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Intérêts spécifiques et formation de l'opinion politique des suissesses

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Intérêts spécifiques et formation de l'opinion politique des suissesses

LLOREN, Anouk, NAI, Alessandro

Abstract

L'existence “d'intérêts spécifiques” qu'on pourrait naturellement attribuer à la catégorie des femmes est amplement débattue dans la littérature contemporaine. Ainsi, selon certains, les femmes en tant que catégorie sociodémographique seraient traditionnellement plus portées à s'intéresser à certains sujets (l'enfance, la parité entre les sexes, l'avortement, etc.) qu'à d'autres. Or, bien que la littérature sur la définition des intérêts des femmes soit assez étoffée, peu d'études essaient, de mesurer leurs effets sur le comportement politique des citoyennes. Ainsi, aucune analyse n'a été proposée jusqu'à

maintenant pour mesurer si la présence d'enjeux particulièrement parlants pour les citoyennes augmente leur engagement intellectuel (notamment dans des enjeux de démocratie directe). A travers l'analyse des votations populaires pour la période 1999–2005 (VOX), nous nous proposons de voir dans quelle mesure le niveau d'intérêt spécifique qui caractérise l'objet soumis au vote influence les stratégies cognitives que les femmes activent lors du [...]

LLOREN, Anouk, NAI, Alessandro. Intérêts spécifiques et formation de l'opinion politique des suissesses. Swiss Political Science Review, 2009, vol. 15, no. 1, p. 99-132

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:28002

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Intérêts  spécifiques  et  formation  de  l’opinion  politique   des  Suissesses  (1999-­2005)

ALESSANDRO NAI ET ANOUK LLOREN

Rutgers University et Université de Genève

L’existence   de   “intérêts   spécifiques”   qu’on   pourrait   naturellement   attribuer   à   la   catégorie  des  femmes  est  amplement  débattue  dans  la  littérature  contemporaine  (Dodson   et  Carroll  1991;;  Sapiro  1998;;  Tremblay  1998;;  Pateman  2000).  Ainsi,  selon  certains,   les   femmes   en   tant   que   catégorie   sociodémographique   seraient   traditionnellement   plus   portées   à   s’intéresser   à   certains   sujets   (l’enfance,   la   parité   entre   les   sexes,   l’avortement,  etc.)  qu’à  d’autres.  Or,  bien  que  la  littérature  sur  la  définition des intérêts des  femmes  soit  assez  étoffée,  peu  d’études  essaient,  à  notre  connaissance,  de  mesurer   leur  effet  sur  le  comportement  politique  des  citoyennes.  Ainsi,  aucune  analyse  n’a  été   proposée  jusqu’à  maintenant  pour  mesurer  si  la  présence  d’enjeux  particulièrement   parlants  pour  les  citoyennes  augmente  l’engagement intellectuel  que  celles-­ci  activent   lors   de   leur   participation   politique   (notamment   dans   des   enjeux   de   démocratie   directe).  A  travers  l’analyse  des  votations  populaires  pour  la  période  1999–2005,  et   plus  précisent  via  les  données  post-­scrutin  VOX,  nous  nous  proposons  de  voir  dans   quelle   mesure   le   niveau   d’intérêt   spécifique   qui   caractérise   l’objet   soumis   au   vote   est  en  mesure  d’influencer  les  stratégies  cognitives  que  les  femmes  activent  lors  du   processus  de  formation  de  l’opinion.  En  partant  de  modèles  dualistes  développées  en   psychologie  cognitive  (Chaiken  1980;;  Eagly  et  Chaiken  1993;;  Chen  et  Chaiken  1999),   nos  analyses  montreront  que  les  citoyennes  sont  davantage  prêtes  que  les  hommes  à   activer  des  stratégies  cognitives  plus  exigeantes  d’un  point  de  vue  intellectuel  lorsque   le  projet  soumis  au  vote  les  touche  de  près,  et  ceci  sous  contrôle  de  caractéristiques   individuelles  essentielles  telles  leur  niveau  de  compétence  politique.

KEYWORDS: Women’s Issues • Opinion Formation • Cognitive Strategies • Gender and Political Behavior • Switzerland

Introduction1

La distinction entre sphère privée et sphère publique, entendue, selon Okin (1989: 111), comme la séparation entre l’univers domestique ou familial

1 Les auteurs tiennent à remercier M. Gianni (Université de Genève) ainsi que les deux

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et l’univers économique et politique, a amené certain-ne-s chercheur-e-s à constater que la politique ne prenait pas en compte les préoccupations des femmes, et que, par conséquent, les femmes ne se préoccupaient pas de politique: “Politics does not take women’s concerns into account, nor do women feel at home in politics” (Jonasdottir 1988). Ainsi, les préoccu- pations des femmes ont souvent été présentées comme ressortissant essen- tiellement de la sphère domestique et familiale (Dodson et Carroll 1991;

Sapiro 1998). Avec la deuxième vague du féminisme, le personnel, et donc la sphère privée, est cependant appelé à devenir un enjeu politique. Les mouvances féministes ont alors revendiqué une plus grande participation des femmes à la prise de décision concernant ces enjeux qui les concer- naient  directement  afin  de  démocratiser  la  sphère  privée.  C’est  donc,  entre   autres, à travers la politisation de la sphère privée, en intégrant les “intérêts des femmes” aux débats politiques, que les citoyennes ont été poussées à prendre part à la sphère publique (Pateman 2000; Okin 2000).2 Dans ce contexte,  il  a  été  question  de  définir  de  manière  convaincante  les  “intérêts   des femmes”. Si de nombreuses études ont essayé de proposer des classi-

fications,  elles  ne  sont  certainement  pas  exemptes  de  critiques.  Comme  le   remarque Celis, “une délimitation thématique des intérêts des femmes est une  intervention  difficile  à  soutenir  sans  tomber  dans  l’écueil  de  l’essenti- alisme” (Celis 2005: 119).

Bien que la littérature sur la définition des intérêts des femmes soit as- sez étoffée, peu d’études essaient, à notre connaissance, de mesurer leur effet sur le comportement politique des citoyennes. Parmi les quelques ré- férences dans la littérature, on citera les travaux de Gaxie (1978 et 2003) ou Bourdieu (1979) qui montrent des citoyennes, disposant généralement d’un capital politique faible, poussées vers l’autocensure lorsque les sujets sont trop éloignés de leurs préoccupations quotidiennes, ou activant une participation normative, voire émotionnelle, dans le débat public lors des enjeux politiques plus proches. Similairement, mais de manière moins pes-

reviewers anonymes de la RSSP pour les précieux commentaires fournis. Une version pré- liminaire de cet article a été présentée lors du congrès annuel de l’Association Suisse de Science Politique, Balsthal, 22–23 novembre 2007.

2 Notons que la politisation de la sphère privée, et, par conséquent, les intérêts des femmes, a tour à tour été présenté comme pouvant être émancipateur ou conservateur. Parce que les intérêts des femmes comprennent, entre autres, des thématiques qui les concernent directe- ment et qui appartiennent à la sphère domestique (famille, enfance, santé, avortement, …), les chercheurs-es y ont vu soit un danger d’essentialisation des femmes (Mouffe 1992), soit une revalorisation des activités féminines (Pateman 1983).

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simiste, Marques de Bastos (1993) propose une l’idée d’une “participation sélective”: lorsqu’un sujet de votation “touche de près” le citoyen (et, par extension, la citoyenne), ce dernier sera alors potentiellement plus porté à la participation et à l’engagement.

Cela étant, aucune analyse n’a été proposée jusqu’à maintenant pour mesurer si la présence d’enjeux particulièrement parlants pour les citoyen- nes augmente l’engagement  intellectuel que celles-ci activent lors de leur participation. Est-ce qu’un projet dont la thématique serait très proche des enjeux traditionnellement féminins est en mesure d’activer un comporte- ment cognitif plus exigeant de la part des citoyennes? Et, inversement, est-­ce   que   l’absence   d’intérêt   spécifique   a   comme   conséquence   que   les   citoyennes “give up accuracy to avoid effort and stress” (Kuklinski, Quirk, Jerit et Rich 2001: 413)?

En partant de modèles en psychologie cognitive expliquant le comporte- ment des citoyens, tels que le modèle Heuristique-Systématique développé par Chaiken et ses collègues (Chaiken 1980; Eagly et Chaiken 1993; Chen et Chaiken 1999), notre travail essaiera de fournir des réponses concrètes à ces interrogations. Nos analyses, construites sur les données VOX pour la période 1999–2005, tenteront de démontrer que les citoyennes sont da- vantage prêtes que les hommes à formuler leur opinion en partant de stra- tégies cognitives exigeantes d’un point de vue intellectuel lorsque le projet soumis  au  vote  touche  de  près  des  thématiques  qui  seront  définies  comme   spécifiquement  féminines.3 Parallèlement, les hommes mobiliseraient pro- bablement  plus  de  raccourcis  cognitifs  leur  permettant  de  simplifier  la  dé- cision à prendre (heuristiques).

Dans cet article on essaiera, dans un premier temps, de rendre briève- ment  compte  des  classifications  avancées  dans  la  littérature  dans  le  but  de   saisir les différentes facettes des “intérêts des femmes”. Cela nous per- mettra   de   proposer   notre   propre   classification   (qui   discrimine   les   diffé- rents projets soumis au vote au niveau fédéral selon trois niveaux d’intérêt spécifique  pour  les  citoyennes:  dominant,  général  ou  nul). On proposera ensuite une discussion théorique sur les différentes stratégies cognitives reconnues dans la littérature en comportement politique, ainsi que sur leurs déterminants. Ceci nous permettra de formuler nos hypothèses de travail, qui  seront  ensuite  vérifiées  empiriquement  à  l’aide  d’une  série  de  régres-

3 On est pleinement conscients des nombreux problèmes (tant opérationnels que norma- tifs)  que  la  détermination  de  ce  qu’est  une  thématique  “spécifiquement  féminine”  comporte.  

On précisera en détail quel est notre point de vue, ainsi que les fondements théoriques et empiriques de ce dernier, dans la prochaine partie.

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sions  logistiques  binomiales.  Comme  on  le  verra,  nos  résultats  confirment   nos attentes de manière très satisfaisante.

“Intérêts”  des  femmes?

En Suisse, une étude exploratoire a tenté récemment de mettre en évidence les préférences des citoyennes à l’égard des projets politiques qui ont été soumis au peuple lors des votations populaires fédérales de 1999 à 2006 (Gfs.Bern 2006). Le rapport souligne, tout d’abord, que le clivage de genre n’est que très rarement décisif pour le résultat des votations. Pourtant, si le sexe ne détermine plus véritablement la participation, il continue à affecter l’orientation du vote, et le rapport en fournit de nombreux exemples: de manière générale, il ressort des analyses du Gfs que le vote des femmes concernant l’environnement, l’armée, la sécurité, les groupes défavorisés, les services publics et l’égalité hommes-femmes, se distingue considéra- blement de celui des hommes. Plus précisément, les femmes semblent da- vantage adhérer aux valeurs post-matérialistes puisqu’elles sont plus atten- tives à la protection de l’environnement dans un sens large. Les citoyennes soutiendraient également les politiques en faveurs de groupes défavorisés tels que les réfugiés, les handicapés, les droits des consommateurs, les jeu- nes et les personnes âgées. Elles seraient, par ailleurs, moins favorables à la libéralisation des services publics que les hommes. Concernant ces deux dernières problématiques, les analyses ont montré que les femmes étaient moins réceptives que les hommes aux arguments économiques allant à l’encontre  de  politiques  sociales.  Pour  finir,  les  thématiques  liées  à  l’éga- lité hommes-femmes, à la sexualité, au couple et à la famille ont montré des résultats plus complexes. Dans cette dernière catégorie de thématiques, en effet, les femmes sont loin de constituer un groupe homogène: ainsi, les femmes sont plus réticentes à libéraliser l’avortement et à accorder un congé maternité à leurs concitoyennes que les hommes (ce “conservatisme féminin” étant principalement expliqué par le poids des femmes de plus de  40  ans).  Pour  finir,  elles  se  montrent  globalement  plus  libérales  que  les   suisses face aux projets proposant un partenariat pour les couples de même sexe et aux quotas en politique.

En plus de fournir des pistes intéressantes quant à l’explication du comportement politique différencié entre hommes et femmes, l’étude en question permet de mettre en avant un questionnement fondamental: les femmes  ont-­elles  des  intérêts  spécifiques?  Ou,  en  d’autres  termes,  peut-­on  

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reconnaître des thématiques qui seraient plus facilement une prérogative des citoyennes?

Pour  de  nombreux  auteur-­e-­s,  si  un  intérêt  spécifique  existe  il  dériverait   avant tout de la différenciation entre sphère publique et sphère privée: les expériences quotidiennes et les rôles sociaux qui sont impartis aux femmes seraient  générateurs  de  préoccupations  politiques  spécifiques  distinctes  de   celles des hommes. Ainsi, le monde domestique et la famille, c’est-à-dire l’environnement traditionnel et quotidien des femmes, seraient à la base des women’s  issues (Jonasdottir 1988). À l’inverse, d’autres chercheur-e-s ont critiqué cette approche, à leurs yeux trop essentialiste, en démontrant que les intérêts des femmes étaient socialement construits par le mouve- ment des femmes/féministes. Ainsi, pour Weldon les intérêts des femmes ne peuvent dériver spontanément d’une expérience sociale partagée par toutes les femmes individuellement, mais résultent plutôt d’une élaboration collective débouchant sur une perspective de groupe (Weldon 2002; Car- roll 2006). Goss et Skocpol adoptent une perspective similaire en montrant que les organisations de femmes/féministes se sont spécialisées depuis les années ’60 en restreignant leurs revendications à des sujets touchant le statut/rôle des femmes dans la sphère politique et la sphère profession- nelle, délaissant, parallèlement, les intérêts plus traditionnels des femmes, comme la maternité, l’enfance, la santé (Goss et Skocpol 2006).

Parler d’intérêts de femmes ou de women’s  issues ne va donc pas sans soulever de nombreux problèmes théoriques et empiriques. En effet, toute délimitation des intérêts des femmes présuppose l’existence d’un groupe

“femmes”  homogène  et  unifié  ou,  si  l’on  adopte  un  point  de  vue  construc- tiviste, de revendications féministes homogènes, ce qui est loin de faire consensus. Il peut, en effet, paraître douteux de soutenir que les femmes partagent des intérêts communs qui transcendent les clivages sociaux et de race (Jonasdottir 1988). De plus, ces intérêts semblent évoluer dans le temps et selon le contexte sociopolitique (Shapiro et Mahajan 1986;

Jonasdottir 1988: 38). Il n’est donc pas étonnant que les “intérêts des fem- mes” ont fait l’objet de nombreuses études et restent toujours au centre de nombreuses controverses. Une des questions centrales qui reste ouverte est celle de savoir si ces intérêts sont objectifs (voir matériels), ou s’ils traduisent plutôt les préférences subjectives des femmes. Dans le premier cas, les intérêts ne sont pas forcément explicites et les femmes ne sont pas nécessairement conscientes de ceux-ci. Proche d’une perspective marxiste, cette conception des intérêts présuppose l’existence d’une élite qui aurait alors le rôle de révéler aux femmes leurs véritables intérêts. Par contre,

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dans l’optique subjectiviste, les intérêts des femmes sont considérés com- me des préférences, des positions politiques explicites. La grande majorité des études empiriques ont opté pour cette dernière conception, peut-être davantage pour des raisons pratiques que pour des raisons théoriques, car elle permet de dégager et d’appréhender plus facilement les intérêts des femmes.

Concrètement, plusieurs typologies ont été proposées dans la littéra- ture pour rendre compte des “intérêts des femmes”. De manière générale, les women’s  issues ont souvent été subdivisés en deux grandes catégories.

D’abord,  les  problématiques  que  l’on  peut  qualifier  de  “féministes”,  selon   M. Tremblay, qui se focalisent notamment sur les femmes elles-mêmes, par exemple les sujets touchant les discriminations dans la sphère profes- sionnelle ou politique (Tremblay 1998; Dodson et Carrol 1991) et, ensuite, les problématiques ressortissants aux domaines traditionnellement impar- tis aux femmes, comme par exemple l’enfance, l’éducation, la santé, et, plus globalement, les domaines liés au care. Goss et Skocpol proposent une distinction similaire: elles distinguent les thématiques qui ont pour objets les femmes elles-mêmes (women  centric) des thématiques qui en- globent des sujets sociétaux (community- or nation-­centric  issues (Goss et Skocpol 2006)).

Shapiro et Mahajan (1986), grâce à une étude empirique, élaborent quant à eux une typologie plus complexe des intérêts des femmes en différen- ciant davantage l’orientation et le contenu des thématiques femmes. Ainsi, ils proposent cinq types d’intérêts féminins. Ils mettent, tout d’abord, en évidence l’importance du clivage de genre dans les problématiques concer- nant l’usage de la force et de la violence, tant au niveau national qu’inter- national. Au niveau des problématiques liées au domaine du care, ils font la distinction entre les thématiques compassionnelles et les thématiques tra- ditionnelles. Les secondes mettent en jeu des valeurs traditionnelles, dites

“conservatrices”, notamment “policies that preserve and protect traditional values, the home, the family, children, religion, the neighborhood or im- mediate community, and the order and stability of everyday life” (Shapiro et Mahajan 1986: 45). Par contre, les problématiques compassionnelles, visant, entre autres, les pauvres, les chômeurs, les malades, font référen- ces à des politiques plutôt progressistes dans le sens où l’Etat-providence est appelé à intervenir. Les femmes seraient également davantage récepti- ves aux problématiques régulatrices et protectrices, comme par exemple l’environnement  et  le  droit  des  consommateurs.  Pour  finir,  les  intérêts  des   femmes comprendraient également les domaines touchant à l’égalité entre

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les sexes ainsi que l’avortement. Bien que théoriquement très intéressante, cette typologie a probablement le défaut d’être trop nuancée. Pour cette raison, notre recherche partira de propositions plus générales telles que celle de Tremblay (1998) ou Goss et Skocpol (2006).

Dans cet article, nous considérerons les intérêts des femmes comme des préférences subjectives issues des expériences quotidiennes et des rapports sociaux entre les sexes. En bref, nous postulons que les femmes (en tant que  catégorie  sociodémographique)  ont  des  intérêts  spécifiques  par  rapport   aux enjeux politiques qui les concernent directement. Il va sans dire que les hommes autant que les femmes peuvent s’intéresser à ces thématiques ou que les femmes s’intéressent  à d’autres problématiques sociales et poli- tiques (Jonasdottir 1988). Cependant, nous partons du postulat que les pro- blématiques abordées dans les votations fédérales peuvent être subdivisées selon  différents  niveaux  d’intérêt  spécifique  pour  les  femmes.  En  partant   indirectement des propositions avancées par Tremblay (1998), Dodson et Carrol (1991) ou encore Goss et Skocpol (2006), qui permettent une classi-

fication  suffisamment  (mais  pas  excessivement)  subtile,  on  reconnaît  trois   niveaux  essentiels  d’intérêt  spécifique  (pour  les  femmes)  que  peut  prendre   tout objet soumis au vote populaire:

intérêt   spécifique  fort (ou dominant): caractéristique des projets soumis au vote qui touchent directement les femmes en tant que catégorie sociodémographique (par exemple des projets portant sur la parité entre les sexes en ce qui concerne la politique ou le travail, le droit à l’avortement, le congé maternité, etc.). Ces projets sont qualifiés  de  féministes  par  Tremblay  (1998)  et  de  “women-­centric”  

par Goss et Skocpol (2006).

intérêt   spécifique  moyen (ou général): caractéristique des projets soumis au vote qui ressortent des domaines traditionnellement impartis aux femmes (enfance, éducation, santé, assurances sociales, famille,  etc.).  Ces  projets  sont  qualifiés  de  “community-” or “nation-­

centric” par Goss et Skocpol (2006).

intérêt   spécifique  nul: caractéristique des projets ne faisant pas partie  des  deux  autres  catégories  d’intérêt  spécifique.  Cette  catégorie   comprend les projets soumis au vote touchant des thématiques telles que l’aménagement du territoire, l’asile, la défense, la politique étrangère, l’économie, etc.

Le  Tableau  1  présente,  pour  chaque  niveau  d’intérêt  spécifique  retenu  dans   les analyses empiriques, l’ensemble des thématiques (selon les projets sou- mis en votation populaire entre 1999 et 2005) qui lui est associé.

1.

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Niveau d’intérêt spécifiqueInterprétationThématiques incluses (liste exhaustive selon projets soumis au peuple, 1999–2005)1 Fort  (ou  dominant) Thématiques touchant direc- tement les femmes en tant que catégorie sociodémo- graphique.

Avortement, Politique familiale, Recherche (uniquement si liée à procréation), Institutions (uniquement si liées à des questions de représentation féminine), Retraite  (uniquement  si  liée  spécifiquement  à  la  retraite  des  femmes),  Santé   (uniquement si liée directement à assurance maternité). Moyen  (ou  général)Domaines traditionnelle- ment impartis aux femmes.

Droits, Chômage, Drogues, Recherche (sauf si liée à procréation), Retraite (sauf  si  liée  spécifiquement  à  la  retraite  des  femmes),  Santé  (sauf  si  liée  di- rectement à assurance maternité), Finances (uniquement si liées à redistribu- tions sociales). Nul,  absentPar exclusion, toute autre thématique.

Politique étrangère, immigration, Union Européenne, Défense nationale, Paix, Politique des transports, Politique énergétique, Environnement, Logement, Aménagement du territoire, Services publics, Droit pénal, Marché du travail, protection des consommateurs, Impôts, Subsides, Institutions (sauf si liées à des questions de représentation féminine), Finances (sauf si liées à redistribu- tions sociales). Note  :  Liste  des  thématiques  directement  reprise  des  données  VOXit,  telle  que  définie  par  le  Gfs.Bern.  

Tableau  1:  Opérationnalisation  du  niveau  d’intérêt  spécifique  de  la  votation

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Intérêts  spécifiques  et  formation  de  l’opinion

La révolution cognitive (Lau et Redlawsk 2001) a signalé la récente émer- gence dans la discipline de modèles fondant le comportement des citoyens et citoyennes sur des postulats psychologiques. Désormais, entre l’indi- vidu  et  son  choix  final  un  filtre  cognitif est mis en avant (Nai 2009). L’un des principaux modèles théoriques responsables de cette interpénétration4 entre comportement politique et psychologie cognitive est le Heuristic-­

Systematic  Model (HSM) développé par Chaiken et ses collègues (Chaiken 1980; Eagly et Chaiken 1993; Chen et Chaiken 1999). Construit en partant des recherches en neurosciences soulignant l’existence de deux “systèmes de pensées” ancrés dans chaque individu (voir par exemple Epstein 1994;

Stanovich et West 2000; Evans 2003) ce modèle modélise tout processus de formation de l’opinion comme une tension entre de deux cheminements mentaux différents mais potentiellement complémentaires:5 un chemine- ment heuristique, qui est souvent traduit dans l’application de raccourcis simplificateurs  qui  aident  à  une  prise  de  décision  plus  simple,  et  un  chemi- nement  systématique, signalant un réel engagement de la part de l’individu dans le processus de prise de décision (Eagly et Chaiken 1993: 327sqq.;

Chen et Chaiken 1999; Zuckerman et Chaiken 1998: 622–633). L’exis- tence de ces deux cheminements de formation de l’opinion, qui se différen- cient essentiellement par le niveau d’engagement cognitif que le citoyen consacre au processus, est le point de départ de nos modèles empiriques.

De manière générale, la littérature sur le sujet met en évidence l’exis- tence de trois typologies de raccourcis cognitifs (les “heuristiques” dans le modèle HSM): émotionnels, par défaut ou référentiels (Nai 2009). Premiè- rement, les raccourcis émotionnels se basent sur des jugements de valeurs (positif-négatif, bien-mal, etc.) développés par les citoyens à l’encontre d’un ou plusieurs acteurs auxquels le processus de prise de décision fait référence. Bien que les enjeux émotionnels aient été reconnus comme cen- traux dans les processus cognitifs de prise de décision (Marcus et al. 2000;

Redlawsk 2006; Neuman et al. 2007), on n’est pas en mesure, avec les données   à   disposition,   d’opérationnaliser   de   manière   efficace   l’usage   de  

4 Krosnick parle à ce propos de cross-­fertilization (Krosnick 1990, dans Marquis 2006:

398).

5 L’usage simultané de différences stratégies cognitives est en effet souligné tant de maniè- re théorique (Eagly et Chaiken 1993: 238) qu’empirique (Kriesi 2005; Nai 2009 et 2008).

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telles stratégies, et c’est pourquoi nous ne considèrerons pas les raccourcis émotionnels dans le présent papier.

Deuxièmement, les raccourcis par   défaut permettent aux citoyens de choisir parmi différentes alternatives sans que leur décision soit fondée sur aucun élément conceptuel, normatif ni affectif. En d’autres mots, les rac- courcis  par  défaut  permettent  une  prise  de  décision  vidée  de  toute  réflexion   ou  considération,  fortement  simplifiée.  Ils  représentent  donc  le  niveau  le   plus faible d’engagement cognitif pour les citoyens. Dans cette typologie de raccourcis cognitifs on en retiendra l’heuristique du statu quo (Bowler et Donovan 1998; Christin, Hug et Sciarini 2002; Kriesi 2005). En partant du postulat anthropologique de l’aversion au risque (Kahneman et Tversky 1979), ce raccourci prévoit simplement que les citoyens peu compétents refusent tout changement législatif, en défendant ainsi le statu quo.

Enfin,   les   raccourcis  référentiels se fondent sur un traitement de re- commandations ou informations en provenance de l’élite politique. Pour cela, ils nécessitent un minimum de sophistication cognitive de la part du citoyen. Dans cette typologie de raccourcis cognitifs, on retiendra les heu- ristiques  partisane  et  de  confiance  Si  la  première  se  base  sur  le  fait  que  les   citoyens suivent les recommandations des élites politiques qu’ils considè- rent comme proches (Downs 1957; Bowler et Donovan 1998), la deuxième part  de  l’idée  que  les  citoyens  ayant  une  bonne  confiance  dans  les  entités   gouvernementales auront tendance à en suivre la position.

Le deuxième pole du modèle HSM développé par Chaiken et ses col- lègues est représenté par le traitement systématique des informations. Un traitement   systématique   est   défini   comme   un   procédé   cognitif   de   traite- ment analytique de l’ensemble des informations reçues par l’individu sous l’angle de ses prédisposions et préférences (Eagly et Chaiken 1993: 326).

En d’autres termes, un procédé systématique représente un effort mental considérable entrepris dans le but d’acquérir une compréhension globa- le de l’ensemble des informations reçues. Ce processus cognitif est par conséquent très exigeant, ce qui requiert tant une forte motivation que des capacités intellectuelles importantes. (Neuwirth et al. 2002: 323). Dans le modèle HSM, “systematic  information  processors  are  viewed  as  judging   the  validity  of  a  message’s  advocated  position  […]  by  thinking  about  this   information  in  relation  to  other  information  they  may  possess  about  the  ob-­

ject  or  issue  discussed  in  the  message” (Eagly et Chaiken 1993: 326–327).

Ces mêmes personnes sont considérés comme choisissant un “chemine- ment central” (central path) lors de la formation de l’opinion dans le mo- dèle ELM de Petty et Cacioppo (1986).

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La littérature en psychologie cognitive signale, entre autres, qu’un haut niveau de besoin  cognitif (need  for  cognition; Cacioppo et Petty 1982; Ca- cioppo et al. 1986; Rudolph et Popp 2007) est une condition nécessaire (bien  que  pas  nécessairement  suffisante)  à  la  mise  en  place  d’un  procédé   cognitif systématique: seul un citoyen utilisant plusieurs sources d’infor- mation et attribuant à l’objet étudié une forte importance subjective (ce qui signale un fort besoin  cognitif) et mettant en place une décision fondée sur un traitement analytique des arguments principaux de la campagne sera alors considéré comme ayant voté selon une formation systématique de l’opinion.

Pour l’instant, peu d’attention a été donnée dans la littérature contem- poraine aux processus systématiques de formation de l’opinion (politique).

Si une grande quantité d’études intègre directement une analyse sur l’uti- lisation, les causes et/ou les effets des différentes heuristiques (Sniderman, Brody et Tetlock 1991; Popkin 1991; Bowler et Donovan 1998; Lupia et McCubbins 1998; Lupia, McCubbins et Popkin 2000; Christin, Hug et Sciarini 2002), peu d’études se focalisent aussi sur l’autre pôle des mo- dèles cognitifs classiques (Forehand et al. 2004; Barker et Hansen 2005;

Kriesi 2005; Rudolph et Popp 2007; Nai 2009 et 2008).

La littérature sur la formation de l’opinion montre assez clairement que les choix cognitifs des citoyen-ne-s sont fortement dépendants de quelques caractéristiques individuelles majeures. Parmi celles-ci, le niveau de com- pétence politique du citoyen a largement été démontré comme agissant de manière positive sur la formation de l’opinion: les individus les plus compétents semblent en effet plus facilement portés vers l’adoption de comportements cognitifs plus exigeants (Zaller 1992; Sniderman, Brody et Tetlock 1991). Cela étant, très peu de recherches montrent de quelle manière ces caractéristiques individuelles sont activées ou contrôlées par le contexte particulier dans lequel le processus de formation de l’opinion se met en place. Quelques travaux récents dérogent cependant à cette règle.

Par exemple, les analyses de Kriesi (2005), Nai (2009 et 2008) ou en- core Lau, Andersen et Redlawsk (2008) mettent en lumière l’effet combiné entre caractéristiques individuelles et intensité de la campagne politique précédant le vote. Par ailleurs, Kuklinski et ses collègues montrent de ma- nière  très  efficace  que  la  motivation  à  agir  cognitivement  et  politiquement   est fortement dépendante de la quantité et qualité d’informations présentes dans l’espace public (Kuklinski et al. 2001).

En suivant une optique similaire, le but de cet article est de montrer que les choix cognitifs des citoyen-ne-s sont directement tributaires de

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l’intérêt (potentiel) qu’on peut attribuer globalement au projet soumis au vote. D’après Kam (2005), un effort cognitif important est probablement en mesure d’être expliqué surtout par des facteurs liés à la thématique par- ticulière par rapport à laquelle le raisonnement des individus se met en place (Kam 2005: 167). Dans notre cas, ceci est mesuré par les différents niveaux  d’intérêt  spécifique  de  la  votation  pour  la  catégorie  des  femmes.

Le fait de mesurer si (et si oui, dans quelle mesure) la formation de l’opinion des femmes diffère de celle des hommes en fonction de la thé- matique du projet soumis au vote n’est pas anodin. Premièrement, à notre connaissance, aucune étude dressant un comportement politique cognitif différent entre hommes et femmes n’existe pour l’instant dans le cadre de la démocratie directe suisse. Pourtant, les analyses démontrant un compor- tement politique (entendu dans le sens classique du terme) différencié entre homme et femmes abondent (Lehman Schlozman et al. 1999; Howell et al.

2000; Inglehart et Norris 2003; Sineau 2004; Fontana et al. 2006; Wernli 2006).  Deuxièmement,  le  fait  de  pouvoir  démontrer  que  l’intérêt  spécifique   de  la  votation  (notre  indicateur  contextuel)  influence  de  manière  différente   la formation de l’opinion des hommes et des femmes nous permettrait de souligner la nécessité de tenir compte à la fois de caractéristiques indivi- duelles (tant sociodémographiques que politiques ou intellectuelles) que contextuelles (la thématique de la votation dans notre cas) dans toute mo- délisation  future  de  la  formation  de  l’opinion  par  les  citoyens.  Enfin  une   formation de l’opinion genrée en fonction du contenu du projet soumis au vote  fournirait  des  appuis  empiriques  à  l’importance  des  classifications  tra- ditionnellement proposées dans la littérature sur les women’s  issues (Trem- blay 1998; Dodson et Carrol 1991; Goss et Skocpol 2006).

Globalement, on peut avancer deux types d’attentes quant à l’expli- cation empiriques des comportements cognitifs des citoyen-ne-s. Premiè- rement, en suivant la littérature dans le domaine, on s’attend à ce que le choix de la stratégie cognitive employée soit fonction d’une série de fac- teurs individuels. Ainsi, on postule un engagement cognitif plus important avec toute augmentation de la compétence politique: faute d’un certain niveau de sophistication politique, l’individu ne possède pas les outils in- tellectuels nécessaires à une prise de décision compétente, et se réfugie donc  dans  l’utilisation  de  raccourcis  simplificateurs  (Zaller  1992;;  Kriesi   2005; Marquis 2006). Similairement, un bon niveau général d’intérêt pour la politique, indicateur de la motivation générale de l’individu dans le jeu politique (Kriesi 2005: 100; Wernli 2001: 63), pousse le citoyen à adop- ter des stratégies plus exigeantes, telles qu’un traitement systématique des

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arguments. Comme remarqué par Petty et Cacioppo, c’est uniquement lorsque l’individu dispose d’un bon niveau d’attention (ou compétence) et de motivation que des processus cognitifs plus exigeants sont possibles (Petty  et  Cacioppo  1986).  Enfin,  ce  sera  surtout  lorsque  les  citoyens  auront   ressenti  des  difficultés  lors  du  processus  de  formation  de  l’opinion  qu’ils   seront portés vers l’usage de raccourcis cognitifs, et vice-versa. En effet, on  peut  attendre  que  “because  heuristics  provide  cognitive  efficiency,  they   should de relied upon more heavily in more cognitively complex situations and/or  for  decisions  that  involve  more  difficult  choices”  (Lau  et  Redlawsk   2001: 955).

Cela peut être formulé dans l’hypothèse suivante (H1): les  citoyennes   ayant  un  faible  niveau  de  compétence  politique,  d’intérêt  pour  la  politi-­

que   ou   ayant   éprouvé   des   difficultés   lors   du   processus   de   formation   de   l’opinion  seront  plus  portées  vers  l’activation  des  raccourcis  heuristiques.  

L’inverse  est  vrai  pour  l’activation  d’un  comportement  cognitif  exigeant   (stratégie  systématique).

Ensuite, ce qui représente le cœur tant théorique qu’empirique de notre travail, on essaiera de mesurer l’importance des enjeux contextuels sur les choix  des  citoyennes  en  partant  de  l’idée  que  le  niveau  d’intérêt  spécifique   du  projet  influence  directement  l’usage  des  raccourcis  cognitifs.  Dans  ce   sens,  on  postule  qu’une  votation  caractérisée  par  un  intérêt  spécifique  do- minant (notamment portant sur des enjeux proprement féminins tels que l’avortement, la parité entre les sexes, la maternité, etc.) augmente de ma- nière considérable l’attention portée par les citoyennes au projet même.

Ceci va dans le même sens que la participation sélective proposée par Mar- ques de Bastos (1993): selon l’auteur, lorsqu’un sujet de votation “touche de près” le citoyen ce dernier est potentiellement plus porté à la partici- pation et à l’engagement. Dans la même direction, on postule que l’enga- gement cognitif des femmes augmente lorsque celles-ci sont confrontées à une votation qui leur est particulièrement saillante: ainsi, plus l’intérêt spécifique  de  la  votation  est  fort,  plus  les  femmes  auront  tendance  à  mettre   en place des stratégies cognitives plus exigeantes (telles qu’un traitement systématique des arguments), et vice-versa. Pour cela, on attend un effet d’interaction  entre  prédispositions  individuelles  et  intérêt  spécifique  sur  les   choix cognitifs des citoyennes.

Cela peut être formulé dans l’hypothèse suivante (H2): sous  contrôle  de   leur  niveau  de  sophistication  (compétence,  intérêt  et  difficultés  perçues),   les   citoyennes   sont   significativement   moins   portées   vers   l’activation   des   raccourcis  heuristiques  que  les  hommes  lorsque  le  projet  soumis  présente  

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un   intérêt   spécifique   dominant.   Dans   un   tel   cas   de   figure,   elles   activent   comparativement  un  comportement  cognitif  exigeant  de  manière  plus  im-­

portante.

Analyses  empiriques

Les analyses empiriques qui suivent sont basées sur une base de donnée intégrée construit sur plusieurs sondages post-scrutin (VOX), survenus après chaque votation fédérale entre 1999 et 20056 (N = 77’766)7. Ceci re- présente 75 projets soumis au peuple lors de 25 scrutins au niveau fédéral.

Pour chaque sondage, une base de données construite sur un échantillon aléatoire en trois niveaux (région linguistique, foyer et personne dans le foyer) d’environ 1’000 individus a été crée.

Afin  de  vérifier  empiriquement  les  deux  hypothèses  avancées  aupara- vant, deux séries d’analyses ont été faites. Premièrement, on a testé le mo- dèle  de  base  (sans  prise  en  compte  de  l’intérêt  spécifique)  qui  prévoit  les   choix cognitifs des citoyennes comme dépendant de trois facteurs: com- pétence politique,8 intérêt dans la politique9  et  difficulté  éprouvée  lors  du  

6 Deux impératifs expliquent le choix de la période 1999–2005. Premièrement, étant donné notre  désir  de  mesurer  l’importance  d’enjeux  contextuels,  il  faut  qu’il  y  ait  suffisamment  de   variance dans les indicateurs les mesurant. Dans notre cas, il faut pouvoir mettre en place nos  analyses  sur  des  données  couvrant  une  période  relativement  conséquente,  afin  de  dispo- ser  de  suffisamment  de  projets  pour  chaque  niveau  d’intérêt  spécifique  (le  Tableau  1  donne   un aperçu de la répartition des projets selon chaque niveau d’intérêt). D’autre part, il faut que la période couverte ne soit pas trop importante, ce qui inclurait de  facto un certain déter- minisme temporel dans les analyses. Le choix, dans notre analyse, de la période 1999–2005 tient compte de ces deux impératifs, et a l’avantage de couvrir des données originales par rapport à celles utilisées dans l’analyse fondatrice de Kriesi (2005), qui s’arrête justement en 1999.

7 Soit 40’226 femmes (sur lesquelles porteront la plupart des analyses) et 37’540 hommes (groupe de contrôle).

8 Le niveau de compétence politique est calculé à travers la mise en perspective de deux questions  présentes  dans  les  données  VOX,  une  vérifiant  la  connaissance  de  l’interviewé  du   titre de l’objet soumis à votation, l’autre relative à son contenu: un individu connaissant les deux obtient 2 points, 1 et 0 points sont respectivement assignés en cas de connaissance de un voir aucun de ces deux éléments.

9 L’intérêt pour la politique est mesuré par une question directe d’auto-évaluation compo- sant quatre possibilités de réponse: très intéressé, plutôt intéressé, plutôt pas intéressé et pas du tout intéressé.

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processus de prise de décision.10  Ce  modèle  a  ensuite  été  complexifié  no- tamment  à  travers  la  prise  en  compte  de  l’intérêt  spécifique  de  la  votation.  

On a ainsi pu mettre en évidence l’effet joué par le contexte sur les choix cognitifs des citoyennes, aussi et surtout en contrôlant si les résultats ob- tenus  par  les  femmes  différaient  significativement  de  ceux  obtenus  par  les   hommes (ce qui a été testé empiriquement à travers une série de paired-­

samples  t-­tests (Sirkin 2006).11

En  premier  lieu,  un  set  d’analyses  a  essayé  de  vérifier  l’effet  direct  de   trois variables individuelles sur les choix cognitifs des citoyennes suisses (première hypothèse) via une série de modèles logistiques binomiaux.12 Selon nos attentes, on attendait une augmentation de la probabilité de met- tre en place une stratégie plus exigeante lorsque la compétence politique et l’intérêt  sont  hauts,  et  la  difficulté  éprouvée  dans  le  processus  de  formation   de l’opinion est faible. Les résultats de nos modèles sont présentés dans le Tableau 3.

Les   résultats   confirment   nos   attentes.   Ainsi,   la   probabilité   pour   les   citoyennes suisses de mettre en place un traitement systématique des in- formations présentes dans la campagne politique augmente sensiblement avec l’augmentation du niveau de compétence politique et de l’intérêt pour la politique (que l’on considère comme un indicateur direct du niveau de

10 La  présence  de  difficultés  lors  du  processus  de  prise  de  décision  a  été  mesurée  à  travers   une  question  demandant  la  difficulté  perçue  lors  de  ce  processus  (deux  possibilités  de  ré- ponse:  plutôt  facile  et  plutôt  difficile).

11 Étant donné que nos modèles présentent un seul facteur explicatif de niveau contextuel et que  nous  nous  focalisons  essentiellement  sur  la  significativité  des  différences  entre  hommes   et femmes lorsque soumis à différentes conditions contextuelles (ce qui nous permet ensuite de déduire l’effet du contexte sur les choix cognitifs en fonction du genre), ce modèle plus simple a été préféré à des modèles plus sophistiqués. Par contre, des modèles tels que les modèles  hiérarchiques  linéaires, ou modèles multiniveaux (Jones, Johnson et Pattie 1992;

Snijders et Bosker 1999) sont fortement recommandés dans des situations basées sur une structure imbriquée (nested) des données et caractérisées par plus d’un facteur explicatif au niveau hiérarchique supérieur; ces modèles sont en effet en mesure de fournir des esti- mations  plus  efficaces  et  permettent  de  mieux  saisir  la  complexité  des  effets  d’interaction   inter-niveaux entre l’ensemble des facteurs explicatifs. Ces modèles ont par ailleurs été appliqués ailleurs (Nai 2008), sur des données similaires.

12 Étant donné que nos variables dépendantes (à savoir les quatre stratégies cognitives re- tenues) sont mesurées en termes de présence-absence, assumant donc une forme dicho- tomique, une série de modèles logistiques binomiaux a été mis en place (Long 1997). En partant des résultats de nos modèles on a ensuite calculé la probabilité prédite pour l’usage des différentes stratégies cognitives par les femmes en fonction des trois facteurs explicatifs retenus.

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Alessandro Nai et Anouk Lloren Stratégie

cognitive

Comportement représenté Notre opérationnalisation

Heuristique du statu quo

Les individus sont plus sensibles aux pertes poten- tielles qu’aux gains ou avantages qu’ils pourraient tirer d’un changement de situation; ils auront donc plus tendance à soutenir une stabilité législative; le statu quo est préféré à l’alternative proposée indé- pendamment du contenu ou de la direction idéologi- que de cette dernière.

Mesurable seulement de manière indirecteb: on considère comme votant se-

lon une logique de statu quo les citoyens qui votent contre une proposition, ce  qui  signifie  la  défense  de  la  situation  actuelle,  et qui ont un faible niveau de compétence politique.

Heuristique partisane

Appliquée par les citoyens qui suivent les recom- mandations et indices en provenance des élites par- tisanes qu’ils considèrent comme proches.

Vote selon les directives (mot d’ordre) du parti considéré comme étant le plus proche; si aucun parti n’est considéré comme proche, ou si le citoyen déclare avoir une faible proximité partisane en général, pas de heuristique partisane.

Heuristique de  confiance

L’heuristique  de  confiance  permet  aux  citoyens  de   suivre la position idéologique et les conseils des en- tités gouvernementales qu’ils considèrent comme valables  et  dignes  de  confiance.

Citoyens  ayant  un  fort  niveau  de  confiance  dans  le  gouvernement  (consi- déré comme l’institution archétypique; Kriesi 2005) et votant selon les di- rectives  de  ce  dernier;;  si  pas  ou  faible  confiance,  pas  de  vote  de  confiance.

Note: a Pour plus de détails, voir Nai 2008.

b Voir Kriesi 2005: 141–143.

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Intérêts  spécifiques  et  formation  de  l’opinion  politique  des  suissesses  115 Stratégie

systématique

Appliquée par les citoyens qui mettent en prati- que un décryptage volontaire et important des in- formations politiques présentes dans la campagne;

un procédé systématique est un effort mental consé- quent mis en place dans le but de construire une po- sition face à une série d’arguments, potentiellement contradictoires.  Afin  de  mettre  en  place  un  tel  trai- tement des arguments, il est demandé au citoyen d’avoir un haut besoin  cognitif.

Le traitement systématique est directement lié à la connaissance, acquisi- tion et mobilisation des arguments présents dans la campagne; pour cela, les citoyens qui ont un fort positionnement face à la principale dimension conflictuelle  de  la  campagne  (mesurée  à  travers  une  analyse  factorielle  des   arguments les plus importants dans cette dernière), sont considérés comme citoyens qui votent en fonction des arguments. Les citoyens qui votent se- lon les arguments et qui ont un fort besoin  cognitif sont considérés comme mettant en pratique un traitement systématique des arguments.

Un citoyen ayant un fort besoin cognitif est celui qui déclare que le projet voté a une importance particulière pour lui personnellement, et qui a utili-

sé un nombre important de sources d’information.c

Note: c Plus précisément, est considéré comme un citoyen ayant un fort besoin cognitif (need  for  cognition; Cacioppo and Petty

1982; Cacioppo et al. 1986) celui qui déclare que le projet soumis au vote est particulièrement important pour lui personnellement

et qui a utilise lors du processus de prise de décision un nombre moyen (4–6) ou grand (7–9) de sources d’information; est aus- si considéré comme ayant un fort besoin cognitif le citoyen qui déclare que le projet est moyennement important pour lui mais qui a utilisé un grand nombre de sources d’information (7–9). Toute autre combinaison entre ces deux conditions produit des ci- toyens ayant un faible besoin cognitif.

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motivation des citoyens (Kriesi 2005: 100; Wernli 2001: 63), et diminue sensiblement  lorsque  des  difficultés  ont  été  perçues  lors  du  processus  de   formation de l’opinion. La sophistication de la citoyenne est donc incon- testablement un facteur d’activation important des comportements cogni- tifs mis en place par les citoyens (Zaller 1992; Kriesi 2005; Marquis 2006).

Inversement, une faible sophistication (faible intérêt pour la politique et présence  de  difficultés  perçues  lors  de  la  formation  de  l’opinion)  augmente   considérablement la probabilité que la citoyenne utilise de la stratégie la moins exigeante (statu quo).

Ce qui va à l’encontre de nos attentes, c’est le fait que la probabilité d’usage des deux stratégies heuristiques référentielles (à savoir les stra- tégies  partisanes  et  de  confiance)  semble  augmenter  avec  l’augmentation   de la sophistication politique de la citoyenne. Selon nos résultats, plus une citoyenne est compétente sur l’objet en votation ou globalement intéressée dans la chose politique plus elle aura tendance à suivre les recommanda- tions du parti qu’elle considère comme proche, voir des autorités fédéra- les   lorsqu’elle   a   une   bonne   confiance   dans   celles-­ci.   Ce   résultat   contre-­

intuitif pourrait être dû en partie à une trop sévère opérationnalisation des deux heuristiques en question (selon laquelle par exemple seulement les citoyennes votant en ligne avec le mot d’ordre du parti préféré et déclarant une forte proximité partisane sont considérées comme mettant en place une stratégie partisane). Des arguments théoriques nous permettent éga- lement  de  justifier  un  tel  résultat.  En  suivant  Sniderman,  Brody  et  Tetlock   (1991), l’activation des raccourcis référentiels (“likability  heuristic”, dans leur étude) ne peut se faire qu’avec une dose minimale de sophistication de la part du citoyen (notamment en ce qui concerne le positionnement face aux acteurs politiques principaux). Ainsi, “even  people  who  are  rela-­

tively  sophisticated  about  politics  […]  are  short  of  political  information;;  

their  comparative  advantage  is  not  that  they  have  a  stupendous  amount  of   knowledge,  but  that  they  know  how  to  get  the  most  out  of  the  knowledge   they   possess” (Sniderman, Brody et Tetlock 1999: 24). Ceci pousse par ailleurs  Lau  et  Redlawsk  à  affirmer  que  “virtually  all  voters  employ  some   common political heuristics during political campaigns” (Lau et Redlawsk 2001: 954), et cela indépendamment de leur niveau de sophistication po- litique.  Ce  résultat  pourrait  aussi  être  interprété  comme  une  confirmation   partielle de l’effet  de  polarisation décrit par Zaller (1992: 100sqq.; Kriesi 2005: 150–151). Selon ce dernier, les prédispositions individuelles des ci- toyens  influencent  leur  degré  d’acceptation  des  messages  en  provenance   des élites. Ainsi, plus le citoyen est sophistiqué politiquement (politically  

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Stratégies cognitives

Statu quo Partisane Confiance Systématique Compétence politique Pas applicable† (***) (***) (***)

- Faible 9.8% 10.3% 12.8%

- Moyenne 18.8% 17.3% 21.8%

- Haute 27.2% 23.6% 29.8%

Intérêt dans la politique (***) (***) (***) (***)

- Aucun 19.4% 4.5% 7.6% 9.7%

- Pas vraiment 13.5% 10.3% 12.4% 15.9%

- Assez 9.1% 22.5% 20.2% 25.5%

- Fort intérêt 6.2% 41.0% 30.4% 37.4%

Difficultés  perçues (***) (***) (***) (***)

-­  Aucune  difficulté 6.8% 27.1% 24.1% 29.9%

-­  Quelques  difficultés 15.6% 12.7% 11.9% 15.5%

Nagelkerke’s R2 0.054 0.151 0.082 0.079

2 Log likelihood 5’813.10 26’803.26 26’584.26 21’830.32

N 9’773 29’085 29’085 19’994

Tableau 3: Probabilité d’usage des stratégies cognitives en fonction des caractéristiques individuelles

aware), plus il résistera aux informations en provenance des élites qui lui sont idéologiquement opposées, en suivant celles qui lui sont le plus pro- ches,  notamment  lorsque  la  position  des  élites  est  particulièrement  conflic- tuelle.

Notre  première  hypothèse  est  donc  globalement  confirmée.  Ainsi,  tant   la compétence politique que l’intérêt pour la politique (proxi de la moti- vation)  que  l’absence  de  difficultés  perçues  activent  un  comportement  co- gnitif plus exigeant de la part de la citoyenne. Cela étant, ces deux facteurs activent tout autant l’utilisation des stratégies cognitives référentielles, ce qui signale probablement qu’une sophistication minimale reste nécessaire même lorsque certains raccourcis sont utilisés (Sniderman, Brody et Tet- lock 1991; Lau et Redlawsk 2001).

Note: Les entrées sont exprimées en pourcentages, âge et niveau d’éducation entrés dans les modèles comme contrôle; † la compétence politique est insérée dans l’opérationnalisa- tion  de  la  stratégie  du  statu  quo;;  *p  <  0.05,  **p  <  .01,  ***p  <  .001,  n.s.  non  significatif  (se- lon ce qui émerge des modèles logistiques).

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Stratégies cognitives Statu quoPartisane M0M1M2M0M1M2 FHFHFHFHFHFH Compétence politique Pas applicablea

(***)(***)(***)(***)(***)(***) Faible0.100.120.100.130.080.14 Moyenne0.190.220.190.240.150.23 Haute0.280.320.280.330.240.28 p (t test)p = .035p = .023p = .035 Intérêt dans la politique(***)(***)(*)(***)(n.s.)(***)(***)(***)(***)(***)(***)(***) Aucun0.210.190.180.210.120.290.050.050.050.050.040.09 Pas vraiment0.140.110.140.120.080.140.100.120.100.120.090.15 Assez0.090.060.110.070.060.060.230.240.220.250.220.24 Fort intérêt0.060.040.080.040.040.030.410.430.400.460.420.37 p (t test)p = .003p = .367p = .275p = .080p = .115p = .048 Difficultés  perçues(***)(***)(***)(***)(***)(n.s.)(***)(***)(***)(***)(***)(**) Aucune  difficulté0.070.050.080.060.040.070.280.310.270.320.250.28 Quelques  difficultés0.160.120.160.130.130.120.130.150.130.170.100.14 p (t test)p = .205p = .126p = .705p = .126p = .070p = .090 Nagelkerke’s R20.0530.0790.0510.0680.0730.1320.1550.1520.140.1620.1670.157 2 Log likelihood4’051.73’063.81’356.51’028.6384.4394.117694.719751.76319.66777.62759.92961.5 N6’7396’9752’0842’07595086419’15419’1046’821647631102856

Tableau  4  :  Probabilité  d’usage  des  stratégies  cognitives  en  fonction  des  caractéristiques  individuelles  et  de  l’intérêt  spécifique  de  la  votation

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Stratégies cognitives ConfianceSystématique M0M1M2M0M1M2 FHFHFHFHFHFH Compétence politique(***)(***)(***)(*)(†)(†)(***)(***)(***)(***)(***)(***) Faible0.100.110.100.130.110.110.120.140.140.170.120.09 Moyenne0.180.200.160.200.170.220.220.240.230.250.200.17 Haute0.250.280.210.240.220.310.300.330.300.320.290.25 p (t test)p = .074p = .010p = .215p = .020p = .020p = .010 Intérêt dans la politique(***)(***)(***)(***)(***)(***)(***)(***)(***)(***)(***)(***) Aucun0.080.080.070.070.070.050.090.120.100.140.140.09 Pas vraiment0.130.140.110.120.120.110.150.190.160.200.200.13 Assez0.210.230.180.200.210.250.250.270.260.270.270.21 Fort intérêt0.320.340.270.320.320.470.380.370.370.350.340.30 p (t test)p = .080p = .161p = .380p = .161p = .310p = .003 Difficultés  perçues(***)(***)(***)(***)(***)(***)(***)(***)(***)(***) (***)(n.s.) Aucune  difficulté0.250.280.210.250.230.300.300.320.310.320.290.23 Quelques  difficultés0.120.130.120.120.100.160.150.160.160.180.160.14 p (t test)p = .295p = .500p = .049p = .205p = .205p = .295 Nagelkerke’s R20.090.0970.060.0860.0960.090.0870.0680.0780.0480.0470.052

Tableau 4 (suite)

(23)

Stratégies cognitives ConfianceSystématique M0M1M2M0M1M2 FHFHFHFHFHFH Nagelkerke’s R20.090.0970.060.0860.0960.090.0870.0680.0780.0480.0470.052 2 Log likelihood17’751.219’373.95’938.76’306.32’839.03’001.614’143.815’748.05’270.05’555.12’395.42’020.5 N19’15419’0146’8216’4763’1102’85613’01313’4934’8154’7352’1161’956

Tableau 4 (suite) Légende des modèles: M0:  votations  sans  intérêt  spécifique  pour  les  femmes. M1:  votations  ayant  un  intérêt  spécifique  général  pour  les  femmes. M2:  votations  ayant  un  intérêt  spécifique  dominant  pour  les  femmes. Note: les entrées sont exprimées en pourcentages. a La compétence politique est insérée dans l’opérationnalisation de la stratégie du statu quo. *p  <  0.05,  **p  <  .01,  ***p  <  .001,  †p  <  .1,  n.s.  non  significatif  (effet  de  la  variable  sur  l’usage  de  la  stratégie  cognitive,  selon  ce  qui  émerge des modèles logistiques).

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