Annales deToxicologieAnalytique, vol. XVTI, n°2,2005
Les intoxications aiguës à la chloroquine :
aspects cliniques et analytiques
Acute chloroquine poisoning : clinical and analytical aspects
Aurélie SERVONNET*, Hervé DELACOUR, Hélène THEFENNE, Véronique GARDET
Fédérationde
Biologie
Clinique, Hôpitald'InstructiondesArméesRobertPICQUE, 331, RoutedeToulouse - 33140VILLENAVE D'ORNON
*Auteur
àquiadresserlacorrespondance : Aurélie SERVONNET, FédérationdeBiologie
Clinique,Hôpitald'Instruction
desArmées RobertPICQUE, 331,RoutedeToulouse - 33140VILLENAVE D'ORNON
Tel : 05 56 8473 02-Fax : 05 56 8474 95 -E-mail : a_servonnet@yahoo.fr (Reçu le 23décembre2004 ; accepté aprèsmodifications le 16mars2005)RESUME
Molécule à index thérapeutique étroit, la chloroquine est Vantimalariqueleplusutilisédansle monde.Elleestàl'ori¬
gined'intoxicationsaiguësgraves rencontréesdans les zones impaludées et plus rarement en Europe. Leur sévérité est essentiellementliée auxtroublescardiovasculaires provoqués parsonaction quinidine-like.Letraitement thérapeutiquefait appelprincipalementau diazepam,àl'adrénalineetàlaven¬
tilation artificielle. Leprotocole de traitement spécifique ne doitêtre appliquédanssonintégralité qu'en casd'intoxica¬
tions graves et non systématiquement. Son efficacité sera augmentéeencas depriseenchargepré-hospitalièrepréco¬
ce. Lagravitédes intoxicationsest évaluéeàl'aidede diffé¬
rents paramètres cliniques (pression artérielle systolique, troubles du rythme), biologiques (hypokaliémie) et toxicolo¬
giques(chloroquinémie). Leslaboratoireshospitalierspossè¬
dent donc un rôlefondamentalenaffirmantle diagnosticet en évaluantla gravitéde l'intoxicationparle dosage de la chloroquine, réalisé préférentiellement sur sang total. Les techniquesanalytiques utilisées sont essentiellement spectro- scopiques(UV)ouchromatographiques (C.L.H.P. ouC.P.G.).
Malheureusement, cesdernières,méthodes deréférencepour les analyses médico-légales, sont difficilement adaptées à l'urgence du
fait
deleur délaiderenduderésultat.MOTS-CLÉS
Chloroquine, intoxication, toxicologieanalytique, protocole thérapeutique.
SUMMARY
Chloroquineis the mainlyand mostfrequently drugused as antimalaric in the world, inspite ofthe extensionofresis¬
tance phenomena.Dueto thenarrowmarginbetween thera¬
peutic andtoxic dose,fatal chloroquinepoisoning come to noticefromtime totimeinAfricaandmoreexceptionally in Europe. Acute intoxication is responsible ofgrave cardio¬
vascular disturbances, which may be rapidly life threate¬
ning. Cardiovasculartoxicity islinkedto apotentmembra¬
ne-stabilising effect provoked by its quinidine-like action.
Treatment is based on diazepam, adrenalin, and assisted ventilation.Itseffectiveness
will
beincreasedincaseof
pre¬mature coverage. Seriousness
of
poisoning is estimated by meansof
various clinical (systolic bloodpressure, rhythm disorders), biological (hypokalemia) and toxicological (chloroquinaemia) parameters. Thus, hospital laboratories possess afundamental role by asserting diagnosis and by estimatingpoisoning's gravit)' by chloroquine'sdetermina¬tionpreferentiallyinwhole blood.Analyticaltechniquesare essentially spectrophometric (UV) or chromatographic (HPLCorGPC). Unfortunately, chromatographic methods are adaptedwith difficulty to the urgency because
of
their delayofresult'sdepiction,KEY-WORDS
Chloroquine, poisoning, analytical toxicology, therapeutic protocol.
87 Annales deToxicologieAnalytique, vol. XVTI, n°2,2005
Les intoxications aiguës à la chloroquine :
aspects cliniques et analytiques
Acute chloroquine poisoning : clinical and analytical aspects
Aurélie SERVONNET*, Hervé DELACOUR, Hélène THEFENNE, Véronique GARDET
Fédérationde
Biologie
Clinique, Hôpitald'InstructiondesArméesRobertPICQUE, 331, RoutedeToulouse - 33140VILLENAVE D'ORNON
*Auteur
àquiadresserlacorrespondance : Aurélie SERVONNET, FédérationdeBiologie
Clinique,Hôpitald'Instruction
desArmées RobertPICQUE, 331,RoutedeToulouse - 33140VILLENAVE D'ORNON
Tel : 05 56 8473 02-Fax : 05 56 8474 95 -E-mail : a_servonnet@yahoo.fr (Reçu le 23décembre2004 ; accepté aprèsmodifications le 16mars2005)RESUME
Molécule à index thérapeutique étroit, la chloroquine est Vantimalariqueleplusutilisédansle monde.Elleestàl'ori¬
gined'intoxicationsaiguësgraves rencontréesdans les zones impaludées et plus rarement en Europe. Leur sévérité est essentiellementliée auxtroublescardiovasculaires provoqués parsonaction quinidine-like.Letraitement thérapeutiquefait appelprincipalementau diazepam,àl'adrénalineetàlaven¬
tilation artificielle. Leprotocole de traitement spécifique ne doitêtre appliquédanssonintégralité qu'en casd'intoxica¬
tions graves et non systématiquement. Son efficacité sera augmentéeencas depriseenchargepré-hospitalièrepréco¬
ce. Lagravitédes intoxicationsest évaluéeàl'aidede diffé¬
rents paramètres cliniques (pression artérielle systolique, troubles du rythme), biologiques (hypokaliémie) et toxicolo¬
giques(chloroquinémie). Leslaboratoireshospitalierspossè¬
dent donc un rôlefondamentalenaffirmantle diagnosticet en évaluantla gravitéde l'intoxicationparle dosage de la chloroquine, réalisé préférentiellement sur sang total. Les techniquesanalytiques utilisées sont essentiellement spectro- scopiques(UV)ouchromatographiques (C.L.H.P. ouC.P.G.).
Malheureusement, cesdernières,méthodes deréférencepour les analyses médico-légales, sont difficilement adaptées à l'urgence du
fait
deleur délaiderenduderésultat.MOTS-CLÉS
Chloroquine, intoxication, toxicologieanalytique, protocole thérapeutique.
SUMMARY
Chloroquineis the mainlyand mostfrequently drugused as antimalaric in the world, inspite ofthe extensionofresis¬
tance phenomena.Dueto thenarrowmarginbetween thera¬
peutic andtoxic dose,fatal chloroquinepoisoning come to noticefromtime totimeinAfricaandmoreexceptionally in Europe. Acute intoxication is responsible ofgrave cardio¬
vascular disturbances, which may be rapidly life threate¬
ning. Cardiovasculartoxicity islinkedto apotentmembra¬
ne-stabilising effect provoked by its quinidine-like action.
Treatment is based on diazepam, adrenalin, and assisted ventilation.Itseffectiveness
will
beincreasedincaseof
pre¬mature coverage. Seriousness
of
poisoning is estimated by meansof
various clinical (systolic bloodpressure, rhythm disorders), biological (hypokalemia) and toxicological (chloroquinaemia) parameters. Thus, hospital laboratories possess afundamental role by asserting diagnosis and by estimatingpoisoning's gravit)' by chloroquine'sdetermina¬tionpreferentiallyinwhole blood.Analyticaltechniquesare essentially spectrophometric (UV) or chromatographic (HPLCorGPC). Unfortunately, chromatographic methods are adaptedwith difficulty to the urgency because
of
their delayofresult'sdepiction,KEY-WORDS
Chloroquine, poisoning, analytical toxicology, therapeutic protocol.
87
Article available at http://www.ata-journal.org or http://dx.doi.org/10.1051/ata:2005025
AnnalesdeToxicologie Analytique, vol.
XVII,
n°2, 2005Introduction
La
chloroquine (7-chloro-4-[[4-(diethylamino)-l-
méthylbutyl] amino] quinoléine)estuneamino-4-quino- léine de synthèse découverte en 1934 par des cher¬cheurs allemands. Indiquée dansla chimioprophylaxie et dans letraitement
curatif
dupaludisme,elleestéga¬lement prescrite en rhumatologie et en dermatologie pourtraiterlapolyarthriterhumatoïdeetcertainslupus (1-2). En France,elleestretrouvéeauseindeplusieurs spécialités pharmaceutiques seule ou associée au pro- guanil (tableau
I).
Ses effets indésirables sont rares dans le cadre d'une chimioprophylaxie (risque estimé inférieur à 1/100 000) et apparaissent principalementen cas de traitements prolongés (3).
A
l'inverse, les intoxications aiguës,par surdosageou lorsde tentative d'autolyse, sont marquéesparlasurvenued'unesymp- tomatologie grave potentiellement fatale. Si elles sont relativement fréquentes dans la zone d'endémie palustre (4-5), elles sont devenues rares voire excep¬tionnelles en Europe (6-11). Cependant, au milieu des années80, uneaugmentationde l'incidencedesintoxi¬
cations aiguësaétéobservéeen métropole. Elle faisait suiteàlapublication
d'un
ouvrage, heureusementrapi¬dement
interdit
àlavente, mentionnant la chloroquine commemédicamentàutiliser
encasdetentativedesui¬cide (12).
La parution d'un livre similaire
en Allemagnefut
accompagnée également de passages àl'acte (13). De plus, la chloroquine est très fréquem¬
ment retrouvée dans les «armoires à pharmacie» des
familles ayant séjournées dans une zone impaludée.
Dans cette revue, après quelques rappels sur la phar- macocinétique, nous développerons les aspects cli¬
niques etanalytiquesdes intoxicationsaiguësàlachlo¬
roquine.
Rappels sur la pharmacoci- nétique
Après uneprise orale à dose thérapeutique, la chloro¬
quine est absorbée au niveau du grêle proximal de façonrapide etpratiquementcomplète (biodisponibili¬
téévaluéeentre78 %et 89 % selonlesétudes). Lepic de concentration plasmatique est atteint en moyenne entre 1 H 30 et 3
H
00 après la prise (3). Lors d'une intoxication, l'ingestion massivediminue l'évacuation gastriqueetlamobilité digestiveetaugmente lessécré¬tions acides, ce qui est à
l'origine d'un
ralentissement de l'absorption.Il
n'est pas rare, dès lors, d'observer uneaugmentation dela concentration plasmatiquejus-
qu'à10heures aprèsl'ingestion.De même, desquanti¬tésimportantes dechloroquinepeuvent être retrouvées dans leliquide gastrique
jusqu'à
plusieursjours aprèsl'intoxication
en l'absence de traitement évacuateur (14).La chloroquinepossède un volumede distributiontrès élevé, autour de 200 L.kg"1 en tenant compte de la concentration dans le sang total et entre 200 et 800 L.kg"1 en se référant aux concentrations plasmatiques.
Cecis'explique parsafortefixation protéique (environ 60 %) et tissulaire
(c
moelle osseuse, rate, leuco¬cytes). Lysosomotrope, elle pénètre dans les erythro¬
cytespouratteindredes concentrations 3 à 6 fois supé¬
rieuresàcelles retrouvées dansleplasma(3).
Le métabolisme hépatique par déalkylation conduit principalement à trois metabolites pharmacologique- ment actifs: la déséthylchloroquine, la bi-déséthylchlo- roquine et la 7-chloro-4-aminoquinoléine (figure 1).
70%dela chloroquineestéliminéesousformeinchan¬
gée auniveauurinaireavecunedemi-vie
d'élimination
situéeentre20 et60jours.L'élimination
urinairerepré¬sente 10 % deladoseingéréeen48 heures et 30 % en 7jours.
TableauI :Listedesspécialitéspharmaceutiques contenantdelachloroquine commercialiséesenFrance.
Chloroquine (sulfate)
Chloroquine (phosphate)
+Proguanil (200 mg)
Nomdesspécialités NTVAQUINE8
(RHONE POULENC ROHRER)
.SAVARINE8
(ZENECAPHARMA)
NOPALU8
Forme:galénique et
pféientoti
^ iComprimésà100mg,boîtede20 ou 100 Comprimésà300mg,boîtede4 Siropà 5mg.mL1,flaconde 150mL
Solution injectableà50mg.mL1, boîtede 5ampoules de 2mL Comprimésà100mg,boîtede28
Gélulesà136mg,boîte de 20 ou 100 (SERVICEDESANTEDESARMEES)
AnnalesdeToxicologie Analytique, vol.
XVII,
n°2, 2005Introduction
La
chloroquine (7-chloro-4-[[4-(diethylamino)-l-
méthylbutyl] amino] quinoléine)estuneamino-4-quino- léine de synthèse découverte en 1934 par des cher¬cheurs allemands. Indiquée dansla chimioprophylaxie et dans letraitement
curatif
dupaludisme,elleestéga¬lement prescrite en rhumatologie et en dermatologie pourtraiterlapolyarthriterhumatoïdeetcertainslupus (1-2). En France,elleestretrouvéeauseindeplusieurs spécialités pharmaceutiques seule ou associée au pro- guanil (tableau
I).
Ses effets indésirables sont rares dans le cadre d'une chimioprophylaxie (risque estimé inférieur à 1/100 000) et apparaissent principalementen cas de traitements prolongés (3).
A
l'inverse, les intoxications aiguës,par surdosageou lorsde tentative d'autolyse, sont marquéesparlasurvenued'unesymp- tomatologie grave potentiellement fatale. Si elles sont relativement fréquentes dans la zone d'endémie palustre (4-5), elles sont devenues rares voire excep¬tionnelles en Europe (6-11). Cependant, au milieu des années80, uneaugmentationde l'incidencedesintoxi¬
cations aiguësaétéobservéeen métropole. Elle faisait suiteàlapublication
d'un
ouvrage, heureusementrapi¬dement
interdit
àlavente, mentionnant la chloroquine commemédicamentàutiliser
encasdetentativedesui¬cide (12).
La parution d'un livre similaire
en Allemagnefut
accompagnée également de passages àl'acte (13). De plus, la chloroquine est très fréquem¬
ment retrouvée dans les «armoires à pharmacie» des
familles ayant séjournées dans une zone impaludée.
Dans cette revue, après quelques rappels sur la phar- macocinétique, nous développerons les aspects cli¬
niques etanalytiquesdes intoxicationsaiguësàlachlo¬
roquine.
Rappels sur la pharmacoci- nétique
Après uneprise orale à dose thérapeutique, la chloro¬
quine est absorbée au niveau du grêle proximal de façonrapide etpratiquementcomplète (biodisponibili¬
téévaluéeentre78 %et 89 % selonlesétudes). Lepic de concentration plasmatique est atteint en moyenne entre 1 H 30 et 3
H
00 après la prise (3). Lors d'une intoxication, l'ingestion massivediminue l'évacuation gastriqueetlamobilité digestiveetaugmente lessécré¬tions acides, ce qui est à
l'origine d'un
ralentissement de l'absorption.Il
n'est pas rare, dès lors, d'observer uneaugmentation dela concentration plasmatiquejus-
qu'à10heures aprèsl'ingestion.De même, desquanti¬tésimportantes dechloroquinepeuvent être retrouvées dans leliquide gastrique
jusqu'à
plusieursjours aprèsl'intoxication
en l'absence de traitement évacuateur (14).La chloroquinepossède un volumede distributiontrès élevé, autour de 200 L.kg"1 en tenant compte de la concentration dans le sang total et entre 200 et 800 L.kg"1 en se référant aux concentrations plasmatiques.
Cecis'explique parsafortefixation protéique (environ 60 %) et tissulaire
(c
moelle osseuse, rate, leuco¬cytes). Lysosomotrope, elle pénètre dans les erythro¬
cytespouratteindredes concentrations 3 à 6 fois supé¬
rieuresàcelles retrouvées dansleplasma(3).
Le métabolisme hépatique par déalkylation conduit principalement à trois metabolites pharmacologique- ment actifs: la déséthylchloroquine, la bi-déséthylchlo- roquine et la 7-chloro-4-aminoquinoléine (figure 1).
70%dela chloroquineestéliminéesousformeinchan¬
gée auniveauurinaireavecunedemi-vie
d'élimination
situéeentre20 et60jours.L'élimination
urinairerepré¬sente 10 % deladoseingéréeen48 heures et 30 % en 7jours.
TableauI :Listedesspécialitéspharmaceutiques contenantdelachloroquine commercialiséesenFrance.
Chloroquine (sulfate)
Chloroquine (phosphate)
+Proguanil (200 mg)
Nomdesspécialités NTVAQUINE8
(RHONE POULENC ROHRER)
.SAVARINE8
(ZENECAPHARMA)
NOPALU8
Forme:galénique et
pféientoti
^ iComprimésà100mg,boîtede20 ou 100 Comprimésà300mg,boîtede4 Siropà 5mg.mL1,flaconde 150mL
Solution injectableà50mg.mL1, boîtede 5ampoules de 2mL Comprimésà100mg,boîtede28
Gélulesà136mg,boîte de 20 ou 100 (SERVICEDESANTEDESARMEES)
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XVII,
n°2, 2005IntestlajrBe. }&*y^g/
Absoipflon
i
Coeur Rate
f
r W1
*m> .
EHmlrwtlon
*)Rdn
/
ÇH3 Ç3Hj
ÇH .CHj
Monodô'séthïicNQfpquirjâ
Sd'eseltycNocoqiine
Figure1 :Représentation schématiquedelapharrnacociné- tiquedelachloroquine.
La
chloroquinepossède un index thérapeutique étroit.En prophylaxie antipalustre, la dose thérapeutique recherchée est de 10 mg.kg"1, soit une concentration plasmatique de
l'ordre
de 0,01 à 0,4 mg.L"1.La
dose toxique est évaluée à 20 mg.kg1 et la dose mortelle à 30 mg.kg1, soitune concentration plasmatique de 4 à 6 mg.L"1 (14 - 16).La
conversionen pmol.L"1 est effec¬tuéeparlaformule :
X
(mg.L1) x 3,13 =Y
(pmol.L1) Ces rappels pharmacocinétiques éclairent la sympto- matologie et l'approche analytique des intoxications aiguës.Aspects cliniques
L'intoxication
aiguë est caractérisée par sa gravité, sa soudainetéetlaprécocité d'apparitiondestroubles car- diovasculairesainsiqueparsonévolution imprévisible : alors queletableaucliniqueestrassurant,ellepeutévo¬luer brutalement versunarrêtcardio-circulatoire.
Les premiers signescliniquesapparaissent1 à3 heures après
l'ingestion
de la molécule et associent troubles cardio-vasculaires, neuro-sensoriels, digestifs, respira¬toires et hydro-électrolytiques. Lors d'intoxications massives, ce délai peut être seulement de quelques minutes avec
l'apparition
d'embléed'un
collapsus voired'un
arrêt cardiaque (14- 17).Signes digestifs et neurosensoriels
Les vomissements sont fréquents.Ilspeuventdiminuer de façon importante la quantité de médicament réelle¬
ment absorbée mais
ils
exposentaurisque d'inhalation chez les sujets comateux. Egalement précoces, lessignesneurologiques sontunprécieuxélémentd'orien¬
tationdiagnostique.L'atteintedela2èmepairecrânienne estresponsabled'un flou visuel, d'une diplopie, parfois d'une amaurose. L'atteinte chochléo-vestibulaire (&"K paire) entraîne des vertiges, des bourdonnements
d'oreille
etune hypoacousie. Sont également observés descéphalées,uneagitationanxieuse, uneobnubilation oudesconvulsions (14-17).Signes cardiovasculaires
Les signes cardio-vasculaires,liés à
l'action
quinidine- like de la chloroquine, sont responsables de la gravité del'intoxication.
Possédant une analogie structurale avec la quinine, la quinidine et les anesthésiques locaux, la chloroquine
fait
partiedelaclassela
desagentsanti-arythmiquesde la classification de Vaughan-Williams.Elle
possède ainsi une action stabilisatrice de membrane, due à un blocage des canaux sodiques, potassiques et calciques dumyocyte.Pardépressionducourantsodiquerapide, lavitessede dépolarisationdécroît,cequientraînedes troublesde la conductionàtous lesniveaux. Cettepro¬priété se traduit par des anomalies de l'électrocardio- gramme:troublesdela repolarisation(aplatissementde l'ondeT, apparitionde l'onde U, allongementdu QT), troubles de la conduction intraventiculaire (allonge¬
ment du QRS) et troubles de la conduction auriculo- ventriculaire (allongementduPR,blocauriculo-ventri- culaire) (figure 2). Ces anomalies ont une importante valeurd'alarme.
A
forte concentration, lachloroquine estégalement un agentinotropenégatifetpossèdeuneactionvasodilata- trice artérielle. L'ensemble de ces mécanismes est àl'origine
des perturbations hémodynamiques : brady- cardierelative allantjusqu'aucollapsus ouàl'arrêt
car¬dio-circulatoire (14-18).
Autres signes
L'intoxication
est parfois responsable d'une polypnéeau cours d'intoxications peu graves. Une hypoxémie
sans hypercapnie, compatible avec une majoration du shunt intra-pulmonaire par effet vasodilatateur de la chloroquineaégalementétérapportée(15-17).
Au niveau biologique, l'hypokaliémie, toujoursprésen¬
te dans lesintoxicationssévères,estparfoistrèsprofon¬
de (jusqu'à0,8 mmol.L1)et peut entraîner une tétrapa- résie.Ellerésulted'un transfert intracellulairedupotas¬
sium par action sur la pompe NaVKVATPase et n'est doncpas liéeàunedepletion potassique.Sadécouverte chezun patientintoxiqué
doit
faireévoquerlediagnos¬tic
d'intoxicationaiguëàla chloroquine (14-17).Unehyperlactatémie peut apparaître dueàuneanoma¬
lie
del'utilisation
tissulaire de l'oxygène. Enfin, une élévation de la creatinine est également observée etl'installation
d'une insuffisance rénale oligo-anurique estdemauvais pronostic (14-17).89 AnnalesdeToxicologieAnalytique, vol.
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Figure1 :Représentation schématiquedelapharrnacociné- tiquedelachloroquine.
La
chloroquinepossède un index thérapeutique étroit.En prophylaxie antipalustre, la dose thérapeutique recherchée est de 10 mg.kg"1, soit une concentration plasmatique de
l'ordre
de 0,01 à 0,4 mg.L"1.La
dose toxique est évaluée à 20 mg.kg1 et la dose mortelle à 30 mg.kg1, soitune concentration plasmatique de 4 à 6 mg.L"1 (14 - 16).La
conversionen pmol.L"1 est effec¬tuéeparlaformule :
X
(mg.L1) x 3,13 =Y
(pmol.L1) Ces rappels pharmacocinétiques éclairent la sympto- matologie et l'approche analytique des intoxications aiguës.Aspects cliniques
L'intoxication
aiguë est caractérisée par sa gravité, sa soudainetéetlaprécocité d'apparitiondestroubles car- diovasculairesainsiqueparsonévolution imprévisible : alors queletableaucliniqueestrassurant,ellepeutévo¬luer brutalement versunarrêtcardio-circulatoire.
Les premiers signescliniquesapparaissent1 à3 heures après
l'ingestion
de la molécule et associent troubles cardio-vasculaires, neuro-sensoriels, digestifs, respira¬toires et hydro-électrolytiques. Lors d'intoxications massives, ce délai peut être seulement de quelques minutes avec
l'apparition
d'embléed'un
collapsus voired'un
arrêt cardiaque (14- 17).Signes digestifs et neurosensoriels
Les vomissements sont fréquents.Ilspeuventdiminuer de façon importante la quantité de médicament réelle¬
ment absorbée mais
ils
exposentaurisque d'inhalation chez les sujets comateux. Egalement précoces, lessignesneurologiques sontunprécieuxélémentd'orien¬
tationdiagnostique.L'atteintedela2èmepairecrânienne estresponsabled'un flou visuel, d'une diplopie, parfois d'une amaurose. L'atteinte chochléo-vestibulaire (&"K paire) entraîne des vertiges, des bourdonnements
d'oreille
etune hypoacousie. Sont également observés descéphalées,uneagitationanxieuse, uneobnubilation oudesconvulsions (14-17).Signes cardiovasculaires
Les signes cardio-vasculaires,liés à
l'action
quinidine- like de la chloroquine, sont responsables de la gravité del'intoxication.
Possédant une analogie structurale avec la quinine, la quinidine et les anesthésiques locaux, la chloroquine
fait
partiedelaclassela
desagentsanti-arythmiquesde la classification de Vaughan-Williams.Elle
possède ainsi une action stabilisatrice de membrane, due à un blocage des canaux sodiques, potassiques et calciques dumyocyte.Pardépressionducourantsodiquerapide, lavitessede dépolarisationdécroît,cequientraînedes troublesde la conductionàtous lesniveaux. Cettepro¬priété se traduit par des anomalies de l'électrocardio- gramme:troublesdela repolarisation(aplatissementde l'ondeT, apparitionde l'onde U, allongementdu QT), troubles de la conduction intraventiculaire (allonge¬
ment du QRS) et troubles de la conduction auriculo- ventriculaire (allongementduPR,blocauriculo-ventri- culaire) (figure 2). Ces anomalies ont une importante valeurd'alarme.
A
forte concentration, lachloroquine estégalement un agentinotropenégatifetpossèdeuneactionvasodilata- trice artérielle. L'ensemble de ces mécanismes est àl'origine
des perturbations hémodynamiques : brady- cardierelative allantjusqu'aucollapsus ouàl'arrêt
car¬dio-circulatoire (14-18).
Autres signes
L'intoxication
est parfois responsable d'une polypnéeau cours d'intoxications peu graves. Une hypoxémie
sans hypercapnie, compatible avec une majoration du shunt intra-pulmonaire par effet vasodilatateur de la chloroquineaégalementétérapportée(15-17).
Au niveau biologique, l'hypokaliémie, toujoursprésen¬
te dans lesintoxicationssévères,estparfoistrèsprofon¬
de (jusqu'à0,8 mmol.L1)et peut entraîner une tétrapa- résie.Ellerésulted'un transfert intracellulairedupotas¬
sium par action sur la pompe NaVKVATPase et n'est doncpas liéeàunedepletion potassique.Sadécouverte chezun patientintoxiqué
doit
faireévoquerlediagnos¬tic
d'intoxicationaiguëàla chloroquine (14-17).Unehyperlactatémie peut apparaître dueàuneanoma¬
lie
del'utilisation
tissulaire de l'oxygène. Enfin, une élévation de la creatinine est également observée etl'installation
d'une insuffisance rénale oligo-anurique estdemauvais pronostic (14-17).89
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(b)
Figure2:Mécanismed'actionpharmacologiquedelachloroquine au niveau cardiaque (a) et répercutionssur l'E.C.G. (b).Au repos, unedifférencedepotentieldel'ordrede80à90mVestobservéau niveaudesfibresmyocardiques:c'estlepotentielde repos.La contractionmyocardiqueestprécédéed'uneinversiondecettedifférencedepotentiel: lepotentiel d'action. Ces phé¬
nomènesélectriques sont liésà desmodificationsdescourants transmembranaires liés au passagedesionsNa*, K* etCa2*.La dépolarisation rapideinitiale(phase 0) estliéàl'entréedeNa*. Puisledébutdelarepolarisation(phase1)correspond à l'aug¬
mentationdela sortiedeK*. Cettephaseestsuivied'un plateau(phase2) résultantdel'entréedeCa2*combinéeàlasortiede K*.La reprisedépolarisation(phase3)correspondànouveauàlaprévalencedesmouvements deK*jusqu'àl'atteintedupoten¬
tielderepos(phase4). Anti-arythmiquedeclassela, lachloroquinepossède uneactionstabilisatricedemembraneprovenant principalementdublocagedescannaux sodiquesdelacellule cardiaque(inhibitionde
l
'entréedesodium etdelasortiedepotas¬siumavectransfert intracellulairedecalcium).
Il
enrésulte uneaugmentation la durée dupotentield'action etde la période réfractaireeffectiveet unallongementdel'espaceQTdel'E.C.G. (37).L'E.C.G.présentéaétéobservé suiteàuneintoxication parcinq grammesdechloroquine(18).Prise en charge thérapeu¬
tique
Critères de gravité
L'attitude thérapeutique est fonction de l'évaluation
initiale
de la gravité del'intoxication.
Celle-ci repose sur l'appréciation de trois paramètres : ladose suppo¬séeingérée,labaissedepressionartériellesystolique et la durée du segment QRS, auxquels
il
fautajouter les troubles du rythme,l'hypokaliémie
et lachloroquiné-mie (14-17).
Silesdéterminationsdelapressionartérielle systolique et de ladurée du segment QRS ne posentpas de pro¬
blèmes spécifiques, celle de la dose supposée ingérée est plus aléatoire : l'examen des emballages vides est peu fiable, le patient peut volontairement
fournir
de fausses informations, les vomissements précoces peu¬ventminorer la dose réellement absorbée. Dès lors,
il
n'est pas étonnant de constater que quelle que soit la dose supposée ingérée, la chloroquinémie varie dans une fourchettede 1 à 10 (15).AnnalesdeToxicologie Analytique, vol. XVTI, n° 2,2005
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(b)
Figure2:Mécanismed'actionpharmacologiquedelachloroquine au niveau cardiaque (a) et répercutionssur l'E.C.G. (b).Au repos, unedifférencedepotentieldel'ordrede80à90mVestobservéau niveaudesfibresmyocardiques:c'estlepotentielde repos.La contractionmyocardiqueestprécédéed'uneinversiondecettedifférencedepotentiel: lepotentiel d'action. Ces phé¬
nomènesélectriques sont liésà desmodificationsdescourants transmembranaires liés au passagedesionsNa*, K* etCa2*.La dépolarisation rapideinitiale(phase 0) estliéàl'entréedeNa*. Puisledébutdelarepolarisation(phase1)correspond à l'aug¬
mentationdela sortiedeK*. Cettephaseestsuivied'un plateau(phase2) résultantdel'entréedeCa2*combinéeàlasortiede K*.La reprisedépolarisation(phase3)correspondànouveauàlaprévalencedesmouvements deK*jusqu'àl'atteintedupoten¬
tielderepos(phase4). Anti-arythmiquedeclassela, lachloroquinepossède uneactionstabilisatricedemembraneprovenant principalementdublocagedescannaux sodiquesdelacellule cardiaque(inhibitionde
l
'entréedesodium etdelasortiedepotas¬siumavectransfert intracellulairedecalcium).
Il
enrésulte uneaugmentation la durée dupotentield'action etde la période réfractaireeffectiveet unallongementdel'espaceQTdel'E.C.G. (37).L'E.C.G.présentéaétéobservé suiteàuneintoxication parcinq grammesdechloroquine(18).Prise en charge thérapeu¬
tique
Critères de gravité
L'attitude thérapeutique est fonction de l'évaluation
initiale
de la gravité del'intoxication.
Celle-ci repose sur l'appréciation de trois paramètres : ladose suppo¬séeingérée,labaissedepressionartériellesystolique et la durée du segment QRS, auxquels
il
fautajouter les troubles du rythme,l'hypokaliémie
et lachloroquiné-mie (14-17).
Silesdéterminationsdelapressionartérielle systolique et de ladurée du segment QRS ne posentpas de pro¬
blèmes spécifiques, celle de la dose supposée ingérée est plus aléatoire : l'examen des emballages vides est peu fiable, le patient peut volontairement
fournir
de fausses informations, les vomissements précoces peu¬ventminorer la dose réellement absorbée. Dès lors,
il
n'est pas étonnant de constater que quelle que soit la dose supposée ingérée, la chloroquinémie varie dans une fourchettede 1 à 10 (15).AnnalesdeToxicologieAnalytique, vol. XVTI, n°2, 2005
Clemessy et al. ont démontré la corrélation existante entre hypokaliémie et gravité de
l'intoxication.
Dans une série de 191 intoxications, la kaliémie des sujets décédésétaitsignificativementplusfaiblequecelledes sujetssurvivants(2,4mmol.L"1 contre3,1mmol.L"1,p= 0,0003) (19).Le pronosticestégalement
lié
àla chloroquinémie.Des concentrations sanguines sur sangtotal supérieures ou égales à 2 mg.L"1 sont associées à des complications.Actuellement, grâce aux progrès thérapeutiques, la mortalitéestnulleendessous de4mg.L"1,de2% entre 4 et 8mg.L"1 etde 21 % audelàde8 mg.L1 (14-16).
A partir
des éléments précédents, uneclassification de lagravitédesintoxications entrois stadesaétépropo¬sée : bénigne,intermédiaireet grave (tableau
II).
Cette évaluationdoit
être répétée régulièrement afin de mettre en évidence toute aggravation del'état
du patientet doncd'adapterlathérapeutique (14-15, 17).Éléments du traitement
Le traitement spécifique reposesurla triadediazepam, adrénaline etventilation assistée.
Lediazepam possède uneaction favorableaucoursdes intoxications expérimentales à la chloroquine (aug¬
mentationde lapression artérielle,delafréquencecar¬
diaque, de la diurèse et
diminution
de la durée du QRS). Cependant, cebénéfice thérapeutique n'est pas retrouvé lorsd'études cliniques. En 1996, Clemessy et al.ontévaluél'intérêt
du diazepam versus placebodans laprise encharge des intoxicationsde gravitéintermé¬diaire. Cette étude
n'a
pas misen évidence une effica¬citédudiazepam surladurée duQRS, du QTou surla tension artérielle (20). En outre,
l'utilisation
de diaze¬pam en ventilation spontanée aux posologies préconi¬
séesdanslaconférencedeconsensus (0,5mg/kgpuis 1
mg/kg/24
H
00) expose à une détresse respiratoire et impose donc un monitorageadapté.L'emploi
dudiaze¬pam en cas
d'intoxication
bénigne ou intermédiaire n'est donc pas retenu et son mécanismed'action n'est pastotalementélucidé(interaction avecla cinétiquede la chloroquine, anti-arythmique par action sur les récepteurs myocardiques aux benzodiazepines, effet anticonvulsivant).L'adrénaline, par ses effets
a
et p\ constitue le traite¬mentdechoixdelabaisse del'inotropisme,delavaso¬
dilation artérielle et de la bradycardie liée à la chloro¬
quine.
Elle
prévient aussil'apparition
de torsades de pointe (14-15).La
ventilation assistée permetl'utilisation
en .toute sécurité defortes posologies de diazepam.Elle
sejus¬tifie
également chaque fois que l'hypoxémie persiste malgré uneoxygénation suffisante, en cas d'arrêt car¬dio-respiratoire
et decomplications
pulmonaires(
aigu dupoumon, syndrome dedétresse respi¬ratoire aiguë). Le contrôle des voies aériennes supé¬
rieuresest
licite s'il
existedestroubles delaconscien¬ceetdes vomissements (14-15).
Le traitementspécifiqueestcomplété par:
-untraitementévacuateuravec lavage gastrique etuti¬
lisation de charbon activé. Cependant, ce traitement n'est recommandé que dans la première heure suivant l'ingestion et ne doiten aucun casretarder lamise en route du traitementspécifique. Les techniques d'épura¬
tion rénale etextra-rénale sontinefficacesen raison de l'importance de lafixation protéique etérythrocytaire de la chloroquine.
- un traitementà viséecardiovasculaire. Leremplissa¬
ge vasculaire
fait
partie du traitement de tout patient hypotendu. En raison dul'effet
ionotropenégatifde la chloroquine et du risqued' aigu du poumon,ce remplissagedoit
être modéré (aumaximum 1 000mL
de colloïdes). Le choc électrique externe est indiqué pourrestaurer un rythme sinusal en cas detachycardie ou de
fibrillation
ventriculaire. Le bicarbonate ou le lactate de sodium molaire (250mL
répétés 1 fois si nécessaire) sont efficaces sur les blocs de conduction intraventriculaire.- une induction anésthésique rapide de type «estomac plein» estnécessaire ; l'étomidateétant l'agent préco¬
nisé (action rapideavecpeu
d'effet
hémodynamique).Enfin, la correction de
l'hypokaliémie
est discutable.L'
hypokaliémie étanttransitoire, unerecharge massive expose àune hyperkaliemic secondaire, surtouten cas d'insuffisancerénaleaiguë anurique (14-15, 17).TableauII : Classificationdesintoxications aiguës àlachloroquine.Laprésenced'unseulcritèredela troisième colonnesuffit pouridentifieruneintoxicationpotentiellementfatale(15).
Dosesupposéeingérée Pressionartérielle systolique DuréeduQ.R.S.
Troublesdurythme
Intoxication "bénigne"
<2g
> 100mmHg
< 0,10s -
Intoxication"intermédiaire"
2<<4g
>100mmHg
< 0,10s +
Intoxication"grave"
>4g
<100mmHg
> 0,10s +
91 AnnalesdeToxicologieAnalytique, vol. XVTI, n°2, 2005
Clemessy et al. ont démontré la corrélation existante entre hypokaliémie et gravité de
l'intoxication.
Dans une série de 191 intoxications, la kaliémie des sujets décédésétaitsignificativementplusfaiblequecelledes sujetssurvivants(2,4mmol.L"1 contre3,1mmol.L"1,p= 0,0003) (19).Le pronosticestégalement
lié
àla chloroquinémie.Des concentrations sanguines sur sangtotal supérieures ou égales à 2 mg.L"1 sont associées à des complications.Actuellement, grâce aux progrès thérapeutiques, la mortalitéestnulleendessous de4mg.L"1,de2% entre 4 et 8mg.L"1 etde 21 % audelàde8 mg.L1 (14-16).
A partir
des éléments précédents, uneclassification de lagravitédesintoxications entrois stadesaétépropo¬sée : bénigne,intermédiaireet grave (tableau
II).
Cette évaluationdoit
être répétée régulièrement afin de mettre en évidence toute aggravation del'état
du patientet doncd'adapterlathérapeutique (14-15, 17).Éléments du traitement
Le traitement spécifique reposesurla triadediazepam, adrénaline etventilation assistée.
Lediazepam possède uneaction favorableaucoursdes intoxications expérimentales à la chloroquine (aug¬
mentationde lapression artérielle,delafréquencecar¬
diaque, de la diurèse et
diminution
de la durée du QRS). Cependant, cebénéfice thérapeutique n'est pas retrouvé lorsd'études cliniques. En 1996, Clemessy et al.ontévaluél'intérêt
du diazepam versus placebodans laprise encharge des intoxicationsde gravitéintermé¬diaire. Cette étude
n'a
pas misen évidence une effica¬citédudiazepam surladurée duQRS, du QTou surla tension artérielle (20). En outre,
l'utilisation
de diaze¬pam en ventilation spontanée aux posologies préconi¬
séesdanslaconférencedeconsensus (0,5mg/kgpuis 1
mg/kg/24
H
00) expose à une détresse respiratoire et impose donc un monitorageadapté.L'emploi
dudiaze¬pam en cas
d'intoxication
bénigne ou intermédiaire n'est donc pas retenu et son mécanismed'action n'est pastotalementélucidé(interaction avecla cinétiquede la chloroquine, anti-arythmique par action sur les récepteurs myocardiques aux benzodiazepines, effet anticonvulsivant).L'adrénaline, par ses effets
a
et p\ constitue le traite¬mentdechoixdelabaisse del'inotropisme,delavaso¬
dilation artérielle et de la bradycardie liée à la chloro¬
quine.
Elle
prévient aussil'apparition
de torsades de pointe (14-15).La
ventilation assistée permetl'utilisation
en .toute sécurité defortes posologies de diazepam.Elle
sejus¬tifie
également chaque fois que l'hypoxémie persiste malgré uneoxygénation suffisante, en cas d'arrêt car¬dio-respiratoire
et decomplications
pulmonaires(
aigu dupoumon, syndrome dedétresse respi¬ratoire aiguë). Le contrôle des voies aériennes supé¬
rieuresest
licite s'il
existedestroubles delaconscien¬ceetdes vomissements (14-15).
Le traitementspécifiqueestcomplété par:
-untraitementévacuateuravec lavage gastrique etuti¬
lisation de charbon activé. Cependant, ce traitement n'est recommandé que dans la première heure suivant l'ingestion et ne doiten aucun casretarder lamise en route du traitementspécifique. Les techniques d'épura¬
tion rénale etextra-rénale sontinefficacesen raison de l'importance de lafixation protéique etérythrocytaire de la chloroquine.
- un traitementà viséecardiovasculaire. Leremplissa¬
ge vasculaire
fait
partie du traitement de tout patient hypotendu. En raison dul'effet
ionotropenégatifde la chloroquine et du risqued' aigu du poumon,ce remplissagedoit
être modéré (aumaximum 1 000mL
de colloïdes). Le choc électrique externe est indiqué pourrestaurer un rythme sinusal en cas detachycardie ou de
fibrillation
ventriculaire. Le bicarbonate ou le lactate de sodium molaire (250mL
répétés 1 fois si nécessaire) sont efficaces sur les blocs de conduction intraventriculaire.- une induction anésthésique rapide de type «estomac plein» estnécessaire ; l'étomidateétant l'agent préco¬
nisé (action rapideavecpeu
d'effet
hémodynamique).Enfin, la correction de
l'hypokaliémie
est discutable.L'
hypokaliémie étanttransitoire, unerecharge massive expose àune hyperkaliemic secondaire, surtouten cas d'insuffisancerénaleaiguë anurique (14-15, 17).TableauII : Classificationdesintoxications aiguës àlachloroquine.Laprésenced'unseulcritèredela troisième colonnesuffit pouridentifieruneintoxicationpotentiellementfatale(15).
Dosesupposéeingérée Pressionartérielle systolique DuréeduQ.R.S.
Troublesdurythme
Intoxication "bénigne"
<2g
> 100mmHg
< 0,10s -
Intoxication"intermédiaire"
2<<4g
>100mmHg
< 0,10s +
Intoxication"grave"
>4g
<100mmHg
> 0,10s +
91
AnnalesdeToxicologie Analytique, vol. XVTI, n°2,2005
Modalités d'application de la prise en charge thérapeutique
La prise en charge thérapeutique a
fait l'objet
d'une conférencedeconsensusen 1987(21). Les recomman¬dations qui y sont proposées ont depuis été modulées.
Le protocole de traitement spécifique qui y est men¬
tionné ne doitêtre appliqué dans son intégralité qu'en
casd'intoxicationsgravesetnon systématiquement.En cas
d'intoxication
bénigneou intermédiaire, l'hospita¬lisation en unité de soins intensifs s'impose avec sur¬
veillance scopique et réévaluation à intervalles régu¬
liers des critères de gravité de
l'intoxication.
Toute aggravation doit faire envisager le traitement d'une forme sévère (tableauIII).
En casd'intoxication
vue après la6Smcheurecesindications doiventêtreadaptées tout en gardant àl'esprit qu'il
est plus dangereux de sous-estimer une intoxication grave que de traiter par excèsuneintoxication bénigne (15).Pour être pleinementefficace, letraitement desformes sévères doitêtre instauréleplus rapidement lors de la phase préhospitalière.Lecasreporté par Messant etal.
(11) en 2004
illustre
ce propos. Unefemme de 25 ans estretrouvée inconscientedansunechambred'hôtelet la présence à ses côtés de boîtes vides de chloroquine permetd'orienter l'origine
del'intoxication
et d'éva¬luerladose ingéréeà 10 g. Arrivés rapidement surles lieux, les secours pratiquentune ventilation artificielle accompagnée de l'administration d'adrénaline et de diazepam.
A
son admission àl'hôpital,
ce traitement est poursuivi et complétéd'un
traitement épurateur (lavage gastrique et charbon actif). Malheureusement, la patiente présente l'ensemble des critères accompa¬gnant une intoxication fatale : unedose supposée ingé¬
rée supérieure à 5 g, unepression artérielle systolique de 80 mm Hg, une durée du segment QRS de 0,14 s, unechloroquinémiede12,46 mg.L"1 ainsiqu'unehypo
kaliémieà 1,7 mmol.L1. Cependant,unenormalisation de sa fonction cardiaque est observée au bout de 24H00puis del'ensembledesparamètrescliniqueset biologiquesen48H00.Selonlesauteurs,la rapiditéde laprise en chargepré-hospitalière permet
d'expliquer
l'issue favorabledecettetentatived'autolyse.Aspects analytiques
En cas de suspicion
d'intoxication
aiguë à la chloro¬quine,lelaboratoirepossèdeplusieurs rôles :
-affirmerlediagnostic et évaluerla gravitéde
l'intoxi¬
cation par la miseen évidence et le dosagede lachlo¬
roquinedanslesang,
-etréaliserdesexamenscomplémentairespour estimer les répercussions de
l'intoxication
surl'équilibre
hydro-électrolytique(kaliémie) etacido-basique (gazo- métrieartérielle, dosage deslactates) et surlafonction rénale (urémie etcréatininémie).Cesélémentsontétérappelésen2003par le groupede travail pluridisciplinaire S.F.B.C. - S.F.T.A. - S.T.C.
"Toxicologieetbiologie
clinique"
(22). Seulesles don¬nées relatives àlamiseenévidence et au dosage dela chloroquine serontdéveloppées.
Méthodologies décrites dans la littérature
Le dosage de chloroquine s'effectue sur sang veineux périphériquerecueillisuranticoagulant, l'analyseétant réalisée préférentiellement sur sang total en raison du tropismede la chloroquinepourles hématies. Quelque soit la technique utilisée, une hydrolyse alcaline du sangtotalàchaudestnécessaireafindelibérer lamolé¬
cule deses liaisons protéiques.
Techniquespectrophotométrique
Aprèshydrolyse,lachloroquineestextraitede l'échan¬
tillon
sur colonneExtrelut® ou en ampoule à décanter TableauIII
:Indicationsdu traitement spécifiquedes intoxicationsaiguësà la chloroquineprise enchargeavantla &""heure (15).Intoxicationgrave Remplissage
Adrénaline 0,25ug/kg/min pourdébuteràadapterjusqu'àune PAS>100mm Hg Intubation rapideetventilationassistée avecFi02à50 %
Diazepam Dosedecharge:2mg/kgen30minutes Dosed'entretien:2à4mg/kg/24H00 Intoxication intermédiaire
Pasdetraitement spécifique Maintientdelaventilation
Adrénalineprête encasd'aggravation Intoxicationbénigne
Pasdetraitement spécifique
AnnalesdeToxicologie Analytique, vol. XVTI, n°2,2005
Modalités d'application de la prise en charge thérapeutique
La prise en charge thérapeutique a
fait l'objet
d'une conférencedeconsensusen 1987(21). Les recomman¬dations qui y sont proposées ont depuis été modulées.
Le protocole de traitement spécifique qui y est men¬
tionné ne doitêtre appliqué dans son intégralité qu'en
casd'intoxicationsgravesetnon systématiquement.En cas
d'intoxication
bénigneou intermédiaire, l'hospita¬lisation en unité de soins intensifs s'impose avec sur¬
veillance scopique et réévaluation à intervalles régu¬
liers des critères de gravité de
l'intoxication.
Toute aggravation doit faire envisager le traitement d'une forme sévère (tableauIII).
En casd'intoxication
vue après la6Smcheurecesindications doiventêtreadaptées tout en gardant àl'esprit qu'il
est plus dangereux de sous-estimer une intoxication grave que de traiter par excèsuneintoxication bénigne (15).Pour être pleinementefficace, letraitement desformes sévères doitêtre instauréleplus rapidement lors de la phase préhospitalière.Lecasreporté par Messant etal.
(11) en 2004
illustre
ce propos. Unefemme de 25 ans estretrouvée inconscientedansunechambred'hôtelet la présence à ses côtés de boîtes vides de chloroquine permetd'orienter l'origine
del'intoxication
et d'éva¬luerladose ingéréeà 10 g. Arrivés rapidement surles lieux, les secours pratiquentune ventilation artificielle accompagnée de l'administration d'adrénaline et de diazepam.
A
son admission àl'hôpital,
ce traitement est poursuivi et complétéd'un
traitement épurateur (lavage gastrique et charbon actif). Malheureusement, la patiente présente l'ensemble des critères accompa¬gnant une intoxication fatale : unedose supposée ingé¬
rée supérieure à 5 g, unepression artérielle systolique de 80 mm Hg, une durée du segment QRS de 0,14 s, unechloroquinémiede12,46 mg.L"1 ainsiqu'unehypo
kaliémieà 1,7 mmol.L1. Cependant,unenormalisation de sa fonction cardiaque est observée au bout de 24H00puis del'ensembledesparamètrescliniqueset biologiquesen48H00.Selonlesauteurs,la rapiditéde laprise en chargepré-hospitalière permet
d'expliquer
l'issue favorabledecettetentatived'autolyse.Aspects analytiques
En cas de suspicion
d'intoxication
aiguë à la chloro¬quine,lelaboratoirepossèdeplusieurs rôles :
-affirmerlediagnostic et évaluerla gravitéde
l'intoxi¬
cation par la miseen évidence et le dosagede lachlo¬
roquinedanslesang,
-etréaliserdesexamenscomplémentairespour estimer les répercussions de
l'intoxication
surl'équilibre
hydro-électrolytique(kaliémie) etacido-basique (gazo- métrieartérielle, dosage deslactates) et surlafonction rénale (urémie etcréatininémie).Cesélémentsontétérappelésen2003par le groupede travail pluridisciplinaire S.F.B.C. - S.F.T.A. - S.T.C.
"Toxicologieetbiologie
clinique"
(22). Seulesles don¬nées relatives àlamiseenévidence et au dosage dela chloroquine serontdéveloppées.
Méthodologies décrites dans la littérature
Le dosage de chloroquine s'effectue sur sang veineux périphériquerecueillisuranticoagulant, l'analyseétant réalisée préférentiellement sur sang total en raison du tropismede la chloroquinepourles hématies. Quelque soit la technique utilisée, une hydrolyse alcaline du sangtotalàchaudestnécessaireafindelibérer lamolé¬
cule deses liaisons protéiques.
Techniquespectrophotométrique
Aprèshydrolyse,lachloroquineestextraitede l'échan¬
tillon
sur colonneExtrelut® ou en ampoule à décanter TableauIII
:Indicationsdu traitement spécifiquedes intoxicationsaiguësà la chloroquineprise enchargeavantla &""heure (15).Intoxicationgrave Remplissage
Adrénaline 0,25ug/kg/min pourdébuteràadapterjusqu'àune PAS>100mm Hg Intubation rapideetventilationassistée avecFi02à50 %
Diazepam Dosedecharge:2mg/kgen30minutes Dosed'entretien:2à4mg/kg/24H00 Intoxication intermédiaire
Pasdetraitement spécifique Maintientdelaventilation
Adrénalineprête encasd'aggravation Intoxicationbénigne
Pasdetraitement spécifique