Outils e t m é th o d e s d e la recherche : Expérimentation, ethnoarchéologie, modélisation
E xpérim e n ta tio n , eth n oarchéolo gie, m odélisation
A van t-propos
Olivier Langlois (UMR ArScAn - Afrique)
Les trois réunions tenues d a n s le c a d re des journées scientifiques du thèm e 7C « Expérimentation, ethnoarchéologie, modélisation » furent c o n sac ré es à une ou deux activités techniques : la céram ique pour la prem ière journée, le traitement d e s p eaux pour la deuxièm e, la production d e sel e t d e feu pour la troisième. C e d é c o u p a g e a m e n a logiquem ent les intervenants à centrer leur propos sur les a sp e c ts proprem ent techniques. Les différentes interventions illustrent ainsi l'intérêt archéologique des observations techniques o p é ré e s en contexte ethnographiques. De fait, les chaînes opératoires relatives au traitement des peaux observées chez les indiens d u Nord canadien (S. Beyries) e t les Koriakes e t les Dolgans d e Sibérie (F. David e t C. Karlin), associées au prélèvem ent et à l'étude d e s outils utilisés, a p p o rte n t in référentiel indispensable à la connaissance d e s technologies préhistoriques. I en est globalem ent d e m êm e des autres techniques considérées, m êm e si les matériaux susceptibles d e servir d e référentiels diffèrent. Ainsi, contrairement au travail des peaux, l'activité céram ique (A. Gelbert e t O. Langlois) laissera à l'archéologue infiniment moins d'outils que d e produits. Ces derniers seront d o n c g é n é ra le m e n t pris c o m m e référentiel, cela, en dépit des difficultés dues à l'oblitération souvent volontaires d es tra c e s techniques. Les productions d e sel (O. Weller) e t d e feu (R. March) ont, q u a n ta elles, pour caractéristique com m une la piètre conservation des produits et des outils qu'elles g én èren t. En effet, non seulem ent le sel est consom m é ou dilué et l'énergie lumineuse et calorique est immatérielle, mais la plupart des outils associés sont périssables ou combustibles. En co n séq u en ce, seuls les résidus d e c e s activités sont susceptibles d e traverser les siècles et, partant, d e fournir un référentiel satisfaisant. À c e s différences près, une m êm e d é m a rc h e fut p rése n tée par l'ensem ble des intervenants. Bien que su pposant la fréquentation d e terrains exotiques, celle-ci se résum e à « profiter des expérimentations naturelles d'un laboratoire naturel » (A. C oudart 1992 : 413) et relève d o n c d a v a n ta g e d e l'expérimentation q u e d'une e th n o a rch é o lo g ie aux contours en c o re mal définis.
Finalement des trois notions définissant le th èm e 7c, seule «l'expérim entation» — ou plutôt un type particulier d'expérimentation — fut jusqu'ici a b o r d é e en profondeur. De fait, rares furent les interventions m ettant en av ant la portée socio-économ ique d e s observations réalisées. Ainsi, seules O. Weller e t A. Gelbert expriment la volonté d e d é p a sse r l'analyse « technico-technique » pour extraire des observations ethnographiques réalisées, des informations sociales e t économ iques utilisables en contextes archéologiques. Les questions pourtant fondam entales d e la validité e t — si validité il y a — des limites du « transfert ethnoarchéologique » ne furent ainsi qu'effieurées. Plusieurs interventions rendirent pourtant c o m p te d e la diversité des pratiques e t des objectifs. Ainsi, A. Gelbert part d 'o b servations ethnographiques — en l'occurrence les emprunts technico- stylistiques intervenant entre deux groupes ethnolinguistiques— e t c h erch e à identifier des régularités utilisables par les archéologues alors, qu'inversement, O. Langlois part d'observations archéologiques qu'il tente d'interpréter à l'aide d e d o n n é e s ethnographiques. C ette inversion m éthodologique rend co m p te d'utilisations très diverses du « référentiel actualiste », outil analytique à p o rté e transculturelle pour les uns, à usage uniquem ent contextuel pour les autres.
Ainsi, les questions se rapportant aux c h am p s d'application du référentiel à établir apparaissent com m e fondam entales. Dès q u e l'on s'extraitdu c a d re des inférences techniques peut-on e sp érer s'affranchir d e la « scorie » culturelle pour atteindre un universel fondé sur des lois psychom otrices ? La pratique qui consiste à mettre en a v an t une analogie contextuelle (environnementale, technique, économ ique, etc.) entre une com m unauté ethnographique e t une com m unauté archéologique, supposée légitimer la d é m a rch e ethnoarchéologique, est-elle a c c e p ta b le ? Si d'un point d e vue co n c ep tu e l le problèm e reste le m êm e, l'utilisation des d o n n é e s ethnographiques peut-elle être différée lorsque les terrains ethnographiques et archéologiques sont identiques d a n s l'e s p a c e e t proches dans le tem ps (O. Langlois) e t lorsque les terrains archéologiques e t ethnographiques sont sans lien (O. Weller). C es questions fondam entales, bien q u 'é m e rg e an t des interventions ten u es d an s le ca d re des séminaires, n'ont guère é té traitées durant les d ébats. Les questions se sont le plus souvent limitées aux problèm es techniques soulevés par les différents matériaux considérés.
Outils e t m éthodes d e la recherche : Expérimentation, ethnoarchéologie, modélisation
Pour c e tte raison, il nous paraît important d e recentrer notre thèm e sur les aspects les moins matériels e t les plus « discutables » d e rethnoarchéologie. H s'agira ainsi d e d éb attre, des objectifs, des m éthodes, d e s contextes e t d es ch am ps d'applications d e l'ethnoarchéologie, discipline c o n ç u e com m e différente d e « l'expérim entation d é lé g u é e » a v e c laquelle elle est souvent confondue. Dans c e cadre, c h a c u n e d e s s é a n c e s sera c o n s a c ré e aux trois types d e pratiques susmentionnées : celles visant à la définition d e lois transculturelles, qu'elles soient b a sé e s sur la mise en év id en ce d e lois ou d e récurrences ; celles visant à l'utilisation d es d o n n é e s ethnographiques en contextes archéologiques « distants », celles visant à l'utilisation d e s d o n n é e s ethnographiques en contextes archéologiques « proches ».