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TROISIEME PARTIE DISCUSSION GENERALE, CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES

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TROISIEME PARTIE

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CHAPITRE VIII

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CHAPITRE VIII. Discussion générale

La variation de la végétation relève d’un ensemble de processus qui se déroulent sur des périodes plus ou moins longues au cours desquelles des perturbations se produisent et qui sont susceptibles de l’influencer. En plus des effets climatiques (sécheresses), des perturbations d’origines anthropiques (pratiques culturales, feux, coupes sélectives du bois, pâturage) peuvent survenir. Il faut les prendre en compte.

Dans cette étude, nous avons voulu caractériser l’influence des perturbations anthropiques, mais également l’influence de la géomorphologie sur la variation de la biodiversité végétale dans la réserve de Fina.

VIII.1. Variation de la diversité floristique en relation avec les perturbations

La diversité floristique est assez importante dans la réserve de Fina (Chapitre III). Elle représente en familles 37,41 %, en genres 24,85 % et en espèces 16,40 % de la flore totale du pays, estimée à environ 155 familles, 692 genres et 1749 espèces (Nasi & Sabatier, 1988). Les familles les plus représentées de façon globale et dans chacune des zones sont : les Poaceae, les Fabaceae (Fabaceae-Faboideae, Fabaceae-Caesalpinodeae et Fabaceae-Mimoisoideae), les Rubiaceae et les Combretaceae.

Par rapport aux groupes systématiques supérieurs, on trouve dans la réserve de Fina une prédominance des dicotylédones, suivies par les monocotylédones. Ces résultats sont rapportés par Nasi (1994) dans le mont mandingue, par Heringa et al. (1988) dans le parc national de la boucle du Baoulé. De par sa composition syntaxonomique, la flore de la réserve se rattache à la flore de la zone soudanienne, centre régional d’endémisme soudanien qu’ont caractérisé White (1983) et Nasi (1994).

L’analyse de la diversité (chapitre III) révèle par zone une diversité plus élevée en milieux perturbés (transition) comparativement aux milieux faiblement perturbés (référence) et aux milieux intermédiaires (tampon). Nombreuses sont les études qui ont fait le lien entre la diversité biologique et les perturbations. Dans le cadre de nos travaux, nous n’avons pas cherché à étayer une théorie par rapport à une autre, celles-ci servent plutôt de cadre pour l’interprétation des résultats obtenus et leurs applications en biologie de la conservation. En effet, l’approche théorique de la perturbation est marquée par l’affrontement de plusieurs courants (chapitre I). L'hypothèse de la perturbation modérée ("intermediate disturbance

hypothesis") proposée par Huston (1994), stipule que peu d’espèces présentent des

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Cette théorie, basée sur le modèle de l’équilibre dynamique, semble également s’appliquer dans la situation actuelle de la zone de transition, siège des cultures extensives et d’exploitation intense des ressources végétales. Les pratiques qui sévissent dans cette zone combinent des facteurs, associant des régimes de perturbation élevés dont l’objectif est d’éradiquer non seulement les organismes susceptibles de diminuer le rendement de l’espèce cultivée, mais aussi de sélectionner les espèces jugées utiles par les populations, créant ainsi une occasion de colonisation pour de nouveaux organismes (Blondel, 1995). Ce qui fait que la richesse floristique dans les milieux perturbés est surtout dominée par des espèces anthropophiles (espèces rudérales surtout) comme c’est le cas en zone de transition. Les différents types de perturbations (fréquence, nature, taille, date, etc…), leur localisation et les conditions durant la régénération, favorisent les espèces ayant des caractéristiques biologiques différentes pour l’installation d’une nouvelle génération : théorie de la niche écologique qui stipule aussi que les perturbations maintiennent la biodiversité (Grubb, 1985).

La réponse de la végétation au changement induit par les activités anthropiques perturbatrices du milieu est très variable. Lorsque la perturbation est de grande ampleur dans un milieu (exploitation intense), ce sont surtout des espèces pionnières qui s’établissent. Si celle-ci est minime, la végétation est dominée par des espèces sciaphiles (LeRoux et al., 2008). Quand la perturbation atteint un niveau intermédiaire entre ces deux extrêmes, la diversité est maximale du fait de la création d’une plus grande hétérogénéité au sein de l’écosystème (variété de niches écologiques) (Sousa, 1984).

Les milieux perturbés sont généralement des milieux ouverts et lorsque les taux de croissance des espèces végétales sont élevés, celles-ci récupèrent après perturbation et se maintiennent dans la communauté avec une diversité maximale qui s’opère quand il y a un équilibre entre exclusion compétitive et perturbation (Ricklefs, 2004 ; Bouzillé, 2007). Ces auteurs soulignent qu’une communauté végétale sans ou à faible perturbation et avec des populations à croissance lente (zone de référence) peut contenir une diversité semblable ou faible comparativement à celle d’une communauté avec des populations à croissance rapide et un niveau élevé de perturbation.

La diversité en espèces serait la résultante des effets simultanés de facteurs qui ne s’excluent probablement pas toujours les uns des autres, régulée par les conditions de l’environnement et opérant à plusieurs échelles spatiales différentes (White & Jentsch, 2001). La diversité augmente d’abord, puis diminue ensuite après une saturation progressive du milieu et a donc une disponibilité de plus en plus faible de ressources (Tilman, 1982).

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contre dans la zone de transition, nous notons une faible équitabilité dans la répartition des espèces qui serait due à l’importance des espèces accidentelles (plus de 80 %) dans cette zone (Figure VIII.1). C’est dans la zone de transition également que les fréquences d’occurrence des espèces accessoires et des espèces communes ou constantes sont faibles. Tout cela indique la perturbation et la dégradation progressive de cette zone.

0 20 40 60 80 100

Transition Tampon Référence Zones E s p è c e s ( % ) Espèces accidentelles Espèces accessoires Espèces communes

Figure VIII.1. Importance des types d’espèces en fonction de leurs fréquences d’occurrence

par zone. La fréquence d’occurrence est le rapport en pourcentage du nombre de relevés ou l’espèce est notée au nombre total de relevés réalisés (Dajoz, 2006). Cet auteur distingue en termes de constance trois groupes : les espèces du premier groupe sont qualifiées de constantes ou espèces communes, lorsqu’elles se retrouvent dans 50 % ou plus des relevés effectués dans une même communauté (zone pour notre cas) ; celles du second groupe sont appelées accessoires lorsque la fréquence d’occurrence des espèces dans chacune des zones est comprise entre 25-49 % des relevés effectués; enfin, le troisième groupe, les espèces accidentelles possèdent une fréquence d’occurrence inférieure à 25 % des relevés effectués. Dans la réserve, les valeurs d’importance des espèces montrent qu’au total 17 espèces sont écologiquement dominantes (tableaux VIII.1). Parmi ces espèces, trois : Anogeissus

leiocarpus, Combretum glutinosum, Acacia macrostachya sont communes aux trois zones. La

zone de référence présente 11 espèces dominantes contre 8 espèces pour la zone de tampon et 7 espèces pour la zone de transition. L’espèce Borassus aethiopum a la plus forte valeur d’importance (58,94 %) dans la zone de référence. Dans les zones de tampon et de transition, c’est le Combretum glutinosum qui a la plus forte valeur avec respectivement 18,83 % et 45,23 %.

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herbacées à cycle de vie court et des arbustes dominés par les combrétacées à forte capacité de régénération (Mitja & Puig, 1993; Yossi et al., 2003). Les perturbations récurrentes entraînent une banalisation des jachères et des savanes avec, à long terme, une perte de diversité végétale, notamment pour les ligneux, puis un blocage de la succession (Kahn, 1982; Mitja & Puig, 1993 ; Donfack, 1998). Toutefois, l’absence de perturbation ou la faible perturbation pendant une longue durée pourrait conduire ces écosystèmes banalisés à des stades plus mâtures, comme le supposent Connel & Slatyer (1977).

Tableau VIII.1: Les espèces prépondérantes dans les 3 zones selon leur indice de valeur

d’importance des espèces (IVI). L’indice de valeur d’importance des espèces a été mis au point par Curtis & Macintosh (1950). Il caractérise au sein d’une végétation, l’importance d’une espèce par rapport à l’ensemble des autres espèces.

Indice de valeurs d’importance des espèces ligneuses

Espèces Référence Tampon Transition

Borassus aethiopum 58,94 - - Isoberlinia doka 25,35 - - Combretum nigricans 13,80 - - Albizia chevalieri 11,90 - - Acacia macrostachya 10,18 - - Vitellaria paradoxa 10,18 - - Anogeissus leiocarpus 12,16 17,02 10,07 Entada sudanica - 11,12 27,20 Terminalia avicenioides - - 18,94 Combretum glutinosum 18,83 34,64 45,23 Acacia macrostachya 28,38 18,65 12,04 Terminalia macroptera - - 11,20 Acacia seyal - - 10,07 Pterocarpus erinaceus 28,38 17,22 - Bombax costatum 28,38 14,32 - Entada sudanica - 11,12 - Lannea acida - 10,38 -

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VIII.2. Réponse de la végétation aux variations des facteurs environnementaux

Nous avons vu dans le cadre de ce travail (chapitre VI) que, dans la zone d’étude, en dehors de l’influence climatique (chapitre VII) qui module la physionomie générale de la végétation (Hommel, 1990), les facteurs écologiques stationnels (la texture du sol, l’altitude, le pH, l’humidité entre autres) ont une influence sur l’aspect physionomique et la composition floristique de la végétation (Witkowski & O’connor, 1996 ; Ojeda et al., 2000). Dans la réserve, la variabilité floristique inexpliquée par les facteurs étudiés (la texture du sol, l’altitude, le pH, et les pressions anthropiques) est importante (49 %). Ce résultat peut être attribué à une évaluation approximative de l’hétérogénéité environnementale. La forte variabilité dans l’espace et dans le temps de la végétation de savane serait imputable à divers types de facteurs environnementaux (Frost et al., 1986 ; Donfack et al., 1995), entre autres les variations pluviométriques, l’hétérogénéité du substrat édaphique liée à la géomorphologie, et des facteurs anthropiques (Floret & Pontanier, 2001).

Les corrélations entre la végétation et les facteurs écologiques (substrat édaphique), réalisées à partir des analyses numériques ont montré que, dans la réserve de Fina, le gradient de perturbation anthropique est un facteur important dans la variabilité floristique (chapitre VI). La diversité floristique et la répartition des groupements végétaux (chapitres III, IV, V) sont le résultat de la conjugaison de ces principaux facteurs. Les espèces s’associent suivant leurs exigences écologiques le long des différents facteurs écologiques (Whittaker, 1977).

VIII.2.1. Influence des variations pluviométriques

Dans la réserve, l’action du climat s’opère par des variations dans le régime de précipitations. A cet effet, l’analyse des valeurs de l’indice standardisé de précipitation (chapitre VII) a montré une évolution régressive de la pluviométrie et sa grande variabilité spatiale et temporelle. La sécheresse qui en résulte se traduit, de par sa récurrence, par l’augmentation de la mortalité de certaines espèces ligneuses et herbacées. La sécheresse par définition, est un assèchement progressif du climat marqué notamment par la diminution de la pluviosité et l’accentuation de la variabilité spatio-temporelle (Ozer et al., 2010). Les épisodes de sécheresse depuis les années 1950 en Afrique de l’ouest ont suffisamment été commentés (Albouy et al., 1975 ; Nasi, 1994 ; Bosma et al. 1996), leurs impact sur les populations ainsi que la végétation naturelle et son évolution largement médiatisés (Heumann et al., 2007 ; Camberlin, 2007 ; Ozer et al., 2010). Les espèces végétales subissent sous l’effet de la sécheresse, une mortalité sélective et également une perturbation de la phénologie des arbres et des arbustes (Ganaba & Guinko, 1996). Cette sécheresse est citée comme l’une des causes de la régression voire de la disparition des espèces à affinités soudaniennes au profit des taxons à affinités plus sahéliennes, voire même sahariennes (Boudet, 1979 ; Nasi, 1994 ; Habiyaremye & Roche, 2004). Ces résultats concordent avec les nôtres dans la réserve, où nous avons observé que la mortalité causée par la sécheresse touche surtout les plantes mésophiles, notamment Terminalia laxiflora, Vitellaria paradoxa, Pterocarpus erinaceus,

Prosopis africana. Une argumentation identique a été également faite par Diarra (1985) et par

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dépasse 13° de latitude nord, endroit où se situe notre zone d’étude. Ces taxons sont particulièrement menacés dans leur aire de répartition qui se rétrécit progressivement. D’autres, au contraire, sont en pleine expansion comme Combretum glutinosum, Guiera

senegalensis, Boscia angustifolia. Ces espèces présentent une grande plasticité écologique

dans la zone d’étude. Elles sont souvent décrites comme des espèces caractéristiques des milieux dégradés qu’elles parviennent à conquérir aisément (Trochain, 1940 ; Lykke, 1996). Une telle caractéristique de ces espèces est assimilable à ce qui peut être observé dans les zones dégradées de la réserve. Les différences de sensibilité de la végétation aux épisodes de forte sécheresse dépendent non seulement des facteurs stationnels mais aussi des espèces (Habiyaremye & Roche, 2004). Dans la réserve, ce sont surtout les formations végétales situées sur les versants des unités de plateaux qui présentent un taux de mortalité élevé et illustrent bien cette assertion. L’explication plausible serait que le biotope de ces unités, malgré l’apport latéral important en eau, devient très sensible en cas de sécheresse, eu égard à sa faible capacité de rétention d’eau. Cette fragilité du milieu à priori favorable vis-à-vis des conditions d’alimentation en eau, explique la forte mortalité enregistrée. Des observations similaires ont été également faites par Cissé (1986) ; Nasi & Sabatier (1988) ; Kaasschieter et

al. (1998) ; Ozer et al. (2010).

Une autre illustration de processus évolutifs régressifs aux effets pervers du climat est sans doute le comblement, de nos jours perceptibles sur le terrain, de nombreuses mares jadis permanentes et des plaines marécageuses dans la réserve (Diarra, 1985 ; Albignac et

al., 1998). Enfin, l’apparition de nombreuses plages nues et le recours aux cultures de

bas-fonds par les populations dans les aires de transition comme solution des populations pour pallier aux sécheresses répétées, reflète bien la tendance défavorable des conditions pluviométriques et la dégradation du couvert végétal dans la zone.

VIII.2.2. Influence du gradient géomorphologique sur la végétation

Dans la réserve de Fina, les types de sols (chapitre VI) identifiés en fonction des unités géomorphologiques (plateau, glacis, plaine et vallée) sont dominés par la fraction limoneuse associée avec l’argile. Ces deux fractions de texture fine se distribuent surtout dans les unités de plaines et de vallées (sols profonds) au niveau des trois zones. Le pH obtenu dans la réserve est faiblement acide pour l’ensemble des trois zones et ne constitue pas un facteur limitant de croissance pour de nombreuses plantes.

Selon les résultats de nos inventaires floristiques, les unités de vallées (109 espèces) et les unités de plaines (108 espèces) apparaissent relativement plus riches en espèces que les unités de plateaux (93 espèces) et de glacis (91 espèces). Ces différentes unités géomorphologiques (liste en annexe VII), quoique de compositions floristiques parfois distinctes, ont en commun de nombreuses espèces.

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végétation permettant de définir de véritables séries de végétation, nous avons néanmoins tenté d’insérer les différents groupements végétaux ligneux identifiés dans les unités syntaxonomiques précédemment décrites par de nombreux auteurs parmi lesquels Togola (1982), Aberlin (1984), Nasi (1994), Mahamane (2005). Ces groupements ou associations végétales s’expliquent par les préférences écologiques des espèces qui les composent, en fonction des différents facteurs écologiques cités. Ils présentent depuis les milieux non perturbés (référence) vers les champs en milieux anthropisés des zones de transition et de tampon, une mosaïque de formations végétales dominées par les savanes qui occupent diverses situations géomorphologiques.

D’amont en aval, en fonction de la position géomorphologique, on observe en milieux perturbés sur les plateaux, des unités de pédoclimats secs (plateau cuirassé et glacis) de type savane arbustive à Combrétacées. Les systèmes agroforestiers (champs) à Terminalia sp.,

Vitellaria paradoxa, Dombeya multiflora, Cordyla pinnata sont visibles sur les plaines qui se

prolongent jusqu’aux unités de pédoclimats humides (vallées et dépressions). Le long des berges de l’effluent Kénié et de l’affluent Baoulé, on note la présence de galeries forestières peu dégradées avec des espèces comme Diospyros mespiliformis, Daniellia oliveri et

Oxytenanthera abyssinica, une graminée ligneuse. En milieux non perturbés, on observe

également des unités de pédoclimats secs et humides. Au niveau des plateaux à cuirasse, la savane arborée à arbustive est constituée par Dombeya multiflora, Stereospermum

Kunthianum, Terminalia laxiflora. Sur les unités de glacis, la végétation est une savane

arbustive avec de groupes d’espèces constitués le plus souvent de Combretum ghasalense,

Grewia Sp. Dans les plaines, la végétation est une savane arborée à Lonchocarpus laxiflorus, Securidaca longipedonculata. Dans les unités de vallées, la végétation est de type savane

boisée et de galerie forestière constituée par des espèces rupicoles (Mitragyna inermis,

Oxytenanthera abyssinica, Borassus aethiopum etc…) sur des endroits temporairement

inondés (mares) et également sur le long des cours d’eau.

Globalement, une tendance décroissante de la structure arborescente sur les unités de vallées et de plaines vers une structure arbustive est notée sur les plateaux et les glacis. Elle est beaucoup moins marquée dans les milieux les moins perturbés et évolue de façon régressive vers les milieux perturbés. La bonne couverture en boisement dans les vallées et bas-fonds serait liée non seulement à la nature de leurs sols, plus profonds avec une texture limono-argileuse, mais surtout à leur bonne réserve hydrique. Ces sols sont les plus cultivés en zone de transition et sont colonisés par des espèces anthropophiles. En Afrique tropicale, Witkowski & O’Connor (1996), Wittig et al. (2002) ont souligné que les propriétés édaphiques variant suivant les conditions géomorphologiques déterminent le bilan du sol en éléments nutritifs et la disponibilité de l’eau pour les plantes. En revanche, les cuirasses latéritiques à sols superficiels (glacis) et les affleurements rocheux (plateaux) sont couverts par une végétation arbustive et des plages nues. Au Mali, des études ont montré que les sols à cuirasse latéritique présentent des conditions stationnelles défavorables à la végétation ligneuse (Nasi, 1994). Le biotope des plateaux est également semblable à celui des glacis avec des conditions microclimatiques quelquefois sévères et pauvres en matière organique (Boudet

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parcours du bétail et au prélèvement de bois de chauffe, ce qui contribue à accentuer leur dégradation. Les végétaux qualifiés de saxicoles se développent dans les fissures souvent assez grandes de ces dalles rocheuses (Guinko, 1984 ; Wittig et al., 2002). De par leur position géomorphologique plus haute dans la réserve, elles constituent le point de départ du ruissellement important dont l’action érosive se manifeste sur les unités en aval, notamment les zones cultivées et les berges des cours d’eau. Les processus d’érosion et d’accumulation affectent la variabilité spatiale des états de surface du sol par enlèvement de particules à la surface des sols et modifient le processus d’infiltration et de ruissellement (Pickup, 1991). En Afrique de l’ouest, Schnell (1971) et Aubreville (1950) attribuent au facteur édaphique un rôle déterminant dans la dynamique de la végétation. Bien que dans le cadre de notre étude, nous n’avons pas réalisé des analyses approfondies de sols apportant des preuves indiscutables pour déterminer la composition exacte des types de sols dans les différentes unités, nous pouvons considérer, qu’en plus de l’anthropisation, ce facteur édaphique joue un rôle important dans la nature actuelle et dans l’évolution ultérieure de la végétation de la réserve de Fina.

VIII.2.3. Influence du gradient anthropique sur la végétation

La coexistence dans les formations de savanes des végétaux ligneux et herbacés en compétition est fortement influencée par les facteurs anthropiques (Floret & Pontanier, 2001). Parmi ces facteurs anthropiques, les défrichements pour la mise en cultures, les feux et le pâturage sont considérés comme les trois événements récurrents faisant partie du fonctionnement normal des écosystèmes (Glenn-Lewin et al., 1992). Leurs effets sur la dynamique de la végétation sont discutés en fonction de leur étendue, de leur fréquence et de leur intensité (Glenn-Lewin & al., 1992). La liaison observée entre une espèce et un milieu, qu’il soit perturbé ou non, dépend de la tolérance de cette espèce ou de sa sensibilité aux différents degrés de pressions anthropiques.

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conditions culturales (Le Bourgeois & Merlier, 1995) et constituent de façon générale, les adventices ou mauvaises herbes des champs qui développent leurs populations lors des cycles culturaux (César & Coulibaly, 1993 ; Chikoye et al., 1997). Dans les conditions de jachères, les arbustes sont capables de se régénérer rapidement ; les adventices de cultures augmentent et persistent souvent quelques années avant que les graminées ne prennent le pas sur elles (Nasi, 1994 ; Delabre, 1998 ; Fournier et al., 2001). La zone de transition obéit à cette situation où on observe une succession d’herbacées annuelles, pour la plupart rudérales, du genre Monechma ciliatum, Spermacoece sp. et Dactylotenium aegyptium ainsi que des ligneux du genre Combretum glutinosum et Guiera senegalensis, inféodés aux cultures. En revanche, en zone de référence, les herbacées du genre Pennicetum pedicellatum et

Andropogon Sp et les ligneux Isoberlinia doka et Anogeissus leiocarpus dominent.

Aussi, la comparaison des proportions des hémicryptophytes et des mésophanérophytes entre les zones, indique leur prépondérance en zone de référence. Cette proportion diminue au fur et à mesure que s’intensifient les perturbations (transition et tampon), notamment les cultures, les feux et le pâturage. Les plantes ligneuses sont diversement sensibles aux perturbations dans la réserve. Certaines d’entre elles (Maerua spp, Boscia spp, et Grewia spp,) sont aisément endommagées lorsqu'elles sont exploitées (Toutain et al., 1983). D'autres sont plus résistantes, comme Combretum glutinosum et Acacia seyal qui s'empressent de développer des repousses après défoliation (Ouedraogo & Delvingt, 2002). La résistance de ces deux espèces aux dessouchages, aux coupes répétées et aux contraintes édapho-climatiques est certainement une des raisons de leur abondance dans la réserve de Fina (Yossi, 1996 ; Diallo, 1997).

Les savanes ouest-africaines sont soumises depuis longtemps et de nos jours encore au passage régulier des feux (M’bow et al., 2004). La réserve n’échappe pas non plus à ces feux de plus en plus fréquents. Ces feux sont utilisés par les populations comme moyen de défrichement agricole (Dembélé, 1996 ; Yossi, 1996 ; Diouf, 2012) ou de régénération des pâturages (chapitres III et IV). Les conséquences qu'ils génèrent sont notamment la transformation des paysages, la disparition de certaines plantes utiles, la destruction des habitats fauniques (Albignac et al., 1998 ; Diouf, 2012). Cependant, les feux bien que nocifs, éliminent les reliquats de paille (Ranaivoarivelo & Milleville, 2001), et permettent de sortir les graines de certaines plantes de leur dormance ou stimuler les souches de Andropogon

gayanus pour des repousses fraîches pour le bétail (Tybirk, 1991 ; Dembélé, 1996 ; Kagoné,

2000) et la reproduction des espèces telles que Terminalia avicennioides, Crossopteryx

febrifuga (Tybirk, 1991 ; Ouedraogo & Delvingt, 2002). Aussi, la destruction de la litière

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ne laissent après leur passage que des sols nus brûlés, facilitant l’action de l’érosion surtout hydrique.

Chaque année, les feux de brousse, pour la plupart tardifs, déciment la presque totalité de la production fourragère herbacée au niveau des 3 zones (photos VIII.1 et VIII.2). Le phénomène est presque devenu un fléau dans la réserve, à tel point qu’il est difficile de parcourir 5 km sans voir les traces de feux. De ce fait, il n’y a pas un espace villageois en zone de transition qui ne soit soustrait à cette pratique de feu brousse. Les zones de référence et de tampon connaissent aussi les pratiques de feu, surtout sur les unités de plaines et de glacis, mais de moindre envergure dans la zone de transition.

Photo VIII.1 (23/09/2007). Parcelle en feu. Photo VIII.2 (23/09/2007). Parcelle après un

(zone de transition). feu récent (zone de transition). Outre les feux, les pressions liées au pâturage provoquent des perturbations majeures dans la réserve. Les pratiques agricoles et pastorales (chapitre V) influencent la dynamique de la végétation des savanes (Devineau, 1999) et sont créatrices d’hétérogénéité des faciès et de l’état des herbacées de savane (Ranaivoarivelo & Milleville, 2001). En fonction des traits biologiques des espèces et de leurs réponses aux perturbations liées à ces pratiques, 6 groupes agrostologiques ont été discriminés (chapitre V). L’effet des perturbations sur la richesse spécifique dans le Fina se traduit par une modification des proportions des deux formes de vie (annuelles et pérennes) au sein des groupes dans lesquels les espèces se distingueraient selon leurs réponses aux pulsations des ressources. Les groupes les plus perturbés sont les plus riches en espèces surtout annuelles avec cependant un faible niveau d’organisation. La richesse spécifique à l’intérieur des groupes augmente avec la résilience des communautés végétales aux perturbations locales (Walker, 1992 cité par Jauffret, 2001).

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al., 2001). Ces variations apparaissent clairement lorsqu’on compare les traits de vie des

espèces herbacées en fonction de l’intensité du pâturage dans les différentes zones.

Nous avons également observé que, dans la réserve, la valeur pastorale n’était pas liée à la diversité biologique des pâturages et diminuait avec l’intensification de la pression pastorale à cause de la diminution de la contribution des bonnes espèces herbacées fourragères qui sont pour la plupart des graminées pérennes. La valeur pastorale, expression synthétique de qualité d’une végétation donnée, traduit l’intérêt zootechnique d’une espèce végétale ou d’un groupe d’espèces végétales donc d’un pâturage (Daget & Poissonet, 1972 ; Le Houérou, 1980). Elle varie également en fonction de la géomorphologie dans la réserve. Les unités généralement humides de par leur position géomorphologique (bas-fonds), ont la valeur pastorale la plus élevée eu égard à leur richesse en espèces de bonne qualité fourragère. Akpo et al. (2003) ont fait le même constat en soutenant que ces fluctuations sont plutôt liées aux variations de la composition des Poaceae, espèces à indice de qualité spécifique élevé.

En effet, dans la zone de transition, espace dévolu au pâturage, la pression de pâture intense se manifeste par l’importance des espèces annuelles dans les champs et dans les jachères. L’augmentation de la biodiversité qui en résulte par l’action altère la valeur pastorale à cause de la régression des graminées pérennes (Penning de Vries & Djitèye, 1982 ; Breman & Cissé, 1977 ; Botoni et al., 2006). Ces auteurs soulignent que l’accroissement de la pression foncière consécutive à la réduction des espaces pâturables et à l’augmentation concomitante du cheptel sédentaire, entraîne une dégradation du couvert végétal, en particulier du potentiel fourrager.

La zone tampon, bien que moins diversifiée, est également soumise aux pressions de pâturage qui se sont intensifiées ces dernières années suite à son ouverture à l’abreuvement du bétail sédentaire et transhumant. Actuellement, dès l’arrêt des pluies, de nombreux transhumants campent non loin des limites de cette zone. Il en résulte le long des berges du Baoulé et du Kénié, une dégradation du couvert végétal due non seulement au pâturage mais surtout au piétinement des animaux qui dénude le sol, le compacte et accroît sa sensibilité à l’érosion (photo VIII.3 et VIII.4).

Photo VIII.3 (16/09/2007). Bordure de Photo VIII.4 (16/09/2007). Bergers et troupeaux

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La présence de plus en plus importante des annuelles, en particulier les adventices de cultures, dans cette zone serait essentiellement due à la dissémination des graines par le bétail et les eaux de ruissellement. C’est un signe de déséquilibre défavorable aux graminées vivaces. Ces espèces vivaces sont les plus productives et les plus consommées par le bétail. Leur diminution entraîne progressivement la dégradation de la végétation à forte valeur pastorale (César, 1992 ; Fournier, 1991 cité par Botoni et al., 2006).

En revanche, en zone de référence, les pressions de pâturage, bien que faibles par rapport aux deux autres zones, connaissent également une certaine fréquence des espèces annuelles mais avec toutefois un nombre élevé de graminées pérennes. Dans la réserve, il semble probable que la résistance des plantes annuelles au pâturage intense ne résulte pas de leur aptitude à éviter le pâturage mais plutôt de leur capacité à produire de grandes quantités de semences à forte capacité germinative (Le Bourgeois & Merlier, 1995) et de réaliser plusieurs cycles végétatifs au cours d’une saison pluvieuse, donc d’une stratégie de tolérance au pâturage. Cette assertion corrobore les observations en savane soudanienne de Hoffmann (1985) et Fournier et al. (2001).

En absence de pâturage en période de saison sèche (mars-mai), dans les zones de transition et de tampon et parfois dans la zone de référence, les bergers transhumants se rabattent sur les fourrages ligneux pour nourrir leur bétail. Cette pratique autrefois limitée dans la zone de transition commence à gagner la zone de tampon. Les espèces ligneuses qui sont régulièrement utilisées sont les Accacia spp., Pterocarpus lucens, Pterocarpus erinaceus. Les coupes et mutilations répétitives de ces espèces (photos VIII.5a et VIII.5b) sont l’une des causes de leur régression dans la réserve. De nombreux pieds morts de ces espèces ont été observés. Les coupes répétées de ces espèces pour les utiliser comme fourrage accroît leur vulnérabilité à la sécheresse et les conduit à leur mort certaine (Karembé, 2001 ; Habiyaremye & Roche, 2004).

Photos VIII.5a et VIII.5b (16/09/2007). Mutilation des Acacia Sp.

En effet, des essais réalisés au sahel sur Pterocarpus lucens et Acacia seyal par Toutain et

al. (1983) ont montré qu’une coupe régulière des branches secondaires entraîne une réduction

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réserve ne cesse de s’intensifier et contribue beaucoup à la dégradation de la flore et de la végétation. La dégradation, concept complexe et ambigu (Barima, 2009), pourrait être définie comme la détérioration d’un écosystème par rapport à un état antérieur ou de référence qualifié de satisfaisant en termes qualitatifs (composition floristique) et quantitatifs (recouvrement, biomasse….) (Jauffret & Véla, 2000 in Visser, 2001 ; Barima, 2009). C’est un processus de modification au sein de la forêt qui affecte négativement ses caractéristiques (FAO, 2009 ; Bamba, 2010). Les variations climatiques et surtout l’anthropisation sont les principaux facteurs de dégradation des écosystèmes dans la réserve. Leurs actions s’opèrent pour le climat par des variations dans le régime de précipitations (sécheresse) et pour les actions anthropiques par l’extension des zones de cultures, le surpâturage, le déboisement et les feux, qui engendrent la dégradation de la végétation et la perte de la biodiversité (Sala et

al., 2000).

Le phénomène de dégradation a été signalé déjà par Chevalier en 1950 cité par Diarra (1985) qui souligne que depuis de longues années, on assiste à la régression de la végétation dans les pays de savane de l’Afrique Occidentale Française (AOF)…. Le parc de Kita, au Soudan français (actuel Mali), délimité en partie par le Baoulé à l’Est et le Bakoye à l’Ouest, avec de la végétation soudanaise typique, s’est appauvri considérablement. De nombreuses études semblent indiquer que la dégradation de certaines forêts africaines serait le résultat des changements climatiques avec son corollaire de sécheresses (Darkoh, 2003 ; Sarr et al., 2007).

VIII.3. Dynamique des paysages de la réserve

L’analyse diachronique de la végétation réalisée dans le cadre de cette étude entre les années 1985 et 2004 a permis de mettre en évidence (chapitre VII) la dynamique des paysages de la réserve. Cette dynamique s’observe sur le terrain à travers les proportions de l’espace occupé par les différents types d’utilisation des sols (leur nature et les proportions d’affectation). La matrice de transition a été utilisée pour déterminer ces proportions. Celle-ci indique une extension des zones agricoles qui se fait au détriment de la couverture forestière dans la réserve et qui évolue de la zone de transition vers les aires intégralement protégées.

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populations végétales et animales, la grandeur de la surface de l’habitat au sein d’un paysage est plus importante, du moins à court terme, que la distance spatiale entre les fragments (McGarigal & Cushman, 2002 ; Fahrig, 2003). Dans la réserve, les suppressions des formations forestières (savane boisée, forêt claire et galerie forestière) augurent la dégradation progressive des conditions de survie des populations végétales et surtout animales. Ces différentes suppressions ont été mises en évidence également par l’indice de dominance dont la valeur a diminué pour chacune des classes supprimées.

Les valeurs de la dimension fractale montrent un remplacement progressif des grandes taches par de petites aux formes plus ou moins régulières, conséquence d’une suppression de certaines taches fragmentées par l’effet de l’anthropisation. Bien que cette anthropisation soit accentuée pour l’ensemble des formations du paysage, elle paraît plus marquée pour les formations de savane arborée, de galerie forestière et de forêt claire.

La régression des surfaces forestières est la combinaison de nombreuses pressions, notamment la mise en cultures et leur extension, l’exploitation forestière, le pâturage excessif, l’explosion démographique, le tout amplifié par l’extrême pauvreté (Ozer et al., 2010). Ces actions anthropiques sont à la base du processus de dégradation de l’écosystème forestier, de son morcellement et de son affectation à d’autres usages.

Comme c’est souvent le cas, le processus de dégradation forestière le plus communément admis est la pression démographique (Allen & Barnes, 1985 ; Sawadogo et al., 2008 ; Ozer et

al., 2010). Ces auteurs indiquent que la population sahélienne connaît une des croissances

démographiques les plus élevées au monde et participe de beaucoup aux bouleversements environnementaux actuels. La zone d’étude ne constitue pas une exception à cette règle, car elle connaît aussi une densité élevée de sa population, avec un afflux massif d’immigrés cultivateurs et éleveurs. Le foisonnement des hameaux de cultures qui en résulte avec son corollaire de défriches importants, d’exploitation frauduleuse du bois et l’afflux important du bétail transhumant, réduisent la couverture forestière et exposent les sols à l’érosion.

L'interrelation étroite entre les activités des hommes et la sécheresse aurait pour conséquence la dégradation du milieu. Or cette dégradation réduit la possibilité de production des écosystèmes et pousse à une surexploitation des différentes ressources naturelles, ce qui fragilise encore davantage le milieu, accentue la sécheresse et perturbe les activités socio-économiques.

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VIII.4. Des indicateurs de suivi de la variation de la biodiversité végétale

A l’heure actuelle, se préoccuper de la diversité biologique, devenue un enjeu majeur de la recherche en écologie, revient à suivre les différents changements d’état ou les modifications de fonctionnement d’un milieu induits par les perturbations naturelles et anthropiques. L’une des voies du suivi des écosystèmes, et en particulier de la biodiversité, est l’étude des indicateurs (Jauffret, 2001, Pontanier, 2004).

Concernant l’évaluation des effets des perturbations surtout liées aux actions anthropiques sur les ressources naturelles, les outils les plus généralement utilisés sont les indicateurs biologiques ou bio-indicateurs (Pontanier, 2004). Nombreux sont les scientifiques qui ont préconisé d'utiliser les indicateurs liés à la biodiversité pour évaluer et suivre l’état de santé d’un écosystème (Chapuis et al., 2002). Un bio-indicateur est un organisme ou un ensemble d’organismes dont les réponses biologiques aux différents facteurs du milieu permettent de caractériser l’état et/ou l’évolution d’un écosystème ou d’un milieu (paysage, forêt, rivière, parcelle agricole, fonds de vallée, etc.) (Lebrun, 1981 ; Jauffret, 2001 ; Bouzillé, 2007). Les bio-indicateurs permettent donc un diagnostic des écosystèmes à partir de l’étude des êtres vivants qui y vivent (Bellan, 1984; Blandin, 1986).

Dans le cadre de nos travaux (Chapitres III, IV, V), les différents paramètres calculés, excepté l’indice de Margalef (richesse spécifique, diversité) n’ont pas montré de différences significatives entre les zones de transition et de tampon. En effet, la zone de tampon comme son nom l’indique, sert de tampon, c’est à dire d’espace protecteur de l’aire intégralement protégée. Ce rôle classique qui lui est dévolu l’expose à des perturbations, si bien qu’à certains endroits, il est difficile de faire actuellement la distinction entre elle et la zone de transition, du fait non seulement de ses limites mal définies mais aussi du non respect des règles d’accès. Par contre, il existe des différences significatives entre zone de référence et zone de transition. Nos résultats ont montré aussi que la richesse spécifique, la diversité, renseignent peu sur le niveau de perturbation et sur l’état de dégradation de la réserve. Ces paramètres ne sont pas favorables au suivi des modifications écologiques dans la réserve. La densité ne semble pas non plus bien caractériser le niveau de perturbation de la végétation de la réserve et ne peut servir d’indicateur.

L’hypothèse couramment émise selon laquelle la surface terrière est plus importante en milieux faiblement dégradés comparativement aux milieux dégradés se confirme également dans la réserve. Ce paramètre peut donc être pertinent pour le suivi de la végétation.

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L’augmentation de la proportion des espèces herbacées résistantes aux stress et aux perturbations et la diminution de la proportion des espèces herbacées sensibles aux mêmes facteurs pourraient être étudiées comme indicateurs de dégradation (chapitre V). Dans la réserve, l’effet de dégradation favorise les thérophytes (espèces annuelles) au détriment des hémicryptophytes (pérennes). Suivre l’évolution de la proportion de ces espèces pérennes donne une idée sur les tendances à l’installation ou à la disparition des individus et permet de juger de la capacité de l’écosystème à se régénérer. L’augmentation de la proportion des espèces, surtout des graminées pérennes, traduirait une dynamique constitutive et répond par l’affirmative à la question relative à la proportion des graminées pérennes qui diminue lorsque la dégradation augmente.

La valeur pastorale s’est révélée un paramètre intéressant qui renseigne sur l’état des pâturages (chapitre V). Nous avons constaté qu’elle n’était pas liée à la diversité et baissait avec la diminution progressive de la contribution des bonnes espèces fourragères (surtout les pérennes) du fait de l’intensification des perturbations. Cet indicateur peut également être pertinent pour le suivi de la végétation.

L’analyse diachronique et les calculs d’indices (chapitre VII) réalisés à partir des images satellitaires associées aux prospections de terrain s’avèrent être des techniques pertinentes pour le suivi des changements du paysage. La matrice de transition combinée à l’identification des processus de transformation spatiale permettent respectivement de quantifier les proportions d’affectation de l’occupation des sols et de décrire les changements observés au cours du temps dans une mosaïque paysagère (Botequilha Leitão & Ahern, 2002 ; Burel & Baudry, 2003 ; Hountondji, 2008). Cela nécessite au préalable que les périodes et l’échelle spatiale pouvant réellement convenir pour une modification du paysage forestier soient bien définies. Dans la réserve, la dégradation de la végétation entre 1985 et 2004 se caractérise par une transformation des formations boisées en savane arbustive et une extension des surfaces anthropisées (champs et jachères).

Outre les changements d’une mosaïque paysagère, de nombreuses mesures semblent décrire les composantes multiples de la configuration de la structure du paysage (Bogaert & Mahamane, 2005). Dans le cadre de nos travaux, parmi ces nombreux indices de mesures, la dimension fractale et l’indice de dominance renseignent sur les effets de l’anthropisation d’un paysage.

La dimension fractale est considérée comme une mesure de complexité du paysage (Kenkel et

al., 1996) et varie suivant le type d’utilisation du milieu (De Cola, 1989). Elle peut servir

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L’indice de dominance mesure à quel point une ou plusieurs utilisations de la terre dominent le paysage (Bogaert & Mahamane, 2005). Plus la valeur de la dominance est grande, moins la classe est fragmentée. La fragmentation suppose le morcellement et donc la diminution de la taille des taches vers de petites taches de tailles similaires (Bamba et al., 2010). Ces deux indices sont souvent des indicateurs de l’impact humain sur la morphologie du paysage (Krummel et al., 1987 ; Burel & Baudry, 2003) qui peuvent être pertinents dans le cadre du suivi des écosystèmes de la réserve.

VIII.5. Critiques de la méthodologie

La présente thèse, loin d’être un produit fini, avait pour objectif d’étudier l’influence des gradients anthropique et géomorphologique sur la variation de la biodiversité dans la réserve de Fina. Elle n’est qu’une amorce d’étude de l’influence de ces 2 gradients difficiles à évaluer avec précision. Elle devrait s’élargir aux 2 autres zones (Badinko et Kongosambougou) de la réserve de biosphère de la boucle du Baoulé. Nous avons procédé dans un premier temps à la comparaison de trois zones de la réserve soumises à des régimes différents de protection, et dans un second temps à la comparaison de deux images Landsat prises à deux dates différentes.

La méthode de relevés (collecte de données de végétation) utilisée a permis de respecter le critère d’homogénéité de la végétation des savanes. Celles-ci sont caractérisées par la complexité de leur structure spatiale, comme par exemple les espèces poussant en touffes (Couteron et al., 1992), et des lacunes dans la connaissance de leur flore (Togola, 1982 ; Nasi, 1994 ; Senterre, 2005). Cette méthode requiert cependant beaucoup de temps.

Les méthodes d’analyses multivariées (DCA en chapitre IV, NMMS et PCA en chapitre V et enfin CCA en chapitre VI) utilisées dans le cadre de nos travaux ont permis de regrouper diverses communautés végétales (ligneuses et herbacées) en fonction de leur degré d’affinité et des gradients écologiques (Djitèye, 1984 ; Kent & Cooker, 1992 ; Bangirimana, 2010). Les ordinations DCA, CCA basées sur des valeurs propres, assument que la matrice des données à traiter contient des variables mesurées suivant une échelle continue avec une normalité multivariée. Elles montrent également que les dissimilarités entre les objets ont des relations métriques (Lawesson, 2000 cité par Bigirimana, 2012 ; McCune & Grace, 2002). Les ordinations (NMMS, PCA) sont basées sur les distances et se réfèrent quant à elles à une matrice des carrés symétriques des distances ou une matrice de similarité. Elles optimalisent la correspondance entre les distances et les relevés dans l’ordination et les distances ou dissimilarités floristiques originales (McCune & Grace, 2002).

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de végétation des milieux perturbés et non perturbés, pour lesquelles la DCA (chapitre IV) a été utilisée. Ce même problème a été observé avec les relevés de végétation et les facteurs écologiques dans l’analyse de la CCA (Chapitre VI). Même constatation en chapitre V pour l’analyse de la végétation herbacée sous l’ordination NMMS.

L’examen des projections sur les différents plans factoriels des relevés et des espèces à partir de ces analyses multivariées facilitent une compréhension des différentes structures (groupes de relevés, groupes d’espèces…) (Djitèye, 1984 ; Bouxin, 2008). Toutefois, elles sont aussi entachées de subjectivité du fait que l’utilisation d’une comparaison visuelle entre les plans "espèces" et les plans "relevés" ne permet pas d’exploiter toute l’information contenue dans l’analyse (Nasi, 1994 ; Bouxin, 2008). En outre, le fait que cette observation ne peut se faire que dans un seul plan, oblige souvent à multiplier les analyses pour distinguer d’éventuelles limites entre les groupes que l’on sait différents mais qui ne sont pas toujours clairement séparés sur les premiers plans factoriels (Nasi, 1994). Les analyses factorielles discriminantes (chapitre IV) ont permis néanmoins de vérifier la qualité de classification des relevés, donc de structuration des groupements végétaux (Diatta et al., 1998 ; Diallo et al., 2010). L’utilisation de Indval (chapitres IV, V) ainsi que le test de Monte Carlo (chapitres VI) ont aidé aux choix des espèces caractéristiques des groupements végétaux discriminés et du facteur écologique dominant.

Les facteurs environnementaux étudiés (texture, pH et l’altitude) et l’effet zonage en chapitre VI n’expliquent pas suffisamment la variabilité floristique et n’ont pas permis non plus de déceler, entre gradient géomorphologique et gradient anthropique, lequel était le plus déterminant dans la structuration de la composition floristique. Cette faible explication de la variabilité floristique par ces facteurs constitue une lacune de cette étude et suggère la nécessité de prendre en compte d’autres facteurs en plus du pH, la matière organique, la profondeur du sol, la pente, de veiller à leur échantillonnage suffisant afin de mieux évaluer l’influence du gradient géomorphologique.

Par rapport aux stratégies adaptatives des herbacées, l’approche par les traits biologiques ou forme de vie (espèces annuelles et pérennes) paraît intéressante et mérite d’être approfondie. La connaissance approfondie sur la phénologie et la biologie des espèces herbacées et leur photosynthèse permettraient de mieux étayer leurs stratégies d’adaptation face à l’allocation des ressources ainsi que leurs réactions aux perturbations.

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conduit à ces changements (Bamba, 2010). Une alternative proposée par cet auteur aurait été d’appliquer la matrice sur plusieurs échantillons de paysages (regroupant le maximum des classes identifiées) afin d’y extraire les valeurs qui serviraient pour des statistiques et une meilleure compréhension de la transformation de ce paysage durant la période. Parmi les nombreux indices proposés pour quantifier et mesurer la structure et la composition du paysage (Forman & Godron, 1986 ; Farina, 2000 ; Burel & Baudry, 2003 ; Bogaert, 2003), nous avons utilisé la dimension fractale et la dominance. Tout comme la matrice de transition, ces deux indices ont aussi détecté un certain nombre de transformations spatiales opérées dans le paysage de la réserve. Ces deux indices ont été choisis non seulement à cause de leur qualité de mesure du degré d’anthropisation des tâches dans une classe du paysage, mais aussi pour leurs seuils qui caractérisent ce degré d’anthropisation. Les modifications sont beaucoup plus amplifiées dans les classes des formations boisées (savanes boisée, arborée, forêt claire) que dans les classes de savane arbustive et de zone agricole (champs et jachères). Pendant que l’indice de dominance de la tâche maximale diminue dans les classes de formations boisées, il s’accroît pour les classes de zones agricoles. Le même résultat est obtenu avec la dimension fractale. L’existence d’une redondance de l’information entre ces deux indices est un argument pour mettre en évidence le fait que les observations ne sont pas dues au hasard (Bogaert, 2003).

En complément aux indices et à la matrice de transition, la méthode de détermination des processus de transformation structurale du paysage a été appliquée. Elle présente de nombreux avantages, entre autres sa simplicité et sa rapidité d’exécution (Bogaert et al., 2004) et constitue un bon outil d’évaluation de la végétation grâce à la mise en évidence des modifications du milieu. Cependant, l’arbre de décisions sur lequel tout le processus est construit fait souvent l’objet de critique eu égard à l’importance accordée à la comparaison du nombre de taches (Jaeger, 2000 ; Barima, 2009).

L’approche méthodologique adoptée a permis de limiter certaines erreurs liées à l’analyse diachronique des images. Toutefois, quelques cas de confusion (zones brûlées), dûs à l’impact des feux, ont été constatés dans la distinction de certaines classes de végétation du fait des réponses spectrales qui sont visuellement similaires. Ces erreurs sont minimes et n’entachent pas la qualité des résultats obtenus.

Enfin, le dispositif théorique de collecte des données sur les sols et sur la végétation ligneuse et herbacée en fonction des gradients anthropique et géomorphologique était plein de contraintes à la descente de terrain du fait de l’inexistence de la zone tampon à plusieurs endroits, et de quelques difficultés de correspondance entre unités morphopedologiques et les types de sols. Ceci a davantage complexifié l’échantillonnage et empêchant de répondre avec précision à certaines de nos questions posées. Ce travail a donné l'occasion de voir qu'un échantillon ne peut jamais être "représentatif" de tous les facteurs écologiques (climats, sols, actions humaines, etc.).

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paramètres ou variables selon leur intensité et qui ont plus de poids ou plus d’effets sur la végétation dans la réserve.

La présente étude et notre connaissance de terrain ont permis de comprendre que, parmi les activités anthropiques qui sévissent dans la zone, celles qui exercent le plus de pressions sur la flore sont les défriches pour l’implantation des cultures et leur extension, et la pâture du bétail.

Le dispositif sera basé sur le critère d’homogénéité et de représentativité et associera l’échantillonnage stratifié à l’échantillonnage à partir des transects réputés efficaces dans l’étude des gradients (Godron, 2012). Cet auteur stipule que lorsque la région à étudier présente une variation spatiale liée à un gradient, il est logique de faire un échantillonnage systématique en orientant les séries de relevés dans le sens de la plus grande variation perçue pour ce gradient.

L’échantillonnage stratifié s’appuiera sur la carte d’occupation des sols réalisée à partir du traitement d’une image plus récente (composition colorée et classification en 6 classes ou faciès de végétation : galerie forestière, forêt claire, savane boisée, savane arborée, savane arbustive et zone agricole identifiées en figure VII.5 du chapitre VII à titre illustratif). Cette classification sera superposée à l’image MNT qui caractérise l’altimétrie de chaque pixel par une valeur d’élévation et à la carte du plan d’aménagement pour l’identification des limites des zones.

Dans chacune des zones et sur chaque type de classe ou faciès de végétation, un transect de longueur 1 km sera implanté le long duquel seront disposées, sur la base d’un échantillonnage systématique, des placettes de taille 1000 m² (50 m x 20 m) et distantes entre elles de 100 m. La distance qui sépare la borne de départ et la première placette est de 25 m. Il en sera de même pour la dernière borne et la dernière placette (figure VIII.2), soit au total 7 placettes par transect au moins en 4 répétitions par faciès de végétation. Au niveau de chaque placette seront juxtaposées 2 lignes de points contacts de part et d’autre du transect ainsi que le prélèvement des échantillons de sols (cf. méthodes en chapitre II) en prenant cette fois ci en compte pour les herbacées, qu’en un même point de lecture, une même espèce touche la baguette métallique à plusieurs niveaux de hauteur (0-5 cm, 5-25 cm, 25-50 cm, …). Les transects seront installés au niveau des 2 zones (transition et référence), au centre ainsi que dans les parties nord et sud de la réserve de Fina. L’orientation du transect sera fonction du gradient étudié. Pour le gradient géomorphologique, le transect sera orienté dans le sens de la pente (toposéquence) et cela pour mieux cerner le profil de la végétation par rapport à ce gradient. Pour le gradient climatique, dans le sens nord-sud qui correspond à la variation perçue de ce gradient. Pour le gradient anthropique dans le sens des villages en zone de transition vers la zone protégée (référence).

Figure VIII.2. Nouveau dispositif d’échantillonnage.

100 m

25 m

50 m

Transect d’1 km

20 m

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Nous utiliserons l’analyse fréquentielle en complément aux analyses multivariées, qui ont l’avantage de donner une vue d’ensemble des données observées et aussi l’inconvénient de ne pas comporter de tests statistiques qui nous diraient si nos hypothèses sont vérifiées. L’analyse fréquentielle apporte des tests qui répondent avec précision à des questions telles que : « quelle est la probabilité a posteriori que telle espèce se trouve avec la fréquence qui a été observée dans tel ou tel état de la variable ou du descripteur choisi ? ». Elle permet aussi de séparer les données de végétation et les facteurs écologiques (Bilodeau, 2010) et avantage les espèces présentes assez fréquemment contrairement à l’analyse factorielle (Mesli et al., 2008 ; Bangirimana, 2010 ; Bilodeau, 2010). Avec cette méthode, il est possible d’une part d’identifier des groupes d’espèces ayant été rencontrées fréquemment ensemble et d’autre part d’identifier les liaisons entre espèces et entre chaque espèce et chaque facteur écologique, et enfin, de chercher à comprendre les groupes d’espèces à la lumière de leur préférence écologique.

VIII.6. Implications pour la conservation de la réserve

La présente étude a permis de porter un diagnostic sur l’état de la végétation et de la biodiversité dans les trois zones de la réserve de Fina, de constituer l’information à la fois sur les milieux naturels et sur l’ampleur des perturbations. Ce diagnostic, bien que non exhaustif, révèle que la réduction des superficies forestières par l’extension des cultures, ainsi que leur fragmentation et leur dégradation, constituent les trois composantes de ce processus de destruction (Koffi, 2008).

Ces trois composantes sont liées aux aléas climatiques (sécheresse) et surtout aux activités anthropiques (feux, cultures, élevage). Si la péjoration climatique ne provoque que rarement des modifications brutales et irréversibles de la végétation (Nasi, 1994) et la disparition d’espèces (Wezel, 2004), il n’en est pas de même pour les activités humaines, difficiles à évaluer avec précision et qui s’intensifient.

En Afrique de l’Ouest, plusieurs auteurs (Djitèye, 1984 ; Le Houérou, 2002 ; Ozer et al., 2010 ; Faye, 2010) ont indiqué une relation entre baisse pluviométrique et déclin des espèces, mais la disparition finale est liée à la surexploitation humaine. Des formations végétales mises en culture une seule fois en portent encore les traces après plusieurs décennies (Nasi, 1994). En effet, jusqu’à un passé récent, conserver la nature revenait essentiellement à créer des réserves pour préserver des écosystèmes naturels riches et variés ou qualifiés d’extraordinaire (Rodary & Castellanet, 2003 ; Hanon, 2008). Toutefois, avec une population en croissance et de plus en plus pauvre, cette stratégie semble actuellement insuffisante pour parer au processus de destruction des ressources végétales de la réserve de Fina. Ainsi, à la différence du climat qui est une donnée de fait sur lequel il est difficile d’agir, le comportement humain peut être néanmoins modifié face à l’évolution régressive de la végétation.

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de la gestion conservatoire des écosystèmes. La gestion conservatoire des écosystèmes des réserves et parcs fait intégralement partie de l’écologie de la restauration (Young, 2000) et vise à initier une action intentionnelle d’autoréparation d’un écosystème dégradé (SER, 2004 ; Nondedeu, 2005). La restauration, bien qu’elle soit relativement peu exigeante en moyens et en temps, n’est cependant applicable que si l’écosystème a conservé une certaine capacité à se restaurer suite à une perturbation, autrement dit, s’il subsiste un niveau de résilience (Dutoit, 2001).

Outre les diverses implications et applications discutées dans les articles de la thèse, la gestion conservatoire des écosystèmes des aires intégralement protégées passe de prime abord par l’aménagement de l’espace en zone de transition. Cet aménagement doit avoir comme base de réflexion le fait que la population continuera d’y demeurer la force dominante dans les agro-systèmes comme le signalent Aronson et al. (1995).

Dans la réserve, les formations naturelles des espaces villageois en zone de transition évoluent progressivement vers des parcs cultivés dans lesquels les jachères et les champs sont les seuls pâturages. Avec le déficit alimentaire pastoral qui va en s'aggravant, et cela particulièrement pour les grands herbivores domestiques dont l’effectif ne cesse de croître, apprendre à gérer les jachères et les autres formations pastorales naturelles pour en assurer la pérennité ainsi que leur sol, devrait être un des objectifs prioritaires de cet aménagement. Une mise en défens des espaces dégradés et une bonne répartition de la charge animale dans les espaces pâturés (pâturage modéré) permet de faciliter les processus de recolonisation et de conservation durable des écosystèmes.

La stabilisation des superficies cultivées par une amélioration conséquente de la productivité du sol constitue également un impératif pour l’émergence d’un développement agricole durable et la réduction des pressions sur les ressources. Il faudrait arriver à relever les niveaux en matières organiques et en éléments minéraux des sols (Bationo, 1995 ; Pieri, 1989) et à assurer aux populations une sécurité foncière.

A cet effet, la synergie agriculture et élevage à travers les contrats de fumure organique entre éleveurs et producteurs ainsi que la production de compost seront encouragés. Des pratiques agro forestières simples basées sur des associations de cultures et de légumineuses ligneuses ou de fruitiers peuvent être initiées. L’agroforesterie, tout en fournissant du bois, pour l’énergie et la construction du fourrage, et des fruits permet d’augmenter la productivité par unité de superficie (Bamba, 2010). Ces pratiques seront renforcées par des techniques de luttes antiérosives pour restaurer les zones dégradées et assurer la conservation des eaux des sols.

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dans un cadre de gestion concertée entre gestionnaire de la réserve et populations locales sur les périodes de mise à feu précoce.

Dans l’optique de mieux protéger la zone centrale intégralement protégée, des pare-feux entre les zones de transition et de tampon doivent être dégagés et nettoyés chaque année pour faire face au cas de feux tardifs qui causent de dégâts importants. La zone tampon constitue en quelque sorte « un périmètre de sécurité » devant réduire au maximum toute influence anthropique susceptible de compromettre la fonction écologique de la zone centrale. Cette zone doit être clairement matérialisée sur le terrain afin de connaître les limites à ne pas franchir et permettre qu’elle joue pleinement sa fonction de protection.

La mise en œuvre réussie de toutes ces propositions dépendra beaucoup du degré d’implication des populations et surtout de la prise en compte de leurs besoins indispensables à l’amélioration de leur niveau de vie et de leurs revenus. Cette implication doit être favorisée par l’organisation des populations, leur sensibilisation sur les rôles et fonctions des forêts et leur biodiversité, sur les espèces endémiques et l’importance de les conserver. Leurs formations sur les techniques appropriées de conservation et de restauration des ressources sont aussi primordiales. Les radios communautaires au niveau local constituent des créneaux utiles dans la diffusion des émissions en langues nationales pour atteindre la plus grande population.

La participation des populations dépendra également en grande partie de la capacité des gestionnaires de la réserve à susciter leur intérêt pour les activités menées dans le but général de l'aménagement et de la gestion conservatoire de la réserve. Il importe que les populations soient sensibilisées aux objectifs de ces opérations et aux textes réglementaires relatifs à la gestion de la réserve. L’information doit porter sur la recherche de convergence de points de vue et de prévention des sanctions auxquelles s’expose tout contrevenant à cette réglementation. Cette tâche spécifique de sensibilisation devra être confiée aux gestionnaires de la réserve les plus proches spatialement de ces populations. Il s'agit des chefs de poste qui n'ont pas, à ce jour, la charge d'une telle tâche. Leur fonction devra donc être revue en conséquence, en y adjoignant des activités d'animation.

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CHAPITRE IX. Conclusions et perspectives

La réserve de biosphère de la boucle du Baoulé est un complexe de trois aires protégées: le Kongosambougou, le Badinko, et le Fina. Elle appartient à l’un des trois observatoires encore non fonctionnel du Réseau National de Surveillance Environnemental (R.N.S.E) et du Réseau d’Observatoires et de Surveillance Ecologique à Long Terme (ROSELT). Nos études de recherche ont été menées dans la réserve de Fina. Cette réserve qui, dans un passé récent, était un modèle de sauvegarde de la biodiversité au Mali, est de nos jours le théâtre de pressions d’origine diverses.

Notre étude avait pour objectif global d’étudier l’influence des gradients anthropique et géomorphologique sur la variation de la biodiversité végétale dans la réserve de Fina. L’approche synchronique a été utilisée pour analyser les variations spatiales de la structure et de la composition floristique des communautés végétales. L’approche diachronique a été utilisée pour analyser la dynamique d’occupation des sols.

Au plan floristique, une liste de 287 espèces réparties entre 172 genres et 58 familles a été établie. La diversité floristique est plus importante en zone de transition non protégée et fortement perturbée qu’en zones de tampon (peu protégée) et de référence (protégée).

Sur le plan phytosociologique, 10 groupements végétaux ont été discriminés dont 4 en zone de référence (milieux moins perturbés) et 6 en zones de transition et de tampon (milieux perturbés).

Sur le plan des spectres biologiques, dans les trois zones, la végétation ligneuse est dominée par les microphanérophytes et les mésophanérophytes et la végétation herbacée par les thérophytes avec une dominance en zone de transition. Ces thérophytes sont pour la plupart des taxons rudérals qui colonisent les milieux perturbés.

Sur le plan des spectres phytogéographiques l’élément de base soudanien est dominant avec une prépondérance en zone de transition et justifie l’appartenance de la zone au centre régional d’endémisme soudanien. L’irradiation constatée des espèces à affinité sahélienne dans la zone d’étude étaye les observations sur les modifications bioclimatiques et la progression des bioclimats sahéliens dans les territoires méridionaux.

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L’analyse diachronique de la couverture végétale dans la réserve a conduit à réaliser la cartographie de la végétation à l’aide d’images satellitaires Landsat (TM et ETM+). L’interprétation visuelle de l’image de 1985 a été réalisée grâce à celle plus récente de 2004. Ainsi, ces images ont été classifiées avec une précision de 88 %. Les occupations du sol extraites de ces cartes montrent un taux de progression générale d’environ 23 % des cultures au détriment des formations forestières.

Notre travail a porté sur la seule réserve de Fina. Ceci constitue pour notre part une lacune pour une étude dans un écosystème aussi vaste comme la réserve de biosphère de la boucle du Baoulé. En perspectives, il serait souhaitable:

- d’étendre notre étude aux deux autres réserves (Badinko et Kongosambougou) de la réserve en étudiant à la fois les systèmes écologiques (ressources végétales) et les systèmes sociaux (usages) ;

- de comprendre également la pression pastorale ainsi que la productivité primaire des écosystèmes de la réserve et leur capacité de charge.

- de comprendre les causes de la quantité élevée de bois morts sur pied ainsi que la faible densité de certaines essences ligneuses comme Butyrospermum parkii et Parkia biglobosa dans la zone d’étude malgré leur protection.

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