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Regards sur les migrants de longue distance en Grèce. Analyse de procédures et d'acteurs à partir de trois points d'observation privilégiés: la région de l'Evros, Athènes et Patras

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Regards sur les migrants de longue distance en Grèce. Analyse de procédures et d'acteurs à partir de trois points d'observation

privilégiés: la région de l'Evros, Athènes et Patras

DEL BIAGGIO, Cristina CAMPI, Alberto (Photogr.)

Abstract

La décision de la Grèce de construire une clôture à sa frontière orientale a fait la une sur Internet et dans les journaux, mais la matérialisation de la frontière par la construction d'une clôture n'est, en Grèce comme ailleurs, qu'un élément d'un système et d'un dispositif frontalier (Bigo et al., 2009). Cet article est le fruit de sept semaines d'enquêtes passées le long de la frontière gréco-turque, afin de comprendre les dynamiques frontalières là où, selon les statistiques, l'on compte le plus grand afflux de migrants dits illégaux vers l'Europe. Les observations sur le terrain nous permettent de dire que la clôture, qui a été achevée en décembre 2012, ne peut être considérée que dans la totalité du dispositif frontalier, non linéaire, mis en place par la Grèce et par l'Union Européenne pour empêcher les migrants de pénétrer dans la forteresse européenne. Ce sont également ces autres barrières, indirectement visibles car souvent non-matérielles, que nous essayons d'analyser.

DEL BIAGGIO, Cristina, CAMPI, Alberto (Photogr.). Regards sur les migrants de longue distance en Grèce. Analyse de procédures et d'acteurs à partir de trois points d'observation privilégiés: la région de l'Evros, Athènes et Patras. L'Espace Politique , 2013, vol. 20, no. 2

DOI : 10.4000/espacepolitique.2675

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:29027

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L'Espace Politique

20  (2013-2)

Barrières frontalières

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Cristina DEL BIAGGIO et Alberto CAMPI

Regards sur les migrants de longue distance en Grèce

Analyse de procédures et d'acteurs à partir de trois points d'observation privilégiés: la région de l'Evros, Athènes et Patras

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Référence électronique

Cristina DEL BIAGGIO et Alberto CAMPI, « Regards sur les migrants de longue distance en Grèce », L'Espace Politique [En ligne], 20 | 2013-2, mis en ligne le 18 juillet 2013, Consulté le 18 juillet 2013. URL : http://

espacepolitique.revues.org/index2675.html ; DOI : 10.4000/espacepolitique.2675 Éditeur : Département de géographie de l'université de Reims Champagne-Ardenne http://espacepolitique.revues.org

http://www.revues.org

Document accessible en ligne sur :

http://espacepolitique.revues.org/index2675.html Document généré automatiquement le 18 juillet 2013.

Tous droits réservés

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Cristina DEL BIAGGIO et Alberto CAMPI

Regards sur les migrants de longue distance en Grèce

Analyse de procédures et d'acteurs à partir de trois points d'observation privilégiés: la région de l'Evros, Athènes et Patras

Introduction

1 Dans cet article, nous proposons une analyse de trois lieux, en montrant à chaque fois comment les problèmes migratoires étaient gérés, jusqu'en décembre 20121, par les autorités grecques:

la région de l'Evros, Athènes et Patras. Dans ces lieux, des frontières entre migrants et non- migrants se dessinent, non pas uniquement des frontières politiques divisant deux Etats, mais également celles de la ségrégation ethnique qui morcèlent les villes d'Athènes et de Patras.

Le lieu, isolé, où les migrants s'alignent pour suivre la procédure du dépôt des demandes d'asile est aussi délimité par une frontière, rendue étanche par sa fermeture par la police. A l'aide des observations récoltées nous soutenons l'idée, forgée par P. Cuttitta, qu'il existe un

"monde-frontière". Un monde, globalisé, dans lequel les frontières n'ont pas disparu, mais se reproduisent et se diversifient en devenant omniprésentes (Cuttitta, 2007). Dans ces lieux- frontière, la gestion de la migration passe par la violence et le "jeu emmêlé des pouvoirs" (Bigo et al., 2009, p.10).

2 Une analyse des observations récoltées durant l'été 2012 sur place est proposée dans cet article, après une introduction générale sur la situation des migrants en Grèce.

3 Sans rentrer dans les détails, il est important pour les propos de cet article de rappeler que la Grèce, notoirement connue pour être un pays d'émigration, est devenu un pays "à forte immigration" à partir des années 1980 avec un afflux important de personnes de la région des Balkans et de l'Europe centrale et orientale et, dès les années 1990, avec des migrants arrivant d'Asie du sud-est (Bangladesh et Pakistan) et d'Afrique sub-saharienne (Kasimis &

Kassimi, 2004; Sintès, 2008, p.263; Triandafyllidou, 2009; Triandafyllidou & Maroufof, 2009;

Triandafyllidou & Ambrosini, 2011, p.255 et suiv.).

4 C'est dans ces années-là que les autorités grecques ont commencé à prendre différentes mesures, notamment législatives (Triandafyllidou, 2009), concernant les migrants présents sur le territoire (entre autres par des promulgations de lois pour faciliter la régularisation et l'expulsion d'étrangers en situation irrégulière, par la création de corps de gardes-frontières)2.

5 Plus récemment, les autorités helléniques ont réagi à deux chiffres publiés dans le rapport 2010 de l'Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des Etats membres de l'Union Européenne (Frontex) montrant que "90% of all detections of illegal border crossing to the European Union" " ont eu lieu à la frontière gréco-turque terrestre ou maritime (Frontex, 2010, p.3) et que 60% de ces arrestations ont été effectués dans le district d'Orestiada (Frontex, 2010, p.9). Ainsi, avec ces statistiques à l'appui, les autorités grecques ont, d'une part, demandé un contingent de gardes frontières européens à l'Union européenne (UE). Celui-ci a été déployé dès 2010 dans le cadre du règlement des équipes d'intervention rapide aux frontières (RABIT), un mécanisme "visant à fournir une assistance technique et opérationnelle renforcée pour une période limitée sous la forme d'équipes d'intervention rapide aux frontières comprenant des gardes-frontières d'autres États membres"3. D’autre part, la Grèce a justifié au monde entier la nécessité de construire une clôture4pour bloquer les migrants, là où l’on a comptabilisé le plus grand afflux à partir de 2009, soit dans le district d'Orestiada, dans la préfecture de l'Evros (fig. 1).

6 Pourtant, une brève contextualisation de ces chiffres s'avère nécessaire afin de comprendre sur quelle base les autorités grecques et européennes se sont fondées pour légitimer ces mesures.

Si, en effet, il est incontestable "[qu']entre 1991 et 2001, le nombre d'étrangers [a] augment[é]

considérablement pour passer de 176'276 à 797'093" (Sintès 2008, p.263), il ne faut pas oublier

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que "ceux-ci sont essentiellement originaires des autres pays balkaniques, au premier rang desquels figure l’Albanie", comme P. Sintès le souligne (Sintès 2008, p.263; v. aussi Sintès, 2003). De plus, comme on peut le lire dans le rapport de Frontex: "Half of [the persons arrested in the Orestiada district] were Albanian workers who routinely cross the border back and forth each year to exploit seasonal employment opportunities in Greece" (Frontex, 2010; v. aussi Carrera & Guild, 2010; Ritaine, 2012; Sintès, 2011). Or, ces chiffres ne sont que rarement ajoutés pour relativiser ceux, relayés dans les médias et dans l'opinion publique, de l'"invasion" (Triandafyllidou, 2000, v. aussi Bernardot, 2011, p.48 et suiv.; Ritaine, 2012, p.22; Sintès, 2011, p.387 et suiv.).

7 Cela dit, même en relativisant les chiffres déployés par les autorités grecques et les médias nationaux et internationaux, il s’avère que le nombre de migrants de longue distance ayant traversé la frontière terrestre entre la Grèce et la Turquie a augmenté depuis 2009 (Triandafyllidou & Maroufof, 2009, p.40). C'est à cette migration que nous allons nous intéresser ici.

Méthodologie

8 Le terrain a duré deux mois, pendant l'été 2012. Accompagnée par un photographe, Alberto Campi5, nous sommes partis afin de mener à bien des enquêtes approfondies dans quelques lieux emblématiques de la migration en Grèce, où nous avons récolté des récits du parcours migratoire et du vécu en Grèce des migrants et observé les pratiques des autorités (notamment à Petrou Ralli, à Athènes). Nous voulions apporter un regard scientifique sur la/les frontière(s) en lien avec le phénomène migratoire récent et jugé comme étant "alarmant" dans les médias.

Cerner les phénomènes frontaliers aux abords du pays, ainsi qu'à l'intérieur de celui-ci, pour en faire ressortir une sorte de typologie était l'objectif premier de ce terrain.

9 Notre terrain s'est déroulé en quatre étapes, en suivant l'itinéraire potentiel amenant les migrants depuis leur pays d'origine à un pays d'Europe occidentale: Istanbul, la région de l'Evros, Athènes et Patras. Sur place, nous avons habité proche des migrants, afin de pouvoir les rencontrer régulièrement et pour récolter leurs témoignages sur leur expérience migratoire et frontalière. Les entretiens réalisés ont été enregistrés et des notes écrites et audio ont été prises.

10 Alberto Campi a récolté en tout 7'500 clichés. J'ai effectué 44 entretiens enregistrés. A cela s'ajoutent une dizaine d'entretiens moins formels pour lesquels j'ai pris uniquement des notes écrites. Les entretiens, de durée variable (quelques minutes à plusieurs heures) n'étaient pas structurés, car ils dépendaient du lieu de l'entretien, des capacités linguistiques des interviewés, des conditions de migration, du pays d'origine du migrant et des informations que le migrant pouvait nous fournir.

Premier point d'observation: La région de l'Evros Evolution de la route migratoire grecque à partir de 2009

11 Les statistiques de Frontex (2012) montrent une nette augmentation, dès 2009, des migrants en situation irrégulière interceptés sur ce qu'ils dénomment la route de la "Méditerranée orientale". Celle-ci se divise en deux secteurs, le secteur terrestre, dans la région de l'Evros, et le secteur maritime traversant la Mer Egée (tab. 1).

Tab. 1: Migrants en situation irrégulière interceptés sur la route de la "Méditerranée orientale"

Source: Frontex, 2012

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12 Pour ce qui concerne le secteur terrestre, c'est à partir de 2010 que la région de l'Evros (fig.

1) est devenue une "cible pour les trafiquants" (entretien avec le chef de la police d'Orestiada, G. Salamangas, du 26.06.2012).

Fig. 1: Préfecture de l'Evros en Grèce

© Wikimedia Commons

13 La "route de l'Evros" se divise elle-même en deux secteurs (fig. 2), septentrional (Didimoticho et Orestiada) et méridional (Alexandroupoli et Soufli). Dans le secteur nord, alors qu'en 2009 3'500 migrants ont été arrêtés, ce chiffre a augmenté à 36'000 en 2010, pour baisser à 28'201 en 2011 (entretien du 26.06.2012 avec Salamangas). Cette diminution contrebalance l'augmentation des afflux dans la région méridionale, de Soufli à Alexandroupoli (entretien avec le porte-parole des forces de police d'Alexandroupoli du 24.06.2012).

Fig. 2: Les municipalités de la préfecture de l'Evros

1 – Alexandroupoli; 2 – Didimoticho; 3 – Orestiada; 4 – Samothrakis; 5 – Soufli

© Wikimedia Commons

14 Des raisons liées au durcissement des contrôles migratoires dans la Méditerranée peuvent expliquer cette évolution des axes migratoires6 de la Méditerranée centrale à la Méditerranée orientale (Bialasiewicz, 2011; Dany, 2011; McDonough & Tsourdi, 2012; Nordhausen, 2011;

Rodier, 2012).

15 Mais une autre raison, primordiale, aide à comprendre l'augmentation des passages dans la région de l'Evros. En 2009, la Grèce et la Turquie ont complété le déminage de leur zone frontalière terrestre7. Ainsi, avec la diminution des dangers dus aux mines anti-personnel8, les passages ont considérablement augmenté.

16 Si l'on ajoute à cela des éléments liés à la configuration frontalière de la région de l'Evros (fig.

3), on comprend pourquoi les passages ont surtout augmenté dans sa partie septentrionale.

Le fleuve Evros matérialise, sur environ 200 km, la frontière politique divisant la Grèce de

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la Turquie, à l’exception du "triangle de Karaagac". Cette portion de territoire de quelques dizaines de kilomètres carrés, obtenue par la Turquie lors du Traité de Lausanne de 1923, est exploitée par les migrants, depuis le déminage, pour entrer plus facilement en Grèce.

Fig. 3: La géographie de la région de l'Evros et de la clôture

Stopper les flux migratoires par la construction d'une clôture

17 En janvier 2011, le ministre grec Papoutsis déclare à l'agence de presse Ana: "La société grecque a dépassé ses limites en matière de capacité d'accueil des migrants clandestins. Aux frontières terrestres, nous planifions la création d'une clôture pour bloquer l'immigration irrégulière"9 (v. aussi Rodier, 2012, p.62). En septembre 2011, la Grèce fait un appel d'offre pour la construction d'une clôture de 12.5 km de long et 3 mètres de haut (figg. 4 et 5). Une entreprise locale a remporté le marché en proposant le prix de 3 millions d'euros, financés par le gouvernement grec, suite à la décision de non-participation de la part de l'UE. La commissaire européenne chargée de la sécurité a justifié ainsi la décision: "Les murs ou les grillages sont des mesures à court terme qui ne permettent pas de s'attaquer de manière structurelle à la question de l'immigration clandestine" (Salles, 2012). Pourtant, l'UE a cofinancé le système de caméras de vidéosurveillance (entretien avec Salamangas du 26.06.2012), ce qui, en fait, revient à financer sinon la clôture lui-même, en tout cas le durcissement de la barrière frontalière. Les travaux ont été terminés en décembre 2012, la dernière étape d'un processus qui, depuis 20 ans, a amené la Grèce à augmenter considérablement ses efforts dans le contrôle des ces frontières (Triandafyllidou & Ambrosini, 2011, p.259).

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Fig. 4: Le module "couché" pour la construction de la clôture

© Alberto Campi 2012

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Fig. 5: La section de la clôture

Dessin de Cristina Del Biaggio et Alberto Campi d'après ProAsyl, 2012, p.10

La clôture, un instrument psychologique

18 Vallet et David écrivaient en 2012 qu'aucune analyse d'ensemble n'existe sur les impacts de la construction des murs sur les zones frontalières (Vallet & David, 2012, p.6). Si le matériel récolté sur place ne nous permet pas de répondre à une telle ambition, nous pouvons néanmoins donner des réponses concernant les fonctions que la clôture grecque remplit au niveau local, soit là où les situations d'urgence en matière de migration doivent être gérées (Ritaine, 2012).

19 Sauf rares exceptions, le consensus semble unanime sur le fait que la clôture ne fera que déplacer le problème. Pourtant, certains croient à l'efficacité de la clôture. Le chef de la police d'Orestiada admet que "seulement avec le fait d'avoir annoncé vouloir construire cet obstacle technique, les immigrés ont été guidés vers la frontière fluviale et le nombre de passages ici a diminué" (entretien du 26.06.2012). En conséquence, la traversée du fleuve étant plus dangereuse que celle de la partie terrestre, avec la construction de la clôture, les victimes seront plus nombreuses, alors qu'avant même la finition de la clôture, et pour la seule année 2010, 70 corps ont été retrouvés du côté grec (Bui, 2012). Aucune statistique n'est connue du côté turc, mais on peut s'imaginer que les chiffres turcs reflètent ceux de la Grèce.

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20 Si les clôtures ne servent pas à la gestion du problème migratoire, pourquoi en ériger de nouvelles?

21 Rodier consacre un chapitre de son livre à la "fonction psychologique" des murs et clôtures (Rodier 2012). Sa théorie colle parfaitement aux mots prononcés par l'adjoint au maire d'Orestiada: "Le mur est avant tout un instrument psychologique pour les citoyens, une barrière visuelle qui fait en sorte que quand quelqu'un va dans un champ il est rassuré qu'il ne rencontrera pas de migrants" (entretien du 29.06.2012, mise en évidence par l'auteur). L'adjoint comme le maire nous ont dit que le problème le plus grand pour eux est la gestion de la peur de la population de cette petite ville de 40'000 habitants. Un habitant de la région nous a confirmé que "ce n'est pas bien qu'il y ait autant de migrants. Ils arrivent de partout, peut-être 200 par jour. Il y a des gens qui ont peur, les migrants n'ont pas d'argent, ils ont faim. Les gens, ici, dorment avec des armes". Pourtant, plus loin dans la discussion, il admet qu'"ici il n'y a pas de problèmes. Nous n'avons pas peur, les problèmes sont à Athènes" (entretien du 30.06.2012)10.

Fig. 6: Gare d'Orestiada, des migrants attendent le train de 5h13 pour Alexandroupoli

© Alberto Campi 2012

La clôture, un instrument politique

22 La clôture remplit également une fonction politique d'affichage du pouvoir, en "fonctionn[ant]

de façon théâtrale, en projetant un pouvoir et une efficacité qu'ils n'exercent pas réellement" (Brown, 2009). En effet, à chaque barrière érigée, il y a "mille manières" de pouvoir la contourner, notamment par la modification des trajets migratoires (Ritaine, 2009, p.27). Ainsi, les clôturesservent au niveau local afin de "donner l'impression, ou l'illusion, de 'faire quelque chose'" (Neisse & Novosseloff, 2010, p.737, v. aussi Vallet et David, 2012, p.18). Les clôtures rassurent, en enfermant dehors les "indésirables" (Ritaine, 2009, p.19).

23 Les pouvoirs en place utilisent la clôture pour montrer qu'ils s'emparent des thèmes qui préoccupent la population et essaient ainsi de contrecarrer le pouvoir des nouvelles forces politiques d'extrême droite. Ces dernières ont été les grands vainqueurs des dernières élections.

Presque inconnu en 2009 avec 0.29% des préférences au niveau national, le parti Chrysi Avgi (Aube dorée) a obtenu le score de 6.97% en juin 201211. Le succès du parti a été construit sur la peur des immigrés. A cela s'ajoute la situation socio-économique critique de la Grèce (Donadio & Bounias, 2012; Donadio & Kitsantonis, 2012; Genoux, 2012; Molard, 2012). Un jeune chômeur vivant dans un quartier d'Athènes avoue que "les habitants ont été oubliés par le gouvernement, qui n'a rien fait concernant l'immigration" (Howden, 2012). Or, Chrysi Avgi a obtenu du succès surtout grâce à leur présence sur le terrain, en agissant là où les forces de l'ordre ne le font pas: en intervenant publiquement et physiquement contre les immigrés12.

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24 Dans un climat social fortement marqué par la xénophobie (HRW, 2012) et où les partis traditionnels sont accusés de ne rien faire pour stopper la vague migratoire, l'argument de la clôture a été utilisé par les politiciens représentant ces mêmes partis pour montrer qu'ils entreprenaient des mesures pour prendre au sérieux les peurs des citoyens.

25 Parallèlement, la clôture est aussi utilisé epar la Grèce comme une réponse aux pressions internationales qu'elle subit de la part de certains pays européens13 et de l'UE elle-même pour qu'elle "rationalise ses contrôles à la frontière" (Ritaine, 2012) en la rendant plus étanche.

26 Cette pression et cette nécessité de trouver des solutions se fonde également sur ce que l'on pourrait appeler la "guerre des chiffres de l'urgence" (v. aussi Sintès, 2011). L'intervention en Grèce de Frontex a été justifiée sur la base du fait qu'en 2010 "90% des clandestins appréhendés en 2010 lors de passages clandestins des frontières extérieures de l'UE l'ont été aux frontières terrestres grecques" (Ritaine, 2012, v. aussi Rodier, 2012, p.10). Ces chiffres ont été fournis à Frontex par l'administration grecque, utilisés tels quels par l'agence européenne et repris par les médias et associations/agences (v. le rapport de la European Union Agency for Fundamental Rights, 2011, p.12). Ils doivent être en réalité fortement relativisés car une grande partie des passages recensés se révèlent être ceux de migrants saisonniers albanais (Ritaine, 2012)14. C'est pourtant sur la base de chiffres alarmistes que les discussions ont eu lieu entre la Grèce et ses partenaires européens.

Stopper les migrants en allant à leur chasse

27 La construction de la clôture a été accompagnée par une autre mesure: l'augmentation des forces de l'ordre présentes dans la région de l'Evros, qui étaient composées à l'été 2012 de 600 policiers15, un nombre inconnu de militaires auxquels s'ajoutent, depuis 2010, 175 gardes frontière de 26 pays européens déployés dans le cadre des premier Rapid Border Intervention Team (RABIT)16(Carrera et al., 2010). Ces derniers ont été déployés par l'UE suite à une demande d'aide de la Grèce, fondée sur des chiffres pour le moins discutables (Ritaine, 2012), comme on l'a vu, mais qui contribuent à alimenter le discours de la menace et à légitimer des mesures politiques (Kasparek, 2010, p.115).

28 Alors que le déploiement d'importantes forces n'a pas atteint le résultat espéré (Triandafyllidou

& Ambrosini, 2011, p.259), les pratiques des migrants dans la région questionnent cette mesure en faisant surgir un évident paradoxe. Comme nous l'avons constaté sur le terrain, la première question que les migrants posent dès qu'ils rencontrent un résident est de savoir où se trouve le poste de police le plus proche. Les migrants savent que la police les transfèrera dans des centres d'enregistrement. Dans ceux-ci, ils sont identifiés et leurs empreintes digitales enregistrées et envoyées, selon la procédure instaurée par le règlement de Dublin II, vers la base de donnée Eurodac17. Ce système permet de disposer d'une base de données commune afin de déterminer les autorités nationales compétentes du dossier d'asile18. L'article 13 du règlement de Dublin II stipule en effet que "le premier État membre auprès duquel la demande a été présentée est responsable de l'examen"19.

29 Il est important de noter qu'à la fin de cette procédure les migrants obtiennent le white paper, un papier qui, à leurs yeux, leur laisse la liberté de circuler sur le territoire grec pendant 30 jours, alors qu'en réalité c'est un document qui les oblige à quitter le pays dans ce délai. Les migrants, pourtant, ne semblent pas se rendre compte de la subtile différence dans l'interprétation, comme les mots de ce Bangladais le confirment: "Maintenant nous n'avons plus peur, car la police nous a donné ce papier qui nous permet de rester ici pendant un mois.

Nous sommes libres dans ce pays" (entretien du 28.06.2012). C'est la certitude d'obtenir ce papier qui pousse les migrants à rechercher la police, comme nous l'a confirmé le chef de la police Salamangas: "Nous arrêtons toutes les personnes que nous trouvons sur le bord de la rivière et nous les transférons dans les centres de rétention. Les personnes que nous ne détectons pas viennent seules se faire arrêter. Si nous n'allons pas les chercher, elles vont arriver toutes seules" (entretien du 26.06.2012).

30 La question surgit spontanément: pourquoi dépenser autant d'argent et employer tant d'hommes pour aller chercher des personnes qui viendraient de leur plein gré? Le déploiement

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des forces de l'ordre comme la construction de la clôture semblent deux stratégies mises en place pour répondre à un seul objectif: la mise en scène du pouvoir.

Les centres de rétention dans la région de l'Évros

31 Le "blindage" d'une frontière se fait non seulement par la construction de barrières, mais aussi à travers des procédures de rétention (Ritaine, 2009, p.158). La région de l'Evros n'échappe pas à cette "règle". Avec la rétention de migrants dans ces centres fermés, les lignes frontalières à l'intérieur du périmètre étatique se déplacent (Cuttitta, 2007; Mezzadra 2007, p.40; v. aussi Bernardot, 2011).

32 Dans la région de l'Évros, il y a deux centres de rétention principaux: Fylakio, où sont enregistrés les migrants traversant la frontière dans la partie Nord (fig. 7), et Poros, responsable pour le Sud. Les nouveaux migrants sont aussi détenus dans d'autres endroits tels des postes de police qui se trouvent le long de la frontière (MSF, 2010, p.7).

33 Une caractéristique rapproche ces lieux: les conditions de rétention. MSF rapporte que les centres sont surpeuplés et que les mauvaises conditions d'hygiène contribuent à la propagation de maladies (MSF, 2010, p.2). Aux mauvaises conditions sanitaires s'ajoutent des comportements irrespectueux de la part des agents de police en charge pour l'enregistrement et la garde des migrants (MSF, 2010). La nouvelle loi (loi n°3907/2011), entrée en vigueur en 2012, apporte des améliorations au cadre légal antérieur. Elle est vue d’un bon œil par les deux représentantes de MSF que nous avons rencontrées, qui en dénoncent tout de même la mauvaise implémentation. Il y a, selon elles, une amélioration dans l'infrastructure mais pas dans les procédures (entretien du 30.06.2012).

Fig. 7: Centre de rétention de Fylakio

© Alberto Campi 2012

34 L'incarcération est vécue comme un acte injuste par les migrants (MSF, 2010, p.21), car leur représentation de l'Europe avant le départ se heurte à la réalité de la rétention. L'incarcération est presque toujours le premier lieu dans lequel les migrants passent leur(s) première(s) nuit(s) en Europe. Ainsi, les centres de rétention deviennent, pour les migrants, la frontière elle-même, qu'ils incorp(s)orent à travers cette expérience (v. van Houtum, 2010, p.970). Les barbelés entourant les centres de rétention sont des barrières, tout autant que le fleuve que les migrants ont dû traverser quelques heures avant leur rétention.

35 A l'intérieur des centres il y a également des frontières qui se dessinent. Comme le souligne HRW, l'écart entre les gardes et les détenus n'est pas uniquement à imputer à un problème de communication, mais aussi à des comportements de la part des gardes. Le récit d'un migrant

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est parlant: "Whenever the guards came into the room, they would wear a mask and plastic gloves to protect them from germs" (HRW, 2008, p.73, sur le discours de la contamination, v. Bernardot, 2011, p.57 et segg.).

36 Les centres de rétention sont également utilisés, selon le rapport de MSF (2010), comme moyen de dissuasion, ou, comme l'écrit Migreurop, comme une "pratique punitive et dissuasive parce que la mesure d'éloignement ne peut en pratique être mise en œuvre" (Migreurop 2009, pp. 25–26). A travers la pratique d'une incarcération longue, les autorités helléniques espèrent atteindre les potentiels migrants restés au pays au travers des récits de ceux qui ont réussi à traverser la frontière (entretiens avec des représentants du GCR du 13 et 19.07.2012). Cette pratique est, en référence à la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, illégale. Cette dernière stipule que "les États contractants n'appliqueront pas de sanctions pénales, du fait de leur entrée ou de leur séjour irréguliers, aux réfugiés qui, arrivant directement du territoire où leur vie ou leur liberté était menacée […], entrent ou se trouvent sur leur territoire sans autorisation". Dans l'alinéa 2, il est ajouté: "Les États contractants n'appliqueront aux déplacements de ces réfugiés d'autres restrictions que celles qui sont nécessaires"20.

Deuxième point d'observation: Athènes

37 Dans cette partie nous nous focaliserons sur la violence présente à Athènes en soulignant le climat de terreur présent dans la ville, mais également en mettant en exergue un point particulier de la ville, soit le lieu où sont déposées les demandes d'asile.

Athènes: (sur)vivre dans la terreur

38 Le titre du rapport de HRW est emblématique: Hate on the street (2012). On y découvre la violence qui règne dans la capitale hellénique: "Les migrants et les demandeurs d'asile nous ont raconté l'existence de véritables 'no-go areas', de zones dans lesquelles on ne va pas la nuit, par peur d'être attaqués par des groupes de Grecs violents" (HRW, 2012, p.4). D'autres chercheurs, journalistes et cinéastes témoignent régulièrement de ce climat de terreur présent à Athènes (Amnesty International, 2012; ECRI, 2009; Triandafyllidou & Ambrosini, 2011, p.261 et suiv.; Bird, 2013; le rapport 2012 du Racist Violence Recording Network21; les trois billets du blog de Keddie22; les films: "L'Escale" de Bakhtiari, 2013; "Fuir Athènes à tout prix"

de Meier et Rühle, 201323).

Fig. 8: Groupe de migrants qui "somnolent" autour de la gare d'Athènes

© Alberto Campi 2012

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39 On y découvre aussi que le président de l'association des Afghans à Athènes a réagi aux dangers auxquels ses compatriotes étaient confrontés par la conception et la distribution d'une carte afin d'illustrer des zones à éviter. Une méthode qu'il avait apprise quand il travaillait pour la Croix Rouge en Afghanistan (HRW, 2012, p.6). Quand nous lui avons demandé une copie de cette carte, il a refusé de nous la donner: "Je l'ai montrée à quelqu'un une fois. Après cela, j'ai reçu beaucoup d'appels d'Aube Dorée et ils m'ont menacé. Je ne l'ai plus montrée. C'était normal de le faire, mais je ne sais pas pourquoi c'était si intéressant pour eux. Ils m'ont appelé et ils m'ont dit 'Tu as une carte, pourquoi fais-tu cela? Ce n'est pas bon pour la Grèce'. Je leur ai répondu: 'C'est la réalité de ce qui se passe à Athènes'" (entretien du 22.07.2012).

40 Sur la base des témoignages récoltés et des rapports lus, nous avons dessiné une carte montrant une claire démarcation entre la zone sûre d'Athènes pour les migrants, en vert, et la zone dangereuse, en rouge (fig. 10). Dans les zones dangereuses, les migrants sans abris restent vigilants et se permettent de somnoler uniquement pendant la journée (fig. 8). Les chiffres concernant les attaques contre des migrants, tirés du rapport de HRW (2012), ne sont pas exhaustifs, mais néanmoins plus fiables que les statistiques officielles du gouvernement grec.

Ce dernier a enregistré seulement deux crimes racistes dans toute la Grèce en 2009, un en 2008 (Cosse, 2012) et neuf depuis 2011 (HRW, 2012, p.11). Ainsi, au climat de tension et violence présent dans les villes grecques, s'ajoute la non-intervention et la non-persécution de ces actes par les autorités (ECRI, 2009; HRW, 2013).

Fig. 9: La place de l'église de St. Panteleimon à Athènes: seuls les Grecs sont autorisés à marcher sur la place

© Alberto Campi 2012

41 Le résultat est une extrême ségrégation de la ville, avec l'existence de zones non fréquentées ni habitées par des migrants (fig. 9)24. Dans ces zones, la violence physique25 et symbolique, notamment par la présence de graffitis nazis (fig. 11), sont monnaie courante.

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Fig. 10: Carte d'Athènes

Fig. 11: Graffiti dans Athènes

© Alberto Campi 2012

Le dépôt des demandes d'asile à Petrou Ralli

42 C'est dans ce contexte que doit être placée la procédure que les demandeurs d'asile doivent suivre afin de déposer leur candidature pour obtenir le statut de réfugié. Sans rentrer dans les détails du système législatif grec concernant l'asile26 et sur ses réformes intégrées dans le

"Greek action plan on asylum and migration movement", nous focalisons notre attention sur les modalités et la localisation du dépôt des demandes d'asile à Athènes, afin d'en faire ressortir ce que nous appelons une "géographie de l'impunité".

La procédure telle que pensée par les autorités grecques

43 La situation des demandeurs d'asile en Grèce est dramatique, comme le démontre l'arrêt M.S.S./Grèce et Belgique de la Cour européenne des droits de l'homme du 21 janvier 201127. Celui-ci a eu comme conséquence qu'"aucun demandeur d'asile ne peut être transféré en Grèce sous peine d'enfreindre l'article 3 de la Convention de Dublin" (Maiani & Néraudau, 2011, p.18). Grâce à la carte publiée par le European Council on Refugees and Exiles sur le

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taux d'octroi de l'asile (v. fig. 12), on comprend vite que dans la "loterie de l'asile" il vaut mieux ne pas chercher à le demander en Grèce, son taux de reconnaissance étant le plus bas de toute l'Europe. En effet, de 2006 à 2011, les autorités grecques ont accepté en première instance, chaque année, moins de 2% des demandes d'asile (HRW, 2012, p.32; Karamanidou

& Schuster, 2011; UNHCR, 2009, p.9).

Fig. 12: Taux d'octroi de l'asile par pays européen et en pourcentage des demandes déposées en 2010

Source: ECRE28

44 A cela s'ajoute un autre problème: le fait que la police est simultanément responsable de l'arrêt et la déportation des migrants en situation irrégulière et de l'examen et l'octroi des demandes d'asile (NHC et al., 2009; UNHCR, 2009, p.9). Cette confusion du rôle de la police grecque qui s'habille simultanément en persécuteur et protecteur devrait néanmoins se résoudre avec l'application de la nouvelle loi.

45 Ce qui, jusqu'en juillet 2012, n'avait pas encore changé, c'était la manière de gérer les potentiels réfugiés. Les demandes d'asile, à hauteur d'une vingtaine, sont reçues une fois par semaine à Athènes, qui gère 95% des demandes d'asile déposées en Grèce (Karamanidou & Schuster, 2011, p.9; UNHCR, 2011a, p.2). La procédure d'asile pensée par les autorités donne le plein pouvoir à la police.

46 Petrou Ralli est le nom d'une avenue dans une zone industrielle d'Athènes. Trois kilomètres séparent le centre ville et le numéro 24 de Petrou Ralli, où se situe le Département de police des étrangers. C'est là que les migrants sont détenus avant d'être expulsés; c'est aussi là qu'ils se rendent pour déposer leur demande d'asile. Des rapports (Amnesty International, 2010;

UNHCR, 2012) et des articles scientifiques (Karamanidou & Schuster, 2011; McDonough &

Tsourdi, 2012; Ritaine, 2012) ont pointé du doigt les problèmes ayant lieu à Petrou Ralli.

47 La distance séparant le centre ville de Petrou Ralli n'est pas importante, mais sa localisation l'isole complètement du reste de la ville. Ce fait est fondamental, compte tenu de comment les procédures d'asile sont organisées, procédures qualifiées par une coalition d'ONGde

"bureaucratic traps" (NHC et al., 2009, p.17). Ce qui est plus problématique, c'est que la géographie du lieu semble être pensée pour que le jeu des pouvoirs ne soit ni dévoilé ni dénoncé, et fait de Petrou Ralli non seulement un piège bureaucratique, mais également un piège géographique.

48 Karamanidou et Schuster imputent au manque d'organisation et de personnel la raison des longues queues à Petrou Ralli pour le dépôt des demandes d'asile (Karamanidou & Schuster,

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2011, p.10)29. Si, en 2009, on comptait encore 2 à 3'000 personnes faisant la queue pour demander l'asile (NHC et al., 2009, p.16), en été 2012, selon nos observations, le nombre a drastiquement diminué. Nous avons vu entre 200 et 300 migrants prenant place dans la file dans l'espoir d'obtenir le papier rose de l'asile (fig. 13). Parmi ceux-ci, uniquement les 20 premiers ont le droit de déposer leur demande30.

Fig. 13: Un migrant regarde la "file" pour la demande d'asile

© Alberto Campi 2012

49 Il est intéressant de noter comment cette "file" s'organise. Les migrants font la queue dans la rue Salaminias, une ruelle parallèle à Petrou Ralli, entourée par des édifices industriels et abritant un parking pour camions. L'entrée de l'édifice pour les demandes d'asile se trouve à 300 mètres de là. Un migrant d'origine ivoirienne nous a expliqué comment Petrou Ralli est sous le contrôle de groupes de migrants qui font un business autour des premières places31 (entretien du 28.07.2012). Selon des témoignages récoltés, ce jeu de pouvoirs entre groupes de migrants serait impossible sans la complicité de la police32.

50 Les 20 migrants qui peuvent déposer leur demande d'asile sont sélectionnés à 2 heures les nuits entre le samedi et le dimanche. Cette procédure soulève plus de questions sans réponse: pourquoi la police ferme-t-elle la rue Orfeos au public à minuit, quelques heures avant la sélection? Pourquoi la sélection se fait-elle en pleine nuit? Pourquoi ces procédures administratives se font-elles la nuit du vendredi au samedi, jour où les bureaux sont généralement fermés?

51 Une série de points problématiques qui peuvent, selon une analyse de la géographie du lieu et des procédures mises en place, s'expliquer uniquement par la volonté de faire de Petrou Ralli un lieu où règne l'impunité.

Petrou Ralli 24: la géographie de l'impunité

52 Le 21 juillet 2012 nous avons voulu observer les procédures à Petrou Ralli. Un cordon et deux policiers bloquent l'entrée entre la rue Salaminias et la rue Agias Annis vendredi à minuit.

Après cela, personne ne peut entrer. Ce fait est au moins curieux vu qu'il s'agit d'une rue, donc d'un espace public où toute personne devrait avoir le droit de marcher. Pendant le temps que la police nous a octroyé pour parler avec les migrants, ceux-ci nous ont questionnés sur le fonctionnement de l'octroi de l'asile. Des questions notamment sur les 20 premières places (toujours occupées par des ressortissants d'Afrique sub-saharienne), mais également sur les procédures mises en place par les autorités grecques. Des questions auxquelles nous n'avons

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pas (voulu ou) su répondre, mais qui montrent le désarroi des migrants face à des procédures opaques.

53 La nuit du 27 au 28 juillet nous sommes retournés deux fois à Petrou Ralli. De notre propre gré nous avons quitté la rue Salaminias vers 20 heures, afin d'y retourner vers minuit, lors de la sélection. Ce qui s'est passé vers 20 heures montre de façon irréfutable ce que nous qualifions de "géographie de l'impunité" (v. fig. 10, partie zoomée). Juste après que nous ayons quitté les lieux, alors que nous attendions le bus sur l'avenue Petrou Ralli, un groupe de motards habillés avec des tee-shirts du parti Chrysi Avgi se sont arrêtés aux feux au croisement entre Petrou Ralli et Agias Annis en menaçant le groupe de migrants qui étaient avec nous. Au feu vert, les motards ont continué leur route en direction de l'autoroute.

54 Ce n'est qu'à notre retour dans "la file", vers 1 heure du matin, que nous avons compris la stratégie des néo-nazis. Connaissant certainement le fonctionnement des procédures d'asile, après le croisement ils ont tourné à droite et rejoint la rue Salaminias. Sous les yeux de la police, qui n'est pas intervenue, ils se sont arrêtés devant la "file", craché sur les migrants, lancé leurs casques contre eux et sont aussitôt repartis quelques minutes après. Nous avons obtenu cette information lors de notre deuxième visite cette nuit-là.

55 Le récit ci-dessus donne, si ce n'est des réponses à nos précédentes questions, au moins des éléments confortant la thèse qu'à Petrou Ralli, comme dans les centres de rétention, c'est le jeu des pouvoirs qui règne. Ceux qui détiennent le pouvoir sont la police, certains groupes nationaux de migrants et les membres d'Aube dorée. La question reste toutefois ouverte sur la volonté des autorités grecques de faire de Petrou Ralli un lieu où règne l'impunité. Ceci est- il le fruit d'une stratégie?

56 Malgré cette question ouverte, il est au moins possible de soutenir les idées de W. Brown qui affirme que "les murs forment une continuité par rapport aux pratiques extra-juridiques apparaissant partout" (Brown, 2009), sur la frontière comme à l'intérieur du territoire.

Troisième point d'observation: Patras

57 A Patras, les migrants se concentrent surtout autour du nouveau port (fig. 14), inauguré en 2011 et, au vu de la nouvelle structure, ne permettant presque plus aux migrants de fuir vers l'Italie. Les récits récoltés sur place font part de violences assimilables à de la torture pour tout migrant attrapé en train de monter sur un camion qui s'embarque pour l'Italie. Les autorités portuaires, appelées emblématiquement "commando" par les migrants, utilisent régulièrement des tasers et des chiens sans muselière contre les migrants. Un Afghan nous a raconté comment un Soudanais avait été tué par le "commando": " J'ai vu un Soudanais courir. Après cela, le commando a accéléré et heurté le Soudanais. Nous avons parlé avec le commando et nous avons dit: 'Pourquoi l'avez-vous tué?'. Ils ont répondu: 'Nous ne l'avons pas tué, il est tombé'".

Pourtant, le jeune Afghan est sûr qu'il ne s'agissait pas d'un accident: "I saw that the commando hit him, with his car" (entretien du 4.08.2012). S'échapper, partir. Et la sanction est la mort.

La vie est placée à la merci de ceux qui s'accaparent le pouvoir de tuer ou de laisser vivre.

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Fig. 14: Le nouveau port de Patras vu depuis un bateau

© Alberto Campi 2012

58 C'est aux alentours du nouveau port que les nouveaux arrivés s'installent (fig. 15), afin  d'être proche de l'infrastructure permettant de quitter le pays. Ainsi, inlassablement, les migrants essaient tous les jours de se faufiler dans ou sous un camion, qui s'embarquera dans un ferry.

Alors que géographiquement, le fait de s'installer à quelques dizaines de mètres du port fait du sens, ce choix est périlleux. Comme pour les personnes sans abri à Athènes, il est très dangereux pour les migrants de s'installer dans ce lieu, connu par les militants d'extrême droite et par les policiers33. Les règles sont les mêmes qu'à Athènes: éviter de dormir pendant la nuit afin d'éviter d'être attaqués.

Fig. 15: La forêt d'eucalyptus à côté du port de Patras

© Alberto Campi 2012

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59 Pour cette raison, les migrants de plus longue date trouvent d'autres abris, plus cachés et excentrés par rapport au port. Il s'agit notamment d'une oliveraie et d'une maison occupée après qu'elle ait été abandonnée suite aux travaux liés à la construction d'un pont (figg. 16 et 17).

Fig. 16: Deux Afghans préparent le repas dans leur campement sous les oliviers à Patras

© Alberto Campi 2012

Fig. 17: La maison occupée de Patras

© Alberto Campi 2012

60 L'inconvénient réside dans le fait que pour atteindre le port, le trajet est plus long (une dizaine de kilomètres), mais cette distance est garante d'une certaine sécurité. Ainsi, de vraies communautés se sont formées. Des communautés dans lesquelles chacun remplit un rôle:

certains ont trouvé un travail dans les usines de Patras ou comme nettoie-vitres, d'autres cuisinent tandis que d'autres encore s'occupent des achats communs. Tous essaient encore de s'embarquer sur un ferry pour l'Italie, mais les tentatives sont plus éparses. Elles ont lieu, selon les témoignages que nous avons récoltés, une à deux fois par semaine.

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61 L'exemple de Patras, qui se trouve loin du point d'entrée des migrants en Grèce, montre bien que les "non-désirables" ne sont pas uniquement "triés" et bloqués aux frontières extérieures de l'UE (Rodier, 2012, p.9; van Houtum, 2010), mais ils sont également entravés dans leurs mouvements à l'intérieur même d'un espace qui avait été pensé comme un espace de "libre circulation des personnes", mais uniquement pour les citoyens de l'Union. Cette restriction s'est concrétisée avec l'obligation de visa d'entrée dans les Etats d'Europe du Sud pour les ressortissants de pays extérieurs à l'Union européenne. Une évolution récente, car, auparavant, comme le souligne E. Ritaine, ces Etats méridionaux laissaient les ressortissants des pays voisins aller et venir, au gré des besoins des activités saisonnières et/ou de l'économie souterraine, ou bien parce qu'il ne s'agissait que de migrations de transit (Ritaine, 2012, pp.19-20).

Conclusion

62 Le projet de construction d'une clôture est symptomatique d'une gestion de la frontière pensée comme une ligne pouvant être fermée hermétiquement. Or, la gestion de la migration n'est ni un problème pouvant être résolu localement, là où la clôture s'érige, ni même au niveau national. Mais l'inexistence d'une politique européenne commune de l'immigration fait en sorte que la gestion des frontières ne puisse se faire qu'en réponse aux urgences successives (Ritaine 2012). Des urgences qui éclatent à la fois sur la frontière elle-même et à l'intérieur du pays, car la frontière, et la gestion de ceux qui la traversent, est internalisée dans d'autres lieux, qui se trouvent parfois très loin du territoire frontalier. Comme le rappelle P. Sintès, en effet, "l’été 2009, en Grèce, correspond aussi à un durcissement indubitable du traitement de la migration irrégulière au sein du pays, élargissant classiquement les activités du contrôle frontalier à l’ensemble du pays" (Sintès 2011, p.387).

63 Les centres de rétention et l'édifice de Petrou Ralli sont des lieux circonscrits, des lieux qu'il est possible d'identifier sur une carte. Ce sont les lieux pensés par les autorités pour enregistrer, sanctionner, contrôler et éventuellement expulser les migrants (v. Bernardot, 2011 sur les camps d'internement). En sus de ces espaces pour le contrôle de la migration, il existe des espaces, urbains, aux frontières floues et changeantes, de confinement des migrants. Des espaces de non-droit où règne la ségrégation ethnique et la violence permanente perpétrée par deux acteurs principaux: les autorités policières et les "groupes citoyens", organisés en unités de surveillance pour patrouiller dans les rues, afin de protéger les résidents, en éliminant les migrants (HRW, 2012, p.7).

64 Dans le cas des "quartiers migrants" d'Athènes et de Patras, comme dans le cas des centres de rétention et de Petrou Ralli, les observations montrent que ce n'est pas la norme et la loi qui règnent, mais plutôt le jeu des pouvoirs. Un jeu des pouvoirs à la faveur des autorités de police et des groupes néo-nazis et au détriment des migrants. Les rondes de fascistes en moto dans les rues, les descentes des policiers dans les appartements des migrants, les abus de pouvoir exercés par les autorités rendent la vie (presque) impossible aux migrants. Ainsi, "rendre la vie impossible" semble être la devise utilisée par les Grecs pour les pousser à partir.

65 La construction de la clôture s'accompagne d'opérations répressives, telle l'opération "Xenios Zeus", une intervention policière lancée en août 2012 par les autorités grecques et ayant comme objectif de "reconduire les sans-papiers dans leur pays d'origine pour ensuite fermer les frontières" (Potet, 2012). Une opération qui a réuni plus de 2'000 policiers à Athènes et quelques 2'500 dans la région de l'Evros, selon M. Potet. Bilan: 7000 arrestations et 2000 personnes détenues dans des centres de rétention (Potet, 2012).

66 Ces deux initiatives sont issues d'une réaction face à des situations qualifiées comme urgentes et menaçantes par les autorités grecques. Ces (ré)actions face aux menaces perçues sont

"bricolées" (Bigo et al., 2009), pensées de façon ponctuelle et locale: les migrants passent- ils via la frontière terrestre? On bloque le passage par une clôture. Y a-t-il trop de migrants à Athènes? On les enferme dans des centres de rétention. Cela démontre le manque d'une vision d'ensemble, du à la "difficile gestation d'une politique commune de l'immigration et de la frontière [ce qui] condamne les différents acteurs politiques (nationaux et européens) à

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une gestion par urgences qui a passé, en Grèce, par la construction d'une clôture, le long d'une frontière politique.

67 Pourtant, la frontière n'est pas uniquement cette ligne qui sépare deux États: l'Évros et la clôture font partie d'un "dispositif frontalier" (Bigo et al., 2009) plus vaste. Les migrants sont stoppés et arrêtés à la frontière, mais leur identification se fait dans les centres de rétention, à l'intérieur du pays. Une frontière qu'ils continuent à vivre plus tard pour toute procédure administrative, telle la demande d'asile, mais également dans le déroulement de leur quotidien à cause de la ségrégation ethnique existante dans les villes grecques.

68 La décision de construire une clôture dans la région de l'Evros renforce la politique de cloisonnement de l'espace de la part des autorités grecques et consolide la "forteresse européenne" dans ses points frontaliers jugés faibles. Mais, en réalité, la Grèce toute entière est pensée et vécue par les migrants comme étant une barrière frontalière à franchir. Les migrants ne veulent pas rester en Grèce, car, comme ce jeu de mots qui nous a été dévoilé par un migrant d'origine marocaine le montre emblématiquement: "Grèce = Euro-pas". L'Europe, pour eux, c'est une fois traversée la frontière occidentale grecque. Ainsi, les migrants s'entassent à Patras, ville portuaire d'où partent les ferry pour l'Italie. Et la Grèce se transforme en une vaste zone- tampon, une frontière progressive où surfaces, points et lignes se (con)fondent (Cuttitta, 2007).

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