Références
Présentation de la thèse
Approximation numérique de lois de conservation
hyperboliques stochastiques scalaires
dirigée par Thierry Gallouët et Julien Vovelle
Sylvain Dotti
Faculté d’Économie de La Réunion14 Février 2018
Lois de conservation scalaires
Les lois de conservation étudiées dans cette thèse s’écrivent sous la forme d’une équation aux dérivées partielles d’ordre 1 :
∂tu (x , t) + divx(A(u(x , t))) = G (x , u (x , t)) , t ∈ [0, +∞), x ∈ Rd.
u : Rd× R+→ R est l’inconnue, appelée quantité.
A : R → Rd est appelée fonction flux.
G : Rd× R → R est appelée terme source.
L’équation est à mettre en relation avec la loi de conservation parabolique
∂tu (x , t) + divx(A(u(x , t)) − ε∇u(x , t)) = G (x , u (x , t)) ,
t ∈ [0, +∞), x ∈ Rd, ε ∈ R+∗
où un terme de diffusion est ajouté.
Ecrites telles quelles, la quantité u et le terme source G ne dépendent pas du hasard, les lois de conservation sont dites déterministes.
Forme intégrale des lois de conservation scalaires
En supposant A et u suffisamment régulières, elles peuvent aussi s’écrire sous leur forme intégrale, grâce à un sous-ensemble ouvert borné régulier
D ⊂ Rd de frontière ∂D : Z D u (x , t2) dx = Z D u (x , t1) dx − Z t2 t1 Z ∂D A (u(x , t)) .n (x ) d Hd −1(x ) dt+ Z t2 t1 Z D G (x , u (x , t)) dxdt
où n (x ) est le vecteur normal extérieur à l’ouvert D, A (u(x , t)) .n (x ) le produit scalaire euclidien entre A (u(x , t)) et n (x ), Hd −1la mesure de Hausdorff de dimension d − 1.
Un terme source stochastique
Si le terme source dépend du hasard, on remplace G (x , u(x , t)) par Φ (x , u(x , t, ω))dW
dt (t, ω)
où ω est la variable qui représente le hasard. Plus précisemment, ω appartient à l’espace probabilisé (Ω, F , P) muni de la filtration (Ft)t∈[0,T ]. W est un processus de Wiener cylindrique, autrement dit
W (t, ω) = X
k∈N∗
βk(t, ω)ek,
les βk étant des mouvements browniens réels mutuellement indépendants,
(ek) étant une base d’un espace vectoriel de Hilbert H. Chaque
Φ (x , u(x , t, ω)) : H → R est linéaire, continue avec Φ (x , u(x , t, ω)) W (t, ω) = X
k∈N∗
Les problèmes de Cauchy
Si la quantité u est connue au temps t = 0, on cherche à résoudre le problème de Cauchy
∂tu (x , t) + divx(A (u (x , t))) = G (x , u (x , t)) , ∀ (x , t) ∈ Rd× R+∗
u (x , 0) = u0(x ) , ∀x ∈ Rd
c’est à dire à prouver l’existence et l’unicité d’une solution u(x , t) qui donnera l’évolution au cours du temps, dans n’importe quel domaine
D ⊂ Rd de la quantité
Z
D
u(x , t)dx .
Lorsque le terme source est stochastique, le problème de Cauchy s’écrit du (x , t, ω) + divx(A (u (x , t, ω))) dt = Φ (x , u(x , t, ω)) dW (t, ω), ∀ (x , t) ∈ Rd× R+ ∗ u (x , 0) = u0(x ) , ∀x ∈ Rd
Solution au sens faible en déterministe
La notion de solution faible fut introduite par Jean Leray dans son article [Ler33] de 1933. On dira que u ∈ L1
loc Rd× R+ est solution faible du
problème de Cauchy ∂tu (x , t) + divx(A (u (x , t))) = G (x , u (x , t)) , ∀ (x , t) ∈ Rd× R+∗ u (x , 0) = u0(x ) , ∀x ∈ Rd si ∀ϕ ∈ C∞ c Rd× R+, Z Rd×R+ (u (x , t) ∂tϕ (x , t) + A (u (x , t)) .∇xϕ (x , t)) dxdt + Z Rd u0(x ) ϕ (x , 0) dx = − Z Rd×R+ G (x , u (x , t)) ϕ (x , t) dx
Grâce à des intégrations par partie par rapport aux variables d’espace et de temps, le problème de la dérivabilité de l’inconnue u est transféré aux fonctions test ϕ(x , t). La condition initiale est alors incorporée dans l’équation à résoudre.
Solution faible entropique en déterministe
L’unicité (et l’existence) d’une solution faible au problème de Cauchy sont résolues par Kruzhkov [Kru70] (cf aussi Gallouët, Herbin [GH94]) grâce à l’introduction d’une condition supplémentaire d’entropie. Une fonction u bornée est dite solution faible entropique si pour toute fonction convexe η ∈ C1 (R), ∀ϕ ∈ Cc∞ Rd× R+; R+ Z Rd×R+ η (u(x , t)) ∂tϕ (x , t)+ Z u(x ,t) 0 η0(r ) A0(r ) dr .∇xϕ (x , t) ! dxdt + Z Rd η (u0(x )) ϕ (x , 0) dx − Z Rd×R+ η0(u (x , t)) G (x , u (x , t)) ϕ (x , t) dx ≥ 0. Lorsque la condition initiale u0 est bornée, il existe une unique solution
faible entropique u ∈ C R+; L1 loc R
Formulation cinétique en déterministe
Lions, Perthame et Tadmor [LPT94] introduisent une variable
supplémentaire ξ ∈ R dite cinétique, et une mesure m positive et finie sur Rd× R+× Rξ afin d’écrire l’inégalité entropique sous la forme d’une
égalité. Dans le cas où G ≡ 0, elle s’écrit ∀ϕ ∈ Cc∞(Rd× R+× R ξ) : Z Rd×(0,+∞)×R ∂tϕ (x , t, ξ) 1u(x ,t)>ξdxdtd ξ + Z Rd×(0,+∞)×R ∇xϕ (x , t, ξ) .A0(ξ) dxdtd ξ + Z Rd +1 ϕ (x , 0, ξ) 1u0(x )>ξdxd ξ = Z Rd×(0,+∞)×R ∂ξϕ (x , t, ξ) m (dx , dt, d ξ)
On retrouve la solution u grâce à la formule Z
R
Solution cinétique stochastique A)
Nous prouvons existence et unicité d’une solution cinétique u au problème de Cauchy du (x , t, ω) + divx(A (u (x , t, ω))) dt = Φ (x , u(x , t, ω)) dW (t, ω), ∀ (x , t) ∈ Td× [0, T ] u (x , 0) = u0(x ) , ∀x ∈ Td lorsque I A ∈ C2
(R; Rd) et a ses dérivées à croissance au plus polynomiale.
I (x , ξ) ∈ Td× R 7→ Φ (x, ξ) est Lipschitzienne en x,1
2-Höldérienne
en ξ, à croissance au plus affine en ξ
I u0est bornée I ∀p ∈ [1; +∞), E Z T 0 Z Td |u (x , t, ω)|pdxdt < +∞ I ∀ϕ ∈ C1 c Td× Rξ, presque sûrement, t 7→R Td×Rξϕ (x , ξ) 1u(x ,t,ω)>ξdxd ξ est càdlàg
Solution cinétique stochastique B)
c’est à dire l’existence et l’unicité d’un tel processus stochastique u et d’une mesure aléatoire m : Ω → M+b Td× [0, T ] × R telle que Emω Td× [0, T ] × R < +∞, qui vérifient ∀ϕ ∈ C1 c Td× Rξ , ∀t ∈ [0, T ], presque sûrement, Z Td×Rξ ϕ (x , ξ) 1u(x ,t)>ξdxd ξ − Z Td×Rξ ϕ (x , ξ) 1u0(x )>ξdxd ξ = Z t 0 Z Td×Rξ A0(ξ) .∇x(ϕ (x , ξ)) 1u(x ,t)>ξ dxd ξdr + Z t 0 Z Td×Rξ ϕ (x , ξ) Φ (x , ξ) δu(x ,r )(d ξ) dxdW (r ) +1 2 Z t 0 Z Td×Rξ ∂ξϕ (x , ξ) kΦ (x , ξ) k2L2(H,R)δu(x ,r )(d ξ) dxdr − Z t 0 Z Td×Rξ ∂ξϕ (x , ξ) m (dx , dr , d ξ) .
Le maillage espace/temps du schéma Volumes Finis
I Le maillage Th de Td de taille h ∈ R+∗ est constitué de polyèdres K
disjoints dont la réunion est égale à Td.
I ∀K ∈ Th, diam(K ) ≤ h où diam(K ) est la distance maximale entre
deux élément du polyèdre K ,
I Si K , L sont deux polyèdres voisins du maillage Th, on note nK ,Lle
vecteur unitaire normal à leur face commune dirigé de K vers L.
I Le maillage Tk de [0, T ] est constitué de NT intervalles [tn, tn+1[ de
longueur ∆tn. Sa taille s ∈ [0, 1] est définie par s = sup 0≤n≤NT−1
∆tn
I La condition CFL utilisée sera s ≤ Cste|K |, ∀K ∈ Th,
Le schéma numérique des Volumes Finis
Pour obtenir le schéma, on écrit la différentielle stochastique
d (u (x , t)) + divx(A (u (x , t))) dt = Φ (x , u (x , t)) dW (t)
sous sa forme intégrale pour t ∈ [tn, tn+1), on intègre l’équation sur la
cellule K , on approche la solution sur [tn, tn+1) × K par la constante uKn :
Z K u(x , tn+1) − u(x , tn)dx + Z tn+1 tn Z K divx(A (u(x , t))) dx = |K | uKn+1− un K + Z tn+1 tn Z ∂K A (u(x , t)) .nKd Hd −1 ≈ |K | un+1 K − u n K + ∆tn X L∈N (K ) AK →L(uKn, u n L) . On obtient donc |K | uKn+1− un K+∆tn X L∈N (K ) AK →L(unK, unL) = Z tn+1 tn Z K Φ (x , uKn) dxdW (s)
La solution approchée donnée par le schéma
La famille de flux numériquesAK →L, K ∈ Th, L ∈ N (K ) choisie sera
monotone :
(u, v ) ∈ R27→ AK →L(u, v ) ∈ R
est croissante en u, décroissante en v .
Avec la donnée initiale u0K =|K |1 Z
K
u0(x )dx , ∀K ∈ Th, la solution
approchée uh,s est définie pour presque tout x ∈ Td par :
La convergence de la solution du schéma Volumes Finis
vers la solution cinétique stochastique
Sous les nombreuses hypothèses précédentes, la solution uh,k du schéma
Volumes Finis explicite en temps converge vers la solution cinétique u de la loi de conservation hyperbolique avec terme source stochastique de la manière suivante : lim h→0E Z Td×[0,T ] |uh,s(x , t, ω) − u(x , t, ω)| p dxdt = 0, ∀p ∈ [1, +∞)
Conclusion A)
Les preuves d’existence et d’unicité de solutions de lois de conservation ne donnent pas la forme de la solution u. Les schémas Volumes Finis donnent des approximations numériques de u par des fonctions
constantes par morceaux. Ces approximations seront utilisables dès que les fonctions A, G , Φ, u0 seront connues.
Conclusion B)
Plus précisémment :
1. Dans le cas déterministe, (x , t) 7→ uh,s(x , t) est constante par
morceaux.
2. Dans le cas stochastique, à ω ∈ Ω fixé, chaque réalisation (x , t) 7→ uh,s(x , t, ω) est constante par morceaux. Chaque
réalisation est calculée grâce à la formule de récurrence
uKn+1(ω) = uKn(ω) − ∆tn |K | X L∈N (K ) AK →L(unK(ω), u n L(ω)) + √ ∆tn |K | X k∈N∗ Xkn(ω) Z K Φ(x , uKn(ω))ekdx où (Xn
k)k,n∈N∗ est une suite de variables aléatoires indépendantes,
Les questions qui se posent A)
I Est-ce que la loi de conservation scalaire déterministe modélise des situations économiques ?
∂tu (x , t) + divx(A (u (x , t))) = G (x , u (x , t)) , ∀ (x , t) ∈ Rd× R+∗
u (x , 0) = u0(x ) , ∀x ∈ Rd
Pour u, je pense à la quantité d’argent présente dans un pays donné (masse monétaire, agrégat monétaire) ; pour A je pense au flux d’argent ; pour G je pense à la source d’argent. Pour
x = (x1, x2, x3, ...), je pense au nombre d’actifs, au nombre de
chômeurs, au niveau des salaires...
Si oui, cela devrait permettre de prévoir l’évolution de ces quantités.
I Même question avec une donnée initiale aléatoire (résultats donnés par Sinai [Sin92] dans le cas où A(ξ) = ξ22)
Les questions qui se posent B)
I Même question avec un terme source stochastique du (x , t, ω) + divx(A (u (x , t, ω))) dt = Φ (x , u(x , t, ω)) dW (t, ω), ∀ (x , t) ∈ Td× [0, T ] u (x , 0) = u0(x ) , ∀x ∈ Td
I Même question avec un flux aléatoire (travaux en cours de Barth et Kröker [BK16])
I est-ce que l’écriture sous forme d’une différentielle stochastique permet d’imaginer des modélisations ?
Exemple d’un modèle de valorisation d’obligations pour un
taux d’intérêt à court terme A)
Le taux d’intérêt r est supposé être un processus de diffusion (voir [Ste]) :
dr = µ(r , t)dt + σ(r , t)dW (t)
Appliquant le lemme d’Itô au prix d’une obligation P(r , t, T ) où t est le temps, T l’échéance, on obtient :
dP(r , t) = ∂tP(r , t) + µ(r , t)∂rP(r , t) + σ2(r , t) 2 ∂ 2 rP dt + σ(r , t)∂rP(r , t)dW (t)
Si à ce moment là, on voit r comme une variable quelconque, alors formellement, on peut écrire dPdt = ∂P∂t, ce qui donne
0 = µ(t, r )∂rP(r , t) +
σ2(r , t)
2 ∂
2
rP(r , t) + σ(r , t)∂rP(r , t)dW (t)
Le changement de variable u(r , t) = ∂rP(r , t) permet décrire
0 = µ(t, r )u(r , t) +σ
2(r , t)
Exemple d’un modèle de valorisation d’obligations pour un
taux d’intérêt à court terme B)
Les solutions recherchées s’écrivent u(r , t) = A(r , t)exp(−rH(t)) donc
du(r , t) dt = ∂tA(r , t) A(r , t) u(r , t) − rH 0(t)u(r , t) soit u(r , t)dt = ∂ du(r , t) tA(r ,t) A(r ,t) − rH0(t) .
Cela nous donne, en injectant dans (1) une équation de la forme
du(r , t) = F (r , t)∂ru(r , t)dt + T (r , t)u(r , t)dW (t)
soit
du(r , t) = ∂r(F (r , t)u(r , t)) dt−u(r , t)∂r(F (r , t)) dt+T (r , t)u(r , t)dW (t)
C’est une loi de conservation avec terme source stochastique dont la solution pourrait être approchée par un schéma Volumes Finis. Cela donnerait une approximation de P(r , t) par une fonction affine par morceaux grâce à une hypothèse de continuité en temps de P(r , t) et à la condition P(r , T ) = Cste, ∀r > 0.
Bibliographie I
Andrea Barth et Ilja Kröker.« Finite volume methods for hyperbolic partial differential equations with spatial noise ». In : Springer International Publishing, 2016 (cf. p.18).
Thierry Gallouët et Raphaele Herbin.« A uniqueness result for measure valued solutions of a nonlinear hyperbolic equations ». In : Differential and Integral Equations 6.6 (1994), p. 1383–1394 (cf. p.7).
Stanislav N Kružkov.« First order quasilinear equations in several independent variables ». In :
Mathematics of the USSR-Sbornik 10.2 (1970), p. 217 (cf. p.7).
Jean Leray.« Etude de diverses équations intégrales non linéaires et de quelques problèmes que pose l’hydrodynamique ». In : Thèses françaises de l’entre-deux-guerres 142 (1933), p. 1–82 (cf. p.6).
P-L Lions, Benoît Perthame et Eitan Tadmor.« A kinetic formulation of multidimensional scalar conservation laws and related equations ». In : Journal of the American Mathematical Society 7.1 (1994), p. 169–191 (cf. p.8).
Ya G Sinai.« Statistics of shocks in solutions of inviscid Burgers equation ». In : Communications in
mathematical physics 148.3 (1992), p. 601–621 (cf. p.17).