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Patients présentant un trouble d’usage de l’alcool : quel accompagnement ?

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Patients présentant un trouble d ’ usage de l ’ alcool :

quel accompagnement ?

Alcool : sevrage ou diminution du risque ?

Abstinence après sevrage et réduction majeure de la consommation d’alcool sont deux notions différentes, qu’il nous a paru utile d’expliciter pour mieux comprendre les conditions d’utilisation des médicaments dans ces indications, et déterminer l’efficacité comparée de ces deux stratégies.

La notion « d ’ alcoolisme » a été portée par une norme sociale

Un modèle moral répandu depuis la seconde moitié du XIXe siècle considérait que l’addiction du buveur dépendant de l’alcool entraînait une désocialisation. L’objectif était donc de supprimer l’addiction, dans le cadre d’un « alcoolisme maladie » :

– la maladie est une entité unidimensionnelle, clairement distinguée de l’absence de maladie sans zone grise intermédiaire ;

– la cause de la maladie est essentiellement biologique ;

– la caractéristique clinique principale de la maladie est l’incapacité de contrôler la consommation d’alcool après la prise d’un premier verre ; – la maladie est irréversible, incurable, et ne peut être l’objet que d’un traitement palliatif au moyen de l’obtention de l’abstinence ;

– la maladie serait également caractérisée par le déni, qui se manifeste par des efforts de minimisation et de dissimulation[3].

Le sevrage désigne donc une abstinence totale

L’abstinence totale a longtemps été considérée comme l’idéal à atteindre pour tout buveur d’alcool. Cela s’est inscrit dans une mesure hygiéniste et paternaliste, dans laquelle la dépendance à l’alcool, souvent perçue comme corollaire de la misère, nécessitait un « retour à la norme ».

Des données pour décider en médecine générale

1Les questions auxquelles répond ce dossier peuvent être retrouvées dansBibliomedn° 866 du 8 octobre 2017, 867 du 15 octobre 2017, 876 du 15 janvier 2018.

C

es dossiers sont issus de textes publiés chaque semaine dans Bibliomed1. Actualisés si nécessaire en fonction des données les plus récentes, ils ne résultent pas d’une revue systématique de la littérature, mais d’une veille documentaire en continu des principales revues médicales publiant des études fondées sur les preuves, ou des recommandations en résultant. Ils ont pour ambition de fournir au médecin généraliste une actualisation des données sur les questions pertinentes pour leur pratique retenues par le comité de rédaction1.

STRATÉGIES

ÉDECINE

Marie Françoise Huez-Robert, Éric Drahi, Pascal Menecier, Yves Le Noc Societe Franc¸aise de Documentation et de Recherche en Medecine Generale yveslenoc@icloud.com

Tires à part : Y. Le Noc

Résumé

La consommation de boissons alcooli- sées est une composante importante des pratiques culturelles françaises et de certaines formes de sociabilité.

Outre l’impact en termes de morbidité et de mortalité, son mésusage a des conséquences sociales majeures dans les sphères privée et professionnelle : délits et violences, accidents du travail, absentéisme par arrêts répétés ou de longue durée, baisse de concentration, perte globale de pro- ductivité, etc. [1].

Au-delà des débats entre sevrage ou réduction de la consommation l’ac- compagnement thérapeutique a pour objectif d’améliorer la santé des patients souffrant d’un trouble d’usage de l’alcool [2]. Il apparaît nécessaire de s’appuyer sur des interventions, médi- camenteuses et psychosociales, éva- luées comme efficaces pour

accompagner des processus de chan- gement des consommations problé- matiques.

Mots clés

troubles liés à l’alcool ; alcoolodépendance ; sevrage alcoolique ; abstinence alcoolique ; baclofène ; soutien psychosocial ; accompagnement.

Abstract. Patients with alcohol use disorder: What support?

The consumption of alcoholic bevera- ges is an important component of French cultural practices and certain forms of sociability. It is associated with major health and social risks. In addi- tion to the impact in terms of morbidity and mortality, its misuse has social consequences in private and profes- sional spheres: Crime and violence, work accidents, absenteeism by repeated or long-term stoppages, concentration decline, overall loss of productivity etc. [1].

Beyond the debates between with- drawal or reduction of consumption, therapeutic support aims to improve the health of patients suffering from

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an alcohol use disorder [2]. It appears necessary to rely on interventions, drug and psychosocial, evaluated as effec- tive to support processes of change problematic consumption of alcohol.

Key words

alcohol related disorders; alcohol dependence; alcohol withdrawal;

abstinence alcohol; baclofen; care.

DOI:10.1684/med.2018.336

Plus récemment, les travaux autour des toxicomanies dans la lutte contre le SIDA ont proposé une stratégie de réduction du risque, à travers une consommation modérée et contrôlée,

À côté d’une vision « externe », le patient que l’on sèvre, la réduction du risque repose sur la construction avec le patient d’une consommation maîtrisée, sans que ces deux notions s’excluent mutuellement.

Qu ’ en est-il de l ’ ef fi cacité de ces deux stratégies ?

L’étude UKATT [4] a comparé, lors d’un essai randomisé pragmatique, l’efficacité des deux stratégies, sevragevs.réduction de la consommation. Le choix de la stratégie était laissé au patient.

Les résultats à 3 et 12 mois de suivi ont été enregistrés à la fois en termes de catégories (abstinence/pas de problème/

très amélioré/un peu amélioré/même consommation/

consommation pire) et sur des mesures continues (pour- centage de jours abstinents, boissons par jour de consommation/score de dépendance).

Les patients déclarant initialement une préférence pour l’abstinence ont montré un meilleur résultat que ceux indiquant une préférence pour la non-abstinence.

Ce meilleur résultat a été plus net à 3 mois de suivi mais encore évident à 12 mois. Le meilleur résultat consistait presque entièrement dans une plus grande fréquence de journées abstinentes avec seulement un bénéfice modeste de l’intensité de la consommation d’alcool par jour pour les patients ayant opté pour l’abstinence, différence disparaissant après ajus- tement sur les covariables (sexe, nombre de verres par jour, pourcentage de jours abstinents, score de dépendance. . .). Le type de résultat réussi (abstinence/

boisson sans problème) a été lié à la préférence initiale des objectifs : succès de la stratégie à 3 mois pour les patients ayant choisi la stratégie de la réduction (38/301),vs. choix de l’abstinence (76/350) (OR 1,92-2).

La publication de Beglund, plus récente, confirme que le choix initial du patient pour l’abstinence a plus de chance de succès que la réduction de consommation [5].

Ces études ne précisaient par les techniques d’interven- tion proposées par les thérapeutes. Il existe vraisembla- blement des biais dans le suivi des patients en rapport avec leur choix de stratégie, ceux ayant choisi l’abstinence ayant peut-être un suivi plus rapproché.

Le NICE recommande la stratégie suivante [2]

L’abstinence est l’objectif approprié pour la plupart des personnes souffrant de dépendance à l’alcool et les personnes qui abusent de l’alcool et ont une importante comorbidité psychiatrique ou physique (par exemple, la dépression ou une maladie du foie liée à l’alcool).

Lorsqu’un patient préfère un objectif de modération, mais qu’il existe des risques élevés, conseiller fortement que l’abstinence est la plus appropriée, mais ne pas

refuser le traitement aux utilisateurs qui ne sont pas d’accord avec un but d’abstinence.

Pour une consommation nocive ou une dépendance légère, sans comorbidité significative, et s’il existe un soutien social adéquat, considérer un niveau modéré de consommation comme objectif de traitement, à moins que le patient préfère l’abstinence ou qu’il existe d’autres raisons de conseiller l’abstinence.

Pour les personnes souffrant d’une forte dépendance à l’alcool, ou ceux qui abusent de l’alcool et ont une comorbidité psychiatrique ou physique, mais qui ne veulent pas considérer un objectif d’abstinence ou s’engager dans un traitement structuré, envisager un programme de réduction des risques. Cependant, enfin de compte, le patient devrait être encouragé à viser un but d’abstinence.

Lors de l’élaboration d’objectifs de traitement, considérer que certaines personnes qui abusent de l’alcool peuvent être tenues de s’abstenir dans le cadre d’une ordonnance ou d’une peine de justice.

Pour la pratique

Le choix initial partagé du patient reste un élément clé de la décision de sevrage ou simple réduction de la consommation.

L’abstinence est l’objectif approprié pour la plupart des personnes souffrant de dépendance à l’alcool et les personnes qui en abusent et ont une importante comorbidité psychiatrique ou physique.

Pour une consommation nocive ou une dépendance légère, sans comorbidité significative, et s’il existe un soutien social adéquat, un niveau modéré de consom- mation comme objectif de traitement peut être envisagé, à moins que le patient ne préfère l’absti- nence ou qu’il existe d’autres raisons de conseiller l’abstinence.

Mais il convient de préciser quel soutien psycho-social mettre en place susceptible de favoriser le maintien du sevrage ou la baisse des consommations et aider le patient à agir sur son addiction.

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Baclofène et alcoolodépendance : béné fi ces/risques ?

Le baclofène a bénéficié en 2014 d’une recommanda- tion temporaire d’utilisation (RTU) dans l’indication baisse de la consommation ou maintien du sevrage alcoolique. L’efficacité et le risque d‘effets secondaires font depuis toujours débat aboutissant, à la suite d’un rapport de l’ANSM, CNAM TS et INSERM [6], à une modification du protocole de la RTU[7]. Fin mai 2018 l’ANSM, sur la base des données disponibles, poursuit une surveillance renforcée. Quel est le rapport bénéfices/

risques ?

Ef fi cacité et sécurité. ATU 2014

Une revue de 3 essais comparatifs a évalué l’efficacité du baclofène vs. placebo sur la dépendance à l’alcool sur des échantillons restreints : 84-80 et 39 patients[8].

Deux essais ont montré dans les groupes baclofène (30 mg/j) vs. placebo des différences significatives des taux d’abstinence et du nombre de jours cumulés d’abstinence :

– dans le premier essai (n = 84) : respectivement 71 %vs.

29 % et 62,8 jours5,4vs.30,85,5 (p = 0,001) ; – dans le deuxième (n = 39) : 70 %vs. 21,1 % et 19,6 jours 2,6vs.6,62,4 (p<0,005).

Les effets anxiolytiques étaient plus importants dans les groupes baclofène et les comportements compulsifs (craving)moins fréquents.

Mais ces études présentaient de nombreuses limites : données manquantes, variabilité des données entre laboratoires, choix de différentes benzodiazépines addi- tionnelles pour le traitement des troubles anxieux.

Dans un troisième essai en double aveugle (n = 80) il n’y avait pas de différence significative entre les pour- centages de jours de forte consommation 19,3 % vs.

24,7 % (p = 0,73) et de jours d’abstinence 51,7 % vs.

51,6 % (p = 0,61).

Une étude précédente observationnelle[9]avait évalué l’efficacité du baclofène à dose croissante de 5 à 330 mg/j sur 100 patients alcoolo-dépendants et résistants aux traitements habituels, tous considérés à haut risque compte tenu de leur consommation (>60 g/j chez l’homme et 40 g/j pour les femmes). 84 % et 62 % étaient devenus à risque faible ou modéré respective- ment à 3 mois et 2 ans avec une relation dose dépendante significative. Parallèlement 59 % des patients présen- taient des troubles de l’humeur (anxiété, dépression, troubles psychotiques, troubles du sommeil) avec pour conséquence un effet moindre du traitement mais contrebalancé par un effet positif des BZD ou des psychotropes. 88 % ont rapporté des effets indésirables variés, tous bénins (troubles du sommeil, essoufflement, nausées, troubles sensoriels, troubles sexuels. . .) indé-

pendants de l’importance du traitement et de l’existence ou non de troubles mentaux antérieurs.

Depuis 2013

Plusieurs essais randomisés ont évalué l’efficacité du baclofène à différentes dosesversusplacebo.

Baclad (n = 56)[10]. Baclofène à dosefinale individualisée de 30 à 270 mg. À 12 semaines respectivement dans les groupes traitement (GT) et placebo (GP) 68,2 % vs.

23,8 % d’abstinents (p = 0,014) et 67,8vs.51,8 de jours cumulés d’abstinence.

Alpadir [11]: essai français (n = 320 ; six auteurs dont deux avec conflits d’intérêts). Baclofène à dose progres- sive sur 17 semaines jusqu’à 180 mg/j. 10,5 % et 11,9 % d’abstinents pendant 20 semaines consécutives respecti- vement dans le GP et le GT à haute dose (OR 1,20 (0,58- 2,5) ; p = 0,618). Au bout de 6 mois la baisse de consommation en faveur du baclofène n’était pas statistiquement significative. Le « craving » avait signifi- cativement diminué.

Beraha (n = 151)[12]. Baclofène 30 mg/jvs. fortes doses jusqu’à 150 mg/j etvs.placebo après un sevrage de 7 à 21 jours. Il n’y pas de différence entre les 3 groupes sur le délai jusqu’à la première alcoolisation, la consommation d’al- cool par jour à 16 semaines, le pourcentage de patients qui rechutent, le taux d’abstinents. Un petit effet dose réponse est observé dans le groupe forte dose montrant un temps plus long pour une rechute d’alcoolisation.

Une autre étude (n = 64)[13]a comparé l’efficacité du baclofène 50 mg/j au placebo. 62 % des patients ont été suivis 12 semaines et 37 % un an. Pas de différence significative entre le baclofène et le placebo.

Une récente mise à jour Cochrane en 2017[14], à partir d’une revue de 98 articles, a retenu 3 essais contrôlés randomisés, dont 2 déjà inclus dans la précédente synthèse de 2015 et un essai ouvert de 2016. Elle a totalisé 141 participants sans pouvoir faire une méta- analyse : baclofène vs. placebo (n = 31) en 2011, baclofène vs.diazepam (n = 37) en 2006 et baclofène vs.chlordiazépoxide (n = 60) en 2016.

Dans aucune de ces études il n’y a de différence entre les groupes sur l’échelle des symptômes de sevrage d’alcool (CIWA-AR scores) (évidence de très basse qualité). Seule l’étude vs. chlordiazépoxide a évalué l’amélioration clinique globale, sans différence significative entre les deux groupes. Aucune n’a évalué l’efficacité sur la diminution du « craving ».

Les effets secondaires

Au vu de la récente étude épidémiologique de l’ANSM, CNAM TS, INSERM[6]le profil de sécurité du baclofène est préoccupant avec, notamment aux fortes doses, une augmentation des hospitalisations et surtout des décès par comparaison aux autres traitements des problèmes de l’alcool.

Affaire à suivre. . .

Des données pour décider en médecine générale | Patients présentant un trouble dusage de lalcool : quel accompagnement ?

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Accompagnement psychosocial en alcoologie : quelles modalités pour quelle durée ?

L’accompagnement thérapeutique en alcoologie a pour principal objectif le mieux-être de la personne. Le changement de consommation d’alcool (diminution ou arrêt) n’est pas l’objectif des soins, mais une modalité pour y parvenir, en référence à la définition historique de l’état de santé comme un état de bien-être complet physique, mental et social. Ce modèle, toujours valide ne se limite pas à l’absence de maladie et souligne la place essentielle d’objectifs d’amélioration de qualité de vie dans les soins en alcoologie.

Au-delà des débats entre sevrage et réduction de consommation la question du maintien de l’abstinence ou du processus de changement de consommation d’alcool, relève avant tout d’une offre d’accompagne- ment psychosocial, parfois soutenue par des moyens médicamenteux. Si la notion d’alcoolisme reste ancrée dans le champ médical, la maladie alcoolique n’est pas une maladie comme les autres ; elle intègre un triple aspect somatique, psychologique et social, dans sa présentation comme dans les soins qu’elle requiert.

Cette triple conception doit aussi guider les offres de soins, qui après avoir intégré les aspects somatiques, concernent le développement d’interventions psycho- sociales[15].

Quel accompagnement, pour qui ?

L’accompagnement du sujet plutôt que la prise en charge du trouble (qui peut tendre vers celle de la personne), apparaît le meilleur modèle de soin en addictologie. Ce mode de soin relationnel favorise la notion de compé- tence et d’autonomisation de la personne dans un

contexte de relation de dépendance à un produit : l’alcool.

S’il envisage d’abord le sujet mésusant d’alcool, l’accom- pagnement psychosocial en alcoologie ne peut oublier les entourages, familiaux, amicaux, professionnels. . . Inté- grés dans des approches inspirées de thérapies systémi- ques ou familiales, l’accompagnement des tiers peut aussi être dissocié entre plusieurs professionnels d’une même structure de soin.

Alors que près de 50 % des sujets relevant de troubles addictifs avec l’alcool règlent leurs difficultés sans l’aide de personne [16], l’accompagnement psychosocial en alcoologie apparaît utile à certains, mais pas à tous. Ce constat doit rappeler humblement la place utile mais relative des soignants, tout en soulignant la position d’expert du patient, ainsi que ses propres ressources d’auto-changement. De plus, à côté des professionnels, n’oublions pas la place des associations d’entraides d’usagers ou de malades de l’alcool, dont leur rôle lors d’accompagnement surtout groupaux des malades ou entourages(Grade C)[15].

Modalités d ’ accompagnement

La seconde conférence de consensus française en alcoologie de 2001 [15]a ciblé les moyens de l’accom- pagnement et les modalités du soutien psychologique.

Les différents référentiels de psychothérapie se répar- tissent entre inspirations psychanalytiques, thérapies cognitivo-comportementales et motivationnelles, approches systémiques, corporelles ou médiatives [17, 18]. Si aucune priorisation de choix entre ces modalités n’a jamais pu être étayée, seules les secondes ont bénéficié d’évaluation(Grade A)[17]. Plus généra- lement, l’intérêt des thérapies de groupes à côté des approches individuelles est régulièrement souligné (Grade C)[17].

Plus récemment, les recommandations de bonnes prati- ques de la Société Française d’Alcoologie [17] ont souligné la place prééminente des interventions psy- chosociales dans les traitements. Pour cela, l’instauration d’une alliance thérapeutique est la première étape des soins[18], pour laquelle, la priorisation des choix du sujet en termes de réduction ou d’arrêt de consommation d’alcool est soulignée (Grade B), même s’ils divergent d’avis d’experts professionnels.

L’accompagnement du sujet relevant de troubles de l’usage d’alcool, concerne la période avant ou vers un sevrage (de l’aller-vers au soutien motivationnel vers le changement), comme celle après un sevrage, parfois appelé « suivi » dans l’aide au maintien de l’abstinence alcoolique[15]. Il ne doit pas négliger l’accompagnement en dehors du sevrage, non requis (en dehors d’alcoolo- dépendance) ou non voulu par le sujet (comme une étape intermédiaire des soins), approchant ainsi les notions de réduction des risques ou des méfaits(Grade A)[17]. Dans ce dernier registre la place d’interventions brèves en alcoologie, complétant le repérage précoce des troubles, mérite d’être rappelée (Grade A) [19], comme une compétence des infirmiers à côté de celle de médecins

Pour la pratique

En 2017 comme en 2013, la démonstration de l’efficacité du baclofène dans le maintien du sevrage ou la baisse des consommations d’alcool n’est pas établie. Ceci est associé à de nombreuses contre- indications et des interrogations sur des effets secondaires graves mais peu fréquents.

Par contre, ces études soulignent le rôle important du soutien psychosocial et de la détermination du patient.

Dans ce contexte l’ANSM rappelle qu’il est particuliè- rement important de déclarer tout effet indésirable susceptible d’être dû au baclofène, en précisant alors que le patient est pris en charge dans le cadre de la RTU baclofène pour assurer au mieux le suivi de la tolérance d’administration du baclofène prescrit selon les modalités de cette RTU [2].

(5)

Acteurs et durée de l ’ accompagnement

Les acteurs de l’accompagnement en alcoologie peuvent être spécialisés dans le domaine, en Unités Hospitalières ou en Centres de Soins d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie (CSAPA). Dans les faits, ils sont d’abord non spécialisés parmi tous les acteurs de soins primaires entre médecins généralistes ou spécia- listes et paramédicaux de première ligne auprès des malades de l’alcool.

Les soins en alcoologie abordent une forme de maladie chronique [20], dans l’approche la plus sanitaire de la question, qui de ce fait requiert un travail psychique et du temps pour se développer. Il a pu être modélisé entre une prise en charge initiale soutenue dans les premières semaines, puis une phase de consolidation d’au moins 6 mois, avant une phase de surveillance du maintien de consommation contrôlée ou d’abstinence [20]. L’effica- cité des interventions, souvent invoquée en santé publique, ou considérée sous l’angle de l’efficience pour en intégrer des aspects financiers, reste à ce jour, non encore définitivement évaluée.

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Liens d’intérêts : les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt en rapport avec de cet article

RÉFÉRENCES

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5. Berglund KJ, Svensson I, Berggren U, Balldin J, Fahlke C. Is There a Need for Congruent Treatment Goals Between Alcohol-Dependent Patients and Caregivers?

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Pour la pratique

Le soin en alcoologie est multimodal, principalement non pharmacologique. Ce soin relationnel se déve- loppe selon les compétences de base de chaque soignant, médical ou paramédical. Il s’adapte à la situation de chaque patient dans un registre d’accom- pagnement motivationnel et clinique. À côté de la prise en compte des besoins physiques et somatiques, les dimensions psychosociales sont essentielles, rele- vant d’approches complémentaires entre les métiers du soin et du prendre soin, à l’idéal en interdisci- plinarité.

L’accompagnement psychosocial en alcoologie débute avant même le changement de consommation (ou le sevrage alcoolique), pour s’intensifier à ce moment, perdurer ensuite dans des objectifs de maintien des bénéfices obtenus pour le sujet et ses entourages.

Patients présentant un trouble d ’ usage de l ’ alcool : quel accompagnement ?

L’abstinence est l’objectif approprié pour la plupart des personnes souffrant de dépendance à l’alcool mais en cas de dépendance légère, sans comorbidité significa- tive, et s’il existe un soutien social adéquat, le choix initial partagé du patient est un élément clé de la décision de sevrage ou simple réduction de la consom- mation d’alcool.

L’efficacité du baclofène dans la réduction de la consommation d’alcool chez les patients adultes présentant une dépendance à l’alcool et une consom- mation d’alcool à risque élevé fait l’objet de nombreux débats. De nombreuses contre-indications et des interrogations sur des effets secondaires peu fréquents mais potentiellement graves justifient un suivi ren- forcé et la poursuite des études pour évaluer le rapport bénéfices/risques.

Le soin en alcoologie est multimodal, principalement non pharmacologique. L’accompagnement psychoso- cial est la première mesure avant même le changement de consommation

Des données pour décider en médecine générale | Patients présentant un trouble dusage de lalcool : quel accompagnement ?

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• Novembre 2017

• 14,5 x 21 cm, 168 pages

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