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LES COMMUNAUTÉS NOUVELLES

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Academic year: 2022

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LES COMMUNAUTÉS NOUVELLES

Florence Brière-Loth

C

1 haque été, plusieurs régions de France sont témoins de

rassemblements proposés par des communautés catho- , liques d'un nouveau genre. À Paray-le-Monial, des ses- sions se succèdent tout l'été à l'initiative de la communauté de l'Emmanuel. À Nouan-le-Fuzelier ou à Lourdes, par la commu- nauté des Béatitudes. À Solignac, par la communauté du Verbe de vie, et à l'abbaye de Bellecombe ou à Tigery, par la commu- nauté du Chemin neuf. Chacun de ces rassemblements réunit plusieurs milliers de personnes : on y prie, on y chante, on s'y confesse, on y célèbre l'eucharistie. Les conférences, carrefours et débats sont toujours centrés sur l'expérience de la foi dans le Christ. Ces festivaliers, assoiffés de spiritualité, viennent de toutes les classes sociales et de toutes les régions. Ils sont jeunes et

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viennent en famille, prenant sur leur temps de vacances pour s'arrêter un instant.

Le mélange des générations, la présence d'hommes, de femmes et d'enfants sont à l'image de ce que sont ces mouve- ments : des communautés qui accordent une grande importance à la famille et qui regroupent hommes et femmes. Appelés

« communautés nouvelles », ces groupes constituent un véritable phénomène. Ils sont nés dans la période de crise qu'a traversée l'Église en Occident entre la fin du concile de Vatican II, en 1965, et l'élection du pape Jean Paul II, en 1978. Crise marquée par de nombreux départs de clercs et de laïcs contestant l'institution.

Deux procès sont alors faits à l'Église : d'un côté, on lui reproche son manque de modernité, de l'autre, d'avoir perdu son identité en se fondant dans la société. Dans les deux cas, les auteurs du procès contre l'Église, une fois le jugement définitif prononcé, s'en vont : les uns jurant de ne plus y remettre les pieds, les autres se regroupant derrière les bannières de l'intégrisme, dont l'une, celle de Mgr Lefebvre, les mènera au schisme en 1988.

Selon le discours dominant, l'Église ne répondrait plus aux attentes des fidèles et ne verrait pas de relève assurée. Or, la soif religieuse est intacte, voire accrue, dans une société qui ne don- ne plus de repères. C'est dans ce contexte que naissent ces com- m u n a u t é s n o u v e l l e s . Elles p r o p o s e n t , à côté d ' a u t r e s cheminements, une nouvelle expression de la foi.

Les fondateurs de ces communautés sont marqués par le mouvement de soixante-huit. S'ils ne sont pas adeptes de l'esprit libertaire revendiqué sur les barricades, ils conservent l'aspiration à une vie communautaire qu'ils souhaitent mettre au service du partage de la foi dont ils font l'expérience. Familiers des Écritures plus que de l'Église, ils doivent inventer pour donner corps à leurs aspirations. Les pionniers de ces groupes trouvent dans les Actes des Apôtres, décrivant la vie des premières communautés chrétiennes, une source d'inspiration essentielle. Un trait, tout à fait particulier, leur est commun : tous ces fondateurs ont enten- du parler de Marthe Robin, cette mystique stigmatisée (morte en 1981) qui a prophétisé qu'une « Pentecôte d'amour se lèverait sur le monde ». Plusieurs d'entre eux viennent la visiter sur son lit de souffrance à Châteauneuf-de-Galaure, et trouvent dans ses

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propos inspiration et encouragements. Des embryons commu- nautaires naissent, ici sous l'influence des dominicains, là sous celle des jésuites, là encore, à l'image de certaines communautés protestantes américaines. Dans tous les cas, on retrouve une aspiration à une vie de foi authentique fondée sur la rencontre personnelle avec le Christ. Le cadre peut être celui d'une vie de type monastique, où se côtoient familles, religieux et célibataires, ou bien celui de petits groupes qui se retrouvent régulièrement pour des rencontres de partage et de prière. Le pauvre, au sens de l'Évangile, est au cœur de l'apostolat. On chante dans les rues pour proclamer sa foi, on évangélise dans les boîtes de nuit, on écoute les victimes de souffrances psychologiques. Très vite, des jeunes et des familles à la recherche de lieux d'expression de leur foi trouvent dans ces communautés un accueil qu'ils aime- raient trouver parfois dans les structures traditionnelles de l'Égli- se. Une génération de convertis ou de personnes revenues à la foi catholique voit le jour. Ils sont une des composantes de ces croyants que Jean Paul II encourage lors de ses deux premiers voyages en France, en 1980 et en 1986.

Ces catholiques d'un genre nouveau découvrent l'Eglise

Pour la plupart, ces catholiques d'un genre nouveau découvrent l'Église. Convertis, ils n'ont pas d'histoire avec elle, ou bien, « recommençants », ils la découvrent avec un regard neuf. Ils refont le chemin, de la foi vers l'Église, et contribuent à apporter à la « vieille dame » un sang neuf. Au début, l'Église elle-même regarde ce courant avec circonspection. L'expérience charismatique vécue par certaines de ces communautés dérange par sa nouveauté que certains jugent excentrique. Selon les membres de ces groupes, l'Esprit saint, troisième personne de la Trinité, mène une action voyante : discernement dans la priè- re, abandon à la Providence, guérison intérieure, conversion à cent quatre-vingts degrés. Le reproche est fait à l'époque à ces mouvements d'attirer du monde et de vider ainsi les églises, de

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tuer la cellule traditionnelle de la paroisse. Les maladresses, les propos définitifs de certains convertis donnent, il est vrai, du grain à moudre à ceux qui voient parfois dans ce renouveau un courant sans avenir. La tension avec l'institution est d'autant plus vive que ces communautés remettent au goût du jour des formes de piété que certains, au nom de Vatican II, avaient voulu balayer. Ainsi, le culte du Sacré-Cœur est remis en vogue par la communauté de l'Emmanuel au sanctuaire de Paray-le-Monial.

De son côté, la communauté des Béatitudes montre un grand attachement à la dévotion mariale. D'une façon générale, l'accent est mis sur le sens du sacré dans la liturgie, et sur la visibilité appuyée par le port de l'habit monastique. Les communautés nouvelles, nées pour l'essentiel de l'initiative de laïcs, montrent toutes un grand attachement à l'Église. Peu à peu, face à ces évolutions, la hiérarchie passe de la circonspection au regard bienveillant. Les évêques délégués auprès des communautés nouvelles constatent qu'elles durent, qu'elles se structurent, tra- vaillent, et forment leurs membres.

Ces communautés contribuent à renouveler l'Église

L'Église est à la recherche de la génération perdue, les 30- 50 ans, qui justement compose le gros des troupes des commu- nautés nouvelles. Préoccupée par le vieillissement du clergé, elle découvre qu'à l'ombre de ces mouvements les vocations sacer- dotales fleurissent. C'est indéniable, ces communautés contri- buent à renouveler l'Église. Des évêques commencent à les appeler à servir dans leur diocèse, certains n'hésitant pas à leur confier la charge de paroisses comme à Paris, Lyon, Perpignan ou Toulouse. Les carnets de chants des paroisses, qui avaient besoin d'être rajeunis, accueillent des compositions du père André Gouze ou de Charles-Éric Hauguel. Là où l'institution manque de cadres, les évêques puisent dans les communautés nouvelles des ressources qu'ils mettent à profit pour leurs ouailles. Dans le domaine de l'accompagnement des familles ou

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de la réflexion sur la sexualité, la communauté de l'Emmanuel, avec sa branche Amour et Vérité, ou la communauté du Chemin neuf, avec sa branche Cana, sont accueillies dans les services pastoraux des diocèses (préparation au mariage). Des missions de l'école Jeunesse lumière sont reçues dans les paroisses. Des prêtres issus des communautés nouvelles sont nommés évêques, comme le père Albert-Marie de Monléon à Meaux, attaché à la communauté de l'Emmanuel, Patrick Le Gai à Tulle, attaché aux Foyers de charité, ou Louis Sankalé à Cayenne, attaché à l'Institut Notre-Dame-de-Vie. Des diacres formés en leur sein sont appelés pour proposer des formations dans les mouvements traditionnels et les paroisses, des théologiens et des théologiennes issus de ces mouvements sont régulièrement consultés.

Le phénomène touche tous les pays

La rencontre entre l'Église et les communautés nouvelles est suivie de près par Rome qui organise, à la Pentecôte 1998, une grande rencontre internationale des nouveaux mouvements.

C'est l'occasion pour l'Église de mesurer le chemin parcouru depuis les années soixante-dix : le phénomène touche tous les pays, soit par la naissance de communautés propres comme en Allemagne, en Suisse, en Italie, en Espagne, en Europe de l'Est, soit par extension géographique sur les cinq continents. Le modèle est partout le même : des communautés réunissant en leur sein prêtres, religieux et religieuses à côté de familles.

La nouvelle évangélisation que le pape Jean Paul II appe- lait de ses vœux au début de son pontificat est en route, loin de toute médiatisation. Ce renouveau fait aujourd'hui pleinement partie de l'Église et s'y sent bien. Le regain de foi dont il témoigne se diffuse au fur et à mesure que la première généra- tion atteint sa maturité. Ainsi, des assemblées de chrétiens, atta- chées à la vie de leur paroisse, n'hésitent pas à lancer des petits groupes dans leur rue ou dans leur quartier pour proposer la vie chrétienne. Leur attachement aux communautés nouvelles ne les détourne pas de l'Église institutionnelle, au contraire, ils en sont des acteurs déterminés au côté de mouvements plus anciens. Le

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renouveau est bien « une chance pour l'Église » comme l'annon- çait, à l'issue du concile Vatican II, le pape Paul VI.

Florence Brière-Loth *

* Journaliste, collaboratrice à l'hebdomadaire Famille chrétienne. Attentive aux questions relatives à la famille et à la transmission de la foi, elle suit, depuis plus de dix ans, le phénomène des communautés nouvelles en France et en Europe.

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