Doc 3, pp. 113 – 114 -
Comment vint la nuit
Il y a longtemps, très longtemps, la nuit n’existait pas sur terre. Le jour régnait en permanence.
Le Grand Serpent qui, sous les eaux, dirigeait le monde, retenait la nuit prisonnière. Aussi n’y avait-il point d’animaux, d’oiseaux, ni de poissons dans les rivières. La forêt n’était agitée d’aucun bruit.
Le Grand Serpent avait une fille qui s’en fut vivre sur la terre aux côtés d’un Indien. Un jour, elle tomba malade et son mari craignit de la perdre.
« Ici, le jour nous éblouit sans cesse », lui dit-elle. « Mes yeux sont aveuglés par la lumière du soleil.
Va demander, je t’en supplie, à mon père qui est sous les eaux de m’envoyer la nuit afin que je retrouve le sommeil. »
L’Indien fit alors venir trois des plus fidèles serviteurs. « Vous irez chez le Grand Serpent, dans le monde qui est sous les eaux », leur dit-il. « Vous lui direz que sa fille mourra si le sommeil la fuit toujours. Vous lui demanderez de rendre à la nuit sa liberté. »
A bord d’un canoë, les trois fidèles serviteurs s’en furent chez le Grand Serpent, dans son royaume sous les eaux.
« Votre fille est mourante », dirent les serviteurs au Grand Serpent. « Si vous ne rendez pas à la nuit sa liberté, jamais elle ne pourra dormir ». A ces mots, le Grand Serpent se saisit de la nuit, l’enferma dans une noix d’arec qu’il avait évidée, et puis il la scella dans la résine : « Seule ma fille devra l’ouvrir », dit-il aux serviteurs. « Veillez à la lui remettre intacte. »
Les trois fidèles serviteurs prirent la noix et, dans leur canoë, ils retournèrent vers la Terre. Tandis qu’ils faisaient route, ils entendaient des bruits étranges – grattements, grincements, croassements et cris perçants – qui semblaient provenir de la noix. Les serviteurs étaient curieux. Ils enflammèrent une torche pour faire fondre la résine et, ignorant les ordres du Grand Serpent, ils ouvrirent a noix.
Alors la nuit tomba…Cette première nuit, il apparut un grouillement d’êtres vivants. Dans la forêt, chaque brindille se transformait en animal. Sur les arbres, chaque feuille devenait un oiseau. Les pierres dans les rivières se changeaient en poissons, les plantes aquatiques en grenouilles et serpents. Cette nuit, l’on vit paraitre le jaguar…ouistiti, le quetzal et l’oiseau-mouche. La forêt s’emplit du bruit des animaux – grattements, grincements, croassements et cris perçants.
Les trois serviteurs qui avaient ignoré la recommandation du Grand Serpent furent changés en singes qui hurlaient maintenant d’un arbre à l’autre.
La fille du Grand Serpent put enfin retrouver le sommeil. Lorsqu’elle s’éveilla, il faisait encore nuit.
Prenant alors deux pelotes de ficelle, elle les changea en oiseaux. L’un chanterait pour célébrer la nuit, l’autre pour annoncer le jour. Ainsi, les hommes ne passeraient-ils que la moitié de leur vie dans l’ombre !
Depuis lors, chaque jour le soir tombe et, pendant la journée, la nuit dort dans le royaume sous les eaux.
TROUGHTON Joanna, Comment vint la nuit : conte d’Amazonie, Paris, Gründ, 1990
1. Relève dans ce texte, sous forme de tableau à deux colonnes, tous les verbes conjugués à l’indicatif passé simple. Retrouve ensuite son infinitif.
2. Vocabulaire. Cherche, à l’aide de ton dictionnaire, la bonne définition des mots suivants (soulignés dans le texte):
- Fidèles - Canoë - Évider - Résine - Croassements - Ignorer - Grouillement
3. Reprends ta fiche synthèse sur les « Caractéristiques du monde merveilleux » (le corrigé est posté sur le site) et complète le tableau dans ton classeur (partie Parcous, p. 131 – 132) 4. Dans la partie Parcours de ton classeur, réponds à la question n° 2
5. Tout en bas du texte, en encadré, il y a certaines informations. Comment appelle-t-on ces informations ? Que contiennent-elles ? Tu dois retrouver 5 informations différentes.
