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Les nouveaux supports du numérique AVANT-PROPOS

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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AVANT-PROPOS

Les nouveaux supports du numérique

Mutation des espaces d’expression, de l’ergonomie et des usages

LISE VIEIRA

Développement de l’offre et de l’audience

Les nouveaux supports du numérique ont le vent en poupe. Portée par le progrès technique, l’offre se renouvelle à un rythme de plus en plus effrené proposant des objets capables de remplir des fonctions toujours plus variées et sophistiquées, pour une plus grande mobilité des usages et une autonomie croissante de l’usager.

Mobilité et délocalisation sont deux facteurs dominants dans la transformation des usages qui sont liés au phénomène de décentralisation des ressources favorisée par le déploiement des réseaux numériques. Les notions de durée et de localisation explosent, d’autant que la technologie de pointe et les efforts réalisés en matière de miniaturisation des supports ont conduit à considérer tout autrement la notion d’accès aux contenus. Ces derniers jusqu’ici accessibles à heures dites dans des lieux physiquement et matériellement implantés (bibliothèque, musée ou bureau) sont désormais déplaçables en maints endroits et acquièrent le statut d’objets nomades 1.

1. D’où le concept de bureau « objet nomade », évoqué dans ses travaux par D. Ettighoffer. L’entreprise virtuelle ou les nouveaux modes de travail, Paris, Éditions Odile Jacob, 1992.

Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur lcn.revuesonline.com

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10 LCN n° 2/2010. Appropriations numériques

C’est ce que Jacques Attali dans un article récent et fort discuté 2 a appelé le carré nomade : le téléphone, l’iPod, l’ordinateur portable et l’iPad, objets qui selon lui correspondent à des fonctions essentielles dans la société actuelle : recevoir, échanger, transmettre l’information et la connaissance.

Mais invention technique et innovation sont deux notions bien distinctes : si ces objets sont attractifs, c’est en grande partie parce qu’ils sont nouveaux. Ces modernes gadgets fruits de l’inventivité technique et d’études marketing sophistiquées, seront ils voués à une disparition aussi rapide que le fut leur avènement ? Eu égard au succès de ces terminaux, l’aspect commercial de leur extension peut sembler prédominant dans une société de consommation avide de nouveauté. Pour prendre l’exemple de l’internet mobile, selon un sondage réalisé en mars 2010 par GroupM 3, on constate que son usage a doublé en un an en France : le nombre d’utilisateurs atteint 4 millions de personnes : « le potentiel est immense dès aujourd’hui puisque 57 % téléphones en usage (soit 22,3 millions de terminaux) peuvent se connecter à internet. Mais seulement 29 % des forfaits intègrent la toile dans le service. À noter la forte progression par rapport aux 18 % de 2009. Mais seulement 18 % des abonnés disposent d’un smartphone (particulièrement optimisé pour le surf mobile) dont 6 % ont choisi l’iPhone. Celui-ci représenterait 65 % des pages vues sur mobile. Ce qui confirme l’image de terminal moteur dans la démocratisation de l’internet mobile ». Selon le Journal du net, un Francais sur deux âgé de 18 à 24 ans a déjà consulté internet depuis son portable 4.

Le fait que l’on constate une nette prédominance de la population jeune peut également amener à penser qu’au-delà du côté gadget, ces terminaux mobiles peuvent aussi avoir des conséquences au plan psychologique, accentuer des tendances addictives et déconnecter l’usager du réel en l’entraînant vers des pratiques ludiques plus ou moins anesthésiantes. Cela amène immanquablement à se poser des questions sur cette sorte de course en avant dans la production d’objets toujours plus performants, plus mobiles, plus attractifs et de se demander quel est réellement leur bien-fondé. Diaboliser la nouveauté technique n’a jamais rien apporté ; en revanche, l’invention technique ne devient véritablement innovation qu’à partir du moment où l’objet de cette invention est intégré dans la société où il est apparu et où il est entré dans les usages.

2. Jacques Attali, l’iPad ou l’hypermédia- http://www.slate.fr/story/16453/ipad-jobs- apple-attali-hypermedia-nomade- article du 28 janvier 2010.

3. http://www.silicon.fr/fr/news/2010/06/09/l_usage_de_l_internet_mobile_a_double _en_un_an_en_france

4. http://www.journaldunet.com/cc/05_mobile/mobile_internet_fr.shtml-

Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur lcn.revuesonline.com

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Avant-propos 11

Évolution des usages

C’est donc sur l’évolution des usages et sur la capacité d’accepter ou de susciter le changement qu’il s’agit maintenant de s’interroger.

L’adhésion au changement passe nécessairement par une modification des mentalités des usagers avec un passage progressif de la réception passive à l’action impliquante. L’imbrication des fonctions d’information et de production 5 est une des caractéristiques de l’évolution de l’économie mondiale.

Internet est désormais un des véhicules majeurs de cette mutation. Les transactions financières ou les échanges d’information en temps réel à l’échelle de la planète bouleversent les équilibres nationaux traditionnels. Dans cette perspective, la circulation d’information est un facteur essentiel car elle introduit une plus grande responsabilité des protagonistes.

D’un point de vue sociologique, de la même manière que la télévision et le téléphone lors de leur apparition ont eu une influence sur l’évolution des rapports au sein de la société, il est probable que les TIC émergentes rempliront ce même rôle. C’est donc dans une logique d’usager que nous devons maintenant inscrire notre réflexion : peut-on considérer qu’il se situe dans une perspective essentiellement consumériste, encouragée par les politiques de marché dominantes, ou bien pouvons-nous voir émerger une prise en charge de l’usager par lui-même, ce dernier devenant alors partie prenante d’un processus dans lequel il est fortement engagé ? Cette question aborde la notion de la situation de l’usager selon un axe fonctionnel : est-il témoin, consommateur ou acteur, est-il les trois à la fois ? Comment cet usager qui est aussi producteur se comporte-t-il dans son environnement social, qu’il soit privé ou professionnel ?

En quelques décennies, nous sommes passés de la société de contrainte décrite par Deleuze 6 consistant à « concentrer, répartir dans l’espace, ordonner dans le temps » en procédant à « l’organisation des grands milieux d’enfermement », à une société d’engagement. Dès 1994, le rapport Théry 7 estimait que les autoroutes de l’information n’auraient de sens véritable que si elles favorisaient l’émergence des nouvelles valeurs de la société de la communication dans les rouages de l’économie et du social, c’est-à-dire l’éclosion d’une société de responsabilité.

5. Jean Lojkine, La Révolution informationnelle, Paris, PUF, 1992.

6. Gilles Deleuze, Pourparlers-, Post scriptum sur les sociétés de contrôle, Éditions de Minuit, 1990.

7. Gérard Thery, Les autoroutes de l'information, Paris, La Documentation Française, 1994.

Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur lcn.revuesonline.com

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12 LCN n° 2/2010. Appropriations numériques

Beaucoup plus récemment, des conclusions similaires apparaissent dans un rapport intitulé Transmédia, numérique, nouveaux comportements. Le multimodèle comme nouvel horizon des médias ? 8 Cette étude concerne essentiellement l’évolution des comportements et des pratiques en matière de consommation des médias télévisuels. Outre la classique constatation que la consommation de medias augmente avec la progression de l’offre technologique et que la fragmentation des audiences croît avec le déploiement de la TNT, cette étude relève de profonds changements dans les pratiques. Elle annonce en conséquence l’urgente nécessité d’organiser une refonte de l’offre fondée sur la flexibilité et la modularité afin de répondre à l’utilisation asynchrone et personnalisée des médias et à l’attitude du consommateur « qui réagit, interagit, mobilise son réseau, et interpelle le média sur ses orientations éditoriales. »

Cette dimension éditoriale est l’un des aspects majeurs de ce contexte en mutation profonde : il s’agit en effet pour les producteurs d’information et de connaissance via ces nouveaux supports de prendre conscience du profond changement de donne : l’information ne circule plus de façon descendante et unidirectionelle comme au premiers temps des « mass media », nous sommes aujourd’hui parvenus à une autre ère : celle de la multiplicité des sources et de l’interaction entre émetteurs et récepteurs. Grâce aux facilités techniques, ils peuvent interchanger de plus en plus facilement leur rôle, mais cela n’enlève pas pour autant la nécessité de disposer de professionnels compétents, spécialistes de leurs champs respectifs et capables de transmettre une information fiable et de qualité.

Le concepteur de supports nouveaux doit porter attention à la construction sociale des usages, tout en étant conscient que la logique de l’offre et celle de la demande interagissent. Nous sommes désormais dans un contexte éminemment complexe qui peut générer une perte de repères : eu égard au nombre et à la complexité des paramètres en présence, la prévision ne saurait s’ériger en science exacte particulièrement en matière d’usages. C’est alors la notion de risque, mais de risque mesuré, c’est-à-dire de stratégie qui prend le relais. Selon Edgar Morin, la stratégie parvient à faire avancer dans l’aléatoire

« elle permet d’utiliser les informations qui surviennent dans l’action, de les intégrer, de formuler soudain des schémas d’action et d’être apte à rassembler le maximum d’incertitude pour affronter l’incertain. » 9

8. http://bepsc.bearingpoint.com/webstudio/client/marketing/ObservatoireMedias2010 /LB-media_web.pdf-

9. Edgar Morin, Science avec conscience, Paris, Éditions du Seuil, 1990, (Coll. Points) p. 178.

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