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Academic year: 2022

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la guerre d'Algérie

BAUDOUI, Remi

Abstract

Cet article rend compte de l'histoire de la guerre d'Algérie depuis les "évènements d'Algérie"

jusqu'à la bataille d'Alger. Il rend compte des différents contextes politiques ayant présidé à la rupture de la paix civile et aux engagement militaires contre-insurectionnels.

BAUDOUI, Remi. la guerre d'Algérie. In: Duclos, Jean-Claude. Français d'Algérie et d'Isère. Grenoble : Editions du Musée Dauphinois, 2003. p. 37-44

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:24232

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La guerre d’Algérie

C’est à minuit le 1er novembre 1954 que débutent les « événements d’Algérie », l’insurrection qui donne naissance a posteriori dans la mémoire collective française au début de la « guerre d’Algérie ». La soixante dizaine d’attentats et incendies commis contre les autorités militaires et civiles suscite dans l’instant incrédulité. Le 7 novembre François Mitterrand ministre de l’Intérieur dans le Cabinet Pierre Mendès France proclame derechef, « L’Algérie, c’est la France et la France ne reconnaîtra pas chez elle d’autre autorité que la sienne ». Le déclenchement de cette violence non comprise par les Français d’Algérie marque pourtant dans les faits moins le début du conflit que le franchissement d’un nouveau seuil dans la dégradation des relations entre la métropole et l’Algérie.

Engagée par l’expédition sur Alger de juillet 1830 du maréchal de Bourmont, la conquête de l’Algérie s’achève par la reddition d’Abd-el-Kader le 23 décembre 1847. Définie comme colonie de peuplement, « l’Algérie nouvelle » s’organise sur la constitution d’une nouvelle géographie du territoire qui accorde aux colons la concession des terres agricoles des plaines littorales fertiles au détriment des indigènes spoliés par les lois foncières de 1851 et 1863.

Refoulés vers les montagnes et les sols arides ces derniers sont ravalés au rang d’ouvriers agricoles pour cultiver les domaines échus aux nouveaux maîtres des lieux. En facilitant l’introduction du droit français au détriment du droit musulman et du droit coutumier, la Loi Warnier de 1873 autorise l’abandon de l’indivision des terres en copropriété indigène au profit d’une spéculation qui sert les intérêts des agriculteurs colons. En ville où se constitue une bourgeoise d’affaires, les indigènes occupent les postes de dockers, manœuvres ou domestiques. En 1914, la population européenne avoisine les 780 000 personnes et comprend

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outre une immigration française, une immigration espagnole, italienne et maltaise. Pour sa part, la population musulmane est de l’ordre de 4 711 300 habitants. La faiblesse de la pression démographique ne saurait masquer la rupture profonde qui caractérise l’évolution des populations européennes et indigènes. Les colons français durant l’entre-deux-guerres ne ressemblent plus guère à leurs ancêtres arrivés démunis en terres africaines. Propriétaires fonciers habitant les villes et leurs périphéries, ils possèdent de grandes exploitations intensives marquées par les progrès de la mécanisation et de l’industrialisation. Pour sa part la société musulmane connaît un appauvrissement généralisé et une désagrégation sociale et culturelle. Les fellahs sont corvéables à merci et soumis directement au joug des colons et des « bureaux arabes ». Ils seront les premiers à faire les frais des effets tardifs de la crise de 1929, tant la solidarité entre métropole et colons à jouer pleinement sur le plan des politiques publiques agricoles. Les échecs répétés des projets politiques de Maurice Violette pour mettre en œuvre une véritable politique d’assimilation par l’instruction publique et l’égalité des droits ruine les derniers espoirs des musulmans d’Algérie. La conviction est désormais acquise par les Algériens que les partisans métropolitains du statu quo colonial ont gagné.

Faute d’être entendu par les pouvoirs publics, le mouvement Jeune Algérien se rapproche des mouvements naissants nationalistes. Messali Hadj appelle dès le milieu des années 1930 à la Constitution d’une Algérie indépendante et révolutionnaire. La répression du régime de Vichy à l’égard des militants nationalistes algériens comme l’effort consenti par les « indigènes » dans l’Algérie du Comité Français de Libération du Général de Gaulle de 1942 pour libérer la France du joug nazi confortera la frustration et le ressentiment. La Conférence de Brazzaville ouverte par le général de Gaulle le 30 janvier 1944 avec les représentants de « tous les territoires de l’empire français » a moins pour objet la recherche des voies de l’indépendance des peuples de l’Empire français qu’à consolider la « souveraineté française » jusqu’à ses marges les plus lointaines. Le 14 mars est créé sous le parrainage de Messali Hadj et Ferhat Abbas les Amis du Manifeste et de la Liberté (AML) dont la mission est de rendre familière l’idée d’une nation algérienne et désirable la constitution en Algérie d’une république autonome fédérée à une République française rénovée, anticoloniale et anti-impérialiste. Dès cet instant, avant même la victoire définitive sur le nazisme toutes les conditions sont réunies pour que s’enclenchent les événements qui conduiront à la guerre d’Algérie. L’émancipation des peuples préconisée par la Charte des Nations Unies en cours de rédaction, la constitution de la Ligue arabe ont été interprétés par les populations algérienne comme autant de signes annonciateurs de l’émancipation de l’Algérie. C’est sur ce fond d’espérances qu’éclate dans un contexte de pénurie et de difficultés économiques majeures, le mouvement insurrectionnel

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qui aboutit le 8 mai 1945 aux émeutes meurtrières de Sétif relayées les jours suivants par celles de Bône, Guelma et Batna. La répression sanglante du général Duval commandant la division de Constantine confirma les dirigeants nationalistes dans l’idée que la jihâd serait inévitable et nécessitait une longue préparation.

Quel homme politique français est réellement en mesure de dresser au 1er novembre 1954 un bilan clairvoyant et lucide de la désagrégation des relations entre colons et indigènes en Algérie ? Qui est capable de qualifier la réalité des relations entre la France et l’Algérie de situation coloniale au-delà même du fait qu’Oran, Alger et Constantine soient des chefs-lieux de départements français au même titre qu’Arras et Clermont-Ferrand ? Sur le plan international, la France semble avoir restauré un climat fait de calme, sérénité et clairvoyance qu’elle n’avait pas connu depuis longtemps. La guerre d’Indochine est achevée. Le processus est engagé pour que le Maroc et la Tunisie s’acheminent vers l’indépendance. La France est persuadée d’avoir consenti tous les efforts possibles pour apaiser toutes les tensions en Afrique du Nord. Impossible d’imaginer que cette « rébellion » lancée par un nouveau mouvement le Front de Libération Nationale (FLN) totalement inconnu puisse marquer une nouvelle étape vers la « guerre d’Algérie ». L’incompréhension commande la réponse.

Considérant que « les départements d’Algérie sont des départements de la République Française », François Mitterrand opte pour une politique de « volonté, fermeté et présence » caractérisée par l’acheminement de renforts militaires vers l’Algérie. L’option de la lutte armée contre « la rébellion » est revendiquée sans équivoque par le Président du Conseil. La logique de la répression est ainsi créée pour fournir au FLN non encore réellement structuré les moyens de gagner à lui de nombreux militants et d’asseoir son influence dans les populations civiles. Nommé le 25 janvier 1955 gouverneur général de l’Algérie le gaulliste Jacques Soustelle confirmé un mois plus tard dans ses fonctions par le nouveau Président du Conseil Edgar Faure est missionné pour engager une « politique de détente et de réformes ».

Pour regagner la confiance des populations musulmanes, le « plan Soustelle » prévoit une augmentation conséquente des budgets en faveur de l’équipement sanitaire, agricole et scolaire afin de parvenir à élever le niveau des vie des habitants. Il envisage également d’ouvrir la fonction publique aux musulmans, de lancer une réforme agraire, de favoriser la création d’entreprises nouvelles et de rendre la gestion du culte musulman autonome. Le soulèvement du 20 août 1955 dans le Nord-Constantinois ruine les espoirs de mise en œuvre du « plan Soustelle » du 1er juin précédent. La répression est sanglante. L’état d’urgence décrété par la loi du 3 avril 1955 est confirmé. Les autorités civiles sont dépossédées de leurs

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responsabilités au profit des militaires dotés de pouvoirs élargis en matière de répression de délits et de crimes. Désormais acquis à la ligne répressive et à la restauration de l’ordre par tous les moyens, Jacques Soustelle donne son accord à l’application par l’armée des méthodes de la responsabilité collective. La porte est ouverte au cycle de la violence forgé par les intimidations, les représailles et les otages. Selon les observateurs avisés, la répression prend désormais la forme d’une guerre totale dans laquelle se trouvent réunis face aux « rebelles » du FLN désormais structuré, les bataillons de CRS, de gendarmes, de parachutistes et de légionnaires et d’appelés. La fin de l’année 1955 se caractérise à la fois par une extension géographique de l’insurrection aux deux tiers de l’Algérie et l’augmentation conséquente des actes terroristes. Sur le plan politique, le FLN est le premier bénéficiaire de la répression orchestrée par l’armée française. Le ralliement des différents courants du nationalisme algérien derrière la bannière du FLN est enfin engagé. A la Conférence de Bandoeng, il a obtenu des pays du Tiers-Monde la reconnaissance de la légitimité de son combat.

Le 2 janvier 1956 les socialistes et radicaux vainqueurs des élections législatives forment un Front républicain. Le 1er février suivant Guy Mollet devient Président du Conseil. Le général Georges Catroux est nommé ministre résidant en Algérie en remplacement de Jacques Soustelle. En déplacement à Alger quatre jours plus tard, Guy Mollet est conspué par les partisans de l’Algérie française pour avoir affiché son intention de parvenir à « la paix en Algérie ». Sous la pression de la vox populi, il récuse le général Catroux pour nommer à sa place Robert Lacoste. L’inflexion politique est donnée. En tout nouveau partisan de l’Algérie française, Guy Mollet fait écho aux revendications des « ultras » et des généraux en augmentant de manière conséquente les effectifs de l’Armée. Pour écraser rapidement la rébellion, Robert Lacoste dépose sur le bureau de l’Assemblée nationale un projet de loi

« autorisant le gouvernement à mettre en œuvre en Algérie un programme d’expansion économique, de progrès social et de réforme administrative, et l’habilitant à prendre toutes mesures exceptionnelles en vue du rétablissement de l’ordre, de la protection des personnes et des biens, et de la sauvegarde du territoire ». Le 1er mars, le Parlement vota massivement la loi sur les pouvoirs spéciaux qui suspendit la plupart des garanties de la liberté individuelle.

Le quadrillage du territoire par l’armée est posé comme le moyen optimal de décapiter le FLN de ses bases arrières. La guerre totale est alors engagée contre un terrorisme disséminé sur tout le territoire algérien qui peut aussi bien frapper dans les villes que dans les bled les plus reculés. La violence de la répression militaire pousse toujours plus les jeunes à rejoindre les maquis du FLN.

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Conscients de la nécessité de publiciser leur lutte de libération, les dirigeants du FLN s’accordent sur l’intérêt que représente l’importation du conflit dans la ville d’Alger. Se fondant sur les « pouvoirs spéciaux », Robert Lacoste confie le 7 janvier 1957 à la 10 ème division parachutiste du général Massu, la mission de s’installer dans Alger et de prendre toutes les dispositions nécessaires pour mettre fin au terrorisme urbain. Tout en recommandant aux Européens de « cultiver à l’égard de la population musulmane les sentiments de fraternité que la République nous commande », il engage ses hommes dans une surveillance incessante des musulmans se traduisant à la fois par des perquisitions de jour et de nuit, le contrôle continu de la Casbah, de chacun des quartiers et de chaque immeuble. La ville est divisée en secteurs, les quartiers musulmans sont isolés par des clôtures de barbelés directement placées sous la lumière des projecteurs. Des milliers de personnes sont arrêtées, les prisonniers sont automatiquement interrogés. L’internement des suspects est généralisé, l’usage de la torture systématisé. Le centre de commandement du FLN dirigé par Abbane Ramdane est contraint de quitter la capitale. Gaulliste de la première heure, le général Paris de la Bollardière demande le 7 mars 1957 au général Salan d’être relevé de son commandement.

Le 27 mars suivant, il témoigne dans l’Express des « aspects dramatiques de la guerre révolutionnaire à laquelle nous faisons face et l’effroyable danger qu’il y aurait pour nous à perdre de vue, sous le prétexte fallacieux d’efficacité immédiate, les valeurs morales qui seules ont fait jusqu’à présent la grandeur de notre civilisation et de notre armée ». Pour avoir violé la loi du silence, le général de la Bollardière est envoyé pour deux mois d’arrêt de forteresse au fort de La Courneuve. La bataille d’Alger est à l’origine d’un profond malaise dans la société métropolitaine. Sous l’impulsion de Robert Barrat paraît en mars 1957, la brochure Les rappelés témoignent. Membres de l’Union nationale des Etudiants de France (UNEF), militants catholiques et prêtres, journalistes tels Jean-Marie Domenach de la revue Esprit, ou encore intellectuels tel François Mauriac, se mobilisent pour récuser une guerre indigne de la France. Pierre-Henri Simon publie Contre la torture. Pierre Vidal-Naquet et Laurent Schwartz créent de toutes pièces le Comité Maurice Audin pour témoigner de la torture et des conditions surprenantes de la disparition du militant. Le romancier Georges Arnaud prend la défense de la porteuse de bombes Djamila Bouhired dans un livre publié aux Editions de Minuit. Pour être diversifiée mais aussi combattue par la censure ou la condamnation judiciaire, l’opposition à la guerre d’Algérie et à l’usage de la torture n’en apparaît pas moins connaître durant cette année 1957 une importante audience. En métropole des réseaux d’aide au FLN se créent tel celui du biographe de Jean-Paul Sartre Francis

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Jeanson. En février 1958 Henri Alleg publie la Question, récit de sa détention et de ses tortures, ouvrage aussitôt saisi et immédiatement détruit.

Tout montre à l’évidence que la IV ème République est dans l’impossibilité absolue de résoudre le problème algérien. Déjà des voies s’élèvent pour réclamer le retour de de Gaulle sur la scène politique. Pour Massu, il est l’homme de la situation qui saura garantir le devenir de l’Algérie française. En dépit de ses succès obtenus à Alger, la situation militaire sur l’ensemble du territoire algérien demeure des plus préoccupantes. La pacification n’a pas abouti. La poursuite des « bandes rebelles » devient d’autant plus difficile que la Tunisie et le Maroc sont devenues des bases arrières d’accueil et de relance des opérations. Pour se protéger des incursions des moudjahidin en provenance de Tunisie, le ministre de la Défense André Morice du gouvernement Bourgès-Maunoury décide de construire en arrière des frontières des réseaux de barbelés électrifiés et minés sur plus de trois cents kilomètres de long. La ligne Morice devient un lieu important d’accrochages et combats frontaliers. En réponse à l’attaque par l’Armée de Libération Nationale (ALN) d’une patrouille française non loin du bourg tunisien de Sakhiet Sidi Youcef, les bombardiers mis en action le 8 février 1958 contre les troupes atteignent aussi le village causant plus de soixante-dix morts et cent cinquante blessés au titre desquels figurent les enfants d’un établissement scolaire. Le conflit algérien acquiert désormais une dimension internationale. La crise du régime parlementaire et la désignation le 8 mai 1958 de Pierre Pflimlin à la présidence du Conseil partisan de l’engagement de négociations avec le FLN pour parvenir à une solution politique du problème algérien inquiète les chefs militaires. A Alger Robert Lacoste ministre résidant répète à qui veut l’entendre que la victoire irait à celui qui tiendrait « le dernier quart d’heure » faute de quoi l’on s’acheminera vers un « Diên Biên Phu diplomatique ». Le lendemain, le général Salan commandant supérieur en Algérie adresse au chef d’état-major général des armées un télégramme pour témoigner que « l’armée française, d’une façon unanime, sentirait comme un outrage, l’abandon de ce patrimoine national ». Les associations de Français d’Algérie adressent le même jour un message au Président de la République pour lui demander la constitution d’« un gouvernement de salut public ». L’annonce par le FLN de l’exécution de trois prisonniers de guerre français est à l’origine d’importantes manifestations le 13 mai au centre d’Alger. Le changement de régime est réclamé, le siège du gouvernement général est investi. Sous la présidence de Massu, est constitué un Comité de Salut public comprenant le général Salan et d’autres officiers supérieurs. Par télégramme, Ce comité affirme au Président de la République René Coty attendre « avec vigilance la création d’un gouvernement de salut

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public, seul capable de conserver l’Algérie partie intégrante de métropole ». Fragilisé, le président du Conseil Pierre Pfimlin ne peut désavouer le coup d’Etat. Le général Massu en appelle au retour du général de Gaulle suivi dans cette voie par le général Salan. Sortant du silence dans lequel il se murait depuis sa retraite de Colombey-les-Deux-Eglises, le général de Gaulle déclare que « devant les épreuves qui montent de nouveau », il se dit « prêt à assumer les pouvoirs de la République ». Dans son esprit, il s’agit moins d’octroyer un blanc-seing aux militaires insurgés qui menacent de « sauter sur Paris » pour l’imposer à la tête d’un nouveau gouvernement que de « restaurer l’autorité de l’Etat ». Le 28 mai, Pierre Pfimlin apporte sa démission à René Coty. Les modalités techniques du retour du général de Gaulle sont aussitôt fixées. Le lendemain, René Coty annonce que « dans le péril de la patrie et de la République », il fait appel « au plus illustre des Français » pour former un gouvernement. Le 1er juin 1958 de Gaulle est investi par l’Assemblée nationale comme nouveau président du Conseil.

Celui qui proclame ne pas désirer à 67 ans « commencer une carrière de dictateur » négocie l’octroi des pleins pouvoirs pour une durée de six mois ainsi que les pouvoirs spéciaux en Algérie. Il engage aussitôt une politique d’apaisement au titre de laquelle il faut sans doute placer le lot des petites phrases prononcées lors de son voyage en Algérie du 4 au 7 juin 1958.

Le « Je vous ai compris » d’Alger comme le « Vive l’Algérie française » de Mostaganem sonnent a posteriori comme autant de slogans destinés à calmer les esprits dans la population française d’Algérie et non comme un quelconque ralliement aux partisans de l’Algérie française. Les ultras semblent avoir le vent en poupe. Jacques Soustelle est devenu ministre de l’Information. Le général Massu est félicité pour avoir « canalisé le torrent pour en capter l’énergie » et confirme l’autorité du général Salan en le nommant délégué général du gouvernement et commandant en chef en Algérie. Massu promu général de division est nommé préfet d’Alger. Le ministère de l’Algérie est rattaché à la présidence du Conseil. Au- delà de ces réformes, le souci du général de Gaulle est celui prendre ses distances avec les Comités de salut public pour mieux reprendre en main l’armée. A l’occasion de son séjour en Algérie du 1er au 5 juillet suivant, il annonce la nécessité de consulter les dix millions d’Algériens au même titre que les métropolitains et les Français d’Algérie sur le principe d’une nouvelle constitution. Le droit de vote est consenti aux femmes musulmanes. Le 28 septembre 1958, la Constitution de la V ème République est approuvée. Le 21 décembre suivant, le général de Gaulle est élu président de la République française et de la Communauté.

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Un premier tournant s’esquisse dans le dossier algérien. Le 28 août, de Gaulle affirme que

« l’évolution nécessaire de l’Algérie doit s’accomplir dans le cadre français ». Le 9 octobre suivant, il ordonne au général Salan de faire quitter aux militaires les Comités de salut public et leur garantir la liberté d’expression sans prendre parti. De nombreux officiers ayant participé aux événements du 13 mai sont déplacés. Le général Salan est débarqué et muté à Paris. Les responsabilités civiles et militaires qui lui étaient dévolues sont séparées. Paul Delouvrier devient délégué général du gouvernement, le général Maurice Challe commandant en chef interarmées. Le chef de l’Etat infléchit sa politique algérienne. Il assume désormais pleinement le fait de vouloir en finir avec « la guerre civile en Algérie ». Le 16 septembre, il proclame que la mission de l’armée n’est plus de garder l’Algérie dans la France, mais de rétablir la paix, puis de garantir la liberté de l’autodétermination des Algériens entre trois options – sécession, francisation, association avec la France – et de protéger quoiqu’il arrive tous ceux qui voudraient rester français. Il envisage, une fois la paix rétablie, d’ouvrir une période transitoire qui n’excéderait pas quatre années, à l’issue desquelles les Algériens seraient appelés à décider de leur destin. Malgré l’octroi de la grâce présidentielle pour des condamnés du FLN et par voie de conséquence la libération de militaires français par ce dernier, le front militaire ne cesse pas pour autant. Le FLN qui a constitué le 19 septembre la FLN un Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) a rejeté l’offre de « la paix des braves » du général de Gaulle. Pour le GPRA, la proclamation de l’indépendance de l’Algérie est un préalable à toute négociation. Challe dispose de six mois pour présenter un bulletin de victoire. Le « plan Challe » a pour objet d’atteindre la « pacification intégrale » par une intensification de la chasse aux « rebelles » dans les massifs montagneux pour, selon de Gaulle, obliger le FLN à rejoindre la table des négociations.

La dualité de la position du chef de l’Etat ne cesse d’inquiéter les partisans de l’Algérie française qui crient à la trahison. Le 18 janvier 1960 le général Massu déclare que l’armée

« qui a la force » et « la fera intervenir si la situation le demande » affirme ne plus comprendre la politique algérienne du général de Gaulle. Le rappel à Paris de Massu déclenche la « semaine des barricades » d’Alger. La guerre d’Algérie est désormais aussi une guerre franco-française qui oppose désormais aux forces de l’ordre, les ultras et les pieds- noirs. La crise offre au général de Gaulle les moyens de révéler sa véritable politique pour l’Algérie. Le général Challe est muté, Jacques Soustelle quitte le gouvernement. Le 14 juin 1960, de Gaulle adresse un nouvel appel au GPRA. Bien qu’ils se soldent pas un échec, les

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pourparlers de Melun font renaître dans l’opinion publique lassée par ce conflit, un immense espoir. Le 5 septembre suivant, au moment où s’ouvre devant le Tribunal permanent des forces armées de Paris le procès des militants arrêtés du « réseau Jeanson », 121 personnalités s’apprêtent à publier un « manifeste sur le droit à l’insoumission ». Le 4 novembre, de Gaulle lève l’ensemble des équivoques. L’Algérie future qui sera de la responsabilité des Algériens possèdera son gouvernement, ses institutions et ses lois car « la République algérienne existera un jour ». Le succès du référendum du 8 janvier 1961 par lequel le chef de l’Etat s’engage à créer des institutions provisoires avant l’autodétermination, comme l’annonce d’une prochaine conférence publique à Evian, et les propos du chef de l’Etat du 11 avril sur l’enjeu économique de la politique de la décolonisation pour la France, décident les partisans du coup de force à passer à l’action. Du 22 au 25 avril 1961, les généraux en retraite, Challe, Zeller, Jouhaud et Salan appuyés par quelques unités d’élites tentent de reprendre depuis Alger le commandement de l’armée pour conserver l’Algérie française. L’échec des putschistes n’en a pas moins eu des répercussions importantes. L’épuration, la dissolution des unités putschistes affaiblit la combativité de l’armée française durant la dernière année du conflit. Le champ était libre pour laisser prospérer et croître l’Organisation Armée Secrète (OAS) fondée par des civils et militaires placés sous l’autorité du général Salan et dont l’objet est de parvenir par la lutte armée sous toutes ses formes à maintenir le pays en guerre pour installer dans le giron français une Algérie « fraternelle et française ». L’année 1961 est de ce point de vue l’année de toutes les violences. Aux attentats au plastic de l’OAS, correspondent les répressions des forces de l’ordre, le FLN cherche à marquer des points sur le théâtre des opérations pour parvenir en position de force dans les futures négociations. Le 9 septembre le général de Gaulle sort miraculeusement indemne de l’attentat du Petit-Clamart. Le 17 octobre, Maurice Papon, préfet de police de la capitale engage ses forces de l’ordre dans la ratonnade meurtrière de la manifestation pacifiste des Algériens contre l’imposition à leur égard du couvre-feu. Le 8 février 1962, le déchaînement policier contre la manifestation anti-OAS aboutit au métro Charonne à neuf morts et cent cinquante blessés.

Plus rien ne peut arrêter le chef de l’Etat dans sa détermination. Le 5 septembre 1961, il reconnaît le caractère algérien du Sahara. Le 6 décembre suivant, le conseil des ministres décrète la dissolution de l’OAS. Le 11 février 1962 débutent au village des Rousses les premières négociations entre représentants du gouvernement français et représentants du FLN.

Les négociations définitives s’engagent à Evian et aboutissent le 18 mars 1962. La souveraineté française est déclarée maintenue jusqu’à la tenue du futur scrutin

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d’autodétermination Le 19 mars 1962 est officiellement proclamé en Algérie le cessez-le-feu.

Les Européens et les pieds-noirs commencent à quitter l’Algérie. Conscients de leur échec, les commandos de l’OAS organisent la « politique de la terre brûlée ». Les musulmans pro- français appelés « harkis » sont abandonnés et livrés à leur propre sort. Le 16 mai, le ministre des Affaires algériennes Louis Joxe se fait fort d’ordonner de rechercher les « promoteurs et les complices » des « rapatriements prématurés » car « toute initiatives individuelles tendant à l’installation en métropole des Français musulmans sont strictement interdites ». Et de rappeler le 15 juillet que « les supplétifs débarqués en métropole en dehors du plan général seront renvoyés en Algérie ». Plusieurs dizaines de milliers d’entre eux seront massacrés après la proclamation de l’Algérie indépendante survenue à l’issue du référendum du 1er juillet 1962. C’est seulement le 10 juin 1999, que l’Assemblée nationale adopte une loi permettant de substituer en France à l’expression d’ « opérations de maintien de l’ordre » celle de « guerre d’Algérie ».

Orientations bibliographiques

Bernard Droz et Evelyne Lever, Histoire de la guerre d’Algérie, 1954-1962, Paris, Seuil, 1982, 381 p.

Benjamin Stora, Histoire de la guerre d’Algérie, 1954-1962, Paris, La découverte, 1993, 123 p.

L’Algérie des Français (présentation par Charles-Robert Ageron), Paris, Seuil, 1993, 377 p.

La Guerre d’Algérie (sous la direction d’Henri Alleg), trois tomes, Paris, Temps Actuels, 1981.

Références

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