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Prendre les droits de l'enfant au sérieux : le nouveau droit du divorce

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Prendre les droits de l'enfant au sérieux : le nouveau droit du divorce

MANAI-WEHRLI, Dominique

MANAI-WEHRLI, Dominique. Prendre les droits de l'enfant au sérieux : le nouveau droit du divorce. In: Pfister-Liechti, Renate. De l'ancien au nouveau droit du divorce . Bern : Stämpfli, 1999. p. 99-123

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:14430

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Prendre les droits de l'enfant au sérieux:

le nouveau droit du divorce

MME DOMINIQUE MANAÏ

Table des matières Introduction _ .

1. Le bien de l'enfant dans l'exercice de l'autorité parentale ... . 1.1 Le principe de J'attribution de l'autorité parentale _ . 1.2 La maxime ct' office. . ... ___ ... . 1.3 Le bien de l'enfant .. _ ... _ .. . 1.4 Les conditions du maintien de l'autorité parentale

commune après le divorce ... _ .. _ .... _ ... . 1.5 La modification de l'autorité parentale _ . . . ... _ .. . 2. Le droit de l'enfant aux relations personnelles .. _ ... .

2.1 Un droit spécifique de l'enfant ... _ ... . 2.2 La compétence du juge. _ ... _ ... . 2.3 La modification du droit aux relations personnelles .. . 3. Les mesures de protection de l'enfant ... . 4. Le droit de l'enfant à être entendu ... .

4.1 En quoi consiste l'audition de l'enfant? ... . 4.2 Est-elle obligatoire ou facultative? . . ... . 4.3 Qui procédera à l'audition? ... . 4.4 Comment se déroulera-t-elle? ... . 5. Le droit de l'enfant à être représenté ... .

5.1 Genèse de l'idée de la représentation de l'enfant. ... . 5.2 Quand doit-on nommer un représentant? ...•..

5.3 Quelle est l'autorité compétente? ... . 5.4 Quel1e est la fonction du curateur? . _ ... __ . 6. Le droit de l'enfant à l'entretien __ .... ____ ... . 6.1 La fixation de la contribution d'entretien ... _ ... . 6.2 L'entretien et les prestations d'assurances sociales ... . 6.3 L'entretien et les besoins extraordinaires de l'enfant. _ .... . 7. Droit transitoire ... ____ ... _ ... _ ... .

7.1 Le principe de la non-rétroactivité ... _. _ ... . 7.2 Les procédures de modification du jugement de divorce ... . 7.3 Les requêtes en divorce pendantes lors de l'entrée

en vigueur du nouveau droit .. _ ..

Pour conclure ... .

Introduction

99 102 103 104 104 105 106 107 107 109 109 109 110 110 112 113 114 114 114 116 117 117 119 119 119 120 120 120 120 121 121

Le monde contemporain de l'enfance se caractérise par son paysage contrasté. D'un côté, nous observons que, depuis une cinquan- taine d'années, les institutions internationales s'intéressent à l'enfant.

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Dominique Manaï

Nombreuses sont les déclarations ou recommandations qui énoncent ce que l'enfant devrait être: bénéficier des libertés fondamentales, être pro- tégé contre toute forme de violence, être à l'abri de toute exploitation.

Cette «éthique pour l'enfance»' dessine le profil d'un enfant idéal.

De l'autre côté, et au-delà des images préfabriquées de l'enfant - roi, de l'enfant heureux de la publicité, de l'enfant - cible de Disneyland, se trouve l'enfant réel, qui peut être tantôt victime de violence, de mal- traitance voire d'abus sexuels, tantôt bourreau quand iI se fait lui-même assassin.

Ce paysage contrasté nous fait prendre conscience de la réalité intrinsè- que de l'enfance, qui n'est pas seulement une étape de passage dans la trajectoire de la maturité, mais qui constitue bien plus un fait humain propre, complexe, voire contradictoire, avec une spécificité irréductible.

C'est précisément pour tenir compte de sa singularité que la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989, entrée en vigueur en Suisse le 26 mars 1997, confère au mineur le droit

d'être entendu dans toute procédure judiciaire directement ou par l'in-

termédiaire d'un représentant (art. 12), y compris dans la procédure en divorce de ses parents et rappelle que la responsabilité d'assurer le dé- veloppement de l'enfant incombe conjointement aux deux parents (art. 18). De surcroît, l'enfant a un droit aux relations personnelles avec ses deux parents (art. 9).

Par la proclamation de la spécificité de l'enfant, il n'est pas question de l'abandonner à ses droits, ni de le livrer à un conflit de loyauté envers ses parents.

Prendre les droits de l'enfant aux sérieux tout en reconnaissant la néces- sité de sa protection, tel me semble être le défi qu'a voulu relever le lé- gislateur suisse lors de la révision du droit du divorce.

L'une des préoccupations majeures de cette révision est celle d'assurer le meilleur intérêt de l'e!)fant2, car même apprivoisé par les adultes, le divorce demeure une blessure pour l:enfant.

Ce qui est nouveau dans cette révision, ce n'est pas la prise en considé- ration du bien de l'enfant. Cette préoccupation était déjà celle du légis- lateur lors de la révision du droit de l'adoption en 1972, puis celle de la fiIiation en 1976. Notion floue, concept indéterminé, l'intérêt de l'enfant a été laissé jusqu'ici à l'appréciation des parents, en tant que protecteurs

1 Cf. texte de l'UNICEF de 1991, J.P. GRANT, La situation des enfants dans le mon- de 1991, Genève, Fonds des Nations Unies pour l'enfance, 1990, pp. 1-18.

2 C. HEGNAUER. Die Wahrung der Kinderinteressen im Scheidungsprozess, AlPI PlA 1994, 7, pp. 88&-893; cf. aussi M. PERREZ, Scheidungsfolgen bei den Kin- dem, PlA 1997, pp. 37 S&

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Prendre les droits de l'enfant au sérieux: le nouveau droit du divorce

légaux, et en cas de divorce, à l'appréciation du juge. Le bien de l'enfant est, de manière paternaliste pourrait-on dire, l'affaire des adultes.

La révision opère un changement de perception dans la manière de con- cevoir son intérêt. Désormais, la détermination de l'intérêt de l'enfant est d'abord et principalement son affaire, il doit avoir la possibilité de s'autodéterminer. L'incapacité traditionnelle liée à sa minorité cède du terrain au profit de la reconnaissance de droits spécifiques qui lui ouvrent de nouvelles sphères d'action et une autonomie juridique crois- sante. L'intérêt de l'enfant devient désormais inséparable du concept d'autonomie. Cette mutation se repère par la fixation de règles de pro- cédure relatives aux modalités de participation de l'enfant à la détermi- nation judiciaire de son intérêt spécifique3

Gest ainsi, comme nous allons le voir, le bien de l'enfant qui sera le cri- tère de l'attribution des droits parentaux et de l'opportunité d'une auto- rité parentale conjointe après le divorce (art. 133 CC; cf. 298a CC pour les parents non mariés). De surcroît, le nouveau droit du divorce recon- naît à l'enfant pour la première fois trois droits, à savoir un droit aux re- lations personneUes avec ses parents (art. 273 CC), I.ill droit d'être en- tendu dans la procédure de divorce (art. 144 CC) et un droit à être re- présenté (art. 146 et 147 CC). Par ailleurs, un droit à être informé et en- tendu est accordé au parent privé d'autorité parentale (art. 275a CC).

Enfin, dans la fixation de la contribution d'entretien pour l'enfant, le nouveau droit tient compte aussi bien des prestations d'assurance que le parent débiteur perçoit pour l'enfant (art. 285 al. 2bi' CC) que d'une éventuelle contribution spéciale pour les besoins extraordinaires non prévus de l'enfant (art. 286 al. 3 CC).

Cette reconnaissance de droits spécifiques métamorphose le statut de l'enfant, il devient sujet actif dans le divorce de ses parents. Ainsi la po- sition de l'enfant se trouve-t-elle améliorée et ses intérêts mieux sauve- gardés. Il devient un acteur sur la scène juridique, un acteur qui a son mot à dire.

3 V. BRAM, Tendenzen der Scheidungsrechtsrevision, RSJ 1990, pp. 257-264;

G. BODENMANN et M. FERREZ, Scheidung und ihre Foigen, Le divorce et ses con- séquences, Berne, H. Huber, 1996; D. MANAÏ, La réforme des droits de l'enfant dans la procédure de divorce, PIA 1997, pp. 1191-11%; R. REUSSER, Die Revi- sion des Scheidungsrechts - die aus kindes- und vormundschaftsrechtlicher Sicht relevanten Neuerungen, RDT 1993, pp. 47-63; R. REUSSER, Gedanken- splitter zur Revision des Scheidungsrechts, RDS 1996, 1, pp. 337-342.

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Dominique Man

1. Le bien de l'enfant dans l'exercice de l'autorité parentale (art. 133 CC)

L'idée sous-jacente au nouveau droit est incontestablement celle de la dédramatisation du divorce non seulement pour les époux mais aussi pour les enfants. Certes le divorce est toujours perçu comme l'échec d'une union, mais il ne doit pas détruire la relation parentale.

C'est pourquoi l'échec du couple conjugal n'empêche pas la survivance du couple parental. .

La simple attention au vocabulaire juridique désignant l'exercice de l'autorité parentale dans l'art. 133 peut s'avérer révélatrice. En effet, au plan de la terminologie, il est symptomatique que le texte allemand ait abandonné l'expression elter/iche Gewall, qui a une connotation de po- tentat, au profit de celle centrée sur l'enfant elterliche Sorge, qui fait res- sortir le faisceau de compétences des parents dans l'exercice de leurs de- voirs envers l'enfant.

En français, le terme autorité parentale est maintenu, alors même que depuis 1984 le Conseil de l'Europe4 et depuis 1989 les Nations Unies' se réfèrent à la notion de responsabilité parentale qui couvre la positionju- ridique globale des parents, y compris le droit de visite et l'obligation d'entretien. Le législateur suisse a préféré s'en tenir à l'expression

«autorité parentale» qui est réservé au droit et au devoir des parents de fournir des soins à leur enfant, de l'éduquer, d'administrer ses biens et de le représenter vis-à-vis du tiers. En effet, le parent privé d'autorité parentale n'est pas libéré de toute responsabilité envers l'enfant6 L'analyse de l'art. 133 CC, ainsi que celle des travaux préparatoires, qui règle le sort des enfants, nous amène à dégager les quatre conclusions suivantes:

4 Recommandaùon du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe du 28.2.84, principe 6. La responsabilité parentale couvre ,<l'ensemble des pouvoirs et des devoirs destinés à assurer le bien-être moral el matériel de l'enfant, notamment en prenant soin de la personne de l'enfant, en maintenant des relations person- nelles avec lui, en assurant son éducation, son entretien. sa responsabilité légale et l'administration de ses biens») (principe la).

5 Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant du 20.11.1989, art. 18 al. 1 et 2.

6 Message du Conseil fédéral concernant la révision du Code civil suisse, du 15 novembre 1995, Berne, 1995, pp. 49-50.

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1.1 Le principe de l'attribution de l'autorité parentale L'attribution de l'autorité parentale à l'un des époux accom- pagnée de son retrait à l'autre époux demeure le principe (art. 133 al. 1 CC).

Néanmoins, la position du parent qui ne détient pas l'autorité parentale se trouve améliorée: il doit être informé des événements relatifs à la vie de l'enfant et entendu avant la prise de décisions importantes pour le dé- veloppement de ce dernier (art. 275a al. 1 CC).

I! peut, en particulier, recueillir auprès des tiers qui s'occupent de l'en- fant, par exemple enseignant ou médecin, des renseignements sur son état et son développement (art. 275a al. 2 CC).

Jusqu'à présent, la loi exclut l'exercice conjoint de l'autorité parentale (art. 297 al. 3 CC)7 Du reste, à plusieurs reprises, le Tribunal fédéral s'est clairement prononcé contre le maintien après le divorce de l'auto- rité parentale des deux parents8 Néanmoins, malgré le texte clair et le

CL travaux préparatoires BOCN 1975, pp. 1777-1779; P. BALSCHEIT, Gesetzge- bung und Rechtsprechung zur gemeinsamen elterlichen Gewalt, PIA 1993, pp. 1204 ss; C. HEGNAUER, Gemeinsame elterliche Gewalt nach der Scheidung?, RSJ 1990, pp. 369-377; C. HEGNAUER, Droit suisse de la filiation, adaptation française et mise à jour par Ph. Meier, Berne, Stampfli, 4eéd. 1998;

C. JosEPHIDEs-DuNAND, Pour une autorité parentale commune après le divorce de lege tata, RSJ 1997, pp. 145 ss; C. JOSEPHIDES-DuNAND, La compétence pour modifier l'attribution des droits parentaux dans la perspective du nouveau droit du divorce, RDT 1998, pp. 180 ss; A. MARTI, Sur l'attribution de l'autorité paren- tale après le divorce, RSJ 1998, pp. 248 ss; Ph. MEIER et M. STETILER, Les effets de la filiation (art. 270 à 327 CC), Droit civil VU2, Fribourg, Ed. universitaires, 1998; CH. MÜLLER, Réponse à l'article de C. Josephides-Dunand intitulé «Pour une autorité parentale commune après le divorce de lege [ata», RSJ 1997, pp. 457 ss; J.-F. PERRIN, Le juge du divorce peut-il instaurer l'autorité parentale conjointe?, SJ 1990, pp. 372-378; A. RUGGIERO, L'attribution de l'autorité paren- tale en cas de divorce, Thèse, Uni. Lausanne, Tolochonnaz, Chabloz, 1992;

S. SANDOZ, Attribution conjointe de l'autorité parentale aux parents divorcés?, in Mélanges Piotet, Berne, Stampfli, 1990, pp. 107 et 5S; S. SANDOZ, Les autorités de tutelle face à un jugement de divorce attribuant l'autorité parentale aux deux parents en violation de la loi, RDT 1993, pp. 65 ss; S. SANDOZ, Certains juges se- raient-ils au-dessus du législateur?, RSJ 1996, pp. 219 ss; LB. SCHNEIDER, L'attri- bution des enfants lors du divorce des parents, in Mélanges en l'honneur de J.-M. Grossen, Bâle, Helbing & Lichtenhahn, 1992, pp. 205 ss; SCHWENZER, Ge- meinsame elterliche Gewalt nach der Scheidung, recht 1998, pp. 212 ss;

C. VON STURM, Gemeinsame elterliche Sorge (elterliche Gewalt) nach Ehe- scheidung, PJA 1997, pp. 1059 ss; A. WIRZ, Gemeinsame elterliche Gewalt ge- schiedener und nicht verheirateter EItern, unter Berücksichtigung des deut- schen, franzôsischen, englischen und schweizerischen Rechts, Bâle, Helbing &

Lichtenhahn, 1995.

ATF 114 II 415

=

JdT 1992 1286; ATF 117 II 523

=

JdT 1994 1 561; ATF 123 III 445.

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Dominique Manaï

sens univoque de la loi, plusieurs tentatives audacieuses émanant de quelques tribunaux cantonaux ont prononcé une autorité parentale commune9.

A cet égard, le nouveau droit prévoit explicitement la possibilité d'ac- corder une autorité parentale conjointe sur requête des parents (art. 133 al. 3 CC), une requête commune qui atteste leur capacité et leur volonté de coopérerlO

Ainsi le juge ne peut pas décider contre le gré des parents que l'autorité parentale sera exercée en commun. C'est pourquoi il est essentiel que le juge vérifie d'une manière approfondie si la requête commune corres- pond effectivement à la volonté des deux conjoints.

Cette systématique de la loi a été abondamment discutée au Parlement.

Au Conseil national une proposition (proposition Bircher) suggérait de poser non comme exception mais comme principe l'autorité parentale conjointe, dans la mesure où le projet du Conseil fédéral perpétue une lo- gique de conflit en présupposant la mésentente des parents et reproduit le caractère exceptionnel de la coopération au-delà de la dissolution du lien conjugall l

Cette proposition a été rejetée à une très forte majorité (130 voix contre 7).

1.2 La maxime d'office

La maîtrise de la décision quant à l'exercice de l'autorité pa- rentale sur l'enfant appartient toujours à l'autorité judiciaire et non aux parents. L'attribution de l'autorité parentale est régie par la maxime d'office. C'est donc le juge qui décide et qui demeure le garant de l'inté- rêt de l'enfant.

1.3 Le bien de l'enfant

C'est exclusivement le bien de l'enfant qui doit guider la déci- sion de l'attribution de l'autorité parentale (art. 133 al. 2 CC).

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11

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Cf. jugement du Bezirksgericht Gelterkinden (BL) du 28.10.1986 mentionné in P. BALSCHEIT, op. cit., RSI 1988, p. 25; cf. aussi la jurisprudence romande men- tionnée in I-E Perrin, op. cit., SI 1990, note 2, p. 372; cf. enfin jugement saint- gallois du 8.11.1988, RSJ 1989, p. 139; décision de l'Obergericht du canton de Bâle Campagne du 22.3.1994, RDT 1994, p. 173.

La question de l'autorité parentale conjointe a fait l'objet de critiques importan- tes lors de la procédure de consultation en raison du risque de difficultés supplé- mentaires ou de querelles entre les ex-époux, situation qui serait nuisible pour l'enfant.

Bulletin sténographique du Conseil national, 17 décembre 1997, pp. 2715-2716;

12 mars 1998, p. 327.

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Prendre les droits de l'enfant au sérieux: le nouveau droit du divorce

Le législateur a renoncé à établir une liste de critères qui permettent de déterminer le bien de l'enfant. Le juge dispose à cet égard d'un large pouvoir d'appréciation. Pour prendre sa décision, il tient compte des re- quêtes communes des parents; il leur donnera suite s'il estime qu'elles correspondent au bien de l'enfant.

L'intérêt de l'enfant relève de l'appréciation du juge et dépend des cir- constances du cas concret!2. La jurisprudence actuelle du Tribunal fédé- ral retient, pour examiner l'intérêt de l'enfant, les critères suivants: des conditions de vie stables sans que la répartition des tâches adoptée du- rant le mariage soit déterminante à elle seule, un parent qui s'occupe de lui et l'élève personnellement, les relations entre les parents et l'enfant, la personnalité des parents (capacité éducative, santé physique et men- tale), leur conditions de vie (faculté dé s'occuper personnellement de l'enfant, situation professionnelle et charges en découlant, nouvelles liaisons), la personnalité de l'enfant, ses rapports avec les autres en- fants13

Comme les conditions de vie de l'enfant sont bouleversées par le divor- ce, l'enfant a le droit de participer à l'organisation de sa vie future. Pour ce faire, son avis doit être recueilli dans la mesure du possible (art. 133 al. 2 CC qui renvoie à l'art. 144 al. 2 CC; cf. infra ch. 4).

1.4 Les conditions du maintien de l'autorité parentale commune après le divorce

Le maintien de l'exercice en commun de l'autorité parentale nécessite une requête conjointe des père et mère. De plus, à l'appui de leur requête, les parents doivent élaborer une convention qui précise leur participation à la prise en charge de l'enfant!4 ainsi que la réparti- tion de l'entretien. Cette convention n'est valable qu'après ratification par le juge (art. 133 al. 3 in fine CC). Ainsi cette convention détermine qui peut prendre les décisions relatives à la vie quotidienne de l'enfant.

Enfin il appartient au juge d'apprécier si l'exercice conjoint de l'autorité parentale est compatible avec le bien de l'enfant. Tel sera le cas s'il est convaincu de la capacité de coopération des deux parents ainsi que de leur aptitude éducative.

12 Cf. HÉLÈNE REY WrCKY et ISABELLE RrNALDI, Intérêt supérieur de l'enfant et di- vorce, perspective multidimensionnelle sur la place et les droits de l'enfant dans le processus de divorce, Lausanne, Ed. EESP, 1998.

13 ATF 115 II 319; ATF 117 II 357.

14 Il s'agit des soins que les deux parents doivent vouer à l'enfant dans sa vie quo- tidienne et le temps que chacun doit lui consacrer (Message du Conseil fédéral, p.133).

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Dominique Manaï

C'est dans cette perspective qu'est prévue la poursuite de l'exercice en commun de l'autorité parentale après la dissolution du lien conjugal (art. 133 al. 3 CC).

La Commission du Conseil national a proposé (proposition Thür) d'in- troduire des «cautèles» à l'exercice en commun de l'autorité parentale, à savoir premièrement avoir déjà assumé conjointement la prise en charge de l'enfant durant le mariage et deuxièmement avoir conclu une conven- tion réglant l'ensemble des effets accessoires du divorce (la preuve par l'acte, TatbeweisJl s.

Celle proposition a été rejetée de justesse.

Une minorité a refusé la réglementation légale de l'exercice en commun de l'autorité parentale, car elle constitue à ses yeux une contradiction en. elle- même. Son argumentation est la suivante16: lorsque les parents sont d'ac- cord, ils n'ont besoin ni d'une autorisation étQtique ni du juge pour déci- der des relations avec leur enfant. C'est pourquoi elle propose de biffer l'al. 3; cette proposition a été rejetée à une large majorité.

1.5 La modification de l'autorité parentale

La position de l'enfant se trouve améliorée dans la procédure:

la loi lui accorde la qualité pour agir (en plus de celle du père, de la mère et de l'autorité tutélaire, art. 134 al. 1 CC) en vue de la modification de l'autorité parentale pour des faits nouves"" importants (par exemple pour des raisons de santé, ou le remariage du parent détenteur de l'auto- rité parentale, et non pour un simple désaccord entre les parents,) néces- sitant une réglementation différente.

L'autorité compétente sera le juge dans les cas litigeux, et l'autorité tu- télaire lorsque les père et mère sont d'accord quant à la modification de l'attribution de l'autorité parentale ou encore au décès de l'un d'eux (art. 134 al. 3 CC en relation avec 315b CC). La qualité pour agir de l'en- tant présuppose sa capacité de discernement (16 CC; 19 al. 2 CC).

Selon l'art. 310 al. 2 CC, l'enfant est déjà légitimé par le droit actuel à agir en cas de retrait du droit de garde.

Si la procédure en modification vise à exercer l'autorité parentale en commun, les conditions de l'art. 134 al. 3 CC doivent être remplies. Si, par contre, il s'agit de supprimer l'exercice conjoint et d'attribuer l'auto- rité parentale à un seul parent, l'autorité compétente doit statuer aussi sur la contribution d'entretien et les relations personnelles (art. 134 al. 2 CC qui renvoie aux art. 286 CC, 287 al. 2 CC et 273 ss CC). Par ailleurs,

15 Bulletin sténographique du Conseil national, 17 décembre 1997, p. 2715.

16 Bulletin sténographique du Conseil national, 17 décembre 1997, p. 2718.

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Prendre les droits de l'enfant au sérieux: le nouveau droit du divorce

le retrait de l'autorité parentale à l'un des parents implique que les fon- dements essentiels de la responsabilité commune n'existent plus et que, dans l'intérêt de l'enfant, elle doit être attribuée à l'un des deuxl1.

2. Le droit de l'enfant aux relations personnelles (art. 133; 273 ss CC)

Le droit aux relations personnelles permet au parent non gar- dien de participer au développement de l'enfant même s'il ne vit pas avec lui et de maintenir ainsi un lien affectif. Il fait partie des droits de la personnalité du père, de la mère et de l'enfantI '.

Lorsque le juge attribue l'autorité parentale à l'un des époux, il doit ré- gler d'office, sans même une requête des parties, les relations personnel- les entre l'enfant et le parent avec lequel il ne vit pas (art. 133 al. 1 et 273 CC). Le juge matrimonial n'est pas lié par une éventuelle convention que les parents soumettent à sa ratification. Il fixe l'étendue des rela- tions personnelles en fonction des circonstances.

2.1 Un droit spécifique de l'enfant

Jusqu'ici le dioit aux relations personnelles, qui découle de l'existence d'un lien juridique de filiation, était considéré comme un droit fondamental des parentsI9; ce sont la jurisprudence et la doctrine qui ont mis en évidence que ce droit est institué aussi dans l'intérêt de l'enfant (garanti par l'art. 9 al. 3 de la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant).

La révision du droit du divorce poursuit cette évolution: les relations personnelles du parent qui n'a pas l'autorité parentale sur l'enfant ne sont plus conçues comme le seul droit des père et mère. Désormais le droit de visite se trouve consacré comme un droit non seulement des

17 Message du Conseil fédéral, p. 135.

18 ATI 100 II 81 = ldT 1975 1 57; cf. V. BRAM, Das Besuchsrecht-geschiedener EI- tem, PlA 1994, pp. 899 ss; C. HEGNAUER, Berner Kommentar, Art. 270-275 CC, Berne, Stampfli, 1991 et supplément 1997; C. HSGNAUER, Personlicher Verkehr - Grundlagen, RDT 1993, pp. 2 ss; D. MANAÏ, Le statut de l'enfant à la lumière du droit aux relations personnelles, RDS 1988 l, pp. 309 ss; E. WYSS, Be- suchsrecht im Interesse des Kindes., Pliidoyer 1994/3, pp. 20 ss.

19 Cf. H. HAUSHEER, Die drittüberwachte Besuchsrechtsausübung (das sogenannte

«begleitete Besuchsrecht»). Rechtliche Grundlagen, RDT 1998, pp. 17 ss., p. 19.

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Dominique Mana}'

père et mère, mais aussi comme un droit spécifique de l'enfant, un droit de sa personnalité20,

C'est ainsi que l'art. 273 al. 1 CC est modifié: il introduit un droit de vi- site réciproque de l'enfant et des père et mère non détenteurs de la gar- de, L'organisation des relations personnelles est laissée aux intéressés, De surcrolI, l'autorité tutélaire peut les rappeler à leurs devoirs et leur donner des instructions lorsque l'exercice des relations personnelles ou son défaut est préjudiciable pour l'enfant (art. 273 al. 2 CC),

En dehors des procédures matrimoniales, le père ou la mère peut exiger que son droit d'entretenir des relations personnelles avec l'enfant soit réglé (art. 273 al. 3 CC),

Au Conseil national, plusieurs propositions ont été faites concernant le droit de visite mais elles ont toutes été rejetées21 :

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21

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D'abord celle consistant à retirer le droit de visite au parent qui, de manière fautive, omet de l'exercer, retrait qui serait assorti d'une com- pensation des dommages causés par le non exercice du droit de visite.

Cette proposition a été jugée excessive (refus 61 voix contre 31), Ensuite celle prévoyalllla possibilité de suspendre le droit de visite en cas de tOrIes présomptions d'abus sexuels Oll d'autres mauvais traite- mellls physiques ou psychiques, Le refus de cette proposition s'est fon- dé sur l'argument que l'ordre juridique protège déjà l'enfant par la pos- sibilité de demander des mesures de protectiolt, ou de retirer le droit de visite ou d'appliquer des sancions pénales (refus 65 voix contre 41), Enfin, une dernière proposition a été refusée: celle consistant à rajou- ter une dispositiDn légale où il serait prévu que les cantons veillent à ce que les parents et les enfants puissent s~adresser à des organismes reconnus dont le but est d'offrir un lieu d'accueil neutre et un encadre- ment pour permettre à l'enfant d'entretenir des relations personnelles avec celui des parents chez lequel il ne vit pas, Il a,lité allégué qu'il ne serait pas opportun de charger les cantons de nouvelles tâches, dans la mesure où il existe déjà des offices de la jeunesse, des institutions reli- gieuses ou privées qui assument celte fonction (refus 62 voix contre 52),

C'est lors de la procédure de consultation qu'une amélioration de la position de l'enfant quant au droit de visite a été réclamée. Par ailleurs, l'art. 9 al. 3 de la Convention de "ONU relative aux droits de l'enfant oblige les Etats à tenir compte du droit de l'enfant vivant séparé de son père ou de sa mère d'entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents, pour autant que cela ne nuise pas à son bien. La ratification de cette convention a mis en exergue le fait que le droit suisse actuel ne tient pas suffi- samment compte de ce droit de "enfant.

Bulletin sténographique du Conseil national, 17 décembre 1997, pp, 2737-2739.

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Prendre les droits de l'enfant au sérieux: le nouveau droit du divorce

Soulignons que le nouveau droit n'établit plus de présomption de pater- nité pour l'enfant qui naît dans les 300 jours après la dissolution du lien conjugal (art. 255 al. 1 CC et 256a al. 2 CC).

2.2 La compétence du jnge

Lors d'une procédure en divorce, le juge fixe d'office l'éten- due du droit aux relations personnelles. Sa compétence est en principe exclusive (art. 275 al. 2 CC; cf. art. 315a al. 3 ch. 2 CC). Le for rationae loci est au domicile de l'un des époux (art. 135 al. 1 CC).

2.3 La modification du droit aux relations personnelles Une requête en modification du droit aux relations personnel- les, en cas de faits nouveaux importants et non pas lors de simples diver- gences entre les parents peut être introduite non seulement par le père, la mère ou par l'autorité tutélaire mais aussi par l'enfant capable de dis- cernement (art. 134 ai. 1 CC).

Désormais c'est l'autorité tutélaire du domicile de l'enfant qui est com- pétente pour les modifications aussi bien contentieuses que non conten- tieuses (art. 134 al. 4, 275 al. 1; 315b al. 2 CC; contrairement à l'art. 157 aCC).

Cependant, pour des motifs d'économie de procédure, le juge sera com- pétent pour modifier les relations personnelles lorsqu'une requête en modification de l'autorité parentale ou de la contribution d'entretien est pendante (art. 134 al. 3 in fine; 275 al. 2; 315b al. 1 ch. 2 et 3 CC).

La compétence à raison du lieu est soit l'autorité tutélaire du domicile de l'enfant, soit celle du lieu de son séjour lorsqu'elle a déjà ordonné ou se prépare à ordonner des mesures de protection de l'enfant (art. 275 al. 1 CC).

Une modification des relations personnelles implique un changement fondamental de la situation, et l'autorité tutélaire ne pourra pas se limi- ter à substituer sa propre appréciation à celle du juge ou suivre la propo- sition de l'un des parents.

3. Les mesures de protection de l'enfant (art. 315a CC)

Le juge du divorce est compétent pour prendre des mesures de protection quant à l'enfant (art. 307 ss CC), et charge les autorités de tutelle de leur exécution. Soulignons que le nouveau droit étend cette

(13)

Dominique Manaï

compétence au juge des mesures protectrices de l'union conjugale (art. 315a al. 1 CC).

Jusqu'à présent, le juge matrimonial avait une compétence restreinte à l'instauration ou au complément des mesures de protection prises par les autorités de tutelle, mais non celle de les limiter ou de les supprimer.

Le nouvel art. 315a al. 2 CC lui confère une compétence plus large, en l'habilitant à les modifier22

Toutefois, les autorités de tutelle demeurent compétentes (art. 315a al. 3 CC) pour poursuivre une procédure de protection de l'enfant introduite avant la procédure judiciaire (ch. 1), et prendre les mesures immédiate- ment nécessaires à la protection de l'enfant lorsqu'il est probable que le juge ne pourra pas les prendre à temps (ch. 2).

Soulignons que toutes les décisions relatives à l'enfant, c'est-à-dire le droit des parents d'entretenir des relations personnelles avec l'enfant, l'institution ou la suppression d'une curatelle, le retrait ou le rétablisse- ment du droit de garde ou de l'autorité parentale, peuvent faire l'objet d'un recours en réforme auprès du Tribunal fédéral (art. 44 lit. d nLOJF).

4. Le droit de l'enfant

à

être entendu (art. 144 CC)

Dans la procédure de divorce, il appartient toujours au juge, à l'instar du droit actuel, d'établir d'office tous les faits importants pour régler le sort du mineur. Il est l'arbitre et le garant de son intérêt.

En revanche, ce qui est nouveau, c'est qu'il établira les faits en procé- dant non seulement à l'audition des père et mère (art. 144 al. 1 CC) mais aussi à celle des enfants (art. 144 al. 2 CC).

4.1 En quoi consiste l'audition de l'enfant?

Le principe de l'audition de l'enfant en tant que tel n'a suscité aucune divergence dans les débats au Parlement. Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de souligner l'applicabilité directe de l'art. 12 de la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant23 Cette obliga- tion d'entendre l'enfant s'applique à toute procédure en divorce qu'elle soit basée sur une requête commune ou sur une demande unilatérale.

Ainsi, une convention de divorce par laquelle les parents prévoient une

22 PH. MEIER et M. STElTLER, Les effets de la filiation (art. 270 à 327 CC), Fribourg, Ed. universitaires, 1998, pp. 337-342, n"726-733.

2.3 M.F. LÜCKER-BABEL, Effet direct de l'art. 12 CDE et écoute de l'enfant, Pliidoyer 199815, pp. 57 ss,

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Prendre les droits de l'enfant au sérieux: le nouveau droit du divorce solution qui semble conforme à l'intérêt de l'enfant ne ruspense pas le juge de procéder à l'audition du mineur".

La parole de l'enfant n'est plus confisquée par les parents ou par le juge.

L'enfant est un intervenant direct dans cette procédure. Ainsi la déter- mination de son meilleur intérêt est favorisée par le contact immédiat avec l'enfant, par son écoute, et non plus seulement par une apprécia- tion des circonstances reconstituées, et donc une appréciation nécessai- rement médiatisée par le juge.

Rappelons que le juge n'est pas lié par l'avis de l'enfant. Il devra néan- moins motiver sa décision si elle va à l'encontre de l'option clairement exprimée de l'enfant.

Par ailleurs, la majorité de la commission du Conseil national a proposé d'introduire dans la loi un devoir d'informer l'enfant, de manière appro- priée, sur son droit à être entendu25

Cette proposition a été refusée (73 voix contre 56) pour le motif que ce de- voir risque de se réduire à la simple présentation d'un formulaire.

L'audition de l'enfant est indépendante de l'en'luête sociale prévue à l'art. 145 al. 2 Cc. La demande d'une telle enquête est laissée à l'appré- ciation du juge. Elle constitue un élément complémentaire pour une pri- se de décision éclairée. Il s'agit d'une faculté que le législateur laisse au juge.

La formulation de {'art. 145 al. 2 CC résulte de la décision du Conseil des Etats.

En effet, rappelons que le projet du Conseil fédéral avait scindé cet al. 2 en deux dispositions légales différentes: il avait distingué la simple possi- bilité de faire appel à des experts (art. 145 al. 2 CC), et l'obligation de s'adresser à l'autorité tutélaire ou à un autre service d'aide à la jeunesse pour s'enquérir des faits susceptibles d'être importants pour régler le sort des enfants (art. 146 CC).

Ainsi, afin (Je mieux sauvegarder les intérêts de l'enfant, le juge devait pro- céder à une requête auprès de l'autorité tutélaire ou d'un autre service d'aide à la jeunesse dans tous les cas de divorce d'un couple avec enfant.

Dans l'optique du Conseil fédéral, cette démarche ne serait pas trop lour- de pour les juges: elle ne devrait pas entraîner u.ne bureaucratie importan- te, dans la mesure où la demande de renseignements pourrait se faire par {e bin;" de formulaire ad hoc. Et dans la plupart des cas, ces renseigne-

24 Cf. R. WENGER-LENHERR, Scheidungsrechtrevision: Neuerungen bei der Kinder- zuteilung und im Kindesrecht, PlA 1996, pp. J225-1229, p. 1227.

25 Bulletin sténographique du Conseil national, 17 décembre 1997, pp. 2730 et 2733.

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90nùnique Manaï

menls n'influenceraient pas la décision du magistrat, mais présenteraient l'avantage de l'informer, certes dans un petit nombre de cas exceptionnels, de faits importants pour régler le sort des enfants que les parents auraient cachés au juge (cas de maladie mentale, d'abus sexuels ou de violence).

Le Conseil aux Elats a supprimé l'art. 146 CC et l'a inséré dans l'art. 145 al. 2 CC qui relègue l'opportunité de la collaboration des services chargés de l'aide à la jeunesse à l'appréciation du juge. C'est dans le but d'alléger au maximum la procédure et d'éviter une bureaucratie superfétatoire que le Conseil des Etats a rendu cette requêlefacultative26•

Au sein du Conseil national, la position de la majorité de la commission est la suivante: elle se rallie au projet du Conseil fédéral et rejette la propo- sition du Conseil des Etats, car elle craint que cette faculté prévue par la loi ne soit pas utilisée el que celte disposition reste lellre morte27.

Celte majorité n'a pas été suivie, el lors du vote final, le Conseil national a suivi la décision du Conseil des Etats de laisser l'enquête sociale à l'appré- ciation du juge (76 voix contre 56).

Le but de l'audition de l'enfant est de clarifier ses rapports avec ses deux parents, sans qu'il soit nécessairement amené à opter pour l'un ou pour l'autre. L'occasion lui est néanmoins donnée d'exprimer ses vœux.

Remarquons que les parents ont le droit d'être informé des résultats es- sentiels de l'entretien. L'audition en elle-même ne sera pas protocolée, toutefois ses principales conclusions seront écrites. Les parents n'ont aucun droit de regard.

Quant aux modalités concrètes de l'audition de l'enfant (art. 144 al. 2 CC), nous allons interroger la loi de trois angles de vue:

4.2 Est-eUe obligatoire ou facultative?

Il importe de savoir si le législateur a prévu une audition obli- gatoire ou facultative. En principe l'audition a lieu, mais exceptionneUe- ment le juge peut y renoncer. Cette possibilité relève de la libre appré- ciation du juge. Le refus doit être motivé.

Le législateur a esquissé un critère pour renoncer à l'audition: celui de l'âge ou d'autres motifs importants.

Notons que la loi n'a pas prévu d'âge minimum pour l'audition.

Par ailleurs, l'interprétation littérale de cette disposition nous invite à en déduire que les motifs importants doivent être analogues à celui de l'âge

26 Bulletin sténographique du Conseil des Etats, 26 septembre 1996, p. 770.

27 Bulletin sténographique du Conseil national, 17 décembre 1997, pp. 2733-2734.

112

(16)

Prendre les droits de l'enfant au sérieux: le nouveau droit du clivorce

de l'enfant28; en d'autres termes, ils doivent être exclusivement relatifs aux particularités de l'enfant (développement affectif, troubles consécu- tifs au conflit conjugal, refus de l'enfant, etc.). Aussi le droit d'être enten- du ne pèsera-t-il pas sur l'enfant, car son droit au silence sera respecté.

Au Conseil national, la proposition de la majorité de la commission, se- lon laquelle l'enfant doit être entendu personnellement lorsqu'il le deman- de, a été rejetée à une faible majorité (69 voix con Ire 61)'9.

4.3 Qui procédera à l'audition?

Une fois l'audition décidée, il est nécessaire de déterminer qui sera chargé d'écouter l'enfant.

La loi prévoit que soit le juge soit un tiers peut entendre l'enfant.

Le choix de la personne habilitée à procéder à l'audition, juge ou tiers, est laissé à l'entière appréciation du tribunal en fonction de la situation concrète. Il appartient donc au juge d'évaluer lui-même sa propre apti- tude à mener un entretien avec un mineur ou la confier à une personne plus qualifiée professionnellement. Mais si l'enfant capable de discerne- ment demande lui-même à être entendu par le juge, celui-ci a le devoir d'accepter.

Notons qu'une délégation systématique à un tiers n'est conforme ni au seos ni au but de l'audition. Le tiers sera un professionnel de l'écoute (par ex. psychologue pour enfants). Le souci du législateur n'est pas seu- lement de prendre acte de la parole de l'enfant mais de la décrypter pour pouvoir prendre une décision éclairée quant aux droits parentaux.

Il ne suffit donc pas d'entendre la parole de l'enfant, il importe bien plus de savoir l'écouter. C'est pourquoi il importe d'apprécier avec beaucoup de prudence ses déclarations, car le mineur peut devenir l'enjeu du con- flit qui oppose ses parents.

Le Conseil aux Etats a modifié la disposition du projet du Conseil fédé- rai et a refusé de poser le principe selon lequel le juge procède personnel- lement à l'audition des enfants et délègue celle tâche à une tierce personne dans des circonstances spéciales'°

Au Conseil national, la majorité de la commission demande que le juge procède en principe personnellement à l'audition de l'enfant, et que la dé- légation de cette tâche à une tierce personne n'intervienne que dans des cas importants, si des circonstances révèlent qu'il est préférable que l'erl-

28 Cf. JEAN-FRANÇOIS PERRIN, Le droit des enfants à être entendus personnellement par le juge dans les procédures les concernant, Semaine Judiciaire 1997, p. 220.

29 Bulletin sténographique du Conseil national,17 décembre 1997, p. 2735.

30 Bulletin sténographique du Conseil des Etats, 26 septembre 1996, p. 770.

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Dominique Manaï

tretien soit mené par une personne de confiance ou un professionnel de l'écouteJl

Cette proposition a été refusée à une faible minorité et le Conseil national s'est rallié à la décision du Conseil des Etars.

4.4 Comment se déroulera-t-elle?

Une dernière question mérite d'être posée: comment se dé- roulera l'audition?

La manière de l'exercer est laissée à l'appréciation du tribunal. La loi mentionne qu'elle doit avoir lieu de manière appropriée. Le déroule- ment de l'entretien est relatif à l'âge et au degré de maturité de l'enfant.

Dans son message32, le Conseil fédéral souligne que la façon d'interro- ger dépend de l'âge de l'enfant; en principe l'audition n'aura pas lieu dans une salle d'audience, mais plutôt dans le bureau du juge ou en de- hors du tribunal. Le juge est libre d'entendre l'enfant en présence ou non de ses parents.

5. Le droit de l'enfant

à

être représenté (art. 146-147 CC)

La représentation est une innovation apportée par le projet du Conseil fédéral. En effet, elle ne figurait pas dans l'avant-projet.

Précisons d'emblée que l'audition de l'enfant n'exclut pas sa représenta- tion. Cette dernière vient en plus, elle est conçue comme une mesure de protection. L'enfant est représenté par un curateur, c'est·à·dire une per- sonne indépendante du procès, un curateur chargé de l'assister.

5.1 Genèse de l'idée de la représentation de l'enfant

Mais pourrait-on se demander, pourquoi le Conseil fédéral a- t-il jugé bon d'introduire la possibilité d'une représentation alors qu'il appartient déjà au juge de sauvegarder l'intérêt de l'enfant conformé- ment au principe de la maxime d'office?

Le Conseil fédéral, suivant en ccla la proposition du professeur HEG- NAUER33, a estimé que la maxime d'office ne suffit pas à protéger l'en- fant, pour trois raisons34 :

JI Bulletin sténographique du Conseil national, 17 décembre 1997, pp. 2732-2734.

32 Message, p. 147.

33 C. HEGNAUER, Die Wahrung der Kindesinteressen im Scheidungsprozess, PIA!

AlP 1994, pp. 888-S93; C. HEGNAUER, Der Anwalt des Kindes, RDT 1994, pp. 181 ss.

34 Message, pp. t49-151.

114

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Prendre les droits de l'enfant au sérieux: le nouveau droit du divorce

Celle-ci est insuffisante d'abord car la tâche des juges est difficile: à la fois dire le droit pour les parties et veiller à l'intérêt de l'enfant.

La tentation des juges pourrait être grande et légitime de se rallier aux conclusions communes des parties et de penser que les parents sont les plus aptes à déceler l'intérêt de leur enfant.

Nécessaire, cette maxime d'office est néanmoins insuffisante, car si le juge estime que l'audition ne doit pas avoir lieu (comme le prévoit l'art. 144 al. 2 CC), seules les parties ont la qualité pour recourir si elles pensent que cette décision est injustifiée, l'audition de l'enfant lui conférant la qualité d'intervenant mais non de partie. Il ne peut donc ni déposer des conclusions ni interjeter un recours.

Elle est insuffisante enfin, car l'audition ne peut parfois pas avoir lieu en raison de l'âge ou de l'état de santé de l'enfant. Dans ce cas, l'intérêt de l'enfant sera exprimé par les parents, en tant que parties, et non par l'enfant lui-même.

La question de la représentation a été abondamment discutée au Parle- ment. Ses adversaires, certes minoritaires, se réclament du bien de l'enfant.

Ils allèguent que la maxime officielle qui place le juge en position d'arbitre des intérêts est la meilleure représentation de l'intérêt du mineur. Au Con- seil national, ils font valoir le double risque d'une curatelle35:

ils font d'abord un procès d'intention au juge, en craignant que celui-ci, chargé de garantir le bien de l'enfant, préfère se reposer sur les conclu- sions du curateur, plutôt que de chercher lui-même à déterminer le meilleur intérêt de l'enfant;

ils font ensuite un procès d'intention au représentant, en craignant de pro- voquer un conflit entre l'intérêt de l'enfant et sa volonté; car, avancent-ils, le curateur sera tenté de céder à ses vœux momentanés, perdant de vue le bien général de l'enfant.

Leur argumentation a été repoussée par 75 voix contre 58.

Incontestablement la possibilité d'instaurer une représentation de l'en- fant améliore sa position dans la procédure36 . Son intérêt n'est plus su- bordonné à la bienveillance de ses parents ou du juge, mais il bénéficie de la sorte d'une assistance directe et immédiate qui lui confère une réelle indépendance dans la procédure de divorce. La représentation lui offre ainsi des garanties formelles au respect optimum de son bien en permettant au curateur de déposer des conclusions en son nom et d'in-

35 Bulletin sténographique du Conseil national, 17 décembre 1997, pp. 2730-2734.

36 Cf. 1. SCHWEIGHAUSER, Die Vertretung der Kindesinteressen im Scheidungsver- fahren - AnwaIt des Kindes, Thèse, Bâle 1998; du même auteur, Kinderanwalt:

Gravierende Mangel, Pladoyer 1998/2, pp. 24 ss.

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Dominique Manaï

te!jeter «recours contre les décisions relatives à l'attribution de l'autori- té parentale, à des questions essentielles concernant les relations per- sonnelles ou aux mesures de protection de l'enfanl» comme le prévoit l'art. 147 al. 2 Cc.

La représentation établit ainsi un équilibre entre les droits dont l'en- fant est titulaire et la protection qui lui est due en raison de sa vulnéra- bilité.

5.2 Quand doit-on nonuner un représentant?

Certes la représentation n'est pas nécessaire pour chaque di- vorce. On peut dire qu'elle est même exceptionnelle.

Dans l'intérêt de l'enfant, il est préférable de restreindre autant que pos- sible le nombre de personnes qui entrent en contact avec l'enfant pen- dant la procédure de divorce.

En effet, l'interprétation de l'art. 146 al. 1 CC nous indique que, en prin- cipe, la nomination d'un curateur est laissée à l'appréciation du juge, lorsque de justes motifs l'exigent.

Le législateur a ensuite établi une liste exemplative, et donc non exhaus- tive, des cas où le juge doit examiner d'office la nécessité ou non d'or- donner une curatelle (art. 146 al. 2 ch. 1-3 CC), à savoir:

1. lorsque les père et mère ne parviennent pas à un accord concernant leurs droits parentaux (ch. 1);

2. ou alors parviennent à un accord, mais l'audition des père et mère ou de l'enfant permet de douter du bien fondé des conclusions com- munes relatives à l'attribution de l'autorité parentale ou à la façon dont les relations personnelles sont réglées voire justifient un exa- men de la nécessité de prononcer une mesure de protection de l'en- fant (ch. 3);

3. enfin, lorsque l'autorité tutélaire le requiert (ch. 2). Ainsi, par exem- ple, si le juge considère que l'audition de l'enfant ne peut pas avoir lieu, l'autorité tutélaire peut demander que l'enfant soit représenté dans la procédure en divorce. Elle doit toutefois justifier sa deman- de.

Cependant, lorsque l'enfant capable de discernement le demande, le juge doit ordonner la nomination d'un curateur (art. 146 al. 3 CC). Ain- si, la représentation ne dépend pas du degré de maturité ou de discerne- ment de l'enfant (art. 308 al. 2 CC).

La proposition faite au Conseil national d'ordonner une curatelle sur de- mande de l'un des parents ou de l'enfant capable de discernement, et pour 116

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Prendre les droits de l'enfant au sérieux: le nouveau droit du divorce

autant que de justes motifs justifient la curatelle, a été refusée à une faible majorité (68 voix contre 66)37

Par ailleurs, le projet du Conseil fédéral obligeait le juge à ordonner une représentation dans les quatre situations mentionnées. Le Conseil des Etats a préféré laisser cette question à l'appréciation du juge, sauf lorsque c'est l'enfant lui-même qui le demande. Cette formulation est plus restric- tive, dans la mesure où elle subordonne la représentation de l'enfant par un curateur à l'existence de motifs importanti38•

C'est à une faible majorité que le Conseil national a opté pour la proposi- tion du Conseil des Etats (64 voix contre 61).

5.3 QueUe est l'autorité compétente?

Une fois que le juge ordonne la représentation de l'enfant, quelle est l'autorité compétente pour désigner le curateur?

L'art. 147 al. 1 CC réserve cette compétente à l'autorité tutélaire et non au juge.

5.4 QueUe est la fonction du curateur?

Qui sera désigné comme curateur? un collaborateur de l'auto- rité tutélaire, un avocat? Comme il s'agit d'une mesure de protection de l'enfant, le curateur sera obligatoirement une personne indépendante du procès; ainsi l'avocat de l'une des parties ne peut pas représenter l'enfant.

La loi mentionne qu'il s'agira d'une «personne disposant d'expérience en matière d'assistance et dans le domaine juridique» (art. 147 al. 1 CC).

Cette formulation comporte, à mon sens, d'autant plus d'ambiguïtés qu'il est impossible d'objectiver la notion d'intérêt de l'enfanl. De la loi ne se dégage aucun consensus clair sur son rôle.

Qu'attend-on de cette personne? Une personne qui veille à ses intérêts ou un avocat chargé de défendre ses droits? S'agit-il d'un porte-parole de ses désirs ou le garant de son intérêt supérieur? S'agit-il d'un amicus curiae, désigné pour fournir au juge tous les éléments pertinents suscep- tibles de l'aider à déterminer l'intérêt de l'enfant?

De l'art. 147 al. 1 CC il découle que le curateur ne peut pas être un sim- ple défenseur d'enfants, c'est-à-dire une personne en laquelle le mineur peut placer sa confiance, l'assister et le conseiller lorsque les parents ne peuvent pas le faire eux-mêmes, puisque la loi précise que ce curateur

37 Bulletin sténographique du Conseif national, 17 décembre 1997, p.2736.

38 Bulletin sténographique du Conseil des Etats, 26 septembre 1996, p. 770.

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Dominique Mana~·

doit disposer d'une expérience dans le domaine juridique et non une formation juridique. Le législatern a donc certes pensé à un avocat d'en- fant, chargé de défendre ses droits dans le divorce, mais pas exclusive- ment. Il peut être un avocat mais sa tâche est plus vaste. Il peut être un psychologue mais au bénéfice d'une expérience du droit. Il sera néces- sairement .formé à plusieurs disciplines, ce qui implique un désenclave- ment des professions juridiques.

En tout état de cause, le législateur a voulu séparer la fonction de l'auto- rité tutélaire et la représentation de l'enfant: alors que la première éva- lue le bien de l'enfant sans avoir la position de partie dans la procédrne de divorce, le curateur a le devoir de faire valoir la volonté de l'enfant et ses souhaits devant le tribunal.

Il en ressort que le crnateur exerce une fonction d'accompagnement de l'enfant qui ne se recoupe pas avec la tâche des collaborateurs de l'auto- rité tutélaire. Celle-ci ne peut pas assumer la représentation de l'enfant, car une telle situation créerait un conflit d'intérêts préjudiciable à l'en- fant.

La nomination d'un représentant se situe dans le cadre des mesrnes pro- tectrices de l'enfant, un représentant qui exprime l'intérêt de l'enfant en son âme et conscience.

Les principes établis à partir de l'art. 309 CC sont applicables de façon similaire à la curatelle de représentation. Les frais pour les mesures de protection de l'enCant sont compris dans les Crais d'entretien (art. 276 al. 1 CC) et en aucun cas ne peuvent être mis à la charge de l'enfant (art. 147 al. 3 CC). En pratique, ce seront probablement les services de l'aide à la jeunesse qui assumeront la curatelle.

Quant à la mission do curateur par rapport à l'enfant, la loi est muette.

Néanmoins, l'étendue de la représentation doit dépendre, à mes yeux, de la situation de l'enfant. Il me semble que la fonction du curateur diffère selon que l'enfant est capable ou incapable de discernement. En effet, si l'enfant est capable de discernement, il est le mieux à même de juger son propre intérêt, la fonction du curateur pourra être ceUe d'un conseiller.

Il sera chargé aussi de lui expliquer, en termes intelligibles, la procédure.

Si l'enfant n'est pas capable de discernement mais cependant apte à ex- primer ses désirs, le curateur devra faire état de la volonté de l'enfant en l'aidant à l'articuler confornlément à son intérêt véritable.

Et si l'enfant est incapable de discernement, le curateur pourrait défen- dre devant le juge la solution qui lui paraît la meilleure pour l'enfant. Il assume, dans ce cas de figure, pleinement la représentation de l'enfant.

Dans la procédure de divorce, la nature de ses attributions est plus clai- re: c'est l'art. 147 al. 2 CC qui les détermine. Le curateur peut déposer des conclusions et interjeter recours contre les décisions relatives à l'at- 118

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Prendre les droits de l'enfant au sérieux: Je nouveau droit du divorce

tribut ion de l'autorité parentale, les relations personnelles ou les mesu- res de protection. Mais il n'a aucune compétence en matière d'entretien.

En effet, la proposition faite au Conseil national d'étendre la compétence du curateur en matière de contribution d'entretien a été refusée (88 voix contre 47)39

6. Le droit de l'enfant à l'entretien (art. 285-286 CC)

A cet égard, le nouveau droit n'apporte pas de changements substantiels. Le juge du divorce fixe, comme en droit actuel, la contribu- tion d'entretien due par le parent qui ne détient pas l'autorité parentale.

En raison de l'abaissement de la majorité civile à 18 ans, la contribution d'entretien peut s'étendre au-delà de la majorité (art. 133 al. 1 CC)40 La révision modifie cependant l'étendue de l'entretien sur trois points:

6.1 La fixation de la contribution d'entretien

Pour la fixation de cette contribution, il convient désonnais de tenir compte non seulement des besoins de l'enfant, de la situation et ressources des père et mère, ainsi que de la fortune et des revenus de l'enfant, comme c'est le cas jusqu'à présent, mais aussi à l'avenir de la participation du parent non gardien à la prise en charge de l'enfant. Cet élément influencera l'étendue de l'entretien, notamment dans le cadre de l'exercice conjoint de l'autorité parentale (art. 285 al. 1 CC).

Si la situation économique le pennet, le débiteur de l'entretien doit par- ticiper équitablement aux frais liés aux loisirs, à l'engagement d'une

«baby-sitter» pour laisser du temps libre au parent détenteur de l'auto- rité parentale, ou aux frais de vacances s'il n'exerce pas le droit de visite aussi largement que l'a prévu le jugement de divorce.

6.2 L'entretien et les prestations d'assurances sociales Si le parent débiteur d'entretien perçoit, suite à l'âge ou l'inva- lidité, des prestations d'assurances sociales destinées à l'entretien de

39 Bulletin sténographique du Conseil national, 17 décembre 1997. p. 2736.

40 Cf. M. STETILER, L'obligation d'entretien des parents à l'égard des enfants ma- jeurs (art. 277 al. 2 CCS) - Evolution de la jurisprudence et de la doctrine, RJB

1992, pp. 133 ss.

(23)

Dontinique Manaï

l'enfant et remplaçant les revenus de travail, il doit verser ces sommes à l'enfant (art. 285 al. 2 bis CC"). La contribution d'entretien diminue alors d'office, de par la loi. Ainsi il ne sera plus nécessaire d'introduire pour cela une requête en modification de la contribution d'entretien.

6.3 L'entretien et les besoins extraordinaires de l'enfant L'évaluation du montant de la contribution d'entretien est une question d'appréciation: elle se base sur toutes les circonstances impor- tantes de la situation compte tenu de son évolution prévisible. Toutefois, en cas de besoins extraordinaires imprévus de l'enfant (par exemple, correction dentaire onéreuse, leçons particulières), les parents peuvent être contraints de verser une contribution spécifique supplémentaire (art. 286 al. 3 CC).

7. Droit transitoire

7.1 Le principe de la non-rétroactivité

Le nouveau droit reprend le principe de la non-rétroactivité des lois énoncé à l'art. 21ïtre final du Code civil, s'appuyant ainsi sur la jurisprudence qui a considéré que le régime transitoire du Code civil de 1907 est valable pour toutes les révisions ultérieures42

C'est ainsi que les dispositions relatives à l'enfant seront applicables dès l'entrée en vigueur du nouveau droit (art. 7a al. 1 tit. fin. CC). La loi ne rétroagit donc pas à l'égard des divorces prononcés sous l'ancien droit (art. 7a al. 2 tit. fin. CC).

7.2 Les procédures de modification du jugement de divorce La modification du jugement de divorce rendu selon l'ancien droit demeure réglée selon l'ancien droit, alors que celle relative aux en- fants, à savoir l'attribution de l'autorité parentale, les relations person- ne liés ouJa contribution d'entretien des enfants, sera tranchée selon le nouveau droit (art. 7a al. 3tit. fin. CC).

Aussi l'enfant ou les époux divorcés pourraient-ils requérir (art. 134 al. 1 CC) auprès de l'autorité tutélaire du domicile de leur enfant une modi- fication du jugement de divorce pour solliciter l'autorité parentale con-

41 Cette disposition a été introduite par la majorité de la commission au Conseil national lors des travaux parlementaires (BOCN 17.12.1997, pp. 2739-2743;

BOCE 12.3.1998, p. 329).

42 ATF 84 11 182.

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(24)

Prendre les droits de l'enfant au sérieux: le nouveau droit du divorce

jointe (art. 134 al. 3 et 315b CC). Ainsi, l'entrée en vigueur du nouveau droit est considérée comme un fait nouveau important.

Les père et mère auront à présenter une convention, soumise à ratifica- tion, qui précise leur participation à la prise en charge de l'enfant et la répartition des frais d'entretien de celui-ci (art. 133 al. 3 CC). L'autorité tutélaire examine si la requête des parents est conforme au bien de l'en- fant.

7.3 Les requêtes eu divorce pendantes lors de l'entrée en vigueur du nonveau droit

Les procès en divorce pendants en première ou en deuxième instance seront jugés d'après le nouveau droit (art. 7b al. 1 tit. fin. CC).

L'enfant sera ainsi entendu (art. 314 ch. 1 CC).

Une réserve est prévue pour les procès en divorce pendants devant le Tribunal fédéral: l'ancien droit continuera de s'appliquer même en cas de renvoi à l'autorité cantonale (art. 7b al. 3 tit. fin. CC).

Pour conclure

Le nouveau droit du divorce qui institue le droit de l'enfant à être entendu et celui à être représenté m'amène à une double conclu- sion: la première touche à la symbolique du droit, et la seconde à l'éthi- que du droit.

1. L'un des acquis les moins contestés de la psychanalyse concerne le poids de la famille nucléaire dans la constitution du sujet. C'est à l'intérieur du scénario triangulaire (père-mère--enfant) que la tra- jectoire d'une identité se construit. Donc pour l'enfant, l'importance de la famille est immense.

La famille nucléaire est un lien institué entre un ensemble de figures où se constituent et se reconnaissent les rôles de chacun. Elle n'est pas seulement le décor de la genèse du sujet inconscient, elle en est l'humus, le terrain nourricier, le lieu d'élaboration du sujet en sa double face individuelle et sociale, le lieu d'articulation de l'expé- rience œdipienne et du lien social. C'est dans ce tissu relationnel de la parentalité que se fonde et s'élabore l'identité du sujet.

Or, le divorce brise cette appartenance familiale, et l'enfant se trou- ve exposé à une situation de crise qui pulvérise ses repères identitai- res: d'abord, le débordement du conflit familial est en lui-même an- goissant. Ensuite, la désorientation qui l'affecte remet en cause la lé- gitimité des figures parentales, leur autorité symbolique vacille, leur

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