R EVUE DE STATISTIQUE APPLIQUÉE
J. H. E NTERS
Les rayures dans les tissus de popeline et le test des signes
Revue de statistique appliquée, tome 5, n
o3 (1957), p. 85-89
<
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LES RAYURES DANS LES TISSUS DE POPELINE ET LE TEST DES SIGNES (I)
par
J.
H.ENTERS
Collaborateur au Bureau
d’Ingénieurs-Conseils
Ir. B. W. BERENSCHOT
Il arrive en fabrication que les tissus de
popeline présentent
extérieurement des rayures. Ces rayures sont indésirables car ces tissus sont souvertemployés pour les
chemises d’hommes et les ateliers de confection sont trèsexigeants
à cetégard.
Ce déiaut
apparaît
sur lalongueur
du tissu et est ainsi lié à la chaine du tissu.La fabrication de ces tissus
comprend,
dans lesgrandes lignes,
la suite desopérations
defilage, d’ourdissage, d’encollage,
detissage,
de teinture et definissage.
Le mal n’est
guère
visiblequ’à
la fin de cesopérations
et il est difficile dedéte rmine r alors
à quel stade de
la fabrication le s rayure s ont bien pu seproduire.
On procéda dans
une tisseranderie à des essaisqui avaient,
entre autresbuts,
celui de déterminer les conditionsqui provoquaient
ces rayures etqui
yétaient
associées. Il y futquestion
de montrer :- s’il y avait un
rapport
entre les rayures et les fournitures de fil- s’il y avait un
rapport
entre les rayures et lesréglages
du métier à tisser.Dans le
premier
cas, onemploya
pour les essais des lots de fils de deux fournisseursqui présentaient
entre eux une nettedifférence
dequalité.
Dans lesecond cas, l’on
procéda
à desréglages différents
dumétier.
Les difficultés suivantes
apparurent lorsqu’il
fallutapprécier
les résultats desessais :
- Il
était
difficile dequantifier
les rayures : l’on n’obtient pas de résultats satisfaisantsenessayantde compter le
nombre de rayures pour une surface donnée afin de se donner une échelled’appréciation.
- Le tri des tissus en
bons,
moyens, mauvais, ne donne pas de francsrésul-
tats : un tissu ne venait que rarement dans lescatégories
"bons" ou "mauvais".- On ne
pouvait enfin
classer les tissusproduits
dansl’ordre d’importance
desrayures car les
pièces produites
étaientteintes
dans des couleurs très différentes et lacomparaison
des rayures de couleurs différentes n’étaitguère possible.
Il était
cependant possible
de comparer deux tissus de même teinte et de déte rmine r celuiqui
avait la meilleurequalité.
( 1 )
T raduction par M. RAISON d’un articlepublié
dans la revue Sigma n" 1, 1955.- 86 -
On forma les deux séries suivantes à
partir
desexemplaires
des tissus pro- duits d’unepart
avec les fils A et B et,d’autre part,
avec lesréglages
1 et 2.Table 1 Série 1
Série 2
Dans
la première série,
les deuxexemplaires
dechaque paire
ont été obtenusavec le même
réglage
dumétier,
tandis que le fil utilisé était dans tous les cas le f il du fournisseur A pour lepremier exemplaire
et celui du fournisseur B pour le secondexemplaire,
Dans la secondesérie,
l’onprocéda
defaçon analogue
en in-versant les rôles du fil et du
réglage.
Ons’arrangea
enfin pour que les tissus depaire
soient de la même teinte.On demanda à trois contrôleurs
qualifiés
d’examiner les 23paires
ainsi for- mées et de déterminer pour chacune despaires l’exemplaire qui
devait, dupoint
de vue des rayures, mériter la
préférence.
Le contrôleur ne connaissaitpoint
aumoment de son examen les numéros des fils et
réglages
utilisés danschaque paire.
Si la
qualité
du fil examiné avaitquelque
chbse à voir avec les rayures, il fallait alors s’attendre à ce que les tissus en fil A soient de meilleurequalité
que les tissus en fil B. S’il en était ainsi àl’examen,
l’on affectait à lapaire
examinéele
signe
+, dans le cas contraire lesigne -.
Si les contrôleurs nepouvaient
trouverde
différence,
l’on donnait lesigne
=.On
présumait également
pour lespaires
13 à 23 que leréglage
1 donnait des résultatssupérieurs
à ceux duréglage
2.à’il
en était bien ainsi l’on affectait à cettepaire
lesigne
+ et dans le cas contraire lesigne -.
L’application
de la formule "lapluralité
des voix décide" donnait enfin le résultatfinal ; l’appréciation
où 2 des 3 contrôleurs étaient du même avis était notée comme"l’appréciation
de lamajorité".
Les
résultats
furent les suivants : Table 2Série 1
(comparaison
desfils)
Série 2
(comparaison
desréglages)
Il y a une différence
frappante
entre les résultats des 2séries :
- Dans la
première
série(comparaison
desfils); l’appréciation majoritaire
finale a
indiqué
des différences sur 10paires.
Seule unepaire
conduisait à un résultat favorable au fil B.- Dans la seconde série
(comparaison
desréglages)
leréglage
"1" a conduit 6 fois à un résultatsupérieur
et leréglage "2",
5 fois.- 88 -
Il
parait
bien clair que les rayures des tissus examinés étaient liées à laqualité
du fil et non pas auréglage
du métier. Seul ungrincheux (un
statisticien, parexemple) pourrait
encore se tourmenter à cesujet.
Et
pourtant
il faut êtreprudent
dansl’appréciation
de tels résultats car dansune série aussi peu
importante
que celle despaires examinées,
le hasardpeut jouer
de vilains tours,Imaginez,
parexemple,
la situation suivante :33
paires
deproduits
sont traités avec unepréparation anticorrosive,
un desexemplaires
dechaque paire
avec lapréparation
A l’autre avec lapréparation
B.Ces
paires
sont ensuiteplacées
dans une enceinte humidependant
un certaintemps
et enfin
contrôlées.
Le contrôle faitapparaître
que lapréparation
B donne lemeilleur résultat pour 10 des
paires examinées.
Faut-il alors en conclure que lapréparation
A doit avoir lapréférence.
Il est
possible,
dans des cassemblables,
de calculer le rôle que le hasardpeut jouer
dans une série de cetteimportance.
Le raisonnement que nous suivrons dans ce cas est très usuel en
statistique ;
nous supposerons, pour commencer,
qu’il n’y
a aucune différence entre les fils etnous chercherons à déterminer la
probabilité d’apparition
du résultat trouvé. Si cetteprobabilité
est trèsfaible,
celasignifie
alors soit que nous avons affaire à un événement extrêmement rare, soit que notresupposition
n’est pas exacte. Dansce cas, nous
négligerons
alors lapremière possibilité
et nous admettrons que lasupposition
initialequ’il n’y
avait pas de d fférence entre les fils était erronée(2).
Dans le cas
représenté
par la table1,
nous supposons pour commencer que les 2 lots de fils neprovoquent
aucune différence dans les rayures et que les dif- férences entrepaires
ne sont duesqu’au
pur hasard ou à d’autres facteurs. Nousnous demandons ensuite
quelle
est, dans ces conditions, laprobabilité
pour que le fil A provoque 9 fois uneappréciation positive
contre 1 fois le fil B. Si les fils neprésentent
réellement aucunedifférence,
un tel résultat ou un résultat encoreplus
"fort"
n’apparaît qu’une
fois sur 100. Comme nous ne tenons pascompte
de lapossibilité
d’avoir eu à faire à un événement aussi rare, nous décidons alors de considérer que les résultats trouvés montrent bien quel’importance
des rayuresdépend
en effet de laqualité
du fil. Ceci est bien en accord avec la conclusion quenous avons
déjà
tirée intuitivement.Ce
pourcentage
de 1%
que nous venons de donnerprovient
d’un calculsimple
relatif à la loi binomiale et dont le résultat est d’ailleurs donné par les tables.
L’on
peut
alors se rendrecompte rapidement
de lasignification
à donner auxvaleurs
trouvées expérimentalement.
Si le nombre designes
+ dans la série exa- minée est inférieur ou auplus égal
aux valeurscritiques
de la table ci-dessous,nous pourrons alors donner une
signification
à la différenceobservée.
(2)
Cette formulation n’est pas tout à fait exacte, ainsi que le lecteur formé à l’emploi des méthodes statistiques aura pu le remarquer.Table 3 Test des
signes
Valeur
critique
pour uneprobabilité
dedépassement
bilatéral de0,05
Pour
apprécier
les résultats des essais de résistance à la corrosion dont il aété
question,
nous chercherons la valeurcritique correspondant
à 33paires.
La table donne à la 4eligne
et à la 4e colonne une valeurcritique
de 10. Lapréféren-
ce pour la
préparation
A est doncmotivée.
Quelle aurait été
cependant
notre conclusionsi,
au lieu de rencontrer 10résultats positifs
comme dans ce cas, nous en avions rencontré 12... Nous nepouvons alors pas conclure
qu’il
n’existe aucune différence entre les effets des 2préparations.
Ce que nous pouvonsconclure,
c’est que ladifférence,
si elleexiste,
n’est pas assezimportante
pour que ses effetspuissent
êtreremarqués
dans le nombre d’essais
effectués.
C’était ainsiprécisément,
le cas de la compa- raison de la table 2 pour cequi regardait
l’influence duréglage
du métier sur 11paires
nous avons 6 valeurspositives
et 5 valeursnégatives.
Pour 11 la table 3 donne 1 comme valeurcritique.
Toute valeur du nombre desappréciations majo-
ritaires
positives (et
du nombre des valeursnégatives)
> 1 nepermet
pas d’éta- blir une distinction entre lesréglages
1 et 2. Si cette distinctionexiste,
elle n’est pas assezimportante
pourqu’elle puisse
êtreremarquée
dans un essai de11
appréciations.
Pour fixer le nombre depaires,
nous ne tiendrons pascompte
despaires
dont les résultats neprésentent
aucunedifférence.
Ce test,
qui
est connu sous le nom de test dessignes, peut
êtreappliqué
defaçon
trèssimple,
dans les casanalogues
à ceux que nous avonsdécrits.
Pour deplus amples
détail sur la basethéorique
de ce test, nous renvoyons le lecteur à(2),
et pour les tables détaillées à(3) (références
donnéesci-après,
ainsi que l’annexeci-après).
Litté rature
(1)
J. HEMELRIJK etH.R. Van der VAART "L’emploi desprobabilités
dedépassement
uni-latéral et bilatéral dans les tests