à une fréquence d’environ 120 termitières/ha (Malaisse, 1997 ; Nzigidahera, 2000). Du fait des types d’espèces qui leur sont inféodées (plantes termitophiles comme Landolphia kirkii, Margaritaria discoidea, Uvaria kirkii, etc.), ces termitières sont considérées comme des écosystèmes particuliers et confèrent aux forêts claires du Burundi des caractéristiques du Miombo zambézien dont elles constituent l’extension la plus septentrionale.

Il apparaît cependant des différences physionomiques manifestes découlant notamment de la différence entre le type d’espèces d’arbres qui dominent la canopée dans chaque région. En effet, la forêt claire de Rumonge, localisée au Sud-Ouest du Burundi, est dominée par des espèces du même genre, à savoir Brachystegia bussei, B. microphylla et B. utilis (Chapitre III, Tableau III.2). En outre, on y observe l’absence totale des espèces comme Julbernardia globiflora, Monotes elegans, Pericopsis angolensis, etc. qui sont dominantes ailleurs dans les régions orientales du pays (Reekmans, 1981 ; Nzigidahera, 2000). Par contre, Dans la région du Sud-Est, les espèces qui dominent les forêts claires sont notamment Brachystegia longifolia, Pterocarpus tinctorius, etc. qui sont également inconnues dans le Burundi occidental. A proximité de la localité de Kinyinya, un peu plus au Nord toujours à Kumosso, il existe de belles reliques d’autres forêts claires dominées principalement par des arbres de Brachystegia wangermeana et B. longifolia auxquelles s’ajoutent déjà les premiers représentants du genre Uapaca. A l’extrême Nord encore, tout près de la localité de Gitwenge, Reekmans (1981) y a prospecté un autre type de forêts claires, jusque là non encore signalé au Burundi, dominée principalement par des arbres de Julbernardia globiflora, Uapaca kirkiana et Monotes elegans.

Par rapport aux forêts claires sud-zambéziennes, la forêt claire de Rumonge constitue l’unique représentant des forêts claires à Brachystegia le plus septentrional. Sa végétation se rapproche aux Ordres des Hyparrhenio-

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Combretetalia Schmitz 1988 (Alliance des Combreto-Hyparrhenion dichroae Streel 1963), des Julbernardio- Brachystegietalia spiciformis Schmitz 1988 (Alliances des Berlinio-Marquesion Lebrun et Gilbert 1954 et des Xerobrachystegion Schmitz 1950) et des Bidentetalia pilosae Schmitz 1971 (Alliance des Bidention pilosae Lebrun in Mullenders 1949) (voir Chapitre IV). Par contre, les forêts claires sud-zambéziennes, en particulier celles du Shaba (ex Haut Katanga) en République Démocratique du Congo, appartiennent au seul Ordre des Julbernardio-Brachystegietalia spiciformis Schmitz 1988 et représentent autant l’Alliance des Mesobrachystegion que celle des Xerobrachystegion Schmitz 1950. Une autre différence non moins frappante est que dans les forêts claires sud-zambéziennes, la dominance des arbres est partagée entre les genres Brachystegia, Julbernardia et Isoberlinia alors que la forêt claire de Rumonge demeure quasi-monophytique (Reekmans, 1981 ; Malaisse, 1997, Mutamba, 2007). Les superficies recouvertes par les forêts claires zambéziennes, celles du Sud-Ouest et de l’Est du Burundi y comprises, sont présentées au tableau VII. 1.

Tableau VII.1 Superficie et importance relative des forêts claires zambéziennes (Malaisse, 1997)

Pays Superficie (en km2) Importance relative (en %)

Angola 731.600 28,2

Zambie 494.900 19,1

Mozambique 407.700 15,7

Tanzanie 403.600 15,6

R.D. Congo 286.300 11,0

Zimbabwe 212.300 8,2

Malawi 54.700 2,1

Burundi 1.400 0,1

TOTAL 2.592.500 100,0

VII.2.3 Structure spatiale des forêts de Kigwena et de Rumonge

La structure spatiale des végétaux et des animaux est une importante caractéristique des communautés écologiques (Connell, 1963 in Ludwig & Reynolds, 1988). C’est habituellement l’une des premières caractéristiques que l’on observe lorsque l’on étudie une communauté et c’est l’une des propriétés les plus fondamentales de tout groupe d’organismes biologiques. Chaque système écologique est caractérisé par une interdépendance de trois éléments clés : sa composition, sa configuration et son fonctionnement (Noon & Dale, 2002). En analysant les structures spatiales et leur dynamique, des déductions utiles au sujet des processus écologiques fondamentaux peuvent être faites, et vice versa (Coulson et al., 1999 in Bogaert & Mahamane, 2005 ; Bogaert et al., 2004). Il existe une gamme de facteurs qui conditionnent la structure spatiale et qui peuvent être classifiés dans trois grandes catégories : 1) les facteurs morphologiques basés sur la taille et la croissance des plantes ; 2) les facteurs environnementaux qui sont hétérogènes du point de vue spatial et 3) les facteurs phytosociologiques qui permettent l’arrangement spatial d’une espèce affectant l’occurrence des plantes d’une autre espèce à travers leur interaction (Dale, 1999).

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Les résultats de notre étude ont montré que la distribution spatiale horizontale des arbres dans la forêt de Rumonge correspond au modèle agrégé, lequel a été confirmé par le test de Dajoz (2000) (voir Chapitre V). Ce type de modèle spatial horizontal s’expliquerait écologiquement par l’hétérogénéité dans la répartition des ressources disponibles dans le milieu, le type et le mode de dispersion des diaspores et les caractères ectomycorhiziques des espèces (Hawthorne, 1995 ; Dale, 2000 ; Newberry et al., 2002 ; Dajoz, 2006 ; Bangirinama, 2010 ; Masharabu, 2011 ; Matthew et al., 2011).

Il convient de rappeler que les effectifs des individus d’arbres ayant servi à la détermination du modèle spatial horizontal agrégé ont été inventoriés dans 12 placeaux de 0,2 ha chacun, délimités sur les 12 transects prospectés (Chapitre V). Or, selon Knight (1975) et Riéra et al. (1990), le modèle de distribution spatiale horizontale des individus d’arbres peut dépendre de la grandeur des superficies ou des échelles considérées. Il est donc fort possible que si les superficies prospectées avaient été de taille plus grande, le résultat aurait pu différer de celui auquel nous sommes arrivés par la présente étude.

VII.3 Discussion des arguments en faveur de la conservation optimale des forêts de Kigwena et de Rumonge

VII.3.1 Arguments liés aux principes généraux

VII.3.1.1 Singularité des forêts de Kigwena et de Rumonge à l’échelle nationale

Au Burundi, le type de forêt péri-guinéen n’existe que sur le site de Kigwena coincé entre la RN3 et le lac Tanganyika. De même, la forêt claire à Brachystegia de Rumonge est une forêt particulière qui ne se rencontre nulle part ailleurs au Burundi que sur les collines surplombant le lac Tanganyika dans la région de Rumonge (Lewalle, 1972 ; Malaisse, 1997). Ces deux types de forêts sont donc représentés uniquement au Sud-Ouest du Burundi, dans le seul District phytogéographique du Mosso/Malagarazi (White, 1983). Pour leur singularité, ces sites forestiers méritent par conséquent d’être préservés.

VII.3.1.2 Taille des forêts de Kigwena et de Rumonge

Selon la théorie des équilibres dynamiques, il est préférable de préserver et de valoriser des écosystèmes de grande taille. En effet, selon Forman (1995) et Lévêque & Mounolou (2008), ce type d’écosystèmes résiste mieux aux perturbations et présente une richesse plus élevée en espèces caractéristiques et en habitats par rapport aux écosystèmes de petite taille. Les effets lisière sont également moins importants dans les écosystèmes de grande taille (Lévêque & Mounolou, 2008). Selon Harper et al. (2005) et Alignier (2010), l’effet lisière est la résultatnte des processus qui s’opèrent au niveau de la lisière, celle-ci étant assimilée à une zone de transition (bordure) entre deux écosystèmes adjacents. L’effet lisière entraîne alors des différences de structure, de composition ou de fonction par rapport aux écosystèmes adjacents concernés (Jules & Rathcke, 1999 ; Tomimatsu & Ohara, 2004 ; Verheyen & Hermy, 2004). Ces différences correspondent aux variations des

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conditions environnementales (températures de l’air et du sol, vitesse du vent, intensité de la lumière, etc.) et aux descripteurs de la végétation (richesse spécifique, composition, abondance) en fonction de l’ampleur et de la distance de l’effet lisière (Chen et al., 1995 ; Forman, 1995 ; Burton, 2002 ; Harper et al., 2005 ; Ewers & Didham, 2006). Au contraire, Hunter (2000) considère que chaque écosystème, quelle que soit sa taille, a son importance.

Pour une superficie équivalente, plusieurs petits écosystèmes peuvent permettre de protéger une grande variété d’habitats et d’espèces rares. Selon Lévêque & Mounolou (2008), les petits écosystèmes minimisent également les risques d’une catastrophe comme le feu, une épidémie ou l’introduction d’espèces, qui peuvent détruire des populations entières. Ces auteurs précisent en fin de compte qu’il n’existe pas de taille minimale pour qu’un écosystème mérite d’être protégé, tout dépend des objectifs visés. A ce titre, même si les forêts de Kigwena et de Rumonge couvrent respectivement une superficie de 500 ha et 600 ha, elles méritent d’être préservées.

VII.3.1.3 Vulnérabilité des forêts de Kigwena et de Rumonge

Les forêts de Kigwena et de Rumonge sont localisées dans une région à forte densité de population. La proximité de nombreux villages entraîne une forte pression anthropique sur les espaces et sur ces écosystèmes forestiers.

Burke (2002) et Oumorou (2003) affirment que les écosystèmes forestiers placés dans de telles conditions constituent le refuge privilégié de la faune et de la flore naturelle. Suite à cette pression, les forêts de Kigwena et de Rumonge pourraient disparaître si des actions de conservation optimale ne sont pas entreprises dans un court terme.

VII.3.2 Arguments liés à la valeur conservatoire de la biodiversité végétale des forêts de Kigwena et de Rumonge

Selon Kakudidi (2004) et Dajoz (2006), la valeur de la biodiversité englobe à la fois la valeur des services rendus et la valeur culturelle, éthique et sociale. Dans la présente étude, les résultats ont montré que les populations riveraines des forêts de Kigwena et de Rumonge y prélèvent des organes de diverses espèces végétales et d’autres produits destinés à des usages variés (Chapitre VI). Parmi ces derniers, l’usage médicinal est le plus prépondérant compte tenu du nombre d’espèces de plantes médicinales récoltées dans les deux forêts. Cela montre que malgré l’expansion de la médecine moderne, les populations riveraines des forêts de Kigwena et de Rumonge font toujours recours à la médecine traditionnelle. En outre, comme l’avait déjà observé Nzigidahera (2000), les plantes médicinales prélevées dans les deux forêts constituent particulièrement une source de revenus notamment pour les tradipraticiens et pour d’autres vendeurs sur les marchés locaux en particulier. Le manque de reboisements familiaux et la densité élevée de la population entraînent une coupe importante d’arbres pour la production d’énergie (bois de chauffe, bois de charbon) et pour la construction (coupe des tuteurs), mais rarement pour le bois d’œuvre. Cette coupe des arbres est également amplifiée par les activités de distillation artisanale de l’huile de palme et de la pêche sur le lac Tanganyika avec la fabrication de pirogues et de pagaies. Le prélèvement des organes de plantes dans les forêts de Kigwena et de Rumonge constitue une des principales menaces qui pèsent sur les deux forêts. Une enquête beaucoup plus approfondie permettrait de

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mettre en évidence l’ampleur quantitative de ces prélèvements et de leur impact non seulement sur la biodiversité des deux forêts, mais aussi sur leur superficie et sur leur structure spatiale.

En vue de la conservation de la biodiversité végétale, Nzigidahera (2000), Habonimana et al. (2004) et Sibomana et al. (2008) ont dressé des listes de plantes ayant déjà atteint le statut d’espèces menacées, selon les critères de l’UICN (1990) adaptés au cas du Burundi. Pour l’UICN, une espèce menacée est soit une espèce en danger (espèce dont la survie est incertaine si l’on n’atténue pas les effets des facteurs de sa raréfaction), soit une espèce vulnérable (espèce risquant de se retrouver dans la catégorie précédente si les causes de sa raréfaction ne sont pas freinées), soit une espèce déjà rare (espèce ni en danger ni vulnérable mais dont les effectifs sont très réduits et confinés dans des habitats spécifiques), ou soit une espèce indéterminée (espèce connue pour être dans l’une des trois catégories précédentes mais qu’on ne parvient pas à classer avec certitude à cause du manque d’informations suffisantes) (Nzigidahera, 2000 ; Dajoz, 2006).

Dans ce cadre, on remarque que 16 espèces de la forêt dense de Kigwena et huit espèces de la forêt claire de Rumonge se retrouvent sur les listes ci-haut citées. Cinq de ces espèces sont communes aux deux forêts (Tableau VII.2). La quasi-totalité de ces espèces menacées ont été qualifiées de très vulnérables par Sibomana et al. (2008) et avaient déjà été placées en position prioritaire pour la conservation par Nzigidahera (2000).

De plus, parmi les espèces inventoriées dans la forêt dense de Kigwena et dans la forêt claire de Rumonge, 22 et 17 espèces respectivement figurent sur la liste élaborée par Bigendako et al. (2009) pour les plantes ligneuses autochtones prioritaires pour la revalorisation et la multiplication au Burundi. Douze espèces sont communes aux deux forêts. Pour dresser cette liste, ces auteurs ont considéré les critères suivants : l’importance que présente l’espèce pour la population, la disponibilité de l’espèce dans la nature en dehors des aires protégées, les possibilités de sa domestication et la disponibilité de ses semences. Ces espèces sont également reprises dans le tableau VII.2.

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Tableau VII.2 Espèces présentes dans les forêts de Kigwena et/ou de Rumonge ; menacées et/ou prioritaires pour la revalorisation au Burundi. + : présence de l’espèce ; - : absence de l’espèce ; * : espèce menacée ; ** : espèce prioritaire pour la revalorisation ; *** : espèce menacée et prioritaire pour la revalorisation

Espèce Kigwena Rumonge Statut

Acacia sieberana + - **

Albizia grandibracteata + - *

Albizia gummifera + + ***

Albizia zygia + - *

Annona senegalensis - + **

Bersama abyssinica + - **

Bridelia brideliifolia + + **

Carissa edulis + - **

Cassia didymobotrya + - **

Combretum molle - + **

Cordia africana + + ***

Cyperus latifolius + - *

Ensete ventricosum + - *

Entada abyssinica + - **

Entadrophragma excelsum + - ***

Eremospatha sp. + - *

Erythrina abyssinica + + **

Euphorbia candelabrum - + *

Euphorbia dawei + - *

Faurea saligna - + **

Ficus thonningii + + **

Harungana madagascariensis + + **

Isoberlinia angolensis - + *

Lannea schimperi + + **

Maesopsis eminii + - *

Myrianthus arboreus + + *

Myrianthus holstii + - **

Neoboutonia macrocalyx + - **

Ozoroa reticulata + + **

Parinari excelsa + + **

Phragmites mauritianus + - *

Pycnanthus angolensis + + *

Rhus vulgaris - + **

Ricinus communis + - **

Securidaca longipedunculata - + **

Sesbania sesban + - **

Spathodea campanulata + - *

Sterculia quinqueloba + + *

Sterculia tragacantha + - *

Strychnos potatorum - + *

Symphonia globulifera + + **

Trema orientalis + + **

Vernonia amygdalina + + **

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Le tableau VII.3 présente la liste des 13 espèces considérées comme endémiques de l’Afrique centrale au sens de Lewalle (1972) et qui ont été recensées dans les forêts de Kigwena et/ou de Rumonge. Une différence éclatante entre les deux forêts se fait remarquer en termes du nombre de cette catégorie d’espèces : 13 espèces endémiques de l’Afrique centrale présentes dans la forêt dense de Kigwena contre deux seulement dans la forêt claire de Rumonge. Même les deux espèces endémiques de l’Afrique centrale recensées dans la forêt claire de Rumonge sont également présentes dans la forêt dense de Kigwena. Nous pensons que ce contraste frappant s’expliquerait par deux principales hypothèses. La première serait liée à l’histoire de la végétation du Burundi occidental (voir Chapitre I, Section I.7.4) qui démontre que la forêt dense de Kigwena s’est formée après la forêt claire de Rumonge, suite à l’effondrement du relief et à la formation du Rift valley occidental. Selon l’idée que l’endémisme implique des limitations spatiales (voir Section I.7.3.3), on peut penser que, parmi les espèces endémiques de l’Afrique centrale recensées dans la forêt dense de Kigwena, il y aurait des néo-endémiques qui se seraient différenciées ultérieurement, suite aux migrations ou aux influences phytogéographiques guinéo- congolaises. Celles-ci atteignent cette forêt à travers le Lac Tanganyika et la rivière Rusizi, effluant du Lac Kivu, et ce, à partir des zones du Bassin du Congo et des montagnes de l’Est de la République Démocratique du Congo considérées par Morley (2000) et par Plana (2004) comme principales zones refuges de la biodiversité en Afrique centrale. La seconde hypothèse découlerait du fait que la forêt dense de Kigwena a été érigée au rang d’aire protégée depuis 1952. En dépit des effets de la pression anthropique liée à une forte densité de population, la forêt dense de Kigwena renferme encore une richesse en taxons plus élevée que celle observée dans la forêt claire de Rumonge (voir Chapitre III). Cette dernière par contre, devenue une aire protégée en 1972, soit 20 ans après par rapport à la forêt dense de Kigwena, présente une physionomie monophytique liée à la dominance quasi monogénérique (dominance des espèces du genre Brachystegia ; voir Chapitres III, IV et V). Dans la forêt dense de Kigwena, certaines espèces, qu’on qualifierait de paléo-endémiques, auraient donc survécu par conservation face à la pression anthropique (Malaisse, 1996) alors que celle-ci continuait de frapper de plein fouet non seulement la forêt claire de Rumonge géographiquement voisine, mais également d’autres localités non protégées.

Il est clair que nos observations ne nous permettent pas de valider les deux hypothèses précédentes étant donné que nous ne disposons pas d’informations suffisantes sur une situation initiale auxquelles pourraient être confrontés nos résultats. Dans tous les cas, la présence de ces espèces dans les deux forêts constitue également un argument de taille pour l’optimisation de la conservation des deux écosystèmes. En effet, même s’il est vrai qu’en procédant à la conservation des écosystèmes, les habitats et les espèces sont du même coup également protégés, il est tout aussi vrai que certaines espèces particulières doivent retenir une attention particulière dans la conservation de la biodiversité (Thomas et al., 2004 ; Rodrígues et al., 2006 ; Lévêque &

Mounolou, 2008). Les premières priorités doivent être réservées aux espèces endémiques à aire de distribution géographique restreinte et aux espèces à populations peu nombreuses. En effet, Pressey et al. (1993), Margules

& Pressey (2000) et Schouten et al. (2009) affirment que la rareté ou le taux d’endémisme est l’un des critères qui orientent les programmes de conservation de la biodiversité.

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Tableau VII.3 Liste des espèces considérées comme endémiques de l’Afrique centrale présentes dans les forêts de Kigwena et/ou de Rumonge. + : présence de l’espèce ; - : absence de l’espèce

Espèce Famille Kigwena Rumonge

Angraecum reygaertii De Wild. Orchidaceae + -

Bidens steppia Scherff Asteraceae + -

Chrysochloa hubbardiana Germain & Risopoulos Poaceae + - Crotalaria agatiflora ssp. imperialis R. Wilczek Fabaceae + -

Dissotis alata A. & R. Fern. Melastomataceae + -

Ficus oreodryadum Mildbr. & Burret Moraceae + -

Isoglossa runssorica Lind. Acanthaceae + -

Macaranga neomildbraediana Lebrun Euphorbiaceae + -

Maerua descampsii De Wild. Capparaceae + -

Psychotria bugoyensis Krause Rubiaceae + +

Psychotria chalconeura (K.Schum.) Petit var.montanaPetit Rubiaceae + - Rhynchosia goetzei Harms var. pseudocaribea Verdc. Fabaceae + -

Rytigynia kiwuensis Robyns Rubiaceae + +

TOTAL : 13 espèces 11 13 2

En outre, vues les caractéristiques et la localisation de la forêt dense de Kigwena au bord du lac Tanganyika, cet écosystème forestier constitue un site Ramsar potentiel. La Convention Ramsar (du nom de la ville de l’Iran où un traité a été signé) s’est fixé comme objectifs de stopper la tendance à la disparition des zones humides, de favoriser leur conservation et de promouvoir et favoriser leur utilisation rationnelle (Barnaud, 1998 ; Dajoz, 2006 ; Barnaud & Fustec, 2007 ; Lévêque & Mounolou, 2008). En effet, ces zones sont des écosystèmes d’importance internationale du point de vue écologique, surtout par rapport à la richesse de leur flore, de leur faune et des processus qui s’y séroulent (Frazier, 1999 ; Dajoz, 2006). La forêt claire de Rumonge, quant à elle, figure parmi les écosystèmes à haut degré de vulnérabilité, méritant ainsi une haute priorité de conservation (Nzigidahera, 2000). Dans un environnement fortement dégradé et soumis à une forte densité de population, les deux forêts méritent donc une attention particulière pour leur conservation car elles constituent à la fois un refuge et un réservoir de la biodiversité tant animale que végétale.

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VII.3.3 Arguments liés aux facteurs de perturbation et de dégradation des forêts de Kigwena et de Rumonge

Dans la présente étude, tous les facteurs de perturbation des forêts de Kigwena et de Rumonge n’ont pas été analysés et/ou quantifiés. L’analyse quantitative de ces facteurs pour faire ressortir leur fréquence et leur impact viendrait donc à point nommé. En effet, nous pensons que ces facteurs doivent être tenus en compte dans les programmes de conservation optimale des deux forêts. Certains de ces facteurs de perturbation et de dégradation des forêts de Kigwena et de Rumonge sont présentés et discutés dans les paragraphes qui suivent.

VII.3.3.1 Prélèvements incontrôlés des ressources naturelles

Les prélèvements concernent les plantes aux usages médicinal, matériel, alimentaire, énergétique et culturel (Cavendish & Campbel, 2007 ; Hegde & Bull, 2007 ; Monela & Abdallah, 2007 ; Mutamba, 2007). Selon les résultats de la présente étude, les prélèvements de ressources végétales naturelles sont plus intenses dans la forêt claire de Rumonge que dans la forêt dense péri-guinéenne de Kigwena. Cela est confirmé par la valeur du rapport de prélèvement qui est plus élevée pour la forêt claire de Rumonge. Ce rapport équivaut à 45,1% (65 espèces prélevées sur les 144 espèces recensées) pour la forêt claire de Rumonge, et à 31,0% (96 espèces prélevées sur les 310 espèces recensées) pour la forêt dense de Kigwena (Chapitre VI).

Cette situation serait due notamment au fait que la forêt dense de Kigwena est de type péri-guinéen et difficilement pénétrable alors que la forêt claire de Rumonge est de type Miombo facilement accessible, traversée par plusieurs sentiers qui mènent vers les nombreux villages riverains (Figure II.1). En outre, la forêt claire de Rumonge renferme plusieurs espèces d’arbres du genre Brachystegia non seulement qui n’atteignent pas de gros diamètres, donc faciles à transporter, mais également dont le bois présente des qualités de mieux résister aux insectes (mieux indiqué dans la construction et dans l’artisanat) et de se consumer lentement et pendant longtemps (meilleure source d’énergie). Les tiges des arbres coupés dans les forêts de Kigwena et de Rumonge servent également dans la pêche sur le lac Tanganyika (pirogues, pagaies, catamarans, etc. ; Photo VI.2a).

VII.3.3.2 Activités d’agriculture intensive

L’agriculture intensive constitue également un facteur important de perturbation et de dégradation des forêts (Conklin, 1963 ; Watters, 1971 ; Gutelman, 1989 ; Landsberg, 1999 ; Vande Weghe, 2004). Suite à la densité élevée de population et au retour massif des réfugiés de guerre dans la région d’étude, certains ménages s’installent anarchiquement dans les environs des forêts de Kigwena et de Rumonge. Il n’est donc pas rare de les voir grignotter les limites des deux forêts au profit des champs de cultures vivrières. Les espaces forestiers entamés dans ces conditions ne peuvent pas se reconstituer en forêt (Boserup, 1970 ; Cazenave-Piarrot, 2004). Le cas le plus illustratif est celui d’un champ de manioc qui a été découvert sur une colline en pleine forêt claire (Photo VII.3).

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Photo VII.3 Champ de manioc (avant-plan) au sommet d’une colline à l’intérieur de la forêt claire (arrière-plan).

Photo : P. Hakizimana, 2007

VII.3.3.3 Exploitation incontrôlée des carrières

L’exploitation des carrières est exercée par des entreprises de construction de routes et/ou de maisons. Le sol caillouteux, parfois rocailleux de la forêt claire de Rumonge est le plus convoité. Son extraction s’accompagne de la réduction des limites de la forêt et de la destruction de sa biodiversité. Les pentes des collines qui restent dénudées sont par la suite très exposées à une érosion intense qui pollue également le réseau hydrographique local (Photo VII.4a et b).

Photo VII.4 Sites d’extraction de carrières dans la forêt claire de Rumonge. En (a), la colline entamée présente déjà des signes d’érosion sur une pente recouverte de gravier et de graminées ; en (b), quelques pieds d’arbres sont menacés de s’écrouler suite à la progression de l’extraction des carrières. Photos : P. Hakizimana, 2007

a b

(20)

VII.3.3.4 Dégagement et entretien des infrastructures

Les routes qui longent ou qui traversent les forêts de Kigwena (Route Nationale n°3) et de Rumonge (Route Nationale n°4) constituent également des sources de perturbation des deux forêts. Le dégagement des abords de ces routes jusqu’à des dizaines de mètres de largeurs, surtout en périodes de guerre ou d’insécurité, entraîne progressivement l’apparition de recrus préforestiers qui viennent remplacer la végétation forestière initiale.

L’opération de dégagement est également régulièrement pratiquée sur une largeur de plus ou moins 20 m de part et d’autre de la ligne Haute Tension qui traverse la forêt claire de Rumonge pour empêcher la croissance des arbres qui pourraient endommager cette infrastructure.

VII.3.3.5 Les feux de forêt

Les feux de forêt menacent la forêt claire de Rumonge dans toute son étendue car le sous-bois herbacé et la litière abondante et sèche sont une proie facile pour le feu. La forêt de Kigwena, quant à elle, n’est menacée que dans sa partie Nord, la plus sèche et où la végétation herbacée est également abondante. Dans les deux forêts, les effets des feux de forêt se traduisent par la présence d’espèces pyrophiles telles que Combretum molle, C.

paniculatum, Euphorbia candelabrum, E. tirucalli, etc. Forman & Godron (1986), Williams & Gill (1995), Agee (1999), Bradstock et al. (2002) et Lindenmayer & Fischer (2006) considèrent les feux de forêt comme étant le plus important facteur de perturbation naturelle des forêts compte tenu de leur fréquence et de l’étendue qu’ils peuvent affecter en un peu de temps.

VII.3.3.6 Les chablis

Dans la zone de la présente étude, les chablis sont très fréquents et importants dans la forêt de Kigwena (Photo VII.6a, b et c). Ils y sont observables sous les quatre formes définies par Puig (2001) à savoir le volis ou le chablis partiel (chute de branches), le chablis élémentaire (chute d’un seul arbre), le chablis multiple (chute simultanée de plusieurs arbres) et le chablis complexe (chute décallée dans le temps de plusieurs arbres). Dans cette forêt, les principales causes des chablis sont le vent et l’humidité permanente du sol.

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Photo VII.5 Illustration des trois pôles d’un chablis dans la forêt de Kigwena. a : le pôle proximal (au niveau de cette zone, on observe la butte de déracinement composée de racines et de terre retournées) ; b : le pôle distal (la zone affectée par les tiges tombées) ; c : l’épicentre (dans cette zone, on observe une grande trouée occasionnée par la chute du branchage et du feuillage des arbres ; c’est à ce niveau que les dégats sur la végétation de la forêt sont plus importants). Photos : P. Hakizimana, 2007

a

b

c

(22)

VII.3.3.7 Autres arguments liés aux implications de la présente étude

Cette étude a révelé que les forêts de Kigwena et de Rumonge ont une valeur écologique et floristique importante. La conservation optimale des deux forêts permettrait d’augmenter et de pérenniser les ressources naturelles et les services écosystémiques qu’elles offrent aux populations, notamment pour les raisons suivantes :

• étant le refuge de la faune et de la flore naturelle dans une région fortement anthropisée, les deux forêts représentent une source potentielle d’espèces pour la recolonisation des espaces déjà dégradés ;

• la présence d’espèces et de groupements caractéristiques augmente la diversité végétale nationale et régionale ;

• leur flore renferme notamment beaucoup d’espèces médicinales très utilisées non seulement en médecine traditionnelle par les populations riveraines, mais également qui pourraient présenter un intérêt pharmaceutique ;

• les adaptations particulièrement remarquables des espèces à une faible profondeur du sol, aux températures élevées, au stress hydrique et aux inondations périodiques pourraient servir de référence lors des projets de reverdurisation ou d’amélioration de la résistance des plantes cultivées vis-à-vis des intempéries ;

VII.4 Proposition de mesures et actions de conservation optimale des forêts de Kigwena et de Rumonge Considérant la situation géographique des forêts de Kigwena et de Rumonge, leur superficie, leurs caractéristiques floristiques ainsi que leur environnement ; tenant compte également des menaces qui se font sentir sur les deux forêts, des mesures et actions appropriées devraient être entreprises rapidement en vue du renforcement et de l’optimalisation de leur conservation. Ces dernières seraient donc placées dans la catégorie II des aires protégées telles que définies par UICN (1994). Les mesures et actions à entreprendre seraient entre autres les suivantes :

• la matérialisation officielle des limites de la forêt dense de Kigwena surtout dans ses parties Nord et Sud ; les limites Est et Ouest étant déjà définies respectivement par la Route Nationale n°3 et le lac Tanganyika;

• le renforcement des limites officielles sur tout le périmètre de la forêt claire de Rumonge ;

• le contrôle strict des méthodes de prélèvement des ressources végétales naturelles en provenance des deux forêts ;

• l’édification des pares-feu au moyen de ceintures vertes formées d’espèces de plantes grasses qui résistent mieux aux feux de forêt (Combretaceae, Euphorbiaceae, etc.) ;

• et la formation d’une équipe de gardes forestiers et de parataxonomistes locaux couplée à la mise en place d’un système de surveillance par les populations locales elles-mêmes.

(23)

VII.5 Conclusion générale et perspectives

Le but global de la présente étude était d’élucider les principaux aspects de l’écologie de la forêt dense de Kigwena et de la forêt claire de Rumonge (composition floristique, structure spatiale et prélèvements de ressources végétales naturelles) en vue de leur conservation optimale. Pour ce faire, les principales méthodes utilisées pour la collecte des informations et des données de terrain ont été les suivantes : la méthode des relevés phytosociologiques, la méthode de mesures du dhp pour tous les arbres à dhp ≥ 10 cm complétée par le comptage des individus d’arbres de dhp < 10 cm dans les transects ainsi que la méthode d’entretiens semi- structurés avec un échantillon non stratifié formé d’habitants des villages riverains des deux forêts. L’analyse et l’interprétation des données recueillies ont été consolidées par des tests statistiques et des indices floristiques, phytosociologiques et structuraux.

L’utilisation de deux méthodes différentes dans les forêts de Kigwena et de Rumonge ne nous a pas facilité le travail d’effectuer les mêmes analyses des données ou de les comparer entre elles. Par exemple, nous n’avons pas pu mettre en évidence les relations entre les facteurs écologiques et les groupements végétaux identifiés dans la forêt claire de Rumonge suite au manque de données d’abondance-dominance des espèces (Chapitre IV), tout comme nous n’avons pas pu déterminer le modèle de distribution spatiale horizontale des individus d’arbres dans la forêt dense de Kigwena à partir des données d’un seul transect. La manière de notation des réponses lors des entretiens avec les habitants des villages riverains des deux forêts n’a pas non plus permis de mettre en évidence la fréquence de citation des espèces et des organes prélevés. Pour des études similaires se déroulant sur plusieurs sites, nous pensons que le suivi d’un même protocole de recherche basé sur la même méthodologie de collecte et d’analyse des données faciliterait l’interprétation et la comparaison des résultats non seulement entre eux, mais également entre les différents sites étudiés. Par ailleurs, la prise en compte, dans la mesure du possible, de superficies d’inventaire équivalentes et beaucoup plus grandes augmenterait la qualité des résultats obtenus.

Les résultats et les conclusions de cette étude ont cependant permis de répondre aux quatre questions scientifiques que nous avions posées (Chapitre I, Section I.8) sur la flore et la végétation, la structure spatiale horizontale et les ressources végétales naturelles prélevées dans la forêt dense de Kigwena et dans la forêt claire de Rumonge au Burundi. Ces résultats montrent que les flores des deux forêts sont dans une même série d’évolution mais pas dans une même série phytodynamique. La composition floristique des deux forêts montre une prépondérance des phanérophytes (espèces ligneuses), des chaméphytes adaptés au stress hydrique et des thérophytes adaptés aux perturbations anthropiques (pâturages, piétinements, feux de forêt, etc.). Les deux flores résultent des mêmes influences phytogéographiques et chorologiques. Une grande partie des epèces dérivent de la flore soudano-zambézienne et de la flore guinéenne. Cependant, chacune des deux forêts garde son identité spécifique malgré les interpénétrations floristiques liées à leur proximité géographique. La forêt dense de Kigwena se rattache plus aux forêts de la région guinéenne tandis que la forêt claire de Rumonge se rattache plus aux Miombos de la région zambézienne. Leurs dissimilitudes floristiques ont été confirmées par la

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