Références
Processus de Wiener,
Intégrale d’Itô,
Équations différentielles stochastiques
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rePartie
Sylvain Dotti
Laboratoire d’Informatique et de Mathématiques de La Réunion
12 Avril 2018
Les processus stochastiques
Le hasard est représenté par la variable ω qui appartient à l’espace probabilisé (Ω, F , P).
Le temps est représenté par la variable t ∈ R+.
L’information disponible au temps t est modélisée par une sous-tribu Ft
de F . Une famille (Ft)t∈R+ croissante de sous-tribus de F est appelée filtration.
Un processus stochastique X est une fonction X : Ω × R+→ (E , B(E )) où E est un espace topologique appelé espace des états, telle que ∀t ∈ R+
fixé, X (., t) : (Ω, F , P) → (E , B(E )) soit une variable aléatoire. Un processus est dit adapté à une filtration (Ft)t∈R+ si ∀t ∈ R+fixé,
X (., t) est Ft-mesurable.
À ω ∈ Ω fixé, la fonction X (ω, .) : R+→ (E , B(E )) est appelée trajectoire du processus X .
Existence d’un mouvement Brownien réel
Un processus B : Ω × R+
→ (R, B(R)) adapté à la filtration (Ft)t∈R+ est appelé mouvement Brownien ou processus de Wiener si
I ∀0 ≤ s < t < +∞, B(., t) − B(., s) est indépendante de la tribu Fs
I ∀0 ≤ s < t < +∞, B(., t) − B(., s) est de loi N (0, t − s) I p.s. B(ω, 0) = 0
I p.s., les trajectoires de B sont continues.
À une modification près, le processus défini ∀t ∈ R+par
B(ω, t) = L2(Ω,F ,P)N→+∞lim N X n=0 Z t 0 en(s)dsYn(ω)
où (en)n∈N est une base Hilbertienne de L2(R+; dt) et (Yn)n∈N une suite
i.i.d. de variables aléatoires de lois N (0, 1) définies sur (Ω, F , P), est un mouvement Brownien adapté à la filtration σ (B(., t))
Unicité du mouvement Brownien réel
Un mouvement Brownien réel B satisfait les propriétés suivantes I ∀0 ≤ t1< ... < tn< +∞, (B(., t1), ..., B(., tn)) est un vecteur
gaussien centré
I ∀0 ≤ s, t < +∞, E (B(., t)B(., s)) = min (t, s) I p.s., B(ω, 0) = 0.
Un processus stochastique B vérifiant les trois conditions précédentes admet une modification qui soit un mouvement Brownien adapté à la filtration σ (B(., t))
t∈R+.
La définition, caractérisation et futures propriétés du mouvement Brownien sont tirées du livre [Gal08] de Léonard Gallardo, qui lui-même suit d’assez près l’ouvrage de Daniel Revuz et Marc Yor [RY13].
Espérance conditionnelle, Martingales
L’espérance conditionnelle E (X |Ft) de X ∈ L1(Ω, F , P) relativement à
une sous-tribu Ft de F est la meilleure approximation de X connaissant
les observations au temps t ∈ R+, dans le sens où I E (X |Ft) ∈ L1(Ω, Ft, P). I ∀U ∈ Ft, Z U E (X |Ft) d P = Z U Xd P.
Un processus M : Ω × R+→ (R, B(R)) adapté à la filtration (F
t)t∈R+ est appelé martingale si
I ∀0 ≤ t < +∞, M(., t) ∈ L1 (Ω, P)
I ∀0 ≤ s < t < +∞, E (M(., t)|Fs) = M(., s) p.s.
Le mouvement Brownien est une martingale relativement à sa filtration ; idem pour le processus ω ∈ Ω 7→ B(ω, t)2− t
inégalités importantes des martingales
Une généralisation de l’inégalité de Bienaymé-Tchebychev pour les martingales est donnée par l’inégalité Lp de Joseph Leo Doob :
Si X est une martingale càdlàg, alors pour tout intervalle I ⊂ R+ : I ∀λ > 0, ∀p ∈ [1; +∞[, λp P sup t∈I |X (., t)| ≥ λ ≤ sup t∈IE |X (., t)| p I ∀p ∈]1; +∞[, E sup t∈I |X (., t)|p ≤ p p − 1 p sup t∈I E |X (., t)| p
Pour le mouvement Brownien B, on a l’égalité maximale ∀λ > 0, P sup
s∈[0,t]
Régularité en temps du mouvement Brownien
Les trajectoires du Mouvement Brownien B sont presque sûrement localement α-Hölderiennes, ∀α ∈]0,12[, mais pas pour α = 12 i.e.
ps, ∀t1, t2∈ I compact ⊂ R+, |B(ω, t1) − B(ω, t2)| ≤ C (ω) |t1− t2|α. Presque sûrement, les trajectoires du mouvement Brownien ne sont dérivables en aucun point.
Presque sûrement, les trajectoires de B ne sont pas à variations bornées,
i.e. ps, ∀s, t ∈ R+, sup s=t0<t1<...<tn=t n−1 X k=0 |B(ω, tk+1) − B(ω, tk)| = +∞
La variation quadratique [B]t de B sur [0, t] ⊂ R+est égale à t
i.e. ∀t ∈ R+, [B] t(ω) = lim |π|→0 n−1 X k=0 |B(ω, tk+1) − B(ω, tk)| 2 = L2(Ω,P)t pour toute subdivision π : 0 = t0< t1< ... < tn= t de l’intervalle [0, t].
l’intégrale d’Itô des processus élémentaires
Un processus X : Ω, F , (Ft)t∈R+, P × [0, T ] → R est élémentaire s’il existe une subdivision 0 = t0< t1< ... < tn= T de [0, T ] ⊂ R+, des
variables aléatoires Xi ∈ L2(Ω, Fti, P) ∀i ∈ {0, .., n − 1}, telles que
X (ω, t) =
n−1
X
i =0
Xi(ω)1[ti,ti +1[(t), ∀t ∈ [0, T ], ∀ω ∈ Ω. Son intégrale d’Itô contre le mouvement Brownien B, adapté à la filtration (Ft)t∈R+, est la variable aléatoire
I[0,T ](X ) = Z T 0 X (ω, t)dB(ω, t) = n−1 X i =0 Xi(ω) B(ω, ti +1)−B(ω, ti), ∀ω ∈ Ω.
Elle vérifie les propriétés
I X 7→ I[0,T ](X ) est linéaire ; E Z T 0 X (ω, t)dB(ω, t) ! = 0 I E " Z T 0 X (ω, t)dB(ω, t) !2# = E Z T 0 X (ω, t)2dt !
Extension de l’intégrale d’Itô
On a donc une isométrie pour T ∈ R+∗ :
X ∈ E2⊂ L2(Ω × [0, T ], F
T⊗ B[0, T ], dt ⊗ P) 7→ I[0,T ](X ) ∈ L2(Ω, F , P) où E2est l’ensemble des processus élémentaires définis précédemment. Un processus stochastique Y : Ω × [0, T ] → R dont chaque restriction à Ω × [0, t] est Ft⊗ B[0, t]-mesurable (∀t ∈ [0, T ]) est dit progressivement
mesurable. La tribu engendré par ces processus est notée Prog . Les processus élémentaires sont progressivement mesurables. La fermeture de E2dans l’espace de Hilbert
L2(Ω × [0, T ], F
T⊗ B[0, T ], dt ⊗ P) est L2(Ω × [0, T ], Prog , dt ⊗ P).
L’isométrie X ∈ ¯E27→ I
[0,T ](X ) ∈ L2(Ω, F , P) permet de définir l’intégrale d’Itô à toutes les intégrandes L2(Ω × [0, T ], Prog , dt ⊗ P).
L’intégrale d’Itô en tant que processus stochastique
Pour la suite, l’espace probabilisé sera muni d’une filtration I complète i.e. F0 contient les ensembles de P-mesure nulle. I continue à droite i.e. ∀t ∈ R+, F
t =
\
s>t
Fs
Ainsi, nous pourrons travailler avec les classes de processus modifiés presque sûrement à chaque t fixé.
Toute modification d’un processus progressivement mesurable est progressivement mesurable.
Les intégrales d’Itô de deux processus X et Y tel que ∀t ∈ R+, X (ω, t) = Y (ω, t) ps, sont égales.
Toute martingale a une modification càdlàg. Le processus (ω, t) 7→Rt
0X (ω, s)dB(ω, s) est adapté à la filtration (Ft)t∈R+, c’est une martingale de carré intégrable qui admet une
Calcul stochastique
Soient A, C ∈ L2(Ω × [0, T ], Prog , dt ⊗ P) deux processus stochastiques,
X (ω, t) = X (ω, 0) + Z t 0 A(ω, s)ds + Z t 0 C (ω, s)dB(ω, s)
défini ∀t ∈ [0, T ], ω ∈ Ω, est appelé processus d’Itô. L’égalité précédente se note dXt= Atdt + CtdBt, et s’appelle différentielle d’Itô.
Soient deux processus d’Itô X et Y , avec dYt = ¯Atdt + ¯CtdBt.
On a la formule d’intégration par parties suivante :
d (X × Y )t = XtdYt+ YtdXt+ CtC¯tdt Soit f ∈ C2,1 (R × R+), on a la formule d’Itô : d (f (Xt, t)) = (∂tf ) (Xt, t)dt + (∂xf ) (Xt, t)dXt+ 1 2C 2 t × (∂xxf ) (Xt, t)dt.
Équation différentielle stochastique
Une équation différentielle stochastique est une équation de la forme
dX (ω, t) = a (X (ω, t), t) dt + b (X (ω, t), t) dB(ω, t)
où l’inconnue X est un processus d’Itô, les fonctions a, b : R × R+ → R sont boréliennes.
La condition initiale X (., 0) : Ω → R du problème de Cauchy doit être F0-mesurable.
Exemples d’équations différentielles stochastiques
Soient a, b ∈ R, l’équation de Langevin
dXt = −a × Xtdt + bdBt, t ∈ [0, T ] sous une donné initiale X0= x0∈ R admet pour unique solution le processus d’Itô défini par
X (ω, t) = e−at x0+ b Z t 0 easdB(ω, s) , ∀t ∈ [0, T ]. Soient (a, b) ∈ R+ ∗ × R∗, l’équation de Black-Scholes-Merton
dXt = a × Xtdt + b × XtdBt, t ∈ [0, T ] sous une donné initiale
X0= x0∈ R+admet pour unique solution le processus d’Itô défini par
X (ω, t) = x0eat− 1 2b
2t+bB(ω,t)
, ∀t ∈ [0, T ].
Remarque : Si dans la dernière équation, on prend a = 0, b = 1, x0= 1, le processus solution est appelé exponentielle stochastique.
Bibliographie I
Léonard Gallardo.Mouvement brownien et calcul d’Itô : cours et exercices corrigés. Hermann, 2008.
Daniel Revuz et Marc Yor.Continuous martingales and Brownian motion. T. 293. Springer Science & Business Media, 2013.