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Connaissances morphologiques et traitement morphologique chez des enfants apprentis lecteurs francophones

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Academic year: 2022

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Master

Reference

Connaissances morphologiques et traitement morphologique chez des enfants apprentis lecteurs francophones

VOUKOVSKA, Christine

Abstract

La lecture est un facteur important d'intégration sociale et professionnelle dans les sociétés industrialisées. Or, 16% de la population adulte Suisse rencontre des difficultés en lecture, souvent conséquentes à un apprentissage inadéquat. Chez les enfants, 5% souffrent de difficultés d'apprentissage spécifiques de la lecture (dyslexie), qui peuvent constituer un handicap important pour leur scolarité. Afin de pouvoir mettre en place des programmes de prise en charge, il est essentiel d'étudier les mécanismes impliqués dans l'apprentissage de la lecture. La contribution des habiletés phonologiques a notamment été largement étudiée. En revanche, il n'existe que peu de recherches en ce qui concerne le traitement morphologique, autre procédure susceptible de jouer un rôle dans l'apprentissage de la lecture. Notre recherche vise à décrire les connaissances morphologiques chez des enfants apprentis lecteurs francophones, à déterminer si les enfants effectuent un traitement morphologique pour lire les mots et les nouveaux mots, et si ce traitement peut faciliter leur apprentissage de la lecture. Nous [...]

VOUKOVSKA, Christine. Connaissances morphologiques et traitement morphologique chez des enfants apprentis lecteurs francophones. Master : Univ. Genève, 2009

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:2061

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et des sciences de l’éducation

Section de psychologie

Mémoire de Maîtrise Universitaire en logopédie

Connaissances morphologiques et traitement morphologique chez des enfants apprentis lecteurs

francophones

Christine Voukovska

Directrice de mémoire :

Prof. Pascale Colé

Jurés :

Prof. Pascal Zesiger et Jennifer Martin

Mai 2009

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Résumé

La lecture est un facteur important d’intégration sociale et professionnelle dans les sociétés industrialisées. Or, 16% de la population adulte Suisse rencontre des difficultés en lecture, souvent conséquentes à un apprentissage inadéquat. Chez les enfants, 5% souffrent de difficultés d’apprentissage spécifiques de la lecture (dyslexie), qui peuvent constituer un handicap important pour leur scolarité. Afin de pouvoir mettre en place des programmes de prise en charge, il est essentiel d’étudier les mécanismes impliqués dans l’apprentissage de la lecture. La contribution des habiletés phonologiques a notamment été largement étudiée. En revanche, il n’existe que peu de recherches en ce qui concerne le traitement morphologique, autre procédure susceptible de jouer un rôle dans l’apprentissage de la lecture. Notre recherche vise à décrire les connaissances morphologiques chez des enfants apprentis lecteurs francophones, à déterminer si les enfants effectuent un traitement morphologique pour lire les mots et les nouveaux mots, et si ce traitement peut faciliter leur apprentissage de la lecture.

Nous avons administré des épreuves à des enfants normo-lecteurs de 3ème et 5ème année primaire. Les tâches ont permis d’évaluer leurs connaissances morphologiques ainsi que le traitement morphologique qu’ils effectuent dans la lecture de mots et de pseudomots. Les habiletés phonologiques de nos sujets ainsi que leur utilisation des différentes procédures de lecture ont également été évaluées. Nous avons observé une évolution dans les habiletés phonologiques entre la 3ème et la 5ème année, une évolution dans la lecture en terme de précision et de rapidité, une utilisation de la procédure de lecture phonologique maîtrisée par les deux groupes, ainsi qu’une utilisation de la procédure orthographique mise en place chez les enfants de 5ème année et commençant à se constituer chez les enfants de 3ème année.

Comme attendu, les résultats aux tâches de connaissances et traitement morphologiques ont montré que les enfants apprentis lecteurs francophones disposent d’un niveau de connaissances morphologiques important, et que ces connaissances augmentent entre la 3ème et la 5ème année primaire. Les enfants se servent des unités morphologiques pour lire les mots et les nouveaux mots, ce qui facilite leur lecture en leur permettant de lire les mots plus rapidement, et les nouveaux mots plus rapidement et plus précisément.

Mots clés :

lecture, enfants apprentis lecteurs, connaissances morphologiques, traitement morphologique, habiletés phonologiques

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Table des matières

Résumé...2

Table des matières...3

Introduction...6

1 La lecture ...8

1.1 Chez l’adulte lecteur expert ...8

1.2 Chez l’enfant apprenti lecteur ...8

1.3 Les habiletés phonologiques dans l’apprentissage de la lecture ...10

1.4 Les habiletés morphologiques dans l’apprentissage de la lecture ...10

2 Le rôle du traitement morphologique dans l’apprentissage de la lecture ...13

2.1 Les connaissances morphologiques et leur lien avec la lecture ...13

2.1.1 Le développement des connaissances morphologiques ...13

A. Développement précoce des connaissances morphologiques...13

B. Lien entre les connaissances morphologiques et phonologiques...15

2.1.2 La relation entre les connaissances morphologiques et le niveau de lecture ...17

2.2 Le traitement morphologique dans la lecture...19

2.2.1 L’identification des mots écrits...19

2.2.2 Le décodage ...21

3 Questions de recherche et hypothèses théoriques ...23

3.1 Questions de recherche ...23

3.2 Hypothèses théoriques ...24

4 Méthode ...25

4.1 Participants...25

4.2 Caractéristiques de la population ...26

4.2.1 Habiletés phonologiques ...26

A. Présentation des tâches ...27

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a) Conscience phonologique ...27

b) Mémoire à court terme phonologique ...27

B. Hypothèses ...27

4.2.2 Evaluation des procédures en lecture (orthographique et phonologique)...28

A. Présentation de la tâche...28

B. Hypothèses opérationnelles ...29

4.3 Habiletés morphologiques ...30

A. Présentation des tâches ...30

a) Fluence morphologique ...30

b) Détection d’intrus ...30

c) Extraction de la base de mots suffixés...31

d) Compréhension de pseudomots suffixés ...31

B. Hypothèses opérationnelles ...32

4.4 Traitement morphologique...32

4.4.1 Tâche de lecture à haute voix de mots suffixés et pseudo-suffixés ...32

A. Présentation de la tâche...32

B. Hypothèses opérationnelles ...32

4.4.2 Tâche de lecture à haute voix de pseudomots morphologiquement complexes 33 A. Présentation de la tâche...33

B. Hypothèses opérationnelles ...33

4.5 Procédure ...34

4.5.1 Apparatus ...34

5 Résultats...35

5.1 Habiletés phonologiques ...35

a) Conscience phonologique ...35

b) Mémoire à court terme phonologique ...35

5.2 Evaluation des procédures de lecture...36

(6)

A. Résultats en terme de précision...37

B. Résultats pour les temps de latence ...38

5.3 Habiletés morphologiques ...40

A. Résultats...40

5.4 Traitement morphologique...41

5.4.1 Tâche de lecture à haute voix de mots suffixés et pseudo-suffixés ...41

A. Résultats en terme de précision...41

B. Résultats pour les temps de latence ...42

5.4.2 Tâche de lecture à haute voix de pseudomots morphologiquement complexes 43 A. Résultats en terme de précision...44

B. Résultats pour les temps de latence ...45

6 Discussion et conclusion...47

6.1 Habiletés phonologiques ...47

6.2 Procédures de lecture ...47

6.3 Habiletés morphologiques ...48

6.4 Traitement morphologique...50

6.5 Conclusion ...51

Bibliographie...53

Annexe A : Epreuves de conscience phonologique...57

Annexe B : Evaluation des procédures de lecture ...60

Annexe C : Evaluation des habiletés morphologiques ...62

Annexe D : Evaluation du traitement morphologique ...67

Abréviations

1P, 2P, … , 6P : 1ère, 2ème, …, 6ème année primaire

PM : pseudomots

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Introduction

Dans les sociétés occidentales, savoir lire est un facteur essentiel d’intégration sociale et professionnelle. Or, 16% de la population adulte suisse ne maîtrise pas la lecture (Hertig &

Notter, 2005). Dans la plupart des cas, l’apprentissage de la lecture ne s’est pas déroulé correctement. Environ 5% des enfants sont dyslexiques, ce qui représente 1 enfant par classe (Yule, Rutter, Berger & Thompson, 1974, In Sprenger-Charolles & Colé, 2003). La dyslexie se répercute également sur d’autres branches que le français. Les mathématiques en sont un exemple : les enfants dyslexiques rencontrent des difficultés à lire et à comprendre les consignes des problèmes et voient leurs résultats baisser dans cette branche, alors même qu’ils sont capables d’effectuer le raisonnement au niveau purement mathématique. La dyslexie est donc un handicap qui peut notablement entraver la scolarité d’enfants possédant pourtant les capacités intellectuelles pour suivre une scolarité normale.

Etudier les mécanismes impliqués dans l’apprentissage de la lecture permet, d’une part, de comprendre à quels niveaux se situent les déficits, et d’autre part, de pouvoir mettre en place des programmes de traitement adéquats pour les personnes concernées. Ces mécanismes sont investigués par les chercheurs auprès de populations d’adultes « lecteurs experts » avec un niveau de maîtrise optimal de la lecture, ainsi que d’enfants « apprentis lecteurs », se trouvant à des stades plus ou moins précoces de son apprentissage. Jusqu’à présent, les compétences nécessaires à l’apprentissage de la lecture qui ont été le plus largement étudiées sont les compétences phonologiques, c’est-à-dire la capacité à analyser la structure du langage parlé au niveau du son. Cette capacité est largement entraînée dans la prise en charge logopédique.

Or, pour des raisons encore non élucidées, certains enfants sont « résistants » à ce type d’entraînement. Il s’agit alors de développer de nouvelles méthodes, qui compléteraient celles déjà existantes, et offriraient de nouvelles possibilités de prise en charge pour ces enfants.

Pour cela, d’autres compétences impliquées dans l’apprentissage de la lecture ont besoin d’être étudiées.

Les compétences morphologiques sont également susceptibles de jouer un rôle dans l’apprentissage de la lecture. Nous savons que l’adulte normo-lecteur bénéficie de la structure morphologique des mots pour lire (Taft & Forster, 1976 ; Colé, Segui & Taft, 1997 ; Grainger, Colé & Segui, 1991). En ce qui concerne l’enfant, nous n’avons que peu de données sur le sujet à l’heure actuelle. L’intérêt pour ce domaine est relativement récent

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parmi les chercheurs. Cependant, les études qui existent suggèrent que l’enfant se sert également de ses connaissances morphologiques dans la lecture, ceci relativement tôt, et qu’un tel traitement facilite sa lecture (Colé, Marec-Breton, Royer & Gombert, 2003). Ces recherches ont besoin d’être complétées. Nous manquons notamment de données en français.

Notre travail s’inscrit dans ce nouveau courant, avec pour objectifs de décrire les connaissances morphologiques des enfants apprentis lecteurs francophones, de déterminer si les enfants se servent de la structure morphologique des mots et des nouveaux mots pour les lire, et si ce traitement facilite leur lecture.

Dans ce but, nous avons administré des épreuves à des enfants normo-lecteurs de 3ème et 5ème année primaire. Les tâches étaient de nature à évaluer les connaissances morphologiques de nos sujets, ainsi que leur lecture de mots et de pseudomots morphologiquement complexes.

Leurs habiletés phonologiques ainsi que leur utilisation des procédures de lecture phonologiques et orthographique ont également été évaluées.

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1 La lecture

La lecture efficiente est le produit de deux composantes principales : l’identification des mots écrits et la compréhension (Hoover & Gough, 1990). Le lecteur déchiffre les mots mais aussi et surtout, accède au sens du texte, ce qui constitue le but final de la lecture. De plus, la lecture est une activité qui met en œuvre un certain nombre de procédures. Ainsi, le niveau de lecture est influencé par le niveau de vocabulaire, les habiletés phonologiques et morphologiques ou encore la mémoire de travail phonologique.

1.1 Chez l’adulte lecteur expert

Chez l’adulte lecteur expert, l’identification des mots écrits est une activité automatisée et quasi-réflexe. En effet, lorsqu’un mot est présenté au lecteur expert, celui-ci ne peut s’empêcher de le lire, même si la consigne est de l’ignorer (Guttentag & Haith, 1978). Cette automatisation dans la lecture experte permet une vitesse de traitement rapide. En effet, le lecteur expert identifie en moyenne 5 mots écrits par seconde. La lecture chez l’adulte est également caractérisée par une relative indépendance du contexte (Forster, 1981).

Selon le modèle à deux voies en cascade ((Coltheart, Curtis, Atkins & Haller (1993) ; Coltheart, Rastle, Perry, Langdon & Ziegler (2001)), l’adulte utilise deux procédures de lecture différentes, les voies phonologique et orthographique. L’utilisation de l’une ou l’autre de ces voies dépend du type de mots à lire. La voie phonologique permet de convertir les graphèmes en phonèmes, c’est-à-dire de traduire les lettres en sons, puis de les assembler.

Cette voie est utilisée pour lire les mots peu fréquents et les mots nouveaux. La voie orthographique permet d’accéder directement à la représentation du mot stockée dans le lexique orthographique du lecteur. Elle est utilisée pour lire les mots irréguliers et les mots fréquents.

1.2 Chez l’enfant apprenti lecteur

Pour parvenir à une lecture efficiente, l’enfant devra effectuer un apprentissage essentiellement au niveau de la composante « identification des mots écrits ». La composante

« compréhension » est, quant à elle, une activité engageant des processus relativement similaires pour les modalités orale et écrite (Sprenger-Charolles & Colé, 2003). Le but de

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l’enfant est de parvenir à comprendre ce qu’il lit, comme il comprend ce qu’il entend. Il s’agit pour l’enfant d’automatiser d’abord l’identification des mots écrits, afin de laisser des ressources de traitement disponibles pour la compréhension. Pour cela, dans un système d’écriture comme le français, l’enfant doit d’abord comprendre le principe alphabétique, c'est-à-dire qu’une lettre correspond à un son. Il commencera alors à mettre en place l’utilisation de la voie de lecture phonologique. La mise en place de cette première voie est d’une grande importance, car elle constitue le socle de l’élaboration de la deuxième voie de lecture, la voie orthographique (Share, 1999). Or, pour devenir un lecteur expert, l’enfant devra maîtriser les deux voies afin de pouvoir identifier tous les types de mots.

Afin de déterminer à quel moment se font ces mises en place, Sprenger-Charolles, Siegel et Béchennec (1998) ont administré une tâche de lecture à haute voix de mots réguliers, irréguliers et de pseudomots à des enfants de la première à la quatrième année primaire, et ont comparé les pourcentages de réponses correctes. Un effet de régularité (les enfants lisent mieux les mots réguliers qu’irréguliers) a été observé dès le milieu de la première année, et perdure jusqu’en quatrième année. Cela indique que la voie phonologique se met en place chez l’enfant dès le milieu de la première année primaire. Dès la fin de la première année, les auteurs observent un effet de lexicalité (les enfants lisent mieux les mots réguliers que les pseudomots) : c’est le début de la constitution du lexique orthographique. Mais ce lexique orthographique reste réduit aux formes régulières jusqu’en 3ème année, les enfants lisant mieux les pseudomots que les mots irréguliers. En fin de 4ème année primaire, les deux voies sont mises en place (il n’y a plus de différences significatives entre la lecture des mots réguliers et irréguliers).

Pour apprendre à lire, l’enfant doit développer des habiletés spécifiques, qui dépendent des caractéristiques du système d’écriture. La langue française utilise un système d’écriture qui relie l’oral à l’écrit selon deux principes : le principe phonographique, qui assure la correspondance entre les unités de l’écrit et les unités de l’oral (syllabes, phonèmes), et le principe sémiographique, qui assure la correspondance entre les unités de l’écrit et les unités de l’oral porteuses de sens (morphèmes, mots). Afin de répondre au premier principe, l’apprentissage de la lecture nécessite le développement d’habiletés phonologiques. Par conséquent, il nécessiterait également le développement d’habiletés morphologiques, afin de répondre au deuxième principe.

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1.3 Les habiletés phonologiques dans l’apprentissage de la lecture

L’alphabet français répond au principe phonographique, car il code les unités de l’oral que sont les phonèmes par des unités écrites que sont les graphèmes. Pour comprendre le principe alphabétique, nécessaire à l’apprentissage de la lecture dans notre système d’écriture, l’enfant devra développer des habiletés phonologiques. Il doit avoir la compétence d’analyser la structure du langage parlé de manière consciente (Sprenger-Charolles & Colé, 2003). Cette compétence, appelée « conscience phonologique », correspond à « la capacité d’identifier les composants phonologiques des unités linguistiques et de les manipuler intentionnellement. » (Gombert, 1990). L’apprenti-lecteur devient conscient que le langage parlé est constitué d’une séquence de sons, et que ces sons correspondent à des lettres (correspondances grapho- phonologiques).

L’enfant parvient très tôt à identifier les séquences de sons au niveau de la syllabe (conscience syllabique, vers l’âge de 4 ans), alors qu’au niveau du phonème il faut attendre le début de l’apprentissage de la lecture (conscience phonémique, vers l’âge de 6 ans) (Alegria, Pignot & Morais, 1982). C’est la conscience phonémique qui semble être la plus importante dans l’apprentissage de la lecture (Share, Jorm, McLean & Matthews, 1984). En 2ème année enfantine et en 1ère année primaire, la conscience phonémique est le meilleur prédicteur du niveau de lecture. Le rôle des habiletés phonologiques a été investigué dans de nombreuses recherches et son importance dans l’apprentissage de la lecture a été largement démontrée.

1.4 Les habiletés morphologiques dans l’apprentissage de la lecture

Les habiletés morphologiques sont également susceptibles de jouer un rôle dans l’apprentissage de la lecture. Le principe sémiographique représente la correspondance entre les unités de l’écrit et les unités de l’oral porteuses de sens. Le morphème est la plus petite unité porteuse de sens de la langue. Par exemple le mot « maisonnette » est composé de deux morphèmes, « maison » qui signifie « bâtiment où on habite » et « ette » qui signifie

« petite ». On distingue morphologie flexionnelle et dérivationnelle (Colé & Royer, 2004, In Valdois, Colé & David, 2004, p.44). Les flexions donnent une information grammaticale (temps des verbes, marques du pluriel : par exemple je chante, je chanter-ai ; un chien, des chien-s). Les flexions sont toujours des suffixes et ne changent pas la catégorie syntaxique du mot. Les dérivations apportent une modification sémantique (par exemple « faire »

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« refaire », « défaire » etc.). Les dérivations peuvent être des préfixes et des suffixes. Les suffixes dérivationnels peuvent modifier la catégorie syntaxique du mot (par exemple « longueur » est un nom, « longuement » est un adverbe).

La langue française est constituée de mots monomorphémiques, c’est-à-dire ne comportant qu’un seul morphème (comme « maison »), et de mots plurimorphémiques ou complexes, c'est-à-dire composés de 2 morphèmes ou plus (comme « maisonnette »). Il existe différentes catégories de morphèmes : la base (par exemple « lait » dans « laitier », « laitage » etc.), la racine (par exemple « coll- » dans « collage », « coller » etc.) et les affixes qui se fixent à la racine pour former le mot. Les affixes sont de deux types, les préfixes, qui se trouvent devant la racine (par exemple re- dans « refaire ») et les suffixes, qui suivent la racine (par exemple - eur dans « chanteur »). En plus d’être porteurs de sens, les morphèmes sont des unités courtes et répétitives (par exemple le suffixe –eur se retrouve dans chanteur, danseur, râleur etc. et signifie toujours « une personne qui…», de même la base « lait » se retrouve dans laitier, laiterie, allaiter, laitage etc.).

Ces unités morphologiques sont traitées lors de la lecture chez l’adulte, et ce traitement facilite sa lecture (Taft & Forster, 1976 ; Colé et al., 1997 ; Grainger et al., 1991). Le lecteur identifie un mot significativement plus rapidement lorsque sa racine est de haute fréquence que lorsqu’elle est de basse fréquence (Colé, Beauvillain & Segui, 1989). Ces observations sont valables pour les mots suffixés, c’est-à-dire dont la racine se trouve au début du mot et par conséquent est repérée immédiatement puisque nous lisons de gauche à droite. Grainger et al. (1991) ont observé des effets de l’amorçage morphologique dans l’identification des mots. Les mots étaient identifiés significativement plus rapidement lorsque le mot amorce était relié morphologiquement au mot-cible que lorsqu’il n’y avait pas de lien.

L’enfant apprenti-lecteur effectuerait lui aussi un traitement des unités morphologiques lors de la lecture (Laxon, Rickard & Coltheart,1992 ; Colé, Marec-Breton, Royer & Gombert, 2003). Ses connaissances morphologiques seraient relativement importantes même avant d’avoir atteint un niveau d’expertise en lecture, et seraient en lien avec le niveau de lecture (Carlisle, 1995 ; Carlisle & Nomanbhoy, 1993 ; Carlisle, 2000 ; Singson, Mahony & Mann, 2000 ; Casalis & Louis-Alexandre, 2000 ; Colé et al., 2003 ; Carlisle & Adison Stone, 2003 ; Colé, Royer, Leuwers & Casalis, 2004; Deacon & Kirby, 2004). Cependant, l’intérêt pour ce domaine est relativement récent et il a été peu étudié à l’heure actuelle. Or, en français, la plupart des mots sont plurimorphémiques : 80 % des mots du Robert méthodique sont

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complexes selon Rey-Debove (1984). Le bénéfice d’un traitement morphologique pour lire de tels mots doit être important (effet facilitateur). De plus, les formes dérivationnelles constituent une grande part des mots que les enfants apprennent à l’école primaire (Nagy &

Anderson, 1984). Nous manquons notamment de données en français sur le sujet : à l’heure actuelle, il n’existe que quatre études en français dans le domaine de la morphologie, celles de Casalis et Louis-Alexandre (2000), Colé et al., (2003), Colé et al., (2004) et Marec-Breton, Gombert et Colé (2005). L’objectif de la présente recherche est donc d’étudier le rôle que peut jouer le traitement morphologique dans l’apprentissage de la lecture chez des enfants francophones.

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2 Le rôle du traitement morphologique dans l’apprentissage de la lecture

Il existe deux types de travaux dans la littérature au sujet du rôle que joue le traitement morphologique dans l’apprentissage de la lecture. Ils poursuivent des objectifs différents. Les premiers traitent de la conscience morphologique. La conscience morphologique représente, par analogie à la définition de la conscience phonologique, la capacité de l’enfant à se représenter consciemment la structure morphologique des mots et l’habileté de réfléchir sur et de manipuler leur structure (Carlisle, 1995). Elle est étudiée à l’aide de tâches qui mesurent les connaissances morphologiques des enfants, telles que de la manipulation de morphèmes par exemple. Ces travaux ont pour objectif de qualifier le développement des connaissances morphologiques des enfants et d’établir les liens entre ces connaissances et la lecture. Les seconds travaux ont pour objet le traitement des unités morphémiques effectué par le lecteur.

Il s’agit de déterminer si ce traitement facilite la lecture. Les tâches administrées aux sujets dans ce type d’études consistent en la lecture de mots ou de pseudomots morphologiquement complexes. Dans la plupart des recherches, ces deux domaines sont traités à part. Notre recherche investigue aussi bien la conscience morphologique que le traitement morphologique.

2.1 Les connaissances morphologiques et leur lien avec la lecture

2.1.1 Le développement des connaissances morphologiques

A. Développement précoce des connaissances morphologiques

Au jardin d’enfants, les connaissances morphologiques des enfants seraient déjà relativement importantes (Carlisle, 1995). Ces connaissances augmenteraient entre le jardin d’enfants et la 1ère année primaire. Carlisle (1995) a effectué une étude longitudinale de la conscience morphologique, dans laquelle une tâche appelée « The Morphological Production Task » a été administrée à un groupe d’enfants anglophones de jardin d’enfants et un autre de 1ère année primaire. Cette tâche consiste à donner à l’enfant une phrase dont le dernier mot manque ainsi qu’une racine que l’enfant doit utiliser pour compléter la phrase en produisant la bonne forme (ex. « Farm » + « My uncle is a _ » : la réponse attendue est « farmer »).

Environ un tiers étaient des formes fléchies, un tiers des formes dérivées transparentes (ex.

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drive et driver) et un tiers des formes dérivées opaques, c’est-à-dire induisant des changements phonologiques (ex. explode et explosion). Au jardin d’enfants, le pourcentage de bonnes réponses était le plus élevé pour les formes fléchies (36.5%), suivi des formes dérivées transparentes (22.8%) et il était le plus bas pour les formes dérivées avec changement phonologique (1.9%). En 1ère année, les résultats étaient significativement plus élevés qu’au jardin d’enfants pour les trois conditions, avec le même ordre de réussite : les formes fléchies étaient les mieux réussies (61.1%), les formes dérivées transparentes venaient ensuite (40.9%) et finalement les formes dérivées avec changement phonologique (11.2%).

Ces résultats suggèrent que même lorsqu’ils se trouvent dans les premiers stades d’apprentissage de la lecture, les enfants possèdent des connaissances morphologiques importantes. Toutefois, il semblerait que la nature de ces connaissances n’est pas la même dans les stades précoces que dans les stades plus avancés. En effet, l’auteur parle d’une transition entre une conscience morphologique implicite à une conscience morphologique explicite. La conscience implicite permettrait à l’enfant d’utiliser des unités morphologiques, mais sans en connaître le fonctionnement de manière consciente (Colé et al., 2004). Ce serait seulement lorsqu’il aurait atteint le stade de la conscience explicite qu’il parviendrait à manipuler ces unités de manière consciente en mobilisant intentionnellement ses connaissances. L’auteur relève l’importance, mais aussi la difficulté au niveau méthodologique, de choisir des tâches qui permettent de déterminer laquelle des deux types de conscience est testée. La tâche utilisée dans l’étude de Carlisle impliquerait une conscience implicite par le fait que l’enfant complète une phrase, mais étant donné qu’il doit analyser cette phrase et manipuler le mot, un certain degré de conscience explicite serait aussi impliqué dans cette tâche.

Dans une étude plus récente de Colé et al. (2004), les tâches ont été élaborées de manière à différencier conscience implicite et explicite. Des enfants francophones ont été soumis aux différentes épreuves en fin de 1ère année primaire et une année plus tard, en fin de 2ème année.

Un autre groupe d’enfants, de 3ème année primaire, a également passé les épreuves. La conscience implicite était investiguée par une tâche de jugement de relations de mots : des paires de mots étaient présentées à l’enfant, dont certaines étaient reliées morphologiquement (par exemple « rapide » et « rapidement ») et d’autres uniquement formellement (par exemple

« bague » et « baguette »). L’enfant devait décider si les deux mots appartiennent à la même famille. La conscience explicite était investiguée au moyen de deux tâches. La première, une tâche d’extraction de la base, consistait à extraire la base dans des mots préfixés et suffixés

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(ex. « refaire » et « fillette ») par opposition à des mots pseudo-préfixés et pseudo-suffixés (ex. « renifler » et « alouette »). La deuxième était une tâche de compréhension des affixes, où l’enfant devait choisir la définition qui lui paraissait le mieux définir un pseudo-mot affixé (ex. « mouteur », est-ce que c’est un petit « moute » ou celui qui « moute » ?). Toutes ces tâches étaient présentées oralement. Les résultats ont montré que la tâche implicite de jugement de relations de mots est bien réussie dès la 1P (en moyenne 16.68 bonnes réponses sur 20) et présente un effet « plafond » dès la 2P. La tâche explicite d’extraction de la base reste difficile en 1P (7 bonnes réponses sur 12 en moyenne), est bien réussie en 2P (9.74 bonnes réponses sur 12) et montre un effet « plafond » en 3P (11.6 bonnes réponses sur 12).

Quant à la tâche explicite de compréhension des affixes, elle montre un effet « plancher » en 1P (13.32 bonnes réponses sur 24), une faible réussite en 2P et une réussite partielle en 3P.

Ces études montrent que les enfants disposent de connaissances morphologiques relativement importantes très tôt, alors qu’ils se trouvent seulement dans les premiers stades de l’apprentissage de la lecture. Les enfants seraient capables d’utiliser leurs connaissances d’abord de manière implicite, puis de manière explicite, la transition survenant entre le jardin d’enfants et la première année. Par ailleurs, des auteurs ont relevé un lien entre ces connaissances morphologiques précoces et les connaissances phonologiques (Carlisle, 1995 ; Carlisle & Nomanbhoy,1993 ; Casalis & Louis-Alexandre, 2000 ; Singson et al., 2000).

B. Lien entre les connaissances morphologiques et phonologiques

Le lien entre les connaissances morphologiques et phonologiques est aisément visible dans le fait que les enfants réussissent mieux à identifier qu’un mot est de la même famille qu’un autre en cas de transparence phonologique plutôt que lorsqu’il y a une opacité phonologique (Carlisle, 1995). Cette tendance a été observée également dans une tâche de production de formes fléchies, dérivées transparentes et dérivées opaques (Carlisle et Nomanbhoy, 1993).

Des enfants âgés de 7 ans en moyenne devaient produire la forme correcte pour compléter une phrase, par exemple avec le mot « help » et la phrase « Father tells me that I am a good… » la réponse est « helper ». En moyenne, les enfants ont obtenu le score le plus élevé pour les formes fléchies (61.1%), suivi par les formes dérivées transparentes (40.9%), et le score le plus bas pour les dérivées opaques (11.2%). Les performances à cette tâche ont également été mises en relation avec les performances à une tâche de conscience phonologique. Tout d’abord, les enfants étaient divisés en deux groupes : le premier se trouvait au stade nommé « pré-phonémique », c’est-à-dire n’ayant pas encore développé une

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conscience phonémique. Le deuxième groupe en revanche était constitué d’enfants ayant développé une conscience phonémique et donc se trouvant au stade nommé « phonémique ».

Les analyses ont mis en évidence un effet significatif du groupe, les enfants du groupe pré- phonémique étant moins capables de produire des formes correctes de mots, qu’il s’agisse de formes fléchies ou dérivées. La conscience phonologique avait donc contribué de manière significative à la conscience morphologique.

Un lien entre les connaissances phonologiques et morphologiques a également été observé chez des enfants francophones (Casalis & Louis-Alexandre, 2000). Au jardin d’enfants, la tâche de segmentation syllabique et les tâches d’habiletés morphologiques sont fortement corrélées. En première et deuxième année, c’est la segmentation phonémique qui est corrélée avec les tâches d’habiletés morphologiques.

Le lien entre connaissances morphologiques et phonologiques est toutefois à relativiser. Une étude très récente de Casalis et Colé (2009) a montré une indépendance entre ces deux domaines, bien qu’ils partagent un certain nombre d’habiletés communes. Deux groupes d’enfants de 6 ans ont reçu respectivement un entraînement morphologique et un entraînement phonologique. Un troisième groupe contrôle n’a reçu aucun entraînement. Tous les enfants ont été soumis à des tâches de conscience morphologique et phonologique pré et post entraînement. Les deux types d’entraînement ont eu des effets positifs. Le groupe ayant reçu l’entraînement phonologique a obtenu des résultats meilleurs que les deux autres groupes aux tâches de conscience phonologique, et le groupe ayant reçu l’entraînement morphologique a significativement surpassé les deux autres groupes aux tâches de conscience morphologique. Certaines compétences ont été développées spécifiquement à chaque type d’entraînement, comme par exemple les compétences relatives aux tâches de segmentation phonémique et morphémique. D’autres compétences ont été transférées d’un type d’entraînement à l’autre : à la tâche de détection d’intrus de phonème initial, le groupe morphologique a surpassé le groupe contrôle, ce qui signifie que l’entraînement morphologique a contribué à accroître la sensibilité phonémique des enfants (sans pour autant exercer une influence sur leur capacité à manipuler explicitement le matériel phonologique).

En conclusion, conscience morphologique et phonologique mettent en œuvre certaines habiletés communes, mais constituent tout de même des domaines relativement indépendants.

Il est intéressant de savoir quelle influence ont chacune de ces habiletés sur l’apprentissage de la lecture. Comme cela a été mentionné plus haut, l’impact de la conscience phonologique a

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été largement étudié dans la littérature et son importance dans l’apprentissage de la lecture n’est plus à démontrer. L’impact des connaissances morphologiques en revanche est moins connu.

2.1.2 La relation entre les connaissances morphologiques et le niveau de lecture Bien que le rôle des habiletés morphologiques dans la lecture soit lié à celui des habiletés phonologiques, il semble qu’avec l’avancement dans le degré scolaire, la contribution de la conscience phonologique diminue, alors que celle de la conscience morphologique augmente (Singson et al., 2000). La contribution de la conscience phonologique à la variance totale de la lecture ne serait plus significative au-delà de la 3ème année primaire, alors que la contribution de la conscience morphologique s’accroîtrait progressivement à partir de la 4ème année.

Selon la plupart des études, les connaissances morphologiques expliqueraient une part de variance significative du niveau de lecture (Carlisle & Nomanbhoy, 1993 ; Carlisle, 1995 ; Carlisle, 2000 ; Singson et al., 2000 ; Casalis & Louis-Alexandre, 2000 ; Colé et al., 2003 ; Carlisle & Adison Stone, 2003 ; Colé et al., 2004 ; Deacon & Kirby, 2004). Cette part serait relativement faible en comparaison avec celle expliquée par la conscience phonologique, mais tout de même significative. Quant au moment auquel la morphologie commence à avoir un impact sur la lecture, on voit deux tendances dans la littérature : pour certains auteurs, la morphologie aurait une influence très tôt sur le niveau de lecture, même dans les premiers stades d’apprentissage, alors que pour d’autres l’impact serait plus tardif et interviendrait lorsque l’enfant se trouverait à un stade plus avancé de l’apprentissage de la lecture.

Singson et al. (2000) ont administré une tâche de conscience morphologique et une tâche de lecture à des enfants de la 3ère année à la 6ème année primaire. La tâche de morphologie consistait à compléter des phrases en choisissant le mot qui convient parmi par exemple chanteur, chanter, chantant etc (morphologie dérivationnelle), ceci avec des mots puis avec des pseudomots. La tâche étant présentée soit par écrit, soit par oral et écrit, ce qui fait 4 conditions. Le niveau de lecture a été déterminé grâce à une tâche de lecture de mots et une autre de pseudomots. Des corrélations significatives ont été observées entre les 4 conditions et les 2 tâches de lecture, allant de .40 (entre la tâche morphologique de pseudomots présentée oralement et la lecture de pseudomots) à .76 (entre la tâche morphologique manipulant des mots présentée par écrit et l’identification de mots). Des analyses de

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régression ont également été effectuées et ont révélé que la conscience morphologique prédit à elle seule 5% de la variance en lecture, au-delà des autres habiletés telles que la mémoire de travail, le niveau de vocabulaire et les habiletés phonologiques. Des résultats similaires ont été obtenus chez des lecteurs anglophones de 3P et 5P (Carlisle & Addison-Stone, 2003) et de 2P (Deacon & Kirby, 2004). La contribution des connaissances morphologiques à la lecture s’accroît entre la 2ème et la 6ème année (Mahony, Singson & Mann, 2000 ; Carlisle, 2000 ; Deacon & Kirby, 2004).

La conscience morphologique contribue non seulement à la composante « identification des mots écrits » de la lecture, mais également à la composante « compréhension ». Dans une recherche de Carlisle (2000) menée auprès d’enfants en 3ème et 5ème année primaire, la conscience morphologique a contribué à la compréhension en lecture chez les deux niveaux scolaires. Le lien entre conscience morphologique et compréhension était plus fort chez les enfants de 5ème année que chez ceux de 3ème année. D’après Nagy, Berninger, Abbott, Vaughan et Vermeulen (2003), la conscience morphologique contribue significativement de manière indépendante à la compréhension en lecture chez des lecteurs à risque de 2P.

Les recherches sur le sujet chez des enfants plus jeunes sont moins nombreuses et leurs résultats moins unanimes. Selon Carlisle et Nomanbhoy (1993), dès la première année primaire, la conscience morphologique contribue à la variance en lecture de mots chez des enfants anglophones. La contribution est faible par rapport à celle de la conscience phonologique (4% pour la conscience morphologique et 33.6% pour la conscience phonologique), mais tout de même significative. Dans cette étude, la conscience morphologique était évaluée à l’aide d’une tâche de jugement de relations de mots ainsi qu’une tâche de production de formes de mots. Seule la tâche de jugement a contribué de manière significative à la variance en lecture. Les mêmes résultats ont été rapportés par Colé et al. (2003) et Colé et al. (2004), qui observent que les performances à la tâche de jugement de relation de mots permettent de distinguer les bons apprentis lecteurs des faibles en 1P. Des connaissances morphologiques implicites auraient donc une influence sur la lecture de l’apprenti-lecteur de 1P. Ces connaissances jouent un rôle également un an plus tard, en effet, une corrélation de .54 avec les performances en lecture en deuxième année a été observée. En 2P, les deux tâches morphologiques explicites qui ont été administrées aux sujets (extraction de la base et compréhension des affixes) permettent de distinguer les niveaux de lecture : les élèves les plus performants à ces tâches le sont également en lecture de mots. En troisième

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année primaire, les tâches de jugement de relation de mots et d’extraction de la base ont un effet plafond, mais les performances à la tâche de compréhension des affixes permettent également de distinguer les niveaux de lecture.

Les résultats concernant la 1P sont toutefois différents dans l’étude de Casalis et Louis- Alexandre (2000). Des analyses de régression ont été effectuées dans le but de répondre à deux questions : 1) quelles compétences morphologiques en 1P et 2P peuvent expliquer les performances en lecture et 2) quelles performances à l’école enfantine peuvent prédire les performances ultérieures en 1P. Les résultats ont montré que les tâches de conscience morphologique n’ont pas prédit de variance en lecture en 1P, mais 16,3% de la variance a été prédite par ces tâches en 2P. Les observations de Carlisle (1995) sont similaires : les performances aux tâches morphologiques en 1ère année primaire prédisent un pourcentage de variance significatif en lecture de mots et en compréhension en lecture en 2ème année.

Malgré les résultats différents en ce qui concerne la première année, il ressort de ces recherches que les connaissances morphologiques contribuent précocement à la lecture, dès la 2ème année primaire (lecture de mots et compréhension). D’autres études ont traité la question de la lecture de mots morphologiquement complexes, afin de déterminer si les enfants traitent les unités morphologiques lorsqu’ils lisent.

2.2 Le traitement morphologique dans la lecture

2.2.1 L’identification des mots écrits

L’enfant apprenti-lecteur effectue un traitement morphologique lors de l’identification des mots écrits. Laxon et al. (1992) se sont intéressés au traitement morphologique dans les premières étapes de l’apprentissage de la lecture. Leur étude a porté sur des enfants anglophones âgés de 7, 8 et 9 ans, distingués en deux groupes : bons et mauvais lecteurs. Ils ont montré que les enfants anglophones, dès l’âge de 7 ans, effectuent une décomposition morphémique lors de la lecture de mots morphologiquement complexes. En effet, les enfants lisaient les mots affixés (comme par exemple « dancer ») avec une plus grande précision que les mots pseudo-affixés (comme par exemple « dinner »). Cet effet était significatif aussi bien chez les bons que chez les moins bons lecteurs. De plus, les suffixes en –er étaient lus significativement mieux que les suffixes en –ed, ceci par les deux groupes de lecteurs. Les auteurs expliquent cela par le fait que ceux en –er se prononcent toujours de la même façon,

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alors que ceux en –ed peuvent avoir plusieurs prononciations différentes. Ce n’est pas le cas chez les adultes. On observe là de nouveau l’interférence avec les éléments phonologiques chez l’enfant. Les résultats obtenus par Carlisle et Addison-Stone (2003) vont dans le même sens, les mots dérivés bi-morphémiques étant lus plus précisément que les mots monomorphémiques (à fréquence et longueurs égales), aussi bien chez les bons que chez les moins bons lecteurs de 3P et de 5P. Cette facilitation engendrée par le traitement morphologique semble quelque peu moins profitable aux lecteurs italophones. En effet, des résultats différents ont été observés dans une étude de Burani, Marcolini, De Luca et Zoccolotti (2008). D’après ces auteurs, chez les lecteurs italiens, une facilitation du traitement morphologique existerait seulement chez les enfants jeunes et les enfants dyslexiques. Les enfants déjà expérimentés en lecture ainsi que les adultes n’auraient pas besoin de la décomposition morphologique, car ils effectueraient un traitement au niveau du mot en entier.

Chez les enfants francophones également, il a été montré que l’apprenti-lecteur tire profit de la structure morphologique des mots écrits pour les lire (Colé et al., 2003 ; Casalis, Dusautoir, Colé & Ducrot, sous presse). Dès la 1ère année primaire, les enfants lisaient plus précisément et plus rapidement les mots préfixés que des mots pseudo-préfixés. De plus, ce traitement morphologique génère un effet de facilitation en lecture. Une tâche d’amorçage a été administrée à des enfants de 1P et 2P. Un mot cible affixé était présenté, précédé d’un mot amorce. Les mots amorces étaient de trois types : reliés morphologiquement au mot cible (par exemple le mot « laitier » est précédé du mot « lait », qui est sa base), reliés orthographiquement mais pas morphologiquement (par exemple le mot « laitier » est précédé par le mot « laitue »), ou n’entretenant aucun lien avec le mot cible (par exemple le mot

« laitier » est précédé par le mot « pomme »). L’amorçage orthographique avait pour but de montrer que l’effet de l’amorçage morphologique n’est pas uniquement dû à la ressemblance orthographique entre la base et le mot affixé. Les enfants devaient appuyer sur une touche dès qu’ils avaient reconnu le mot cible, et le restituer oralement. Les résultats ont révélé des temps de reconnaissance des mots cibles significativement plus courts dans la condition d’amorçage morphologique que dans les conditions d’amorçage orthographique et contrôle.

Cela montre un effet de facilitation morphologique dont bénéficient les lecteurs dès la 1P, et cet effet ne peut être dû à la seule ressemblance orthographique entre la base et le mot affixé.

Casalis et al. (Sous presse) obtiennent des résultats similaires chez des enfants de 4ème année.

Feldman, Rueckl et al. (2002) ont également utilisé l’amorçage, mais dans une tâche de

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complétion de mots fragmentés. Leurs résultats montrent également que la tâche est mieux réussie par les enfants dans la condition d’amorçage morphologique que dans les conditions orthographique et contrôle.

2.2.2 Le décodage

La décomposition morphologique faciliterait également la lecture des nouveaux mots (Laxon et al., 1992, Marec-Breton, Gombert & Colé, 2005). Les enfants décomposeraient précocement (dès la 1ère année) les pseudomots en unités morphémiques pour les lire. Dans l’étude de Laxon et al. (1992), les enfants devaient lire des pseudomots soit composés d’une racine réelle (par exemple « deeped »), soit d’une pseudo-racine (par exemple « neeted »).

Aussi bien les bons que les moins bons lecteurs lisaient mieux les pseudomots avec racine réelle que les pseudomots avec pseudo-racine. Ces résultats vont dans le sens d’une décomposition morphémique effectuée par les enfants, décomposition qui faciliterait la lecture des nouveaux mots. La facilitation de l’extraction d’informations morphologiques dans la lecture de mots inconnus a aussi été démontrée chez des apprentis lecteurs francophones, et ceci dès la 1P, par Marec-Breton et al. (2005). Les auteurs ont souhaité vérifier si les résultats de Laxon et al. (1992) étaient applicables aux enfants francophones. La moyenne d’âge des enfants était de 7,3 ans (inférieure à celle de Laxon et al. (1992) en raison d’un apprentissage de la lecture plus précoce en français). Les enfants étaient séparés en deux groupes (bons et mauvais lecteurs) et devaient lire des mots et des pseudomots à haute voix.

Les résultats attestent que les enfants effectuent une extraction d’informations morphologique qui leur facilite la lecture de mots inconnus.

Les apprentis-lecteurs italophones effectuent également un traitement morphologique qui leur facilite la lecture de mots nouveaux (Burani, Marcolini et Stella, 2002 ; Burani et al., 2008).

Cette facilitation est profitable aussi bien aux lecteurs jeunes ou dyslexiques qu’aux lecteurs expérimentés ou adultes (Burani et al., 2008). Les résultats à une tâche de lecture à haute voix ont montré que les pseudomots composés d’une base et d’un suffixe dérivationnel étaient nommés plus précisément et rapidement que les pseudomots non composés d’unités morphologiques (Burani, 2002). Les premiers étaient des pseudomots composés d’une racine et d’un suffixe réels (par exemple « donn -», racine de « donna » qui signifie « femme » et

« ista », suffixe réel en italien, le pseudomot résultant étant « donnista »). Les deuxièmes étaient des pseudomots ne comportant pas d’unités morphologiques réelles (par exemple

« denn » qui n’est pas une racine réelle en italien et « osto », qui n’est pas un suffixe réel, ce

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qui donne le pseudomot « dennosto »). Une tâche de décision lexicale a montré des résultats similaires, puisque les pseudomots composés d’une base et d’un suffixe dérivationnel étaient désignés plus fréquemment comme étant des mots possibles que les pseudomots qui n’étaient pas composés d’unités morphologiques.

En conclusion, les résultats de ces recherches font l’objet d’un relatif consensus sur le fait que le traitement morphologique représenterait une alternative au traitement phonologique dans la lecture, ce qui n’était pas envisageable quelques années auparavant.

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3 Questions de recherche et hypothèses théoriques

Dans la présente recherche, nous avons souhaité étudier aussi bien l’aspect des connaissances morphologiques que celui du traitement morphologique. A notre connaissance, seulement deux études réunissent ces deux aspects (celle de Colé, Marec-Breton, Royer et Gombert, 2003 et celle de Carlisle et Addison Stone, 2003). Notre recherche contribue également à accroître le nombre très restreint d’études existant sur le sujet en français (seulement quatre).

Notre population est constituée d’enfants normo-lecteurs francophones de Suisse. Nous avons administré les épreuves à des enfants de deux niveaux scolaires différents, les uns en 3ème année et les autres en 5ème année primaire. Notre choix s’est porté sur ces deux niveaux car, d’une part, il n’existe pas d’étude à notre connaissance allant au dessus de la 3ème année et, d’autre part, entre la 3P et la 5P surviennent des changements notoires qui différencient ces deux niveaux. Les 5P ont notamment développé les deux procédures de lecture (phonologique et orthographique) à ce stade, ce qui ne devrait pas encore être le cas des 3P, qui se trouveraient à un stade de l’apprentissage de la lecture plus précoce et encore moins bien établi. Il est par conséquent intéressant de comparer ces deux niveaux. Afin de vérifier cela, nous avons évalué l’utilisation des deux procédures de lecture chez les deux groupes de sujets. Nous avons également voulu nous assurer de leurs compétences phonologiques, au vu de l’importance de celles-ci dans l’apprentissage de la lecture, mais aussi leur lien avec les compétences morphologiques.

3.1 Questions de recherche

Le premier objectif de notre recherche est de déterminer le niveau des connaissances morphologiques chez des apprentis lecteurs francophones de 3P et 5P. Dans cette optique, nous leur avons administré des tâches de conscience morphologique implicites (une tâche de fluence morphologique et une tâche de détection d’intrus de base et de suffixe) et explicites (une tâche d’extraction de la base et une tâche de compréhension de pseudomots suffixés).

Le second objectif est de déterminer si les apprentis lecteurs francophones effectuent un traitement morphologique pour lire les mots dérivés et pour lire les nouveaux mots, et si ce traitement facilite leur lecture. Pour cela, nous leur avons administré une épreuve de lecture à haute voix de mots suffixés et pseudo-suffixés, ainsi qu’une épreuve de lecture à haute voix

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de pseudomots morphologiquement complexes. Afin d’obtenir des résultats différenciés et précis, nous avons mesuré la précision de lecture et les temps de latence.

Ainsi, avec cette recherche, nous souhaitons répondre aux questions suivantes :

• Quel est l’état des connaissances morphologiques des enfants francophones de 3P et de 5P ?

• Ces connaissances évoluent-elles entre la 3P et la 5P ?

• Les enfants se servent-ils de la structure morphologique des mots écrits pour les lire ?

• Ce traitement morphologique facilite-t-il aussi leur lecture de mots nouveaux ?

3.2 Hypothèses théoriques

Nos hypothèses sont les suivantes : Les enfants de 3ème et ceux de 5ème année devraient montrer des connaissances morphologiques relativement importantes. Ces connaissances devraient évoluer entre la 3P et la 5P, dans le sens où les enfants de 5P devraient montrer de meilleures compétences morphologiques que les 3P. Les enfants des deux degrés devraient utiliser les unités morphémiques pour lire les mots complexes et les mots nouveaux. Cette procédure devrait faciliter leur lecture.

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4 Méthode

4.1 Participants

Les épreuves ont été administrées à 41 enfants, dont 20 en 3ème année et 21 en 5ème année primaire, fréquentant des écoles genevoises ordinaires. Les sujets ont été présélectionnés sur la base des critères suivants : les enfants devaient être monolingues francophones, ne pas avoir redoublé ni être en avance d’une année scolaire, ne pas présenter de déficit en lecture ni en intelligence non verbale. Les deux premiers critères (monolinguisme et parcours scolaire) nous ont été certifiés par les enseignants. Les deux autres critères (pas de déficit en lecture ni en intelligence non verbale) ont été testés au moyen d’épreuves standardisées.

Le niveau de lecture des enfants a été déterminé au moyen du test L’Alouette (Lefavrais, 1967). Ce test permet de déterminer l’âge de lecture du sujet. Les sujets ayant un âge de lecture inférieur de plus de 18 mois par rapport à leur âge chronologique ont été retirés de l’échantillon. La compréhension en lecture a été testée au moyen de l’épreuve L4 du ORLEC (Lobrot, 1980). Le nombre de bonnes réponses est relevé au terme du test et le sujet obtient une note sur 10. L’intelligence non verbale a été évaluée au moyen des matrices de Raven (Raven, 1956). Cette épreuve a été utilisée uniquement en tant que critère d’inclusion/exclusion de nos sujets. Les sujets ayant obtenu un score inférieur au percentile 10 ont été retirés de l’échantillon.

Nous avons également souhaité nous assurer du niveau de vocabulaire satisfaisant de nos sujets. Dans cette optique, nous leurs avons administré le test standardisé EVIP (Dunn, Theriault-Whalen. & Dunn., 1993). Les items ont été présélectionnés en fonction de l’âge chronologique des sujets afin de réduire le temps de passation. La tâche est présentée sous forme informatisée (logiciel PowerPoint). Quatre images sont présentées à l’enfant sur l’écran d’ordinateur et un mot qui correspond à l’une d’entre elles lui est présenté oralement.

L’enfant doit désigner la bonne image. On calcule le pourcentage de bonnes réponses.

Au final, sur les 41 enfants présélectionnés, 7 enfants ont été retirés au total : 1 de 3P (en raison de l’intelligence non verbale) et 6 de 5P (3 en raison de l’âge de lecture, 2 en raison de l’intelligence non verbale et 1 qui a été exclu d’emblée en raison d’une trop grande lenteur lors de la lecture à l’Alouette). L’échantillon final est donc composé de 34 enfants, dont 19 de 3P et 15 de 5P. Parmi eux, 19 sont de sexe féminin (10 de 3P et 9 de 5P) et 15 sont de sexe

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masculin (9 de 3P et 6 de 5P). Le tableau I ci-dessous résume les informations concernant les participants.

Tableau I

Moyennes (écarts-types) de l’âge chronologique, de l’âge de lecture, du score à la compréhension en lecture, du score aux matrices de Raven et du pourcentage de bonnes réponses en vocabulaire des enfants de 3P et 5P.

Niveau scolaire

N Age

chronologique (années)

Age de

lecture (Alouette) (années)

ORLEC (L4) Matrices de Raven

Vocabulaire (EVIP)

3ème

primaire 19 8.93 (0.3) 9.60 (1.3) 5.74 (2,13) 31.42 (3.5) 85.02 (6.23) 5ème

primaire 15 11.02 (0.3) 11.49 (1.1) 7.67 (2,06) 33.26 (1.5) 85 (7.73)

Les 2 groupes se différencient significativement sur leur âge de lecture (Alouette) (t(32)=4,39, p<.001), en faveur des 5P. La différence entre l’âge de lecture et l’âge chronologique est marginale pour les 3P (t(18)=2,07, p=0,053) et non significative pour les 5P (t(14)=1,55, ns). Les 3P ont donc tendance à mieux lire que ce qu’ils devraient par rapport à leur âge chronologique, mais pas les 5P. Les 3P et les 5P se différencient significativement sur la compréhension en lecture (ORLEC) (t(32)=2,66, p<.01), en faveur des 5P. Les enfants de 3P et de 5P ont présenté un niveau de vocabulaire satisfaisant, le pourcentage de bonnes réponses des enfants de 3P étant en moyenne de 85,02 (écart-type = 6,23) et celui des 5P de 85 (écart-type = 7,73).

4.2 Caractéristiques de la population

Les habiletés phonologiques et l’utilisation des procédures de lecture (orthographique et phonologique) ont été évaluées.

4.2.1 Habiletés phonologiques

Les habiletés phonologiques ont été évaluées au travers de la conscience phonologique et la mémoire à court terme phonologique. Les épreuves sont issues de la batterie EVALEC (Sprenger-Charolles et al., 2005). Les consignes et items de ces épreuves sont présentés dans l’annexe A.

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A. Présentation des tâches

a) Conscience phonologique

La conscience phonologique a été évaluée grâce à trois sous-épreuves: une tâche de suppression de la première syllabe et deux tâches de suppression du premier phonème. Pour la suppression de la première syllabe, l’enfant entend 10 pseudomots trisyllabiques et doit les répéter en enlevant la première syllabe (exemple : « povidu » → « vidu »). Pour la suppression du premier phonème, il entend 12 pseudomots triphonémiques de structure consonne – voyelle – consonne (CVC), par exemple « puf » (→ « uf »), et 12 pseudomots triphonémiques de structure consonne – consonne – voyelle (CCV), par exemple « klo » (→

« lo ») et il doit les répéter en enlevant le premier phonème. Les caractéristiques des items sont présentées en annexe. Ces tâches sont informatisées. L’enfant porte un casque audio relié à l’ordinateur, dans lequel il entend les items préenregistrés. Lorsque l’enfant donne sa réponse à un item, l’expérimentateur clique deux fois, le premier clic permettant d’enregistrer le temps de réponse et le deuxième de lancer l’item suivant. Le temps total est enregistré par l’ordinateur. L’expérimentateur relève les erreurs et en calcule le pourcentage de bonnes réponses.

b) Mémoire à court terme phonologique

La mémoire à court terme phonologique a été testée au moyen d’une tâche de répétition de pseudomots. Les items sont de longueur croissante : 6 pseudomots trisyllabiques (par exemple « moukola »), 6 quadrisyllabiques (ex. « gontadiro »), 6 de cinq syllabes (ex. « tabaritolu ») et 6 de six syllabes (ex. « vardotivaruté »). Comme les tâches de conscience phonologique, elle est informatisée et les items sont présentés à l’enfant via un casque audio relié à l’ordinateur. L’enfant entend un pseudo-mot et doit le répéter. Lorsque le sujet a donné sa réponse, l’expérimentateur clique deux fois et le sujet entend l’item suivant. Le pourcentage d’erreurs est calculé et le temps de réponse est enregistré.

B. Hypothèses

On s’attend à une évolution des performances entre la 3ème primaire et la 5ème primaire en termes d’habiletés phonologiques. Sprenger-Charolles et al. (2005) ont en effet montré que les performances en conscience phonologique évoluent entre la 1ère et la 4ème année d’apprentissage de la lecture. Dans ce sens, on peut s’attendre à ce que ces performances évoluent encore en 5ème année. Les enfants de 5P devraient présenter des résultats

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significativement supérieurs à ceux des 3P en termes de précision et de rapidité dans les tâches rendant compte de la conscience phonologique et de la mémoire à court terme phonologique.

4.2.2 Evaluation des procédures en lecture (orthographique et phonologique)

A. Présentation de la tâche

L’utilisation des deux voies de lecture, orthographique et phonologique, dans l’identification des mots écrits a été évaluée par une tâche de lecture à haute voix de mots irréguliers (tels que par exemple « automne » et « technique ») et de pseudomots (comme par exemple « aspouche » et « tarmine »), courts et longs. Cette tâche est informatisée et issue de la batterie EVALEC (Sprenger-Charolles et al., 2005). Elle comporte une liste de mots irréguliers, présentée en premier lieu, et une liste de pseudomots, présentée ensuite. Chacune des deux listes comporte 20 items, 10 courts et 10 longs et 2 items constituent la phase d’entraînement.

Les items sont appariés en fonction de la longueur (nombre de lettres, de syllabes et de phonèmes), de la fréquence orthographique (fréquence des bigrammes) et du graphème initial. Les caractéristiques des items sont présentées dans le tableau II ci-dessous.

L’expérience est présentée sur un écran d’ordinateur. Pour chaque item, la séquence des événements est la suivante. Une croix s’affiche d’abord sur l’écran pendant 100 ms. L’item apparaît. L’enfant le lit à haute voix et l’expérimentateur clique sur une touche de l’ordinateur afin de passer à l’item suivant. Chaque réponse du sujet est enregistrée via un microphone relié à l’ordinateur. Les résultats ont été relevés grâce à un logiciel fourni avec EVALEC (Sprenger-Charolles et al., 2005). On mesure la précision et le temps de lecture.

Pour cela, on relève les items correctement lus et pour chacun de ces items, le temps de latence (temps mis pour initier la lecture) est mesuré manuellement. Chaque item a été écouté et seuls les items lus sans hésitation et de manière intelligible ont été traités. Les listes des items sont présentées dans l’annexe B.

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Tableau II

Moyenne de la longueur en nombre de lettres, phonèmes, syllabes et de la fréquence lexicale et en bigrammes des mots et des pseudomots en fonction de la longueur.

Mots Longueur en nombre de Fréquence

Lettres Phonèmes Syllabes Bigrammes Lexicale

Courts 4,30 3,10 1,30 713,45 18,90

Longs 8,00 6,00 2,40 988,72 10,20

Courts et longs 6,15 4,55 1,85 851,08 14,55

Pseudomots

Courts 4,40 3,10 1,20 768,64

Longs 7,80 6,10 2,50 1053,96

Courts et longs 6,10 4,60 1,85 911,30

B. Hypothèses opérationnelles

On s’attend à ce qu’il y ait une évolution des performances en lecture entre la 3P et la 5P. Les enfants de 5P devraient donc lire plus rapidement et précisément les mots et les pseudomots (PM) que les enfants de 3P. On s’attend à ce que les enfants de 5P utilisent la voie orthographique pour lire. Ils devraient donc lire plus rapidement et précisément les mots irréguliers que les PM et l’effet de longueur devrait être absent pour les mots. On s’attend à ce que les enfants de 3P n’aient pas encore automatisé la procédure orthographique de lecture pour les mots irréguliers, comme l’étude de Sprenger-Charolles et al. (2003) l’a montré (utilisation de la voie orthographique pour lire les mots irréguliers qu’en fin de 3ème année).

Si les enfants utilisent la voie phonologique pour lire, alors ils devraient moins bien lire les mots irréguliers que les PM et on devrait trouver un effet de longueur pour les PM. De plus, on s’attend à observer un effet de longueur des mots pour les 3P puisque ceux-ci n’auraient pas encore automatisé la procédure orthographique de lecture.

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