par les formes cyclotomiques de grand degr´ e
Etienne Fouvry & Michel Waldschmidt ´
Pour chaque entier d ≥ 4, nous ´ etudions la suite des entiers positifs repr´ esent´ es par une des formes binaires cyclotomiques Φ
n(X, Y ) pour les n positifs tels que ϕ(n) ≥ d.
Le cas d = 2 a ´ et´ e ´ etudi´ e dans notre pr´ ec´ edent texte [FLW]. Notre d´ emonstration repose sur une variante d’un ´ enonc´ e de [SX] concernant les valeurs communes prises par deux formes binaires de mˆ eme degr´ e et de discriminants non nuls.
Toutes les constantes sont effectivement calculables.
1. Introduction
Rappelons ([FLW]) que la suite (Φ
n(X, Y ))
n≥1des formes cyclotomiques est d´ efinie par la formule de r´ ecurrence
X
n− Y
n= Y
k|n
Φ
k(X, Y ).
Le polynˆ ome Φ
n(X, Y ) est homog` ene de degr´ e ϕ(n) (ϕ fonction indicatrice d’Euler) et il est reli´ e au polynˆ ome cyclotomique φ
n(t) ∈ Z[t] par la formule
Φ
n(X, Y ) = Y
ϕ(n)φ
n(X/Y ).
Puisque, pour n ≥ 3, le polynˆ ome φ
n(t) n’a aucun z´ ero r´ eel, on a donc l’in´ egalit´ e Φ
n(x, y) max(|x|
ϕ(n), |y|
ϕ(n)),
uniform´ ement sur x et y r´ eels.
Pour N ≥ 2 et d entier pair, on d´ esigne par A
d(N ) le cardinal de l’ensemble des entiers 1 ≤ m ≤ N tels qu’il existe un entier n et des entiers (x, y) v´ erifiant les trois conditions
(1.1)
ϕ(n) ≥ d, Φ
n(x, y) = m, max(|x|, |y|) ≥ 2.
On s’int´ eresse au comportement asymptotique de A
d(N ) pour d fix´ e et N tendant vers l’infini. Il est alors sage d’introduire la derni` ere condition de (1.1) puisque pour tout p premier on a Φ
p(1, 1) = p et le cardinal des p ≤ N masquerait le terme principal de l’estimation qui sera donn´ ee en (1.6). Par convention, nous r´ eservons la lettre p aux nombres premiers. Enfin, si n est un entier impair, on a l’´ egalit´ e
Φ
2n(X, Y ) = Φ
n(X, −Y ).
On peut ainsi ajouter, aux conditions de (1.1), la condition de congruence
(1.2) n 6≡ 2 mod 4,
sans modifier l’´ etude de A
d(N ).
Appelons totient toute valeur prise par la fonction ϕ. La suite croissante des totients est ainsi
T := {1, 2, 4, 6, 8, 10, 12, 16, 18, 20, 22, 24, 28, 30, . . . }.
1
Cette suite contient la suite des p − 1 mais reste myst´ erieuse ` a de nombreux points de vue (on se reportera avec profit aux articles de Ford [Fo1] et [Fo2] traitant, entre autres choses, de la fonction de comptage de la suite T et du nombre de solutions ` a l’´ equation ϕ(n) = d ). Il est naturel de restreindre l’´ etude de A
d(N ) au cas o` u d est un totient pair. L’´ etude de A
2(N ) a ´ et´ e trait´ ee dans [FLW, Th´ eor` eme 1.3] o` u il est prouv´ e qu’il existe deux constantes C
2= 1, 403132 . . . et C
20= 0, 302316 . . . telles que, uniform´ ement pour N ≥ 2, on a l’´ egalit´ e
(1.3) A
2(N ) = C
2N (log N )
12− C
20N (log N )
34+ O N
(log N )
32! .
Les constantes C
2et C
20se d´ efinissent au moyen des valeurs, au point s = 1, de certaines fonctions de Dirichlet L(s, χ) o` u χ est le caract` ere de Kronecker attach´ e aux corps quadratiques de discriminants −4, −3 et 12.
Pour d totient ≥ 4, les outils de [FLW] conduisent ` a la majoration (1.4) A
d(N ) = O N
2d(log N )
1,161, (voir corollaire 4.11 et sa preuve ci–dessous).
Par rapport ` a [FLW], le pr´ esent travail innove en injectant r´ esultats et m´ ethodes de [SX] que nous d´ ecrirons au §2. Contentons–nous pour l’instant de donner notre r´ esultat principal qui am´ eliore notablement (1.4). Pour son ´ enonc´ e, nous introduisons les notations suivantes :
• si d est un totient, on note d
†le successeur imm´ ediat de d dans la suite T.
• pour d entier ≥ 3, on pose
(1.5) η
d=
2/9 + 73/(108 √
3) si d = 3, (1/2 + 9/(4 √
d))/d si 4 ≤ d ≤ 20, 1/d pour d ≥ 21.
On prouvera donc le
Th´ eor` eme 1.1. — Soit d ≥ 4 un totient. Alors, il existe une constante C
d> 0, telle que, pour tout ε > 0 et uniform´ ement pour N ≥ 2, on a l’´ egalit´ e
(1.6) A
d(N ) = C
dN
2d+ O(N
d2†) + O
ε(N
ηd+ε).
Remarque 1.2. — La formule (1.6) est d’autant plus pr´ ecise que d
†− d est grand.
Ainsi, dans le cas particulier o` u d ≥ 6, la minoration triviale d
†≥ d + 2,
r´ eduit la formule (1.6) en sa forme plus grossi` ere
A
d(N ) = C
dN
2d+ O(N
d+22).
Remarque 1.3. — Le th´ eor` eme 1.1 suppose d ≥ 4. La formule (1.3) correspond donc au cas d = 2. Mais, par la pr´ esence au d´ enominateur du facteur (log N )
12, elle diff` ere notablement de (1.6). Cette diff´ erence s’explique comme suit. Il y a trois formes cyclotomiques de degr´ e 2. Ce sont les trois formes quadratiques binaires (1.7)
Φ
3(X, Y ) = X
2+ XY + Y
2, Φ
4(X, Y ) = X
2+ Y
2, et Φ
6(X, Y ) = X
2− XY + Y
2.
Puisque Φ
6(X, −Y ) = Φ
3(X, Y ) les formes Φ
6et Φ
3repr´ esentent les mˆ emes entiers.
Mais les formes Φ
3et Φ
4` a la diff´ erence des formes cyclotomiques de degr´ e au moins 4, ont un nombre infini d’automorphismes comme d´ efinis au §4.4. Par exemple on a AutΦ
4= O(2, Q ) (le groupe des matrices orthogonales 2 × 2 ` a coefficients dans Q ).
L’objet des th´ eor` emes 1.4 et 1.6 est de compl´ eter la formule (1.6). Nous pr´ ecisons d’abord la constante C
d.
Th´ eor` eme 1.4. — Soit d ≥ 4 un totient. La constante C
dde la formule (1.6) v´ erifie l’´ egalit´ e
(1.8) C
d= X
n6≡2 mod 4 ϕ(n)=d
w
nA
Φno` u
(1.9) w
n:=
(
14
si 4 - n,
1
8
si 4 | n, et
A
Φn= Z Z
Φn(x,y)≤1
dxdy.
Voici deux exemples dans lesquels la formule (1.8) donnant la valeur de la con- stante C
dse simplifie.
1. Soit p ≥ 5 un nombre premier de Sophie Germain, c’est-` a-dire tel que le nombre
` = 2p + 1 soit premier. Alors ` est l’unique entier 6≡ 2 mod 4 tel que ϕ(`) = 2p et on a l’´ egalit´ e
C
2p= 1 4 A
Φ`.
On conjecture qu’il y a une infinit´ e de nombres premiers de Sophie Germain.
2. Supposons que d ≥ 4 est une puissance de 2, disons d = 2
k.
On d´ esigne par M l’ensemble des nombres entiers m ≥ 1 dont le d´ eveloppement binaire m = 2
a1+ 2
a2+ · · · + 2
arest tel que chacun des nombres F
ai= 2
2ai+ 1 est premier (nombre premier de Fermat). L’ensemble M contient les entiers 1, 2, 3, . . . , 31; on ne connaˆıt pas d’autre ´ el´ ement de M.
Pour chaque m ∈ M v´ erifiant m ≤ k, on d´ efinit
`
k(m) = 2
k−m+1F
a1F
a2· · · F
ar,
de sorte que ϕ(`
k(m)) = 2
k. Les entiers n 6≡ 2 mod 4 tels que ϕ(n) = d sont d’une part n = 2d, qui est multiple de 4, d’autre part les `
k(m) avec m < k, qui sont aussi multiples de 4, et enfin, si k ∈ M, `
k(k)/2 qui est impair, avec A
Φ`k(k)= A
Φ`k(k)/2. Alors
C
d=
1
8 A
Φ2d+ 1 8
X
m∈M m<k
A
Φ`k(m)si k 6∈ M, 1
8 A
Φ2d+ 1 8
X
m∈M m<k
A
Φ`k(m)+ 1
4 A
Φ`k(k)si k ∈ M, avec
A
Φ2d= Z
∞−∞
dt
(1 + t
d)
2/d= 2 d
Γ(1/d)
2Γ(2/d)
(cf. §6.1 et [SX, Corollaire 1.3 et § 5]).
Nous montrerons que l’on a
n→∞
lim A
Φn= 4.
C’est une cons´ equence de l’´ enonc´ e plus pr´ ecis suivant, concernant le domaine fon- damental cyclotomique O
nd´ efini par
O
n= {(x, y) ∈ R
2| Φ
n(x, y) ≤ 1}.
Th´ eor` eme 1.5. — Soit ε > 0. Il existe n
0= n
0(ε) tel que, pour n ≥ n
0, le domaine fondamental cyclotomique O
nd’indice n contient le carr´ e centr´ e en O de cˆ ot´ e 2 − n
−1+εet est contenu dans le carr´ e centr´ e en O de cˆ ot´ e 2 + n
−1+ε.
Enfin nous discutons de l’optimalit´ e de la formule (1.6)
Th´ eor` eme 1.6. — On adopte les notations du th´ eor` eme 1.1. Soit d ≥ 4 un entier tel que d et d + 2 soient des totients. Il existe une constante positive v
d> 0 telle que pour N suffisamment grand, on ait l’in´ egalit´ e
A
d(N ) ≥ C
dN
2d+ v
dN
d+22.
Remarque 1.7. — Il est naturel de conjecturer qu’il y a une infinit´ e de d tels que d + 2 soit aussi un totient : c’est une cons´ equence de la conjecture des nombres premiers jumeaux. Enfin, on peut tout ` a fait envisager des ´ enonc´ es analogues sous l’hypoth` ese d
†= d + ν o` u ν est un entier pair fix´ e. Cette extension n´ ecessiterait une adaptation des propri´ et´ es de confinement d´ ecrites aux §4.1, §4.2 et §4.3.
2. Valeurs prises par une forme binaire
L’objet de cette section est de d´ ecrire pr´ ecis´ ement le r´ esultat de Stewart et Xiao [SX]. Ce r´ esultat d´ eja mentionn´ e plus haut est ` a la base de notre travail. Dans toute cette section F = F(X, Y ) est un polynˆ ome homog` ene de Z[X, Y ] de degr´ e d ≥ 3.
On dit alors que F est une forme binaire de degr´ e d. Un entier m est dit repr´ esent´ e par une forme binaire F s’il existe (x, y) ∈ Z
2tel que F (x, y) = m. On d´ esigne par R
F(N ) le cardinal de l’ensemble des entiers m repr´ esent´ es par F et v´ erifiant 0 ≤ |m| ≤ N. On appelle automorphisme de F toute matrice U de Gl(2, Q )
U =
u
1u
2u
3u
4, telle que
(2.1) F (X, Y ) = F(u
1X + u
2Y, u
3X + u
4Y ).
Muni de la multiplication des matrices, l’ensemble des automorphismes de F forme un sous–groupe fini de Gl(2, Q), not´ e AutF . Il existe alors une ensemble G de dix sous–groupes finis de Gl(2, Z ) tel que que pour toute forme binaire F de degr´ e d ≥ 3, il existe T ∈ Gl(2, Q) et un unique G ∈ G v´ erifiant
AutF = T GT
−1.
L’ensemble G contient en particulier les deux groupes suivants
1. D
2, groupe di´ edral ` a quatre ´ el´ ements, engendr´ e par 0 1
1 0
et
−1 0 0 −1
, 2. D
4, groupe di´ edral ` a huit ´ el´ ements, engendr´ e par
0 1 1 0
et
0 1
−1 0
.
A partir de la d´ ` ecomposition pr´ ec´ edente, Stewart et Xiao construisent un nombre rationnel W
F(voir [SX, Theorem 1.2]) dont la d´ efinition, de nature alg´ ebrique, est longue puisqu’elle envisage les dix possibilit´ es pour G. Disons, pour m´ emoire, que W
Ftient compte des d´ eterminants des r´ eseaux de Z
2dont l’image, par certains sous–groupes de AutF , est incluse dans Z
2. En vue des applications, nous nous restreignons ` a deux cas particuliers
1. Cas o` u G = D
2. Soit Λ le sous–r´ eseau des ´ el´ ements (v, w) ∈ Z
2tels que, pour tout A ∈ AutF on ait A
v w
∈ Z
2. On pose alors
(2.2) W
F= 1
2
1 − 1
2| det(Λ)|
.
2. Cas o` u G = D
4. D’abord Λ est d´ efini comme pr´ ec´ edemment. Le groupe AutF poss` ede exactement trois sous–groupes de cardinal 4, not´ es G
1, G
2et G
3. On d´ esigne par Λ
i(1 ≤ i ≤ 3) le sous–r´ eseau des ´ el´ ements (v, w) ∈ Z
2tels que, pour tout A ∈ G
ion ait A
v w
∈ Z
2. On pose alors (2.3) W
F= 1
2
1 − 1
2| det(Λ
1)| − 1
2| det(Λ
2)| − 1
2| det(Λ
3)| + 3 4| det(Λ)|
. Notons
A
F:=
Z Z
|F(x,y)|≤1
dxdy,
l’aire de la r´ egion fondamentale associ´ ee ` a F . Enfin, pour d ≥ 4 entier pair, nous introduisons la constante β
d∗d´ efinie par
(2.4) β
∗d=
( 3/(d √
d) pour d = 4, 6, 8 1/d pour d ≥ 10.
Nous pouvons maintenant ´ enoncer le r´ esultat fondamental de [SX, Theorem 1.1].
Th´ eor` eme 2.1. — Pour tout d ≥ 3 il existe une constante β
d< 2/d ayant la propri´ et´ e suivante : Pour toute forme binaire F de degr´ e d, de discriminant non nul, pour tout ε > 0, on a, uniform´ ement pour N ≥ 2 l’´ egalit´ e
(2.5) R
F(N ) = A
FW
FN
d2+ O
F,ε(N
βd+ε).
Si, dans la formule (2.5), on se restreint aux formes binaires F de degr´ e pair d ≥ 4,
de discriminant non nul, sans facteur lin´ eaire r´ eel, on peut donner ` a β
dla valeur
β
∗d, d´ efinie en (2.4).
3. Valeurs communes ` a deux formes binaires
Aux formes binaires F
1= F
1(X
1, X
2) et F
2= F
2(X
3, X
4) on associe les deux fonctions de comptage suivantes :
1. Pour B ≥ 2, N
F1,F2(B) est le cardinal de l’ensemble n
(x
1, x
2, x
3, x
4) ∈ Z
4| max
i=1,2,3,4
|x
i| ≤ B, F
1(x
1, x
2) = F
2(x
3, x
4) o . 2. Pour N ≥ 2, R
F1,F2(N ) est le cardinal de l’ensemble
n
n | |n| ≤ N, n = F
1(x
1, x
2) = F
2(x
3, x
4), pour certains (x
1, x
2, x
3, x
4) ∈ Z
4o
. G´ en´ eralisant la d´ efinition (2.1), on dit que F
1et F
2sont isomorphes s’il existe U ∈ Gl(2, Q ) tel que
(3.1) F
1(X
1, X
2) = F
2(u
1X
1+ u
2X
2, u
3X
1+ u
4X
2).
En particulier deux formes isomorphes ont mˆ eme degr´ e. Nous prouverons au §3.1 le Th´ eor` eme 3.1. — Soient F
1et F
2deux formes non isomorphes de mˆ eme degr´ e d ≥ 3. On suppose de plus que les discriminants de F
1et de F
2sont non nuls et qu’au moins une des formes F
in’est pas divisible par une forme lin´ eaire non nulle
`
a coefficients rationnels. Alors, pour tout ε > 0 on a la majoration (3.2) N
F1,F2(B) = O(B
dηd+ε),
o` u η
dest d´ efini en (1.5).
Remarque 3.2. — La condition que l’une des formes F
1et F
2ne contient pas de facteur lin´ eaire sur Q est importante. Consid´ erons les deux formes
F
1(X
1, X
2) = X
1(X
12+ X
22) et
F
2(X
3, X
4) = X
3(X
32+ 2X
42).
Elles ne sont pas isomorphes. L’´ egalit´ e F
1(0, x
2) = F
2(0, x
4) = 0 implique l’in´ egalit´ e N
F1,F2(B) B
2, ce qui est sup´ erieur ` a la partie droite de (3.2).
Du th´ eor` eme 3.1 nous d´ eduirons le
Corollaire 3.3. — Soient F
1et F
2deux formes v´ erifiant les hypoth` eses du th´ eor` eme 3.1. On suppose de plus que les deux formes F
1et F
2sont d´ efinies positives.
Alors pour tout ε > 0 on a l’in´ egalit´ e
R
F1,F2(N ) N
ηd+ε.
D´ emonstration du corollaire 3.3. — Les hypoth` eses impliquent les in´ egalit´ es
| F
1(x
1, x
2) | max(|x
d1|, |x
d2|) et | F
2(x
3, x
4) | max(|x
d3|, |x
d4|), uniform´ ement pour x
i∈ R . Par cons´ equent, si on a
−N ≤ F
1(x
1, x
2) = F
2(x
3, x
4) ≤ N, on a alors
i=1,2,3,4
max |x
i| N
1d.
Il suffit alors de remplacer B par O(N
1d) dans la majoration (3.2).
3.1. Preuve du th´ eor` eme 3.1. — Puisque les formes F
1et F
2sont de discrimi- nants non nuls, l’hypersurface X de P
3(C) d´ efinie par l’´ equation
(3.3) X : F
1(X
1, X
2) − F
2(X
3, X
4) = 0
est lisse. Nous inspirant de [SX], nous d´ ecomposons N
F1,F2(B) en (3.4) N
F1,F2(B) = N
F(1)1,F2
(B) + N
F(2)1,F2
(B) + 1, o` u
• N
F(1)1,F2
(B ) est le nombre de quadruplets non nuls (x
1, x
2, x
3, x
4) de Z
4, v´ erifiant max |x
i| ≤ B , et tels que le point projectif associ´ e (x
1: x
2: x
3: x
4) appartienne ` a X , mais ne se situe pas sur une droite (complexe) contenue dans X ,
• N
F(2)1,F2
(B ) est le nombre de quadruplets non nuls (x
1, x
2, x
3, x
4) de Z
4, v´ erifiant max |x
i| ≤ B , et tels que le point projectif associ´ e (x
1: x
2: x
3: x
4) appartienne ` a une droite (complexe) contenue dans X.
Nous prouverons d’abord la
Proposition 3.4. — Pour tout ε > 0 et uniform´ ement pour B ≥ 1, on a l’in´ egalit´ e
N
F(1)1,F2
(B) B
dηd+ε. Puis la
Proposition 3.5. — Uniform´ ement pour B ≥ 1, on a l’in´ egalit´ e N
F(2)1,F2
(B) B.
En combinant ces deux propositions et la formule (3.4) on compl` ete la preuve du th´ eor` eme 3.1.
3.1.1. Preuve de la Proposition 3.4. — Si x = (x
1: x
2: x
3, : x
4) est un point de P
3( Q ), on d´ esigne par h(x) la hauteur de x, c’est–` a–dire le maximum des |x
i|, si (x
1, x
2, x
3, x
4) est un quadruplet d’entiers premiers entre eux dans leur ensemble, repr´ esentant x. Notons aussi N
(1)( X , B) le cardinal de l’ensemble des x de P
3( Q ) appartenant ` a X mais non situ´ es sur une droite contenue dans X et de hauteur h(x) ≤ B. En d´ ecomposant suivant la valeur δ du pgcd de (x
1, x
2, x
3, x
4) on d´ eduit l’in´ egalit´ e
(3.5) N
F(1)1,F2
(B) ≤ X
1≤δ≤B
N
(1)( X , B/δ).
Un r´ esultat de Salberger [Sa, Theorem 0.1], donne l’in´ egalit´ e N
(1)( Y , B) B
dηd+εvalable pour toute surface projective Y ⊂ P
n( Q ), g´ eom´ etriquement int` egre de degr´ e d > 2. La surface X v´ erifie cette propri´ et´ e. En effet supposons qu’il existe des polynˆ omes A et B de degr´ e ≥ 1 tels que
F
1(X
1, X
2) − F
2(X
3, X
4) = A(X
1, X
2, X
3, X
4)B(X
1, X
2, X
3, X
4).
Calculant les d´ eriv´ ees partielles par rapport ` a chacun des X
i, on voit que tout point (x
1: x
2: x
3: x
4) de P
3( C ) tel que
A(x
1, x
2, x
3, x
4) = B(x
1, x
2, x
3, x
4) = 0,
est un point singulier de X . Puisqu’on est dans P
3( C ), les deux surfaces d’´ equation A = 0 et B = 0 ont une intersection non vide. Ainsi X serait singuli` ere, ce qui contredit la propri´ et´ e de lissit´ e ´ enonc´ ee au §3.1.
Il suffit de sommer sur δ < B l’in´ egalit´ e (3.5) pour compl´ eter la preuve de la Proposition 3.4.
3.1.2. Droites contenues dans X . — Afin de d´ emontrer la Proposition 3.5, nous donnons des conditions n´ ecessaires pour qu’une droite projective de P
3(C) apparti- enne ` a X en exploitant le fait que dans l’´ equation (3.3) d´ efinissant X , les paires de variables (X
1, X
2) et (X
3, X
4) sont s´ epar´ ees.
Lemme 3.6. — Sous les hypoth` eses du th´ eor` eme 3.1, si une droite projective de P
3( C ) appartient ` a l’hypersurface X d´ efinie par (3.3) et contient un point rationnel, elle est d´ efinie par des ´ equations
(3.6)
( X
1= u
1X
3+ u
2X
4X
2= u
3X
3+ u
4X
4, o` u l’un au moins des u
iest irrationnel.
D´ emonstration. — Pour a = (a
1, a
2, a
3, a
4) et b = (b
1, b
2, b
3, b
4) deux quadruplets non nuls et non proportionnels de nombres complexes, on suppose que la droite projective D
a,bde P
3(C) d´ efinie par les ´ equations
(3.7) D
a,b:
( a
1X
1+ a
2X
2+ a
3X
3+ a
4X
4= 0 b
1X
1+ b
2X
2+ b
3X
3+ b
4X
4= 0 est contenue dans X et contient un point rationnel.
• Si a
1= a
2= 0 et a
36= 0, on substitue X
3= −(a
4/a
3)X
4dans la deuxi` eme
´
equation de (3.7) qui devient ainsi
(3.8) b
1X
1+ b
2X
2= a
4b
3− a
3b
4a
3X
4.
Si a
4b
3− a
3b
4= 0, cela signifie que X contient une droite de la forme (3.9)
( a
3X
3+ a
4X
4= 0 b
1X
1+ b
2X
2= 0.
Exploitant la forme particuli` ere de l’´ equation (3.3) d´ efinissant X , on d´ eduit b
1X
1+ b
2X
2divise F
1(X
1, X
2) et a
3X
3+ a
4X
4divise F
2(X
3, X
4).
Compte tenu de l’hypoth` ese sur les F
i, ces conditions de divisibilit´ e contredisent l’hypoth` ese qu’il y a un point rationnel sur la droite d´ efinie par (3.9).
Si a
4b
3−a
3b
46= 0, on remplace X
3par la valeur donn´ ee par la premi` ere ´ equation de (3.7) et X
4par la valeur donn´ ee en (3.8) conduisant ` a
F
1(X
1, X
2) = F
2(X
3, X
4) = (a
4b
3− a
3b
4)
−dF
2(−a
4, a
3)(b
1X
1+ b
2X
2)
d, ce qui contredit l’hypoth` ese que le discriminant de F
1est non nul.
• Si a
1= a
2= 0 et a
46= 0, par le mˆ eme type de raisonnement suivi pr´ ec´ edemment, on est ramen´ e au cas o` u (a
1, a
2) 6= (0, 0).
• Par sym´ etrie, on suit le mˆ eme raisonnement dans les trois cas suivants : si a
3=
a
4= 0, si b
1= b
2= 0 ou si b
3= b
4= 0.
• En conclusion de la discussion pr´ ec´ edente, nous avons prouv´ e que si D
a,b, contenue dans X, poss` ede un point rationnel, on a n´ ecessairement
(3.10) (a
1, a
2), (a
3, a
4), (b
1, b
2), et (b
3, b
4) sont 6= (0, 0).
• Supposons maintenant a
1b
2= a
2b
1et a
16= 0. Multipliant la premi` ere ´ equation de (3.7) par −b
1et la seconde par a
1, on obtient que dans ce cas le syst` eme d’´ equations d´ efinissant D
a,best ´ equivalent ` a
( a
1X
1+ a
2X
2+ a
3X
3+ a
4X
4= 0 (a
1b
3− a
3b
1)X
3+ (a
1b
4− a
4b
1)X
4= 0.
Or (3.10) a ´ elimin´ e le cas (b
1, b
2) = (0, 0). On en d´ eduit que l’hypoth` ese a
1b
2= a
2b
1et a
16= 0 est impossible.
• Supposons maintenant a
1b
2= a
2b
1et a
26= 0. Mais ce cas est impossible par un raisonnement identique. Puisque par (3.10) le cas (a
1, a
2) = (0, 0) est interdit, on est ramen´ e ` a supposer que a
1b
26= a
2b
1.
• Pour finir on suppose donc que a
1b
26= a
2b
1. Par r´ esolution d’un syst` eme (2,2) en les inconnues X
1et X
2et de d´ eterminant non nul, on voit que le syst` eme (3.7) est
´
equivalent ` a
( X
1= u
1X
3+ u
2X
4X
2= u
3X
3+ u
4X
4, o` u les u
isont des nombres complexes. On a donc l’´ egalit´ e (3.11) F
2(X
3, X
4) = F
1(u
1X
3+ u
2X
4, u
3X
3+ u
4X
4).
Si det
u
1u
2u
3u
4= 0, cela signifie que par exemple, on a, pour un certain λ complexe, l’´ egalit´ e u
1X
3+ u
2X
4= λ(u
3X
3+ u
4X
4) donc en reportant, on d´ eduit l’´ egalit´ e
F
2(X
3, X
4) = (u
3X
3+ u
4X
4)
dF
1(λ, 1), ce qui contredit l’hypoth` ese de non nullit´ e du discriminant de F
2.
Si det
u
1u
2u
3u
46= 0, par (3.11) on voit que les formes F
1et F
2sont isomorphes par un changement de variables lin´ eaires ` a coefficients complexes. L’hypoth` ese de non isomorphisme, sur Gl(2, Q), de F
1et F
2implique que parmi les u
il’un au moins est irrationnel.
Ceci termine la d´ emonstration du lemme 3.6.
3.1.3. Preuve de la proposition 3.5. — On sait que pour tout d ≥ 3, il existe un entier `(d), tel que, toute surface lisse de P
3(C) de degr´ e d contient au plus `(d) droites. Pour des ´ etudes fines concernant cette constante `(d) on se reportera ` a [Se]
et ` a [BS] par exemple.
Grˆ ace au lemme 3.6, on est ramen´ e ` a d´ enombrer l’ensemble des quadruplets d’entiers (x
1, . . . , x
4) avec max |x
i| ≤ B, v´ erifiant
( x
1= u
1x
3+ u
2x
4x
2= u
3x
3+ u
4x
4,
sachant que l’un au moins des u
iest irrationnel. Disons que c’est u
1.
– si dim
Q(1, u
1, u
2) = 3, la seule solution en (x
1, x
3, x
4) ∈ Z
3de l’´ equation
x
1= u
1x
3+ u
2x
4est (0, 0, 0),
– si dim
Q(1, u
1, u
2) = 2, on exprime u
2= a + bu
1, avec a et b rationnels et on est ramen´ e ` a l’´ equation
x
1− ax
4= (x
3+ bx
4)u
1,
qui implique x
1−ax
4= x
3+bx
4= 0. Donc le syst` eme (3.6) admet O(B) quadruplets (x
1, . . . , x
4) solutions de hauteur inf´ erieure ` a B.
Ceci termine la preuve de la proposition 3.5.
4. Quelques propri´ et´ es des formes cyclotomiques
Dans ce paragraphe nous prouvons quelques r´ esultats g´ en´ eraux concernant les formes cyclotomiques Φ
n(X, Y ) dont le degr´ e est d = ϕ(n). Ces divers r´ esultats seront n´ ecessaires lors de la preuve des th´ eor` emes 1.1, 1.4, 1.5 et 1.6. En parti- culier les r´ esultats des sections §4.1, §4.2 et §4.3. ne seront utilis´ es que pour la preuve du Th´ eor` eme 1.6. Nous rappelons d’abord plusieurs formules classiques sur les Φ
n(X, Y ). Ces formules ne sont que la version homog` ene des formules correspon- dantes sur les φ
n(x).
Nous rappelons certaines notations et conventions : si n ≥ 1 est un entier, on d´ esigne par µ(n) la valeur de la fonction de M¨ obius, ω(n) est le nombre de facteurs premiers distincts de n, κ(n) est le radical de n, c’est–` a–dire le produit de tous les premiers divisant n, d(n) le nombre de diviseurs. On dit que deux nombres rationnels u et v sont congrus modulo le nombre premier p si on a u−v ∈ p Z
p, o` u Z
pest l’anneau des entiers p–adiques.
Si n ≥ 2 est factoris´ e en n := p
rm, avec p - m et r ≥ 1, la forme Φ
nv´ erifie les identit´ es suivantes
Φ
n(X, Y ) = Y
d|n
(X
d− Y
d)
µ(n/d),
(4.1) Φ
n(X, Y ) = Φ
m(X
pr, Y
pr) Φ
m(X
pr−1, Y
pr−1) , et
Φ
n(X, Y ) = Φ
pm(X
pr−1, Y
pr−1).
Par it´ eration de cette derni` ere formule, on parvient ` a (4.2) Φ
n(X, Y ) = Φ
κ(n)(X
n/κ(n), Y
n/κ(n)).
Nous rappelons quelques valeurs de φ
nen certains points :
(4.3) φ
n(1) =
0 si n = 1,
p si n = p
k(k ≥ 1), 1 si ω(n) ≥ 2, et
(4.4) φ
n(−1) =
−2 si n = 1,
φ
n/2(1) si n ≥ 2, 2kn,
1 si n ≥ 3, 2 - n,
1 si n ≥ 4, 4|n, n 6= 2
`,
2 si n ≥ 4, n = 2
`.
Pour majorer les coefficients de Φ
nnous utiliserons le r´ esultat suivant, dˆ u ` a P. Bate- man [Ba, p.1181]. Quand P est un polynˆ ome, nous d´ esignons par L(P ) (longueur de P ) la somme des valeurs absolues des coefficients de P .
Lemme 4.1. — Pour tout n ≥ 1, on a L(φ
n) ≤ n
d(n)/2.
Les majorations classiques des fonctions arithm´ etiques d(n) et ϕ(n) impliquent alors que pour tout ε > 0 et pour n suffisamment grand, on a
(4.5) ϕ(n)L(φ
n) ≤ e
nε.
4.1. Propri´ et´ es de confinement modulo p. — Nous prouvons que pour tout a et b entiers Φ
n(a, b) est, pour tout m divisant n, restreint ` a quelques classes de congruence modulo m.
Proposition 4.2. — Soient n ≥ 2 et p un premier divisant n. Alors pour tout a et b de Z on a
(4.6) Φ
n(a, b) ≡ 0, 1 mod p.
D´ emonstration. — Remarquons d’abord que lorsque p = 2 ou lorsque b ≡ 0 mod p, l’´ enonc´ e pr´ ec´ edent est trivial. Enfin on peut se restreindre au cas
n sans facteur carr´ e.
C’est une cons´ equence de l’inclusion des images Φ
n( Z , Z ) ⊂ Φ
κ(n)( Z , Z ), qui se d´ eduit directement de (4.2). Commen¸ cons par le cas o` u n est un nombre premier. On a
Lemme 4.3. — Soient p ≥ 3 un nombre premier, a et b deux entiers. Alors on a les congruences
1. Si a 6≡ b mod p, on a
Φ
p(a, b) ≡ 1 mod p, 2. Si a ≡ b mod p, on a
Φ
p(a, b) ≡ pa
p−1mod p
2.
D´ emonstration du lemme 4.3. — C’est une cons´ equence de la formule a
p≡ a mod p. Dans le premier cas, on ´ ecrit
Φ
p(a, b) = (a
p− b
p)/(a − b) ≡ (a − b)/(a − b) ≡ 1 mod p.
Dans le second cas, on ´ ecrit
Φ
p(a, b) = a
p−1+ a
p−2b + · · · + ab
p−2+ b
p−1,
on pose b = a + pt avec t entier et on d´ eveloppe suivant la formule du binˆ ome pour obtenir le r´ esultat.
Poursuivons la d´ emonstration de la proposition 4.2. On suppose donc que n est sans facteur carr´ e et on pose
n = pm = pp
2· · · p
t. Par it´ eration de (4.1), on a l’´ egalit´ e
(4.7) Φ
n(a, b) = Y
m1|m
Φ
p(a
m1, b
m1)
µ(m/m1).
Ceci nous am` ene ` a d´ ecomposer le produit ` a droite de l’´ egalit´ e (4.7) en Φ
n(a, b) = Φ
†n(a, b) ˜ Φ
n(a, b),
o` u Φ
†ncorrespond ` a la condition a
m16≡ b
m1mod p et ˜ Φ le produit compl´ ementaire.
Par le lemme 4.3, on a Φ
p(a
m1, b
m1) ≡ 1 mod p si et seulement si a
m16≡ b
m1mod p. Ceci implique que Φ
†n(a, b) est un nombre rationnel qui est produit et quotient d’entiers congrus ` a 1 mod p. C’est donc un nombre rationnel congru ` a 1 mod p.
Par d´ efinition, on a l’´ egalit´ e
(4.8) Φ ˜
n(a, b) := Y
m1|m (a/b)m1≡1 modp
Φ
p(a
m1, b
m1)
µ(m/m1).
D’apr` es ce qui pr´ ec` ede, pour compl´ eter la preuve de la congruence (4.6), il reste ` a prouver que ˜ Φ
n(a, b) est un rationnel congru ` a 0 ou 1 mod p.
Soit ` l’ordre de (a/b) modulo p. Ainsi ` divise p − 1 et le produit apparaissant dans (4.8) est sur les m
1tels que
` divise m
1et m
1divise m.
Ce produit est vide lorsque ` - m; c’est par exemple le cas si a 6≡ b mod p et si (p − 1, m) = 1. On suppose donc que ` | m. Quitte ` a r´ eindicer les p
j, on peut supposer que ` est de la forme
` = p
2· · · p
r,
avec 1 ≤ r ≤ t, avec la convention que ` = 1 si r = 1. Posant alors h = p
r+1· · · p
t= m/` et m
1= `m
2, on r´ ecrit la d´ efinition (4.8) comme
(4.9) Φ ˜
n(a, b) := Y
m2|h
Φ
p(a
`m2, b
`m2)
µ(h/m2). On articule la discussion suivant plusieurs cas.
• si h = 1, le produit apparaissant dans (4.9) ne contient qu’un seul terme
`
a savoir Φ
p(a
`, b
`). Il est congru ` a 0 mod p, d’apr` es le lemme 4.3.2.
• si h 6= 1, en utilisant la formule de M¨ obius, on ´ ecrit (4.9) sous la forme Φ ˜
n(a, b) = Y
m2|h
Φ
p(a
`m2, b
`m2) p
µ(h/m2),
o` u maintenant chaque fraction du produit est congrue ` a a
`m2(p−1)modulo p (lemme 4.3.2). Ainsi chacune de ces fractions est un entier premier ` a p. Le nombre rationnel Φ ˜
n(a, b) v´ erifie donc
Φ ˜
n(a, b) ≡ a
`m2(p−1)P
m2|hµ(h/m2)
≡ 1 mod p,
en utilisant de nouveau la formule de M¨ obius. Ceci termine la preuve de la proposi- tion 4.2.
4.2. Propri´ et´ es de confinement modulo 9. — Par la proposition 4.2, on sait
que si 3 | n, on a Φ
n(a, b) ≡ 0, 1 mod 3. Ce n’est pas assez satisfaisant pour la future
application. Nous utiliserons une version plus pr´ ecise avec la
Proposition 4.4. — Soit k ≥ 2. Alors pour tout a et tout b entiers, on a la congruence
Φ
3k(a, b) ≡ 0, 1, 3 mod 9.
D´ emonstration. — Les cubes modulo 9 forment l’ensemble Q(9) := {0, 1, −1}.
Or
Φ
3(u, v) = u
2+ uv + v
2.
Si u et v parcourent l’ensemble Q(9) on voit que Φ
3(u, v) parcourt l’ensemble E = {0, 1, 3 mod 9}.
Pour terminer la preuve de la proposition, il suffit d’utiliser le fait que Φ
3k(a, b) = Φ
3(a
3k−1, b
3k−1),
cons´ equence de (4.2).
4.3. Propri´ et´ es de confinement modulo 4. — Nous envisageons maintenant le cas o` u n est pair. Par la remarque (1.2), on peut mˆ eme supposer que 4 | n et on
´
ecrit que 2
kkn avec k ≥ 2.
1. Soit a pair et b impair. Par application it´ er´ ee de (4.1), on voit Φ
n(X, Y ) est produit et quotient de polynˆ omes de la forme Φ
2k(X
α, Y
α) o` u α et β sont des nombres impairs. Puisque Φ
2k(X, Y ) = X
2k−1+ Y
2k−1et k ≥ 2, on d´ eduit que Φ
2k(a
α, b
β) ≡ 0 + 1 ≡ 1 mod 4 et, par cons´ equent, que
Φ
n(a, b) ≡ 1 mod 4.
2. Soit a et b pairs. Puisque Φ
n(X, Y ) est somme de monˆ omes de la forme c
µ,νX
µY
νavec µ + ν = ϕ(n) et c
µ,νentier, on voit que 4 | c
µ,νa
µb
ν, d’o` u
Φ
n(a, b) ≡ 0 mod 4.
3. Supposons a ≡ b ≡ 1 mod 4. On ´ ecrit Φ
n(a, b) = b
ϕ(n)φ
n(a/b) ≡ φ
n(1) mod 4.
Et, d’apr` es (4.3), ceci vaut 2 mod 4 si n = 2
kavec k ≥ 2 ou 1 mod 4 si n 6= 2
k. D’o` u
Φ
n(a, b) ≡ 1, 2 mod 4.
4. Supposons a ≡ −b ≡ 1 mod 4. On ´ ecrit Φ
n(a, b) = b
ϕ(n)φ
n(a/b) ≡ φ
n(−1) mod 4. Il suffit d’appliquer les deux derni` eres lignes de (4.4) pour conclure que l’on a, dans ce cas
Φ
n(a, b) ≡ 1, 2 mod 4.
5. Supposons a ≡ −1 mod 4. On utilise la relation Φ
n(a, b) = Φ
n(−a, −b) valable pour n ≥ 3.
Nous rassemblons ces divers r´ esultats sous la forme de la
Proposition 4.5. — Soit n un entier divisible par 4. Alors pour tout a et tout b entiers, on a la congruence
Φ
n(a, b) ≡ 0, 1, 2 mod 4.
4.4. Automorphismes des formes cyclotomiques. — Soit Φ
n(X, Y ) une forme cyclotomique de degr´ e d = ϕ(n). Par la d´ efinition (2.1), rechercher les automorphismes de Φ
nconsiste ` a rechercher les matrices U de Gl(2, Q )
U =
u
1u
2u
3u
4, telles que
(4.10) Φ
n(X, Y ) = Φ
n(u
1X + u
2Y, u
3X + u
4Y ).
Cette ´ egalit´ e formelle entraˆıne que l’ensemble U
ndes racines primitives n–i` emes de l’unit´ e est stable par l’application H de C b dans C b d´ efinie par
(4.11) z 7→ H(z) := u
1z + u
2u
3z + u
4.
Si U
na au moins trois ´ el´ ements (c’est–` a–dire n ≥ 5 et n 6= 6), il y a un cercle et un seul contenant U
n. Il s’agit du cercle S
1et celui–ci est stable par H. Les transformations de C b de la forme (az +b)/(cz+d) (avec (a, b, c, d) ∈ C
4et ad−bc 6= 0) laissant S
1globalement invariant sont connues : il s’agit des transformations z 7→ ρz et z 7→ ρ/z avec ρ nombre complexe de module 1. Ainsi la fonction H d´ efinie en (4.11) a n´ ecessairement une des quatre formes
H(z) = z, −z, 1/z, −1/z,
puisque les u
isont des rationnels. Enfin pour tout n ≥ 1, on a l’´ equivalence ξ ∈ U
n⇐⇒ 1/ξ ∈ U
net seulement pour n ≡ 0 mod 4, l’´ equivalence
ξ ∈ U
n⇐⇒ −ξ ∈ U
n. Nous voyons donc que si
1. si n ≡ 0 mod 4, et n ≥ 8, on a
uu1z+u23z+u4
= z, −z,
1z, −
1z, 2. si n 6≡ 0 mod 4, n ≥ 5 et n 6= 6, on a
uu1z+u23z+u4
= z, −z.
Revenant ` a la d´ efinition (4.10) et rappelant que Φ
nest une forme homog` ene de degr´ e ϕ(n) on obtient les matrices U :
1. Pour n ≡ 0 mod 4, et n ≥ 8, on a U =
±1 0 0 ±1
,
±1 0 0 ∓1
,
0 ±1
±1 0
,
0 ±1
∓1 0
2. Pour n 6≡ 0 mod 4, n ≥ 5 et n 6= 6, on a U =
±1 0
0 ±1
,
0 ±1
±1 0
.
Les petites valeurs de n (celles v´ erifiant ϕ(n) = 2) se font directement grˆ ace aux formes explicites donn´ ees en (1.7). En notant D
kle groupe di´ edral ` a 2k ´ el´ ements, on obtient la
Proposition 4.6. — Soit n ≥ 3 un entier. Alors le groupe des automorphismes AutΦ
nde Φ
n(X, Y ) est
Aut Φ
n= (
D
4si 4 divise n,
D
2dans le cas contraire.
Nous en d´ eduisons:
Corollaire 4.7. — Pour n ≥ 3, on a W
Φn= w
no` u w
nest d´ efini par (1.9).
D´ emonstration. — Les groupes d’automorphismes des formes cyclotomiques sont constitu´ es de matrices ` a coefficients entiers. Ainsi, dans les d´ efinitions (2.2) et (2.3), quand F est une forme cyclotomique, les r´ eseaux Λ et Λ
isont ´ egaux ` a Z
2, leur d´ eterminant vaut 1.
4.5. Isomorphismes entre formes cyclotomiques. — Rappelons que la d´ efinition d’isomorphisme entre deux formes binaires a ´ et´ e donn´ ee en (3.1). La proposition suivante caract´ erise les formes binaires cyclotomiques isomorphes.
Proposition 4.8. — Soient n
1et n
2deux entiers positifs avec n
1< n
2. Les conditions suivantes sont ´ equivalentes.
(1) On a ϕ(n
1) = ϕ(n
2) et les deux formes binaires cyclotomiques Φ
n1et Φ
n2sont isomorphes.
(2) Les deux formes binaires cyclotomiques Φ
n1et Φ
n2repr´ esentent les mˆ emes en- tiers.
(3) n
1est impair et n
2= 2n
1.
Les formes binaires cyclotomiques Φ
n(X, Y ) avec ϕ(n) = d et n non congru
`
a 2 modulo 4 forment donc un syst` eme complet de repr´ esentants des classes d’isomorphisme des formes binaires cyclotomiques de degr´ e d.
La d´ emonstration de la proposition 4.8 utilisera le lemme suivant:
Lemme 4.9. — Soit n un entier positif. Le groupe de torsion du corps cyclo- tomique Q (ζ
n) est cyclique, d’ordre n si n est pair, d’ordre 2n si n est impair.
D´ emonstration du lemme 4.9. — Le groupe de torsion du corps cyclotomique Q (ζ
n) est cyclique, d’ordre multiple de n. S’il est d’ordre sup´ erieur ` a n, alors il contient une racine primitive de l’unit´ e d’ordre pn, avec p premier, dont le degr´ e est ϕ(pn).
On en d´ eduit ϕ(pn) = ϕ(n), d’o` u il r´ esulte que p = 2 et que n est impair.
D´ emonstration de la proposition 4.8. —
(1) = ⇒ (3) Supposons Φ
n1et Φ
n2isomorphes avec n
1< n
2. Il existe une matrice u
1u
2u
3u
4∈ GL
2(Q) telle que
ζ
n1= u
1ζ
n2+ u
2u
3ζ
n2+ u
4·
On en d´ eduit que les corps cyclotomiques Q (ζ
n1) et Q (ζ
n2) co¨ıncident, et le lemme 4.9 donne le r´ esultat.
(3) = ⇒ (2). Si n
1est impair et n
2= 2n
1, alors φ
n2(t) = φ
n1(−t), donc les deux formes binaires cyclotomiques Φ
n1et Φ
n2repr´ esentent les mˆ emes entiers.
(2) = ⇒ (1). En utilisant les notations du th´ eor` eme 2.1 et du corollaire 3.3, nous avons, par hypoth` ese les ´ egalit´ es
(4.12) R
Φ1(N ) = R
Φ2(N ) = R
Φ1,Φ2(N ),
pour tout N ≥ 1. Par le th´ eor` eme 2.1 la premi` ere ´ egalit´ e de (4.12) implique ϕ(n
1) = ϕ(n
2). Enfin si Φ
n1et Φ
n2n’´ etaient pas isomorphes, le corollaire 3.3 entraˆınerait que la deuxi` eme ´ egalit´ e de (4.12) serait impossible pour N suffisamment grand.
4.6. R´ esultats auxiliaires de comptage. — Notre d´ emonstration du th´ eor` eme 1.1 au §5 utilisera l’´ enonc´ e suivant [FLW, Theorem 1.1].
Th´ eor` eme 4.10. — Soit m un entier positif et soient n, x, y des entiers ra- tionnels v´ erifiant n ≥ 3, max{|x|, |y|} ≥ 2 et Φ
n(x, y) = m. Alors
max{|x|, |y|} ≤ 2
√ 3 m
ϕ(n)1et par cons´ equent, ϕ(n) ≤ 2
log 3 log m.
Nous en d´ eduisons le
Corollaire 4.11. — Pour d ≥ 2 et N ≥ 1, on a la majoration A
d(N ) ≤ 29N
2d(log N )
1.161.
D´ emonstration du corollaire 4.11. — D’apr` es le th´ eor` eme 4.10, les conditions ϕ(n) ≥ d et Φ
n(x, y) ≤ N impliquent max{|x|, |y|} ≤
√23
N
1d. Notons que A
d(N ) = 0 pour N = 1 et N = 2. La condition max{|x|, |y|} ≥ 2 permet d’obtenir ϕ(n) ≤
log 32log N , donc n ≤ 5.383(log N )
1.161(formule (1.1) de [FLW]). Il en r´ esulte que le nombre de triplets (n, x, y) tels que ϕ(n) ≥ d et Φ
n(x, y) ≤ N est major´ e par
16
3 5.383N
2d(log N )
1.161.
5. D´ emonstration des th´ eor` emes 1.1 et 1.4
Pour n entier avec ϕ(n) ≥ 4 et N ≥ 1, on d´ esigne par B
n(N ) l’ensemble (5.1) B
n(N ) :=
m ≤ N | m = Φ
n(a, b) avec max(|a|, |b|) ≥ 2 . Par le th´ eor` eme 4.10, on a l’implication
B
n(N ) 6= ∅ ⇒ ϕ(n) log N, soit encore
B
n(N ) 6= ∅ ⇒ n log N log log log N,
uniform´ ement pour N > 10. Ainsi, par la d´ efinition de A
d(N) et par la restriction (1.2), nous avons l’´ egalit´ e
(5.2) A
d(N ) =
[
n6≡2 mod 4 ϕ(n)≥d
B
n(N ) ,
o` u cette r´ eunion porte sur un nombre fini de n.
Le terme principal dans l’estimation du cardinal de A
d(N ) sera X
n6≡2 mod 4 ϕ(n)=d
B
n(N )
.
L’´ egalit´ e
B
n(N )
= R
Φn(N ) permet d’appliquer le th´ eor` eme 2.1 ` a chacun des termes de cette somme:
B
n(N )
= A
ΦnW
ΦnN
2d+ O
Φn,ε(N
β∗d+ε).
Grˆ ace au corollaire 4.7, on a W
Φn= w
n. On obtient
(5.3) X
n6≡2 mod 4 ϕ(n)=d
B
n(N )
= C
dN
2d+ O(N
β∗d+ε) avec la valeur de C
dannonc´ ee dans la formule (1.8).
5.1. Minoration de A
d(N ). — En restreignant le nombre de termes dans l’´ egalit´ e (5.2), on a la minoration
A
d(N ) ≥
[
n6≡2 mod 4 ϕ(n)=d
B
n(N )
≥ X
n6≡2 mod 4 ϕ(n)=d
B
n(N )
− X X
n1<n2
ϕ(n1)=ϕ(n2)=d n1, n26≡2 mod 4
B
n1(N ) ∩ B
n2(N ) . (5.4)
La premi` ere partie du membre de droite de (5.4) est trait´ ee dans (5.3).
Pour la seconde partie, on ´ ecrit l’´ egalit´ e
B
n1(N ) ∩ B
n2(N )
= R
Φn1,Φn2
(N ). Par la proposition 4.8 les formes Φ
n1et Φ
n2ne sont pas isomorphes. Le corollaire 3.3 donne ainsi la majoration
B
n1(N ) ∩ B
n2(N )
= O(N
ηd+ε).
En conclusion, nous avons prouv´ e la minoration suivante de A
d(N ):
A
d(N ) ≥ C
dN
2d− O(N
βd∗+ε) − O(N
ηd+ε), qui se simplifie en
(5.5) A
d(N ) ≥ C
dN
2d− O(N
ηd+ε),
puisque, d’apr` es (1.5) et (2.4), on a pour tout d ≥ 4 pair, l’in´ egalit´ e
(5.6) η
d≥ β
d∗.
5.2. Majoration de A
d(N ). — On ´ ecrit maintenant A
d(N ) ≤
[
n6≡2 mod 4 ϕ(n)=d
B
n(N )
+ A
d†(N ), dont on d´ eduit la majoration
(5.7) A
d(N ) ≤ X
n6≡2 mod 4 ϕ(n)=d
B
n(N )
+ A
d†(N ).
Le premier terme de cette majoration a d´ eja ´ et´ e trait´ e en (5.3). Pour majorer A
d†(N ) on utilise le corollaire 4.11 avec d remplac´ e par d
†. Revenant en (5.7), on a donc prouv´ e la majoration
(5.8) A
d(N ) ≤ C
dN
d2+ O(N
βd∗+ε) + O N
d2†(log N )
1.161.
Cette formule appliqu´ ee en rempla¸cant d par d
†donne la majoration A
d†(N ) N
d2†,
o` u il n’y a plus de puissance de log N parasite. Reportant cette derni` ere majoration dans (5.7), l’in´ egalit´ e (5.8) est am´ elior´ ee en
(5.9) A
d(N ) ≤ C
dN
2d+ O(N
βd∗+ε) + O(N
d2†).
En combinant (5.5), (5.9) et l’in´ egalit´ e (5.6), on termine la preuve de (1.6). Les preuves des th´ eor` emes 1.1 et 1.4 sont compl` etes.
6. Preuve du th´ eor` eme 1.5
6.1. R´ egion fondamentale d’une forme binaire d´ efinie positive. — Quand F est une forme binaire d´ efinie positive de degr´ e d, on d´ esigne par O(F ) l’ensemble des (x, y) ∈ R
2tels que F(x, y) ≤ 1. C’est un compact du plan euclidien rapport´ e au rep` ere orthonorm´ e (O,~i,~j). Il est d´ elimit´ e par une courbe alg´ ebrique de degr´ e d et de classe C
∞, d’´ equation F (x, y) = 1. Rappelons (§ 1) que A
Fd´ esigne l’aire de O(F ). Le changement de variable (x, y) → (t, y) avec x = ty donne
A
F= Z Z
F(x,y)≤1
dxdy = Z
+∞−∞
dt F (t, 1)
2/d·
Quand F a ses coefficients alg´ ebriques, ce nombre est une p´ eriode au sens de Kont- sevich – Zagier. L’article [Be] est consacr´ e au calcul de A
F.
On d´ esigne par L(F ) la longueur du polynˆ ome F (X, 1) et par m(F ) le minimum de la fonction F(t, 1) sur R . Comme F est homog` ene de degr´ e d, on a, pour tout (x, y) ∈ R
2,
m(F ) max{|x|, |y|}
d≤ F (x, y) ≤ L(F ) max{|x|, |y|}
d.
Il en r´ esulte que O(F ) contient le carr´ e centr´ e en O de cˆ ot´ e L(F)
−1/d, ` a savoir {(x, y) ∈ R
2| max{|x|, |y|} ≤ L(F )
−1/d},
et qu’il est contenu dans le carr´ e centr´ e en O de cˆ ot´ e m(F )
−1/d: {(x, y) ∈ R
2| max{|x|, |y|} ≤ m(F )
−1/d}.
Par cons´ equent,
4L(F)
−2/d≤ A
F≤ 4m(F )
−2/d.
6.2. Le domaine fondamental cyclotomique O
npour n ≥ 3. — Pour n ≥ 3, O
n= O(Φ
n) est la r´ egion fondamentale de la forme cyclotomique Φ
net son aire est A
Φn.
Pour n ≥ 3, O
nest sym´ etrique par rapport ` a la premi` ere bissectrice et sym´ etrique par rapport au point O. De plus, si n est divisible par 4, O
nest sym´ etrique par rapport aux axes de coordonn´ ees. Si n est impair, O
2ns’obtient ` a partir de O
npar sym´ etrie par rapport ` a un des axes de coordonn´ ees.
Pour n = 4, O
4est le disque x
2+ y
2≤ 1 et A
Φ4=
Z
+∞−∞
dt
1 + t
2= π.
Quand p est un nombre premier impair on a A
Φp=
Z
+∞−∞
dt
(1 + t + t
2+ · · · + t
p−1)
(p−1)/2· Par exemple O
3est l’int´ erieur de l’ellipse x
2+ xy + y
2= 1 et
A
Φ3= Z
+∞−∞
dt
1 + t + t
2= 2π
√ 3 ·
6.3. D´ emontration du th´ eor` eme 1.5. — La d´ emonstration du th´ eor` eme 1.5 repose sur des estimations de Φ
n(t): majorations et minorations. L’estimation de m(φ
n) donn´ ee dans [FLW] ne suffit pas pour d´ emontrer le th´ eor` eme 1.5.
Montrer que O
ncontient le petit carr´ e revient ` a d´ emontrer, pour n suffisamment grand,
(6.1) Φ
n(x, y) < 1 quand max{|x|, |y|} < 1 − n
−1+ε,
alors que montrer que O
nest contenu dans le grand carr´ e revient ` a d´ emontrer, pour n suffisamment grand,
(6.2) Φ
n(x, y) > 1 quand max{|x|, |y|} > 1 + n
−1+ε.
Les relations Φ
n(x, y) = Φ
n(y, x) = Φ
n(−x, −y) (pour n ≥ 3) permettent de se limiter au domaine |y| ≤ x.
Si P ∈ R [X] est un polynˆ ome de degr´ e d, on a
|P (t)| ≤ L(P ) max{1, |t|}
dpour tout t ∈ R . En particulier
φ
n(t) ≤ L(φ
n) max{1, |t|}
ϕ(n)pour tout t ∈ R .
De (4.5) on d´ eduit, pour tout ε > 0, pour n suffisamment grand et pour tout t ∈ R , l’in´ egalit´ e
(6.3) φ
n(t) ≤ e
nεmax{1, |t|}
ϕ(n).
Montrons que cela implique (6.1). Soit n suffisamment grand et soit (x, y) satisfaisant 0 < |y| ≤ x < 1 − n
−1+ε.
Posons t = x/y. On a |t| ≥ 1 et, en utilisant (6.3) avec ε/3,
Φ
n(x, y) = y
ϕ(n)φ
n(t) ≤ y
ϕ(n)e
nε/3t
ϕ(n)= x
ϕ(n)e
nε/3< 1 − n
−1+εϕ(n)e
nε/3. Pour n suffisamment grand on a
ϕ(n) > n
1−ε/3, log x ≤ log 1 − n
−1+ε< −n
−1+ε, d’o` u
ϕ(n) log x < −n
2ε/3, c’est-` a-dire
x
ϕ(n)< e
−n2ε/3. Ceci compl` ete la d´ emonstration de (6.1).
Pour d´ emontrer (6.2), on doit minorer φ
n(t). Nous utiliserons les estimations
donn´ ees par les deux lemmes suivants; la premi` ere nous sera utile quand |t| − 1 n’est
pas trop petit, la suivante quand |t| − 1 est positif et petit.
Lemme 6.1. — Pour tout t ∈ R et pour tout n ≥ 3, on a φ
n(t) ≥ |t|
ϕ(n)−1(|t| − 1) Y
d|n d6=n
L(φ
d)
−1.
D´ emonstration. — Le r´ esultat est trivial si |t| ≤ 1. Pour commencer prenons t > 1.
De
(6.4) t
n− 1 = φ
n(t) Y
d|n d6=n
φ
d(t) on d´ eduit
(6.5) t
n− 1 ≤ φ
n(t) Y
d|n d6=n
(L(φ
d)t
ϕ(d)) = φ
n(t)t
n−ϕ(n)Y
d|n d6=n
L(φ
d).
On minore t
n− 1 par (t − 1)t
n−1. Par cons´ equent, t
ϕ(n)−1(t − 1) ≤ φ
n(t) Y
d|n d6=n
L(φ
d), ce qui est la conclusion du lemme 6.1 pour t > 1.
Supposons t < −1 et n pair. Dans ce cas, t
n− 1 = |t|
n− 1; dans le produit (6.4) il y a deux facteurs n´ egatifs, ` a savoir φ
1(t) = t − 1 et φ
2(t) = t + 1, et on remplace (6.5) par
|t|
n− 1 ≤ φ
n(t)|t|
n−ϕ(n)Y
d|n d6=n
L(φ
d).
On conclut avec
|t|
n− 1 ≥ (|t| − 1)|t|
n−1.
Enfin pour t < −1 et n impair, le membre de gauche de (6.4) est −|t|
n− 1, et dans le membre de droite le seul facteur n´ egatif est celui correspondant ` a d = 1, ` a savoir φ
1(t) = −|t| − 1. Ainsi
|t|
n+ 1 = φ
n(t) Y
d|n d6=n
|φ
d(t)| ≤ φ
n(t)|t|
n−ϕ(n)Y
d|n d6=n
L(φ
d).
Comme |t|
n+ 1 est minor´ e par |t|
non a une estimation plus pr´ ecise que celle du lemme 6.1, ` a savoir
|t|
ϕ(n)≤ φ
n(t) Y
d|n d6=n