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La Cour européenne des droits de l'homme : le Tribunal fédéral et le droit transitoire des mesures de sûreté

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La Cour européenne des droits de l'homme : le Tribunal fédéral et le droit transitoire des mesures de sûreté

ROTH, Robert, THALMANN, Vanessa

ROTH, Robert, THALMANN, Vanessa. La Cour européenne des droits de l'homme : le Tribunal fédéral et le droit transitoire des mesures de sûreté. forumpoenale , 2009, vol. 2, no. 3, p.

175-181

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:46249

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(2)

Robert Roth, professeur à l'Université de Genève Vanessa Thal mann, assistante

à

l'Université de Genève

La Cour européenne des droits de l'homme, le Tribunal fédéral et le droit transitoire des mesures de sûreté

Table des matières

I. Introduction

II. Sanction et exécution de la sanction III. Regards critiques

IV. Conclusion

1. Introduction

L' «année transitoire•• au terme de laquelle les internements prononcés sous l'ancien droit (art. 42 et 43 ch. 1 al. 2 du Code pénal en vigueur jusqu'au 31.12.2006, ci-après: a CP) devaient être transformés en mesures de sûreté du nouveau droit s'est achevée le 31.12.2007.1 Il a toutefois fallu atten- dre l'automne 2008 pour que le Tribunal fédéral complète et parachève (provisoirement?) son travail d'interprétation des dispositions finales, entamé dès novembre 2007.2 Dans plusieurs arrêts de septembre er octobre 2008,3 le Tribunal fédéral a, implicitemenr ou explicitement, affirmé la com- patibilité des dispositions finales du Code pénal (ci-après:

DF) avec les instruments internationaux de sauvegarde des droits de l'homme (Convention européenne des droits de l'homme, CEDH, ses Protocoles et Pacte international sur les droits civils et politiques, PIDCIP). Cerre affirmation, qui suppose parfois une interprétation des DF proche de la

Arr. 2 al. 2 des dispositions finales de la modification du 31.12.2002.

Il faut ici rappeler que ces dispositions ont été adoptées dans une première version, jamais entrée en vigueur, sous le titre ·Disposi·

rions transitoires• le 13.12.2002 en même temps que l'ensemble de la révision (FF 2002, 7658, 7733 ). La version définitive a été adop- tée dans le cadre des •Correctifs en matière de sanctions et casier judiciaire» le 24.3.2006, RO 2006, 3539, 3544.

2 ATF 134 IV 121 (6B_347/2007).

3 Arrêr de principe destiné à publication TF, arrêt du 9.9.2008, 6B_144/2008 (en français), co~1pléré par TF, arrêts du 11.9.2008, 6B_172/2008 et du 8.10.2008, 68_218/2008, qui développem cer- tains points de l'argumentation (en allemand), spécialement sous l'angle de la compatibiliré avec le principe de non·rétroacriviré (68_172/2008, c. 2.3).

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réécriture,4 s'appuie en particulier sur la distinction entre sanction et exécution de la sanction, distinction sur laquelle repose également l'art. 388 du Code pénal dans sa version dès le 1.1.2007, (ci-après nCP).s En cette même année 2008, la Cour européenne des droits de l'homme (Cour EDH) a rendu un arrêt, Kafkaris c. Chypre, dont la solution repose largement sur la même distinction et que, curieusement, le Tribunal fédéral ne cite pourtant pas. La convergence entre ces différentes décisions nous a amenés à rédiger la présente note, afin de

i) résumer l'argumentation de la Cour européenne et du Tribunal fédéral;

ii) porter quelques regards critiques sur le paysage des mesures de sûreté tel qu'il se dégage en cette fin d'année 2008, suite à ces arrêts.

Il. Sanction et exécution de la sanction

1. L'arrêt Kafkaris c. Chypre du 12.2.2008 (req. No 21906/04) concerne une condamnation à la «peine obligatoire de ré- clusion criminelle à perpétuité» prononcée en 1989 par la Cour d'assises de Limassol er confirmée en 1990 par la Cour suprême. Le jour du début de cette peine, Kafkaris se vit re·

mettre un formulaire dans lequel il était indiqué qu'il serait libéré le 16.7.2002 (date reportée par la suite au 2.11.2002 pour des raisons <<techniques»). Dans l'intervalle, la règle- mentation chypriote relative à l'exécution des peines fut modifiée. Suite à cette modification, le requérant ne fur pas libéré le jour initialement prévu.

Devant la Cour EDH, Kafkaris fit valoir essentiellement deux arguments: une violation de l'art. 3 CEDH (traitement inhumain ou dégradant), motif pris de l'incertitude quant à

4 Le Tribunal fédéral impose aimi, contra uerbum de l'art. 2 al. 1 DF, une comparaison entre le régime des art. 43 ch. 1 al. 2 a CP et 64 nCP pour admettre un internement sur la base de cene dernière disposition pour des fairs co1mnis aorérieurcment au 1.1.2007, cf.

en particulier ATF 1341V 121.

5 En particulier son al. 3 qui rend les dispositions du nouveau droit également applicables aux aureurs condamnés en vertu de l'ancien droit.

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la durée de la peine réelle, et une violation du principe de la légalité tel que garanti par l'art. 7 CEDH. La majorité de la Cour ad mie le second argument, en considérant que la <<loi>>

n'avait pas la qualité requise par l'art. 7: sa précision était insuffisante. En revanche, elle considéra que la détention de Kafkaris n'avait pas été prolongée en vertu d'un changement de loi dans des conditions heurtant le principe de non-ré- troactivité. Cette dernière affirmation se fonde sur la dis- tinction entre «peine» et «exécution de la peine»: la peine imposée à Kafkaris n'a pas été modifiée depuis sa condam- nation; seules l'ont été ses modalités d'exécution.

Le raisonnement de la Cour fut vivement mis à mal dans des opinions concordantes er dissidenres. Deux points furent essentiellement critiqués: la frilosité de la majorité quant à la compatibilité de la <<peine perpétuelle" en soi avec la Convention;6 la distinction entre peine et exécution de la peine, distinction «plus que superbe» selon les termes du juge Borrego Borrego, particulièrement en verve.7 C'est ce deuxième sujet qui sera repris ici.

2. Dans ses arrêts de l'automne 2008, le Tribunal fédéral était confronté à la légitimité de la poursuite au-delà du 1.1.2007 d'un internement ordonné sous l'ancien droit, sur la base de dispositions abrogées le 31.12.2006 (art. 42 et 43 ch. 1 al. 2 aCP). Etant admis que l'internement représente une «peine>> au sens des art. 7 al. 1 CEDH et 15 al. 1 PIDCP et que, par conséquent, l'application de dispositions «plus fortes» (i.e. plus lourdes pour le condamné) que celles qui étaient en vigueur au moment où l'infraction a été commise est exclue, le Tribunal fédéral estime qu'au moment du chan- gement de base légale (de 42 ou 43 ch. 1 al. 2 aCP en 64 nCP), il ne s'agit plus de l'imposition d'une (nouvelle) sanc- tion, mais uniquement de l'exécution (Vollstrecktmg) d'une sanction reposant sur un jugement entré en force sous l'an- cien droit.8 Dès lors, la poursuite de l'internement selon le nouveau droit ne nécessite pas une comparaison entre l'an- cien et le nouveau droit, comme c'est le cas lorsqu'un inter- nement est envisagé après le 1.1.2007 pour une infraction commise avant cerre date.9 Il y a convergence emre cette ap- proche et celle de l'arrêt Kafkaris, dans ce que nous appe- lons ici «logique de l'exécution».

On sent d'emblée le Tribunal fédéraJ peu à l'aise avec les conséquences de cette analyse. C'est pourquoi il insiste sur la possibilité pour l'interné de solliciter sa libération condi- tionnelle à tout moment. I.:internernent dans son ensemble

6 Cf. en particulier les opinions concordante Bra12a er partiellement dissidente Tulkens, Cabral Barrero, Fura-Sandstrom er Spielmann.

Voir également l'opinion dissidente Fura-Sandsrrôm dans ACEDH du 1 J .4.2006, Léger c. France, requête no 19324/02, S 16.

7 Son opinion dissidente mérite d'être lue ou plutôt savourée, car elle représente un modèle d'imperrioence judiciaire (également au sujet de la situation polirique sur l'ile de Chypre, qui forme la roile de fond de cerre affaire).

8 TF, arrêt du 11.09.2008, 68_172/2008, c. 2.3.2.

9 C'est le cas de figure ayant donné lieu à I'ATF 134 IV 121. Sur la démarche imposée par cet arrêt, voir ci-dessous, lll.3.

étant exécuté selon le nouveau droit, ce som les conditions de ce dernier, telles qu'établies par les art. 64a-64b nCP qui s'appliqueront. Dès lors- et c'est un point sur lequel le Tri- bunal fédéral insiste1o-les conditions quant au pronostic seront celles de l'art. 64a al. 3 nCP, qui ne permettent un pronostic défavorable que s'il est «sérieusement à craindre que( ... ) la personne libérée conditionnellement ne commette de nouvelles infracrions au sens de l'art. 64 al. 1». Ainsi, si l'internement initial reposait sur la commission d'infractions contre le patrimoine sans contenu violent, 11 un danger même important de réitération du même type d'infractions (non violentes) ne suffit pas, contrairement à ce qui était le cas sous l'empire des dispositions de l'ancien droit.

La démarche appelle deux remarques avant d'être sou- mise à la critique.

a) Le TF reprend ici, toujours sans la citer, la jurispru- dence Stafford Il de la Cour EDH. Ce requérant britannique s'était vu refuser la libération conditionnelle pour avoir, pen- dant la période probatoire, commis diverses infractions de faux. Or, son régime de libération conditionnelle reposait sur sa condamnation, en 1967, pour meurtre, à une peine perpétuelle obligatoire; IJ ce régime était lié au risque de dan- gerosité attesté par l'infraction initiale, i.e. une dangerosité

«qualifiée» (violence). Le gouvernement britannique n'étant pas parvenu à établir que les infractions astucieuses commi- ses par Stafford révélaient un risque de réitération d'infrac- tions violentes, sa réintégration violait l'art. 5

S

1 CEDH:

en effet, la privation de liberté associée à la réintégration était dépourvue d'une cause pertinente au sens de cerre dis- position.14 La Cour fair ainsi des infractions (ou des com- porremenrs) à caractère violent et à caractère 110n violent deux catégories distinctes, à apprécier différemment dans l'analyse de la conformité des privations de liberté avec la Convention.

b) L'application dans le cas d'espèce de l'art. 64a al. 3 nCP-qui est plus favorable à l'accusé que les dispositions de l'ancien droit- repose sur la «logique de l'exécution» et non sur le fait que cerre disposition représente, parce qu'elle est plus stricte, une lex mitior vis-à-vis des dispositions cor- respondantes de l'ancien droit.

10 Cf. TF, arrêts du 9.9.2008, 6B_l44/2008, c. 1.l et 1.2.2 er du 8.l 0.2008, 6B_21812008; le Tribunal fédéral reprend ici les thèses de RIKLIN, Revision des AJlgemeinen Teils des Strafgescrzbuches:

Fragen des Obergangsrechrs, AjPIPJA 2006, 1471, 1485 ct HEER, in: N1ccu/WtPRXCHTICER (eds.), BSK StGB 1, 2•- éd.,'Bâle 2007, Art. 64b N 2.

11 Situation des arrêts cirés dans la nore précédente.

12 ACEDH du 28.5.2002, Stafford c. Royaume-Utli, Rec. 2002-IV, 115.

13 Peine donr s'esr inspiré le législateur cypriote mis en cause dans l'affaire Ka(karis précédemment cirée. Daos les deux cas, cerre

«peine perpétuelle obligatoire• connaissait en réalité un terme fixé posréricurcmenr ou jugement.

14 Arrêt ciré S 38 (reprenant ACEDH du 18.7.1994, Wynne c.

Royaume-Uni, série A no 294-A, 14, S 35) er 52.

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Ill. Regards critiques

l. La distinction entre sanction et exécution de la sanction est-elle compatible avec le système suisse (dualisme repré- sentatif)?

Le dualisme représentatif continue à régir l'essentiel des mesures de sûreté.IS En cas de traitement institutionnel des troubles mentaux ou des addictions, de placement institu- tionnel des jeunes adultes er de traitement ambulatoire, la levée d'une mesure non accompagnée d'un <<succès» au sens des art. 62 al. 1 et 63b al. J nCP conduit à l'exécution de la peine suspendue ou à une nouvelle mesure, en application des art. 62c al. 3 et 4 et 63b al. 5 nCP. Admettons que la dé- cision de faire exécuter la peine relève encore de l'exécution, bien que cette décision puisse être assortie de décisions com- plémentaires qui, pour certaines, relèvent plutôt de sa fixa- rion (en particulier l'octroi d'un sursis ou d'un sursis partiel).

En revanche, quand le juge décide de <<remplacer l'exécution de la peine» par une nouvelle mesure, il est difficile d'ad- mettre que l'on se trouve en phase de pure <<exécution de la sanction». Il en va de même en cas d'application de l'art. 65 al. 1 nCP et de transformation d'une peine (ou d'un inter- nement) en cours d'exécution en mesure thérapeutique ins- titutionnelle ou de transformation d'un traitement institu- tionnel en internemenr par le jeu de l'art. 62c al. 4 nCP. 16

Cette transformation ne saurait être assimilée à une exécu- tion de la peine, du traitement ou de l'inrernement. 11 est donc évident qu'il n'y a pas {toujours) de succession chro- nologique entre sanction et exécution de la sanction. Dès lors, régler la question de l'application de la loi pénale dans le temps, qui suppose des jalons chronologiques solides, sur cette distinction conduit à des constructions quelque peu chancelantes.

2. La solution adoptée par la jurisprudence est sans doute pragmatiquement satisfaisante, mais on peur douter de sa solidité au regard des exigences conventionnelles et même de la systématique du nCP.

a) L'art. 5 § 1 CEDH et la jurisprudence de la Cour EDH exigent que toute privation de liberté repose sur une <<Cause suffisante» .11 Cette cause peut, selon les termes des juges de Strasbourg «se distendre». Les motifs classiques de disten- sion sont l'écoulement du temps et la modification signifi- cative de l'état du détenu.•s L'abrogation de la base légale sur laquelle repose la privation de liberté représente un cas

15 U s'agit pour l'essentiel de dualisme rcpréscnrarif tempéré: la me- sure précède la peine; lorsque la mesure prend fin, la peine peut être exécurée. En raison des resrricrions à cerre exécurion, (cf. art. 62b al. 3 er 63b al. 1 nCP), on esr proche à cerrains égard d'un dualisme représentatif pur (la mesure remplace complètement la peine); voir RonlffHALMANN in: Commentaire romand CP 1, arr. 57 N 1 ss.

16 Cf. ATF 134 IV 315, C. 3.7 p. 324.

17 N. J 4 ci-dessus ct ACEDH du 24.6.1982, van Droogenbroeck c.

Belgique, série A no 50, 21, S 39.

18 Cf. ACEDH du 27.5.1997, Eriksen c. Norvège, Rec. 1 997-ill, 861,

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de distension plus radical: le lien de causalité entre décision de condamnation et détention est rompu. Ou pour le dire de manière plus abrupte: il manque tout simplement à par- tir du 1.1.2007 un titre de détention valable. Dés lors, la poursuite de la détention viole l'arr. 5 CEDH. Elle viole éga- lement à notre sens l'arr. 7 CEDH: de même qu'une loi pé- nale abrogée ne peut pas fonder une condamnation," une

«peine» (au sens de l'arr. 7 CEDH) quelle qu'elle soit- et a fortiori une sanction privative de liberté - ne peut pas se fonder sur un article de loi qui n'est plus en vigueur.

Il aura ir fallu dès lors compléter l'art. 2 al. 2 DF, en exi- geant w1e décision motivée et attaquable, non pas seulement pour la transformation des internements reposant sur les dispositions abrogées en traitement institutionnel, mais éga- lement pour la <<poursuite» de leur exécution conformé- ment aux art. 64 ss nCP. L'examen des conditions d'impo- sition de l'art. 64 nCP aurait été originaire et non pas dérivée; la libération des «internements sans cause>> (en vi- gueur) aurait été automatique. C'était, sous réserve d'une précision quant au type de décision, la solution des <<dispo- sitions transitoires» votées le 13.12.2002;20 les <<COrrectifs»

adoptés uJtérieurement21 ont «COrrigé,. dans le sens de l'in- cohérence voire de la violation de la Convention et même du Code pénal! Le Tribunal fédéral lui-même est d'ailleurs allé dans cette direction en considérant, durant le même automne 2008, comme illégale une condamnation au titre de l'arr. 291 nCP sanctionnant le non-respect d'une déci- sion d'expulsion parfaitement régulière avant le 1.1.2007, mais qui se fonde sur une base légale- art. 55 a CP (expul- sion pénale) -qui avait été abrogée au moment du juge- ment.22

b) La justification- ou une des justifications-donnée par le TF à la suite il est vrai de la doctrine, étonne quelque peu. Dans le c. 1.1. de son arrêt du 9.9.2008 (cf. n. 3), notre Haute Cour invoque l'arr. 56 al. 6 nCP, aux termes duquel

«une mesure dont les conditions ne sont plus remplies doit être levée». Pourquoi alors prononcer une libération condi- tionnelle? La personne qui ne remplit plus les conditions du

19 Cf. la décision de la Commission européenne des droits de l'homme du 25.9.1963, X. c. RFA, Annuaire de la Convention européenne des droits de l'homme 6, 589, er, dans la doctrine, RoLLAND, Arti- cle 7, in: Pmm er al. (eds.), La Convention européenne des droits de l'homme: commentaire article par article, 2._ éd., Paris, 1999, 295.

20 Art. 2 al. 2 des DT du 13 décembre 2002 (FF 2002, 7733): •Dans un délai de douze mois à comprer de l'entrée en vigu~ur du nouveau droit, le juge examine d'office si les personnes internées en vertu des art. 42 er 43, ch. 1, al. 2, de l'ancien droit remplissent les condi- tions définies à l'arr. 64. Si ces conditions sont remplies, la mesure esr maintenue conformément au nouveau droir. Dans le cas contraire, elle est levée.

21 •Correctifs en matière de sanctions• (n. l ), ici RO 2006, 3544.

22 TF, arrêt du J 2.09 .2008, 6B_559/2008. En l'espèce, l'une des condi- tions légales constitutives de l'infraction fait défaur (arrêr ciré c.

2.4). Une •condition légale• fait rout aura nt défaur pour un inter- nement reposanr sur une disposition abrogée!

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prononcé d'un inrernemenr- et qui est donc détenue sans cause- ne doit-elle pas être libérée purement et simplement, sans être soumise à un délai d'épreuve?

L'argumentation du Tribunal fédéral entretient une confusion dommageable entre levée de la mesure er libéra- tion conditionnelle. Pourtant, tant la systématique du Code que l'essentiel de la littérature distinguent clairement les deux décisions.2J

3. La jurisprudence du Tribunal fédéral applique-r-elle de manière cohérente la distinction?

Dans I'ATF 134 IV 121, qui concerne une infraction commise avant le 1.1.2007 mais jugée après cette date, le TF, pour déterminer si le nouveau droit n'est pas plus défa- vorable effectue une comparaison entre les conditions du prononcé de l'internement selon les deux droits, ainsi qu'une comparaison des conditions de la libération conditionnelle de l'internement - pour aboutir à la conclusion que les conditions prévues par le nouveau droit ne som pas plus sé- vères.H

On peur s'interroger sur la pertinence de ce choix. En effet, dans la logique stricte de la jurisprudence et de la dis- tinction entre prononcé et exécution de la sanction, il sem- ble que seule la question de savoir si les conditions du pro- noncé de l'internement selon le nouveau droit sont plus strictes devrait se poser, à l'exclusion de route comparaison de droit en matière d'exécution de la sanction. De toute ma- nière, la libération conditionnelle- qui fait partie de l'exé- cution de la sanction-ne peut être régie que par le nouveau droit: à quoi sert-il alors de faire entrer cene phase dans la comparaison?

Cette confusion illustre une fois de plus, le caractère quel- que peu flou de la distinction opérée par le TF et la Cour EDH.

4. Que fair-on de l'exécution de la peine à l'issue d'une mesure prononcée sous l'ancien droit?

Comme il a été rappelé (2.1. ci-dessus), le scénario de base en cas d'échec de la mesure est l'exécution de la peine suspendue. Si la réalisation de ce scénario ne pose pas de problème majeur avec les mesures régies par le dualisme re- présentatif tempéré avant et après la réforme de 2007, elle se heurte à divers problèmes pour les internements régis soit avant soit après la réforme par un autre système: dualisme

23 Par exemple, STRATENWERTH, Schweizerisches Strafrechr, Allgemei- ner Teil li, 2tm• éd., Berne, 2006, S 12 N 28-33 distingue clairemem Entlassung et Aufhebzmg, qui fonr l'objet de deux chapirres diffé- renrs. Il en va de même dans BSK-HEER (n. lO),Arr. 62c N 27 ss., que le TF cire pourranr (en se fondant sur un autre passage il esr vrai, où la confusion existe) dans son arrêt.

24 Le Tribunal fédéral paraît considérer, toujours en s'appuyanr sur le te;,.:te des OF qu'en cas d'équivalence des droirs c'esr le nouveau droir qui s'applique dans la mesure où •il n'esr pas plus sévère que l'ancien droir• (ATF 134 IV 1.21, 131 s.)- ce qui apparaît comme contraire à sa jurisprudence rendue jusqu'à cc jour qui considéra ir que l'ancien droit érair applicable si celui-ci érair équivalent aunou- veau.

représentatif pur pour l'ancien art. 42 a CP (la mesure rem- place entièrement la peine); dualisme cumulatif pour le nou- vel art. 64 nCP (la peine précède la mesure). Prenons quel- ques illustrations.

a) Cas où un internement a été ordonné sous l'ancien art. 43 ch. 1 al. 2 a CP et se poursuit selon le régime de l'art.

64 nCP. L'ancien droit prévoyait l'exécution subséquente de la peine en cas d'échec de la mesure. Or un internement qui a été prononcé sous l'ancien droit et qui se poursuit selon le nouveau droit ne peut pas à proprement parler être suivi de l'exécution de la peine, puisque selon le nouvel art. 64 nCP l'exécution de la peine précède l'internement. D'ailleurs, la base légale permettant l'exécution de la peine à la fin de l'internement (arr. 43 ch. 3 et 5 a CP) a été abrogée. Dès lors, une seule solution existe, en dehors d'une décision de non- exécution de la peine faute de base légale: la transformation de l'internement en traitement instimtionnel (arr. 59 nCP).

Cene transformation est possible sur la base et aux condi- tions de l'art. 65 al. 1 nCP; eUe est compatible avec l'arr. 7 CEDH puisque la mesure de traitement n'est pas une «peine»

au sens de cene disposition et que le principe de non-rétroac- tivité ne s'applique donc pas. Restent les problèmes de com- patibilité avec l'arr. 5 CEDH et le principe ne bis in idem (arr. 4 du 7ème Protocole à la CEDH) que nous avons exa- minés par ailleurs.2s

En cas d'échec de cette mesure thérapeutique de l'art. 59 nCP,26 une exécution de la peine pourra être im- posée en application de l'arr. 62c al. 2 nCP. La distinction entre sanction et exécution de la sanction retrouve alors route sa portée. Si la décision de faire exécuter la peine relève strictement de l'exécution et que, conformément à la jurisprudence de la Cour EDH et du TF, elle n'est pas soumise au principe de non-rétroactivité, elle échappe à un examen critique sous l'angle de ce principe. En revanche, en cas de réfutation de cette distinction ou de sa portée dans ce cas précis, l'examen critique s'impose:

il faut alors procéder à une comparaison des condi- tions concrètes d'imposition de l'exécution de la peine.

Cette comparaison donne un résultat contrasté. A teneur stricte de texte de loi, l'ancien droit (art. 43 ch. 3 aCP) était moins impératif, et donc plus favorable au condamné, que l'actuel (art. 62c al.2 nCP), qui ptescrit l'exécution de la peine (ou l'imposition d'une nouvelle m(\sure) en cas d'échec: la clause potestative de l'arr. 43 ch. 3 aCP27 a disparu. En revanche, l'ancien droit ne mentionnait pas la possibilité d'une libération conditionnelle immé-

25 RoTH, Nouveau droit des sanctions: premier examen de quelques points sensibles, RPS 2003, 16 ss., er ROTH, in: Commentaire ro- mand CP 1, an. 65 N 10 ss.

26 On écarte ici l'hypothèse d'un -rerour à l'internement•, via l'art.

62c al. 4.

27 •Lorsqu'il est mis fin à un rrairemenr en établissement faure de ré- suJrar, le juge décidera si er dans quelle mesure des peines suspen- dues seronr exécutées•.

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diate, manifestement prévue par le nouveau droit.28 Quant à l'imputation, elle devient une règle absolue avec le nouveau droit (art. 57 al. 3 nCP). On peur donc consi- dérer qu'une comparaison d'ensemble montre le nouveau droit comme plus favorable er par conséquent appli- cable.29

b) Cas où un internement a été ordonné sous l'ancien art. 42 aCP (qui prévoyait que la mesure remplaçait entiè- rement la peine) et se poursuit selon le régime de l'art. 64 nCP: il paraît alors impossible de faire exécuter la peine. La seule issue serait, comme dans le cas précédent, une transi- tion par une application de l'art. 59 nCP, dans l'hypothèse où il existe le <<trouble mental grave» requis par cette dis- position. Mais peut-on admettre qu'une peine qui devait être entièrement absorbée par la mesure sous l'ancien régime de l'art. 42 aCP «renaisse» par la grâce du changement de lé- gislation? Cela paraît heurter à la fois le bon sens et Je prin- cipe de non-rétroactivité. En effet, dans cette hypothèse, une peine serait exécutée, qui ne pouvait pas l'être sous l'ancien droit. Toutefois, une comparaison concrète pourrait amener à considérer que la situation du détenu ne serait pas pire sous le nouveau droit que sous l'ancien, puisque l'interne- ment pouvait de roure manière être de durée indéterminée.

Une telle conclusion serait routefois à notre sens inaccepta- ble. Les limites de la valeur heuristique de la distinction en- tre sanction er exécution de la sanction apparaissent à nou- veau.

c) Telle aurait été l'analyse de la situation fondée sur l'identité er les caractéristiques des sanctions au moment où elles sont imposées puis exécutées. Imaginatif, le Tribu- nal fédéral a construit une autre solution dans un arrêt du 26.2.2008,30 Un internement au ritre de l'art. 43 ch. 1 al. 2 aCP avait débuté le 19.5.1998; il fur transformé a poste- riori en exécution d'une peine privative de liberté, ce qui permit de considérer que les deux riers de durée de ladite peine étaient arteinrs31 er que, par conséquent, le recourant avait <<basculé» dans le régime de L'arr. 64 al. 3 nCP (libé- ration conditionnelle de l'internement au sens de l'arr. 64 al. 1 nCP). Le raisonnement exploite jusqu'à l'extrême les ressources offertes par la distinction entre la sanction er son exécution: la liberté de manœuvre reconnue par les dis- positions finales32 er la jurisprudence (de la Cour EDH comme du TF lui-même) autorise une requalification corn-

28 BSK-HEER (n. 10), Art. 62c N 30 ss.; TRECHSEL et al., Schweize- risches Strafgesenbuch, Praxiskommentar, Zürich/St.Gallen 2008, Art. 62cN 7.

29 Voir n. 23.

30 TF, arrêt du 26.2.2008,6B_326/2007,6B_38112007 et6B_585/2007, rendu à cinq juges mais non desriné à la publication. Le raisonne·

mem du Tribunal fédéral esr repris et développé dans I'ATF 134 IV 315 cité n. 16.

31 La condamnation initiale portait sur dix·sepr années de réclusion;

les deux tiers étaient sans doute atteints gr5ce à la détention avant jugemenr (l'arrêt ne le précise pas).

32 Ainsi que, toujours, par l'art. 388 nCP.

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piète d'une sanction (une mesure devient a posteriori une peine). A nouveau, la solution est pragmariquement effi- cace, puisqu'elle «débarrasse» les autorités, administra- tives et judiciaires, d'une peine quasiment ingéra ble comme nous l'avons montré plus haut [a) et b)]; elle est toutefois difficile à justifier d'un point de vue strictement concep- tuel.

5. La libération conditionnelle et la réintégration d'un auteur qui fait l'objet d'une mesure prononcée sous l'ancien droit.

La «logique de l'exécution» imposée par le législateur et Ja jurisprudence a le mérite de rendre simple la situation une fois la libération conditionnelle accordée sur la base des art.

64a-64b nCP: le statut de celui qui avait initialement été condamné sur la base des articles abrogés (43 ch.l al. 2 ou 42 a CP) ne se distingue plus de celui des personnes condam- nées après le 1.1.2007. Dès lors, par exemple, si un auteur libéré conditionnellement commet durant le délai d'épreuve des infractions qui auraient pu justifier un internement avant Je 1.1.2007 et ne le peuvent plus après cerre date, la réinté- gration sera impossible. La situa rion peut toutefois être dé- licate si l'expertise ordonnée dans le cadre de la procédure portant sur ces infractions nouvelles (une série de vols sans aucune composante de menace psychique par exemple) dé- ment le pronostic posé au moment de la libération et se montre pessimiste quant aux risques de commission d'in- fractions à caractère violent: une réintégration est-elle pos- sible?

A suivre strictement la jurisprudence de l'automne 2008, qui n'a pas envisagé cette hypothèse, la réintégration serait possible, puisque, si l'experrise rédigée dans le cadre de la procédure de libération conditionnelle avait été négative, l'internement se serait poursuivi selon les modalités de l'art. 64 nCP. Et cela, alors même que les conditions d'im- position d'un internement au sens de l'art. 64 nCP ne se- raient pas aujourd'hui réalisées. A notre sens, une relie solution serait toutefois inadmissible au regard des arr. 5 er 7 CEDH. Les liens avec la «Cause» initiale de l'interne- ment (la décision de condamnation antérieure au 1.1.2007) seraient trop distendus, er la base légale de la réintégration trop fragile, puisque le nouveau droir, plus favorable doit primer.

Une autre situation problématique esr celle d'un auteur libéré conditionnellement avant le 1.1.2007, er qui commer de nouvelles infractions violentes justifiant la réintégration selon l'art. 64a al. 3 nCP. Peut-il être réintégré si son trouble mental, qui avait été suffisant pour justifier son internement sous l'ancien droit, ne répond pas aux critères du «grave trouble mental chronique ou récurrent» au sens de l'art. 64 al. 1 lit. b nCP?

Une réintégration dans l'internement violerait l'art. 56 al. 6 nCP, puisque la cause, au sens médico-légal du rerme cette fois, a pris fin. Quid si le trouble est insuffisant pour justifier un internement mais suffisant pour justifier un trai-

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1 ARTICLES

cernent institutionnel au sens de l'arr. 59 nCP?JJ La réinté- gration accompagnée d'une transformation de la mesure paraît s'imposer. La base légale explicite fait toutefois dé- faut. On peut songer à une application analogique des art.

64b al. 1 lit. b et 65 al. 1 nCP. Le Tribunal fédéral s'est tOu- tefois montré légaliste et par conséquent restrictif à l'égard de telles libertés prises avec le texte de la loi.J4 Suivant cette jurisprudence, la conversion, à l'occasion d'une réintégra- tion, d'un internement en traitement institutionnel paraît dès lors exclue.

Telle n'a tourefois pas été la démarche suivie dans l'arrêt 68_218/2008, qui traite d'une situation proche: le recourant est interné au titre de l'art. 42 .a CP depuis 1981 (avec une interruption pendant une période de libération condition- nelle avant le J .1.2007). Il <<ne présente aucun trouble psy- chique grave» .Js Le Tribunal fédéral, appliquant sa j urispru- dence ici discutée et avec laquelle nous divergeons une fois encore, confirme la poursuite de l'internement sous réserve d'une libération conditionnelle, dont l'examen s'opérera se- lon les critères des art. 64a-64b nCP.

Outre le fondement fragile de la jurisprudence en géné- ral, sur lequel nous ne revenons pas, la solution du TF nous paraît également contraire à l'art. 56 al. 6 nCP (et à l'art. 5 CEDH). La cause de la mesure a disparu en même temps que l'art. 42 a CP. Peur-être l'interné remplit-il les conditions de l'art. 64 ch. 1 Lit. a nCP («Caractéristiques de la person- nalité»). Il faudrait alors toutefois statuer sur cerre question, ce que le Tribunal fédéral ne fait pas, et procéder à un exa- men complet des conditions de l'art. 64 nCP. Une nouvelle fois, la jurisprudence ne convainc pas.

IV. Conclusion

Les défis principaux posés par le nouveau droit des mesures ont trait au droit transitoire. Ces difficultés sont essentiel- lement la conséquence de l'adoption par le législateur de dispositions finales dont la conformité aux instruments in- ternationaux est douteuse. Le Tribunal fédéral a tenté de résoudre ces difficultés en s'appuyant sur une distinction

33 li y a d'abord, par simple comparaison de textes, l'hypothèse du trouble grave mais non chronique ou récurrent. De manière plus générale, la question de l'adoption d'un standard plus strict à 64 qu'à 59 paraît encore discutée. BSK-HEER (n. 10), Art. 59 N 24, s'appuyant sur TF 65.768/1999 c. 3, paraît l'admettre, à l'inverse de STRATENWERnl (n. 23), S 12 N 13, selon lequel •gilt hier (i.e. ad 64} dasselbe•. C'est essemiellemem le cnrère de /'maccessibilité à un traitement, sur lequel repose la subsidiarrté de 64 vis-à-vis de 59, qUI devrait faire la différence; cf. TF 68_263/2008 (n. 15), c.

3-4, et SCHWARZENEGGER!HuG!josrrscH, Strafrecht Tl, Strafen und Massnahmen, 8!mc éd., Zurich 2007, 190.

34 Cf. à propos de l'art. 63b al. 5 nCP et de la possibilité de transfor- mer un traitement ambulatoire en un noLwe~u traitement ambula·

toire, ATF 134 IV 246.

35 Arrêt cité du 8.10.2008 (n. 3), c. 2.2.

entre le prononcé d'une sanction - auquel le principe de non-rétroactivité s'applique- et son exécution, à laquelle ce principe ne s'applique pas.

Cette distinction, commode en pratique, notamment parce qu'elle a dispensé nos autorités judiciaires de pronon- cer une décision nouvelle sur chaque cas d'internement, ainsi que la libération immédiate des personnes internées sous l'ancien droit qui ne remplissaient pas les conditions d'internement selon le nouveau droit, a permis au Tribunal fédéral d'affirmer la compatibilité des dispositions transi- toires prévues par le législateur avec les normes internatio- nales; il n'en demeure pas moins qu'elle peut aboutir à des situations difficiles à résoudre en pratique, voire absurdes, et qu'elle est à notre sens contraire à la CEDH. Ainsi, nos quelques exemples tirés du droit suisse donnent raison aux juges minoritaires de l'affaire Kafkaris de la Cour EDH36 dans leur contestation de la validité de la distinction entre sanction et exécution de la sanction au regard de l'art. 7 CEDH.

Paradoxalement, enfin, un relief et une portée particu- liers sont donnés à cette distinction traditionnelle, alors même qu'une caractéristique essentielle du nouveau droit des sanctions consiste dans la multiplication des possibilités de transformation de la sanction au cours de son exécution, qu'il s'agisse des peines ou des mesures de sûreté.

Mots-clés: sanctions, exécution des sanctions, interne- ment, droit transitoire, Convention européenne des droits de l'homme

Stichworter: Sanktionen, Vollzug von Sanktionen, Ver- wahrung, Übergangsrecht, Europaische Menschenrcchts- konvenrion

Résumé: A l'issue de l' «année transitoire» durant la- queUe tous les internements prononcés sous l'ancien droit ont dû être transformées en mesures du nouveau droit, cet article porte un regard critique sur la jurispru- dence de la Cour européenne des droits de l'homme et du Tribunal fédéral. Som en particulier discutées la por- tée de la distinction entre sanction et exécution de la sanction, faite par les deux juridictions, ainsi que la com- patibilité des solutions de droit transitoire données par le Tribunal fédéral avec la Convention européenne des droits de l'homme.

Zusammenfassung: Nach Ablauf des .. Qbergangsjah- res», innerhalb dessen alle umer altem Recht angeord- neten Verwahrungen in Massnahmen des neuen Rechts umgewandelt werden mussten, wirft dieser Bcitrag einen kritischen Blick auf die Rechtsprechung des Europai- schen Gerichtshofes für Menschenrechre und des Bun-

36 Ci-dessus ch. Il.

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desgerichtes. Besprochen werden insbesondere die Trag- weite der von beiden Gerichtsinstanzen durchgeführten Unterscheidung zwischen Sanktion und Vollzug der

Sanktion sowie die Vereinbarkeit der vom Bundesgericht vorgebrachten Übergangslosungen mit der Europiiischen Menschenrechtskonvention.

Marc Pellet, Titulaire du brevet d'avocat, Premier président du Tribunal d'arrondissement de l'Est vaudois

Réhabilitons la peine privative de liberté!

Table des matières

l. Le constat des praticiens II. Les peines supérieures à six mois TIL Les courtes peines

1. L e constat des praticiens

A l'heure où responsables politiques, juristes et criminolo- gues discutent de l'effet des sanctions du nouveau droit, il paraît utile d'exprimer le point de vue du juge pénal, qui choisit la sanction en présence de celui qui la subira. Il s'agit donc du magistrat de première instance, car aussi bien le juge de l'instance de recours que le juge fédéral de la Cour suprême statue, le plus souvent pour le premier et toujours pour le second, à la vue d'un dossier uniquement. Or, le prin- cipe de l'individualisation de la peine est tout d'abord as- sumé par celui qui interroge l'accusé pour éprouver, le cas échéant, son accessibilité à la sanction et par conséquent veiller concrètement à l'application du droit pénal. Ille fera évidemment en choisissant avec mesure et discernement dans l'éventail des sanctions celle qui éloignera, autant que faire se peut, le condamné de la récidive.

Avec le nouveau droit, cette tâche s'est indéniablement compliquée. On ne s'en plaindra pas. Les nouvelles dispo- sitions du code pénal offrent en effet des alternatives inté- ressantes avec le travail d'intérêt général et les jours-amende.

Tous les types de peine ont leur vocation. On ne dissuade en effet pas de la même manière l'automobiliste trop pressé et le pédophile.

Qu'en est-il de la peine privative de liberté? En vertu de la loi, mais aussi de la jurisprudence du Tribunal fédéral, son champ d'application est malheureusement réduit à tel point que le juge ne peur plus y avoir recours là où elle se- rait pourtant nécessaire. Pourquoi l'affirmer aussi péremp- toirement? Précisément pour être le juge confronté aux jus-

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ticiables et savoir, en présence de rel ou tel récidiviste, que le travail d'intérêt général ou les jours-amende n'ont pas de sens. L'individualisation de la peine et la prévention spéciale ne sont pas seulement des principes théoriques, mais aussi une réalité vécue par le magistrat. Manifestement, l'arsenal répressif actuel est parfois insuffisant. Tous les praticiens en conviennent. Face à ces situations insatisfaisantes, certains collègues- je le fais parfois aussi- continuent à prononcer des peines privatives de liberté en venu de l'art. 41 CP ou de plus de six mois, sachant que l'instance de recours est susceptible de ne pas approuver la sanction. Cette situation est inquiétante. Il y a là une inégalité de traitement cho- quante en défaveur de ceux qui acceptent leur peine.

Pourtant le nouveau droit pourrait conduire à de meilleurs résultats. Appliqué avec cohérence et en tenant compte de manière réaliste de la prévention spéciale, les art. 34 ss CP offrent un système de répression suffisant, à une réserve près sur laquelle on reviendra.

Il. L es peines s upérieures à six mois

Dans sa trilogie des arrêts consacrés récemment à la hié- rarchie des peines,1 le Tribunal fédéral a malheureusement cru voir une subsidiarité générale de la peine privative de liberté, laquelle n'est pourtant aucunement consacrée dans le code pénal. Selon les juges fédéraux, il faut ainsi envisa- ger, pour les sanctions comprises entre six mois et un an, en premier lieu la peine pécuniaire, conformément au principe de la proportionnalité qui implique de choisir la sanction portant atteinte le moins durement à la liberté indivi- duelle.2

En réalité, ce postulat repose sur l'affirmation répétée de certains pénalistes et criminologues que la prison a échoué

1 ATF 134 IV 60; ATF 134 IV 82; ATF 134 IV 97.

2 ATF 134 IV 82, 84 s.

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