LA GESTION
DES DÉCHETS
D O
Collection dirigée par Michel Serres et Nayla Farouki
PHILIPPE PICHAT
LA GESTION DES DÉCHETS
Un exposé pour comprendre Un essai pour réfléchir
DOMINOS
Flammarion
Philippe Pichat. Ingénieur et docteur ès sciences, il quitte en 1971 le secteur enviable des matériaux high-tech pour appliquer son expé- rience au « continent-déchet », largement inexploré, voire méprisé.
Un médecin attire son attention sur l'incidence de la qualité de l'eau sur la santé. Il réalise alors qu'il ne suffit pas d'épurer les eaux usées et les fumées ; il faut ensuite solidifier et stabiliser les déchets d'épu- ration pour éviter des transferts de pollution vers les ressources utili- sées pour fabriquer de l'eau potable.
Dès 1974, appuyé par quelques industriels particulièrement clair- voyants, il est à l'origine de l'introduction en Europe des techniques de solidification de déchets industriels. Il ne cesse depuis de les faire évoluer vers un meilleur rapport performances/coûts.
Créateur d'une PME spécialisée dans la gestion de l'innovation technologique, il dirige le Centre pour la Solidification-Stabilisation et le Stockage des déchets - consacré à la mise en place d'entités industrielles -, sans pour autant renoncer à ses activités scienti- fiques et d'expertise.
Ses principales publications sont : L'Innovaction, Chotard Éditeur, 1989.
Innovez plus, innovez mieux, Chotard Éditeur, 1993.
Et de nombreux articles :
«La solidification des boues au moyen de ciment », SCL, 1970.
« L'utilisation des déchets dans la fabrication du ciment et du béton », Task Force MJS, 1970.
«Pour une bonne gestion des déchets industriels », Hommes et tech- niques, février 1974.
« Le traitement ultime des boues », Andès, mars 1975.
« La réutilisation des déchets dans les travaux publics et la construc- tion », Revue des matériaux de construction, novembre 1975.
«Les problèmes de l'eau », L'Actualité chimique, novembre et décembre 1976.
« Engrais et compost - concurrence ou complémentarité », ISG Ave- nir-Anred, 1981.
« Chemical stabilization of ashes from European facilities », 7th International Conference on ash management and utilization, Arlington-VA, Etats-Unis, novembre 1994.
© Flammarion 1995 ISBN : 2-08-035247-4
Imprimé en France
La première fois qu'apparaît un mot relevant d' un vocabulaire spécialisé, explicité
dans le glossaire, il est suivi d'un *
Avant-propos
S un vieil adage populaire, « il y a de l'or dans les poubelles ». Apparemment, cet avis n'était pas partagé par ceux qui, ces dernières années, brandis- sant des pancartes représentant des têtes de mort, ont manifesté leur opposition à des projets de traitement ou de stockage des déchets. Et, en survolant l'immense décharge de New York, par exemple, on ne peut que se demander : cette région va-t-elle être com- plètement défigurée? Peut-on atteindre un point de non-retour? Quelles seront les répercussions sur la santé ? D'autres questions surgissent aussitôt. Peut-on minimiser la production de déchets ? Quelles sont les valorisations possibles ? Qu'en est-il à l'échelle mon- diale? C'est à ces interrogations que prétend répondre cet ouvrage.
Tracer une carte concise du « continent-déchet », constitué de territoires très divers, est désormais une nécessité. L'accroissement de la population, l'augmen- tation de la consommation liée aux innovations tech- nologiques, l'urbanisation envahissante provoquent, à
l'échelle du globe, une prolifération des déchets. Face à ce défi, quelle stratégie, quelle tactique appliquer ? Quels choix effectuer ?
Les réponses sont d'autant plus importantes que les enjeux d'une bonne gestion des déchets sont la qualité de l'environnement, la santé publique, l'appro- visionnement en matières premières, et aussi l'écono- mie internationale dans son ensemble, car il n'y a pas d'activité sans production de déchets.
Nos contemporains se sont trop souvent mobilisés contre des projets concernant les déchets dans leur voisinage, en particulier ceux à connotation indus- trielle. Cette attitude est en contradiction avec le fait que nous sommes tous responsables de la situation actuelle, parce que nous aussi nous produisons, à titre personnel, des quantités croissantes de déchets.
L'auteur ne peut prétendre traiter de manière exhaustive un si vaste sujet ; c'est ainsi que sont essen- tiellement abordés les pays industrialisés. La première partie de cet ouvrage étudie d'abord, à partir du cas de la France, les déchets produits par les ménages - et plus particulièrement les déchets méconnus et leur toxicité -, puis les déchets agricoles, industriels, radioactifs ou provenant des activités médicales. La seconde partie s'efforce d'expliquer pourquoi à l'échelle mondiale la situation pourrait empirer, quels sont les enjeux de la gestion des déchets et quelles mesures concrètes devraient être prises à l'échelle des individus et des collectivités.
La décharge de New York :
Apocalypse now ! Ph. © L. Psihoyos / Matrix / Cosmos.
Les déchets :
quels risques ?
Qu'est-ce qu'un déchet ?
F un peu d'étymologie. Le mot « déchet », apparu au XIV siècle, vient du verbe « déchoir », qui traduit la diminution de valeur d'une matière, d'un objet, jusqu'au point où ils deviennent inutili- sables en un lieu et en un temps donnés. De façon plus administrative, la directive européenne 91/56/EEC définit un déchet comme « toute substance que le pro- priétaire abandonne, destine à l'abandon ou se trouve dans l'obligation de se débarrasser ».
D'ores et déjà, ces définitions font apparaître deux notions sur lesquelles nous serons amenés à revenir fréquemment dans la suite de cet ouvrage : la notion de relativité d'un déchet et celle d'obligation d'élimi- nation. La qualité du déchet évolue avec le temps.
Cette perte de valeur est en effet relative : les terrils constitués à partir des déchets des mines de charbon du nord de la France sont devenus, un siècle plus tard, un remblai de qualité, apprécié pour construire des autoroutes ; des déchets d'épluchures envoyés en
décharge à New York sont dans la banlieue du Caire une nourriture donnée aux moutons...
Un déchet est également ce qui doit être éliminé.
Pourquoi ? Un déchet peut en effet présenter un dan- ger s'il est inflammable, explosif, corrosif, facilement soluble, chimiquement très réactif, comme le sodium, ou encore radioactif. Un déchet peut également être dangereux du fait qu'il crée de la pollution dans notre biosphère.
La biosphère dans laquelle nous vivons est une enveloppe mince qui abrite un système en équilibre fragile. L'humanité ne peut continuer à se développer qu'à la condition que les écosystèmes* (rivières, pâtu- rages, forêts...), constituant la biosphère, ne soient pas trop perturbés. Le rejet inconsidéré de déchets peut entraîner des conséquences graves pour la biosphère et par voie de conséquence pour l'homme, en particulier lorsque ces déchets sont des produits toxiques suscep- tibles de créer une pollution, c'est-à-dire la destruction d'un cycle biologique dans un écosystème.
Enfin, on appelle « nuisances » l'ensemble des élé- ments qui altèrent l'environnement. Un tas de déchets plastiques constitue une nuisance dans la mesure où il enlaidit le paysage. Il peut être une source de pollution s'il s'enflamme en dégageant des fumées suffocantes.
Selon le degré de traitement des déchets, on dis- tingue les déchets « primaires », qui sont produits par un particulier, par une entreprise, par une municipa- lité, et se présentent sous forme d'eaux polluées, de boues, de déchets solides, de gaz (fumées,
Facteurs de risques pour l'environnement, les déchets, en augmentation constante, envahissent notre planète.
Traitement et valorisation sont à l'ordre du jour, mais pour Philippe Pichat, ingénieur et spécialiste d'innovations technologiques liées aux déchets, beaucoup de travail reste à faire, non seulement sur le plan des collectivités, mais aussi, et peut-être plus encore, à titre individuel.
DOMINOS
Pour mettre à la portée de tous la complexité du monde, chaque DOMINOS propose deux parties : un exposé pour comprendre, un essai pour réfléchir.
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