Définition bifocale d’une ellipse
Dans tout ce qui suit, on se place dans R2, muni de sa structure euclidienne canonique, et on considère l’ellipseE d’équation cartésienne
x2 a2 +y2
b2 = 1,
où a(le demi grand axe) etb(le demi petit axe) sont deux réels tels que0< b < a.
On pose classiquement c=√
a2−b2,F = (c,0)etF′ = (−c,0).
F etF′ sontles foyers de E. On a alors, en notant AB la distance entre deux points, E = M ∈R2 / F M+F′M = 2a .
Cette définition deEjustifiela méthode du jardinierpour tracer au sol le contour d’un massif elliptique :
•prendre deux piquets reliés par une corde de longueur2a
•planter lesdits piquets en deux points distincts F etF′ tels que F F′<2a
•tendre la corde à l’aide d’un bâton tenu vertical et tracer l’ellipse avec la pointe dudit bâton, tout en maintenant la corde tendue (la pointe du bâton prendra les diverses positions M telles que F M+F′M = 2a).
En choisissantF =F′ on obtient une méthode déjà connue pour tracer un cercle de rayona!!
Le résultat se démontre rapidement moyennant quelques (habiles) équivalences.
Soit M = (x, y) :
F M+F′M = 2a ⇔ F M+F′M 2 = 4a2
⇔ (x−c)2+y2+ (x+c)2+y2+ 2 (x2+y2+c2−2cx) (x2+y2+c2+ 2cx) = 4a2
⇔ (x2+y2+c2)2−4c2x2= 2a2− x2+y2+c2
⇔ x2+y2+c2 2−4c2x2 = 4a4−4a2 x2+y2+c2 + x2+y2+c2 2
⇔ a2 x2+y2+c2 −c2x2=a4
⇔ b2x2+a2y2 =a2b2
⇔ x2 a2 +y2
b2 = 1 !!
On peut compléter ce résultat par une propriété géométrique classique : pour M ∈ E, la tangente à E enM est la bissectrice extérieure des demi-droites [MF) et[MF′).
Définition bifocale d’une ellipse Page 2 Quelques définitions s’imposent ; étant donnés un point M et deux vecteurs unitaires u et u′, on appelle
•bissectrice intérieure des demi-droites d’origine M dirigées par u et u′ la demi-droite d’origine M dirigée paru+u′
•bissectrice extérieure des demi-droites d’origine M dirigées par uet u′ la droite d’origineM dirigée paru−u′ (donc orthogonale à la précédente, puisque u etu′ sont unitaires).
Noter que la bissectrice intérieure est celle du collège, qui sépare le secteur angulaire formé par les deux demi-droite en deux secteurs angulaires de même mesure. Il s’agit même de mesures orientées modulo 2π. En effet, en notant (·|·) le produit scalaire canonique et[·,·]le produit mixte, j’ai, du fait queu et u′ sont unitaires,
u|u+u′ = 1 + u|u′ = u+u′|u′
et, du fait du caractère alterné du produit mixte (qui est un déterminant !), u|u+u′ = u|u′ = u+u′|u′ .
Par conséquent les deux angles orientés, deuavecu+u′ d’une part, deu+u′ avecu′ d’autre part, sont égaux (modulo2π). C’est bien l’idée de bissectrice habituelle. . . Le géomètre avisé aura remarqué que MNP N′ est un losange, où N =M +u,N′ =M +u′ etP =M+ (u+u′).
Quant à la bissectrice extérieure définie ci-dessus, nous venons de voir (en remplaçant u′ par−u′) que la demi-droite d’origine M dirigée par u−u′ est la bissectrice intérieure des demi-droites d’origine M dirigées par u et−u′.
On dit aussi que les deux droites orthogonales M+ Vect (u±u′) sont les deux bissectrices des droites D=M+ Vectu et D′ =M + Vectu′ (elles jouent des rôles identiques dans ce cas).
Autre propriété dans ce contexte : l’union de ces deux bissectrices est l’ensemble des points équidistants de D et D′. En effet, pour P fixé, le projeté orthogonal H de P sur D est caractérisé par
−−→MH = −−→MP|u .u, d’où MH2 = −−→MP|u 2, puisque u est unitaire. De même le projeté orthogo- nal H′ de P surD′ vérifie MH′2= −−→MP|u′ 2. Or les deux trianglesMHP etMH′P sont rectangles, avec pour hypoténuse commune MP.
Définition bifocale d’une ellipse Page 3 Le théorème de Pythagore montre alors que P est équidistant de D et D′ (i.e. P H = P H′) si et seulement si MH =MH′, or
−−→MP|u 2 = −−→MP|u′ 2 ⇔ −−→MP|u 2− −−→MP|u′ 2= 0
⇔ −−→
MP|u+u′ × −−→
MP|u−u′ = 0 grâce à une identité remarquable bien connue et par linéarité à droite du produit scalaire.
Ainsi P est équidistant de DetD′ si et seulement si −−→MP est orthogonal àu+u′ ou à u−u′. On retrouve bien la réunion des deux bissectrices définies ci-dessus !
Revenons maintenant à notre ellipse, que je choisis de paramétrer parM :t→(acost, bsint).
M est C∞ surRpar les théorèmes opératoires classiques et
∀t∈R M′(t) = (−asint, bcost).
Ce vecteur n’est jamais nul, donc tous les points sont réguliers etM′(t)dirige la tangente àE enM(t).
Or, d’après la définition bifocale de E, j’ai
∀t∈R −−−−→
F M(t) 2+ −−−−−→
F′M(t) 2 = 2a.
NiF niF′ n’appartient àE, donc je peux dériver ces expressions selon les formules usuelles, en remar- quant que, F étant indépendant de t,
d dt
−−−−→
F M(t) = d
dt(M(t)−F) =M′(t) et de même d dt
−−−−−→
F′M(t) =M′(t). J’obtiens
1 F M(t)
−−−−→
F M(t) M′(t) + 1 F′M(t)
−−−−−→
F′M(t) M′(t) = 0 soit
− u+u′ M′(t) = 0 où u= 1
M(t)F.−−−−−→
M(t)F et u′ = 1
M(t)F′.−−−−−→
M(t)F′.
u est le vecteur unitaire dirigeant la demi-droite [M(t)F) et u′ le vecteur unitaire dirigeant la demi- droite [M(t)F′), donc d’après ce qui précède M′(t) dirige la bissectrice extérieure de ces deux demi- droites !
Cette propriété peut sans doute se démontrer de façon plus analytique (et péniblement. . . ) en utilisant l’équation cartésienne de la tangente àE enM vue au chapitre 12, mais la version cinématique ci-dessus est “trop belle” !