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Academic year: 2022

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Texte intégral

(1)

Sur un graphe aléatoire

Erik Thomas

Résumé

Dans cette note, nous nous intéressons à un modèle de graphe aléatoire. Nous montrons que le nombre de points isolés du graphe converge, sous certaines hypothèses, vers une loi de Poisson. Nous prouvons aussi une loi forte des grands nombres.

1 Introduction au problème

Le point de départ de cette note est un problème qui aurait pu intéresser Édouard Lucas lorsqu’il dénombrait le nombre de façons de placerncouples autour d’une table !

On place n personnes autour d’une table circulaire, chaque personne sympathise avec un de ses voisins (celui de gauche ou de droite avec une probabilité fixée indépendante du choix de la personne). On s’intéresse au nombre de personnes qui n’ont sympathisé avec personne à l’issue du repas.

On peut modéliser la situation avec un graphe aléatoire. Ce genre d’approche n’est pas nouveau et l’article fondateur est sûrement celui d’Erdös et Rényi. Dans leur article [1], les auteurs se placent dans le graphe completKn dans lequel les arêtes sont enlevées de manière indépendante avec une probabilitép∈]0, 1[. Les auteurs montrent alors que le nombre de sommets isolés (notion définie à la définition 1.1) que, sous certaines hypothèses entrenet p, le nombre de sommets isolés converge en loi vers une loi de Poisson.

Nous nous plaçons dans le cercle discret [[0,n−1]]. L’addition est celle de Z/nZ. Chaque sommet i est relié par une arête aux sommetsi−1 eti+1, que l’on appelera ses voisins. Soitp∈]0, 1[. Chaque arête est enlevée, indépendamment les unes des autres, avec une probabilitép. On noteGn,ple graphe obtenu.

Définition 1.1. Sommet isolé

Soit j ∈[[0,n−1]]. On dit que le sommetj est un sommet isolé deGn,p s’il n’y a pas d’arête entrej−1 et j et entrej et j+1.

Pour touti∈[[0,n−1]], on noteXi,n la variable aléatoire qui vaut 1 si le sommetiest isolé et 0 sinon. On note Xn le nombre de sommets isolés deGn,p. Il est clair queXn=

n−1

X

i=0

Xi,n. Le but de cette note est de montrer les deux propositions suivantes.

Proposition 1.1. Probabilité de présence de points isolés On a :

(i) lim

np2→0

P(Xn >0) =0; (ii) lim

np2→+∞P(Xn>0) =1.

Remarque 1. On remarque que la valeur 1

n constitue alors un seuil : le comportement deP(Xn >0)dépend de la position de ppar rapport à 1

n.

Proposition 1.2. Convergence vers une loi de Poisson Soitc >0. On posep:= √c

n+o 1

n

. La suite(Xn)n∈Nconverge vers une loi de Poisson de paramètre

(2)

Nous allons ensuite nous intéresser à la convergence de la suite Xn

n

n∈N

. Proposition 1.3. Loi des grands nombres

Soit p ∈]0, 1[. La suite Xn

n

n∈N

converge presque-sûrement vers une variable déterministe presque sûrement égale àp2.

2 Convergence du nombre de points isolés vers une loi de Poisson

Avant d’établir les propositions 1.1 et 1.2, nous allons établir la proposition suivante.

Proposition 2.1. On a : (i) E(X) =np2;

(ii) pour tout(i,j)[[0,n−1]]2 aveci6=j, cov(Xi,n,Xj,n) =

(p3(1−p) siietjsont voisins

0 sinon ;

(iii) V(Xn) =E(Xn)(1+2p−3p2).

Remarque 2. La proposition 1.2 devient alors intuitive : lorsque p = √c

n, la variable aléatoire Xn est la somme de lois de Bernoulli dont le couplage tend vers 0 lorsquentend vers l’infini. Il est donc raisonnable de penser que Xn se comporte comme la somme de lois de Bernoulli indépendantes de paramètres c2

n, soit une loi binomiale de paramètresn et c2

n. Or, il est classique qu’une telle suite de variables aléatoires converge en loi vers une loi de Poisson de paramètrec2.

Démonstration. (i) On aE(Xn) =

n−1

X

i=0

E(Xi,n). Or,Xi,nsuit une loi de Bernoulli etXi,n=1 si, et seulement si, les arêtes reliant les sommetsi−1 etiet les sommets ieti+1 ont été enlevées. Par indépendance, on aE(Xi,n) =p2.

(ii) Soientietj deux entiers compris entre 0 et n−1 aveci6=j. On a

cov(Xi,n,Xj,n) =E(Xi,nXj,n)E(Xi,n)E(Xj,n) =E(Xi,nXj,n)p4.

• Si iet j sont voisins. On a par exemplej=i+1. Ainsi,Xi,nXj,n =1 si et seulement si les arêtes reliant les sommets i−1,i,j =i+1 eti+2 ont été enlevées, soitE(Xi,nXj,n) =p3.

• Si i et j ne sont pas voisins. On a Xi,nXj,n = 1 si et seulement si, les arêtes reliant les sommets i−1 eti, les sommetsiet i+1, les sommets j−1 etj et les sommetsj et j+1 ont été enlevées.

Ainsi,E(Xi,nXj,n) =p4. (iii) On a :

V(Xn) = V

n−1

X

i=0

Xi,n

!

=

n−1

X

i=0

V(Xi,n) +X

i6=j

cov(Xi,n,Xj,n)

= np2(1−p2) +2np3(1−p)

= E(Xn)(1+2p−3p2).

(3)

On en déduit alors le corollaire suivant.

Corollaire 2.1. Soienti etj deux éléments non voisins de [[1,n]]. Les variables aléatoires Xi,n et Xj,n sont indépendantes.

Remarque 3. On peut montrer plus généralement que si,i1,. . .,imsont des voisins qui sont deux à deux non voisins, alors les variables aléatoiresXi1,. . .,Xim sont indépendantes.

Démonstration. La preuve est immédiate si l’on se souvient que deux variables de Bernoulli sont indépendantes si, et seulement si, elles sont non corrélées.

Nous prouvons la proposition 1.1.

Démonstration. (i) On utilise l’inégalité de Markov pour obtenirP(Xn>0) =P(Xn≥1)≤E(Xn) =np2, ainsi lim

np2→0

P(Xn >0) =0.

(ii) En utilisant l’inégalité de Bienaymé-Tchebyshev, on a : P(Xn>0) ≥ E(Xn)2

E(Xn2)

≥ 1−V(Xn) E(Xn2)

≥ 1− V(Xn) E(Xn)2

≥ 1− 1

E(Xn)(1+o(1)). Il s’ensuit que lim

np2→+∞

P(Xn >0) =1.

Nous prouvons la proposition 1.2.

Démonstration. • Soit kN. On calcule le k-ième moment factoriel de Xn : E(Xn(Xn−1)· · ·(Xn− (k−1))). On a :

E(Xn(Xn−1)· · ·(Xn−(k−1)))

= X

i1 ,...,ik deux à deux distincts

P(i1,. . .,ik isolés)

= X

i1,...,ikdeux à deux distincts et non voisins

P(i1,. . .,ik isolés) + X

i1,...,ikdeux à deux distincts au moins deux sommets sont voisins

P(i1,. . .,ikisolés).

La somme X

i1 ,...,ikdeux à deux distincts et non voisins

contientn(n−2)(n−4)· · ·(n−2(k−1))termes, ainsi

X

i1 ,...,ikdeux à deux distincts et non voisins

P(i1,. . .,ik isolés) =n(n−2)(n−4)· · ·(n−2(k−1))p2k n→+∞E(Xn)k =c2k. On notera que la ligne précédente assure qu’il existeλ1>0 tel que :

0≤ X

i1 ,...,ikdeux à deux distincts et non voisins

P(i1,. . .,ik isolés)λ1nkp2k=λ1c2k. (1)

Il reste à montrer que lim

n→+∞

X

i1,...,ikdeux à deux distincts au moins deux sommets sont voisins

P(i1,. . .,ikisolés) =0. Pour cela, on discute suivant le nombre de voisins. Pourj ∈[[2,k]], on introduit

X

(4)

de sorte que

X

i1 ,...,ikdeux à deux distincts au moins deux sommets sont voisins

P(i1,. . .,ik isolés) =

k

X

j=2

Sj.

Or, la somme deSj contient n×(nj−2)×(nj−4)× · · · ×(nj−2(kj))termes. Il s’ensuit que

Sj = n×(nj−2)×(nj−4)× · · · ×(nj−2(kj))×pj×p2(k−j)

n→+∞nk−j+1p2k−j+1

n→+∞E(Xn)k−j+1pj−1. Le calcul ci-dessus assure aussi que :

j∈[[2,k]],∃λj ≥0, 0≤Sjλjc2(k−j+1)pj−1λjc2(k−j+1). (2) On en déduit que lim

n→+∞Sj = 0, puis lim

n→+∞

X

i1 ,...,ikdeux à deux distincts au moins deux sommets sont voisins

P(i1,. . .,ikisolés) =0. On a donc montré que

kN, lim

n→+∞E(Xn(Xn−1)· · ·(Xn−(k−1))) =c2k. Les lignes (1) et (2) assurent, en posantC:=max{λ1,. . .,λk}, aussi que :

0≤E(Xn(Xn−1)· · ·(Xn−(k−1))Cc2k+C

k

X

j=2

c2(k−j+1)=C

k

X

j=1

c2(k−j+1). (3)

• On introduit la fonction génératrice factorielle des moments deXn : ϕn(t):=

+∞

X

k=0

E(Xn(k)) k! tk,

où, par commodité, on a poséXn(k):=Xn(Xn−1)· · ·(Xn−(k−1)). L’inégalité (3) assure queϕn est bien défini surR.

SoitY ֒→P(c2). On noteϕsa fonction génératrice factorielle définie par ϕ(t):=

+∞

X

k=0

E(Y(k)) k! tk =

+∞

X

k=0

c2ktk

k! =exp(c2t). Il s’ensuit queϕest définie surR.

SoittR. Comme pour toutkN, lim

n→+∞E(Xn(k)) =E(Y(k))et grâce à la majoration (3), le théorème de convergence dominée pour les séries assure que

n→+∞lim ϕn(t) =ϕ(t). (4)

• La ligne (4) assure que la suite(Xn)n∈N converge en loi versY.

3 Loi des grands nombres

Nous allons prouver la proposition 1.3.

(5)

Démonstration. • Nous prouvons d’abord la convergence en loi. Soitε >0. D’après l’inégalité de Bienaymé- Tchebyshev et en utilisant la proposition 2.1, on a :

nN, P

Xn

np2ε

V(Xn) n2ε2 = p

2(1+2p−3p2) 2 . Par encadrement, lim

n→+∞P

Xn

np2ε

= 0. Ainsi, la suite Xn

n

n∈N

converge en probabilité, donc en loi, vers une variable aléatoire déterministe presque sûrement égale àp2.

• Nous prouvons d’abord la convergence en loi. SoitnN. Pour touti∈[[0,n−1]], on poseXi,n =Xi,nE(Xi,n) = Xi,np2. On pose aussi Xn =

n−1

X

i=0

Xi,n . Il suffit donc montrer que Xn

n

n∈N

converge presque-sûrement vers 0. On va montrer que X

n≥1

E Xn′4

n4

converge presque-sûrement, ce qui assure Xn

n

n∈N

converge presque-sûrement vers 0. On a : E(Xn′4) = X

1≤i,j,k,ℓ≤n

E(Xi,n Xj,n Xk,n Xℓ,n ) =S1+S2+S3+S4, où, pour toutm∈[[1, 4]], on a posé

Sm:= X

1≤i,j,k,ℓ≤n card{i,j,k,ℓ}=m

E(Xi,n Xj,n Xk,n Xℓ,n ).

On a

S1 =

n

X

i=1

E(Xi,n′4) =

n→+∞O(n). (5)

Il y a 4

2

façons de choisir 2 éléments parmi 4 (ceux qui seront égaux), ainsi

S2= 4

2 X

1≤i,j≤n i6=j

E(Xi,n′2,Xj,n′2 ) =

n→+∞O(n2). (6)

Il y a 4

3

façons de choisir 3 éléments parmi 4 (ceux qui seront égaux), ainsi

S3= 4

3

X

1≤i,j≤n i6=j

E(Xi,n′3,Xj,n ) =

n→+∞O(n2). (7)

Pour étudierS4, on discute suivant le nombre de voisins. Plus formellement, on introduit : S4(1):= X

1≤i,j,k,ℓ≤n tous non voisins

E(Xi,n Xj,n Xk,n Xℓ,n ),

S4(2):= X

1≤i,j,k,ℓ≤n trois voisins, l’autre isolé

E(Xi,n Xj,n Xk,n Xℓ,n ),

S4(3):= X

1≤i,j,k,ℓ≤n deux groupes de voisins

E(Xi,n Xj,n Xk,n Xℓ,n ),

(4) X

(6)

et

S4(5):= X

1≤i,j,k,ℓ≤n tous voisins

E(Xi,n Xj,n Xk,n Xℓ,n ).

On a donc S4 =

5

X

m=1

S4(m). Par indépendance des variables aléatoires car les sommets sont tous non voisins, on a

S4(1)= X

1≤i,j,k,ℓ≤n tous non voisins

E(Xi,n )E(Xj,n )E(Xk,n )E(Xℓ,n ) =0. (8)

Pour estimerS4(2), on remarque que la somme contient contientO(n2)termes (on choix un sommet, puis on place les deux sommets voisins et un autre sommet non voisin), donc

S4(2) =

n→+∞O(n2). (9)

Le même raisonnement s’applique pour montrer que S4(3) =

n→+∞O(n2). (10)

On remarque, par exemple, que si lesi et j sont voisins et si les sommets k et sont isolés, alors, par indépendanceE(Xi,n Xj,n Xk,n Xℓ,n ) =E(Xi,n Xj,n )E(Xk,n )E(Xℓ,n ) =0, ainsi

S4(4)=0. (11)

Enfin, on remarque que

S4(5) =

n→+∞O(n) (12)

car la somme X

1≤i,j,k,ℓ≤n tous voisins

contient O(n) termes (il suffit de choisir un sommet dans[[0,n−1]], les autres étant voisins).

Les lignes (5), (6), (7), (8), (9), (10), (11) et (12) assurent queE(Xn) =

n→+∞O(n2), soitE Xn4

n4

n→+∞= O

1 n2

, ce qui permet de conclure.

Références

[1] P. Erdös, A. Rényi,On Random Graphs. I, Publicationes Mathematicae. 6, pp. 290-297, 1959.

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