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L'Assemblée fédérale : un parlement de milice en voie de professionnalisation

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L'Assemblée fédérale : un parlement de milice en voie de professionnalisation

PILOTTI, Andrea, et al.

Abstract

Il est possible de distinguer au moins trois dimensions de la professionnalisation politique, à savoir celle individuelle, celle qui se rapporte aux fonctions politiques, et enfin celle qui touche les institutions politiques. Ce chapitre vise plus précisément à illustrer si et comment les deux dernières dimensions ont pu se développer dans le cas du Parlement suisse qui, reposant sur le principe de milice, est historiquement un législatif peu voire pas du tout professionnalisé. Le chapitre se structure en quatre parties. Premièrement, nous allons faire un bref détour historique pour présenter les origines du Parlement fédéral et comprendre les traits distinctifs fondamentaux qui le caractérisent encore aujourd'hui. Deuxièmement, nous présenterons les deux projets de réforme qui, depuis les années 1970, ont abordé la question d'une professionnalisation parlementaire en Suisse. Troisièmement, nous allons montrer comment l'indemnisation du travail des parlementaires – élément clé de toute professionnalisation – s'est développée en Suisse. À l'aide des résultats d'une récente enquête, nous [...]

PILOTTI, Andrea, et al. L'Assemblée fédérale : un parlement de milice en voie de

professionnalisation. In: Pilotti, Andrea & Oscar Mazzoleni. Le système de milice et la professionnalisation politique en Suisse. Lausanne : Ed Alphil, 2019. p. 53-89

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:124460

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Pascal Sciarini, Frédéric Varone et Fabio Cappelletti L’Assemblée fédérale : un parlement de milice en voie de professionnalisation

Comme mentionné dans l’introduction du présent ouvrage, il est possible de distinguer au moins trois dimensions de la professionnalisation politique, à savoir celle individuelle, celle qui se rapporte aux fonctions politiques, et enfin celle qui touche les institutions politiques (Borchert, 2003 : 8-10). Ce chapitre vise plus précisément à illustrer si et comment les deux dernières dimensions ont pu se développer dans le cas du Parlement suisse qui, reposant sur le principe de milice, est historiquement un législatif peu voire pas du tout professionnalisé. Le chapitre se structure en quatre parties. Premièrement, nous allons faire un bref détour historique pour présenter les origines du Parlement fédéral et comprendre les traits distinctifs fondamentaux qui le caractérisent encore aujourd’hui. Deuxièmement, nous présenterons les deux projets de réforme qui, depuis les années  1970, ont abordé la question d’une professionnalisation parlementaire en Suisse. Troisièmement, nous allons montrer comment l’indemnisation du travail des parlementaires –  élément  clé de toute professionnalisation  – s’est développée en Suisse. À l’aide

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des résultats d’une récente enquête, nous illustrerons également le jugement que les élus fédéraux portent eux-mêmes sur le système d’indemnisation actuel. Enfin, quatrièmement, nous analyserons l’évolution dans le temps du volume de travail et du temps consacré par les parlementaires suisses à leur mandat.

Les origines du Parlement fédéral

À l’occasion des débats pour la rédaction de la Constitution fédérale de 1848, la discussion au sujet de la future organisation du Parlement voit s’affronter deux camps. D’une part, les radicaux, gagnants de la guerre du Sonderbund, souhaitent la création d’une assemblée nationale unitaire (législatif monocaméral) dont la composition est proportionnelle à la population. Cette configuration pénalise les petits cantons catholiques qui seraient largement minorisés. D’autre part, les conservateurs catholiques envisagent la création d’une nouvelle Diète fédérale permettant d’assurer une représentation des entités fédérées et d’éviter en même temps qu’un pouvoir excessif ne soit détenu par les radicaux (majoritaires dans les grands cantons du Plateau). Finalement, une solution de compromis inspirée du modèle bicaméral des États-Unis s’impose (Düblin, 1978), mais non sans résistance, comme le rappelle Aubert (1998 : 33) : « On lui reprochait son coût […], le ralentissement qu’elle ne manquerait pas d’entraîner dans l’adoption des lois, voire le risque de paralysie qui résulterait du désaccord persistant des deux Chambres. Même son origine étrangère la desservait aux yeux d’une classe politique souvent méfiante et un peu xénophobe. »

L’Assemblée fédérale issue de la Constitution de 1848 ne connaît ensuite pas de véritables changements dans sa structure, étant toujours composée de deux chambres (le Conseil national et le Conseil des États) disposant des mêmes prérogatives (bicamérisme parfait). Il existe cependant trois points sur lesquels les deux Chambres fédérales se différencient historiquement.

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Premièrement, leur base de représentation, à savoir le peuple pour le Conseil national et les cantons pour le Conseil des États. Deuxièmement, le nombre de leurs membres : pour la Chambre basse, 111 députés en 1848, un chiffre qui augmente selon la croissance démographique, à raison d’un siège pour 20 000 habitants (Suisses et étrangers)23 jusqu’en 1963, année à laquelle il est fixé à 20024. La Chambre haute compte pour sa part 44 sénateurs de 1848 à 1979 (deux pour chaque canton et un pour chacun des six demi-cantons) et ensuite 46, en raison de la création du canton du Jura (Aubert, 1998 : 31-34, 54-57 ; Graf, 2015). Troisièmement, le mode d’élection des deux chambres est également différent : le Conseil national est choisi de 1848 à 1917 par une élection populaire directe au scrutin majoritaire, puis dès 1919 à la proportionnelle, tandis que les conseillers aux États sont dans un premier temps élus par les parlements des cantons respectifs, souvent pour une seule année.

Au cours du xxe siècle, la durée des mandats est étendue à trois ans (jusqu’en 1931), puis à quatre ans, alors que l’élection se fait au moyen d’un scrutin populaire au système majoritaire (sauf au Jura et, dès 2011, à Neuchâtel, ces deux cantons ayant opté pour le système proportionnel).

Un autre élément différencie initialement les deux Chambres.

Comme le relève Aubert (1998 : 46-47), durant les premières années de l’État fédéral, le Conseil national joue un rôle plus important que le Conseil des États. Cette « supériorité » est notamment illustrée par le fait que la priorité dans la discussion

23 Au début du xxe siècle, les milieux politiques ruraux critiquent la prise en compte des étrangers pour l’attribution des sièges en demandant que le calcul pour l’attribution des sièges tienne compte uniquement de la population suisse. D’après ces milieux, le fait d’inclure aussi la population étrangère favorise les cantons urbains au détriment des cantons campagnards (Aubert, 1998 : 57).

24 Le nombre de sièges du Conseil national, depuis sa création, a été modifié douze fois : 120 (1851), 128 (1863), 135 (1872), 145 (1881), 147 (1890), 167 (1902), 189 (1911), 198 (1922), 187 (1931), 194 (1943), 196 (1951) et 200 (1963) (Aubert, 1998 : 58 et 93).

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des objets revient toujours à la Chambre basse et que la Chambre haute ne remet que rarement en cause les décisions du Conseil national. La Chambre du peuple jouit ainsi d’un plus grand prestige, ce qui explique d’ailleurs le fait qu’au xixe siècle la carrière type d’un élu fédéral passe d’abord par un siège au Conseil des États puis au Conseil national, alors que de nos jours le parcours est plutôt inverse25.

Le principe de milice

Un des traits distinctifs du Parlement fédéral tient au principe de milice sur lequel repose historiquement tout engagement public dans la Confédération. Selon ce principe, repris du domaine militaire où il a été appliqué pour la première fois, les fonctions publiques sont remplies à titre bénévole. Le principe est ensuite adopté, durant l’Ancien Régime, surtout pour les mandats électifs dans les exécutifs communaux. Au xixe  siècle, son application s’élargit aux mandats dans les législatifs cantonaux et même, pour une certaine période, à ceux

25 Aubert identifie deux raisons principales pouvant expliquer cette situation.

Premièrement, il observe qu’« aux yeux du public l’innovation majeure de la Constitution fédérale de 1848 était la création du Conseil national, qui devait incarner l’idée de la nation suisse. Le Conseil des États était le produit d’une concession faite aux cantons conservateurs, singulièrement aux vaincus du Sonderbund, pour leur rendre le changement sinon agréable, ce qui était impossible, du moins pas trop inacceptable. Dans ce bicamérisme parfait, mais politiquement bancal, la vraie chambre était la chambre du peuple suisse, l’autre n’était qu’un appendice. » (Aubert, 1998 : 47). Deuxièmement, les conseillers nationaux peuvent se prévaloir d’une légitimité plus grande de par leur élection populaire directe, contrairement aux sénateurs qui pendant longtemps sont élus par les parlements cantonaux, ce qui contribue à affaiblir en quelque sorte leur légitimité. Un autre élément allant dans ce sens est lié à la durée des mandats des sénateurs qui pouvait être d’une seule année, voire parfois d’une seule session. Ajoutons enfin le fait que dans certains cantons, le mandat des conseillers aux États pouvait être révoqué à tout moment par le Grand Conseil.

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dans les exécutifs cantonaux (Riklin, 1982 ; Wiesli, 2003 ; André, 2004 : 12-14).

Le principe de milice régit également dès 1848 l’activité des parlementaires fédéraux, même s’il n’apparaît pas formellement dans la Constitution fédérale. Ainsi, chaque conseiller national et conseiller aux États ne remplit son mandat qu’à titre annexe, en poursuivant d’autres activités professionnelles en parallèle.

La persistance du principe de milice tout au long du xxe siècle peut s’expliquer à la fois par des raisons éthiques, idéologiques, identitaires, ainsi que liées à son efficacité présumée (Stanga, 2011 : 166-170). Le fort ancrage du système de milice et son importance font donc de la Suisse une véritable exception par rapport aux autres pays occidentaux, notamment en ce qui concerne le développement du processus de professionnalisation parlementaire.

La professionnalisation parlementaire : l’exception suisse

On distingue généralement trois phases dans le processus de professionnalisation parlementaire dans les pays occidentaux. Lors de la première, de 1880 à 1920, nous assistons à l’introduction d’un premier véritable salaire annuel versé aux membres des parlements nationaux aux États-Unis, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique et en Grande-Bretagne. La deuxième phase (années  1920-fin des années  1950) se caractérise dans différents pays par la création d’un système de commissions permanentes spécialisées, s’accompagnant également du développement des administrations parlementaires, tandis que l’octroi d’un salaire annuel aux élus nationaux se poursuit dans d’autres pays (par exemple en Finlande, en Norvège et en Italie).

Enfin, depuis les années 1960 se développe la troisième phase de la professionnalisation parlementaire, qui inclut entre

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autres la possibilité pour les élus de disposer de collaborateurs personnels pouvant constituer un appui fort précieux dans l’accomplissement de leurs tâches, l’amélioration régulière du salaire de base et des différentes indemnités, ainsi que le renforcement du système de commissions (Z’graggen, 2009 : 39 ss.).

En regard de ces évolutions, la Suisse se distingue clairement puisque les premiers débats sur la professionnalisation parlementaire se tiennent seulement au cours des années  1960. C’est notamment l’affaire des Mirages qui contribue à remettre pour la première fois en question, même si ce n’est que partiellement, les fondements institutionnels du Parlement de milice : en 1964, le Conseil fédéral soumet aux parlementaires une nouvelle requête de financement pour l’achat d’avions militaires, alors que l’Assemblée fédérale avait déjà voté en 1961 un important crédit à cet égard. Il s’avère cependant que les coûts ont entre- temps augmenté sensiblement, sans que l’administration et le gouvernement n’en informent les élus. Le scandale entraîne la création de la première commission d’enquête dans l’histoire du Parlement suisse et le renforcement du contrôle parlementaire, avec la création d’un Service de documentation (Urio, 1972). À la suite du scandale, à la fin des années 1960 et au début des années 1970, les indemnités sont adaptées pour que les parlementaires disposent de davantage de moyens financiers et puissent, de ce fait, mieux exercer leur fonction de contrôle. Cette adaptation ne remet cependant pas en question le principe de milice régissant l’activité des élus fédéraux (Pilotti, 2017 : 141-144).

Le scandale des Mirages conduit aussi un certain nombre de parlementaires à s’interroger sur les limites de fonctionnement du système de milice et sur la nécessité de professionnaliser davantage le travail des députés et des sénateurs suisses. Cela débouche notamment sur la mise sur pied d’une commission d’étude en 1974.

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Le projet Avenir du Parlement (1974-1978)

La commission Avenir du Parlement, composée de conseillers nationaux et de conseillers aux États, travaille pendant quatre ans entre 1974 et 1978. Bien qu’appelée à se pencher sur la question d’une professionnalisation du travail parlementaire, la commission s’empresse d’exclure une telle option. Cela apparaît déjà clairement dans la liste des objectifs que la commission se fixe. Parmi ceux-ci, il y a la volonté :

« [de] déterminer – après avoir pesé les avantages et les inconvénients du Parlement de milice et du Parlement professionnel, mais en s’efforçant de maintenir un système de milice [souligné par nous]  – quelles améliorations pourraient être apportées, dans les limites de la constitution actuelle et avec les moyens appropriés, à l’activité du plénum des deux conseils et des commissions, à l’organisation de celle-ci et à la procédure qui la régit, ainsi qu’à l’activité individuelle des députés et aux instruments de travail mis à leur disposition, afin que le Parlement, compte tenu des exigences auxquelles il sera prochainement confronté, puisse assumer au mieux la tâche qui est la sienne. » (Rapport final de la commission d’étude des Chambres fédérales Avenir du Parlement, FF 1978 II : 1025)

Finalement, la question de la professionnalisation de l’Assemblée fédérale ne suscite guère de débat et est assez rapidement reléguée à l’arrière-plan des discussions, y compris par les élus de gauche censés pourtant être les plus favorables à une professionnalisation du travail parlementaire. L’idée reste au contraire un véritable tabou que personne n’ose évoquer au cours des années 1970. Il n’est donc pas surprenant que, dans son rapport final, la commission d’étude Avenir du Parlement n’envisage pas de réformes de grande envergure, jugées non nécessaires, mais plutôt des réformes ponctuelles visant à améliorer l’efficacité du travail parlementaire.

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En résumé, la commission d’étude estime que, malgré ses quelques lacunes, le Parlement de milice s’en sort encore le mieux, même dans une comparaison internationale. À titre de curiosité, relevons néanmoins que la commission Avenir du Parlement a dû faire face à l’une des limites reconnues du système de milice, à savoir la difficulté de concilier de manière adéquate les tâches liées au mandat parlementaire et les activités professionnelles. En effet, il suffit de mentionner que pour presque chaque séance de la commission d’étude, au moins un tiers des membres est systématiquement absent.

On pourrait donc y voir une sorte de paradoxe dans la mesure où la commission qui a défendu le principe de milice en a elle-même en fait subi les conséquences dès le début de ses travaux, en étant constamment confrontée à un taux d’abstentionnisme élevé.

Les quatre ans de travail de la commission ne débouchent finalement que sur peu de résultats concrets, et cela malgré les nombreuses séances de travail, les différents experts mobilisés, ainsi que malgré la réalisation d’une enquête auprès des élus.

Il est par ailleurs significatif que le rapport de la commission Avenir du Parlement n’ait été discuté qu’au sein des groupes parlementaires durant l’été  1979, mais jamais lors des séances plénières des deux Chambres fédérales. De plus, une très large majorité des députés refuse l’une des propositions les plus importantes du rapport, à savoir la création d’un nouveau système de commissions permanentes. La seule suite accordée aux travaux de la commission d’étude est l’adoption de quelques mesures très ponctuelles, à l’exemple d’une modification du règlement du Conseil national et l’adaptation au renchérissement du remboursement des frais aux parlementaires (pour plus de détails, voir Pilotti, 2017 : 144-157).

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Le manque de dynamisme des années 1980 et le projet de réforme de 1991

Les années 1980 se caractérisent par l’absence de toute velléité de réforme en profondeur du Parlement visant à renforcer et à revaloriser son rôle. Les seules mesures adoptées tiennent d’une part à la création de la Conférence de coordination en 1984, et d’autre part à l’adoption d’une nouvelle loi sur les indemnités en 1988. Il faut attendre la fin des années  1980 pour que la question d’une réforme du Parlement regagne de l’intérêt aux yeux des députés et des sénateurs suisses. C’est en fait à la suite de deux scandales politiques, celui touchant la conseillère fédérale Elisabeth  Kopp et celui concernant l’affaire dite des fiches (Rayner et  al., 2017 ; Thétaz, 2018), que nous assistons à une nouvelle prise de conscience de la nécessité de réformer le rôle du législatif fédéral, en lui accordant davantage de compétences et de ressources, afin qu’il puisse mieux remplir sa fonction de contrôle sur le Conseil fédéral et l’administration fédérale. L’alourdissement des tâches et la complexification des dossiers à traiter contribuent aussi à faire évoluer la perception que les élus fédéraux ont eux-mêmes de leur mandat, ainsi que la conviction parmi nombre d’entre eux de l’inadéquation des ressources à disposition pour l’exercer.

Dans ce contexte de bouleversement des institutions politiques helvétiques, le conseiller aux États de Bâle-Campagne René Rhinow et le conseiller national genevois Gilles Petitpierre, deux élus du Parti radical-démocratique et professeurs de droit, déposent en mars 1990 une initiative parlementaire demandant de relancer la réforme du Parlement. Les deux initiateurs identifient cinq points cruciaux à aborder avec urgence : 1.)  l’accélération de la procédure législative ; 2.)  une conduite et une planification plus efficaces de l’activité du Parlement ; 3.)  une meilleure participation du Parlement à la définition

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de la politique étrangère ; 4.) la poursuite de l’amélioration des conditions de travail des membres du Parlement (assistants, crédits appropriés) ; 5.) la possibilité que des hauts fonctionnaires accompagnent ou remplacent les conseillers fédéraux dans des commissions parlementaires et les deux Conseils législatifs (Bulletin du Conseil national 1990 IV : 1624).

Rhinow et Petitipierre précisent que leur proposition de réforme ne doit pas être conçue comme une tentative de révolutionner le système de milice. À travers leur initiative, ils visent au contraire

« à l’amélioration des méthodes de travail du Parlement en respectant intégralement les principes du cadre institutionnel actuel [souligné par nous]. Ils n’entendent pas mettre en question ni la place du Parlement dans le système général du gouvernement et de la Confédération, ni les droits populaires, ni l’égalité des deux Chambres, ni le mode de l’élection des membres des Chambres, ni la possibilité pour un parlementaire de conserver une activité professionnelle importante. » (Bulletin du Conseil national 1990 IV : 1626)

Pour les deux élus radicaux, il ne s’agit donc pas d’imposer une professionnalisation généralisée à tous les membres des Chambres fédérales, mais plutôt de donner la possibilité, à celles et à ceux qui le veulent, de gagner leur vie grâce à leur activité parlementaire, par une rémunération adéquate.

La nécessité d’une réforme est largement partagée par les autres membres de l’Assemblée fédérale qui, à la différence de ce qui s’était passé avec les propositions de la commission Avenir du Parlement, décident rapidement de donner suite à l’initiative Rhinow/Petitpierre. Après seulement huit mois de travail (au lieu de quatre ans), la commission parlementaire chargée du projet de réforme présente son rapport final en mai 1991. Après de nombreuses discussions et amendements,

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la réforme du Parlement est adoptée à une très large majorité en octobre de la même année. Celle-ci prévoit entre autres une amélioration sensible des conditions de travail des parlementaires en termes financiers (augmentation des indemnités et de la contribution de base annuelle) et d’infrastructure (crédit pour l’engagement d’un collaborateur personnel) (Pilotti, 2017 : 156 ss.).

Avec le soutien de l’Union suisse des arts et métiers (USAM) et, entre autres, des députés  UDC Christoph  Blocher et Walter Frey, un référendum est lancé contre le projet de réforme – et il aboutit. La réforme du Parlement est notamment soutenue par le Conseil fédéral, une large majorité des parlementaires et les principaux partis nationaux, à l’exclusion de l’UDC et avec parfois l’opposition de quelques sections cantonales du PRD et du PDC. Le 27 septembre 1992, seul le premier volet de la réforme (modification de la loi sur les rapports entre les conseils) est accepté, tandis que les deux autres volets financiers, qui ont le plus animé la campagne référendaire (augmentation des indemnités et crédit pour l’engagement d’un collaborateur personnel), sont refusés avec respectivement 72 % et 69 % de non (Pilotti, 2017 : 174-178).

La professionnalisation contestée du Parlement suisse Le processus de professionnalisation du Parlement fédéral, outre son démarrage tardif et sa dimension inachevée en comparaison internationale, provoque de fortes résistances, comme le démontre la votation populaire de septembre 1992.

Ces oppositions surgissent cependant déjà depuis le début des années  1960, lorsque la question d’une professionnalisation est thématisée pour la première fois, et persistent jusqu’aux années  2000. Plus précisément, il existe deux oppositions qui, au fil du temps, finissent en quelque sorte par s’allier.

La première opposition est celle exprimée par la droite économique libérale depuis les années  1960-1970 et repose

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à la fois sur des motivations financières, liées aux coûts jugés excessifs des réformes, et sur la crainte que le renforcement du rôle du Parlement se traduise en une emprise grandissante de l’État sur la société et en particulier sur l’économie.

Cette opposition parvient entre autres à faire échouer par voie référendaire une modeste augmentation de l’indemnité journalière en 1962.

À ces arguments de la droite économique libérale s’ajoutent, depuis les années  1990, d’autres motivations de nature identitaire, avancées cette fois-ci par la droite nationaliste. C’est notamment l’UDC qui se fait le porte- parole de cette opposition aux réformes visant à une plus grande professionnalisation du Parlement, vues comme une tentative de rapprocher la Suisse de l’Union européenne. Le but de la droite nationaliste est de sauvegarder le système de milice et d’éviter ainsi, à ses dires, de le dénaturer (voir aussi Mazzoleni, 2006 : 178). Cet objectif est atteint, comme l’illustre l’échec cuisant de la réforme du Parlement de 1991 contestée par voie référendaire et soumise au vote populaire en septembre 1992.

L’opposition à la professionnalisation parlementaire en Suisse persiste au-delà de 1992 et elle est loin d’être marginale, même s’il faut reconnaître qu’elle apparaît peut-être moins incisive depuis le référendum de 1992. En effet, malgré l’échec de la réforme inspirée par l’initiative Rhinow/Petitpierre, le Parlement suisse a entre-temps adopté plusieurs mesures visant à renforcer son rôle et ses compétences. Parmi ces mesures, rappelons notamment l’instauration d’un nouveau système de commissions permanentes en 1991 (Lüthi, 1997 ; Jegher, 1999) et l’adoption d’une nouvelle loi sur le Parlement (2002) qui permet à l’Assemblée fédérale de disposer désormais d’une plus grande influence dans le processus décisionnel (voir Sciarini, 2014 ; Sciarini et al., 2015), ainsi que l’augmentation sensible des indemnités individuelles et des contributions aux groupes. Ces évolutions plus

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récentes témoignent d’un processus de professionnalisation parlementaire, certes inabouti par rapport à d’autres pays occidentaux mais indéniablement à l’œuvre.

Pour mieux saisir la portée de ce processus, nous allons examiner plus en détail dans la prochaine partie du chapitre comment l’indemnisation du travail des parlementaires, enjeu central dans toute professionnalisation des législatifs nationaux (Borchert, 2008), s’est développée en Suisse, et de quelle manière cette indemnisation s’organise aujourd’hui26.

L’indemnisation du travail parlementaire

Évolution historique du système d’indemnisation

Les caractéristiques du système actuel d’indemnisation au sens large des parlementaires fédéraux sont fixées par la loi fédérale du 18  mars 1988 sur les moyens alloués aux parlementaires (LMAP)27 et par son ordonnance (OMAP)28. Ces deux bases légales sont l’aboutissement d’un processus cumulatif par lequel différents soutiens, monétaires et non monétaires, ont progressivement été accordés aux parlementaires. Une présentation détaillée des bases légales successives ainsi que de l’évolution historique du contenu du système dépasse le périmètre de ce chapitre29. La référence à quelques étapes

26 Cet examen se base sur une étude que des auteurs du présent chapitre ont réalisée pour le compte de la délégation administrative du Parlement fédéral (voir Sciarini et al., 2017).

27 Loi fédérale du 18 mars 1988 sur les moyens alloués aux parlementaires (LMAP ; RS 171.21).

28 Ordonnance de l’Assemblée fédérale du 18 mars 1988 relative à la loi sur les moyens alloués aux parlementaires (OMAP ; RS 171.211).

29 Nous renvoyons les lecteurs intéressés à la fiche d’information de la Bibliothèque du Parlement (https://www.parlament.ch/centers/documents/

fr/faktenblatt-bezuege-f.pdf, page consultée le 06.03.19capitulation des

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marquantes est néanmoins nécessaire pour comprendre la logique du système actuel.

En 1848, le système d’indemnisation reposait sur deux piliers : une indemnité journalière versée pour chaque participation à une séance de conseil ou de commission30 et ayant pour but de défrayer les parlementaires pour les dépenses liées à leur présence à Berne et une indemnité de défraiement au kilomètre pour les déplacements entre leur domicile et Berne. Au cours du temps, les montants versés au titre de ces deux indemnités ont connu plusieurs augmentations. En 1964, le système a été complété par l’introduction d’une indemnité de défraiement pour nuitée.

On peut ainsi constater que pendant plus d’un siècle, les parlementaires ont uniquement bénéficié d’indemnités de défraiement. Ce traitement minimal s’explique, comme déjà mentionné précédemment, par le fait que, dans le système suisse de parlement de milice, exercer un mandat de parlementaire a longtemps été considéré comme un honneur ne nécessitant pas de rémunération31.

Au fil des années a néanmoins germé l’idée selon laquelle les montants des indemnités de défraiement devaient être supérieurs aux dépenses effectives des parlementaires, afin de leur accorder une rémunération –  quoique symbolique et indirecte  – pour le temps consacré aux séances et à la préparation de celles-ci32.

indemnités versées aux membres de l’Assemblée fédérale depuis 1900, voir aussi Pilotti (2017 : 335-336).

30 Des règles spéciales s’appliquaient aux parlementaires domiciliés loin de Berne et lors des jours de pause.

31 Voir par exemple le Rapport de la commission du Conseil des États concernant les indemnités de séance et de route des membres du Conseil national, des commissions de l’Assemblée fédérale, des membres du Tribunal fédéral et du conseil d’École polytechnique du 15.12.1869 (FF 1870 I 52).

32 Voir le Message du Conseil fédéral à l’Assemblée fédérale concernant le projet de loi sur les indemnités de présence et de déplacement du Conseil national et des commissions des deux conseils du 3  mars 1922 (FF  1922  I  572) ou le Message du Conseil fédéral à l’Assemblée fédérale

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L’affaire des Mirages en 1964 facilite aussi la diffusion de cette idée. En 1972, avec l’adoption de la loi fédérale sur les indemnités dues aux membres des Conseils législatifs, les Chambres ont finalement entériné la renonciation au principe de l’exercice du mandat à titre bénévole et le passage à une rémunération du travail parlementaire, conjuguée au défraiement des dépenses que celui-ci occasionne33, donnant ainsi naissance au système de rémunération encore en vigueur aujourd’hui. Ce système conjugue une indemnité annuelle au titre de la préparation des travaux parlementaires (10 000 CHF en 1972, soit 26 144 en 2018 si l’on tient compte du renchérissement) et des indemnités journalières versées pour la participation aux séances et pour l’exercice de fonctions spécifiques (en particulier la présidence des Chambres, de commission ou de délégation, et la fonction de rapporteur).

Enfin, le système d’indemnisation au sens large a été complété en 1988 avec l’adoption de la LMAP et la création de son troisième et dernier pilier, soit l’introduction d’une contribution au titre de la prévoyance. Par la suite, le système est resté stable dans ses principes, avec comme seuls changements l’introduction de quelques dispositions de moindre importance –  au vu des montants concernés  –, comme les prestations complétant les allocations familiales cantonales, l’aide transitoire et le forfait pour frais de télécommunications.

concernant le complètement de la loi sur les indemnités de présence et de déplacement des membres du Conseil national et des commissions de l’Assemblée fédérale du 8 décembre 1950 (FF 1950 III 637).

33 Rapport sur la Conférence des présidents de groupe du 4  février 1972 (FF 1972 I 611). Un premier pas dans cette direction avait déjà été fait en 1969 avec l’introduction d’une indemnité annuelle (3  000  CHF en 1969, soit 9  234 en 2018 si l’on tient compte du renchérissement) qui, selon la teneur de l’ancienne loi fédérale sur les indemnités dues aux membres du Conseil national et des commissions de Conseil législatif, visait à indemniser le travail personnel que requiert la préparation des objets à traiter.

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Comme nous l’avons vu précédemment, la seule tentative de revoir en profondeur ce système a subi un sévère échec en votation populaire, en septembre 1992. En revanche, les montants alloués ont augmenté au fil du temps, en raison notamment du renchérissement. Mentionnons ainsi l’augmentation, en 2002, de l’indemnité versée au titre de la préparation des travaux parlementaires (de 12  000 à 24 000 CHF) et de la contribution aux dépenses de personnel et de matériel (de 18 000 à 30 000 CHF). En 2012, l’indemnité versée au titre de la préparation des travaux parlementaires a été portée à 26  000  CHF et la contribution aux dépenses de personnel et de matériel à 33 000 CHF.

Le tableau 2.1 dresse la liste de tous les éléments qui, en 2017, composent ce système d’indemnisation au sens large, avec une présentation synthétique des buts et des montants qui s’y rapportent. Il détaille ainsi les trois composantes du système d’indemnisation mentionné plus haut :

1. le système de rémunération, qui rémunère principalement le travail parlementaire, complété – de manière très subsidiaire au vu des faibles montants concernés – par une compensation pour perte de revenu via le tiers du défraiement pour longue distance ;

2. le système de prévoyance, qui conjugue traitement ordinaire (avec les cotisations  AVS) et traitement ad hoc (avec la contribution au titre de la prévoyance en lieu et place des dispositions prévues par la LPP en matière de prévoyance professionnelle) ; et

3. le système d’indemnisation au sens strict, un système complexe en ce qu’il conjugue des indemnités globales (comme la contribution aux dépenses de personnel et de matériel), des indemnités (très) spécifiques (p. ex. défraiement pour repas ou nuitée) et une panoplie d’autres prestations accessoires.

(18)

Tableau 2.1 : Les indemnités parlementaires en 2017 Nom du moyenNatureMontant (CHF)FréquenceImposableBase légale

RÉMUNERATION

Indemnité annuelle

Rémunération au titre de la préparation des travaux26 000AnnuelleOuiArt. 2 LMAP Indemnité journalièreRémunération pour la participation aux séances440Par jour de séanceOuiArt. 3 LMAP Indemnité versée aux présidents de commission

Rémunération de tâche supplémentaire440Par jour de séance avec présidenceOuiArt. 9 LMAP Indemnité versée aux rapporteursRémunération de tâche supplémentaire220Pour chaque rapport oralOuiArt. 9 LMAP Défraiement longue distance (1/3)

Compensation pour la perte de revenu due à des trajets particulièrement

longs

7,5Par 1/4 d’heure de trajet après 90 minOuiArt. 6 LMAP Art. 6 OMAP

(19)

Nom du moyenNatureMontant (CHF)FréquenceImposableBase légale

PRÉVOYANCE ET ALLOCATIONS

Prévoyance (partie employeur)Contribution au titre de la prévoyance jusqu’à 65 ans10 152Annuelle

Uniquement si versé à une institution 

3aArt. 7 LMAP Art. 7 OMAP

Complément aux allocations familiales

Prestations complétant

les AF cantonales si celles-ci sont inférieures aux AF

accordées aux fonctionnaires fédéraux

-MensuelleOui, mais pas de cotisations socialesArt. 6a LMAP

(20)

Nom du moyenNatureMontant (CHF)FréquenceImposableBase légale

(3a) INDEMNITÉS FORFAITAIRES

Contribution annuelle

Contribution aux dépenses de personnel et de matériel33 000AnnuelleNonArt. 3a LMAP Défraiement pour repasDéfraiement pour les dépenses de repas115Par jour de séanceNonArt. 4 LMAP Art. 3 OMAP Défraiement pour nuitée

Défraiement pour les dépenses de nuitée des parlementaires hors domicile

180Par nuit séparant

deux jours de séance consécutifs

NonArt. 4 LMAP Art. 3 OMAP

Défraiement pour repas et nuitées

(étranger)

Défraiement pour les dépenses de repas et de nuitée

à l’étranger395Par jour de séanceNonArt. 4 LMAP Art. 3 OMAP Frais de déplacement

AG 1re classe ou défraiement forfaitaire

correspondant au prix de cet abonnement

640 (en 2015)AnnuelleNonArt. 5 LMAP Art. 4 OMAP Défraiement longue distance (2/3)

Défraiement pour les trajets Par 1/4 d’heure Art. 6 LMAP 15de trajet après Non particulièrement Art. 6 OMAP 90 min longs

(21)

Nom du moyenNatureMontant (CHF)FréquenceImposableBase légale

(3b) NATURE INDEMNITES SUR JUSTIFICATIF OU EN

Frais des déplacements à l’étranger

La Confédération fournit ou

rembourse les billets de train ou d’avion

nécessaires

-

Achat direct ou remboursementArt. 5 LMAP - Art. 4 OMAP sur justificatif Remboursement RemboursementArt. 5 LMAP Frais de parcagedes taxes -  sur justificatifArt. 4 OMAP de parcage

Équipement informatique

Équipement

standard et crédit options

ou crédit général

500 (options) ou300 (général)

Crédit par législature

-Autres bases légales Allocation pour formation

Remboursement pour cours de méthode de travail ou de langue

000 (crédit)Remboursement sur justificatif-Autres bases légales

(22)

À ce stade, il est important de souligner que le système actuel de rémunération vise exclusivement à rémunérer le travail parlementaire au sens strict, c’est-à-dire le travail mené au sein des organes de l’Assemblée fédérale (conseils, commissions, délégations et groupes) et sa préparation. Cette rémunération se caractérise donc par une forte composante variable en fonction du nombre de séances auxquelles le parlementaire participe. La même remarque s’applique au système d’indemnisation au sens strict, qui vise uniquement à défrayer les parlementaires pour les coûts engendrés par leur participation aux séances et à la préparation de celles-ci. Cela signifie que le système d’indemnisation au sens large ne prévoit aucune compensation pour toutes les activités directement liées à l’exercice du mandat de parlementaire, telles que les relations avec le public, les électeurs et les médias, les activités de représentation, ou la participation aux séances d’information, aux réunions de parti, aux campagnes de votation et aux comités d’initiative. Relevons toutefois que ces activités peuvent représenter un nombre élevé d’heures non rémunérées.

État des lieux lors de la 49e législature (2011-2015)

Le tableau 2.2 montre les montants dépensés pour chaque composante du système d’indemnisation au sens large, au total et par parlementaire, dans chaque chambre et pour l’ensemble du Parlement au cours de la 49e  législature (2011-2015). Les montants des indemnités et des rémunérations versées, ainsi que les prix coûtants des prestations en nature ont été calculés à partir des données fournies par la comptabilité des services du Parlement.

Au cours de la 49e législature, la Confédération a ainsi versé 37,4  millions par année, en moyenne, aux parlementaires au titre du système d’indemnisation au sens large (29,4  millions pour les conseillers nationaux et 8 millions pour les conseillers aux États). Pour l’ensemble de la législature, cela représente donc un montant total d’environ 150 millions.

(23)

Tableau 2.2 : Coût annuel total et par parlementaire du système d’indemnisation, 49e législature (2011-2015), en francs suisses Conseil nationalConseil des ÉtatsAssemblée fédérale MembreTotalMembreTotalMembreTotal Indemnité annuelle26 000200 000 26 000196 000 26 000396 000 Indemnités journalières39 553910 67147 827200 06241 10110 110 732 Sessions23 591718 23022 225022 34023 336740 570 Commissions, délégations et sous-commissions11 566313 19019 591901 17513 067214 365 Délégations internationales168233 530602119 680436353 210 Groupes et autres779555 791817129 587786685 378 Maternité, accident et maladie 45089 930 59327 280 476117 210 Indemnités pour fonctions spéciales070414 092940273 234827695 326 Présidents de commission182236 410049140 254531376 663 Rapporteurs de commission558111 68345666 980726178 663 Délégué administratif----33000

(24)

Conseil nationalConseil des ÉtatsAssemblée fédérale Présidents des Conseils22044 00095744 00035888 000 Vice-Présidents des Conseils11022 000 47822 000 17944 000 Autres formes de rémunération513302 58766976 757542379 343 Allocations familiales046209 18089641 207018250 387 1/3 du défraiement pour longue distance46793 407 77335 549 524128 956 Indemnités de défraiement forfaitaires54 52710 905 36160 193768 87055 58613 674 230

Contribution aux dépenses de personnel et de matériel

33 000600 00033 000518 00033 000118 000 Défraiement pour repas908981 68511 563531 91210 218513 597 Défraiement pour nuitées297859 47710 908501 766599361 243 Défraiement pour nuitées et repas (étranger)387277 386179146 223722423 609 2/3 du défraiement pour longue distance934186 814 54370 969 048257 782

(25)

Conseil nationalConseil des ÉtatsAssemblée fédérale Prestations en nature ou sur justificatif34577915 47818 147834 77911 180750 257 Déplacements en Suisse580915 933537208 687572124 620 Allocations pour formation19238 4319850117542 932 Remboursement parking15731 34010794214736 282 Déplacements à l’étranger649929 775 13 405616 649 286546 424 Contribution au titre de la prévoyance525904 928 436434 069 508338 997 Cotisations sociales218843 623 924226 518 350070 141

Coût total par année parlementaire

146 98429 396 739 174 137010 287 152 09437 415 026 34Il n’a pas été possible de déterminer le montant exact dépensé pour l’équipement informatique des parlementaires. Nous avons néanmoins estimé un coût par parlementaire allant de 000 à 500 CHF, c’est-à-dire de 500 à 1 125 CHF par année.

Un tel montant n’est pas de nature à modifier significativement le coût total calculé dans ce tableau. L’estimation est basée sur un parlementaire ayant choisi l’équipement standard, ce qui est le cas de 83

% des parlementaires ayant siégé pendant la 49e législature. L’équipement standard consiste en un ordinateur portable avec applications (valeur d’environ 000 CHF) et un crédit d’options de 2 500 CHF.

(26)

Ainsi, le montant annuel brut reçu par un parlementaire s’est élevé, en moyenne, à 174  000  CHF au Conseil des États et à 147 000 CHF au Conseil national. Deux facteurs expliquent cette différence de montants entre les deux conseils. Premièrement, les sénateurs reçoivent en moyenne plus d’indemnités journalières et de défraiement, car ils sont en général membres d’un plus grand nombre de commissions que leurs collègues du Conseil national. Deuxièmement, et pour une raison similaire, les conseillers aux États reçoivent aussi davantage de défraiements pour les voyages, repas et nuitées à l’étranger : comme les délégations internationales se composent de représentants des deux Chambres sur une base paritaire, une proportion plus élevée de sénateurs en sont membres.

Le coût total du système d’indemnisation au sens large est principalement déterminé par deux types de dépenses : les rémunérations (principalement indemnité annuelle, indemnités journalières et indemnités pour fonctions spéciales, 48 % du coût total) et les indemnités de défraiement forfaitaires (45 % du coût total). En comparaison, le système de prévoyance joue un rôle plus secondaire (7 %).

Le système d’indemnisation jugé par les parlementaires En plus de ces analyses des données fournies par les services du Parlement, nous avons également réalisé une enquête par questionnaire auprès des parlementaires (Sciarini et al., 2017). Entre novembre 2016 et janvier 2017, les 263  parlementaires ayant siégé pendant au moins une année parlementaire lors de la 49e législature ont été invités à remplir un questionnaire (en ligne ou sur papier) portant sur le volume de leur travail parlementaire, ainsi que sur les charges et les dépenses effectives en lien avec ce travail.

52 % des parlementaires (136  répondants) ont participé à l’enquête, soit un score relativement élevé pour une enquête

(27)

de ce type. Le taux de réponse a été légèrement supérieur au Conseil des États (57 %, contre 51 % au Conseil national).

En outre, les élus fédéraux qui sont encore en fonction ont plus participé à l’enquête que les parlementaires qui ont quitté le Parlement à la fin de la 49e législature (56 % contre 42 %). Cet écart n’est cependant pas problématique, car il n’y a pas de raison de s’attendre à de grandes différences dans les réponses de ces deux catégories de parlementaires. Nous avons aussi enregistré des variations sensibles dans le taux de réponse d’un groupe parlementaire à l’autre, mais nous disposons néanmoins d’un nombre suffisant de réponses individuelles pour chaque groupe. Par ailleurs, les analyses supplémentaires que nous avons conduites ne montrent pas de différences majeures des réponses entre les groupes par rapport au sujet traité dans ce chapitre.

Graphique 2.1 : Évaluation par les parlementaires du système d’indemnisation (N  =  136) (en %)

58 28 7

12 23

38 33 21

41 67

76 80

75 55 63 73

2 5 17

9 2 7

4 5

0% 20% 40% 60% 80% 100%

Contribution au titre de la prévoyance Indemnité de nuitée Indemnité pour repas Indemnité pour longue distance Indemnités journalières Contribution aux dépenses de personnel et de matériel Indemnité annuelle Indemnités parlementaires en général

Insuffisante/s Appropriée/s Trop élevée/s

(28)

Dans notre enquête, nous avons notamment demandé aux parlementaires d’évaluer le système d’indemnisation au sens large et ses différentes composantes. Le graphique 2.1 ci-dessous présente l’ensemble des réponses à cette question.

On remarque que les indemnités parlementaires en général sont jugées « appropriées » par une très large majorité des répondants (seuls 21 % les jugent globalement « insuffisantes » et 5 % globalement « trop élevées »). Il en va de même pour les deux principales rémunérations : l’indemnité annuelle est jugée « appropriée » par 63 % des répondants (33 % la jugent « insuffisante ») ; les indemnités journalières sont vues comme « appropriées » par 75 % des répondants (seuls 23 % les jugent « insuffisantes »). En revanche, on constate une forte insatisfaction en ce qui concerne la contribution au titre de la prévoyance, qui est jugée « insuffisante » par près de 60 % des répondants. Notre enquête ne permet toutefois pas de déterminer si cette insatisfaction porte sur le montant de la contribution ou sur les règles qui définissent les modalités de versement aux parlementaires.

Le volume de travail parlementaire

Le travail parlementaire au sens strict se compose du travail en séance au sein d’organes de l’Assemblée fédérale et du travail de préparation relatif à ces séances. Si on ajoute à cela le travail consacré à d’autres activités directement liées au mandat parlementaire (notamment les relations avec les partis, les médias, les électeurs et le public), on obtient le travail parlementaire au sens large.

Le volume du travail en séance a été déterminé grâce aux données sur la durée des séances collectées par les services du Parlement, alors que le volume du travail de préparation (séances du conseil, des commissions et des délégations, et des groupes parlementaires) et le volume du travail

(29)

pour les activités liées au mandat parlementaire ont été calculés à partir des réponses à l’enquête par questionnaire mentionnée ci-dessus. Concrètement, les parlementaires ont été priés d’estimer le nombre d’heures consacrées aux diverses composantes du travail parlementaire précitées.

Le graphique  2.2 présente les résultats, dans chacune des chambres.

Au cours de la 49e législature, les parlementaires se situant à la médiane ont siégé 500  heures par année dans les organes de l’Assemblée fédérale (première boîte à moustaches –  en blanc). Si les conseillers aux États ont passé plus de temps en commission, les conseillers nationaux ont quant à eux siégé plus longtemps en plénum. Au final, le temps de travail au sein des organes de l’Assemblée fédérale est donc très proche d’une chambre à l’autre.

Dans les deux chambres, la médiane du temps de préparation des séances s’élève également à environ 500 heures (deuxième boîte à moustaches –  en gris clair). Dans chaque chambre, on note par contre de fortes variations, d’un parlementaire à l’autre, dans le temps de travail consacré à la préparation des séances. Ceci vaut en particulier pour la préparation des séances de conseil. Si on cumule le temps de travail en séance et le temps de préparation des séances, on arrive à un volume de travail au sens strict (troisième boîte à moustaches –  en gris). Au total, le temps de travail médian s’élève à un peu plus de 1 000 heures par année, dans chacune des chambres, avec à nouveau de fortes variations entre les parlementaires.

En outre, il est à noter que ce temps de travail est identique pour les parlementaires qui ont engagé un collaborateur (ce qui concerne la moitié d’entre eux) et pour les parlementaires qui n’ont pas engagé de collaborateur.

Le temps –  non rémunéré  – consacré aux relations avec le public, les électeurs et les médias, aux activités de représentation ou encore aux réunions de parti, varie fortement

(30)

entre les parlementaires et entre les conseils (dernière boîte à moustaches –  en gris foncé). Il s’élève en moyenne à 720 heures pour les conseillers nationaux et à 480 heures pour les conseillers aux États.

Rapporté à un poste à plein temps de 42 heures par semaine, 48  semaines par année (4  semaines de vacances), le temps de travail au sens strict correspond à un taux d’activité annuel médian de 50 %. Si l’on ajoute les activités directement liées au mandat parlementaire au travail au sein des organes de l’Assemblée fédérale, alors les élus du Conseil national arrivent à un taux d’activité total médian de 87 % (1  754  heures par année) et ceux du Conseil des États à un taux de 71 % (1 431 heures par année).

Graphique 2.2 : Volume de travail parlementaire annuel (au sens strict et au sens large)

(31)

Les différents types de parlementaires

Dans notre enquête, nous avons par ailleurs inclus d’autres questions relatives au temps de travail consacré au mandat parlementaire. Les réponses à ces questions peuvent être comparées à celles d’études antérieures conduites dans les années  1980, 1990 et 2000, et permettent donc de se faire une idée de l’évolution du degré de professionnalisation des parlementaires. La première étude a été conduite par Henri Kerr (1981) et demandait aux parlementaires « combien de temps ils ont consacré aux activités politiques à la fois dans et hors du parlement ? ». Ainsi formulée, cette question amenait donc les parlementaires à prendre en compte, dans leur estimation, non seulement le temps consacré au travail parlementaire au sens strict (participation aux séances et préparation de celles-ci) et le temps consacré au travail parlementaire au sens large, mais aussi, le cas échéant, les mandats politiques exercés en dehors du Parlement fédéral, c’est-à-dire au niveau cantonal et/

ou communal. Les études ultérieures ont posé des questions légèrement différentes, mais les réponses restent néanmoins comparables35.

À partir de ces questions concernant la répartition du temps de travail, ces diverses études ont regroupé les parlementaires en trois catégories (tableau  2.3) : les miliciens, qui consacrent au plus un tiers de leur temps au travail parlementaire et aux activités qui en découlent ; les semi-professionnels, qui consacrent entre un tiers et deux tiers de leur temps au mandat ; et les professionnels, qui y consacrent plus de deux tiers de leur temps.

35 Dans notre questionnaire, inspiré de celui d’Eco’Diagnostic, qui s’inspirait lui-même du questionnaire utilisé par Riklin et Möckli (1991), nous avons demandé aux parlementaires d’estimer, pour une semaine « standard », le pourcentage de temps consacré, i) au travail parlementaire au sein des organes de l’Assemblée fédérale, ii)  à la préparation de ce travail parlementaire au sein des organes de l’Assemblée fédérale, iii) à d’autres activités directement liées à votre mandat parlementaire, iv)  aux activités en lien avec d’autres mandats politiques aux niveaux cantonal ou communal, et v) à leur activité professionnelle. Le tableau 2.3 présente les chiffres cumulés pour toutes les activités politiques.

(32)

Comme le montre le tableau 2.3, la proportion de parlementaires pouvant être considérés comme des professionnels de la politique, tout du moins du point de vue du temps qu’ils y consacrent, a fortement augmenté au cours des quarante dernières années. En 1975, seul un parlementaire sur quatre était un professionnel. Cette proportion est passée à un sur trois en 1991, puis presque un sur deux en 2001 et presque deux sur trois en 2016. À l’inverse, la proportion de « purs » miliciens était encore d’un quart en 1975, mais a pratiquement disparu dès les années 1990. Aujourd’hui, tous les parlementaires sont donc des semi-professionnels ou des professionnels de la politique.

Le graphique 2.3 confirme le mouvement en direction d’une professionnalisation des activités parlementaires. Il montre l’évolution, depuis 1991, du taux d’activité moyen des parlementaires, pour le temps de travail au sens strict (participation aux séances et préparation de celles-ci) et au sens large (temps de travail au sens strict et activités directement liées

Tableau 2.3 : Type de parlementaire (en % de chaque catégorie)

1975

(Kerr, 1981) 1991 (riKlin/ MöcKli, 1991)

2001 (eco’Diagnostic,

2001)

2016 (sciarini

et al., 2017) Miliciens

(0-33 %) 24 2 1 2

Semi-professionnels

(34-66 %) 49 63 53 37

Professionnels

(67-100 %) 27 35 46 61

Total

(N) 100

(233) 100

(128) 100

(136) 100

(134)

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