INSTRUCTION
SUR LA CULTURE
F(^
DE LA BETTERAVE
CtlAMPÊTRE,
Publiée par la Commission d'agriculture
et
des Arts.
La
Betteravechampêtre, connue
assez généralement, sous lenom
de racinede
disette,
nommée
enAllemand Dick-
fFurieî,Mangel -
ff^uriel,
est
une
variétéde
la Betterave. Cette racine, d’unvolume
considérable, est renflée vers le milieu; elle a, à-peu-près , laforme
d’une toupie. Sa chair,moins
fine,moins
serréeque
celle des Betteraves ordinaires , est blanche, assezsouvent
veinéede
rose; sa surface est d’un rose agréable , ses feuilles longues , larges et assez charnues, ont les côtes et les principales nervures teintes aussi
de
rouge.A
M A U)
^2-
(O
La
Betteravechampêtre
^introduite enFrance
en1775,
'ne
prit pas d’abord la faveur qu’elle méritoit ; elle lutcommuniquée
à quelques cultivateurs :pendant
plusieursannées on
se tint à de petites cultures; mais vers1784,
le ci-devant
abbé
Commerell,
qui avoient
vu
enAllemagne
le produit considérable et les avantages de la culture
de
cette plante ^ en fit venirune
assez grande quantitéde
graines, l’annonça, la préconisaavec
raison; desmar- chands
s’en procurèrent : des cultivateurs , dignesde
confiance, la cultivèrenten
grand, en sentirent et firent ' connoître les avantages, et, dès lors, cette culture pritde
l’extension; elle
semble
se ralentir aujourd’hui : ce-pendant
il est bienprouvé que
cette plante estune de
celles qu’on
peut
cultiver avec plus de profit dans les petites,comme
dans les grandes exploitations.On
tirependant
l’été et l’automne, trois à quatre récoltesde
ses feuilles qu’ondonne
aux bestiaux. Ses racines leur four- nissent Loutl’automneetl’hiverune
nourritureabondante
,
fraîche etsaine
, qui convient d’autant
mieux
aux vaches,
cju’elle leur
procure beaucoup
de lait : jamais ellene cause de
maladies , et toujours lesanimaux
lamangent
avec plaisir; ellea
encore
l’avantage den’être pas dévorée par les insectes ,comme
les navets etbeaucoup
d’autres plantes.Aujourd’hui
que
nos principales richesses doiv'entémaner de
l’agriculture,
nous devons employer
tous les jnoyens d’accélérer sa prospérité; et c’est dans cettevue
que nous répandons
des graines des plantes quipeuvent
y
concourirle plus, etque nous
publions enmême
teins ceque
l’expérience a apprisde
positif sur lesprocédés
à suivre danschaque
culture.( 5 )
Du
terrainpropre à
laBetterave champêtre.
Elle se plaît, ainsi
que
la plupart des racines, dans les terresdouces,
substancielies,meubles ou
ameublies,im peu
fraîches, et c’est-làoù
elleprend
le plus grand accrois-sement;
mais elle réussitmieux que
toute autre dans les terresun peu compactes
et argilleuses qui ont été divisées par plusieurs labours;comme
ellene pique
pas profon-dément
en terre , elle convientencore
dansun
solpeu prolond
,
pourvu
qu’ilne
soit.pas épuise,ou qu
il aitreçu debons amandemens.
De
laprêparaîLon du
terrain.La
terre destinée à recevoir la graine de Betteravechampêtre,
doit être plusou moins
travaillée, suivant la naturedu
sol et l’étatou
elle se trouve. Si elle esc naturellement légère et déjàen
culture ,deux
labours suffisent ; il en faut aumoins
trois dansun
sol argilleuxou compact,
eton
doit passerlaherse aprèschacun
d’eux,
lorsque la terre
commence
à se ressuyer.Le
terrain qui n’auroit pas étéfumé
, l’annéeprécédente,
le seroit avant lesecond ou
troisième labour. Enfin, plus la terre sera divisée et
amendée
, plus le produit sera considérable etsurprenant.
Des
différenssemis
,du rems ch
ilsdoivent
êtrefaits , et
de
laquantité de graines nécessaire à
L’arpent de neuf
cents toises.Quelques
cultivateurs ontprétendu
qu’il étoit plus avantageuxde
replanter la Betteravechampêtre
,que do
A »
(
4
)la
semer
en place : mais des expériences comparatives ^ faitespendant
plusieurs années, par des praticiens dignesde
confiance jprouvent que
, si cetteméthode
peut êtreemployée
dans les cultures en petit, elle-ne doit l’êtredans les cultures en grand,
que pour
gaiaàî^ les parties trop claires a\ec les plantes qu’on doit retirer des parties trop drues.En semant
en place ,on économise
letems
et desfraisde
plantation;on gagne
sur la végétation, parceque
les plantes sont toujours retardées par cette opération,dont
souvent elles souffrentmême beaucoup
par lestems
secs, assezcommuns au
printems et en été. D’ailleurs , il est bienprouvé que
ces plantessemées
en place prennent plus d’accroissementque
celles qui ont été replantées.Dans
les terrainslégerson peut semer
dèsVentôse
, et continuer dans les terres plus substantielles jusqu’à la finde
Prairial; mais letems
le plusconvenable
esten Ger-
.minal et Floréal.
On sème
les Betteraveschampêtres
à la volée et par rayons.La première méthode
, plus
prompte
, est d’autant pluscommode, que
ces graines assez grosses etnon cou-
lantes, se
sèment
avec la plus grande facilité, et qu'ilne
s’agit
que
de passer la herse et le rouleau aprèsles avoir confiées à laterre ; mais il estbien plus avantageuxde
se-mer
parravons;lessemences mieux
couvertesgerment
plussthement
: les plantes plus espacées lournisscnt de plusabondantes
récoltesparleproduit des feuilles etdes racines qui acquièrent plus d’étendue etde
volume.La
terremoins
couverte,mieux
préparée par lesfaçons,sedispose déjàpour
la récolte suivante.Ces
semis par ra'^ ons se lont de d:\’ersesmanières
;celles
que nous
indiquons ici , sont les plus pratiquées.L’une
consiste à tracer , à l’aide d’uncordeau
, des rigoles profondesde deux pouces
environ , et espacees dun
pied et demi.On y répand
très-clairlasemence
qu’on recouvre avecun
rateaii.La seconde méthode
se pratique à la suitede
la charrue.On sème
dans la raie qui résultedu
ren-versement de
laterre,
opéré
parlesdeux
premiers sillons.On
laisse libre laseconde
raieque forme
le troisièmesillon ;
on sème
dans la quatrième^ dans la sixième, ainside
suitede deux
endeux; on couvre
avec laherse, eton
passe le rouleau.Dans
le casoù on
voudroitsemer
en pépinière, ce doit être toujoursparrayons etbeaucoup
plusdru qu’ensemant pour
rester en place.Pour
les semis à la volée,on emploie
trois livresde
graine à i’arpent, etdeux
livresen semant
par rayons.Des façons à donner aux
racines*Lorsque
letems
estfavorable aux semis , les grainesne
restentque
dix àdouze
jours en terre ;un mois ou
cinq décades après,ou
doit sarcler , biner, et
commencer
à regarnir les parties trop claires avec les plants tirés des parties trop drues.On
avance eton
assurela reprisede
cesjeunes plants par le
procède
suivant :Mêlez de
labouse de vache
et de la terre franche i-peu-près par parties égales ; délayez à consistancede
bouillie;trempez
les jeunes racines dans cetamalgame;
saupoudrez-les deterre
douce
, tamisée;ayezl’attentionde
ne pas casserlepivot; plantez avecun
plantoir etrappro-chez !a terre, de tnanière à
ne
laisserancmi
vide autour des racines, qu’ilfautbien assurer etne
pas trop enfoncer.Un mois
après,on
])eutdonner un nouveau
binage, et replanterencore
,sion
croitqu’ilj
aitnécessité.Dans
cetteseconde
opération ,on
doit espacerles plantesde douze
à quinze pottees.On
a l’attention dene
jamais chausser ces racines; il est, au contraire, très-avantageuxde
dégagerle collet, et de
former
autour d’ellesun
petit bassin qui se pratique aisément avec lamain
en façonnant.On
doitencore
avoir grand soin dene
pas blesserles plantes avec l’instrumeiu.Delà
récoltedes
feuilles etde
leur usar^e.J
O
Lorsque
lesfeuilles ontun
granddéveloppement, que
les premières etprincipales ont acquis environ
un
piedde longueur, on
casse les plus étendues, eton
le fait tout prèsdu
collet de la plante;on
appuie lepouce
endedans
et
on
brisevivement
parun mouvement en
dehors,pour ne
laisser ni chicots ni appendices.On
n’en retireque
les plus grandes; jamais
on note
les jeunes poussesdu
ce’.itrc.
Cette opér.aiion se
recommence
toutes les foisque
les feuilles ont prisun
granddéveloppement.
Les
vaches, les bceuis, lesmoutons
et les porcs s’eu nourrissent fort bien ;en
peut les leurdonner
entières.On
les engraisse assezpromptement
avec cette seulenour- riture,en
ladonnant abondamment; on
assuremême que
ces feuilles,mêlées
avecde
la paille, fournissent auxchevaux une bonne
nourriture , maisnous
n’en avonsjaas l’expérience.Hachées mena
etmêlées
avecdu
son, ellesnourrissentlesvolailles.
li faut toujours
donner aux animaux
ces feuilles irai- elles, sans être mouillées.De
la récoltedes
racines.Elle doit se faire avant les gelées
; et
comme
il estné-
cessaire
que
cesoitparun tems
sec’pour enassurerlacon- servation, il vautmieux
l’avancerque
de la retarder. Parun beau
jour ,on
arrache les plantes ,on en coupe
les leuilles près des racinesqu’on laisse ressuyer surchamp,
si
on
ne craint pas la pluie. Sur le soir,
ou
lelendemain
,dans le milieu
du
jour,on
rentre ces racines qu’on a soinde ne
pasmutiler. Si elles n’etoientpas assez ressuyées,on
les placeroit
un
jourou deux
enheu
sec, a 1air libre ; ensuiteon
les mettra, ht par ht , surdu
sable sec , dansun
cellierou
dansune
cavepeu
profonde.On
peuten
placer encore dans des fosses,comme
il a été ditpour
lescarottes et les narcts.
On
lave bien ces racines eton
lescoupe pour
les cîoniier aux bestiaux. Elles doivent etre divisées parmorceaux
de la grosseur d’un petitœuf pour
les gros
animaux,
et d’une noix,ou
plus petitsencore, pour
lesmoutons.
Moyens
d''ûhtenlrde bonnes graines.
Au tems de
la récolte des racines ,on
mettrade
côtéles grosses plantes, les
moins
allongées etdont
la surface seraparfaitement roseetlisse.On
n’en ôteraquelesgrandes feuilles, sans altérer les petitesdu
centre.Au commencement de Germinal
, etun mois
plutôt,si c’estdansun
climatchaud
,on
plante ces racines à trois pieds environde
distance,dansun
terrain substantiel,bien( s )
diviséJ et
on donne
lesfaçonsnécessairespour
détruirelesmauvaises
herbes.Lorsque
les tigesde
ces plantesontacquisenviron quatre piedsde
hauteur ,on
les protègeparun
tuteur solide,hautde
six à septpieds;on y
attache les principalestiges aufur et àmesure qu
ellescroissent,afmd’empêcher
leventdelesbriser.
Lorsque
les tigesperdent de
leurvigueur etque
lei semencesjaunissent,on
peiulescouper
etlesdressercontreim mur où
elles sécheront parfaitement,siletems
estbeau
;dans
le cas contraire,on
les placera dansun
grenierbien aéré,où on
les suspendra, par paquets , sousun
angar, jusqu’à ceque
les grainesbien sèches puissent se détacherpour
être conservéesen
sacs dansun
lieu sec etsansfeu.Ces semences
récoltées avec soin, etbien conservées, lèventau bout de
trois ans.Quoique
des écrivains aient porté les avantagesde
la Betterave
champêtre
fort au-delàde ceux
qu’on doit attendrede
la Betterave ordinaire ,nous
invitonsnéan- moins
les cultivateurs àne
pas négligerla culturede
cette dernière.L’emploi
considérableque
les nourrisseurs des environsde
Paris en fontpour
nourrir leurs vachesen
hiver ,prouve
assez qu’elle est très-profitable.A P A R
I S Jl’Imprimerie des