Quelques pages
Les organismes modèles dans la recherche médicale Gabriel Gachelin (sous la direction de) PUF, 2006
ISBN 2-13-055269-2
• 24 €
Voici décrites en collectif, thème parmi d’autres d’un cycle d’ateliers autour de « La dynamique des dis- ciplines biologiques», les mutations qu’a pu subir la notion « d’organisme modèle » en recherche. Notion récente, si l’on s’en tient à l’exemple de la grenouille,
« animal paradigmatique » de la neurophysiologie du 19esiècle, avant la souris. Mais par quel basculement disciplinaire a-t-on pu en arriver à la drosophile ? Avant de répondre un peu hâtivement que la place maîtresse de la génétique en fut la cause originelle, l’auteur sug- gère de regarder d’un peu plus près ce besoin d’orga- nisme modèle (qu’il considère un peu comme une
« réification » soit de la métaphore soit de l’analogie).
Vers 1980, un télescopage lexical fait de l’organisme modélisé un modèle. Cet imbroglio conceptuel vient de l’interpénétration de domaines hétérogènes : phar- maceutique, médical, génétique, biologique. Une géné- ralisation des informations recueillies de l’expérience et des ressources techniques en a fait un « groupe taxi- nomique » autonome. Gabriel Gachelin fait l’histo- rique de ce qui a commencé par être des « styles méthodiques ». Tout organisme modèle est à la fois exemple et outil, à condition qu’il ne s’agisse pas d’ar- tefacts « construits », mais d’organismes vivants, objets de connaissance, peut-être instrumentalisés mais aptes à générer des inductions fécondes.
Ils participent à la recherche de ce qui est « commun à », intéressant de par son degré de représentativité.
Leur durée de vie dépend évidemment du dévelop- pement du champ de recherche, mais ils peuvent sur- vivre à un programme de recherche et entamer une belle carrière : ainsi la drosophile, modèle pour la car- tographie génétique, puis exploitable en embryologie moléculaire.
Àpropos de leur utilisation en pathologie expéri- mentale, R. Koch, fondateur de la bactériologie moderne exprima pourtant toujours sa méfiance envers le savoir clinique, pratique fonctionnant sans théorie explicite, ou procédure sérielle : le concept d’animal modèle excluait alors l’hypothèse que les résultats soient transposables d’une espèce à l’autre.
En biologie, les organismes sont choisis pour leur caractère ubiquitaire, en recherche médicale pour leur proximité spécifique. Les animaux expérimentaux ont joué un rôle en tant qu’appareillage vivant, média- teurs entre champs empirique et théorique, sorte de
«fiction sous surveillance» (J. Mouloud, 2002).
Gabriel Gachelin décrit très bien comment la souris – surtout utilisée par les immunologistes à cause de la composante génétique de certaines réponses immuni- taires – et la drosophile sont devenues les organismes modèles paradigmatiques du 20esiècle. Et ce jusqu’à la construction de la souris idéale, susceptible d’éta- blir des lignées pures, (inbred) : l’animalité s’est effa- cée derrière la reproductibilité et la standardisation.
L’organisme modèle a changé de statut dans les stra- tégies expérimentales surtout grâce aux souris trans-
Les organismes modèles dans la recherche médicale
géniques, réservoir de polymorphismes génétiques per- mettant l’étude in vivodes conséquences de l’inactivation d’un gène précis. Mais, ces souches stables, mimeraient des symptômes plus que des pathologies, excellents sup- ports d’expérience, mais non modèles des maladies.
Puis, forcément, ces « souris-outils » devinrent obsolètes, sortes de référent historique. Du fait qu’elles étaient non pas découvertes mais inventées, elles dévièrent le regard sur objectifs : l’ouverture d’un nouvel espace entre tech- nologie et science, usine et laboratoire*1. Le criblage sur tumeurs fit apparaître la distinction modèles de et modèles pour (traitements)*2. Modélisation plus que modèle, il s’agissait de décrypter la « boîte noire », soit davantage q’un ensemble biologique, une piste exigeante pour fourbir des médicaments plus pointus. Le criblage sur tumeurs était donc plus qu’une mesure d’activité bio- logique, il incluait quelque chose – «l’effet plus spéci- fique, non identifié qui mimait un cancer». Puis vint l’ère moléculaire où les cultures cellulaires accompagnaient des souris « immunocompromises » : un système immu- nitaire humain dans un corps de souris par transplan- tation des composants fœtaux du système immunitaire humain et de cellules immunitaires humaines*3. Devant cet animal producteur de médicaments, Gabriel Gachelin s’interroge beaucoup sur la fin possible des organismes modèles voués à être supplantés par les bio- technologies. L’humanisation des anticorps deviendrait affaire d’ingénierie génétique. Mais beaucoup de nou- veaux anticorps sont à présent entièrement humains, sélectionnés et produits sans animaux. « Les maladies humaines sont-elles appelées à devenir… leurs propres modèles ?» Le problème ne serait plus la démarche scien- tifique, mais la faible portée de généralisation des résul- tats. Pourtant, l’expérimentation animale reste une nécessité. Peut-être faudrait-il remettre à sa place la radi- cale molécularisation en évaluant ses aptitudes à l’« extra- polabilité » ? Selon l’auteur, deux facteurs sont entrés en jeu : la « scientifisation » a chamboulé la médecine et l’institutionalisation de la recherche par la création de l’Inserm dans les structures hospitalo-universitaires. Nul doute qu’il y ait du vrai dans cette forêt de néologismes.
La définition des organismes modèles reste celle d’outils pertinents, expérimentaux parmi d’autres servant à conceptualiser ou valider une hypothèse, soit une « struc- ture formalisée utilisée pour rendre compte de phéno- mènes ». « Les modèles de criblage se situent donc en amont du » moléculaire « de la recherche clinique ».
Hélas la prédictivité fait souvent défaut (analogie n’est pas identité). Pourquoi alors ne pas faire des « rétro- expériences », sur la base d’une toxicité reconnue, ce qui exclurait d’avoir à assumer une extrapolabilité rela- tive ? Les caractéristiques des êtres vivants et la régu- larité de certaines contingences autorisent la notion de généralisation. Il faudra toujours recourir à la géné- ralisation inductive pour « certifier » du caractère
« ubiquitaire » d’un phénomène. Il y a « idéalisation » d’une situation ou d’un trait. Ce qui est acquis, conclut BIOFUTUR 271 • NOVEMBRE 2006
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*1En partie à cause de l’apparition d’une hypothèse virale oncogène redevable à cette standardisation.
*2Au chapitre intitulé
« Les modèles animaux en recherche thérapeu- tique au National Cancer Institute».
*3« Comme nous l’avons vu dans ce qui peut être décrit de manière vague sous le nom d’ère molécu- laire dans la recherche sur le cancer, les modèles in vitrosont quelquefois considérés comme des substituts du moins en principe des modèles in vivoet les modèles in vivosont
en fait conçus comme des tubes à essais, c’est-à-dire des modèles in vitro. »
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Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur biofutur.revuesonline.com
¢Darwin, dessine-moi les hommes
Claude Combes Editions Le Pommier 2006
ISBN 2-7465-0300-X
• 25 €
¢Les climats passés de la Terre Monica Rotaru, Jérôme Gaillardet, Michel Steinberg, Jean Trichet Société géologique de France Editions Vuibert - Coll Enseigner les sciences de la Terre - 2006 ISBN 2-7117-5394-8 • 26 €
Reçus également à la rédaction Erratum
BIOFUTUR 271 • NOVEMBRE 200659
par Maël Knoll m.knoll@lavoisier.fr
Les méthodes utilisées en amélio- ration des plantes ainsi que les cri- tères de sélection évoluent rapidement. Cet ouvrage concret, synthétique et d’actualité permet d’avoir un arrêt sur image à l’aube de ce 21esiècle.
L’ouvrage rappelle tout d’abord les bases de la génétique et les modes de reproduction des espèces végé- tales. Il propose ensuite cinquante fiches de présentation de plantes cultivées, avec pour chacune :
- une synthèse sur l’histoire de l’espèce et les innovations marquantes en matière de création variétale (principales
Histoire et amélioration de cinquante plantes cultivées
On mesure depuis peu le rôle essentiel joué par l'océan dans les mécanismes complexes qui régissent le climat. En stockant la chaleur reçue du Soleil pour la transporter des tropiques vers les régions tempérées, l'océan interagit avec l'atmosphère, contribuant à rendre notre planète habi- table. Dans le contexte du réchauffement climatique glo- bal, l'étude des relations entre l'océan et le climat est devenue un enjeu scientifique majeur.
En quelques décennies, l'océanographie physique est pas- sée d'une approche descriptive et géographique à une approche géophysique. Cette mutation spectaculaire a été rendue possible grâce au développement de pro- grammes internationaux sans précédent, auxquels se sont ajoutés les apports déterminants de l'observation spa- tiale et de la modélisation numérique.
Océan et climat
l’auteur, c’est la particularité et non pas la généralité qui décide du mode d’usage substitutif du modèle.
Question subsidiaire, la fertilisation in vitro, le clonage cellulaire et les cellules souches sonnent-ils la fin des organismes modèles ? «…L’homme devenant un modèle de lui-même…»
C’est donc le moment de discuter avant qu’il ne soit trop tard… Gabriel Gachelin, par son abord franc des questions et sa mise en perspective historique très tendue, replace ses modèles charnels ou presque dématérialisés sur une ligne d’horizon contingente de l’Éthique.G
étapes de l’amélioration génétique, perspectives à envisager, données sur l’inscription et la protection des variétés)
- des illustrations de la plante entière et des produits de la récolte.
Ces présentations concernent : quatre céréales, six oléoprotéagineuses, trois industrielles, trois forestières, cinq fourragères, huit fruitières, douze légumières, cinq ornementales, trois exemples d’espèces cultivées en milieu tropical et la vigne.
Cet ouvrage s’adresse aux étudiants et aux enseignants du secondaire comme du supérieur, aux profession- nels des semences et à toute personne qui s’intéresse à l’amélioration des plantes.G
Historique et amélioration de cinquante plantes cultivées
C. Doré, F. Varoquaux, coord.
Collection « Synthèses » Editions Quae - 2006 ISBN 2-7380-1215-9
• 72€
Ce vaste déploiement de moyens techniques, scien- tifiques et humains est à l'origine de la découverte des mécanismes fondamentaux de la dynamique des océans, et du rôle particulier des océans tropicaux dans la variabilité climatique.
Accessible à un large public, cet ouvrage retrace dans sa dimension scientifique et humaine les conquêtes d'une discipline en plein essor, à présent au coeur des questionnements sur le climat futur.
Jacques Merle, océanographe-physicien, directeur de recherche à l'Institut de recherche pour le dévelop- pement, a été l'un des acteurs de cette conquête scien- tifique. Il étudie le rôle particulier des océans tropicaux dans la dynamique des interactions océan atmosphère et la variabilité du climat. G
Océan et climat Jacques Merle IRD Editions - 2006 ISBN 2-7099-1584-7
• 32 €
Attention : une erreur s’est glissée dans notre numéro précédent : le prix et l’ISBN de l’ouvrage ci-dessous doivent être rectifiés comme suit :
¢La photosynthèse Processus physiques, moléculaires
et physiologiques
J. Farineau, J.-F. Morot-Gaudry Collection « Synthèses » Editions Quae
ISBN 2-7380-1209-4
• 49 € 11-livre271 6/10/06 10:17 Page 59
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