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Cancers du sein: l’heure des analyses génétiques et des traitements ciblés

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460 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 19 février 2014

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Cancers du sein : l’heure des analyses génétiques et des traitements ciblés

Fréquemment évoqué dans le champ de la cancérologie, le «traitement personnalisé»

sera-t-il bientôt une réalité ? Du moins, une réalité en pratique quotidienne et accessible au plus grand nombre des personnes pou- vant en bénéficier ? Une étape importante semble aujourd’hui franchie avec une publi- cation du Lancet Oncology.1 Il s’agit d’un tra- vail de grande ampleur, signé par un groupe de vingt médecins et chercheurs travaillant dans treize centres français – groupe dirigé par les Prs Fabrice André (Institut Gustave- Roussy, Villejuif) et Hervé Bonnefoi (Institut Bergonié, Université de Bordeaux).

Il s’agit aussi de la première étude de mé- decine personnalisée, réalisée de façon mul- ticentrique et à large échelle. Baptisée «Safir 01», cette large étude prospective de méde- cine personnalisée visait à déterminer le choix thérapeutique en fonction du profil géno- mique du tissu métastatique. L’objectif était d’identifier une anomalie dans le génome de la tumeur pour laquelle il existe un médi- cament ciblé disponible ou en développe- ment, agissant spécifiquement sur les cellules tumorales qui présentent cette anomalie.

«L’analyse élargie du génome des tumeurs de plus de quatre cents patientes, atteintes d’un cancer avancé du sein, a permis d’iden-

tifier les femmes qui pourraient être candi- dates à des traitements ciblés actuellement en phase de développement clinique, résu me- t-on auprès de l’Institut Gustave-Roussy. Les résultats de l’étude démontrent l’intérêt d’ana- lyser l’ensemble du génome de la tumeur et de ne pas se limiter à rechercher les quelques gènes d’intérêt les plus fréquents.» Ce tra- vail a été mené dans le cadre et sous l’égide d’Unicancer.2

«Jusqu’à présent, les profils génomi- ques n’analysaient qu’un nombre limité de gènes. De ce fait, on risquait de passer à côté d’une mutation donc d’une opportunité thérapeutique, a expliqué à la presse le Pr Fabrice An- dré, oncologue à l’Institut Gustave- Roussy et coordonnateur scientifique.

Pour la première fois, nous démon- trons que des techno logies d’analyse étendue du génome tumoral permet- tent, en identifiant les mutations rares et fréquentes, d’orienter les patientes attein tes d’un cancer métastatique du sein vers des thérapies mieux ciblées.

Ainsi, nous validons véritablement la faisabilité du concept de médecine personnalisée en pratique clinique.

C’est un changement d’échelle, on ne

vise plus le cancer d’un organe mais un can- cer à l’échelle de la cellule.»

Les investigateurs de l’étude ont pu ana- lyser les biopsies de 407 patientes prove- nant de 18 centres français de lutte contre le cancer entre 2011 et 2012. En pratique, l’ana- lyse du génome tumoral a pu être réalisée chez environ deux tiers des patientes. Chez près de la moitié (46%) des 423 patientes participant à l’étude, une mutation géné- tique de la tumeur correspondant à un trai- tement ciblé a été identifiée. L’analyse géno- mique a également révélé des mutations rares pour lesquelles il n’existe actuellement avancée thérapeutique

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Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 19 février 2014 461 aucun trai tement – et ce chez 39% des pa-

tientes. «Ces résultats permettent de définir le traitement le plus adapté en fonction des anomalies iden tifiées, résument les cher- cheurs. Ils aideront également à la concep- tion de nouveaux protocoles d’essais cli- niques et au développement de traitements personnalisés.»

Au final, 55 femmes, soit 13% des patien tes de l’étude (et 28% de celles qui présentaient une anomalie génomique pour laquelle il existe un traitement ciblé), se sont vues pro- poser un traitement en développement cli- nique. «Ceci souligne la nécessité d’aug- men ter le nombre d’essais cliniques qui

évaluent les thérapies ciblées, notre but étant de pouvoir proposer ce type de traitement à 30% des patientes et de les inclure dans les essais cliniques en cours» souligne le Pr Fabrice André. En d’autres termes, ces résultats ten dent à démontrer que l’analyse étendue du gé-

nome tumoral, réalisée en routine clini que, permet-

trait de dé terminer si une patiente atteinte d’un

can cer mé tastatique du sein peut être éli- gible à un panel

de thérapies ci- blées plus large.

Les perspecti- ves semblent lar- ges et les acquis contagieux. En pa- rallèle de l’étude Safir 01, l’Institut Curie de Paris a lancé fin 2012 un autre essai cli-

nique ambitieux dénommé Shiva.

Cette fois, l’objectif est de vérifier qu’une thérapie ciblée sur l’anoma-

lie génétique est efficace en termes de survie sans progression de la maladie, et ce quel que soit le type de can- cer. «L’idée est de sortir du dogme de l’or- gane pour traiter la maladie en fonction de son profil moléculaire», résument ses pro- moteurs dirigés par le Dr Véronique Diéras, directrice du Département de recherche cli- nique à l’Institut Curie. «Il est désormais évident que chaque individu est unique et qu’il a besoin d’un traitement individualisé, adapté à son propre organisme, à son profil génétique, et ce en fonction de son âge et de son environnement» souligne-t-elle.

Cet essai randomisé de phase II inclura au total deux cents patients sur une période de trois ans. La recherche d’une quarantaine d’anomalies moléculaires sera réalisée dans les prélèvements d’un millier de patients.

Les chercheurs estiment qu’environ 20%

d’entre eux devraient être porteurs d’une anomalie pour laquelle existent d’ores et déjà des thérapies ciblées (onze dont trois hormonothérapies). Ces patients seront ré- partis dans deux groupes, l’un recevant le traitement conventionnel (la chimiothérapie validée à ce jour en fonction de la localisa- tion et de l’évolution tumorale), l’autre bé- néficiant de l’une des onze thérapies ciblées selon leur profil biologique.

Le même Institut Curie a lancé un autre essai clinique, un essai d’envergure euro- péenne sur les cancers du col de l’utérus pour lesquels on ne dispose pas de mar- queurs d’évaluation des risques de récidive et de réponse au traitement. L’objectif de cet essai (coordonné par le Dr Suzy Scholl) est d’identifier des groupes de patientes en fonc- tion de leur profil moléculaire et ainsi leur proposer la thérapie la mieux adaptée. Le recrutement d’un millier de patientes se fera dans sept pays européens (Allemagne, France, Hongrie, Moldavie, Pays-Bas, Roumanie, Serbie). Cet essai repose sur la collaboration entre des hôpitaux et des plateformes de biotechnologies et de recherche translation- nelle européennes. A l’issue de cet essai, la prise en charge du cancer du col de l’utérus devrait être harmonisée en Europe et les femmes bénéficieront du traitement le mieux adapté. Dans un deuxième temps, l’effica- cité des nouvelles pistes thérapeutiques sera évaluée. A partir de l’analyse moléculaire complète des tumeurs, il sera possible de

proposer aux patientes des thérapies ciblées.

En établissant pour la première fois, le profil moléculaire complet des cancers du col de l’utérus, l’essai RAID devrait aussi mettre en évidence de nouvelles cibles thérapeu- tiques.

Jean-Yves Nau jeanyves.nau@gmail.com

1 «Comparative genomic hybridisation array and DNA se- quencing to direct treatment of metastatic breast cancer : A multicentre, prospective trial (SAFIR01/UNICANCER)».

The Lancet Oncology, Early Online Publication, 7 February 2014. doi:10.1016/S1470-2045(13)70611-9. Cette étude a reçu un financement du programme hospitalier français de recherche clinique en cancérologie, dans le cadre d’un appel à projets de l’Institut national du cancer.

2 UNICANCER regroupe les Centres de lutte contre le cancer (CLCC) et la Fédération française des Centres de lutte contre le cancer. Les dix-huit Centres de lutte contre le cancer sont des établissements de santé pri- vés à but non lucratif, participant au service public hospi- talier français. Ils assurent des missions de soins, de re- cherche et d’enseignement, avec une prise en charge en conformité avec les tarifs conventionnels et l’absence de pratiques libérales. R&D UNICANCER est un promo- teur académique et un opérateur de recherches en can- cérologie. Il promeut des études cliniques impliquant plus de 130 centres, français et étrangers, et héberge le Bureau de liaison français de l’European Organisation for Research and Treatment of Cancer (EORTC).

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