Leçon 42 : Groupe des isométries du plan : décomposition d’une isométrie en produit de réflexions, groupe des déplacements, classification des
isométries à partir de l’ensemble des points invariants
Pré requis : Applications affines
Réflexions, rotations et translations du plan (en particulier une réflexion inverse les angles orientés de vecteurs)
Notion de groupe
Cadre : On se place dans P plan affine euclidien d’espace vectoriel associé . On primera les images des points par f.
I) Groupe des isométries du plan
1-DéfinitionDéfinition 1: Soit une application. On dit que f est une isométrie si elle conserve les distances ie
ou pour simplifier .
Exemple : Les translations, les réflexions et les rotations sont des isométries mais pas la projection orthogonale.
Notation : On note Is(P) l’ensemble des isométries du plan.
2-Application vectorielle associée
Lemme 1 : Toute isométrie du plan transforme le milieu d’un segment en le milieu du segment image
Démonstration : I milieu de [AB] ⟺IA=IB et IA+IB=AB⟺I’A’=I’B’ et I’A’+I’B’=A’B’⟺I’ milieu de [A’B’] ∎ Proposition 1: Soit f ∈ Is(P). L’application définie par φ: ⟶ est parfaitement définie.
Démonstration : Soit un élément de . Alors = ⟺ MNBA est un parallélogramme ⟺ [MB] et [NA]
ont même milieu ⟺ [M’B’] et [N’A’] ont même milieu ⟺ M’N’B’A’ est un parallélogramme ⟺
= ⟺ φ( )=φ( ).∎
Définition 2 : φ est appelé application vectorielle associée à f.
Propriété 1 :i) φ conserve la norme et le produit scalaire ii) φ est linéaire
iii) φ est bijective
Démonstration : i) Pour tout couple (M, N) du plan on a, puisque MN=M’N’, . Soit , deux vecteurs de .
ii) Pour tout couple de vecteurs ( , ) de , il existe M, N et R trois points de P tel que et
Alors
Soit λ∈ℝ.
. D’où φ (λ )=λφ( ).
iii) .
Alors Ker φ= { } d’où φ est un endomorphisme injectif de de dimension finie donc φ est bijective.∎
3-Structure de groupe
Théorème 1 : Toute isométrie du plan est i) bijective
ii) conserve le barycentre
Démonstration : Soit f∈ Is(P).
i) Injectivité : Pour tout couple M, N de P, f(M)=f(N) ⟹f(M) f(N)=0⟺MN=0⟺M=N.
Surjectivité : Soit O point de P et O’=f(O). Alors pour tout point M’ de P, il existe tel que par surjectivité de φ. Soit M point de P tel que alors
’ d’où M’=f(M).
ii) Une isométrie est une application affine.∎
Théorème 2 : (Is(P),∘) est un groupe (∘ =loi de composition)
Démonstration : Montrons que (Is(P),∘) est un sous-groupe des bijections du plan.
* donc (Is(P),∘) est non vide.
* Soit f et g∈ (Is(P),∘). Soit M et N deux points de P. Alors
donc ∈ (Is(P),∘).
* Soit f ∈ (Is(P),∘). Puisque f est bijective,
donc .∎
II) Décomposition d’une isométrie en produit de réflexions
Lemme 2 : Une isométrie du plan est entièrement déterminée par la donnée des images de trois points non alignés Démonstration : Montrons qu’une isométrie f fixant trois points non alignés est l’identité : soient A,B et C ces
trois points fixes et M un point quelconque d’image M’ par f. Si M≠M’ alors AM=AM’,
BM=B’M’ et CM=C’M’ et ainsi ces trois points sont sur la médiatrice de [MM’] et A,B et C sont alignés : absurde donc M=M’. Puisque M est quelconque, .
Par suite, si f et g sont deux isométries qui coïncident sur trois points non alignés alors
fixe ces trois points et donc .∎
Théorème (de Cartan-Dieudonné) : Toute isométrie du plan est la composée d’au plus trois réflexions Démonstration : Si , alors où D est une droite quelconque du plan.
Sinon, soit A’ image de A par f et la réflexion qui transforme A’ en A alors fixe A.
Si alors et c’est fini.
Sinon il existe B d’image B’ par tel que B’≠B. Soit donc la réflexion qui transforme B’ en B, alors fixe B et A (car A appartient à med[BB’] ; en effet, AB=
)
Si alors et c’’est terminé.
Sinon il existe C d’image C’ par tel que C’≠C. Soit donc la réflexion qui transforme C’ en C alors fixe A, B et C qui sont non alignés et alors par le
lemme on a : ⟹ ∎
Remarque : Le théorème suivant nous donne la décomposition d’une rotation et d’une translation
Théorème 3 : *Soient D et D’ deux droites parallèles et normal à D et D’ tel que alors . Réciproquement, toute translation se décompose en produit de deux réflexions d’axes parallèles.
*Soient D et D’ deux droites sécantes en I et θ=2(D,D’) *2π+ alors .
Réciproquement, toute rotation se décompose en produite de deux réflexions d’axes sécants.
Démonstration : * Soient D et D’ parallèles, M un point du plan, et . Si H et H’ désignent les projetés orthogonaux de M sur D et D’, on a et
d’où : ce dernier est un vecteur indépendant de M et on a
alors .
Considérons et soit D une droite orthogonale à et D’ telle que alors par ce
qui précède .
*Soient D et D’ sécantes en I de vecteurs directeurs respectifs et , M point du plan ,
et .
Les droites D et D’ sont les bissectrices respectives de et ainsi
et . D’où
.
Comme IM=IN=IM’, M’ est l’image de M par la rotation de centre I et d’angle . Considérons et soit D une droite passant par I et D’ passant par I telle que
θ/2=(D,D’) [π] alors par ce qui précède .∎
Propriété 2 : Une isométrie conserve le parallélisme, l’orthogonalité, les angles géométriques et l’alignement.
L’image par une isométrie d’une droite est une droite, d’un segment est un segment de même longueur, d’un cercle en un cercle de même rayon…
Dorénavant, on suppose que le plan P est orienté.
III) Groupe des déplacements
On sait qu’une réflexion inverse les angles orientés, ainsi par le théorème de Cartan-Dieudonné, on voit qu’une isométrie va ou bien conserver ou bien inverser les angles orientés d’où la définition suivante.
Définition 3 : Une isométrie du plan qui conserve les angles orientés est appelé déplacement. Celle qui les inverse est appelé antidéplacement. On note leur ensemble et .
Exemple : Une rotation est un déplacement, une réflexion est un antidéplacement.
Proposition 2 : La composée de deux antidéplacements est un déplacement.
Démonstration : Soit et deux antidéplacements d’application vectorielle associée φ et Ψ On
définit les vecteurs par …
Alors ( et . Au final,
donc est un déplacement.∎
Remarque : De même, on peut montrer que la composée de deux déplacements est un déplacement tandis que la composée d’un déplacement et d’un antidéplacement est un antidéplacement.
Corollaire 1 : Une isométrie f est un déplacement ssi le nombre de réflexions qui intervient dans la décomposition de en produit de réflexions est pair.
Corollaire 2 : Tout déplacement est soit une rotation soit une translation soit l’identité.
Théorème 4 : est un sous-groupe de . Démonstration :*L’identité est un déplacement.
*La composée de deux déplacements est un déplacement d’après la remarque précédente.
*Si est un déplacement, supposons que soit un antidéplacement ; alors dans ce cas, est un antidéplacement ce qui est absurde donc est un déplacement.∎ Remarque : n’est pas un groupe.
IV) Classification des isométries d’après l’ensemble des points fixes
Définition 4 : On définit la symétrie glissée du plan comme la composée commutative de la translation de vecteur et de la réflexion d’axe D tel que dirige D.
Remarque : Puisqu’une translation est un déplacement, une symétrie glissée est un antidéplacement.
Proposition 3 : Notons l’ensemble des points invariants d’une isométrie . Alors on peut classifier les isométries selon :
Déplacement Antidéplacement
P Identité
D
{A] r(A,θ)
∅
Démonstration : 1- Si l’ensemble des points fixes de est le plan alors elle possède trois points fixes non alignés donc .
2-Soit une isométrie du plan dont l’ensemble des points fixes est une droite D et M ∈P n’appartenant pas à D Notons M’ son image par . Par isométrie, pour tout point N de D, NM=NM’ et N est sur la médiatrice de [MM’] qui est donc D : M’ est donc le symétrique de M par rapport à D, est la réflexion d’axe D.
3-Soit une isométrie possédant un seul point fixe A , M un point de P distinct de A d’image M’, D la médiatrice de [MM’] (A∈D) et ; alors g est une isométrie qui laisse fixe A et M donc (AM). D’après ce qui précède, (g ne peut pas être l’identité car sinon f serait une réflexion) et ainsi donc est une rotation de centre A puisque D et (AM) sont sécantes en A.
4- Si ne possède aucun point fixe, soit A d’image A’. Considérons l’application où D=méd [AA’], g fixe alors le point A donc :
*ou bien g est une rotation de centre A et d’angle θ. Ainsi, . Or on peut
écrire tel que et D’ parallèle à D. On a alors
et est une symétrie glissée.
*ou bien g est une symétrie d’axe (AB) où B est un autre point fixé par g et . Si B est tel que D et (AB) sont parallèles alors est une translation de vecteur non nul (puisque A∉D) ; sinon est une rotation ce qui est absurde puisqu’elle admettrait un point fixe.
Puisque est un sous-espace affine de P, tous les cas ont étés étudiés.∎
V) Application
Proposition 4 : Soient A, B, A’ et B’ 4 points du plan tels que AB=A’B’ . Alors il existe un unique déplacement f tel que f(A)=A’ et f(B)=B’. De plus, *si alors f= où
*si alors f est une rotation d’angle (
Démonstration : Existence : transforme B en b tel que ce qui implique A’b=AB=A’B’ et
de sorte que r(A’, envoie b sur B’ et fixe A’.
Par suite, envoie A sur A’ et B sur B’. De plus f est clairement un déplacement.
Unicité : Soit g un autre tel déplacement. Alors fixe A’ et B’ . Or un déplacement ayant plus d’un point fixe est l’identité d’où .∎
Exercice : Construire le centre O de la rotation
Correction : *Si A=A’ et B=B’ alors f=id=r(M,0) ∀M ∈P.
*Si A=A’ et B alors f=r(A, .
*Supposons alors A et B≠B’ de sorte que O appartienne à la fois à la médiatrice D de *AA’+ et D’ de
*BB’+ alors OA=OA’ et OB=OB’.
Deux cas : si D et D’ ne sont pas parallèles alors O est le point d’intersection de D et D’.
sinon D=D’ puisque O appartient aux deux droites. Dans ce cas ou bien ,O-=(AB)∩(A’B’) ou bien O est le centre du parallélogramme ABA’B’.