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Docteur en droit public, Enseignant-Chercheur à la Faculté de droit de Université de Lomé (Togo)

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Academic year: 2022

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Texte intégral

(1)

1 Efoe Mawunyigan KINI

kiniefoe@gmail.com

01BP 2934 Lomé 01 (TOGO)

Docteur en droit public, Enseignant-Chercheur à la Faculté de droit de Université de Lomé (Togo)

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2 RESUME

La crise de la représentativité semble créer une représentation déformée de la théorie de la séparation des pouvoirs. Cependant, loin des hypothèses pessimistes, on peut aussi considérer que, s’il y a crise, ce n’est pas une crise affectant l’existence du Parlement lui-même, mais plutôt une crise d’adolescence de la démocratie représentative. De toute évidence le Parlement est débout et conserve ses prérogatives propres : le pouvoir législatif commence avec le Parlement et finit avec lui sur fond de monopole d’adoption d’acte de puissance législative. De plus, que le Parlement soit le lieu symbolique où s’incarne la démocratie, quel qu’en soit le type, ne fait aucun doute.

MOTS CLES : Parlement, fait majoritaire, discipline partisane, gouvernement de parti, démocratie représentative.

ABSTRACT

The crisis of representativeness seems to create a distorted representation of the theory of the separation of powers. However, far from pessimistic assumptions, one can also consider that, if there is a crisis, it is not a crisis affecting the existence of Parliament itself, but rather an adolescent crisis of representative democracy. Clearly, Parliament is alive and well and retains its own prerogatives: legislative power begins with Parliament and ends with it against the background of a monopoly on the adoption of acts of legislative power. Moreover, there is no doubt that Parliament is the symbolic place where democracy is embodied, whatever its type.

KEY WORDS: Parliament, majority rule, party discipline, party government, representative democracy.

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3 L’aporie métaphorique « déclin du parlement » dans les démocraties africaines, cas du

Bénin et du Togo

Le parlement est toujours debout en écho à son éloge, au sein du système politique anglais, donné par Jean-Louis de Lolme1. Pour autant, ici et là, l’institution parlementaire fait l’objet d’une polémique doctrinale2 presque pithiatique pour traduire la décrépitude que connaîtrait le Parlement sous l’ère de la crise de la démocratie représentative3. Poussée à maturation, la réflexion débouche sur une « épitaphe » de la démocratie parlementaire4. Seulement, cette analyse du déclin du Parlement, perçue comme une ruine de la démocratie parlementaire en Afrique5, est d’une préoccupation saisissante quand on se rappelle, à bon aloi, que la démocratie se réalise avec le Parlement. À partir de là, un billet retour s’impose sur l’aporie métaphorique « déclin du parlement » dans les démocraties africaines. Il convient, bien avant tout développement, de procéder à une précision définitionnelle.

1 Jean-Louis de Lolme a pu affirmer que le Parlement « peut tout faire sauf changer une femme en homme » (cité par R. CAPITANT, « Régimes parlementaires » in Mélanges Raymond Carré de Malberg, Paris, Sirey, 1933, p. 42.).

2 Lord James Bryce intitula le chapitre 58 de son ouvrage Modern Democracies, « Le déclin des parlements ».

Il concluait que « la dignité et l’influence morale des assemblées représentatives est en déclin », L. BRYCE, Modern Democracies, vol. II, Londres, Macmillan, 1921, p. 391. Voir aussi E. SOMA, « La perfectibilité du contrôle parlementaire du pouvoir exécutif en Afrique noire francophone », in Revue Burkinabé de Droit, n° 53, 2e semestre 2017, p. 229-258 ; A.-J. ADELOUI, « Les métamorphoses du Parlement béninois », in Démocratie en Questions. Mélanges en l’honneur du professeur Théodore HOLO, Toulouse, Presses de l’Université Toulouse Capitole, 2017, p. 510-513 ; P. DABEZIES, « Le déclin du Parlement », Projet, n° 56, juin 1971, p. 671 ; A. HAURIOU, Droit constitutionnel et Institutions politiques, Paris, Montchrestien, 5e éd., 1972, p. 863 ; J. GICQUEL, Droit constitutionnel et Institutions politiques, Paris, Montchrestien, coll. « Domat Droit public », 15e éd., 1997, p. 640 ; G. CARCASSONNE, « La résistance de l’Assemblée nationale à l’abaissement de son rôle », in O. DUHAMEL et J. L. PARODI (dir.), La Constitution de la Ve République, Paris, Presses de Sciences Po, coll. « Références », 2e éd., 1988, p. 330 ; P. BASTID, Le Monde, 31 juillet 1958. Le Parlement est ainsi présenté comme étant dans une « position diminuée » (voir P. PACTET (Institutions politiques. Droit constitutionnel, Paris, Armand Colin, coll. U, 16e éd., 1997, p. 417.), maintenu dans un « corset orthopédique » (pour reprendre l’expression de Marcel Prelot, cité par D. TURPIN, Droit constitutionnel, Paris, PUF, coll. 1er cycle, 3e éd., 1997, p. 417). Voir aussi J. BARTHÉLEMY et P. DUEZ, Traité de droit constitutionnel, Paris, L.G.D.J, Édition Panthéon-Assas, 2004, p. 699.

3 M. -A. COHENDET, « Une crise de la représentation politique ? », Cités, 2004/2, n° 18, p. 41-61.

4 P. CHATENET, Épitaphe pour la démocratie parlementaire, Paris, Buchet-Chastel, 1990, 230 p.

5 K. AHADZI, « Les nouvelles tendances du constitutionnalisme africain », in Afrique Juridique et Politique, La Revue du CERDIP, volume 1, n° 2, 2002, p. 35 ; J. DU BOIS DE GAUDUSSON, « Constitution sans culture constitutionnelle n’est que ruine du constitutionnalisme. Poursuite d’un dialogue sur quinze années de transition en Afrique et en Europe », Mélanges Slobodan Milacic, Démocratie et liberté : tension, dialogue, confrontation, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. 333–348 ; voir aussi A. CABANIS et M. L. MARTIN, Les Constitutions d’Afrique noire francophone, évolutions récentes, Paris, Karthala, 1999, 192 p. ; C. DEBBASCH, « Le nouveau visage constitutionnel de l’Afrique noire francophone », in Mélanges offerts au Doyen Charles CADOUX, Presses Universitaires d’Aix-Marseille, 1999, p. 103-109 ; A. KPODAR, « Bilan sur un demi-siècle de constitutionnalisme en Afrique noire francophone », in La constitution béninoise du 11 décembre 1990. Un modèle pour l’Afrique ? Mélanges en l’honneur de Maurice Ahanhanzo-Glèlè, Paris, L’Harmattan, 2014, p. 89-126.

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4 Le premier concept, le parlement6 est appréhendé comme un pouvoir public constitutionnel dont les prérogatives sont fonction des mutations constitutionnelles et politiques. Point besoin de rappeler, ici, la longue évolution historique de l’institution parlementaire dont l’origine devrait être cherchée en Angleterre pour les Britanniques et en Islande pour les Scandinaves7. On retiendra que la plupart des manuels et traités de droit constitutionnel distinguent le Parlement de l’Exécutif avec lequel il constitue le noyau ultime de la doctrine de la séparation des pouvoirs8. Or, depuis la relecture de l’Esprit des lois par Charles Eisenmann, on sait que Montesquieu ne postulait pas une séparation stricte des fonctions dans laquelle chacun des pouvoirs publics constitutionnels n’interviendrait que dans sa seule sphère de compétence9. Si traditionnellement et restrictivement, le Parlement est présenté comme l’organe délibérant10 chargé de fabriquer la loi11 et de contrôler l’action gouvernementale, il n’est pas que cela ou n’exerce pas que cette fonction. L’accent longtemps mis sur les rapports entre le législatif et l’exécutif a poussé la doctrine à négliger les éventuels rapports qui existeraient ou pourraient exister entre le Parlement et les citoyens12. C’est

6 Voir M. DE VILLIERS et A. LE DIVELLEC, Dictionnaire du droit constitutionnel, 10e éd., Paris, Sirey, 2015, p. 257 : « le Parlement est une institution représentative par sa composition, délibérative par son mode de travail ».

7 Voir notamment : R. CARRE DE MALBERG, La Loi, expression de la volonté générale, Paris, Economica, coll. « Classiques », 1984, 228 p. ; J. J. CHEVALLIER, Histoire des institutions et des régimes politiques de la France de 1789 à nos jours, 9e éd., Paris, Dalloz, 2009, 748 p. ; J. J. CHEVALLIER, Histoire de la pensée politique, t. 3 : La grande transition : 1789-1848, Paris, Payot, 1984, 293 p. ; J.-C. COLLIARD, Les régimes parlementaires contemporains, Paris, Presses de la FNSP, 1978, 369 p. ; R. BONNARD, Les règlements des assemblées législatives de la France depuis 1789, Paris, Sirey, 1926, 543 p. ; M. PRELOT, Les institutions politiques françaises de 1789 à 1870, Paris, Les cours de droit, 1956-1957, 278 p. ; P. ROSANVALLON, La monarchie impossible. Les Chartes de 1814 et de 1830, Paris, Fayard, coll. « Histoire des constitutions de la France », 1994, 377 p. ; D. BARANGER, Parlementarisme des origines, Paris, PUF, coll. « Léviathan », 1999, 408 p. ; S. RIALS, Sieyès ou la délibération sans la prudence. Éléments pour une interprétation de la philosophie de la Révolution et de l’esprit du légicentrisme, Paris, Droits, 1991, n° 13, p. 13-138.

8 R. CARRE DE MALBERG, Contribution à la théorie générale de l’État spécialement d’après les données fournies par le droit constitutionnel français, t. 2, Paris, Dalloz, 2004, p. 47-48. Voir aussi S. MOUTON, « La séparation des pouvoirs ? Du concept politique aux concrétisations juridiques », Paris, Revue française de droit constitutionnel, vol. 120, n° 6. 4, 2019, p. 825–842. Voir par exemple, la Constitution du Bénin du 11 décembre 1990 en son article 79 et la Constitution du Togo du 27 septembre 1992 en son article 81.

9 C. EISENMANN, « L’Esprit des lois et la séparation des pouvoirs » in Mélanges Carré de Malberg, op. cit.

p. 163 et suivant, R. CAPITANT, « La Réforme du parlementarisme », in Écrits d’entre-deux-guerres (1928- 1940), Éd. Panthéon-Assas, Paris, 2004, p. 327 ; G. VEDEL, « La Constitution de 1958 », Le Monde, 19 juillet 1958, in Comité national chargé de la publication des travaux préparatoires des institutions de la Ve République.

Documents pour servir à l’histoire de l’élaboration de la Constitution du 4 octobre 1958. Volume V.

Commentaires sur la Constitution 1958-1959, Paris, La Documentation française, 2001, p. 345.).

10 J. GICQUEL et J. -E. GICQUEL, Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris, Montchestien, 2018, p. 727.

11 P. ROSANVALLON, La monarchie impossible. Les Chartes de 1814 et de 1830, Paris, Fayard, 1994, p. 9.

12 E. SOHOUENOU, H. F. KAKAÏ et M. OLIVIER (dir.), Le parlement en Afrique, Actes du colloque international organisé au Bénin, du 23 au 26 septembre 2019, Paris, L’Harmattan, 2021, p.21. ; M. TALL, Le parlement dans les États d’Afrique noire francophone : essai sur le Burkina Faso, la Cote d’Ivoire, le Togo, le Sénégal, Thèse, Poitiers 1986, 463 p. ; K. SOMALI, Le Parlement dans le nouveau constitutionnalisme en Afrique. Essai d’analyse comparée à partir des exemples du Bénin, du Burkina Faso et du Togo, Thèse de doctorat,

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5 pourquoi, dans le cadre de cette étude, le Parlement, qui peut être monocaméral ou bicaméral13, est considéré comme le pouvoir public qui discute et légitime les mesures politiques proposées par l’Exécutif pour le bien-être du peuple.

Le deuxième concept, la démocratie ne peut pas être précisée en quelques mots, car les formes, les idéologies et les illusions qu’il véhicule sont diverses. Bien que le concept soit présenté comme un passe-partout, les différentes disciplines adoptent une définition de la démocratie proche de celle athénienne en présentant le peuple comme aiguilleur. Que ce soit en science politique avec Raymond Aron 14ou en sciences juridiques avec Hans Kelsen15, la démocratie est présentée comme un pouvoir détenu ou contrôlé par le peuple, sans qu’il y ait de distinctions dues à la naissance, à la richesse, à la compétence16. Dans sa dimension juridique, les auteurs de droit constitutionnel la définissent comme « le régime politique où, ni un individu, ni un groupe, ne s’approprient le pouvoir, ses titulaires sont désignés par le peuple, par voie d’élections périodiques et sont contrôlés par lui ». La démocratie « entendu comme instrument de la liberté » implique également la « liberté-participation17 » qui « consiste à associer les gouvernés à l’exercice du pouvoir pour empêcher celui-ci de leur imposer une

dirigée par V. Cattoir-Jonville, Université de Lille-II, 2008. 491 p. ; T. ONDO, « Réflexion sur le contrôle parlementaire au Gabon », in Revue juridique et politique des états francophones, p. 303-350 ; F. MENGUE, « Le nouveau parlement gabonais », in Afrique juridique et politique, Vol n° 1, 1er sem 2002, p. 5-28.

13 voir D. KOKOROKO, « Réflexions sur les secondes chambres en Afrique noire francophone », R.T.S.J, n° 1, 2012, p. 10 ; A. SALL, « Processus démocratique et bicéphalisme du pouvoir exécutif en Afrique Noire Francophone », E.D.J.A, n° 66, 2005, p. 63 ; K.A.A. KUAKUVI, Les secondes chambres du parlement dans les États francophones : le cas du Burundi, de la France, du Gabon et du Sénégal, thèse de doctorat, dirigée par D.

Kokoroko, Université de Gand, 2012, 370 p. ; P. GUENIFFEY, « Constitution et intérêts sociaux : le débat sur les deux chambres », in M. TROPER et L. JAUME (dir.), 1789 et l’invention de la Constitution, Paris, LGDJ, 1994, p. 77-88.

Dans les États unitaires, le Parlement est composé d’une assemblée unique appelée Assemblée nationale. C’est le cas au Bénin (art. 79 al. 1er de la Constitution du Bénin), au Mali (art. 59 al. 1er de la Constitution du Mali) et au Niger (art. 83 de la Constitution nigérienne de la VIIe République du 25 novembre 2010). Dans d’autres États, unitaires comme fédéraux, le Parlement est composé de deux chambres, la première représentant le peuple, et, la seconde, les collectivités territoriales ou les États fédérés. Dans ce deuxième type d’États, le Parlement comprend donc une Assemblée nationale et un Sénat. Il en est ainsi au Burkina Faso (art. 78 de la Constitution du Burkina Faso), au Cameroun (art. 14-1) de la Constitution du Cameroun), au Gabon (art. 35 de la Constitution de la République gabonaise) et au Togo (art. 51 de la Constitution du Togo). En droit comparé, on peut citer la France (art. 24 al. 2 de la Constitution française).

14 R. ARON, Démocratie et totalitarisme, Paris, Folio, 1987, 370 p.

15 H. KELSEN, La démocratie ; sa nature, sa valeur, réimpression de la 2e édition de 1932, Paris, Dalloz, juin 2004, 142 p.

16 M. PRELOT et G. LESCUYER, Histoire des idées politiques, Paris, Dalloz, 13e éd., août 1997, p. 54. ; P. BRAUD, Science politique, La démocratie., Seuil, Paris, mars 1997, p. 61. ; M. DUVERGER, Institutions politiques et droit constitutionnel. Les grands systèmes politiques, Paris, PUF, 1980, p.53 et 81. ; G. BURDEAU, F. HAMON et M. TROPER, Droit constitutionnel, Paris, L.G.D.J., 27e éd., 2001, p. 86. ; P. ARDANT, Institutions politiques et droit constitutionnel, Paris, L.G.D.J., 18e éd., 2006, p. 145. ; P. PACTET, Institutions politiques, droit constitutionnel, Paris, A. Colin, 26e éd., 2007, p. 85.

17 G. BURDEAU, Les régimes politiques, Paris, LGDJ, 1970, p. 575.

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6 autorité discrétionnaire »18. Prise dans ce sens, « l’objectif de la démocratie est alors tout à la fois d’assurer aux individus et aux groupes les avantages déjà acquis et de garantir leur participation aux bénéfices résultant de la croissance économique19 ». L’idéal démocratique n’est réel que sous sa forme représentative20. Au reste, dans le cadre de cette étude, la démocratie est appréhendée comme le gouvernement du peuple, par les représentants du peuple et dans l’intérêt du peuple21. Sur ce dernier point et à défaut de passer le cap de la transition vers la consolidation démocratique22, les États africains connaissent aussi une crise de la représentativité marquée par un rejet du Parlement.

Jamais la crise de la représentativité n’a été aussi débattue qu’aujourd’hui avec autant de regret et de désespoir sur fond d’une crise du Parlement. Le citoyen guette les dirigeants et, directement encore, la catégorie particulière des élus. Malheur à ces derniers s’ils n’obtiennent pas des réponses concrètes aux problèmes factuels. Donc de manière récurrente, des questionnements traversent le débat constitutionnel à la foi sur le sens, l’utilité et la portée effective du travail parlementaire. Bien évidemment, la question du bicamérisme n’est pas oubliée. Face à autant de problématiques, sommes-nous véritablement en présence d’un

« déclin du parlement » alors même que l’institution est omniprésente ? En clair, peut-on affirmer à la lumière des pratiques parlementaires que le processus démocratique en Afrique peut véritablement se poursuivre sans le Parlement ?

Ce tableau sombre de l’institution parlementaire ne fédère pas forcément toutes les opinions. L’apport de la démarche est surtout de faire appel à des fondamentaux inhabituels pour parvenir à de nouvelles conclusions fondamentalistes. Il y a donc une très grande richesse d’activités des parlements qui est ignorée. En réalité, la perception du déclin masque la nature

18 Ibidem, p. 576.

19 G. BURDEAU, Les régimes politiques, op. cit., p. 579.

20 La démocratie représentative ou le gouvernement représentatif ou encore le régime représentatif est un système politique dans lequel on reconnaît à une assemblée restreinte le droit de représenter un peuple, une nation ou une communauté et de prendre les décisions la concernant. Elle se distingue de la démocratie directe, dans laquelle l’essentiel des décisions est pris par l’ensemble des citoyens. Elle a été théorisée à travers les considérations de James Madison lors de la Révolution américaine et d’Emmanuel-Joseph Sieyès lors de la Révolution française.

Sur la théorie de la représentation voir E. J. SIEYÈS, Quelques idées de constitution applicables à la ville de Paris en juillet 1789, Paris, Hachette, 2017, 40 p.

21 K. HOUNAKE, Les juridictions constitutionnelles dans les démocraties émergentes de l’Afrique noire francophone : le cas du Bénin, du Gabon, du Niger, du Sénégal et du Togo, Thèse de doctorat, dirigé par K.

Ahadzi-Nonou et D. Breillat, Université de Lomé, 2012, p. 17.

22 Sur le processus de démocratisation en Afrique postcoloniale voir notamment E. KINI, La démocratie devant l’Union africaine, Thèse de doctorat, dirigée par D. Kokoroko et D. Gnamou, Université de Lomé, 2018, p. 20 et suivant.

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7 multifonctionnelle du Parlement23. Pour nous, les fonctions du Parlement sont doubles : d’un côté, elles découlent des relations entre le législatif et l’exécutif et, de l’autre, des rapports avec le peuple. Sur le premier point, l’analyse offre un cadre cohérent de « viscosité24 » afin d’évaluer l’impact du parlement sur les projets de loi émanant de l’exécutif25. Mais, si on tient compte des autres fonctions qu’il remplit, y compris celle, essentielle, d’approuver les lois et les impôts, son rôle apparaît plus important. C’est pourquoi cette institution, considérée en déclin, reste à notre sens omniprésente dans le paysage institutionnel africain, qui pour l’essentiel, se limitera à deux États d’Afrique noire francophones : le Bénin et le Togo26.

On comprend alors avec Hans Kelsen que : « la démocratie directe n’étant pratiquement pas applicable à l’État moderne, on ne saurait douter sérieusement que le parlementarisme soit aujourd’hui la seule forme véritable de réalisation de l’idée démocratique, et que par suite le destin du parlementarisme décidera de celui de la démocratie27 ». Le Parlement est nécessaire pour l’accomplissement de la démocratie et la démocratie est le terreau sur lequel s’épanouit, mieux se modernise le Parlement28. Dans ce contexte, la façade de collaboration que présente le Parlement vis-à-vis de l’Exécutif (I) cache fondamentalement les rapports entre le Parlement et le peuple (II).

I. LE DÉCLIN : UN AVEU DE FAÇADE

L’articulation des pouvoirs entre le Parlement et le gouvernement est telle que le dernier a besoin du soutien du premier pour la mise en œuvre de son programme d’action29. Dès lors,

23 Le mot « déclin » signifie, aux termes du Littré « l’état d’une chose qui penche vers sa fin, qui perd de sa force, de son éclat ». Apparaît donc dans cette définition l’idée d’une situation plus ou moins élevée d’où l’on s’écarte en direction du bas. À défaut de ces réformes, le Parlement ne serait plus encore utile (voir la première phrase de l’ouvrage de P. AVRIL, Les Français et leur Parlement, Paris : Casterman, coll. P. H., 1972, p. 7 ; A. CHANDERNAGOR, Un Parlement pour quoi faire ? Paris, Gallimard, coll. Idées, 1967 ; M. ROCARD, Un député, pour quoi faire ? Paris, Syros, 1973.).

24 La viscosité fait référence à la capacité de résister au changement dans l’ordonnancement des molécules, dans ce cas, les molécules législatives.

25 J. BLONDEL et al., « Legislative Behavior : Some Steps Towards a Cross-National Measurement», Government and Opposition, vol. 5, n° 1, 1970, p. 67–85. Voir aussi Ph. NORTON, « Parliament and Policy in Britain : The House of Commons as a Policy Influencer», Talking Politics, vol. 13, n° 2, 1984, p. 198–221).

26 La raison fondamentale de ce choix est simple. La trajectoire de démocratisation de ces pays est caractérisée par de nombreuses similarités, diversités et nuances révélatrices des heurts et malheurs du processus de démocratisation en Afrique. Le Bénin a adopté un régime de séparation alors qu’au Togo le régime politique présente les caractéristiques d’un régime parlementaire avec une dose de présidentialisme.

27 H. KELSEN, La démocratie. Sa nature - sa valeur, trad. Charles Eisenmann, Paris : Sirey, 2e éd., 1929, rééd., Economica, coll. Classiques, Série politique et constitutionnelle, 1988, p. 38.

28 P. LAUVAUX, Le parlementarisme, PUF, coll. « Que sais-je ? », Paris, 1987, p. 28.

29 Voir dans ce sens l’article 78 alinéas 2 et 3 de la Constitution de la République du Togo du 27 septembre 1992 :

« Avant son entrée en fonction, le Premier ministre présente devant l’Assemblée nationale le programme d’action de son gouvernement. L’Assemblée nationale lui accorde sa confiance par un vote à la majorité absolue de ses membres. »

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8 cette montagne institutionnelle est interprétée comme un déclin du Parlement, mais en réalité n’est qu’un aveu de façade, pouvant être analysée tant sur le plan politique (A) que technique (B).

A. Un aveu tiré d’un argument politique

En application au domaine parlementaire de l’adage « l’union fait la force », le Gouvernement et la majorité parlementaire sont obligés d’aller de concert pour garantir le triomphe de leur philosophie politique. Georges Burdeau a pu parler d’un gouvernement de parti30 fondé sur le sacro-saint principe de discipline majoritaire (1) au bénéfice de la pérennité de l’action gouvernementale (2).

1. L’explicite principe sacro-saint de discipline majoritaire

La pratique du fait majoritaire31 trouve son expression parfaite dans la discipline de vote suivie par les parlementaires32. Ainsi, toute l’organisation du groupe converge vers cet objectif que protège surtout le président du groupe majoritaire.

Les groupes parlementaires sont perçus comme des « fragments de l’un des pouvoirs publics33 » qui, selon la formule de Jean Gicquel, « donnent vie au Parlement et […] le résument34 ». Cet aphorisme n’est pas innocent. Il illustre le passage d’une conception individuelle du mandat parlementaire, héritée de la théorie du régime représentatif, à une conception collective du travail parlementaire, ordonnée autour des groupes35. À ce premier acte, il faut en ajouter son ondulation, tout aussi avérée, celle de la présidentialisation des groupes parlementaires. Car, les règlements des assemblées ne connaissent « l’intervention des

30 G. BURDEAU, Traité de Science politique, t. V : Les régimes politiques, Paris, LGDJ, 2e éd., 1970, p. 417 et suivant.

31 Le fait majoritaire consiste, pour le Gouvernement, à disposer d’une majorité stable et fidèle, sur laquelle il peut s’appuyer tout au long de son mandat. Une partie de la doctrine considère qu’il ne serait apparu qu’au fil de la pratique institutionnelle, en raison du contexte d’application de la Constitution. (Voir J BENETTI, Droit parlementaire et fait majoritaire à l’Assemblée nationale sous la Ve République, Thèse de doctorat, dirigé par J.

Gicquel, Université Paris 1, 2004, 468 p. Le fait majoritaire ne peut être assimilé à une règle, ni même à une loi naturelle de la vie politique. Il s’agit d’une série de « phénomènes ordonnés autour de la majorité parlementaire ».

J. BENETTI, « L’impact du fait majoritaire sur la nature du régime », LPA, n° 138, 2008, p. 20

32 F. M. DJEDJRO, « Principe majoritaire et démocratie en Afrique », RID, n° 39, 2008, p. 12.

33 E. PIERRE, Traité de droit politique, électoral et parlementaire, 5e éd., Paris, Librairie-Imprimeries Réunis, 1924, p. 276.

34 Cité par J. BENETTI, « Le président du groupe majoritaire », Pouvoirs, n° 146, 2013, p. 34.

35 Les groupes parlementaires ou groupes politiques sont des formations intérieures des assemblées permettant aux parlementaires de se regrouper par affinité́ politique. Ils se présentent comme des organes incontournables du fonctionnement des parlements modernes. Voir notamment E. LEMAIRE, Les groupes parlementaires, Paris, L.G.D.J, 2020, 318 p.

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9 groupes que par l’intermédiaire de leurs présidents36 ». À ce titre et en lien avec les témoignages de Chateaubriand37, la conférence des présidents, réunion des présidents de groupes, s’analyse comme un « Parlement miniature38 » qui règle le scénario de la vie parlementaire.

La discipline de vote, amalgame d’autolimitation et d’autoritarisme, n’est pas qu’une illusion. Elle est une construction « et non pas un comportement inné […] Image d’Épinal à la fois attractive et répulsive39 ». Dans ce sens, les membres des assemblées parlementaires apparaissent comme inféodés aux désirs de l’Exécutif. C’est justement cette construction qui participe à la dévalorisation du Parlement. Mais au fond, cette image apporte également une définition positive de la disposition des parlementaires à soutenir l’action du Gouvernement.

Elle présente le parlementaire comme un fidèle à ses engagements, capable de stabilité.

Le parlementaire, à l’instar de tout citoyen libre, accepte de contraindre sa liberté afin qu’elle s’exerce dans un sens compatible avec le bien commun40. La discipline de vote n’est donc pas un démembrement de la discipline parlementaire41. Elle relève tout à la fois d’une pratique autoritaire en ce qu’il s’agit d’imposer cette stabilité aux élus, et revêt un aspect consensuel, dans la mesure où les parlementaires ont eux-mêmes participé à l’élaboration de la consigne de vote. Du reste, les parlementaires ne parlent ni de godillot, ni de discipline de vote dont ils semblent n’avoir même pas conscience, mais d’autodiscipline et de responsabilisation.

Le rôle du président du groupe majoritaire constitue le nouveau fer de lance de l’émancipation de la majorité. Sa posture habituelle anticipe finalement le sens dans lequel la majorité entend diriger le vote. En effet, la discipline partisane voudrait que le vote se pose dans la directive imposée par le président du groupe. Elle s’exprime dans le cadre plus global des règlements parlementaires, visant le bon ordre. Ces règles sont des « mesures d’ordre intérieur soumises au respect de l’ordre constitutionnel42 », enchevillées dans des « usages […],

36 P. AVRIL, J.-E. GICQUEL et J. GICQUEL, op. cit. p. 103.

37 Chateaubriand a en effet laissé un témoignage sur les réunions de groupe parlementaire en ces termes : « nous allions assez souvent, rue Thérèse, passer la soirée en délibérations chez M. Piet […] Nous parlions de la loi présentée, de la motion à faire, du camarade à porter au secrétariat, à la questure, aux diverses commissions. » (F.- R. DE CHATEAUBRIAND, Mémoire d’outre-tombe, 3e partie, livre 25, chap. 8, Gallimard, Paris, 1951, p. 16.)

38 J. BENETTI, op. cit., p. 34.

39 D. REIGNIER, La discipline de vote dans les assemblées parlementaires sous la cinquième République, Thèse de doctorat, dirigée par G. TOULEMONDE, Université de Lille 2, 2011, p. 11.

40 Ibidem.

41 Elle s’exerce dans le cadre du droit qui est appliqué au Parlement, sans toutefois relever de celui-ci. Elle ne saurait pas davantage être réduite à un démembrement de la discipline partisane. En effet, loin de constituer une donnée purement politique, elle participe à structurer le régime politique et les institutions, notamment en leur apportant la stabilité que le droit seul ne peut assurer.

42 P. JAN, Le Parlement de la Cinquième République, Paris, Ellipses, 1999, p. 11.

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10 pratiques anciennes et éprouvées43 ». Le rôle stratégique du président du groupe majoritaire le place, dans certaines circonstances, au-dessus du président de l’assemblée parlementaire, surtout lorsque ce dernier, membre du groupe de la majorité est présent aux réunions de la majorité.

Utile pour garantir la discipline au sein du parti parlementaire majoritaire, le fait majoritaire peut offrir implicitement au gouvernement une majorité parlementaire stable.

2. L’implicite jeu de séduction gouvernementale

Le jeu de séduction réciproque entre le Parlement et le gouvernement est pourvu de frontières à la fois intangibles et infranchissables : « on est dedans ou on est dehors ». Ce symbolisme multiséculaire raisonne dans la rédaction des Constitutions africaines à l’image du syndrome de la mante religieuse44.

La majorité parlementaire « gouverne » incontestablement dans le régime parlementaire. Elle présente avec le gouvernement d’évidentes analogies. Ce modèle est caractéristique d’un gouvernement parlementaire.45 Seulement, dans le régime présidentiel, on ne peut dire pour autant que la majorité gouverne. À l’évidence, la majorité au Togo ou au Bénin s’écarte de cette référence, et doublement. Premièrement, ces majorités parlementaires sont « asservies » au sens cybernétique du terme : elles sont contrôlées de l’extérieur.

Fonctionnellement, sa raison d’être est de soutenir le gouvernement. Or, le gouvernement, selon la formule consacrée, ne « procède » pas du Parlement, mais du président de la République46. Ainsi ce n’est pas la majorité qui définit le gouvernement, c’est exactement l’inverse. À ce niveau, se crée non pas une majorité parlementaire, mais une majorité présidentielle. C’est donc l’élection présidentielle qui constitue la décision politique majeure pour la formation de la

43 P. JAN, idem, p. 12.

44 Le rôle du Gouvernement est précisément de réaliser la politique désirée par la majorité des électeurs, lesquels sont représentés au sein de l’Assemblée nationale. C’est la raison pour laquelle l’Assemblée nationale investit le Gouvernement de sa confiance, à charge pour lui de suivre, le plus fidèlement possible, la voie tracée lors de la campagne électorale des élections législatives surtout présidentielles.

45 P. AVRIL, « La majorité parlementaire », in Pouvoirs, n° 68, 1994, p. 45-53.

46 L’article 66 de la Constitution du Togo dispose expressément que le président de la République « nomme le Premier ministre. Il met fin à ses fonctions ». Dans une rédaction similaire le constituant béninois pose à l’article 54 que le président de la République « est le détenteur du pouvoir exécutif. Il est le chef du Gouvernement, et à ce titre, il détermine et conduit la politique de la Nation. Il exerce le pouvoir réglementaire (…) Les membres du Gouvernement sont responsables devant lui ». Le Premier ministre n’est donc pas choisi par la majorité, il lui est imposé par la décision présidentielle, et s’il la dirige, c’est à ce titre. Par ailleurs l’Assemblée nationale peut refuser sa confiance au Gouvernement (article 97 alinéa 2 de la Constitution), ou mettre en cause la responsabilité du Gouvernement (article 98 de la Constitution) cependant que le Président de la République peut prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale (article 74 de la Constitution).

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11 majorité47. Si la majorité ne s’inscrit plus dans le sillage de l’élection présidentielle passée, elle repose, au moins dans les esprits, sur l’anticipation de l’élection présidentielle à venir. La portée de cette évidence est telle qu’au Togo, même avec l’inversion du calendrier48, l’élection présidentielle à venir pèse sur la législature en cours. Ici c’est l’élection présidentielle qui constitue une queue de comète de l’élection législative49. La preuve de cette prégnance présidentielle est apportée par le fait que le chef du Gouvernement à l’issue des élections législatives de 2018 a été reconduit avec l’allure d’une préservation de la majorité présidentielle après l’élection présidentielle de 2020. Paraphrasant Georges Burdeau, on pourrait dire alors que la majorité n’est pas gouvernante, mais qu’elle est plutôt gouvernée50.

Deuxièmement, rappelons que le gouvernement avait nécessairement une majorité avant la révision de 200251. Il a fallu enfermer la majorité initiale dans un réseau de contraintes qui couvrait l’ensemble de l’activité parlementaire en réduisant le rôle de la confiance. Dès lors que celle-ci avait été accordée lors de l’investiture52, elle était présumée se maintenir tant qu’une manifestation explicite de défiance n’aurait pas eu lieu. En conséquence, le gouvernement se voyait conférer un monopole de l’initiative qui plaçait la majorité dans sa dépendance, depuis la fixation de l’ordre du jour jusqu’au vote final des textes, en passant par l’immunité des projets et la maîtrise des amendements. Dans ce cas, la majorité est asservie par les mécanismes du parlementarisme rationalisé. Il ne s’agit plus ici de l’ombre du président de la République, mais des rapports avec le Gouvernement. Pour évoquer encore Georges Burdeau, c’est l’articulation

47 Bien qu’il ne s’agit pas au Bénin et au Togo d’un système bipartisme, le mode de scrutin permet au parti présidentiel d’obtenir une majorité fut-elle relative. Au Bénin, c’est le scrutin proportionnel de liste dans vingt- quatre circonscriptions correspondant aux limites des départements. Le scrutin se tient avec des listes fermées et les résultats en voix conduisent à une répartition des sièges entre tous les partis ayant franchi le seuil électoral de 10 % des suffrages exprimés, selon le système du quotient simple, puis de la méthode du plus fort reste. Le Togo a adopté le mode de scrutin proportionnel de liste dans trente circonscriptions de 2 à 10 sièges chacune. Le scrutin se tient avec des listes fermées paritaires comprenant deux fois plus de candidats que de sièges à pourvoir, et les résultats en voix conduisent à une répartition des sièges sans seuil électoral, mais selon la méthode du plus fort reste.

48 Les élections législatives se tiennent 2 ans avant l’élection à la fonction de président de la République. Même au plus fort de la cohabitation à la béninoise (La cohabitation se caractérise par « la contradiction politique entre les majorités présidentielle et parlementaire », in P. AVRIL et J. GICQUEL, Lexique de droit constitutionnel, Paris, P.U.F, 5e édition, 2016, p. 22 ; Sur la cohabitation, lire, à titre d’illustration, A. M. COHENDET, La cohabitation : leçons d’une expérience, Paris, P.U.F, 1993, 343 p.) intervenue entre 1991-1995 et entre 1999-2003, les députés n’ont jamais été séduits par l’idée d’actionner la procédure d’outrage à l’Assemblée nationale aux dépens du chef de l’État (F. J. AÏVO, « Le Bénin à l’épreuve du fait majoritaire », Revue Juridique et Politique, n° 1, 2008, p. 128-131.).

49 G. GRUNBERG, « La crise de notre système politique », Commentaire, n° 114, printemps 2013, p. 57.

50 G. BURDEAU, Traité de Science politique, op. cit., p586.

51 Voir l’article 66 de la Constitution de 1992 révisé par ma loi constitutionnelle n° 2002-029 du 31 décembre 2002.

52 Article 78 alinéa 2 et suivant « Avant son entrée en fonction, le Premier ministre présente devant l’Assemblée nationale le programme d’action de son gouvernement. L’Assemblée nationale lui accorde sa confiance par le vote à la majorité absolue de ses membres ».

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12 entre le citoyen abstrait et « l’homme situé » que doit réaliser le député de la majorité, en même temps porte-parole de ses électeurs.

Globalement l’articulation des pouvoirs au Bénin et au Togo implique une cohérence entre la majorité parlementaire et le gouvernement. Sous ce rapport politique, la majorité parlementaire renonce volontairement à utiliser, au plan technique, ses prérogatives constitutionnelles susceptibles de bouleverser cette architecture.

B. Un aveu tiré des arguments techniques

Dans la dénonciation des faiblesses des Parlements, il est souvent évoqué des arguments qu’ils sont mal outillés techniquement53. De ce fait, l’affaiblissement du rôle des assemblées parlementaires se manifeste notamment dans leur fonction première de consentir à l’impôt (2) et dans la deuxième fonction de fabriquer la loi (1).

1. La perte justifiée du pouvoir budgétaire

Aux origines des assemblées parlementaires était le consentement à l’impôt.54 Dans les démocraties africaines comme partout ailleurs, le Parlement est un rouage essentiel d’approbation des politiques, du vote des lois de finances initiale et rectificative et d’examen des comptes de fin d’année55. Seulement, les parlements sont suffisamment dépossédés de leur pouvoir budgétaire sur fond de technicité et de contrainte communautaire.

Les systèmes constitutionnel et parlementaire en Afrique ont hérité de la lente maturation du consentement à l’impôt opéré dans les États occidentaux. Guy Carcassonne rappelait d’ailleurs dans un commentaire de l’article 14 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qu’« historiquement il n’a pas été un principe démocratique parmi les autres, il a été celui qui a donné naissance à la démocratie elle-même56 ». La plupart des Constitutions traduisent plus ou moins clairement ce principe dans une formule lapidaire : la loi fixe les règles concernant : «  […] l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures57 ». Ce cadre constitutionnel se traduit concrètement par une formule quasi rituelle

53 K. SOMALI, Le Parlement dans le nouveau constitutionnalisme en Afrique. Essai d’analyse comparée à partir des exemples du Bénin, du Burkina Faso et du Togo, op. cit., p. 253.

54 Voir V. RIQUETI et F. QUESNAY, Le Supplément à la Théorie de l’impôt, Genève, Slatkine, 1776, 204 p.

55Relativement aux procédures budgétaires en Afrique noire francophone, voir notamment G. MOYEN, « La procédure budgétaire dans les États d’Afrique francophone : Cas du Congo, du Bénin, du Togo et du Burkina Faso », Annales de l’Université Marien NGOUABI, Vol. 14, n° 3, 2013, p. 48-70.

56 G. CARCASSONNE, La Constitution, 11e éd., Paris, Seuil, 2013, p. 426.

57 Voir la rédaction de l’article 84 de la Constitution du Togo, de l’article 98 de la Constitution du Bénin, de l’article 101 de la Constitution du Burkina Faso, de l’article126 de la Constitution de la République Démocratique du Congo ou de l’article 71 de la Constitution de la République de Côte d’Ivoire.

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13 contenue dans le premier article de chaque loi de finances initiale : « La perception des impôts […] continue d’être effectuée pendant l’année58 ». Cette disposition rappelle de ce fait même, le principe de la légalité fiscale. Il s’agit d’un principe constitutionnel intangible qui met les parlementaires au cœur de l’adoption de la législation fiscale. Pour Loïc Philip, l’application de ce principe aurait même renforcé le pouvoir fiscal du Parlement en étendant son champ de compétence comme jamais59.

Cependant, le Parlement est désormais dans une situation de contrainte que l’on pourrait qualifier de multimodale. En effet, si l’essentiel de la législation fiscale se trouve bien contenu dans des lois de finances et maintenant plus rarement dans des lois ordinaires, la

confection et l’adoption des lois financières font l’objet de multiples contraintes.

Les parlementaires sont amenés à voter chaque année des dispositions fiscales nombreuses, complexes sur lesquelles ils n’ont finalement que peu de prise. Trois éléments d’analyses peuvent être relevés. Dans un premier temps, une rare unanimité se dégage pour admettre que

« le Gouvernement doit être seul compétent pour préparer le budget et le soumettre au parlement 60». La primauté du gouvernement tient fondamentalement à la technicité entourant la procédure budgétaire61. Ainsi, le vote du budget s’effectue par les grandes masses insusceptibles de modification impunie. Dans un deuxième temps, la liberté politique du parlement est de plus en plus réduite. Les dépenses sont reconduites d’une année à une autre pour près de 85 %. Autrement, la liberté du parlement ne représente que 15 % du budget62. Plus encore, la liberté politique d’action du parlement est enchâssée dans des interdictions constitutionnelles. Dans un troisième temps, le gouvernement, sur habilitation législative, dispose d’une franchise annuelle pour se substituer au Parlement. Les douzièmes provisoires par ordonnance permettent au gouvernement de s’affranchir des discussions et du vote parlementaire sur la Loi de finances63.

58 M. BOUVIER, Introduction au droit fiscal général et à la théorie de l’impôt, 12e éd., Paris, LGDJ-Lextenso, 2014, p. 57.

59 L. PHILIP, « Le droit constitutionnel des finances publiques », Revue française de finances publiques, n° 7, 1984 ; L. PHILIP, Droit fiscal constitutionnel. Évolution d’une jurisprudence, Paris, Economica, 2014, 154 p.

60 C. VINTZEL, Les armes du gouvernement dans la procédure législative, Paris, Dalloz, 2011, p. 43.

61 Voir notamment M. BOUVIER et P. PARINI, La nouvelle administration financière et fiscale, Paris, LGDJ, 2011, 198 p. ; M. COLLET, L’Impôt confisqué, Paris, Odile Jacob, 2014, 104 p.

62 V. CONSTANTINESCO et S. PIERRE -CAPS, Droit constitutionnel, Paris, PUF, 2e éd., 2004, p.196.

63 Cet instrument juridique, peut être présenté comme une réponse au « shutdown » là la suite au désaccord budgétaire aux États-Unis, entre l’Exécutif et le Congrès. Le Bénin a connu un exemple de mise en vigueur du budget par le recours aux pouvoirs exceptionnels du Président de la République. Discuté devant l’Assemblée nationale, le projet de loi de finances portant budget général de l’État, exercice 2014 a été rejeté le 19 décembre à raison de 44 voix contre 39. Au moment de passer au vote du budget, un premier groupe de députés invoquent l’article 57 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale afin que le vote du budget se déroule en secret, alors

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14 D’autres contraintes communautaires, surtout dans l’espace UEMOA64, viennent éroder les prérogatives budgétaires du parlement. La question des sources externes du droit fiscal65 et partant du rôle du Parlement dans la réception de ces normes communautaires est fondamentale dans la compréhension de la relation entre le Parlement et l’impôt. La commission de l’UEMOA a, en effet, défini des critères de convergence afin de s’assurer que tous les pays

travaillent à maintenir les équilibres requis pour la stabilité de la monnaie commune.

Les indicateurs concernent, entre autres, la masse salariale, le déficit budgétaire, l’endettement et l’inflation. Dans les domaines du droit fiscal, par exemple, la TVA, les droits d’apport et les droits d’accises font l’objet de mesures d’harmonisation très poussées.

L’affaiblissement de la fonction du parlement n’est pas seulement justifié dans la procédure budgétaire, il présente aussi une efficacité dans la procédure législative.

2. La perte relative de l’initiative des lois

D’une manière générale, l’élément commun à tous les Parlements au monde est la prééminence de l’Exécutif en matière d’initiative législative. Mais en réalité, l’élargissement des centres d’impulsion législative66 est compensé par le temps d’études en commission parlementaire.

Depuis le « passage de la démocratie politique à la démocratie économique et sociale67 », le Gouvernement, détenteur de « l’Administration […] donc de l’information […]

facteur essentiel de puissance68 », est le mieux outillé pour initier des projets en toute cohérence avec les besoins de la population69. Pour De Serre, « proposer la loi, c’est régner70 ». Cette

que ce vote a toujours eu lieu à main levée conformément à l’article 56 du RI. La Cour constitutionnelle est intervenue pour annuler le rejet du budget 2014 en ce que la procédure suivie est inconstitutionnelle par une décision DCC 13-171 du 30 décembre 2013.

64 L’Union économique et monétaire des États de l’Afrique de l’Ouest (UEMOA) est un ensemble de huit pays de l’espace ouest-africain ayant en partage l’usage du franc CFA. Il a été institué en 1994 par le Traité de Dakar du 10 janvier de la même année. L’UEMOA vise à réaliser un espace commun fondé sur la libre circulation des personnes et des biens.

65 Sur cette question, cf. J. LAMARQUE, O. NEGRIN et L. AYRAULT, Droit fiscal général, 2e éd., Paris, LexisNexis, 2011, p. 171-334.

66 Auparavant conçut selon le modèle hiérarchique conférant la primauté au pouvoir législatif, la production du droit pourrait maintenant davantage s’analyser dans le contexte de la théorie systémique du droit, selon laquelle le système juridique prend la forme d’un réseau (F. OST et M. V. DE KERCHOVE, De la pyramide au réseau ? Pour une dialectique du droit, Bruxelles, Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, 2002, 597 p. Voir aussi M. COUDERC, « Les travaux préparatoires de la loi ou la remontée des enfers », D, 1975, p. 249.) ; R. DRAGO (dir.), La Confection de la loi, Paris PUF, 2005, 307 p.

67 M. AMELLER et G. BERGOUGNOUS, L’Assemblée nationale, Paris, PUF, Que sais-je ?, 2000, p. 5.

68 B. CHANTEBOUT, Droit constitutionnel et science politique, Paris Dalloz, 16e édition, 1999, p. 293.

69 Y. MENY et Y. SUREL, Politique comparée. Les démocraties, Allemagne, États-Unis, France, Grande- Bretagne, Italie, Paris, LGDJ, 2001, p. 224.

70 Cité in E. OLIVA, L’article 41 de la Constitution du 4 octobre 1958, Paris, Economica, 1999, p. 26.

(15)

15 affirmation a été depuis mise à jour comme la substance motrice ou la phase essentielle de la fonction législative71. La doctrine est unanime pour reconnaître le déplacement exponentiel de l’initiative des lois au profit du Gouvernement72. La conception de la séparation des pouvoirs

« implique de manière implicite que le Gouvernement, parce qu’il est responsable de l’exécution de la loi, ne doive pas avoir la responsabilité d’exécuter une loi qu’il n’a pas lui- même décidé d’introduire. A contrario, il ne faut pas que les membres du Parlement puissent introduire des mesures pour l’exécution desquelles ils ne sont pas eux-mêmes concernés73 ».

Ainsi, les projets de loi représentent 90 % dans la fabrication des lois dans presque tous les États74. La spécialisation fonctionnelle des organes est telle qu’a priori, l’Exécutif ne devrait pas disposer de l’initiative des lois. L’évidence est toute autre. Le Président de la République a l’initiative des lois « concurremment avec les membres de l’Assemblée nationale75 ». En effet, le Gouvernement ne peut guère espérer voir son programme aboutir de manière complète et unitaire s’il n’est pas dominant dès l’impulsion de la loi. Cette première phase de la procédure législative comporte deux stades successifs que sont l’initiative proprement dite et l’inscription à l’ordre du jour76. Sur ce dernier point, l’inscription, par « priorité », à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale est de droit si le Gouvernement en fait la demande77. Car in fine, l’une des vérités fondamentales de la vie politique contemporaine se résume à « Gouverner c’est légiférer78 », c’est-à-dire faire des lois ou en demander le vote au Parlement.

Certes, l’impulsion est une étape cruciale de la procédure législative, mais ne peut pas à elle seule être déterminante. Pour Raymond Carré de Malberg, l’initiative des lois n’est pas à elle seule un « acte de puissance législative79 ». Quoi qu’il en soit, le droit d’initiative dont dispose à bon droit le Gouvernement n’est pas plus influent que le droit de vote80. Le Parlement

71 J.-E. GICQUEL et J. GICQUEL, Droit constitutionnel et institutions politiques, 35e édition, Paris, LGDJ, 2021, p. 1107.

72 Voir par exemple I.M. FALL, Pouvoir exécutif dans le constitutionnalisme des États d’Afrique, Paris, L’Harmattan, 2008, p. 22.

73 L. BLUM, La réforme gouvernementale, 26e édition, Paris, B. Grasset, 1936, p. 292.

74 V. CONSTANTINESCO et S. PIERRE -CAPS, op. cit. p.197. Voir aussi B. MIRKINE-GUETZEVITCH,

« L’échec du parlementarisme rationalisé », Revue internationale d’histoire politique et constitutionnelle, t. IV, Paris, PUF, 1954, p. 115.

75 Voir l’article 57 de la Loi N° 90-32 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin.

76 L. FAVOREU, P. GAÏA, R. GHEVONTIAN et coll., Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2021, p. 651.

77 Voir l’article 82 alinéa 2 de la Constitution du Togo du 27 septembre 1992 ; l’article 144 alinéa 2 de la Constitution du Tchad du 4 mai 2018.

78 R. CAPITANT, « Le rôle politique du président du Reich », in revue Politique, 1932, p. 216-229 et « Le président du Reich », réédité dans les Écrits d’entre-deux-guerres, Paris, Éditions Panthéon-Assas, 2004, p. 405- 432.

79 R. CARRE DE MALBERG, Contribution à la théorie générale de l’État, 1922, réed. 2004, op. cit. p.81

80 E. PIERRE, Traité de droit politique, électoral et parlementaire, Paris, Librairie-Imprimerie Réunies, 1989, p. 81.

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16 garde en matière législative toute la prérogative de ne pas adopter les projets en question. Cela revient à dire qu’il peut transformer ce qui n’est qu’un texte, donc sans valeur juridique, en un ensemble de normes juridiques. Donc c’est le Parlement qui, au final, détient la « puissance législative81 ». L’essentiel des prérogatives en cette matière concerne le droit de discuter, d’amender, ou de refuser les projets de loi82. Le Parlement tient exactement une partie de sa légitimité institutionnelle et de la spécificité de son caractère délibérant. Cette conception a notamment été exposée par Maurice Hauriou, qui qualifiait le Parlement de « pouvoir délibérant ». Notait-il, « ce qui fait l’unité de ce pouvoir […] c’est que, dans l’accomplissement de ses fonctions variées, il procède toujours par la même opération de volonté, qui est la délibération83 ». Il décrit la délibération comme une forme de discussion dont est censée jaillir la lumière, car fondée sur la réflexion et l’esprit critique. Auctoritas, non veritas, facit legem.84

En cela, les délibérations parlementaires sont présumées plus conformes à la nature des choses85. L’accroissement de l’activité législative est fonction aujourd’hui, et il est important de le souligner, soit à l’importance des textes issus des travaux parlementaires, soit en

considération du temps passé à les examiner, ou des modifications qu’ils ont subies.

À l’évidence, le temps passé en séance publique ne traduit pas toujours ce phénomène86. Cette dialectique de la délibération et de la décision peut notamment être mise en valeur comme principe fondamental du processus des délibérations parlementaires87. En définitive, la qualité de cette délibération parlementaire se mesure à la qualité du travail du rapporteur de la commission permanente saisie au fond ou pour avis88. Ce dernier est présenté, dans les assemblées parlementaires d’Afrique noire francophone, comme la figure incontournable dans la conduite et l’organisation des débats.89

81 R. CARRE DE MALBERG, idem.

82 J.-P. CAMBY, « Le droit d’amendement, une nouveauté », in Mélanges Dimitri Georges Lavroff, Paris Dalloz, 2005, p. 109.

83 M. HAURIOU, Précis de droit constitutionnel, 2e édiction, Paris, Dalloz, 2015, p. 469.

84 C’est l’autorité et non la vérité qui fait loi.

85 M. HAURIOU, op. cit., p. 471-472.

86 L. PEGORARO, « Centralité et déclin du parlement », in Pouvoirs, n° 103, 2002, p. 105-127.

87 N. ROUSSELLIER, Le Parlement de l’éloquence. La souveraineté de la délibération au lendemain de la Grande Guerre, Paris, Presses de Sciences Po, 1997, p. 87.

88 P. CAHOUA, « Les commissions, lieu du travail législatif », Pouvoirs, n° 34, 1985, p. 43. Voir aussi, H. GEORGES, « Les pouvoirs des rapporteurs des commissions parlementaires », in Le pouvoir. Mélanges offerts à Georges Burdeau, Paris, LGDJ, 1977, p.1191.

89 F. HOURQUEBIE et F. FRAYSSE (dir.), Les commissions parlementaires dans l’espace, Paris, Montchrestien, 2011, 282 p. A. DE MONTIS, La rénovation de la séance publique du Parlement français. Étude sur l’efficacité politique de la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008, Paris, Dalloz, 2014, p. 182 et 232.

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17 Il apparaît que le travail de ses commissions permanentes, quoique souvent invisible, éloigne la critique d’une institution qui serait devenue une chambre d’enregistrement. Donc au- delà de la façade, le Parlement a su préserver l’essentiel de ses fonctions fondamentales.

II. LE DÉCLIN : UN DÉSAVEU DES FONDAMENTAUX

Le Parlement, comme pouvoir public90, possède un droit légitime d’exister, présenté par Jean Bodin, comme « suprême et absolu91 ». L’analyse des Constitutions des États étudiés démontre, en effet, une consécration des aspects fondamentaux de l’omniprésence du Parlement. Ces aspects fondamentaux peuvent être analysés d’un point de vue juridique (A) et institutionnel (B).

A. Un désaveu tiré d’un argument juridique

Le Parlement, comme d’ailleurs le président de la République, exerce indirectement la souveraineté92. Cette institutionnalisation du pouvoir93 dans l’État fait bénéficier au Parlement une double légitimité : d’une légitimité populaire (1) qui s’inscrivait dans le mouvement démocratique avant de combiner celle-ci avec la légitimité qui dépasse la temporalité, une légitimité nationale (2).

1. La temporalité de la légitimité populaire

Chez Raymond Carré de Malberg à la suite de la pensée rousseauiste, le peuple est la source de tous les pouvoirs. Ce souverain, le Peuple, écrit-il « est dans la démocratie, ce qu’est le monarque dans la monarchie. Dans la démocratie proprement dite, le peuple est le centre et la source de tous les pouvoirs 94». Seulement, l’utilisation première de la souveraineté du peuple est présentée comme une légitimité populaire à la fois temporelle et en déclin.

La souveraineté du peuple95 est ici perçue tout à la fois comme une réalité politique et juridique. Au plan politique, la souveraineté appartient incontestablement au peuple. Ainsi que

90 G. BURDEAU, Traité de Science Politique. Tome II – L’État, Paris, LGDJ, 1980, p. 309.

91 Voir J. BODIN, Les six livres de la République, Paris, Ed. Scientia Aalen, 1961, 1060 p. voir aussi G. JELLINEK, L’État moderne et son droit. Deuxième Partie – Théorie juridique de l’État, op. cit., pp. 72-168 ;

R. CARRE DE MALBERG, Contribution à la Théorie générale de l’État (Tome I), Paris, Dalloz, 2004, p. 73 ; J. ELLUL, « Recherche sur la conception de la souveraineté dans la Rome primitive », in Le Pouvoir, Mélanges

offerts à Georges BURDEAU, Paris, LGDJ, 1977, pp. 265-279. G. JELLINEK, op. cit., pp. 72-168. ; H. KELSEN, Théorie pure du droit, Paris, Dalloz, 1962, p. 378.

92Voir R. CARRE DE MALBERG, Contribution à la théorie générale de l’État, op. cit., p. 79.

93 G. BURDEAU, Droit constitutionnel et institutions politiques, 17eéd., Paris, LGDJ, 1976, p. 18.

94 R. CARRE DE MALBERG op.cit., p. 183.

95 Les penseurs du droit naturel moderne, tels Hobbes, Bodin, Pufendorf, Burlamaqui et Rousseau, ont intégré la théorie de la souveraineté dans la doctrine jusnaturaliste. Pour Pufendorf, le pacte social accomplit un transfert total de souveraineté (S. PUFENDORF, Le droit de la nature et des gens, Traduction de J. Barbeyrac, édition de

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