E´DITORIAL / EDITORIAL
Avec ce nume´ro, la revueObe´site´a trouve´ son cap, si ce n’est sa vitesse de croisie`re. De conside´rations physiopathologiques (mieux comprendre le tout de´but du de´veloppement du tissu adipeux) en perspectives sociologiques (faire face a` la stigmatisation), nous vous proposons une re´flexion originale sur une maladie qui continue a` de´concerter en de´pit d’avance´es scientifiques multiples.
L’hypothe`se de la programmation ante´natale des maladies constitue probablement une des clefs pour mieux appre´hender la redoutable re´alite´ de l’obe´site´. Ainsi, les changements conduisant a`
une adiposite´ excessive pourraient eˆtre programme´s avant meˆme la naissance,in uteroou au cours des premiers mois ! La nutrition, lors de ces pe´riodes critiques, modifierait certaines fonctions me´taboliques de fac¸on durable et ce conditionnement serait e´ventuellement transmissible aux ge´ne´rations suivantes. Ge´ne´tique, e´pige´ne´tique, effets de la croissance pre´coce, les frontie`res de l’inne´ et de l’acquis deviennent floues. Les acides gras polyinsature´s de notre alimentation, ou plutoˆt l’e´quilibre ome´ga 6-ome´ga 3, seraient susceptibles d’influencer conside´rablement le de´veloppement des adipocytes puis l’adipogene`se, comme le propose G. Ailhaud. Une hypothe`se
« prote´ines » avait de´ja` e´te´ e´voque´e par M.-F. Rolland-Cachera.
Le discours me´dical n’a pas encore pris en compte ces bouleversements conceptuels. Certes, d’un coˆte´ on s’interroge sur la responsabilite´ de ces facteurs pre´coces, et les incertitudes sont grandes encore, mais de l’autre on conside`re toujours la personne obe`se comme coupable d’avoir trop longtemps laisse´ s’installer un bilan e´nerge´tique positif. Les messages de pre´vention, largement diffuse´s dans notre socie´te´ : « manger moins ou mieux et bouger plus » sont-ils adapte´s ou suffisants pour faire face a` la monte´e de l’e´pide´mie ?
Nous donnons dans ce nume´ro une large place aux personnes concerne´es, adultes ou adolescents.
L’authenticite´ de leurs te´moignages nous renvoie a` la dure re´alite´. L’obe´site´ est ve´cue comme une maladie culpabilisante dans la gene`se de laquelle s’entremeˆlent les facteurs psychologiques et biologiques. La lucidite´ de certains d’entre eux est impressionnante. Mais, que de souffrances exprime´es ! Nous connaissons les grandes difficulte´s du traitement de cette maladie insidieuse, dont le de´terminisme est de´sormais conside´re´ comme pre´coce. Mais, dans la vie re´elle, en premie`re ligne, les personnes obe`ses restent soumises aux injonctions bien intentionne´es et aux propositions plus ou moins alle´chantes des pseudo-spe´cialistes de l’amaigrissement.
La revueObe´site´« milite » pour que cela change, pour que toute personne en surpoids puisse trouver dans son lieu de vie des compe´tences me´dicales et parame´dicales, et surtout une e´coute et un re´confort. La me´decine de l’obe´site´ doit se construire en France comme ailleurs. Nous sommes et serons heureux d’accueillir dans ces colonnes les opinions de nos amis francophones et de relater leurs expe´riences.
Les sciences humaines et sociales nous permettent d’appre´hender un peu plus clairement l’ampleur des proble`mes. La stigmatisation des personnes obe`ses est une re´alite´ qui fait mal et qui nous interpelle ! La` encore, que d’interrogations et de souffrances qui appellent des re´ponses de notre part. C’est un devoir vis-a`-vis des milliers d’adolescents obe`ses qui affrontent le regard d’une socie´te´ qui proˆne encore et toujours l’ide´al de minceur et met en avant la forme physique comme crite`re de re´ussite au sens large.
Redonner de l’espoir, adapter notre syste`me de soins y compris la pre´vention, de´velopper des programmes d’observation et d’intervention tre`s toˆt dans la vie, voila` quelques objectifs que l’ensemble de la communaute´ devrait faire siens.
O. Ziegler Obes (2007) 2: 141
©Springer 2007
DOI 10.1007/s11690-007-0058-4
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