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Étude du mécanisme de radiolyse de l'alanine et des acides aminés. Implications pour la

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ÉTUDE DU MÉCANISME DE RADIOLYSE DE L’ALANINE ET DES ACIDES AMINÉS 5 J.-M. DOLO

Étude du mécanisme de radiolyse de l'alanine et des acides aminés. Implications pour la

métrologie des rayonnements ionisants : Dosimétrie par résonance paramagnétique

électronique de l'alanine

Study of radiolysis mechanism of alanine and amino acids. Implication for ionizing radiation

metrology: Dosimetry by Electron Spin Resonance of alanine

Jean-Michel DOLO 1, Jacques RAFFI 2 et Philippe PICCERELLE 3

1 LNE-LNHB (Laboratoire National Henri Becquerel), CEA-Saclay, 91191 Gif sur Yvette Cedex, France, jean-michel.dolo@cea.fr.

2 Laboratoire de Radiolyse de la Matière Organique, UMR 6171, Faculté des Sciences de Saint Jérôme 13397 Marseille cedex 20, France.

3 Laboratoire de Pharmacie Galénique, UMR 6171, Faculté de Pharmacie de La Timone, 13385 Marseille cedex 5, France.

Résumé

Afin de comprendre les variations observées sur les spectres RPE de l'alanine irradiée au fil du temps [1-5], il a été décidé d'étudier le mécanisme de radiolyse de l'alanine. Nous présentons la méthodologie déployée afin d'identifier et de quantifier les radicaux formés. La méthode que nous avons développée est le couplage de la technique de piégeage de spin avec la chromatographie liquide associée à une détection par spectrométrie RPE. Elle vise à obtenir les radicaux de l'alanine irradiée en phase solide sous forme de radicaux piégés stables en phase liquide, afin de les séparer pour permettre des mesures plus précises que celles disponibles actuellement [6,7]. Les résultats préliminaires montrent la faisabilité de la technique aboutissant à la collection des données de bases à partir des spectres obtenus, qui sont indispensables à une déconvolution dans un cadre métrologique. Les premiers résultats confirment la complexité du mécanisme radicalaire, avec la présence de plusieurs espèces en compétition et permettent d'identifier les paramètres à contrôler pour garantir les informations quantitatives qui seront obtenues.

MOTS CLÉS : DOSIMÉTRIE, ALANINE, RPE, RADIOLYSE

Abstract

To understand the observed variations with time on ESR spectra of irradiated alanine[1-5], it has been decided to study the radiolysis mechanism of alanine. We present our methodology to identify and quantify the created radicals. The method that we have developed is the coupling of spin trapping technique with liquid chromatography associated with detection by ESR spectrometry. The objective is to transform the radicals of alanine in a solid phase into stable trapped radicals in a liquid phase, in order to separate them and give us the opportunity to obtain more accurate measurements than those actually available [6,7]. Our preliminary results show the feasibility of the technique for creating a database with the obtained reference spectra that are indispensable for the future deconvolution in a metrological frame. The first results confirm the complexity of the radiolysis mechanism, with the evidence of several species in competition and permit us to identify parameters whose control is necessary to be confident in the quantitative information obtained.

KEY WORDS: DOSIMETRY, ALANINE, ESR, RADIOLYSIS

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1. Introduction

La dosimétrie par Résonance Paramagnétique Electronique (RPE) de l'alanine est maintenant considérée comme une méthode de référence pour la mesure des fortes doses (50 Gy à 100 kGy), et assure le transfert vers d'autres méthodes de mesures de routine qui sont couramment pratiquées dans différents secteurs d'activité.

Dans ce domaine de doses, la métrologie des rayonnements ionisants est nécessaire afin de garantir la qualité des irradiations qui sont effectuées dans le cadre d'applications pour la santé : par exemple la stérilisation des produits sanguins, des médicaments issus des biotechnologies ou bien des produits à usage unique comme les seringues ou les prothèses, mais aussi pour garantir la qualité hygiénique de certains produits alimentaires. De nombreuses applications industrielles utilisent également l'irradiation à des doses élevées, nous citerons ici pour mémoire la chimie des polymères et le durcissement de l'électronique.

Si cette méthode présente indéniablement des avantages par rapport à ses concurrentes, notamment par son domaine de mesure étendu, son incertitude relativement peu élevée (3,5 % à k = 2) et sa mesure non destructive, il reste à l'évidence des inconnues dans la maîtrise du signal et dans la description physico-chimique du fonctionnement du détecteur qui repose sur la radiolyse de l'alanine. En spectrométrie par RPE, le signal mesuré provient du spectre d'absorption de l'énergie fournie par une source micro-onde électromagnétique, en fonction du champ magnétique appliqué perpendiculairement à la micro-onde dans des conditions de résonance. Il serait dû très majoritairement à un radical stable ayant un électron non apparié provenant de l'irradiation de l'alanine.

La réponse de l'alanine en spectrométrie RPE en fonction de la dose est représentée, en général, par une équation mathématique (polynôme de degré 3) certes rigoureuse mais sans connexion avec la signification physique du spectre RPE et avec la nature chimique de la réaction. Les laboratoires nationaux de métrologie ont tous développés une approche empirique afin de s'assurer de la maîtrise de la mesure par RPE de l'alanine. De nombreux termes correctifs ont été établis afin de rendre comparables les dosimètres irradiés dans des conditions différentes à plusieurs jours d'intervalle. Ils ne sont en général applicables qu'en interne à un laboratoire car liés à son équipement, son dosimètre ou à sa pratique. Ces termes correctifs peuvent être classés en trois catégories : ceux relatifs à l'irradiation (température, énergie des photons…..), ceux relatifs à la mesure RPE (dérive, réponse angulaire, température…), ceux relatifs aux phénomènes physico-chimiques ayant lieu dans le détecteur et aux paramètres d'influence environnementaux après irradiation (diminution du signal, température et humidité durant le stockage avant mesure…). Cette approche est due en grande partie à l’absence, malgré de nombreuses études, de connaissances approfondies sur le fonctionnement du détecteur. Plusieurs études menées par les laboratoires nationaux de métrologie [1-5] ont mis en évidence la nécessité de la maîtrise de la radiolyse et la

complexité du comportement de l’alanine soumise aux paramètres environnementaux extérieurs (température et hygrométrie). Quelques publications décrivent qualita- tivement la nature des espèces « stables », à l'aide de programmes de simulation construits à partir d'une théorie en chimie quantique : Density Functional Theory (DFT).

Ainsi différentes espèces sembleraient pouvoir co-exister suite au mécanisme de radiolyse [8-10]. Un seul laboratoire a mis en évidence différents radicaux stables issus de la radiolyse de l'alanine [6,7,10] dans des conditions ambiantes, confirmant ainsi les résultats proposés par les simulations mathématiques. Cependant les informations sur les concentrations, les proportions relatives, leurs sensibilités respectives aux paramètres d’influence, l’organisation et la cinétique du schéma réactionnel ne sont que très embryonnaires.

Les calculs ab initio en chimie ont beaucoup progressé ces dernières années. L'intérêt permanent pour les acides aminés du fait de leur rôle dans les sciences de la vie a conduit à une reprise des anciennes données obtenues expérimentalement et à leur introduction dans des codes de simulation. La confrontation des résultats expérimentaux récents obtenus grâce à des technologies nouvelles de mesures en RPE (ENDOR et EIE) [10-13]

avec les études théoriques des différentes formes spatiales des radicaux produits lors de l'irradiation des acides aminés ne montrent pas un bon accord. Par exemple, Ban et Wetmore [8] présentent une étude théorique concluant à l'existence de trois radicaux appelés respectivement R1, R2, R3 (fig. 1). Ceux-ci sont les mêmes que ceux présentés dans les conclusions des travaux expérimentaux de l'équipe norvégienne [6,7,10].

Fig. 1. – Radicaux formés par radiolyse de l'alanine.

Par contre, d'autres calculs ont fourni l'identification de quatre conformères possibles pour R1, d'un seul pour R2, et de quatre pour R3. R1 est obtenu par une réaction de désamination d'un anion protoné. R1 est le résultat d'une réduction alors que R2 et R3 sont plus probablement des produits d'oxydation. R2 est obtenu par une réaction d'abstraction d'hydrogène de l'atome C central. Il y a donc une compétition des 2 réactions. R3 serait obtenu par une réaction d'abstraction d'hydrogène suivie par un transfert de proton. R3 pourrait être également obtenu à partir de R2 [8]. La multiplicité des conformères, l'organisation et la compétition des réactions devraient tendre, par exemple pour R3, vers une probabilité de présence plus élevée que celle communément admise (très inférieure au pourcent).

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ÉTUDE DU MÉCANISME DE RADIOLYSE DE L’ALANINE ET DES ACIDES AMINÉS 7 Les premières estimations de leur répartition fournies par

Heydari et al. [6] : R1 approximativement 60 %, R2 35 %, et 5 % pour R3 [6] puis respectivement 60 %, 30 %, 10 % [7] ne sont obtenues qu'à l'aide de spectres simulés et ne sont pour l'instant que très peu consolidées sachant que les aspects cinétiques et les paramètres d'influence ne sont pas ou peu pris en compte.

Avant d'utiliser ces données quantitatives, le LNHB a choisi d'approfondir les aspects fondamentaux quantitatifs sur la cinétique de la radiolyse de l'alanine. Nous présentons dans ce document, les premiers résultats obtenus dans le cadre du contrat d’ incitation : « Étude des mécanismes de radiolyse et de vieillissement de l’ alanine irradiée en vue de l’ amélioration de la dosimétrie par résonance paramagnétique électronique ». Une méthodologie générale d’ approche a été développée afin d'acquérir les informations utiles sur la radiolyse du détecteur. Celle-ci repose d'une part sur une analyse des parties sensibles du spectre de l'alanine, d'autre part sur la mise au point d’ une technique séparative permettant d’ isoler les différentes espèces présentes et donc de les identifier : le piégeage de spin couplé à la chromatographie liquide. Cette dernière partie a pour objectif de s'assurer de la maîtrise quantitative de la réaction de piégeage afin de mesurer et d'établir les données de bases, les spectres de référence, pour ensuite être en mesure de déconvoluer les spectres d'alanine irradiée et ainsi d'améliorer les incertitudes de mesures de cette technique pour ce détecteur.

2. Présentation de la méthodologie de recherche La démarche développée est présentée sur la figure 2.

A lan in e et au tres acid es a m in és S pectres de poudres

m al résolus S pectres après piégeage de spin en ph ase liquide bie n résolus

co m p ortem en t d es raies effet d’irradiation

chauffage (vieillissem ent accéléré) saturation

m is e a u point a vec N M P reproductibilité

E tude

quantitative E tude qualitative Interprétation chim ique S im ulation m athém atique

M aîtrise d e la cin étique

Fig. 2. – Méthodologie de recherche.

Elle repose sur deux constatations simples. D'une part, les données sur les acides aminés de la même famille (dont le comportement physico-chimique est très voisin) peuvent contribuer à comprendre la complexité du spectre RPE de l’ alanine qui est manifestement moins simple que ne le prévoit la théorie. Cette pratique est classique en chimie organique pour élucider les mécanismes radicalaires en synthèse et pour interpréter les spectres RMN. Nous avons donc choisi d’ étudier, outre l’ alanine, la glycine et la valine (fig. 3). D'autre part, les spectres RPE des poudres et monocristaux sont mal résolus alors

que ceux des liquides le sont parfaitement. S’ il existe un lien fort entre les spectres observés en phase liquide et solide, ils peuvent être exploitables quantitativement. Il convient donc de mettre au point une méthode de passage de l’ état solide à l’ état liquide qui soit autant que possible conservatoire et traçable.

Fig. 3. – Formules développées des 3 acides aminés étudiés.

La méthodologie mise en place repose d’ une part sur l’ observation des spectres de poudres et l’ exploitation du comportement des raies, que ce soit vis à vis des paramètres de mesures RPE (utilisation de la saturation) ou extérieur (température), et d’ autre part sur la séparation physique des espèces radicalaires contribuant au spectre afin de constituer une banque de données spectrales pour la simulation mathématique et la déconvolution. La première partie de ce travail s’ appuie sur l’ analogie que l’ on peut faire entre l’ identification des raies du spectre de l’ alanine et la pratique appliquée en chromatographie ou les techniques spectrométriques utilisées en chimie. Elle consiste à identifier avec précision les raies sur tout le spectre à partir d'une acquisition en haute résolution dans les conditions optimales de mise en évidence de la complexité du spectre. Par exemple, on peut identifier des raies ayant des comportements différents à l'aide de la puissance de saturation spécifique de l’ espèce radicalaire.

De nombreux autres facteurs peuvent permettre de discriminer plus finement les catégories de raies, il suffit qu'ils agissent quantitativement sur le spectre. Nous en avons retenu deux, la dose appliquée à l'échantillon et la température (chauffage modéré après irradiation) qui permet en général d’ accélérer les phénomènes liés à la cinétique chimique. La seconde partie du travail est liée à l’ étude en phase liquide des espèces présentes en phase solide. Pour cela, la méthode de piégeage de spin a été employée. Elle a été adaptée au contexte et couplée à une méthode séparatrice, la chromatographie, afin d’ isoler les espèces et d’ effectuer des mesures quantitatives fiables par spectrométrie RPE.

3. Étude des spectres de poudres

Les acides aminés sont très nombreux et nous avons tout d’ abord constaté une très grande diversité dans la stabilité (de quelques heures à quelques mois) et la nature des signaux de RPE relatifs aux radicaux induits. Nous n'avons retenu que la glycine et la valine comme points

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systématiques de comparaison pour nos expériences. Ce sont deux molécules appartenant à la même famille, les acides aminés aliphatiques, dont le comportement chimique vis-à-vis de la radiolyse devrait être voisin. La présence ou non de groupements méthyles devrait modifier l'environnement électronique de l'électron non apparié du ou des radicaux par rapport à ceux produits lors de la radiolyse de l'alanine. L'effet attendu dans le cas de radicaux analogues est une variation des constantes de couplages et une augmentation du nombre de raies par apparition de couplages supplémentaires hyperfins. Cela permet ainsi d'encadrer notre acide aminé de référence.

Nous avons étudié les effets sur le spectre de RPE de trois actions [14,15] :

– l'augmentation de la dose : 10 kGy, 50 kGy et 120 kGy ;

– le chauffage à 120 °C et 170 °C après irradiation ; – l’ augmentation de la puissance micro-onde de 0,02 mW à 160 mW.

Tableau 1

Conditions d'acquisition des spectres RPE.

Puissance micro-onde Modulation d'amplitude Largeur de balayage Nombre de balayages

Durée d'acquisition d'un spectre

0,8 mW (24 dB) 0,32 mT 20 mT 3 63 s

Pour chacun des trois acides aminés, nous avons identifié chacune des raies d’ un spectre de référence dont les conditions d'acquisition sont données dans le tableau 1, afin d'observer leur évolution quantitative relative en fonction de ces trois actions. Nous avons établi les règles qui ont permis d'identifier les comportements communs aux différentes raies. Elles ont été établies par analogie avec d'autres pratiques usuelles en chimie ou en spectrométrie et sont présentées dans le tableau 2.

Tableau 2

Comparaison entre les principes des interprétations effectuées en chromatographie et en résonance

paramagnétique électronique.

Chromatographie RPE

Temps de rétention différents

Espèces chimiques différentes

Comportements de raies différents

Raies appartenant à des radicaux différents Temps de

rétention identiques

Peut-être la même espèce chimique

Comportements de raies identiques

Les raies appartiennent peut-être à un même radical (nécessite confirmation par action d’autres facteurs)

En spectrométrie RPE, le signal est proportionnel à la concentration du radical. Ainsi des raies qui appartiennent à un même radical doivent se comporter de façon identique, quelle que soit l’ action que l’ on exerce sur l’ échantillon. Pour autant, des raies qui se comportent de façon identique n'appartiennent pas nécessairement à un même radical. Par contre, des raies qui se comportent différemment appartiennent nécessairement à des radicaux

différents. Ces règles restent valides pour un mélange de différents radicaux tant que leurs concentrations relatives restent constantes. Ainsi nous avons pu organiser les regroupements et un classement de ces raies afin de relier ultérieurement leur variation à la quantité de radical présent.

3.1. Résultats

Nous présentons une synthèse de nos résultats sur l'alanine dans le tableau 3. Les détails et l'interprétation que nous en proposons sont donnés ci-après.

3.1.1. Effets de l'augmentation de la dose

Pour l'alanine, 15 raies ont été identifiées et sont présentées sur la figure 4. La raie 8, communément utilisée en dosimétrie, a été choisie comme référence avec une intensité égale à 100 %.

-1,E+05 -8,E+04 -6,E+04 -4,E+04 -2,E+04 0,E+00 2,E+04 4,E+04 6,E+04 8,E+04 1,E+05

1,94 1,96 1,98 2

2,02 2,04 2,06

1 2 3

4 5

6 7

8

9 10

11

12 13

1415

Fig. 4. – Spectre de RPE de l’ alanine irradiée à 10 kGy : dérivée de l’ absorption (unités arbitraires) en fonction du facteur g.

On constate que certaines raies présentes à 10 kGy disparaissent par la suite, c’ est le cas des raies 7, 9, 10. On remarque également qu’ il y a des épaulements (raies 1, 4, 10, 12) présentes à toutes les doses mais dont les variations ne sont pas mesurables, c’ est le cas des raies 1, 4 et 12. Toutes les autres raies se retrouvent d’ une dose à l’ autre dans le spectre, mais celles-ci peuvent évoluer de manière différente.

3.1.2. Effets du chauffage

Nous avons effectué un chauffage en vue de produire un « vieillissement accéléré ». Celui-ci résulte d'un relâchement de la maille cristalline qui augmente la vitesse de déplacement de l’ eau dans celle-ci, d’ où une destruction plus rapide des radicaux, mais qui ne doit pas engendrer par une thermolyse directe la formation de nouvelles espèces radicalaires. Le chauffage a pour but d'augmenter la probabilité de réaction de tous les radicaux avec les espèces voisines. Les réactions les plus fréquentes impliquent les radicaux avec les molécules d'eau, puis avec les molécules d'alanine intactes, enfin les radicaux entre eux. Nous avons vérifié sur de l'alanine non irradiée, par des expériences de thermoluminescence que la décomposition thermique de l'alanine n'intervenait qu'au- delà des deux températures (120 °C et 170 °C) retenues.

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ÉTUDE DU MÉCANISME DE RADIOLYSE DE L’ALANINE ET DES ACIDES AMINÉS 9 Nous observons vers 220 °C le début de la formation d'un

complexe activé (en général une bi-molécule excitée).

Elles ont montré pour nos trois acides aminés un faible taux de décomposition thermique, prouvant que le chauffage entraîne principalement, au moins à 120 °C, un simple relâchement de la maille cristalline.

Pour l'alanine, l’ allure générale du spectre n'évolue pas lors d’ un chauffage de huit heures à 170 °C; cependant l’ intensité de celui-ci diminue fortement. Les principales modifications sont :

– les épaulements 6, 7, 9 deviennent des raies bien distinctes ;

– les épaulements 4 et 10 sont plus nets dans leur massifs respectifs (4, 5, 6) et (10, 11) ;

– les raies 5, 8, 11 et 13 sont conservées qualitativement (malgré la diminution globale du spectre) mais augmente en intensité relative.

Il semble qu'un radical majoritaire présente un spectre constitué par les raies principales 5, 8, 11 et 13. Pour les autres raies deux hypothèses sont envisageables. Nous avons soit un second radical constitué par l’ ensemble des autres raies, soit deux autres radicaux représentés respectivement par les raies 6, 7, 9, 12 d’ une part, 4 et 10 d’ autre part.

Tableau 3

Variations relatives des intensités des raies des spectres de RPE de l’alanine.

RAIE DOSE CHAUFFAGE SATURATION GROUPE

10 à 50 kGy 50 à 120 kGy 120 °C 170 °C 10 kGy 50 kGy 1

2

25 I ?

3

9 25 IV

4

= IV ?,III ?

5

9 25 I

6

= 9 25 III

7

= V

8

9 25 I ?

9

= III ?

10

= III ?

11

= = 9 25 II

12

= III ?

13

= = 9 25 II

14

= = II ?

15

9 25 I ?

Les données d’une colonne peuvent être lues indépendamment des autres. La comparaison des données d'une ligne permet de voir si les deux raies de RPE correspondantes présentent exactement les mêmes modes de variations et, donc, peuvent appartenir à un même groupe (de radicaux). Les cases blanches correspondent à des données manquantes ou non significatives.

DOSE : : croissance : décroissance = : pas d’évolution

CHAUFFAGE : variations relatives durant un chauffage à 120 °C ou à 170 °C : croissance : décroissance = : pas d'évolution

SATURATION : : croissance sans maximum apparent dans la gamme de puissances testée 9 : saturation à environ 9 mW puis décroissance

25 : saturation à environ 25 mW

GROUPE I : possibilité d’un radical unique ou d’un groupe de radicaux

Le chauffage semble entraîner la disparition des radicaux, chacun d'eux à des vitesses différentes, sans faire apparaître de nouvelles espèces. On constate que

selon les acides aminés la durée de chauffage nécessaire pour modifier le spectre varie, ce qui signifie qu’ ils n’ ont pas la même sensibilité (vitesse de réaction de

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décomposition). Les radicaux générés dans l'alanine sont plus stables que ceux générés dans la glycine, eux-mêmes plus stables que ceux générés dans la valine. Au cours du refroidissement et du suivi, nous n'observons pas d’ évolution dans les spectres, ce qui signifie que le chauffage a permis d’ accélérer le relâchement de la maille cristalline et donc le vieillissement et qu’ à température ambiante cette réaction retrouve sa cinétique normale. Le comportement de la glycine semble signifier qu'il y a au moins deux familles de raies dans son spectre, donc au moins deux espèces radicalaires en présence, dont l’ une est majoritaire. La valine montre quatre groupes de raies, ce qui signifie qu’ il existe au moins quatre espèces radicalaires.

3.1.3. Effets de l'augmentation de la puissance micro- onde

L’ intensité des raies du signal est proportionnelle au carré de la puissance micro-onde qui est imposée, ceci tant que la saturation n’ est pas atteinte. Les acquisitions ont été effectuées avec les paramètres sélectionnés présentés dans le tableau 1 en faisant varier la puissance micro-onde entre 0,02 mW et 160 mW. Pour l'alanine, à 10 kGy on peut observer sur le spectre 8 raies et 5 épaulements. Pour les courbes de saturation, les raies 3, 5, 8, 11, 13, et 15 ont sensiblement le même comportement. En effet, elles croissent de façon similaire jusqu’ à atteindre un maximum pour une puissance d’ environ 9 mW. La raie 6 semble croître tout au long de l’ expérience mais un ralentissement de cette croissance vers les fortes puissances laisse penser qu’ il s’ agit en fait d’ une interaction avec les autres raies.

La raie 7, malgré des fluctuations importantes dues à sa faible intensité et aux perturbations par les raies avoisinantes importantes (notamment la raie 8), croît sur l’ ensemble de la gamme des puissances donc bien au delà des 9 mW. Il semblerait que l’ on soit en présence d'au moins deux types de comportement. Ceci est également observé à 50 kGy.

3.2. Discussion

Les variations du spectre de l'alanine selon certains paramètres [16-18] étaient connues. L'association des raies par l'analyse des comportements communs à l'aide de chacun des trois paramètres (effets de dose, du chauffage et de la saturation en puissance) nous a permis de proposer une classification par analogie de comportement qui peut être associée à une espèce ou à un groupe d'espèces à composition fixée pour chaque acide aminé. Nous avons identifié pour l’ alanine cinq types de comportement. Pour la glycine sept comportements ont été identifiés et neuf pour la valine. Pour l'alanine, parmi ces cinq types, les raies mesurables peuvent être classées en trois groupes majeurs :

– groupe I : raie 5, et peut-être 2, 8 et 15 ; – groupe II : raies 11, 13, et peut-être la raie 14 ; – groupe III : raie 6, avec peut-être les raies 4, 9, 10 et 12.

Il existerait donc bien au moins trois espèces radicalaires dans l’ alanine irradiée.

Ces premières observations ne constituent pas des preuves formelles de l'existence d'espèces, mais éliminent définitivement l'hypothèse du mono-radical insensible aux paramètres environnementaux et étayent l'hypothèse que les incertitudes observées à l'heure actuelle soient corrélées à cette approximation. Le caractère composite du spectre de l'alanine avait été proposé, il y a plusieurs années [19], à partir des problèmes observés lors de la simulation des spectres de poudres. Depuis, l'accumulation des informations quantitatives plus précises [15,20] ne laisse plus de doute sur la véracité des hypothèses initiales proposées par Muto et al. dès 1977 [21]. Ce travail a permis surtout de déterminer les zones les plus sensibles du spectre pour lesquelles l'exploitation quantitative des raies devra être particulièrement minutieuse, que ce soit pour les effets des paramètres qui influencent la cinétique de la radiolyse ou bien pour la déconvolution.

4. Étude par piégeage de spin

C'est la structure chimique des espèces radicalaires qui crée leur réactivité. L'organisation spatiale en phase solide n'est que le complément mécanique du phénomène apparent de stabilité. Il est très important de déterminer la structure chimique de ces espèces, minoritaires ou non, afin de comprendre leur réactivité potentielle vis à vis des paramètres d'influence (température et hygrométrie, oxygène, pH, UV… ) et pour que l'on puisse imaginer les moyens de limiter ou de contrôler leur influence sur la cinétique de la réaction et donc sur l'évolution des spectres au cours du temps.

Les spectres RPE en phase liquide permettant de remonter à la structure chimique des radicaux, nous avons choisi d'effectuer des expériences de piégeage de spin selon la réaction :

R° + tBu–N=O tBu–N°(-R)–O (phase solide) (solution) (solution)

Nous avons choisi comme molécule « piège » le 2-Méthyl-2-Nitroso Propane (NMP) (CH3)3C-N=O. Les spectres RPE de radicaux nitroxydes présentent toujours une allure présentant trois « massifs » dus à l'atome d'azote du piège. Ce sont les interactions à l'intérieur de chaque massif qui apportent des informations sur la structure du radical piégé. Les échantillons ont été irradiés à 5 kGy, soit une dose au moins vingt fois inférieure à celles décrites précédemment dans la littérature [22,23].

Les conditions opératoires initiales de ces travaux ont ensuite été optimisées, afin d’ observer, non seulement l’ espèce majoritaire, mais également la ou les espèces minoritaires. La méthode comporte cinq étapes : la préparation de la solution de piégeage, la réaction de piégeage, la préparation de l'échantillon à mesurer en

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ÉTUDE DU MÉCANISME DE RADIOLYSE DE L’ ALANINE ET DES ACIDES AMINÉS 11 spectrométrie RPE, et enfin l'acquisition du spectre et le

suivi cinétique de l'expérience.

4.1. Résultats

4.1.1. Radical R1

Le spectre des solutions de piégeage de l'alanine irradiée se présente sous forme d’ un triplet de doublets [14]. Ce spectre a déjà été observé par l'équipe de Riesz [22,23]. Le triplet est dû à l’ azote (spin de 1) du piège et chaque doublet provient d’ un proton (spin de ½) provenant d’ une fonction CH d’ un radical formé par radiolyse de l’ acide aminé. Riesz, qui a effectué ses expériences dans l’ eau lourde, a mis en évidence que chaque raie correspond à un quadruplet et a associé ce radical à la structure « R1 » correspondant au « radical parent » formé par départ de la fonction NH3+ de l’ alanine.

Le radical « fils » nitroxyde est très stable puisqu’ on peut l’ observer 4 à 5 jours après piégeage.

4.1.2. Radical R2

Nous observons une deuxième espèce dont le spectre est un triplet de singulets [14]. Ce radical a été observé dans le passé à plusieurs reprises [22-24]. Il a été démontré par des séparations par chromatographie liquide [27] que deux triplets de singulets peuvent se former lors de réactions parasites du piège sur lui-même. Les deux constantes de couplages sont respectivement de 1,68 mT et 1,72 mT. Nous trouvons une constante de couplage de 1,7 mT. L'espèce que nous avons observée ne semble donc pas être celle liée à la radiolyse de l’ alanine communément identifiée par R2.

4.1.3. Radical R3

Nous observons également un triplet de triplets. Le triplet principal ayant une constante de couplage de 1,67 mT est attribuable à l’ azote de la fonction nitroxyde.

Le triplet secondaire est de type 1 : 2 : 1 mais le rapport signal sur bruit de fond est mauvais (à peine supérieur à 2). Les hauteurs étant comparables, on ne peut exclure complètement une forme 1 : 1 : 1. La structure du radical correspondrait à un radical parent formé par départ d’ un proton de l’ alanine. L’ hypothèse la plus probable est celle d’ un triplet secondaire 1:2:1 correspondant à deux protons identiques, c’ est-à-dire à une fonction CH2. On peut envisager une structure du radical R3 qui correspond donc à un radical parent obtenu par arrachement d’ un proton du groupement méthyle de l’ alanine.

4.1.4. Glycine et valine

Pour la valine et la glycine, les travaux de référence sont également ceux de Riesz [22,23]. Les spectres que nous avons obtenus à partir de la valine [14] montrent l’ existence d’ au moins deux espèces : un triplet de doublets avec aN = 1,57 mT et aH = 0,37 mT et un triplet de singulets avec aN = 1,64 mT. Ces valeurs sont compatibles avec celles trouvées par Riesz. Ces deux espèces ne suffisent pas à expliquer complètement la forme des spectres. Le vieillissement de la solution montre

d’ ailleurs au bout de huit jours l’ apparition d’ un triplet de singulets (aN = 1,71 mT) qui existe déjà dans le spectre initial et qui est analogue au radical R2 trouvé dans l’ alanine. Ceci est particulièrement intéressant du point de vue cinétique car cette « apparition » tardive pourrait être corrélée à l'absence d'observation de R2 dans nos conditions, mais aussi aux augmentations du signal RPE que nous avons déjà rapportées [5]. Pour la glycine, le spectre [14] montre l’ existence de nombreuses raies. On observe en particulier : un triplet de triplets avec aN = 1,51 mT et aH = 0,33 mT (2 protons) et un triplet de doublets avec aN = 1,47 mT et aH = 0,79 mT (1 proton) ou un triplet de triplets avec aN = 1,4,7 mT et aH = 0,40 mT (2 protons). En fait, il y a trop de radicaux formés pour que l’ on puisse faire une interprétation et une séparation précise des différentes raies.

Note : aN et aH sont les constantes de couplage respectivement pour l’ azote et pour l’ hydrogène.

4.2. Influence de la température, l'oxygène et les UV sur les solutions de radicaux piégés

Le signal le plus simple que l’ on puisse trouver dans les spectres de radicaux nitroxydes est, en dehors du triplet de singulets, un triplet de doublets soit un spectre de 9 raies. Un mélange de radicaux entraîne donc un très grand nombre de raies qui rend souvent difficile l'interprétation du spectre total, le repérage des raies de chaque espèce puis les tentatives par la simulation d'établir les proportions relatives des espèces. La méthode de piégeage étant probante (efficace et reproductible), nous avons étudié sommairement, l'effet de quelques paramètres qui pourraient modifier les conditions d'obtention de nos radicaux : la température, la présence d'oxygène et les UV.

La stabilité des radicaux a été testée en fonction de deux températures. Les capillaires ont été remplis de la même manière que pour les manipulations classiques, puis placés à l’ étuve à 40 °C ou au bain marie à 70 °C. Dans les deux cas, nous avons observé un spectre identique à celui obtenu en conditions ambiantes. Cependant, la durée de vie des radicaux piégés est nettement diminuée : en conditions ambiantes elle est de 6 jours, à 40 °C elle passe à moins de deux jours, à 70 °C elle n’ est plus que de quelques heures. Aux faibles températures (0 °C à 15 °C), en phase liquide, les allures des spectres obtenus restent identiques. Nous n’ avons donc modifié ni la proportion ni la nature des radicaux nitroxydes. Le signal du témoin persiste 6 jours à température ambiante avec une décroissance du signal s’ amorçant au bout du quatrième jour. A 6 °C, le signal est toujours aussi intense au bout de 10 jours et son allure n’ a pas évolué. Le signal obtenu après décongélation d'un échantillon conservé à –18 °C durant 9 mois (durée maximale actuellement étudiée) est identique à celui que l’ on enregistre avant congélation. A température ambiante, la cinétique de destruction des radicaux semble reprendre ensuite sa vitesse initiale (6 jours). L'abaissement de la température permet donc de

« geler » la réaction et donc de contrôler à loisir la durée de vie des radicaux. Ceci nous a permis de mettre en place une tentative de séparation.

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La présence de l'oxygène a un effet à deux niveaux : lors de la préparation de l’ agent de piégeage et de la solution de nitroxydes, et directement sur les radicaux nitroxydes, une fois ceux-ci formés. La présence d’ oxygène dans le premier cas entraîne la formation de radicaux oxygénés de type ROO.. Sur le spectre, la présence de tels radicaux se manifeste par une distorsion de la ligne de base du spectre traditionnel. Dans le second cas, l’ oxygène a pour principal effet de diminuer la durée de vie de ceux-ci. On observe qu'elle n’ est plus que de 2 jours en l'absence d'un dégazage suffisant à l'hélium.

Le dernier paramètre étudié est l’ effet des UV de la lumière solaire sur les radicaux nitroxydes. Nous avons observé un spectre identique au spectre témoin, cependant la durée de vie est de moins d’ une heure. Cette constatation montre que les radicaux nitroxydes absorbent dans l'UV. En identifiant la longueur adéquate, un système de détection basé sur la spectrophotométrie UV peut donc être utilisé.

4.3. Chromatographie liquide

La stabilité observée des radicaux nitroxydes piégés rend possible une chromatographie liquide des solutions [26,27]. Ceci a déjà été fait dans le cas des sucres irradiés [28], et sur le NMP [26]. Le principe de la méthode est simple : en fonction de la réponse du détecteur UV, on recueille les différentes fractions qui peuvent être congelées puis analysées par spectrométrie RPE dans la configuration souhaitée. Nous avons effectué les premiers essais en CLHP (Chromatographie Liquide Haute Performance) à l'aide d'une colonne NUCLEOSIL 100-5 C18 NAUTILUS (Macherey-Nagel) qui contient une phase inverse à base de silice greffée C18, de haut degré de pureté, stable en milieu aqueux. Elle présente des interactions polaires via des activités de liaisons hydrogène et des forces dipôle-dipôle. Ces types d’ interactions vont influer sur les temps de rétention (tR) et améliorer la sélectivité (α), particulièrement lors de la séparation de composés polaires tels que les acides aminés. La technique a été utilisée à des fins semi- préparatives pour concentrer et séparer les radicaux nitroxydes, la séparation des molécules intactes d'acides aminés et de NMP est un corollaire. Cependant les conditions opératoires (débit 6 ml min-1) n'ont pas été optimales, seul le détecteur UV a pu être mis en fonctionnement. Les radicaux ne supportant pas la chaleur, la température appliquée a été de 10 °C, alors que celle conseillée pour ce type de chromatographie est de 70 °C à 80 °C. Nous avons effectué les expériences pour chacun des trois acides aminés, irradié ou non. Les chromatogrammes montrent que l'élution des acides aminés a fonctionné correctement. En effet, nous observons pour chacun d'entre eux un pic correspondant à la molécule intacte et nous avons pu déterminer les temps de rétention. Par contre, dans le cas des acides aminés irradiés, la séparation a été incomplète. De nouveaux pics apparaissent mais insuffisamment séparés. Les fractions obtenues contiennent donc plusieurs espèces chimiques provenant de la radiolyse, mais nous n’ avons pas pu mettre en évidence plus aisément les radicaux nitroxydes.

4.4. Discussion

Nous avons constaté que les radicaux nitroxydes peuvent n’ apparaître qu’ au bout de quelques heures après dissolution de l’ alanine irradiée dans la solution de piège.

Même si nos dernières expériences ne font plus apparaître ce phénomène aussi nettement, il est significatif et doit être pris en compte pour l’ interprétation des résultats, en particulier pour les aspects quantitatifs lorsque l’ on considérera les pourcentages relatifs des espèces nitroxydes. Il n'est pas possible que des radicaux formés en phase solide restent stables quelques heures en milieu liquide lors de la dissolution avant d’ être piégés. N'ayant pas pu mettre en évidence une véritable cinétique d’ apparition des radicaux, la seule hypothèse plausible pour expliquer cette observation est le passage par une espèce diamagnétique, ne donnant donc pas lieu à un signal en spectrométrie RPE, qui se décomposerait en quelques heures pour donner naissance à des radicaux.

Cette décomposition semble brutale, et peut être liée à un déclenchement d’ ordre catalytique. Toutefois, deux possibilités existent. La première est qu'une espèce diamagnétique soit présente dans le solide. Les radicaux observés en phase solide pourraient n’ être pratiquement pas piégés et donc observés. Une espèce diamagnétique présente dans le solide irradié donnerait une suite de réactions selon la figure 5. Plusieurs auteurs [29,30] ont déjà évoqué l’ existence d’ une telle espèce en phase solide.

Ceci pourrait également correspondre à certaines augmentations de l’ intensité des signaux de RPE observées en phase solide.

Fig. 5. – Hypothèse de l'espèce diamagnétique en phase solide.

La seconde serait que l'espèce diamagnétique soit formée lors du piégeage (fig. 6). Les radicaux A° formés par radiolyse de l’ alanine sont transformés lors de la dissolution en une espèce diamagnétique, donc non observable par RPE, qui se décompose en quelques heures pour donner après réaction avec le NMP le radical nitroxyde observé en RPE. Cette deuxième hypothèse peut donner lieu à plusieurs variantes, au niveau de la réaction initiale.

L’ espèce diamagnétique peut être formée par association de deux radicaux A° ou de deux radicaux piégés par le NMP. Si l’ influence de telles espèces a déjà été envisagée, de même que la dimérisation de certains radicaux en solution, la stabilité et la possibilité de ces

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ÉTUDE DU MÉCANISME DE RADIOLYSE DE L’ ALANINE ET DES ACIDES AMINÉS 13 réactions doit dépendre de nombreux paramètres, ce qui

explique que l’ on ait réussi à obtenir, avec des conditions bien définies, une bonne reproductibilité avec un piégeage quasi immédiat. La température comme le pH de la solution ont un rôle, de même que la température d’ irradiation joue un rôle sur les quantités de radicaux formés [18,31].

Fig. 6. – Hypothèse de l'espèce diamagnétique en solution.

Les premiers résultats de mise au point de la CLHP des solutions de radicaux nitroxydes montrent qu'elle est réalisable. Cependant une optimisation devra être effectuée afin de valider les hypothèses émises :

– les radicaux nitroxydes recueillis dans les fractions sont en trop faibles concentrations pour être observables par RPE. Dans ce cas, il est nécessaire de concentrer aussi bien la solution initiale que chacune des fractions.

Plusieurs techniques classiques sont envisageables comme l'évaporation partielle sous vide ou bien la lyophilisation.

Au préalable, il faudra vérifier que la technique choisie ne détruit pas (totalement ou partiellement) les radicaux nitroxydes et conserve les proportions ;

– le fractionnement est fait actuellement au hasard. Les temps de rétention des divers radicaux n'ont pas été déterminés. En remplaçant le détecteur UV par un spectromètre de RPE en ligne, on aurait en continu des indications plus précises sur ceux-ci. La mise en place d'un fonctionnement pour la pompe, la colonne et le spectromètre RPE vers 5 °C devrait rendre les analyses plus aisées ;

– Enfin, la non observation des radicaux peut être due à leur destruction lors de la chromatographie. C'est l'hypothèse la plus pessimiste. Les deux premières corrections à apporter au protocole seraient alors l'abaissement de la température de travail et la saturation des solutions à l'hélium.

5. Conclusions

L'analyse des spectres de poudres d'alanine a montré que ce détecteur est un système complexe comme le laissait prévoir le comportement des autres acides aminés de la même famille. Nous avons étudié plus particulièrement trois paramètres afin de démontrer qu'une discrimination des raies est possible. Une implication de ces observations est donc que ces mêmes paramètres peuvent être utilisés également pour établir un état

contrôlé de la substance détectrice. Une « zone de stabilité » du spectre ou de moindre risque pour ce détecteur pourrait être identifiée empiriquement.

Comme nous l’ avons vu, les expériences de piégeage de spin sont possibles et donnent de bien meilleurs résultats que ceux observés initialement dans les années 1980. Certes cela est dû en partie à la technologie de la spectrométrie RPE qui a beaucoup progressé tant en matière de sensibilité qu’ en résolution, mais le gain réel est, pour une technique appliquée jusque là essentiellement à des fins qualitatives et d’ identification, une reproductibilité contrôlée (du rendement de piégeage) qui pourrait permettre une utilisation quantitative de la technique à l’ aide de la séparation par chromatographie puis mesure par RPE. En effet, les premières applications seraient la détermination précise des quantités respectives des différents radicaux dans une configuration donnée.

Une étape complémentaire sera d’ améliorer la détection des espèces radicalaires minoritaires obtenues en piégeage de spin en effectuant des acquisitions de spectres avec des accumulations plus nombreuses afin d'améliorer le rapport signal sur bruit. Cela devrait nous permettre de trancher entre les deux hypothèses pour le triplet de triplets trouvé pour l'alanine.

La méthode étant au point, des études comportementales de l'équilibre entre ces espèces pourraient être effectuées. Les résultats de ces études pourront contribuer à établir avec précision les termes correctifs utiles tels ceux liés à la température d'irradiation ou de stockage et de la diminution du signal qui reposent à l'heure actuelle sur une modélisation empirique et dont les données et incertitudes ne sont pas transposables d'un laboratoire à l'autre aisément. Cette précision pourrait être améliorée à partir d'une modélisation physico-chimique de la cinétique. Ainsi, on pourrait identifier par simulation, une « zone de stabilité » pour les espèces considérées et donc du spectre RPE. Une action spécifique, par exemple

« un vieillissement accéléré » permettra d'atteindre cette zone et d'y mesurer la concentration en radicaux dans des conditions de haute fiabilité.

Pour réduire les incertitudes sur les mesures en spectrométrie RPE, la séparation (par déconvolution) et la mesure de l'espèce radicalaire majoritaire R1 semblent la voie la plus prometteuse. A l'aide des données de base du spectre des espèces radicalaires en phase liquide et de leurs répartitions dans des conditions données, on pourra établir par simulation le spectre de poudre individuel, puis par composition établir un spectre composite réaliste. Le chemin réciproque, pour effectuer une déconvolution à des fins quantitatives, n'est possible que si les deux étapes précédentes ont été réalisées.

Ce travail a été effectué avec des doses élevées et sur des poudres. Les résultats en matière de méthodologie : connaissance du mécanisme réactionnel du détecteur, contraintes sur le dosimètre à l'aide de paramètres extérieurs et déconvolution du spectre seront applicables pour des dosimètres sous forme de pastilles et pour les mesures dans la gamme de doses pour la radiothérapie (1 Gy à 10 Gy), la chimie et la physique de ces espèces

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radicalaires n'étant pas affectées par leur niveau de concentration. L'amélioration de la maîtrise des termes correctifs et de leurs incertitudes permettra une diminution de l'incertitude relative élargie à un niveau particulièrement attrayant pour ce domaine où le niveau d'exigence se situe à mieux que 2 %.

Remerciements

Les auteurs remercient le BNM pour le soutien financier apporté à cette étude via le contrat d’ action d'incitation n° 01 3 004.

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