A NNALES DE L ’I. H. P., SECTION B
R OLAND G RUNIG
Probabilités parfaites. Théorème de Kolmogorov
Annales de l’I. H. P., section B, tome 2, n
o3 (1966), p. 221-225
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221
Probabilités parfaites.
Théorème de Kolmogorov
Roland GRUNIG
Vol. II, n° 3, 1966, p. 225. Calcul des Probabilités et Statistique.
En 1949 Gnedenko et
Kolmogorov
ont introduit la notion deprobabilité parfaite.
Marczewski etRyll-Nardzewski
en 1953 ont consacréplusieurs
articles
[3] [4] [5] [7],
auxprobabilités
compactesqui
sont uneparticulari-
sation des
probabilités parfaites,
et auxprobabilités quasi
compactesqui
sontéquivalentes
auxprobabilités parfaites.
Nous avons choisisystématiquement l’appellation probabilité parfaite plutôt
quequasi compacte
bien que lesprincipales propriétés
de cesprobabilités
se trouvent dans[7].
Le but decet article est de caractériser des espaces mesurables sur
lesquels
toute pro- babilité estparfaite
et degénéraliser
le théorème deKolmogorov.
1. DÉFINITION
[7].
- Uneprobabilité
P sur une tribu A departies
d’unensemble Q est
parfaite
si et seulement si pour toute variable aléatoiref
il existe û
(a
EA)
tel que = 1 et est un borélien de la droiteréelle. -
De cette définition on déduit facilement la
propriété
suivante desproba-
bilités
parfaites qui
est essentielle dans les démonstrations des résultats ultérieurs.2-1. PROPOSITION. - Soient
(Q, A, P)
un espace deprobabilité (Q’, A’)
un espace mesurable
et f une application
mesurable de(D, A)
dans(QB 3É’).
Si la
probabilité
P sur A estparfaite,
laprobabilité P,
sur A’ définie pourtout A’ par =
P[ f 1(A’)]
estparfaite.
Démonstration. Soient
(R, $)
la droite réelle munie de sa tribu boré- lienne et h uneapplication
mesurable de(~2’, 3É’)
dans(R, L’application
hof de
(0, A)
dans(R, 93)
est mesurable donc il existe Q EA, P(Q)
= 1222 ROLAND GRUNIG
tel que
(hof)
= B Posons Q’= f(c2).
On ah(Q’)
= B ~B doncl’ensemble
c~.~
= E A’ eth(c2~)
=h(t2’)
E $. D’autre partt2~
:::>f(c2) implique
:::> :::>tl,
donc = 1. Ainsi pourtoute
application
réelle mesurable h de(s2’, A’)
dans(R, 93)
il existe~2~
E A’tel que = 1 et E $.
pf
est doncparfaite.
2-2.
REMARQUES. -
On déduit immédiatement de laproposition précé-
dente deux
propriétés classiques
desprobabilités parfaites :
1. Soit
(D, A, P)
un espace deprobabilité.
Si P estparfaite
la restrictionde P
à toute sous-tribu de A estparfaite.
2. Soient
(D, A, P)
un espace deprobabilité
et 3t une relationd’équiva-
lence dans n telle que la
partition
associée à R soitcomposée
d’ensembles mesurables. Soient il’injection canonique
de D dans la tribu laplus
fine sur0/3t
rendant imesurable,
et P.1t laprobabilité
sur définiepour tout D par
P.1t(D)
=P[1-1(D)].
Si P estparfaite
surA,
Pjt estparfaite
surA/3t.
3-1. DÉFINITION
[9].
- Soit{ An ~ n
=1, 2,
... une suite departies
d’unensemble SZ. La fonction
caractéristique
de la suite{ An )
estl’applica-
tion h de Q dans l’ensemble de
Cantor,
définie pour tout M E Q paroù cpi est la fonction indicatrice de l’ensemble
A~.
3-2. THÉORÈME. - Soit
(Q, A)
un espace mesurable où A est une tribu detype
dénombrable. Pour que touteprobabilité
sur A soitparfaite
il estnécessaire
que pour toute suite{ An ~ n
=1, 2,
...engendrant A,
et suffi-sant que pour une suite
{ An ~ n
=1,2,
...engendrant ~, l’image
de 11par la fonction
caractéristique
de la suite{ An ~
soit universellement mesu-rable.
Démonstration.
a)
Condition suffisante : Soit( SZ, A, P)
un espace deprobabilité, A
étant la tribuengendrée
par une suite{ An ~ n
=1, 2,
... departies
de Q. La fonctioncaractéristique
h de la suite{ An ~
est uneapplica-
tion mesurable de
(Q, A)
dans(R, 93)
et|par hypothèse
est universel-lement mesurable. Si
Ph
est laprobabilité image
de P sur 93 on a donc(P;~
étant laprobabilité
extérieure associée àPh).
Modulo un ensemble
négligeable,
h est unisomorphisme
de(Q, A, P)
sur
(B, B, Ph)
et, commePh
estparfaite
sur 93 nB,
P estparfaite
sur Ad’après [7].
b)
Condition nécessaire :Soient { An ~
une suite departies
de Q engen- drant la tribuA,
h la fonctioncaractéristique
de cettesuite,
et (Jo une mesure deStieltjes-Lebesgue
sur la tribu borélienne 93 de la droite réelle.Posons
h(S2)
= Y. On peut supposerfJ.*(Y)
> 0. Il existe F E 93 tel queLa
probabilité
(LI trace de la mesure y sur F estparfaite
etConsidérons la
probabilité
lY trace sur Y de laprobabilité
c’est-à-dire laprobabilité
sur définie pour tout B E 93 parOn sait que, pour tout A
h(A)
eY n 93. On pose alorsP(A) =
P est une
probabilité parfaite
parhypothèse.
D’autrepart
on peut consi- dérer 1Y sur Y comme laprobabilité image
de P car si1Y est donc une
probabilité parfaite d’après
laproposition
2-1. Celaentraîne
d’après [8] (théorème 2)
que, pour touteapplication
mesurablef
de
(F,
F n93)
dans(R, f-1[ f(Y)] appartient
à la tribuquotient
F ncomplétée
par rapport à laprobabilité quotient (pour
la relationd’équi-
valence
x1R
x2 Hf(x1)
=f(x2)).
Enparticulier
si onprend
pourf l’applica-
tion
identique
de F dansR,
on voit que Yappartient
à lacomplétée
deF~ B par rapport à donc à la
complétée
de B par rapport à (Jo.Remarque
1. Ce théorème apporte une solution définitive auproblème posé
par Blackwell[1]
en 1956 de savoir si tout espace mesurableparfait
de type dénombrable est un espace de Lusin
(au
sens deBlackwell), problème auquel
Sasonov avaitrépondu négativement
par uncontre-exemple [8].
Remarque
2. Dans le théorèmeprécédent
on peutremplacer probabilité parfaite
parprobabilité
compactepuisque
ces notions sontéquivalentes
dans le cas de tribu de
type
dénombrable.224 ROLAND GRUNIG
Remarque
3. Du théorèmeprécédent
et du faitqu’une probabilité
Psur une tribu A est
parfaite
si et seulement si sa restriction à toute sous-tribu de type dénombrable de A estcompacte [7]
on déduit immédiatement : Soit(D, A)
un espace mesurable. Une condition suffisante pour que touteprobabilité
sur(Q, A)
soitparfaite
est que pour toute suite{ An ~ n
=1, 2,
... d’élémentsde A, l’image
de D par la fonctioncaractéristique
de la suite{ An ~
soit universellement mesurable.Remarque
4. Du théorème 3-2 et despropriétés
de la fonction carac-téristique
d’une suite d’ensembles on déduit immédiatement le résultatclassique :
touteprobabilité
sur la tribu borélienne d’un espacepolonais éparpillé
est compacte.4-1. DÉFINITION
(2).
- On ditqu’un
espacetopologique
F est un espace lusinien s’il estséparé
et s’il existe un espacepolonais éparpillé
E et uneapplication
continuebijective
de E sur F.4-2. PROPOSITION. - Toute
probabilité
sur la tribu borélienne d’un espace lusinien est compacte.Démonstration. Soient F un espace lusinien et P’ une
probabilité
surla tribu borélienne de F. Il existe un espace
polonais éparpillé
E et uneappli-
cation continue
bijective f
de E sur F. Un espacepolonais éparpillé
étanten
particulier
lusinien tout borélien B de E est un sous-espace lusinien de Edonc f(B)
est un borélien de F[2].
Sur la tribu borélienne de
E, f étant bijective
on peut poserP(B)
=P’ [ f (B)].
La
probabilité
P estparfaite (remarque
3précédente)
et pour tout borélien-A de F on aP[ f-1(A)]
=P’ { f [ f-1(A)] ~
=P’(A).
Laprobabilité
P’ est doncimage
de P parl’application
mesurablef
et P étantparfaite
P’ estparfaite.
D’autre part la tribu borélienne de F est de type dénombrable
puisque f
est
bijective
et bimesurable. Laprobabilité
P’ est donccompacte.
5-1. THÉORÈME DE KOLMOGOROV. 2014 Soit une famille de
probabilités
n
définies sur les
produits
finis d’une famillequel-
conque
{ ( s2t, R } d’espaces
mesurables et telle que, siT2
sont deux sous-ensembles finis de T la restriction de
PTt
àQ9 At
vautPT1.
Ti
Si pour tout t E T la
probabilité
P estparfaite,
il existe uneprobabilité unique
surl’espace produit At) qui prolonge
chacune desproba-
bilités
Pt1...
tn.Démonstration. - Dans le cas où les
probabilités
Pt sont compactes,ce théorème se trouve dans
[6].
On se ramène facilement à ce cas en utilisant lapropriété
desprobabilités parfaites rappelée
dans la remarque 3-3 eten remarquant que
la réunion étant
prise lorsque
ll3t parcourt les sous-tribus de type dénom- brable deAt
et S lesparties
dénombrables de T.Cette
égalité qui
nous a étésuggérée
par M. J. Neveu résulte du fait que le deuxième membre est une tribu contenant lespavés
mesurables et contenue dans(~~.
On en déduit immédiatement que toute sous-tribuT
de type dénombrable de
(~) At
est contenue dans unproduit ~
~3S où S estT S
une
partie
dénombrable de T et93s
une sous-tribu de type dénombrablede As.
Remarque
1. - Il résulte de la démonstrationprécédente
que laproba-
bilité obtenue sur
l’espace produit
estparfaite,
cequi généralise
le résultat deRyll-Nardzewski
dans[7].
Remarque
2. - Du théorèmeprécédent
et de la remarque 2-2-1 on déduit immédiatement que le théorème deKolmogorov
s’énonce aussi pour la familleBt, P;)
oùBt
est une sous-tribuquelconque
deAt
etP;
la restric- tion de Pt àBt.
BIBLIOGRAPHIE
[1] BLACKWELL D., Proceedings of the 3rd Berkeley Symposium of mathematical statistics and probability. Vol. II, 1956, p. 1-6.
[2] BOURBAKI N., Top. Gen., Chap. 9, § 6, n° 4 (il est à remarquer que les résultats de ce
paragraphe
restent valables si l’on supprime l’hypothèse de métrisa-bilité).
[3] MARCZEWSKI E., On compact measures. Fund. Mat., t. 40, 1953, p. 113-124.
[4] MARCZEWSKI E. et RYLL-NARDZEWSKI C., Projections in abstract sets. Fund.
Mat., t. 40, 1953, p. 160-164.
[5] MARCZEWSKI E. et RYLL-NARDZEWSKI C., Remarks on the compactness and
non direct products of measures. Fund. Mat., t. 40, 1953, p. 165-170.
[6] NEVEU J., Bases mathématiques du calcul des probabilités, Masson, Paris, 1964,
p. 78 et 79.
[7] RYLL-NARDZEWSKI C., On quasi compact measures. Fund. Mat., t. 40, 1953,
p. 125-130.
[8] SASONOV V. V., Sur les mesures parfaites. Publications de la 6e conférence
sur la théorie des
probabilités
et des statistiques mathématiques (en russe), Vilnus, 1960.[9] SZPILRAJN E., The characteristic function of a sequence of sets and some of its
applications.
Fund. Mat., t. 31, 1938, p. 207-229.(Manuscrit reçu le 13 décembre 1965) .