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Article pp.117-144 du Vol.22 n°3-4 (2010)

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ARTICLE /ARTICLE

Les sépultures de sujets périnatals du Vicus de Falacrinae (Cittareale, Italie). Évidences anthropologiques

du rituel des suggrundaria

The burials of perinatal subjects from theVicus of Falacrinae (Cittareale, Italy).

Anthropological evidences of the suggrundaria ritual

Ll. Alapont Martin · C. Bouneau

Reçu le 8 juillet 2009 ; accepté le 30 avril 2010

© Société danthropologie de Paris et Springer-Verlag France 2010

Résumé Le long des murs des habitations attenantes au sanctuaire de Falacrinae, neuf sépultures d’enfants ont été mises au jour. Toutes étaient des inhumations primaires à l’intérieur de fosses, certaines étant recouvertes par destegu- lae; à l’exception d’une qui correspond à un dépôt secon- daire qui se trouvait à l’intérieur d’un vase. L’exhumation méthodique et l’analyse anthropologique des restes ont permis de connaître les caractéristiques des squelettes et de déterminer leur âge comme périnatal. La découverte de ces sépultures révèle la pratique d’un rituel particulier appelé suggrundaria(Fulgence), selon lequel les très jeunes enfants décédés ne pouvaient être traités normalement, ni recevoir les rites et cérémonies établis. Il est ainsi fait référence au fait que les enfants de moins de 40 jours ne pouvaient être incinérés et que leurs corps étaient trop petits pour que leurs sépultures soient considérées comme des tombes.

Mots clésFalacrinae · Inhumation domestique · Périnatals · Rituel ·Suggrundaria

AbstractAlong the walls of the habitations adjoining the sanctuary of Falacrinae, nine burials of children were found. All were primary burials inside pits, some being covered bytegulae; except for one which corresponds to a secondary deposition inside a vase. The methodical exhuma- tion and the anthropological analysis of the skeletal remains have permitted to know the characteristics of the skeletons

and to determine their age as perinatal. The discovery of these burials reveals the practice of a particular ritual called suggrundaria(Fulgentius), according to which very young dead children could not be buried normally, nor receive the rites and ceremonies established. It refers to the fact that children of less than 40 days could not be incinerated; their bodies were too small so that their burials were regarded as tombs.

KeywordsFalacrinae · Domestic burial · Perinatal · Ritual · Suggrundaria

Introduction

Les fouilles archéologiques réalisées par laBritish School at Romeet l’université de Pérouse à Falacrinae,Vicusoù serait né l’empereur Vespasien1, ont permis la découverte, sur le site de Vezzano (Cittareale, Province de Rieti, Fig. 1), d’un sanc- tuaire dont le caractère sacré est confirmé par la présence de nombreuses fosses votives contenant d’abondants restes de sacrifices animaux et de libations. Les premières manifesta- tions du sanctuaire datent de l’époque archaïque (début du

VIesiècle avant notre ère) et ses fonctions se prolongent au moins jusqu’auIIIesiècle avant J-C. Neuf sépultures d’enfants ont été localisées le long des murs des habitations attenantes au sanctuaire [1]. L’exhumation méthodique et l’analyse anthropologique des restes squelettiques ont permis une meil- leure identification et détermination des sépultures de sujets périnatals et l’approfondissement de notre connaissance du rituel différencié et spécifique appliqué aux enfants décédés précocement.

Les premiers squelettes ont été mis au jour lors de la campagne 2007, alors qu’aucune méthodologie particulière

Ll. Alapont Martin (*) · C. Bouneau

CDL València, Sant Roc 9, 1er, 1, 46460, Silla, Valencia, Spain e-mail : lalapont@ono.com

C. Bouneau (*)

CReAAH, UMR 6566, Université du Maine, Chez Mlle Dugrip, 65, Quai de la Seine, 75019 Paris, France

e-mail : chloe.bouneau@gmail.com 1Suétone,Vita Vesp. 2.

Bull. Mém. Soc. Anthropol. Paris (2010) 22:117-144 DOI 10.1007/s13219-010-0016-9

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n’avait été mise en place, la présence de sépultures n’ayant pas été envisagée. Lors de la campagne 2008, une attention toute particulière a donc été portée sur l’éventuelle décou- verte de nouvelles sépultures de sujets périnatals, permettant un meilleur repérage des tombes, l’intervention de fouilleurs expérimentés et la mise en place d’une méthodologie adéquate. Nous regrettons donc la perte d’une importante partie des informations concernant les sépultures mises au jour en 2007 (tombes 7, 8 et 9) pour lesquelles les données de terrain sont quasi inexistantes. Le dégagement des tombes 1 à 6 a été réalisé à l’aide d’instruments fins, d’outils de dentiste et de petits pinceaux. Le sédiment a été récupéré pour chaque tombe puis tamisé à l’eau à la maille 2 mm.

Un dessin à l’échelle 1/1 a été réalisé après chaque décapage, accompagné de clichés photographiques.

L’activité humaine apparaît sur le site à l’époque archaïque (à partir de la première moitié duVIesiècle avant notre ère). À cette époque est construit un édifice de plan trapézoïdal (Fig. 2) composé de trois pièces et interprété comme le temple d’un sanctuaire [2]. À partir duIIIesiècle avant notre ère, unVicuss’installe autour du temple. Dans un premier temps, le temple continue à fonctionner, activités sacrées et activités domestiques liées aux maisons adjacentes coexistent dans un même secteur, les habitations respectant les espaces du sanctuaire. Probablement, dans le courant duIIIesiècle, la structure du sanctuaire est modifiée par la construction d’une grandedomus comprenant unatriumà impliviumqui est installée sur l’espace du temple. D’impor-

tantes modifications sont effectuées à la fin duIIesiècle, la trame de ladomusest modifiée, certains espaces étant divi- sés et d’autres agrandis. D’autres habitations sont construites autour de l’ancien sanctuaire, ainsi en plus de la domus (bâtiment I) apparaissent les bâtiments II et III. Nous ne savons pas si ces nouveaux bâtiments appartiennent à une mêmedomus, avec deuximpluvia, ou si au contraire chaque impluvium correspond à une maison indépendante. C’est dans les secteurs de cesdomique sont localisées les sépul- tures d’enfants (Fig. 3). Les tombes 1 et 9 sont situées dans l’extension du bâtiment I. La tombe 7 est également locali- sée à l’intérieur de la premièredomus, dans l’espace qu’oc- cupait initialement lacelladu temple. Les tombes 2, 4, 5, 6 et 8 ont été mises au jour dans les pièces attenantes auxatria des bâtiments II et III. La tombe 3, située dans un autre sondage, est également liée à un bâtiment domestique.

Les résultats2 de la datation 14C effectuée sur les reste osseux de l’individu de la tombe 1 indiquent que cette sépulture date de l’époque républicaine (KIA-42377 : 2150 ± 30BP (140 av. J.-C. ± 30 ans) ; Résultat calibré OxCal 2 Sigma: (95,4% probabilité) 360 à 280 av. J.-C.

(30,2 %), 260 à 50 av. J.-C. (65,2 %). Elle semble donc bien être en rapport avec les bâtiments domestiques. On peut supposer qu’il en est de même pour les autres inhuma- tions primaires. En revanche, la sépulture secondaire (tombe 7) serait beaucoup plus ancienne (KIA- 42378 : 2530 ± 35BP (520 av. J.-C. ± 35 ans) ; Résultat calibré OxCal 2 Sigma: (95,4 % probabilité) 800 à 530 av. J.-C.).

Ces résultats concordent avec la datation du récipient dans lequel le squelette a été retrouvé (VII-VIe siècle avant notre ère) et avec la période de fonctionnement du sanctuaire où la sépulture a été mise en place. Par conséquent, l’inhumation secondaire doit être en rapport avec un cérémonial particu- lier lié au sanctuaire. Les autres sépultures, qui semblent toutes suivre la même norme, correspondent à un rituel différent, domestique, se manifestant postérieurement, à l’époque républicaine. Ces sépultures semblent donc être dessuggrundaria, ce terme faisant référence à des inhuma- tions domestiques de très jeunes enfants à l’époque romaine, et au toit ou plus exactement à la partie du toit qui dépasse de la façade, l’auvent. Toutes les inhumations sont localisées à l’intérieur des bâtiments, aucune ne semble se trouver dans la rue ou en façade. Ce « toit » ou « auvent » a pu être symbolisé par unetegula recouvrant la tombe des nourris- sons. Notre étude cherche à éclairer la corrélation entre l’âge, les circonstances du décès des individus infantiles et des pratiques funéraires particulières, exclusives, appelées suggrundaria et à enrichir nos connaissances de la société romaine des époques archaïque et républicaine.

Fig. 1 Localisation de Cittareale /Cittareales location

2 Datations C14 réalisées par Mark Vanstrydonck. Kikirpa, Institut royal du Patrimoine artistique. Parc du Cinquantenaire 1, B-1000 Bruxelles

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Évaluation des données anthropologiques

En laboratoire, les os ont été soigneusement nettoyés avant d’être catalogués et analysés. Quand cela s’est avéré possible, les crânes, mandibules et os longs endommagés post mortem ont été restaurés dans le but d’obtenir des estimations significatives. Ils ont seulement été mesurés quand les deux points de référence étaient présents et intacts.

Les os incomplets et/ou ceux dont l’état de conservation empêchait tout type de restauration ont été enregistrés comme très endommagés.

L’analyse anthropologique et l’examen métrique, quanti- tatif, qualitatif et pathologique des os de chaque individu ont été enregistrés dans une fiche d’analyse anthropolo- gique. La dite fiche est composée de dix parties : données générales ; représentation graphique ; inventaire ; dentition ; Fig. 2 Évolution chronologique du site /Chronological evolution of the site

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mesures et indices crâniens ; morphologie crânienne ; mesu- res et indices infracrâniens ; morphologie infracrânienne ; estimation de l’âge, du sexe, de la stature et physionomie générale des os ; et enfin paléopathologie [3].

L’estimation de l’âge des individus passe par l’évaluation de leur taille corporelle et a été obtenue à partir des mesures de la totalité des os bien conservés. Les points de mesure décrits par Fazekas et Kosa [4] coïncident avec ceux utilisés par Callen [5], ce qui permet de bénéficier des estimations de ces deux méthodes à partir des mêmes mesures. Les dimen- sions obtenues ont été comparées avec les tableaux proposés par Callen dans lesquels figurent les paramètres habituels pour l’estimation de l’âge gestationnel et biométrique fœtal à partir de mesures échographiques des os longs du fœtus.

Ces tableaux sont particulièrement pratiques, rapprochant les paramètres avec l’âge exprimé en semaines de gestation, et en outre montrent la variabilité de chaque paramètre pendant l’évolution de la grossesse. L’estimation de l’âge par la comparaison avec les paramètres dérivés des mesures échographiques peut s’avérer très intéressante puisque, grâce aux avancées technologiques, l’échographie fœtale est devenue l’outil fondamental employé pour établir l’âge

gestationnel, s’avérant plus fiable que les autres méthodes utilisées pour déterminer l’intervalle de croissance fœtale.

Cependant, les tableaux publiés par Callen ont l’inconvé- nient de ne prendre en compte que la longueur des os longs des membres supérieurs et inférieurs, en accordant une plus grande importance aux dimensions du fémur.

Les restes anthropologiques provenant d’une intervention archéologique présentant un état de conservation variable, il est nécessaire de disposer de références qui permettent d’estimer l’âge à partir des dimensions d’un maximum d’élé- ments squelettiques. Par conséquent, nous avons aussi utilisé la comparaison avec les équations de Fazekas et Kosa établies à partir des mesures d’une collection de référence de fœtus en provenance de Hongrie, en adaptant le calcul des mois lunaires aux semaines de gestation. L’utilisation conjointe de multiples mesures osseuses permet d’obtenir une détermi- nation plus fiable de l’âge en multipliant les estimations.

L’emploi de mesures de différentes pièces osseuses s’avère particulièrement important puisqu’il n’est pas rare que des individus normaux présentent des mesures supérieures ou inférieures à la valeur moyenne attendue pour un certain âge. Par conséquent, notre méthode a consisté à employer Fig. 3 Localisation des sépultures /Location of the burials

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Tableau 1 Mesures des squelettes et estimations de lâge des individus /Individual skeletal measurements and age assessments

Tombe/os Mesure Valeur (mm) Âge estimé (semaines)

Tombe 1 Droit Gauche Fazekas & Kosa Callen

Humérus Longueur maximale 60,55 61,16 3739 37 ± 3

Longueur articulaire distale 15 15,2 3739

Clavicule Longueur maximale 42,1 3840 39 ± 3

Scapula Hauteur maximale 34,46 33,93 3840

Largeur maximale 26,97 28,27 3840

Ilium Largeur maximale 33,31 32,2 3739

Hauteur maximale 30,1 29,41 3840

Tombe 2 Droit Gauche Fazekas & Kosa Callen

Clavicule Longueur maximale 44,79 3840 40 ± 3

Scapula Hauteur maximale 34,6 3840

Largeur maximale 28,44 28,82 3840

Humérus Longueur maximale 65,44 66,16 3840 39 ± 3

Longueur articulaire distale 17,67 18,2 3840

Ulna Longueur maximale 61,93 3840 40 ± 3

Radius Longueur maximale 53,76 53,79 3840 39 ± 3

Ilium Hauteur maximale 31,19 3840

Fémur Longueur maximale 76,06 3840 38,8 ± 3

Tibia Longueur maximale 65,38 3840 40 ± 3

Fibula Longueur maximale 64,1 64,3 3840 40 ± 3

Partie latérale Longueur maximale 23,4 3739

Largeur 14,16 3739

Partie basilaire Hauteur maximale 15,61

Largeur 15,01 3840

Hauteur du corps 12,7 3739

Tombe 3 Gauche Fazekas & Kosa Callen

Humérus Longueur articulaire distale 17,2 3840

Tombe 4 Droite Gauche Fazekas & Kosa Callen

Clavicule Longueur maximale 40,13 39,9 3739 38 ± 3

Scapula Hauteur maximale 29,22 3739

Largeur maximale 27,76 3739

Humérus Longueur maximale 62,11 61,87 3739 37 ± 3

Longueur articulaire distale 16,2 16 3739

Ulna Longueur maximale 57,13 56,55 3739 37 ± 3

Radius Longueur maximale 53,3 52,27 3840 37 ± 3

Ilium Largeur maximale 30,5 3739

Hauteur maximale 28,3 3739

Fémur Longueur maximale 70,4 69,71 3739 35,5 ± 3

Longueur articulaire distale 16,6 16 3739

Parties latérales Longueur maximale 22,73 21,79 3739

Largeur 15,19 14,77 3840

Partie basilaire Hauteur maximale 15,64

Largeur 13,79 3739

Hauteur du corps 12,2 3739

Tombe 5 Droit Gauche Fazekas & Kosa Callen

Clavicule Longueur maximale 44,16 45,9 3840

Scapula Hauteur maximale 37,55 3840

Largeur maximale 29,65 3840

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Tombe/os Mesure Valeur (mm) Âge estimé (semaines)

Humérus Longueur maximale 64,99 65,8 3840 39 ± 3

Longueur articulaire distale 16,56 16,73 3840

Radius Longueur maximale 55,08 3840 39 ± 3

Ilium Largeur maximale 36,39 36,73 3840

Hauteur maximale 31,56 3840

Fémur Longueur maximale 74,19 73,59 3840 37,5 ± 3

Longueur articulaire distale 16,6 16 3739

Tibia Longueur maximale 65,31 3840 40 ± 3

Fibula Longueur maximale 62,48 3840 40 ± 3

Parties latérales Longueur maximale 21,76 3739

Largeur 16,4 17,55 3840

Partie basilaire Hauteur maximale 15,33

Largeur 14,72 3840

Hauteur du corps 12,2 3840

Tombe 6 Droit Gauche Fazekas & Kosa Callen

Clavicule Longueur maximale 44,11 3840

Scapula Hauteur maximale 32,2 3840

Largeur maximale 29,24 29,54 3840

Radius Longueur maximale 52,15 3840 37 ± 3

Ulna Longueur maximale 60,38 59,6 3840 38 ± 3

Ilium Largeur maximale 34,13 33,65

Hauteur maximale 31,58 29,54 3840

Fémur Longueur maximale 74,17 3840 37,7 ± 3

Longueur articulaire distale 16,6 3739

Partie latérale Longueur maximale 25,6 25,97 3840

Largeur 17,36 16,73 3840

Partie basilaire Hauteur maximale 15,94

Largeur 14,72 3840

Hauteur du corps 12,1 3840

Tombe 7 Droit Fazekas & Kosa Callen

Ilium Largeur maximale 29,33 3739

Fémur Longueur maximale 70,95 3739 35,5 ± 3

Longueur articulaire distale 16 3739

Tombe 8 Droit Fazekas & Kosa Callen

Humérus Longueur maximale 64,47 3840 38 ± 3

Longueur articulaire distale 17,22 3840

Parties latérales Longueur maximale 23,16 3739

Largeur 16,08 3840

Partie basilaire Hauteur maximale 15,17

Largeur 13,37 3739

Hauteur du corps 11,15 3638

Tombe 9 Droit Fazekas & Kosa Callen

Ilium Largeur maximale 29,22 3739

Hauteur maximale 31,82 3739

Fémur Longueur maximale 73,43 3739 37,5 ± 3

Longueur articulaire distale 17,7 3739

Tibia Longueur maximale 59,19 3739 37 ± 3

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une technique de moyenne simple dans laquelle les estima- tions de l’âge dérivées des dimensions de chaque os ont été totalisées et divisées par le nombre d’estimations effectuées.

L’estimation de l’âge à partir de la comparaison des résul- tats de deux méthodes différentes, bien que les deux utilisent les mêmes critères d’estimation à partir des dimensions osseuses, n’a pas été réalisée afin d’apprécier des divergences entre elles, mais dans le but d’obtenir une plus grande préci- sion dans l’estimation, en présentant les résultats obtenus par l’utilisation d’une méthode « classique » comme celle de Fazekas et Kosa et un autre plus moderne proposée par Callen. Cependant, les méthodes étant différentes, les estima- tions obtenues par l’une et l’autre méthode n’ont bien évidemment pas été totalisées conjointement, mais à part, en effectuant la moyenne et en spécifiant l’estimation obte- nue pour chacune d’entre elles séparément. Nous devons prendre en compte que la variabilité dans la détermination de l’âge augmente au fur et à mesure de la gestation. Ainsi, un individu à la fin du troisième trimestre, avec une estimation de 40 semaines, présente une variabilité correspondant au moins à 40 semaines ± 3,2 semaines [5]. De ce fait, nous avons considéré qu’il était nécessaire d’observer des signes morphologiques comme le degré d’ossification, les centres d’ossification, épiphyses, synostose, etc. De la même manière, nous avons ajusté les estimations d’âge à partir des mesures de l’os occipital [6], les stades d’éruption

dentaire [7] et le degré de calcification des germes [8].

Toutefois, le degré de variabilité de ces dernières estimations est beaucoup plus important que les précédentes. L’estima- tion de l’âge par la mesure des os peut parfois s’avérer inexacte du fait qu’il existe des causes fœtomaternelles qui provoquent un retard de croissance intra-utérine. Bien que la taille du fœtus soit inférieure à ce qui est attendu pour son âge gestationnel, le reste des organes internes, en particulier les poumons et le cœur, présentent une maturité adéquate [9]. De même, des variations génétiques peuvent influer sur la taille du fœtus et limiter la fiabilité de l’estimation.

En ce qui concerne l’estimation du sexe des individus périnatals à partir de données biométriques ou de critères morphologiques, nous continuons à être sceptiques en ce qui concerne les tentatives effectuées jusqu’à présent à partir des mesures des os crâniens [10], ou au moyen de mesures de la mandibule [11] ou de l’utilisation des pièces dentaires [12]. Les études statistiques de l’analyse du pelvis infantile effectuées par Holcomb et Konigsberg [13] s’avèrent problé- matiques pour les populations archéologiques. Les fonctions discriminantes calculées par Schutkowski [11] sont appli- quées par Majo et al. [14] à deux séries différentes, d’âge et de sexe connus, en concluant que l’application directe de ces équations discriminantes offre des résultats pires que les équations qui peuvent être calculées pour chacune des séries étudiées. Selon Majo [15], les principales limitations de Fig. 4 Porosité des parties basilaire et latérales de los occipital du sujet de la tombe 6 /Porosity of the basilar and lateral parts on the occipital bone from tomb 6

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l’étude du sexe sur le squelette immature dérivent des défi- nitions imprécises des points de mesure sur les os infantiles et de la difficulté de définir des caractéristiques qualitatives.

Nous nous trouvons plus enclins à croire en la possibilité de détecter un dimorphisme dans les os du pelvis, toutefois les études statistiques de l’analyse du pelvis infantile effectuée par Holcomb et al. [13] ne s’avèrent pas applicables à des études bioanthropologiques. La taille et la forme des os peuvent varier tout au long de leur formation, et s’il est certain que le dimorphisme est entamé depuis le fœtus, les caractéristiques secondaires significatives n’apparaissent pas avant la puberté. Quoiqu’il en soit, cette question reste non résolue [16]. Pour cette raison, nous nous sommes refusés à toute tentative d’obtenir une diagnose sexuelle, bien que nous reconnaissions l’importance de la connaissance du sexe pour ses connotations sociales et culturelles, et quant à une hypothétique sélection des individus inhumés. À notre avis, seule une analyse ADN peut confirmer le sexe d’un individu immature.

Résultats de l’analyse anthropologique

L’analyse anthropologique des ossements a révélé que tous les individus étudiés étaient âgés à leur décès de 37 à

40 semaines de gestation (Tableau 1). Tous les enfants semblent décédés, si ce n’est à la naissance, en période postnatale, donc peu de temps après le début de leur existence. Il est donc possible que certains individus soient morts à la naissance.

Les restes squelettiques présentent des signes évidents de gracilité et d’immaturité. Les os crâniens et les segments diaphysaires correspondant aux insertions musculaires montrent une porosité particulière (Fig. 4). La porosité peut être en rapport avec plusieurs épisodes pathologiques comme les Cribra orbitalia quand elle affecte les orbites oculaires, ou associée aux Cribra symetrica, phénomène poreux situé autour de la suture lambdoïde, mais ce n’est pas notre cas. Une autre manifestation pathologique en rapport avec la porosité osseuse est l’hyperostose poreuse, dont la caractéristique différentielle est l’épaississement du diploé. Cette pathologie n’est pas observée sur les individus périnatals de Falacrinae. Quelques auteurs ont détecté une association statistiquement significative entre la présence et l’intensité de la porosité observées dans la partie basilaire de l’occipital et l’âge du sujet [17]. Cette porosité semble donc à mettre en rapport avec un état de maturation incomplet du squelette et parait normale pour des individus dont l’âge au décès est estimé entre 37 et 40 semaines de gestation.

Fig. 5 Tombe 1 /Tomb 1

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Sépultures

Toutes les sépultures correspondent à des ensevelissements individuels et primaires, exceptée une (tombe 7), retrouvée à l’intérieur d’une coupe debucchero nero. Les individus ont été inhumés dans des fosses simples, creusées dans la terre naturelle, et dont les dimensions s’adaptent à la taille du corps qu’elles contiennent. Il n’existe pas d’orientation préférentielle des tombes puisqu’elles s’alignent le long des murs. Dans un cas (tombe 8) l’individu a été directement déposé sur un imbrex. Bien que seulement trois des neuf tombes conservent leurs couvertures, unetegula, nous pou- vons supposer que d’autres sépultures pouvaient disposer d’un élément de couverture du même type qui ne nous serait pas parvenu. Il se peut que tout comme à Sallèles-d’Aude [18], la grande majorité des sépultures infantiles ait initiale- ment été recouverte d’un élément de terre cuite architecturale dont la fonction était de couvrir voire protéger la tombe ou au moins de la signaliser.

Dans quelques cas, l’éboulement de lategulade couver- ture a provoqué le déplacement et la fragmentation de quelques os. Dans d’autres cas (tombes 1, 3 et 6) ce sont les travaux agricoles qui ont dû les occasionner. Les corps

des défunts ont été indifféremment déposés allongés sur le dos (tombes 2 et 8), de trois-quarts (tombe 6) ou en position latérale (tombes 1, 4 et 5).

Aucun des défunts n’était accompagné de mobilier, d’élé- ments d’habillement ou de parure, ni d’offrandes ayant laissé des traces, contrairement aux morts plus âgés retrouvés dans les nécropoles de la même période. Seule une canine de jeune suidé a été trouvée avec l’individu déposé secondaire- ment dans la coupe debucchero nero, mais il est possible qu’elle s’y soit retrouvée accidentellement. Cette absence de mobilier, caractéristique des sépultures de nouveau-nés dans nombre de civilisations anciennes, montre bien que ces individus décédés à la naissance, n’ayant pu accomplir leur vie de façon satisfaisante, étaient dénués d’individualité, leur mort prématurée et l’absence de mobilier accompagnant le défunt impliquant sans doute un manque de personnalisation et de socialisation de l’individu [19,20].

Tombe 1

Le corps a été déposé dans une fosse ovale peu profonde, de 45 cm de long sur 22 cm de large pour 10 cm de profondeur, orientée ouest-est et creusée dans la terre naturelle, une Fig. 6 Relevé de la tombe 1 et proposition de restitution de la position de lenfant /Drawing of the tomb 1 and restitutions hypothesis of the childs position

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couche argilo-sableuse brun clair contenant d’abondantes pierres calcaires de petite taille. Les dimensions et la forme de la tombe paraissent s’adapter à la taille de l’enfant qui l’occupe. Le comblement argilo-sableux brun clair et ocre contenait quelques pierres ainsi que des fragments de céra- miques et de terre cuite architecturale. On note la présence de nombreuses petites racines qui ont pu en partie perturber la tombe (Figs. 5–7).

Le sujet se trouvait en décubitus latéral droit, le crâne appuyé sur le pariétal droit, la tête à l’ouest et les pieds à

l’est, le regard tourné vers le sud. Les membres supérieurs étaient repliés contre le thorax. La destruction partielle de la partie orientale de la tombe ne nous a pas permis de déter- miner la position exacte des membres inférieurs. La position de l’enfant semble indiquer qu’il n’a pas été enseveli emmailloté.

La tombe apparaît très perturbée, de nombreux os du squelette présentant des signes clairs de déconnexion anato- mique. La clavicule gauche est déplacée vers la partie infé- rieure de corps, posée sur sa face supérieure, verticalisée et Fig. 7 État de conservation du squelette de la tombe 1 /Conservation state of tomb 1s skeleton

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Fig. 8 Tegulade couverture de la tombe 2 / Tegulacovering tomb 2

Fig. 9 Tombe 2 /Tomb 2

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parallèle à la colonne vertébrale au niveau lombaire, dans la zone abdominale. L’humérus gauche montre également une situation anormale et contraire à sa position naturelle, loca- lisé entre les côtes et le pelvis dans la région dorsale de l’individu, appuyé sur sa face postérieure, l’épiphyse proxi- male dirigée vers l’est. De la même façon, la scapula gauche est déplacée et occupe l’espace thoracique. Apparue par sa face antérieure, elle était retournée, le bord supérieur en direction de la partie inférieure du corps, vers l’est, et l’angle inférieur vers l’ouest, en direction des cervicales. Les côtes gauches et les corps et arcs vertébraux thoraciques sont disloqués. La colonne vertébrale est en partie dissociée.

Quelques côtes et arcs vertébraux apparaissent déplacés en dehors du volume initial du corps. Les os des membres infé- rieurs présentent une très mauvaise conservation, les tibias et fibulas sont séparés, fragmentés et déplacés par rapport à leurs positions naturelles.

Les os qui montrent une plus grande perturbation sont ceux du côté gauche du corps et des membres inférieurs, situés dans la moitié orientale de la tombe où le fond de la fosse est moins profond et comporte quelques pierres.

Malgré ces bouleversements, les éléments squelettiques apparaissent dans l’ordre anatomique : dans l’extrémité ouest de la tombe se trouvent les os de la boîte crânienne qui sont tombés dans l’espace laissé libre après la disparition du cerveau. Le bloc crânio-facial étant posé sur le côté droit, le pariétal gauche et l’occipital se sont retrouvés au-dessus des autres. L’hémimandibule gauche apparaît par la face antérieure. La colonne vertébrale est interrompue dans la région thoracique, mais les corps des vertèbres lombaires et les os du pelvis respectent la logique anatomique en occupant la zone centrale du corps.

Les germes dentaires retrouvés, comme ceux des autres individus, sont de couleur marron, l’émail n’étant pas Fig. 10 Relevé de la tombe 2 et proposition de restitution de la position de lenfant /Drawing of the tomb 2 and restitutions hypothesis of the childs position

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complètement minéralisé. Ils n’ont pas été mis au jour dans les maxillaires, mais à l’extérieur, face au crâne. Les côtes droites, appuyées sur le fond de la fosse sont maintenues dans leur position naturelle, tout comme la scapula et l’hu- mérus droits qui se trouvent en connexion anatomique. Il semble logique que les os de côté gauche du corps soient plus bouleversés, car ils sont plus exposés à des perturbations.

Les corps des vertèbres thoraciques sont apparus en face latérale gauche. Ceux des vertèbres lombaires se sont affais- sés avec un « effet domino » sur leur face inférieure une fois

disparu le cartilage qui les unissait aux arcs. Enfin, concer- nant les os du pelvis, l’individu étant couché latéralement sur le côté droit, l’ilium droit, reposant au fond de la fosse, est apparu en face antérieure. Une fois les viscères intrapelvien- nes disparus, l’ilium gauche est tombé à plat au fond de la fosse et est apparu en face endopelvienne.

Quelques hémi-arcs vertébraux ont été retrouvés en dehors du volume corporel, mais il est probable que ces déplacements soient liés à une perturbation de la sépulture.

En effet, les os situés à un niveau plus élevé dans la tombe, Fig. 11 État de conservation du squelette de la tombe 2 /Conservation state of tomb 2s skeleton

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en particulier le membre supérieur gauche, ainsi que les membres inférieurs semblent avoir été bouleversés, possi- blement par des travaux agricoles en raison de la faible profondeur de la fosse. Ces perturbations limitent notre interprétation de l’espace dans lequel l’individu s’est décomposé. Il est possible que la sépulture ait à l’origine été recouverte d’unetegulapar exemple, comme plusieurs autres tombes du site, ce que pourraient attester les petits fragments de terre cuite architecturale découverts aux limites de la fosse.

Tombe 2

La tombe 2 était couverte par unetegulaplate découpée dans ses longs côtés pour être adaptée aux dimensions de la sépul- ture. Lategulaest fragmentée et effondrée en partie dans la fosse dans sa moitié nord. La partie méridionale de lategula se trouvait posée directement sur le crâne de l’individu. La partie inférieure de la tegula fragmentée est effondrée et a brisé le fémur droit. En retirant lategula, nous avons observé un remplissage argilo-sableux brun clair d’infiltration Fig. 12 État de conservation du squelette de la tombe 3 /Conservation state of tomb 3s skeleton

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contenant d’abondantes pierres de très petite taille et de nom- breuses petites racines qui ne semblent pas avoir affecté le squelette infra-crânien, mais qui ont toutefois provoqué des fissures, des cassures et des modifications au niveau du bloc crânio-facial. La fosse, de forme ovale, orientée sud-nord, mesure 53 cm de long, 33 cm de large et 8 cm de profondeur.

Les dimensions et la forme de la fosse paraissent s’adapter à la taille de l’enfant. Elle a été creusée dans la terre naturelle, un niveau argilo-sableux brun clair contenant d’abondantes pier- res calcaires de petites et moyennes dimensions (Figs. 8–11).

Cette sépulture correspond à un dépôt primaire. Un cer- tain nombre de connexions anatomiques généralement rapi- dement détruites pendant la décomposition du corps ont persisté. Nous avons observé, entre autres, les connexions strictes de la partie distale du pied, avec le maintien de l’articulation labile des métatarses et des phalanges, ainsi que celles du rachis cervical. À l’intérieur du bloc crânio- facial se trouvait en outre une grande quantité d’escargots de petite taille. Il s’agit de gastéropodes détritivores qui se sont nourris de la matière organique en décomposition. La présence de ces escargots suggère également le caractère primaire de la sépulture.

Le corps a été retrouvé en décubitus dorsal, la tête au sud et les pieds au nord. Le crâne est tourné sur le côté droit. Une partie du frontal et du temporal, ainsi que le pariétal gauche sont tombés dans l’espace laissé vide après la disparition du cerveau. Les os du rachis cervical sont maintenus en

connexion anatomique stricte, les cervicales reposant sur leur face postéro-latérale droite, tandis que les autres vertè- bres sont apparues en face antérieure. La mandibule est tom- bée sur les vertèbres cervicales et est apparue en face supérieure. Le membre supérieur droit apparaît en connexion anatomique, étendu le long du corps. Le membre supérieur gauche est, quant à lui, replié sur la cage thoracique, la main semblant reposer sur les côtes droites, au niveau de l’aisselle.

La scapula gauche est apparue en face postérieure, l’angle externe tourné vers la ligne médiane du corps, et l’humérus en face postéro-latérale.

Les côtes droites se sont maintenues dans leur position initiale sur le fond de la fosse conservant une faible obliquité naturelle et une partie du volume thoracique, tandis que les côtes gauches ont subi une mise à plat complète en tombant dans l’espace thoraco-abdominal suite à la disparition des parties molles du corps. Cette asymétrie des hémithorax paraît logique si l’individu n’a pas été déposé complètement en décubitus dorsal, mais légèrement en position latérale droite, certainement à cause de la topographie irrégulière du fond de la fosse sépulcrale.

Le fémur gauche est apparu en face antérieure, brisé.

Cette rupture a été provoquée par l’effondrement de lategula qui couvrait la sépulture et qui a également causé la fragmen- tation des os du coxal gauche. Cependant, il semble certain qu’avant la cassure et l’effondrement de lategula, les deux membres inférieurs présentaient une position semblable : Fig. 13 Tegulade couverture de la tombe 4 / Tegulacovering tomb 4

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symétriquement en abduction, les genoux formant un angle de 90°, avec les pieds joints et croisés, le droit sur le gauche.

La position des membres inférieurs suggère que l’individu a été déposé sur le dos. La ceinture pelvienne est complète- ment ouverte, les iliums, ischiums et pubis gauches et droits reposaient à plat sur le fond de la fosse. Le membre inférieur droit a été maintenu en connexion anatomique, fémur, tibia et fibula se présentent en vue postéro-médiale, de même que le tibia et la fibula gauches, faisant ainsi apparaître lesfibulas à l’intérieur des tibias. La positon du défunt semble indiquer qu’il n’a pas été enseveli emmailloté.

La position du crâne, tourné sur le côté droit, tandis que les hémimandibules reposent sur leur face inférieure sur le rachis cervical nous indique qu’initialement le crâne a dû être positionné dans l’axe du corps et qu’il a subi une rota- tion latérale après la disparition de l’articulation temporo- mandibulaire, particulièrement labile. Le bloc crânio-facial a donc été retrouvé dans une position secondaire, ce qui semble indiquer que la décomposition du corps s’est effec- tuée en espace vide.

Tombe 3

Les limites de la fosse n’ont pas pu être clairement identi- fiées, cette dernière étant trop superficielle. La tombe a pratiquement été complètement détruite par des travaux agricoles et nous ne pouvons être certains que la totalité des quelques éléments osseux retrouvés figuraient bien à leur place originelle, certains semblant avoir été dispersés.

Nous pouvons toutefois supposer qu’il s’agissait d’un dépôt primaire. Nous n’avons donc pas pu déduire la posi- tion dans laquelle le défunt a été déposé à partir des rares informations dont nous disposions, ni la nature de l’espace dans lequel la décomposition s’est effectuée (Fig. 12).

Le faible nombre d’os conservés et leur mauvais état de conservation n’ont pas permis d’obtenir des mesures suffi- santes. Toutefois, les dimensions observées, la gracilité et le degré d’ossification des os (point distal de la diaphyse de l’humérus et point proximal de l’ulna gauche) suggèrent qu’il s’agit d’un sujet périnatal dont l’âge s’apparente à celui des autres individus étudiés.

Fig. 14 Tombe 4 /Tomb 4

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Tombe 4

L’enfant a été déposé dans une fosse quadrangulaire creusée dans la terre naturelle. La tombe était couverte par unetegula plate qui, lors de sa mise au jour, était brisée en cinq fragments et ne couvrait que la moitié orientale de la tombe, soit presque tout le squelette à l’exception du crâne. Entre lategulaet le squelette se trouvait une fine couche de terre. La présence de cet élément de couverture sur le squelette infra-crânien et son absence sur le crâne a provoqué une conservation différen- tielle des deux parties du squelette. Lategulaa en effet pro- tégé et conservé les os du squelette infra-crânien dans leur position initiale tandis que le crâne semble avoir été perturbé.

En retirant la tegula nous avons observé un remplissage argilo-sableux brun. Cette couche contenait de nombreuses petites racines qui n’ont pas affecté le squelette infra-crânien mais ont provoqué quelques fissures et modifications au niveau du bloc crânio-facial. La fosse dans laquelle a été déposé l’enfant, de forme ovale et orientée nord-ouest– sud-est, mesure 50 cm de long, 24 cm de large et 7 cm

de profondeur. Les dimensions et la forme de la fosse semblent s’adapter à la taille de l’enfant (Figs. 13–16).

L’individu a été déposé en décubitus latéral contracté, en position fœtale, sur le côté droit, crâne à l’ouest, regardant vers le sud et les pieds à l’est. Il s’agit d’un dépôt primaire, presque tous les os sont en connexion anatomique, et on peut noter la conservation d’articulations labiles comme la connexion entre les métatarses et phalanges. La position fœtale de l’enfant indique qu’il n’a pas été enseveli emmailloté.

Le bloc crânio-facial est posé sur le côté droit. Une partie du frontal et du temporal ainsi que le pariétal gauche sont tombés dans l’espace libéré par la disparition de la mem- brane crânienne et du cerveau. Une partie de l’os occipital est séparée du bloc crânio-facial et se trouve clairement en dehors du volume initial du crâne. Ce déplacement résulte certainement de la destruction de la partie de lategulaqui recouvrait la tête de l’individu. Le membre supérieur gauche est fléchi et replié contre le thorax de l’enfant. La clavicule se présente par sa face inférieure, la scapula par sa face postérieure et l’humérus par sa face antéro-latérale. Le radius Fig. 15 Relevé de la tombe 4 et proposition de restitution de la position de lenfant /Drawing of the tomb 4 and restitutions hypothesis of the childs position

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et l’ulna sont apparus en face latérale. La main gauche devait se trouver devant la face du sujet. En s’écroulant sur eux-mêmes, les os du crâne ont recouvert ceux du carpe, du métacarpe et les phalanges de l’individu.

Une fois disparu, le cartilage qui unissait les os du pelvis, ceux-ci se sont retrouvés à plat sur le fond de la fosse, l’ilium et l’ischium droits ainsi que l’ilium gauche apparaissant en face endopelvienne et l’ischium gauche en face exopel- vienne. Les os des membres inférieurs sont en connexion anatomique, les fémurs reliés aux articulations coxofémo- rales. Les membres inférieurs sont parallèles et fléchis, le

gauche reposant sur le droit et les pieds joints. Le fémur et le tibia gauches apparaissent en face latérale, tandis que la fibula a glissé et se retrouve devant la face antérieure du tibia. Le fémur, la fibula et le tibia droits se présentent logiquement par leur face médiale.

Lategulade couverture de cette tombe semble avoir bien protégé le squelette de l’individu qui est particulièrement bien conservé et en connexion anatomique. L’intégralité des os du squelette se trouvait dans le volume corporel du sujet, excepté une partie de l’occipital, mais nous avons vu que cela est très certainement à mettre en relation avec la Fig. 16 État de conservation du squelette de la tombe 4 /Conservation state of tomb 4s skeleton

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disparition de la partie detegulaqui recouvrait initialement la tête de l’enfant et donc à une perturbation.

Tombe 5

La tombe 5 était couverte par unetegulaplate très fragmen- tée, qui couvrait seulement la partie occidentale de la tombe, soit pratiquement tout le squelette à l’exception du crâne. En retirant lategula, nous avons observé un comblement argilo- sableux brun. Ce remplissage présentait de nombreuses petites racines qui ont probablement légèrement altéré la position initiale des os. L’enfant a été déposé dans une fosse de forme ovale, orientée est-ouest mesurant 50 cm de longueur, 20 cm largeur et 7 cm de profondeur. Les dimen- sions et la forme de la tombe paraissent s’adapter à la taille de l’enfant. Comme les fosses des autres sépultures, elle a été creusée dans la terre naturelle (Figs. 17–20).

L’individu a été déposé en position latérale, sur le côté gauche, la tête à l’est et les pieds à l’ouest. La tête est appuyée sur la paroi orientale de la fosse et le bloc crânio-facial, qui est

apparu en face supéro-antérieure, est incliné vers l’intérieur du corps, si bien que la mandibule est restée en connexion avec le maxillaire. Les os de la boîte crânienne sont tombés dans l’espace laissé vide après la disparition du cerveau et les pariétaux se sont rabattus sur eux-mêmes. Les os du rachis cervical étaient maintenus en connexion étroite, les éléments vertébraux apparaissant par leur face antéro-latérale droite. La clavicule droite est apparue en face supérieure, légèrement éloignée de l’humérus droit, qui reposait sur sa face antérieure entre les côtes. Radius et ulna sont séparés de l’humérus et situés sur la cage thoracique, perpendiculairement à la colonne vertébrale. Le membre supérieur droit était donc fléchi sur le thorax. On observe une certaine conservation du volume thoracique du côté gauche, les côtes plaquées contre le fond de la fosse s’étant maintenues dans leur position initiale, et une mise à plat des côtes droites, plus obliques, qui sont tombées dans l’espace thoraco-abdominal après disparition des parties molles du cadavre. La colonne vertébrale est interrompue dans ses régions thoracique et lombaire. Les os du pelvis et les membres inférieurs sont Fig. 17 Tegulade couverture de la tombe 5 / Tegulacovering tomb 5

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apparus en connexion. Étant donné la positon latérale de l’enfant, l’ilium gauche, appuyé contre le fond de la fosse, apparaît en face endopelvienne et l’ilium droit, tombé lui aussi lors de la décomposition du cadavre, en face exopel- vienne. Les deux pubis et ischiums ont été retrouvés dans la cavité pelvienne. Les membres inférieurs sont parallèles. Le gauche était fléchi, le fémur, articulé avec l’ilium, est apparu en vue postéro-médiale, perpendiculaire à l’axe longitudinal du tronc, le tibia et la fibula en face médiale. Le membre inférieur droit apparaît également en connexion anatomique, fléchi. Le fémur, articulé avec l’ilium, semble avoir subi une légère rotation et est apparu en face antérieure, perpendicu- laire à l’axe longitudinal du tronc. Le tibia et la fibula étaient très fragmentés en raison de l’effondrement de lategulaqui recouvrait le corps.

Tombe 6

Aucun élément de couverture n’a été retrouvé au moment de la fouille. La fosse, de forme ovale et orientée est-ouest, mesure 48 cm de long, 20 cm de large et est conservée sur 10 cm de profondeur. Elle a été creusée, comme les autres

fosses, dans la terre naturelle. Les dimensions et la forme de la fosse paraissent s’adapter à la taille de l’enfant. La partie occidentale de la tombe semble avoir été détruite par la mise en place de la tombe 5. Par conséquent, la tombe 6 serait antérieure à la tombe 5, la fosse de cette dernière étant creu- sée aux pieds de la précédente en l’altérant partiellement. Ce fait écarte la possibilité qu’il s’agisse d’une sépulture double.

Le comblement de la fosse de la tombe 6 est identique à celui des autres tombes (Figs. 18–21).

Le sujet repose de trois-quarts face, dans une position inter- médiaire entre le décubitus latéral gauche et le décubitus dorsal, l’axe vertex–coccyx étant dirigé du sud-est au nord- ouest. La tête est donc située au sud-est et les pieds semble-t-il à l’ouest, dans le prolongement de la tombe 5 qu’elle sur- plombe à la tête. Le membre supérieur droit était étendu le long du corps et le gauche fléchi à 90°, l’humérus, le long du thorax, se présente par sa face postérieure et l’avant-bras, en abduction, perpendiculaire à l’axe du corps, le radius et l’ulna apparaissant en vue médiale. Les connexions anato- miques conservées suggèrent que l’enfant n’était donc pas emmailloté ni contenu de quelque manière que ce soit. L’arti- culation labile entre le carpe et le métacarpe droits est Fig. 18 Tombes 5 et 6 /Tombs 5 and 6

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maintenue. Le bloc crânio-facial est très fragmenté et certains de ses composants sont situés en dehors du volume initial du corps.

Il est possible qu’à l’origine on ait voulu déposer l’enfant en décubitus dorsal et que sa position de trois-quarts face soit due à la forme de la fosse, dont le fond n’est pas plat et comporte des pierres de taille moyenne, en particulier sous la partie droite du sujet. Les côtes tant droites que gauches sont tombées sur le fond de la fosse sépulcrale, subissant une mise à plat complète. Nous observons également une mise à plat du pelvis, les deux iliums apparaissant en face endopel- vienne, ce qui a pu entraîner la rotation latérale du fémur droit qui se présente par sa face médiale (à moins que ce ne soit une perturbation due à la destruction de la moitié occidentale de la tombe).

Il faut souligner la topographie du fond de la fosse, très irrégulière et comportant de nombreuses pierres, ce qui a conditionné la position des os. La colonne, en connexion anatomique, apparaît serpentante et semble s’adapter à l’espace dessiné par les pierres. Les côtes droites sont surélevées, car situées sur une pierre de taille plus importante que les autres. Les nombreuses pierres, de différentes tailles et formes, ont provoqué l’effondrement de quelques os dans le fond de la fosse, principalement des côtes et des corps

vertébraux, qui se sont ainsi retrouvés en déséquilibre, ce qui a pu modifier leur position originelle. La destruction partielle de la partie occidentale de la tombe ne nous a pas permis de déterminer la position exacte des membres inférieurs, seul le fémur droit nous étant parvenu.

La faible profondeur de la fosse explique très certaine- ment la mauvaise conservation des os et la destruction partielle de cette sépulture. Ces conditions limitent la réflexion sur l’espace de décomposition du cadavre. Toute- fois le maintien en connexion d’articulations labiles comme celles des os de la main droite incite à penser que la décom- position s’est effectuée en espace colmaté et que ce sont des perturbations ultérieures, comme des travaux agricoles, qui ont entraîné le déplacement d’un certain nombre d’éléments osseux en dehors du volume corporel.

Tombe 7

Il s’agit d’un dépôt secondaire à l’intérieur d’un vase debuc- chero nero, qui n’a pu être observé in situ lors de sa décou- verte. La taille réduite du contenant céramique révèle que les os du squelette de l’individu périnatal ont été déposés dans le récipient une fois le processus de décomposition achevé. En effet, les dimensions réduites du récipient sont incompatibles Fig. 19 Relevé des tombes 5 et 6 et proposition de restitution des positions des enfants /Drawing of the tombs 5 and 6 and restitutions hypothesis of the childrens positions

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avec un dépôt primaire (Fig. 22). Ce dépôt secondaire est surprenant, toutes les autres sépultures retrouvées jusqu’à présent étant primaires. Les vases de bucchero nero sont produits en Étrurie et en Campanie, principalement aux

VIIe et VIe siècles avant notre ère [21]. Les résultats de la datation 14C des échantillons osseux du sujet de la tombe 7 indiquent que cette sépulture est beaucoup plus ancienne que les autres et qu’elle serait de l’époque archaïque. Cette datation correspond à celle dubucchero neroet à la période de fonctionnement du sanctuaire où se trouvait la sépulture,

localisée dans l’une descellae du temple. Par conséquent, l’inhumation secondaire doit concerner un cérémonial parti- culier en rapport avec le sanctuaire, sans aucune relation avec le rituel desSuggrundaria(Fig. 23).

Tombe 8

Le corps du défunt a été déposé sur unimbrex, orienté est- ouest. Nous ne disposons pas de données de terrain concer- nant cette sépulture, mais il semble qu’elle était en partie Fig. 20 État de conservation du squelette de la tombe 5 /Conservation state of tomb 5s skeleton

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altérée. D’après les informations qui nous sont parvenues et les dimensions del’imbrex, il semble que la fosse mesurait approximativement 35 cm de longueur pour 20 cm de largeur (Fig. 24).

Tombe 9

Tout comme pour la tombe 8, nous ne disposons pas de don- nées de terrain concernant cette sépulture, mais il semble qu’elle était très altérée (Fig. 25).

Évidence d’un rituel particulier

L’important taux de mortalité néonatale durant l’antiquité paraît indéniable. En ce sens, le témoignage d’Aristote3 semble révélateur : il décrit les sept premiers jours après la naissance comme le moment où se produisait le plus grand nombre de décès. Le nouveau-né s’expose à un risque Fig. 21 État de conservation du squelette de la tombe 6 /Conservation state of tomb 6s skeleton

3Aristote,Histoire des Animaux, VII, XII ; 7–10

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particulier du fait que son système immunitaire n’a pas été développé et de sa dépendance totale à sa mère. La grossesse et l’accouchement ont en outre dû être des moments critiques pour la survie des enfants étant donné les insuffisances sani- taires. De plus, l’éventuel fait de naître prématuré comportait un grand risque, car le système thermorégulateur de ces enfants n’est pas encore complètement formé [22]. Ces faits ne peuvent pas expliquer à eux seuls la présence de sépultures de sujets périnatals àFalacrinae, tout comme ils n’expliquent pas non plus la paradoxale pénurie de tombes d’individus périnatals dans les nécropoles, l’absence de cré- mation pour ces enfants et en général les rares découvertes de restes de tout-petits par rapport au reste de la population.

Par conséquent, ce sont des raisons de type culturel, social, religieux et philosophique qui doivent expliquer cette absence et le traitement discriminatoire des enfants décédés en bas âge. En ce sens, le nouveau-né ne serait pas considéré comme membre de plein droit dans la société. Ce fait est mis en rapport avec l’absence de mobilier et d’offrande funé- raires, lesquels ont pour but d’individualiser le défunt et le reconnaître aux yeux de ceux qui l’ont accompagné au cours

de sa vie, par conséquent, il s’avère difficile de trouver un objet caractérisant un nouveau-né, qui n’a pas encore été identifié comme appartenant au monde des vivants, à une société et à sa culture matérielle [19].

Dans le monde romain, les nouveau-nés étaient appelés infans nodum homo, ils étaient donc considérés comme des enfants inhumains et par conséquent des êtres humains non finis ou incomplets [23]. Ce fait confirme la pratique d’un cérémonial particulier appelé Suggrundaria4, selon lequel les enfants de moins de 40 jours ne pouvaient pas recevoir les rites et les cérémonies des adultes, ni même être enterrés dans les nécropoles, mais étaient inhumés sous les auvents des maisons. Pline l’Ancien5souligne une pratique réservée aux êtres humains décédés avant la venue des premières dents : ils sont épargnés du bûcher, comme le rappelle Juvénal6en évoquant le corps d’un jeune enfant confié à la Fig. 22 Restitution hypothétique du dépôt secondaire de la tombe 7 /Hypothetical restitution of tomb 7s secondary deposit

4Fulgence,Expositio sermonum antiquorum, 7

5Pline l’Ancien, 7.70–2

6Juvénal,Satires, XV, 139–40

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terre et non aux flammes. De la même manière, Plutarque7et Cicéron8 précisent que les enfants morts en bas âge ne devaient pas causer d’affliction, ni recevoir les libations et les cérémonies habituelles. Les sources juridiques romaines stipulent également que le deuil ne devait être que partiel pour les enfants de moins de trois ans et n’était pas porté pour ceux de moins d’un an9.

Les jeunes défunts de Falacrinae ont bénéficié d’un traitement particulier qui semble très comparable à celui des enfants décédés en période périnatale ou postnatale à Sallèles-d’Aude : inhumés dans des fosses exiguës, sans mobilier, à l’intérieur de bâtiments, le long des murs et les tombes signalisées par des tegulae ou fragments de terre cuite architecturale [18]. Ces enfants sont tous en bas âge et la tegula peut faire référence au toit évoqué dans le terme suggrundaria. Les inhumations ne se trouvent en effet pas directement sous le toit ou l’auvent comme le signale Fulgence, à l’extérieur de la maison. À Falacrinae Fig. 23 État de conservation du squelette de la tombe 7 /Conservation state of tomb 7s skeleton

7Plutarque,Œuvresmorales, 11

8Cicéron,Tusculanes, 1.39

9Frag. Vat. 321

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comme à Sallèles-d’Aude, les enfants sont retrouvés à l’intérieur des bâtiments, leur tombe en général recouverte d’un élément de terre cuite architecturale, à la fois certaine- ment par pragmatisme, mais aussi probablement pour symboliser le « toit ». Par métonymie, lestegulaeretrouvées au-dessus de certaines tombes semblent représenter le toit ou l’auvent et l’on peut supposer que certaines sépultures découvertes sans éléments de couverture ou signalisation en disposaient bel et bien à l’origine. Ce qui définit les suggrundariasemble donc bien être le caractère domestique

des sépultures de très jeunes immatures et le traitement différentiel qui leur est accordé. Cependant, tout comme pour le taux de mortalité infantile indéniable, la conception différente du nouveau-né dans la société et son traitement discriminatoire face au décès influencent, mais n’expliquent pas par eux-mêmes le fait d’inhumer exclusivement des enfants de 37 à 40 semaines de gestation le long des murs des bâtiments duVicusde Falacrinae. L’âge paraît donc être un facteur significatif en ce qui concerne le traitement sélectif des défunts dans le rituel et la pratique funéraire Fig. 24 État de conservation du squelette de la tombe 8 /Conservation state of tomb 8s skeleton

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que nous observons à Falacrinae. Un traitement différentiel et exclusif semble destiné aux enfants mort-nés ou décédés peu après la naissance [24]. Le décès à la naissance a des connotations clairement négatives dans les sociétés anciennes et traditionnelles, qui la conçoivent comme une

« mauvaise mort » en opposition au concept de la « bonne mort » qui met fin à une vie accomplie de manière satisfai- sante [13]. Par conséquent, la naissance d’un enfant mort ou la mort d’un nouveau-né devait paraître comme un fait

néfaste et malheureux pour la famille et la maison, entraî- nant donc un rituel funéraire plus domestique que religieux qui nettoierait et libérerait les proches du fait funeste d’un décès prématuré. Le fait d’enterrer un défunt dans le sol de la maison ou d’une zone domestique constituerait un acte prophylactique, le corps étant déposé en contact direct avec la terre [9]. Avec ce dépôt rituel, le mort serait restitué à la terre-mère, afin de préserver de futurs décès périnatals et rendre propices de nouvelles naissances [25].

Fig. 25 État de conservation du squelette de la tombe 9 /Conservation state of tomb 9s skeleton

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