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Reçu lã
-Ú. Jb..-
Cote
txempl. —rtw
N° Entrée . tJbE
1 6 JUIN 1372 Aftoù
UN CAS
D'UTILISAT
DU SOUS-EMPLOI RURAL AU MAROC
OBSERVATIONS PREALABLES
1. Il y a lieu de souligner
d'abord
les limites de cette étude quin'a
pas faitl'objet d'enquête
sur leterrain,
mais qui, faute detemps,
en raison de la fin prématurée du projet de reva¬lorisation de
l'agriculture
en sec auMaroc,
adû
recourir à la seule analyse des documents disponibles. D'où ses limites et sesinsuffisances
qu'il
y aurait lieu dedépasser
en menant defaçon systématique
uneenquête
par questionnaires et interviews dans uneprovince choisie en raison de sa
représentativité,
sur la base descritères
proposés
dans la"Note
concernant des méthodes demesure
applicables à
l'investissement
humain en milieumaghrébin(2)".
2. Cette étude
n'implique
nullement quel'on
considère que le sous-emploi rural doive - et puisse - êtreépongé
dans satotalité,
ou pour sa plus grandepartie,
par le seul recours à cetteméthode.
Dautres possibilités sont à explorer et à utiliser:
a)
Soit dans le cadre d'une modernisation rurales'ins¬
crivant elle-même dans une perspective
d'aménagement
des campagnes et del'environnement
rural, et faisantappel, de
préférence,
aufacteur abondant : la
main-d'oeuvre,
plutôtqu'au
facteur rare :le capital. Et cela
d'autant
plus que - et c'est unrisque dont certains exemples prouvent
qu'il n'est
pas sans fondement - lerecours à des méthodes hautement
capitalistiques
enagriculture,
s'il se traduit par des"succès"
sur le planmicro-économique,
peut entraîner - et, en fait, très souvent entraîne - nombred'incon¬
vénients
sur le planmacro-économique
pour né pas parler des ten¬sions sociales accrues qui se font jour à cette occasion.
Il se traduit
d'abord
par un accroissement du sous-emploirural qui, le plus souvent,
s'accompagne d'une
accélération del'exode
rural, lequels'effectue
dans un contextenégatif,
les•
«./...
(2)
Cf. Chap. C, note(ï)
ENRMA 100
sous-employés
ruraux se transformant en chômeurs urbains parIncapacité
du secteur Industriel à absorber cettemain-d'oeuvre
rurale
"excédentaire".
Unemécanisation
trop poussée del'agri¬
culture revêt ainsi un
aspect doublement
négatif
car cet accrois¬sement du sous-emploi rural et du
chômage
urbain va de pair avec une diminution des potentialités dedéveloppement
industriel. Toute ressource en capital- facteur rare - utilisée dans une"modernisa¬
tion"
inadaptée
du secteur agricoles'effectue
en effet, en der¬nière analyse, au détriment du secteur
industriel( I).
Une telle utilisation se révèledonc,
sur le planmacro-économique, être
unfrein au
développement
du secteur industriel.C'est là un type de
réaction réciproque négative
auquelil
n'est généralement
pasporté
une attention suffisanteet qui aggrave encore le caractère propre
d'une
telle forme de"moderni¬
sation" :
- dans un cas,
l'importion
de tracteurs et de machinesagricoles lourdes et complexes se traduit par une
dépendance
accrue,commerciale et autre, à
l'égard
des pays industrialisés et, endéfinitive,
par une tendance ou une accentuation du caractère hété- rocentré dudéveloppement. L'accroissement
corrélatif du rôle du marché extérieurs'accompagne, d'autre
part,d'une
diminution relative du poidsspécifique
du marché intérieur et l'effetmultiplicateur
d'un tel mode dedéveloppement
reste faible.- dans l'autre cas
(ressources
correspondante® consacrées au déve¬loppement du secteur
industriel,
surtout si celui-ci estadapté
aux besoins propres du
pays),
il contribue au contraire au déve¬loppement du marché intérieur
(et
donc du secteuragricole)
j soneffet multiplicateur est plus
élevé
et entraîne la créationd'em¬
plois nouveaux ainsi que la diminution du sous-emploi rural.
b)
Soit par ledéveloppement
de petits centres urbains ousemi-urbains,
et/ou
debourgs
ruraux.De longue date, industries rurales et artisanat villageois
ont utilisé la force de travail paysanne saisonnièrement
inemployée.
A leur
métier,
les producteurs de bléeuropéens
en ajoutaient jadisun autre ou plusieurs
"qui
venaient combler le vide de leur exis- enceterrienne, L'artisanat,
lecolportage
et le roulage,l'appel
des chantiers
urbains,
des mines, des ports, de laforêt,
trouvaient dans ledésoeuvrement
compagnard les brasdisponibles dont ils
(ï)
Mais,Enà dessupposantcontra'intessur un uneplanmobilitédiverses,dud'ordre
capitalsocio-culturfelqui, en fait, ense heurteparticulier,
global, le raisonnement reste valable et il est,d'autre
part, possible de prendre desmesures d'ordre divers, sus¬
ceptibles de lever - ou de diminuer - de telles contraintes.
ENRMA 100
avaient
besoin"(l).
En
France,
de la fin du Moyen Age au XVIII esiècle, l'emploi
temporaire des paysansétait
favorisé par la dissé¬mination dans les campagnes des industries textiles et de la petite
métallurgie(2).
Dansl'ensemble
del'agriculture
euro¬péenne
actuelle, emploisd'appoint
ou de remplacement conti¬nuent, au
demeurant,
de jouer un rôle nonnégligeable.
Les efforts à accomplir en direction d'une ruralisation de
l'industrie
et dudéveloppement
des activités artisanalesvillageoises
semblent avoir reçu une impulsion nouvelle de l'exem¬ple chinois qui
s'est
attaché à mobiliser les "forces productives cachées" du sous-emploi, encore que certainsexcès,
unepréci¬
pitation quelque-fois
dommageable
et une insuffisance dansl'orga¬
nisation de la coordination aient fait parfois
apparaître
le risqued'un gaspillage
de ressources de la partd'une
politiquetendant à promouvoir les petites industries à
l'échelon
villa¬geois,
lorsqu'elle
n'est pasappliquée
à bon escient.Il n'en reste pas moins
qu'on
ne saurait sous-estimerl'intérêt
de la fabrication des biensd'équipement
dont la collec¬tivité rurale a
besoin(pelles, brouettes, matériaux
de construction charrues et herses de conceptionaméliorée,
bateaux en bois,etc.)i
et, pas
davantage,
ledéveloppement
de petites industries locales de transformation des produits agricoles.Cette création
d'industries
rurales est conditionnée par certains facteurs tels que :- La disponibilité des matériaux sur place,
-
L'existence
de conditions propices à une petite exploi¬tation,
-
L'organisation
de marchésadaptés
aux besoins locaux.Créées dans ces conditions, les industries rurales procurent non seulement de nouveaux emplois, mais constituent une
étape
nonnégligeable
dans le processusgénéral
dudéveloppement économique
en satisfaisant les besoins croissants des marchés ruraux eux-mêmes
(1)
D.FaucherEtudes"Aspects
sociologiques du travailagricole",
Rurales
13-14, 1964
pp.125/126.
(2)
H.Kellenbenz"Les industries rurales en Occident, de la fin duMoyen Age au XVIIle
siècle,
Annales-Economies - Sociétés-Civilisations,
septembre-octobre1963.
Il ne
s'agit
pas,toutefois, d'inscrire
cet effort dansune perspective
régressive
de"village
se suffisant àlui-même(l),
mais, bien au contraire , de
développer
les liens avec les mar¬chés urbains.
Cependant,
alors que les conditions de la domination coloniale ou d'une économie hétérocentrée aboutissaient - ou abou- tissent-àprivilégier
le commerced'import-expert
à destination ou en provenance des marchésétrangers, l'évolution envisagée
estinverse,
qui, dans unepremière
phase tout au moins, redonne une orientationgénérale
plus saine, tournée vers les besoins de lamasse de la population, laquelle abandonne ce type de croissance
"rattachée"
pour undéveloppement économique
autocentré visant, suivant la formulation de J.Bénard,
àl'élévation
du niveau de vie de la population par le moyend'un développement
diversifiéde son économie interne.
c)
Ainsi conçu, le role de la petite industrie rurale est susceptibled'enrayer
le mouvement migratoire qui draine vers les villes les éléments les plus valides et les plusentreprenants,
en leur fournissant des emplois sur place. Le
développement
del'alimentation
enélectricité
ainsi quel'amélioration
du réseau routierpermettent-grâce
à lagénéralisation
des outils et des machines mus par1'électricité-d'implanter
des industries dans les villesd'importance
secondaire, dans certains cas, dans de grosvillages.
Aussi bien,
l'élévation
locale du niveau moyen del'emploi,
en comblant
l'utilisation
d'une maind'oeuvre permanente et d'unemain-d'oeuvre saisonnière,
a-t-elleété,
dès avant la révolutionculturelle, l'un
des objectifsassignés
par laRépublique
popu¬laire de Chine aux entreprises industrielles
communales(2).
Les critiques qui ont été faites parfois à
l'égard d'une
telle politique sont souvent basées sur les critères parcellaires
en matière de choix
technologiques.
Ellesnégligent
de replacer(1)
Errementrelevé,
àl'époque,
par la missiond'évaluation
des Nations Unies enInde(cf"Report
of aCommunity Development
Evaluation Mission in
India'',
M.J.Coldwell,
R.Dumont et M.Read, New-York 1959*par.
I6l/l62.
(2)
C. Bettelheim "La construction du socialisme en Chine" Edit.F.Maspéro,
Paris,1965.
- 5 - ENRMA 100
l'utilisation
destechniques employées
dans leur contexte socialen
s'interrogeant
sur larésultats
obtenus en ce qui concerne ledéveloppement économique
global àlong
terme.L'utilisation
detechniques
faiblement productives est en effet Justifiéelorsqu'il
n'est pas possibled'obtenir
les mêmes résultats dans lesmêmes
détails avec destechniques
plus productives.Le
danger qu'il
y a lieud'éviter
n'en reste pas moinscelui de
figer
la productivité à un niveau trop bas alorsqu'il
est possible
d'obtenir
une productivité plusélevée. D'autre
part,ce qui a été positif à un moment donné et a favorisé
l'augmentation
du taux de croissance peut
ultérieurement
exercer une influencenégative
ou freiner cettecroissance,
Aussibien,
seul, un calcul concret,appuyé
surl'expérience,
permet-il depréciser
les limites au-delàdesquelles l'utilisation
de tellestechniques
cessed'être avantageuse.
L'influence
des divers facteurs à prendre en cause varient avec letemps,
explique pourquoi ce quipeut
être
justifié à uncertain moment cesse de
l'être
quelque tempsaprès
: certainesindustries
et activités artisanales ruralesdisparaîtront
et d'au¬tres viendront les remplacer.
Parmi ces
industries,
celles qui emploient de lamain-d'oeuvr
saisonnière permettentd'utiliser
les temps morts du cycle agricole.Mais se pose alors le problème de leur
rentabilité,
une telle uti¬lisation pouvant conduire à une
sous-utilisation de
l'équipement
en
machines(l).
Ce caractère saisonnier peut aller de pair avec un étale¬
ment plus ou moins
complémentaire
du caractèreégalement
saisonnierdu sous-emploi. A cet
égard,
les industries qui ont besoin de main-d'oeuvre
en pleine saison agricole offrent moinsd'avantages(cas
des conserveries de
légumes
et desbetteraveries).
Al'inverse,
certaines industries sont particulièrement utiles pour les travail¬
leurs agricoles
sous-employés lorsqu'elles
fournissent du travaild'appoint
quandl'agriculture
a le moins besoin de bras.C'est,
par exemple, le cas en
Norvège
et enSuède,
de lapêche
et des(l) D'où
depréférence l'intérêt,
à desdansindustriesce type defaiblementréalisation, capitalistiques. d'avoir
recoursindustries qui en
dépendant,
ainsi que de la sylviculture. Les I.H, qui peuvent être utilisés dans laphase de construction de telles industries sont un moment et un moyen de la revitalisation rurale,
et, de
même,
ledéveloppement
des diverses activitésd'appoint
dans les
villages
ainsi que le processusgénéral
de ruralisation del'industrie.
Cefaisant,
ilspréparent
directement leur propredispari:ion :
- en aidant à la monétarisation de
l'économie,
- en élevant le niveau de vie des populations rurales et
en
élargissant
ainsi le marché intérieur dans une pers¬pective de
développement autocentré,
- En
préparant
les conditions d'une élévation de la produc¬tivité à la fois dans
l'agriculture
et dansl'industrie,
etd'un développement
de ces deux secteurs dans un processusd'interaction.
3. Les limites de
l'action
de la P.N. sont,d'autre
part,à rechercher dans les
principes
- ouplutôt
lesprésupposés
- qui guident son action, tout au moins telsqu'ils
sont énoncés dans certains documents.a)
La possibilité d'une utilisation immédiate et massive du sous-emploi avant tout effort de remise en cause structurelleparaît
bien, par exemple, avoir été laconviction de certains initiateurs.
A
l'issue
d'un voyage effectué à traversplusieurs provin¬
ces du Maroc en juin
1962,
et qui était consacré aux réalisationsde la P.N.,
l'un
deuxn'écrivait-il
pasqu'il
suffisait de la vouloirréellement pour
"mettre
au travail la totalité de ceux qui désirent réellementtravailler, peut-être
500 000,peut-être
un milliond'hommes
et mêmeplus".
Tout en pensant que cette mise au travail ne saurait
s'accommoder
derégimes
fonciers qui entravent la mise en valeur desterres,
iln'en
estimait pas moins que de tellesréformes,
si importantessoient-elles, "ne
devaient pas retarder la mise autravail". Jugement
qu'il
nuançaitd'ailleurs légèrement
en écrivant:- 7 -
ENRMA 100
"Les réformes de structures
elles-mêmes,
dont je ne mécon¬nais nullement
l'importance
dans certainesrégions,
ne devront pasêtre un
préalable
: elles devront être réalisées parallèlement à la mise au travail, et celle-ci ne pourra pas ne pas en rendrel'utilité
plusévidente
et la réalisationpeut-être
plusfacile".
Toutefois,
dans un rapportrédigé après
cette mission(juin 1962),
iln'en
proposait pas moins :*
"La mobilisation
intégrale
et immédiate deschômeurs
maro¬cains
(qui)
serait un gage de paix et deprogrès
pour le Maghrebtout
entier(...)
Son intérêt le plusévident
comme ses responsa¬bilités
internationales,
tout me semble donc pousser le Maroc dans la voie d'une mobilisation totale et immédiate de ses forces de travail disponibles(l).
b) L'expression "mise
au travail des chômeurs"paraît
a prioriadaptée
à son objet : ladésignation
de gens qui ne tra¬vaillent pas. Mais,
s'appliquant
à des réalités aussi différentes que le sous-emploi rural et lechômage
urbain, elle risque de con¬duire à une confusion dans les concepts et à des erreurs dans les solutions
proposées.
La mise au travail des chômeurs urbains ne peut
s'effectuer
de la même façon que
l'utilisation
du sous-emploi rural. Les pre¬miers ont acquis une mentalité de salariés et
n'acceptent
pas, le(l) Ces^citations sont extraites
de"Promotion
Nationale auMaroc", délégation générale
à la P.N. et au Plan, Royaume du Maroc, Rabat,1964.
Les trois premiers paragraphes de la conclusion dont sont tirés certains des passages ci-dessus ne laissent aucun doute à cet
égard.
"En conclusion,
j'ai été frappé,
comme jel'avais
étéprécédem¬
ment, du contraste entre une
expérience
qui,malgré
desdéfauts,
a de très belles réalisations à son actif-son principal
défaut
est d'être trop
limitée-et l'hésitation
à tirer des leçons decette
expérience,
à enélargir
lesrésultats
pour supprimer la plus grave maladie del'économie
marocaine, le sous-emploi, et pour apporter à un volumed'investissements
nettement insuf¬fisant un surcroît de
réalisation.
J'insiste
sur le fait quel'expérience
actuelle, confirmant laprécédente,
à la valeur une véritable démonstration. La mise au travail de ceux quidésirent
réellement travailler- peutêtre
500.000,peut-être
un million d'hommes et même plusest possible, elle est immédiatement
réalisable, immédiatement
voulant dire dans un délai de quelques mois. La condition, je
le
répète
: le vouloirréellement,
en accepter bien entendu toute lesimplications,
donner une des premières places à cettepréoccupation
en sachantqu'il s'agit
de fournir au pays la possibilitéd'un
véritable bond en avant".plus souvent, de quitter la ville pour aller travailler à salaire, réduits sur des chantiers
d'i.H.
Cela a parfois conduit à proposer
d'octroyer
à ceux-ci un salaire inférieur à la normale, compte tenu del'avantage
queprésente
pour un homme la possibilité de travailler durant lapériode
de morte-saison.Il est permis de faire des réserves sur une telle solution.
Ou le chômeur urbain travaille dans le secteur urbain, et il lui est difficile
d'accepter
de travailler aurabais(ce
qui, quellesque soient les intentions de ceux qui font de telles propositions, risque de faire pression sur le niveau
général
des salaires dans le sens d'unediminution).
Ou lemême
chômeur s'en va travaillersur des chantiers villageois et
intervillageois,
et leproblème
inverse se pose : comment et-pourquoi-le paysan
sous-employé
con¬sentirait-il à travailler bénévolement ou pour une allocation nettement plus faible que le salaire normal si, à
côté
de lui,lesdits chômeurs urbains perçoivent un salaire plus
élevé ?(2).
A ces
problèmes(chômage urbain/sous-emploi rural)
de nature différente doivent êtreapportées
des solutions différentes :c'est en ville
qu'en règle générale
lechômeur
urbain seraemployé
et c'est sur place, dans son village ou à
proximité,
que lepaysan
sous-employé
participera à des travauxd'investissements.
Ce qui
n'exclut
nullement que la dynamique de la revitalisation rurale fasse sentir ultérieurement ses effets sur lechômage
ur¬bain lui-même.
a)
En freinantl'exode
rural qui, dans les circonstancesprésentes,
contribue, au contraire, àl'aggraver.
b)
En facilitant le retourvolontaire(et
non par la contrainte, vouée àl'échec)
deschômeurs
dans leurs villagesd'origine,
retour qui touchera surtout ceux dont l'urbanisation est de fraî¬
che date. Redevenus des ruraux, ils pourront alors, au
même
titreque les autres paysans :
- ou être
employés
à des travauxd'investissements,
(2)
Il est raisonnable de penser, en effet, que leschômeurs
ne consentiront à se rendre sur de tels chantiersqu'avec
lapromesse de recevoir un salaire comparable à celui
qu'ils
touchaient en
ville(sinon
nous retrouvonsl'objection précé¬
dente
).
- 9 -
ENRMA 100
- ou trouver et effectuer un travail normal si, au
village,
uneéconomie monétarisée a, pour
l'essentiel, remplacé
une économie à dominanted'autoconsommation
et entraîne ainsi une diminutionmarquée
du sous-emploi rural et, dumême
coup, la disparitiondu recours aux I.H.
Ace moment de
l'évolution,
cette dernière formed'investisse¬
ment fait place aux investissements par la
voi^monétaire
classique.Mais, e*i dernière analyse, il semble bien que soit vouée à
l'échec l'utilisation
directe de la force de travailinemployée
des
chômeurs
urbains sous formed'i.H.
aussi bien que dans lesmesures de contracte visant à leur imposer de
façon autoritaire,
un
"retour
à la terre". Les résultats de la P.N. le confirmant, oùl'utilisation
des chômeurs dans les grands centres a amené de telsmécomptes(rendement
très faible et coût élevé destravaux) (l)
que ses promoteurs ont dû y renoncer.Il a été
relevé,
par exemple- Le coût
"astronomique"
del'entretien
du kilomètre de pistedans la province de
Casablanca,
- Les prix
élevés
del'ouverture
de pistes ou de routes dans le"Maroc utile"(Casablanca,
Fez et Meknès enparticulier) où
"pourtant
le terrain est souvent moins facile" alors que les prix(l)
G.Ardant relèvequ'au
Maroc, les populations des provinces les plus riches neréagissent
pas de lamême
manière que les populationsmontagnardes"les
plus pauvres et les plus coura¬geuses,
c'est-à-dire
les plusintéressantes",
devant lespossibilités
d'i.H.
Ces dernières se contentent del'octroi
de matériaux et renoncent aux rénumérations allouées par
journées
detravail("Comment
assurer le plein emploi dans les pays en voie dedéveloppement",
Revue Internationale du Tra¬vail juillet
1963
p.26.).
Dans le même sens, il remarquequ1
à"A
Fes, onétait
nettement plusréticent,
mais il faut bien dire que la province de Fez est sans doute moinspauvre"
(op.
cit. page39).
Blacque-Belair constate, de soncôté,
que lesexpériences d'utilisation
du sous-emploi effectuées auMaroc montrent que le rendement de la main-d'oeuvre diffère
également
suivant la mentalité de la population concernée et selon ses conditions de vie."Le rendement est à peu près nul dans les grands centres où l'on a affaire à des chômeurs qui considèrent de leur intérêt de faire traîner en longueur la besogne. Il est faible dans les secteurs riches, avoisinant les centres ou les terres de
colonisation,
là où les ouvriers sont habitués à un salaire plus fort et sont en voied'acquérir
une mentalitéprolétaire.
Ainsi dans le sud de la province de Rabat,
l'administration
des Eaux & Forêts s'est vue contrainte de remplacer la main- d'oeuvre locale, dont le rendement était inférieur d'un quart
par rapport à la normale, et
d'embaucher
des hommes duRif(..)
Par contre, quand il y a une population traditionnellement laborieuse, habituée à travailler dur pour survivre et quand
on lui offre des travaux dont elle saisit aisément
l'utilité,
le rendement atteint alors son
optimum(Promotion
Nationaleau
Maroc",
op. cit.p.58).
sont"normaux
dans les provincespériphériques(Sud-Nord)",
- et, de
même, "le
coût P.N. très exceptionnellement élevé"des travaux
édilitaires
ou communaux entrepris dans les villesou les centres, en employant des
chômeurs.
Le même document con¬clut à ce sujet :
"Il
apparaît
clairement que nous sommes là enplein
type
de chantiers de
chômage, coûteux
et non productifs. Heureusement que cettecatégorie
nereprésente
que duprogramme
1961
eta été
supprimée
en1962" (op-cit.
page67)(2).
A/
OBJECTIFSDès son
institution,
en1961,
la P.N. se proposait de mobi¬liser les ruraux productifs.
Ses
créateurs
lui assuraient en effet la mission suivante :"a)
mobiliser les rurauxsous-employés
en vued'investir
leur force de travail dans laréalisation
de travaux productifs ;b)
associer la population àl'action
dedéveloppement
menéepar
l'Etat
en la faisantparticiper
àl'élaboration
et à l'exécu¬tion de programmes
d'intérêt
national ou local;
c)
ralentirl'exode
rural parl'amélioration
des conditions de vie et de production des zonesdéshéritées,
et la promotion sociale de leurs habitants ;d)
intensifierl'équipement
desrégions
marginales par lamise au travail d'un maximum de
main-d'oeuvre,
pour un minimumd'investissements
financiers ettechniques".(1).
Depuis lors, ces
objection'ont
pasété
remis en cause. Aussi bienl'analyse critique(chap.
Dci-dessous)
des résultats obtenus(résumés
infra enC)
sera, pourl'essentiel,
basée sur la concor-dance-entre les derniers et les premiers et recherchera les facfceurs de distorsion entre les uns et les autres.
(1)
Plan quinquennal1968-1972,
vol. 2, Ministre des AffairesEconomiques,
du Plan et de la Formation des Cadres, Division de la coordinationEconomique
et duPlan,chap.J>:La
promotionNationale, p.169.
(2)
Ces observations recoupent celles faites dans un autre contexesocio-culturel,
celui du Laos, et qui sont rapportées dans notrelivre"lnvestissements humains,
illusions et réalités"édit.cordantes
Mouton, qu'elles
Paris-Lasoient,Haye,ces1969
indicationsp.21/22.
fragmentairesMais, pour con¬ne sauraient remplacer une recherchesystématique
et approfon¬die dont elles ne font
qu'indiquer
la voie.♦
B/
METHODES(2)
- 11 -
ENRMA IOO
Selon la nature des travaux et le bénéfice
qu'en
retirentceux qui y sont
employés,
il existe une différence entre les taux derémunération
où l'on peutdistinguer
trois types :A et B : Plein salaire de 2
DH(3)
ennature pour tous les travaux
d'intérêt
public quin'intéressent
pas directement les
participants(reboisement,
routesprincipales
ou
secondaires,
gros ouvrages,etc)
;C : Demi-salaire en nature.
Théoriquement,
ils'applique
aux travauxentrepris
à la demanded'une
collectivité locale et va de la mise en valeur(aménagement
de sources,épierrage, défrichement
de
collectifs)
à1'infrastructure(pistes, ponts)
ou àl'équipement (souks,
constructionscollectives)
;D : Travaux
d'intérêt direct(petite hydraulique,
plantations etaméliorations
de vergers,etc..., habitat).
Pas derémunération,
mais la P.N. apporte son concoui® en fournissant matériels et ma¬
tériaux.
Parmi les différents types de
rémunération,
les tableaux sta¬tistiques figurant aux bilans de la P.N. font
apparaître
la partprédominante
des types A et B rémunérés à pleinsalaire(en
moyenne9/10
del'ensemble
destravaux)
et la proportion insignifiante des travauxd'intérêt
direct nonrémunérés,
de typeD(de 0,8
à2,2$
avec une moyenne quadriennale de
1,65).
Ceux à demi salaire detype C occupent une place
marginale(moyenne
quadriennale de8,1
avec un minimum de
6,8
et un maximum de9,A)
: lesprincipes posés
en matière derémunération
ne paraissent donc pasêtre appliqués
avec rigueur.(2)
Pourtitutionneléviter desde laredites, P.N.(role
ne duseraConseilpas abordésupérieur
icil'aspect
et du Conseilins¬provincial de la
P.N.)
le par. D. étant en partie consacré àl'analyse critique
de leur fonctionnement.(3)
DH ; dirham.Année s
j Type s
;de rémunération
1966 1967 1968 1969
!
jA
+B
1
!C
»
ÍD
89,8 9,4 0,8
91
6,8
2,28 9,7
8,7 1,6
90,5
7,5 j 2,0
! TOTAL
! 100,0 100,0 1C0 0 100,0
D'autre
part, iln'est
pas sans intérêt de noter que lesrares travaux effectués entrant dans la
catégorie D(non rémunérés)
concernent une zone
géographique
limitée où la part de la province de Ouarzazate est constammentprédominante
etreprésente même,
pour
l'année 1968,
la totalité des travaux de ce type :Années
!
!
! Provinces
1966 1967 1968 1969
! Agadir
47
j Kénitra
25! Ksar es Souk 31
t
j Ouarzazate 67
53 100 75J Tanger
«
2
•
TOTAL 100 100 100 100
0/ RESULTATS
OBTENUSD'après
les rapports annuels de la P.N. les résultatsobtenus de
1961
à1969
correspondraient aux chiffres suivantsd'emploi
à pleintemps(l).
1961 1962 1963 1964 1965 Í 1966 1967 ; 1968 1969
55474 54 058
19 392 19 395 55 250j 85
571;
78 460
j 78
o\COCO76 800
(1)
Survalentla baseà un deemploi250 joursannueldeà pleintravailtemps.annuel considérés commeéqui¬
(2)
niveauPour cesprévu
deuxauannées, Plan(98
lesl60
chiffressur la mêmecorrespondantbase de 250à environjours). 80$
duENRMA 100
Après
le recul des années1963
et1964,
les résultats s'amé¬liorent en
1965*
puis en1966
et, depuis cette date, plafonnent à un chiffre inférieur à 80 000 emplois à plein temps, correspon¬dant à un peu moins de 20 millions de journées de travail.
1) L'appréciation
de ces résultats quantitatifs ne peut se fairequ'en
fonction du chiffre-même approximatif -des disponi¬bilités en
main-d'oeuvre. Malheureusement,
tant les estimations du premier PlanQuinquennal(1960-1964)
qui les avait chiffrées à 150millions,
que celles del'enquête
menée en1964 à l'ini¬
tiative de la P.N. et
qui les ramène à 60
millions,
paraissent difficilement utilisables.Il est
généralement
admis que cetteenquête
a sous-estimé le chiffre des"disponibilités"(3).
Le Plan avance pourl'année 1967,
le chiffre de 80 millions de journées utilisables.Sur cette base
(qui
est plus un ordre de grandeurqu'une évaluation statistique),
la P.N. aurait donc absorbé le quart du sous-emploi rural, chiffre
non
négligeable
sans doute mais qui montre que,élément
de résor¬ption du sous-emploi rural, elle ne saurait à elle seule constituer
une solution globale au problème de
l'emploi,
2)
Un autre critèred'appréciation
est celui de son impactsur le
développement économique
: les travauxentrepris
peuvent-ils être considérés comme des investissements productifs ou non ?Sont - ils à maturation rapide ou lente?
Son programme
d'action privilégie
les domainesd'intervention
concernant
l'agriculture
et son environnement ainsi que les voies de communication, la priorité étant accrodée aux opérations inté¬grées
et de mise en val ur :"chaque
fois que cela est possible, il sera recherché la combi¬naison des actions destinées directement à la
production(plantation, aménagements
dessols)
avec celles qui y sont destinées indirec¬tement
(équipement
de petitehydraulique,
infrastructure etéquipe¬
ments
agricoles),
considérant lesopérations sociales(habitat,
équipement
communal,etc...)
comme secondaires et uniquementcomplé-
mentaires, compte tenu desimpératifs
de production et des(3)
auxal.Mieuxlité3,b.remarquesqualitativement différentevaudraitfaitesparlerci-dessusdu"sous-emploi
: dupar.chômage rural", "Observations
urbain.qui recouvreSepréalables",
reporterune réa¬limitées tant en crédits
qu'en
Pour les quatre dernières
de P.N.
s'analyse ainsi,
seloncadres
techniques"(1).
années connues, le bilan des travaux la nature des
travaux(2)
:Nature des travaux
1966 1967 1968 1969
! !
!Moyenne antérieure
t
!
Mise en valeur
Infrastructure
Equipement
58,7 58,4
22,946,2 37,5 16,5
58,4 28,0 15,6
56,9
55,9 7,2; 4i
!
40,5
; 18,5
1
TOTAL
%
100,0 100,0100,0 100,0
1
! 100,0
1 Total en nombre de
journées de travail 202l600()
I96ÏKXD 19747000
1956IOOC
;
Í
îSes
statistiques
fontapparaître
:- un accroissement
régulier (à l'exception
de1969)
du pour-centage
des journées de travail consacrées à la mise en valeur(51 %
en1961),
avecprédominance
de deuxcatégories
de travaux :petite et moyenne
hydraulique
avec25,7$,
D.R.S. et reboisementavec
15,5$
°> le reste étant constitué par les travaux destockage
des eaux, de lutte contre les
eaux, etc... j
- une
légère régression
des travauxd'infrastructure,
avec chute plus marquée en1968
; yprédominent
les travauxd'ouverture
et
d'aménagement
des pistes(respectivement
25 et6,9$);
- conformément aux objectifs de la P.N., une baisse continue des travaux
d'équipement.
La diminution très nette(supérieure
à 6$)
intervenue en1969
par rapport à1968
est due essentiellement à la suppression des chantiers de travauxmunicipaux.
(1)
PlanQuinquennal,
vol. II, op. cit. p. 175(2) D'après
les bilans établis par la P.N.- 15 -
ENRMA 100
Outre les
réalisations elles-mêmes,
un autre élément positifest à retenir : ils entraînent une redistribution des revenus en
faveur des populations rurales, surtout dans les zones les plus
défavorisées, d'où
une intensification de la circulation monétairedans les
régions
restéesjusqu'ici
particulièrementautarciques,
et une incitation à la création puis au
développement.
"
d'un marché intérieur
indispensable
à une production indus¬trielle