LA PASTEURISATION DES MIELS
M. GONNET, P. LAVIE
J. LOUVEAUX
Station
expérimentale d’Apiculture,
Centre de Recherches
agronomiques
du Sud-1?st,M ontfavet (Vaucluse)
Statiorz de Recherches sur l’Abeille et les Insectes sociaux, l3uyes-sur-Yvette
(Seine-et-Oise)
SOMMAIRE
La
pasteurisation
des miels est uneopération
courante dansplusieurs
pays et notamment au Canada et aux États-Unis. Les auteurs ont utilisé les installations de la miellerieexpérimentale
de1’l. N. R. A. en vue de déterminer l’intérêt
de cette
technique pourl’apiculture française.
De nom-breuses mesures et analyses ont
permis
d’évaluer avecprécision
les modificationsphysico-chimiques
et
biologiques qu’elle
fait subir aux miels en fonction de leurorigine
et de leurcomposition.
INTRODUCTION
Selon les estimations les
plus dignes
defoi,
la consommation du miel atteinten France environ 20 millions de
kg, soit, en gros, 5oo g par personne et par an. Ce
n’est donc pas un produit
de première
nécessité mais il est recherché pour sa supé-
riorité sur le sucre ordinaire tant du
point
de vuegustatif
que dupoint
de vue dié-tétique.
Son arôme, sonparfum
et le faitqu’il
renferme surtout des sucressimples
d’assimilation facile font que,
malgré
sonprix,
un vastepublic
en fait une consom-mation
régulière.
Une
augmentation progressive
de la consommation est souhaitée par l’ensemble desproducteurs
et il semblequ’elle
soit assez facilement réalisablemoyennant
un effortpublicitaire,
mais on nepeut espérer
la maintenir ensuite defaçon
durableque
si, parallèlement à cet effort,
on procède
à une amélioration de la qualité
des
produits
offerts au public. Or,
une enquête
effectuée il y a quelques
années à Paris
(B ORKECK
,
Louis etLouv!AUx, ig5g) a montré qu’il
restait beaucoup
à faire dans
ce domaine et que
beaucoup
de miels commercialisés dans lacapitale
étaient dequalité
très médiocre. C’estpourquoi,
vers la mêmeépoque,
nous avonsentrepris
d’étudier de
façon systématique les méthodes permettant
d’améliorer la qualité
et la
présentation
des miels. La miellerieexpérimentale
que l’I. N. R. A. installait à la Stationd’Apiculture
du C. R. A. du Sud-Est nousapportait
les moyens matérielsnécessaires à cette étude. Ce sont les résultats essentiels obtenus
depuis quatre
ansque nous
présentons
dans ce mémoirequi
fait suite à celui que nous avonspublié
dans cette même revue
(L AVIE
etLouvEAux, ig6i) pour exposer notre programme de recherches et décrire nos moyens de travail.
Pour discuter valablement de l’amélioration de la
qualité
desmiels,
il convient tout d’abord de définir lesprincipes
en fonctiondesquels
nous entendonstravailler,
ce
qui
nous amène àpréciser
les critères utilisés pourjuger
de laqualité
du miel.Indiquons
tout d’abord que nous ne prenons en considération que les facteurs de laqualité qui
sont sous ladépendance
du travail duproducteur
ou du transfor- mateur. Ceci revient à dire que nous mettrons sur unpied d’égalité
tous les mielsnaturels bien que, selon leur
origine florale, ils présentent
des caractéristiques physico- chimiques et organoleptiques
variables qui
font qu’ils
sont plus
ou moins appréciés
organoleptiques
variablesqui
fontqu’ils
sontplus
ou moinsappréciés
du consommateur.
On
peut,
à notreavis,
définir comme un miel de bonnequalité
un miel dont lateneur en eau n’excède pas
1 8, 5
p. 100.qui
ne contient pas departicules
solidesétrangères
d’une taillesupérieure
à 0,2 X 0,2 x 0,2 mm, dont le culot de centri-fugation
n’excède pas 0,35 ml parkg
maisqui
contientcependant
dupollen
en quan- tité normale(au
moins 200ograins
par gramme pour les miels lesplus pauvres), qui
neprésente
aucunsigne
de fermentation ni aucungoût
ou odeurparasite.
Ildoit se
présenter
sous unaspect physique défini,
soitliquide,
soit finement cristallisé.Il ne doit pas
présenter
lessignes
d’unchauffage
excessif(en
valeur absolue et endurée)
c’est-à-dire que sa teneur enhydroxyméthylfurfural (H.M.F.) doit rester
inférieure à 40
ygjg
et quel’amylase
ne doit pas être détruite.Les critères que nous venons d’énumérer nous
semblent,
dans l’état actuel denos
connaissances, parfaitement
suffisants pour définir unproduit sain,
propre, stable etd’aspect agréable. Sous réserve qu’il provienne
de plantes
fournissant un bon
nectar, il doit satisfaire les consommateurs les plus exigeants.
Il peut
être produit
dans toute
exploitation apicole travaillant avec un outillage
rationnel. En effet,
la teneur en eau
peut
êtreajustée
par passage des hausses en chambre chaude avant l’extraction et unepropreté rigoureuse peut
être obtenue par passage du miel surdes filtres très ordinaires.
Si tout
apiculteur soigneux et bien outillé peut,
en principe
et sans difficulté
technique importante préparer
un miel de bonne qualité,
il n’en est pas de même pour lacoopérative
ou pour l’industrielqui
doivent travailler sur desproduits
dequalité
variable et souvent médiocre. La
préparation
de grostonnages
d’un miel dequalité homogène pose des problèmes
difficiles à résoudre et il est certain qu’ils
ne peuvent
être abordés qu’avec
des méthodes appropriées.
Ce sont ces méthodes, applicables
essentiellement au stade du conditionnement par grosses
quantités,
que nous avons étudiées car ce sont ellesqui,
en fin decompte,
conditionnent une amélioration substantielle de laqualité
moyenne des miels du commerce.Toutes ces considérations nous ont amenés à concevoir l’unité
expérimentale
de conditionnement du miel que nous avons installée à Montfavet comme l’outil
répondant
aux besoins del’entreprise
moyenne traitantquelques
centaines de tonnes par an.L’emploi
dupasteurisateur
àplaques
à fonctionnementcontinu,
courant enAmérique
duNord,
nous est apparu deprime
abord comme la solution idéale pour l’obtention de mielsrépondant
aux normes dequalité
que nous nous sommesfixées,
notamment en ce
qui
concerne la stabilité de l’étatphysique
et l’absence de fer- mentation. L’examen des résultats obtenusjusqu’ici
nous montrera si nos vues étaientjustes
et si l’industrie du mielpeut
s’orienter vers sonemploi systématique
sans inconvénient grave.
MATÉRIEL
ETMÉTHODES
.-lprès
avoirrappelé
brièvement lescaractéristiques
dupasteurisateur
utilisé à Montfavet sansinsister sur les conditions
d’emploi précédemment
décrites, nousindiquerons quelles
sont les modi-fications que nous lui avons apportées
depuis
la rédaction de notre mémoire de ig6i(L AVIE
et Lou- VEAUX). Nous examinerons ensuite lescaractéristiques
des miels utilisés,puis
les méthodes depré-
lèvement et
d’analyse.
A. - MATÉRIEL
1
°)
Lepasteurisateur
Le
pasteurisateur
de la miellerieexpérimentale
de Montfavet est unappareil
àplaques
de mar-que A. P. ‘’. utilisé ordinairement en laiterie et ne comportant aucune modification de
principe.
x tant conçu comme un
appareil expérimental,
il comporte desdispositifs
permettant de faire varier à volonté la température du circuit d’eau chaude et du circuit d’eau froide, le débit de la pompe à miel et le volume du circuit dechambrage.
Enagissant
sur ces deux derniers facteurs, il estpossible
de réaliser un
grand
nombre de combinaisons et de faire varier trèslargement
le débit horaire. Les contrôles de température peuvent être effectués sur tous lespoints importants
de l’installation.La
température
depasteurisation
faitl’objet
d’unenregistrement
continu(fig. i).
Lapression
du mielen aval de la pompe
principale
est constamment connue ; un pressostat limite sa valeur maximumcompatible
avec la résistance et l’étanchéité des canalisations,lesquelles
sont en pyrex, cequi
per- met de suivre sans difficulté la marche desopérations.
Lesprélèvements
d’échantillons avant etaprès pasteurisation
sont renduspossibles
par des robinets convenablementplacés.
Depuis
a96i, nous avonsprocédé
à un certain nombred’aménagements.
C’est ainsi que la tem-pérature
de l’eau de refroidissement est désormaisréglée automatiquement
par thermostat et vanneélectromagnétique.
On a doncsupprimé
la commande manuelle insuffisammentprécise
etsusceptible
de
dérèglements inopinés.
Ledispositif
d’admission de la vapeur dans le circuit d’eau chaude a étécomplété
par un manomètre mieuxadapté
et une commande directe. Un filtre à maille de 3/io mma été installé en amont du
pasteurisateur
et un manchonmétallique
à maille de 2 fIo mm a étéplacé
dans le chambreur ; un manchon
supplémentaire
élimine à la sortie del’appareil
les dernièresimpu-
retés avant la mise en pot. Enfin, un débitmètre a été installé sur la canalisation d’amenée du miel,
ce
qui
permet de connaître par lecture directe, et nonplus
par le calcul, le débit del’appareil.
Il enrésulte une grande
simplification
duréglage
de la pompe d’alimentation.Toutes ces modifications sont intervenues
progressivement
et ce n’estqu’en
1963 que nous enavons bénéficié en totalité. Avant cette date, nous avons travaillé dans des conditions sensiblement moins favorables mais
qui
ne modifient en rien la valeur del’expérimentation,
sauf en cequi
con-cerne la filtration. Mais nous en tiendrons compte au moment de la discussion des résultats.
2
°)
Les miels utilisésL’expérimentation
dont nous apportons ici les résultats porte sur i500okg
de miel environ.Aucun essai n’a
porté
sur moins de 5ookg.
Au total, 22opérations
depasteurisation
ont été effectuées.Le tableau i donne les
principales caractéristiques
dechaque
lot.Signalons cependant
quecinq
B. - MÉTHODES 1
°) Pasteurisation
Tous les essais ont été effectués dans les conditions normales d’utilisation industrielle de
l’ap-
pareillage.
On a fait varier d’un essai à l’autre latempérature (6 5 0
- 70° -7 8°)
et le temps dechambrage ( 2
à r5minutes).
2
°)
Prélèvement et conservation des échantillonsLes
prélèvements
sont faits avantpasteurisation
au moyen d’un robinet situé à l’entrée del’échangeur
de température etaprès pasteurisation
à l’extrémité libre du circuit.Le temps qui
s’écoule entre les deux
prélèvements
est égal au temps de chambrage. On a ainsi la certitude que les deux échantillons sont très sensiblementcomparables.
Onprélève
18 échantillons de 500 g au cours dechaque
essai. Ces échantillons sontrépartis
comme suit :4
échantillons
pasteurisés
conservés à r4&dquo;, 4échantillons non
pasteurisés
conservés à z4o, 4échantillons
pasteurisés
conservés à la température ordinaire du laboratoire, 4échantillons non
pasteurisés
conservés à la température ordinaire du laboratoire,i échantillon
pasteurisé
eti échantillon non pasteurisé sont réservés aux contrôles immédiats. Tous les prélèvements sont
faits en pots de verre
soigneusement
lavés, rincés à l’eau distillée et séchés à l’étuve. Les pots sont ensuite bouchéshermétiquement.
3
°) Analyses
et contrôles diversa)
Cyistallisation.Pour
apprécier
la recristallisation, nous utilisons la méthode de WxiTEetal.,( 19 6 2 )
àpeine.
modifiée, c’est-à-dire que nous nous servons de l’échelle suivante comportant des notes de o à 10:
o —
liquide limpide,
z -
quelques
cristaux épars,z - trouble
léger homogène,
3
- trouble
prononcé homogène,
4
— couche de cristaux de 2à 5 mm
d’épaisseur
au fond durécipient
et formation de cristaux dans la masse,5
— couche de cristaux de 6 à 12 mm
d’épaisseur
au fond durécipient
et formation de cristaux dans la masse,6 — cristallisation de 25p. 100de la masse du miel,
- cristallisation de 50p. 100de la masse du miel,
8 — cristallisation de 75p. ioo de la masse du miel,
9
- cristallisation
complète souple
et fine,io - cristallisation
complète
dure etgrossière.
b)
Coloration.Nous utilisons pour la mesure de la coloration un
spectrophotomètre
/ouan «Spectral-Junior
»travaillant dans une bande
spectrale
allant de 35o à 750my avec une largeur de bandede
7 niii. Lescuves sont des cuves
parallélépipédiques
de o mmd’épaisseur.
Dix grammes de miel introduits dans des tubes àcentrifugation
sont portés à l’étuve à 70°pendant
3o minutes. Ceréchauffage
est indis-pensable
pour obtenir la refonte totale des cristaux deglucose.
Unecentrifugation
de 5 minutes à 2500 t/mn élimine toutes les bulles d’air. Le mielliquide
etlimpide
est transvasé dans la cuvedu
photomètre.
La lecture de la densitéoptique
est faite sous 4;o niy pour les miels clairs (1) et sous550iny pour les miels foncés. Bien entendu, le même traitement
s’applique
à tous les échantillons même s’ils ne présentent aucune trace de cristallisation.c)
Indice dey éf y action.
Les mesures sont faites au réfractomètre Abbé
(marque Zeiss).
La teneur en eau est obtenueen utilisant les tables de CHATAWAY
( 1954 ).
Les corrections de température nécessaires sont effectuées.d) pH.
La mesure du
pII
est faite au moyen d’unpH-mètre
« Methrom » E 196 S à électrode de verre.On utilise une solution de miel à io p. 100dans l’eau distillée bouillie et refroidie.
( 1
) De o à o,6o Dosous 45o my, un miel est considéré comme clair.
e) Teneur en sucres.
Le
dosage iodométrique
duglucose
est effectué selon la méthode de I3oucnul,T( 1917 ).
Noustravaillons sur une solution de miel à i p. 100et avec une
prise
d’essai de 10ml. Les résultats sontexprimés
en g de glucose pour 100grammes de miel.On détermine le rapport
glucose/eau
(G/E) défini par Aus2IN( 195 6) qui
permet deprévoir
assezbien la
rapidité
de recristallisation d’un miel. Les rapports inférieurs ou égaux à x,7ocorrespondent
à des miels à recristallisation très lente. Les rapports égaux ou
supérieurs
à 2correspondent
à desmiels à recristallisation
rapide.
La
chromatographie
de partage surpapier
nous apermis
d’effectuer un contrôlequalitatif
dessucres. Nous avons utilisé la méthode de MnUxIZIO
( 1959 )
et nous avonsemployé
une cuve pourchromatographie
descendante Shandon et dupapier
Wathman n° i.f)
Teneur en acides.Nous dosons l’acidité libre, les lactones et l’acidité totale par la méthode de !’VHtTE et al.,
(i 95 8)·
Les résultats sont
exprimés
enméq/kg
de miel.g) Hydroxyméthylfurfural (H.M.F.).
L’II.M.F. est dosé par la méthode
colorimétrique qualitative
etquantitative
mise aupoint
par l’un d’entre nous (GONNET, 1963). Les résultats sont
exprimés
en yg par g de miel.h) 1 nvertase.
GorrTnxsx
l
( 1957 )
aadapté
la microméthode dedosage
duglucose
de HAGEDORN et JENSEN(
1923
)
pour évaluer la teneur engluco-invertase
des miels. C’est cette méthode que nous avons retenue pour nosanalyses.
Les résultats sontexprimés
en mg de saccharose interverti en 2 heures par la diastase contenue dans 50mg de miel.i)
Amylase.La méthode que nous avons choisie est celle de SIIADE, Mnxscx et ECKERT
(x 95 8).
Les résultats sontexprimés
en ml d’amidon(solution
à i p.100 ) hydrolysé
en une heure par ladiastase
contenue dansx g de
miel.j)
Znhibine.Le
dosage
de l’inhibine, mis aupoint
par DOLD et WITZEhBnusE!v(i 955 )
etrepris
par GONNET et LAVIE( 19 6 0 )
a étéappliqué
sans modification. La souche bactérienne de référence est Bacillus subtilis cnxorr. Les lectures sont effectuées 24heuresaprès
l’ensemencement et les résultats sontexprimés
par une note de o à 5 avec uneapproximation
de o,z5.k) Fermentation.
Nous avons mis au
point
et utilisé pourquelques
échantillons un testqui
permet de reconnaître si un miel contient ou non des microorganismes vivantssusceptibles
de le faire fermenter. On intro- duit depetites quantités
de miel dans des flacons stériles et on les dilue avec de l’eau stérilejusqu’à
des teneurs en eau allant de 20 à 40 p. 100. Les flacons bouchés avec un tampon d’ouate stérile sont portés à l’étuve à z5!. On observe le
développement
des levuresqui
se traduit par un trouble de la solution et undégagement
gazeux.PRINCIPAUX
RÉSULTATS
La
présentation
desprincipaux
résultats obtenus a nécessité de notrepart
l’établissement d’un certain nombre de tableauxqui
ferontl’objet
d’un bref com-mentaire. Tous les
dosages
et toutes les notations ont été faits selon lesprincipes exposés au chapitre
matériel et méthodes. Il conviendra donc de se reporter
à ce
chapitre
pour la compréhension
des résultats. On consultera également
le tableau i
qui
regroupe toutes les données relatives aux différents miels utilisés.i)
Cristallisation(tabl. 2 ).
Miels du
groupe
A. - Ils’agit
de miels de Lavande et Lavandin à cristalli- sationrapide (voir le rapport G/E au tableau 4 )
ainsi qu’en témoigne
le comporte-
4 )
ainsiqu’en témoigne
lecomporte-
ment des échantillons témoins.
Malgré
cette facilité decristallisation,
unepasteu-
risation à7 8 0 pendant
6 à 8 minutes est suffisante pour le maintien de l’étatliquide
pendant
6 moislorsque
latempérature
de conservation est de 14°, etpendant
10 à r2 mois
lorsqu’elle
est de 20° environ. Les mielsayant gardé l’état liquide
pen-
dant un an à la température
de 20° sont ceux qui
ont été chauffés 8 minutes ou plus.
Au bout de 15 mois de
conservation,
on ne note encore quequelques
cristauxépars.
Les essais effectués à
65°
montrent que cettetempérature
nepermet guère,
mêmeavec un
temps
dechauffage
assezlong,
d’obtenir de bons résultats. Un début de recristallisation se manifestegénéralement
vers le3 e
mois.Miels du
groupe
B. - Ils’agit
de miels deBruyère (Evica cinerea) récoltés dans
les Landes
et qu’il
n’a pas été possible d’épurer
convenablement avant la pasteu-
risation. Dans le cas leplus favorable,
on nedépasse
pas 5 mois de conservation à l’étatliquide,
cequi peut
être considéré comme un échec. Cet échec est nettementimputable
auximpuretés trop
nombreusesqui
ont pujouer
le rôle de noyaux de recristallisation.Miels du
groupe
C. - Ces miels sont, paropposition
à ceux du groupe A des miels à cristallisation lente. On ne pourrajuger
des résultatsqu’après plus
d’un ande conservation.
2
)
Coloration(tabl. 3 ).
On ne note aucune modification de la coloration des
miels, quels qu’ils soient,
sous l’influence de la
pasteurisation
tout au moins dans la limite de sensibilité de notreappareillage.
C’est direqu’il
estimpossible
de noter uneprise
de coloration décelable à l’oeil.3
)
Teneur en eau(tabl. 3 ).
Il ressort nettement de la lecture des résultats obtenus
qu’on
nepeut
noteraucune modification
systématique
de la teneur en eau sous l’influence de lapasteu-
risation.4
) pH (tableau 3 ).
Le
pH
des miels n’est pas affecté par lapasteurisation.
Lesquelques
variationsobservables,
d’ailleurs trèsfaibles,
sont de toute évidence dues au hasard.5
)
Acidité(tabl. 3 ).
Les
quelques
variations dans l’aciditétotale,
l’acidité libre et les lactones que l’on constate à la suite de lapasteurisation
se font aussi bien dans le sens d’uneaugmentation
que d’une diminution. Elles sont vraisemblablement enrapport
avec la méthode dedosage
utilisée ou avecl’hétérogénéité
résiduelle des échantillons.6)
H. M. F.(tabl. 3 ).
Lorsqu’il
y a modification de la teneur enH.M.F.,
elle se faittoujours
dansle sens d’une
augmentation.
Celle-ci atteint au maximum 5,5[L g/g
pour les échan- tillons6 1/ 6 2
et43/ 6i.
Onpeut
donc la considérer commepratiquement négligeable.
7
)
Sucres(tabl. 4 ).
Les
dosages
deglucose
avant etaprès pasteurisation
montrentqu’il peut
y avoir une trèslégère
modification de la teneur englucose
de certains miels. Outre que cette modification est trèsfaible,
on noteraqu’il
estimpossible
dedégager
unrapport
net entre l’évolution et unecaractéristique
donnée du miel. Parailleurs,
les contrôles
opérés
parchromatographie
surpapier
n’ont paspermis
de décelerde
changement
dans lacomposition
en sucres des miels sous l’influence de lapasteu-
risation.8)
Invertase(tabl. 5).
La
pasteurisation
du miel provoquetoujours
une chuteimportante
de l’activité de l’invertase. Cette chute est enrapport
direct avec latempérature
depasteuri-
sation et, d’une manière
moindre,
avec letemps
depasteurisation (fig. 2 ). On note
en effet que la
perte
d’activité esttoujours plus
forte à7 8 0 qu’à 70 °
ou65°,
cequi
est
logique.
Par contre, on constate que tous les miels neréagissent
pas de la mêmefaçon ;
il semble que laperte
d’invertase soit d’autantplus importante
que l’acidité totale estplus
forte. La teneur en eau et lepH peuvent également jouer un rôle.
9
) Amylase (tabl. 5 ).
On constate que
l’amylase
estbeaucoup
moins sensible à l’élévation detempé-
rature que l’invertase. Pour atteindre une
perte
d’activité de l’ordre de 50 p. 100, il faut chauffer à7 8°.
Pour un mêmemiel,
l’inactivationpartielle
del’amylase
esten
rapport
avec latempérature
et letemps
depasteurisation (fig. 3 ). Pour des miels
différents,
on note une relation étroite entre lacomposition
et le taux d’inactivation.Par
exemple,
l’échantillon6 0/ 6 2
chauffé 6 minutes 33s à7 8°
n’aperdu
que 7 p. 100 de sonamylase, perte identique à celle du miel 10 6/6 3
chauffé 5 mn 25 s à 70 ° ;
le
miel 103 /6 3
chauffé 5 mn 25 s à 7 8 0
a perdu
par contre 26 p. 100 de son amylase.
Il semble que les
pertes
lesplus
fortes se rencontrent chez les mielsqui
ont lepH
leplus
bas.Cependant,
aucune relation évidenten’apparaît
entre l’affaiblisse ment dupouvoir diastasique et la teneur en eau ou l’acidité totale (tabl. 6).
10
)
Inhibine(tabl. 5 ).
I,’affaiblissement du facteur
antibiotique
estproportionnel
à l’intensité du chaul-fage.
La note baisse de 0,50 à 0,75point pour,-une pasteurisation à 7 8°,
de 0,25 à
0
,5
0
point
à7 0 °
et de o à 0,50point
à65°.
Letemps
depasteurisation
ne sembleguère
avoir d’influence sur le résultat final. Les miels dont lepH
est leplus
élevéprésentent
lespertes
d’inhibine lesplus importantes, donnée déjà acquise par GONNET
et LAVIE (ig6o).
(ig6o).
il)
Fermentation(tabl. 7 ).
Les levures du miel sont aisément détruites par
chauffage.
Nous n’avons pas noté de fermentation(même
pour une dilution maximum à 40 p. 100d’eau)
avecdes miels
pasteurisés
de 2mn 19 s à 14mn 10 s à7 8 0
C et de 5 mn 24s à 14mn 10 sà
70! C.
Par contre, unepasteurisation
à6 5 °
C est insuffisante pour écarter tousrisques
de fermentation. Le tableau 7 donne l’ensemble des résultats obtenus.DISCUSSION
I,’ensemble
des résultats obtenusjusqu’ici
par lapasteurisation
des miels nousfournit somme toute un tableau
encourageant.
les contrôles effectués à l’heure actuellepermettent
de tirer les conclusions suivantes :1
°)
Le mielpasteurisé
n’est pas altéré dans l’essentiel de sacomposition.
Iln’y
a pas formationimportante
d’H.’:VT.F’. comme on aurait pu le craindre. Il y acertes un affaiblissement des
diastases, plus
fort pour l’invertase quepour l’amylase,
mais
l’amylase
n’est pas détruite dans desproportions
tellesqu’on puisse
redouterune
dépréciation
du miel aux yeux de certains utilisateursétrangers particulièrement pointilleux
sur cettequestion.
Lepouvoir
antibactérien est àpeine
réduit. Sous réserve de rester dans les limites d’untemps
depasteurisation
de l’ordre de 6 minutes et de ne pasdépasser 7 8°, il n’y
a pas dégradation
du miel. Des études sont encore
nécessaires pour rechercher si une
pasteurisation
à moins de7 8°
resterait suffisam- ment efficace. Dansl’affirmative,
il seraitpossible
de réduire encore le taux d’affai- blissement des diastases.2
°)
Lapasteurisation
stabilise le miel à l’étatliquide
pour unepériode
de6 à 8 mois sous réserve
qu’on
ne traitequ’un
miel bienépuré
etqu’on
n’utilise que desrécipients
lavés. Nous insistons sur cepoint
carl’expérience
nous a montréqu’il
y a de
grandes
différences de stabilisation selon que l’on introduit ou non des pous- sières dans le miel au moment de la mise enpots.
3
°)
Le mielpasteurisé
estgaranti
contre toute fermentation ultérieure. Sa conservationpeut
donc se faire dans les meilleures conditions. Nous sommes doncen mesure de confirmer dans leur ensemble les résultats obtenus sur le
plan technique
par nos
collègues
nord-américains etqui
ont étéexposés
defaçon synthétique
par TOWNS E
ND
(ig6i)
ainsi que par MORSE( 19 6 1 ).
Parailleurs,
nous avons pu montrerqu’une pasteurisation
conduite defaçon
rationnelle nepeut
que valoriser les miels.Contrairement à ce
qu’on pouvait craindre,
elle se révèleparfaitement compatible
avec les
exigences
de la loifrançaise. Quelques
réserves sont à faire en cequi
con-cerne les miels destinés à
l’exportation ;
un affaiblissementimportant
de l’inver- tase, seuleconséquence
notable del’opération, risque
d’être considéré actuellement dans certains pays voisins de la France conunepréjudiciable
à laqualité
du miel.Il est
d’ailleurs possible qu’à
l’avenir l’attitude de ces pays se modifie sensiblementcar elle repose
plus
sur des donnéessubjectives
que sur des faitsscientifiquement
établis.L’apiculture française devrait donc pouvoir
faire un usage de plus
en plus important
des méthodes de conditionnement du miel faisant appel
à lapasteurisa- tion, tout au moins pour le traitement de quantités importantes
de produit.
Reçu pour
publiratiou
fi)féarier
i96.!.SUMMARY
l!ASTI!tTRIZATION OF HONEY
7’he observations were conducted at Montfavet where the
pasteurizer
of theexpsrimentat honey processing plant
hasundergone
certainimprovements
since 196 The series ofexperiments
was carried out on a
approximately
1!,000 kg ofhoney
and during its course 22pastcurizations
were effected.
Analysis
andinspection
were carried out in accordance with the methods described.They
showed that the basiccomposition
ofpasteurised honey
is not altered : there is nosignificant
H.M.F. formation, and the
amylase
is not sufficientlydestroyed
to feardegradation
of the honey.Such
degradation
can b2preventedby keeping
the time ofpasteurization
down to about 6 minutesand the temperature below 780C. Pasteurization stabilizes honey in the liquid state for 6 to 8 months,
provided
thatonly suitably purified honey
is treated and that the vessels arethoroughly
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