ENTRE SC'JS LE N° 60,309
FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
ANNEE 1901-1902 N° 30
CONTRIBUTION A
L'ÉTUDE
DE
L'OBSTRUCTION INTESTIN
PAR LES
FIBROMES UTERINS
THESE POUR
LEDOCTORAT
ENMÉDECINE
présentée et soutenuepubliquementle 11 Décembre 1901
Tterio-IVIaijLr,ice-<3rLis"tave EPRON
Né à L'Hermenault (Vendée), le 22 novembre 1873
INTERNE DES ASILES DE LA GIRONDE (CADILLAC)
!MM. DEMONS
BOURSIERCHAVANNAZANDÉRODIAS agrégéagrégéprofesseur.... Président
professeur )) Juges)Le Candidat répondra aux questions qui lui seront laites sur les diverses parties de l'Enseignement médical.
BORDEAUX
IMPRIMERIE DU MIDI — PAUL CASSIGNOL
91 — RUE PORTE-DIJEAUX — 9i 1901
Faculté de Médecine ct_de Pharmacie de Bordeaux
M. DE NABIÂS, doyen — M. PITRES, doyen honoraire.
PROFESSEURS
MM. MIGÉ )
DUPUY > Professeurs honoraires.
MOUSSOUS J
Clinique interne Cliniqueexterne Pathologie et théra¬
peutique générales.
Thérapeutique
Médecine opératoire.
Clinique d'accouche¬
ments
Anatomie pathologi¬
que Anatomie
Anatomie générale et histologie
Physiologie Hygiène
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Physiologie Embryologie Ophtalmologie
Hydrologie etMinéralogie Pathologie exotique
Le Secrétaire dela Faculté:
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PRINCETEAU LAGRANGE.
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LEMAIRE.
Pardélibération du 5 août 1879, laFaculté aarrêté que les opinions émises dans les Thèsesqui lui sontprésentées doivent être considérées commepropres à leursauteurs, qu'elle n'entend leurdonner ni approbationni improbation.
A MON PÈRE ET A MA MÈRE
Bien faible témoignage dereconnaissance.
A MES FRÈRES ET A MES BELLES-SŒURS
A MESPARENTS
A MES AMIS
A MONSIEUR LE DOCTEUR NICOULAU
MÉDECIN EN CHEF DEL'ASILE D'ALIÉNÉS DE CADILLAC
A MES EXCELLENTS AMIS
les docteurs ALAIN, AUCHIER et LtAINGUEI
A mon Président de Thèse
MONSIEUR LE DOCTEUR DEMONS
PROFESSEUR DE CLINIQUE CHIRURGICALE A LA FACULTÉ DE MÉDECINEDE BORDEAUX
OFFICIER DE LALÉGION D'HONNEUR
OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
MEMBRE CORRESPONDANT DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE
AVANT-PROPOS
Nous n'avons point l'intention d'ajouter un nouveau cha¬
pitre à la gynécologie ou à la pathologie chirurgicale, il nous
a seulement paru que mettre en relief une des causes de
l'obstruction intestinale serait faire œuvre utile ;aussi, ne doit-on voir dans notre travail qu'un essai d'assemblage d'arguments tendant à démontrer que chez la femme une
cause d'obstruction intestinale se trouve dans les tumeurs
utérines, et plus particulièrement lesfibromes.
Au dire, en effet, de certains chirurgiens, un utérus sur trois serait atteint de tumeurs fibreuses; nous n'avons pu contrôler jusqu'à quel point cette opinion était exacte, mais
en admettant qu'elle soit exagérée, il n'en est pas moins permis de croire, en se basant surles observations médicales
de chaque jour, que bien souvent on pourrait à juste titre
attribuer au fibrome utérin les phénomènes d'obstruction
intestinale dans ses manifestations diverses, depuis la simple constipationjusqu'à l'occlusion complète.
Avant d'aborder notre sujet, nous sommes heureux de pouvoir, à tous ceux qui dans le courant de nos études ont bien voulu s'intéresser à nous, témoigner aujourd'hui nos sentiments les plus reconnaissants.
Nous nous rappellerons toujoursle maître bienveillantque fut pour nous M. le Prof. Pitres, et les enseignements pré¬
cieux dont nous avons profité durant le temps, hélas trop court, que nous avons passé dans son service.
Nous sommes heureux d'avoir été l'élève de M. le Prof.
— 10 —
Démons ; nous le prions de vouloir bien agréer nos remer¬
ciements pour les précieux conseils qu'il nous a prodigués et
pour le grand honneur qu'il nous fait aujourd'hui en prési¬
dant notre thèse.
Nous remercions M. le Prof. Régis de la grande bien¬
veillance qu'il a bien voulu nous accorder en maintes occasions.
M. le Dr Chavannaz nous a prodigué ses conseils et a contribué pour une grandepart à l'élaboration denotrethèse,
nous lui en sommes profondément reconnaissant.
Nous tenons tout particulièrement à rendre hommage à
M. le Dr Nicoulau, médecin en chef de l'Asile d'aliénés de Cadillac; les années que nous avons passées sous ses ordres compteront certainement au nombre de nosplus heureuses et
nous lui savons gré d'avoir bien voulu nous faciliter la terminaison de nos études en nous accordant, toujours avec
une amabilité extrême, les congés quinous furent nécessaires.
Nous n'oublierons jamais combien notre frère, le docteur Gabriel Epron, fut bon pour nous, c'est bien sincèrement que nous le remercions; il a bien voulu contribuer à notre
œuvre et, à cesujet, il a droit une fois deplus à notre recon¬
naissance.
PLAN
Après avoir décrit la structure des fibromes, leurs modifi¬
cations, leurs rapports avec l'utérus, nous esquisserons
dans un second chapitre l'étude clinique de l'obstruction intestinale; nous en consacrerons un troisièmeau diagnostic
et au pronostic de l'obstruction par fibrome ; viendront
ensuite les quelques observations que nous avons purecueillir
avec les réflexions qu'elles nous ont suggéré, puis un dernier chapitre consacré au traitement.
CHAPITRE PREMIER
Anatomie pathologique des fibromes.
Les fibromes sont des tumeurs composées de tissu con¬
jonctifet de fibres musculaires lisses. Ces tumeurs, qui, la plupart du temps, ont pour siège l'utérus, sont d'un volume
essentiellement variable, parfois,toutau plus grosses comme
une noisette, il en a été observé cependant qui atteignaient
le poids énorme de 140 livres (Hunter).
Constitution des fibromes.
Dans la constitution intime deces tumeurs, noustrouvons,
comme l'indique leur définition, du tissu conjonctif et des
fibres musculaires : suivant la prédominance de l'un ou de l'autre de ces deux éléments ont les anommées tantôt fibro¬
mes, tantôt myomes, polypes fibreux ou encore fibro-
myomes. Cette dernière appellation nous semblerait la plus rationnelle, et cependant nous nous conformons à l'usage
courant en les nommant fibromes. Nous ferons remarquer
cependant que l'évolution du néoplasme, et surtout son
accroissement, sont influencés suivant qu'il est constitué
surtout par du tissu conjonctif, ou plutôt par du tissu mus¬
culaire.
La vascularisation des fibromes est très variable et en
rapport avec leur plus ou moins grande connexion avec la
masseutérine. C'est ainsi quedans certains, quifonttellement partie de l'utérus que non seulement il leur serait impos¬
sible de leur reconnaître un pédicule, mais de distinguer
— u —
même par un étranglement l'endroit où commence le tissu néoplasique, on trouve des vaisseaux qui par leur nombre
etleur volume peuvent devenir une gêne pour le chirurgien:
d'autres, au contraire, ceux que l'on appelle plus particuliè¬
rement polypes fibreux, parce qu'ils sont nettement pédicules
etordinairement encapsulés, ne présententque peu ou pas de
vascularisation; et dans ce cas on peut voir les vaisseaux
utérins envoyer quelques ramifications, dont la plupart se
perdent dans l'épaisseur du pédicule.
L'existence deslymphatiques ne semble faire aucun doute; Dupuytren en atrouvé un nombre considérable et Poirier a démontré que dans les utérus myomateux les lymphatiques
sous-séreuxs'hypertrophient au point d'acquérir le volume
du pouce.
On peut trouver des détails sur l'innervation des fibromes
dans les travauxde Bidder, Herz etLorey.
Évolution et transformations des fibromes.
D'après Duplay et Reclus, « ily a deux faits fort étranges
dans l'histoire de ces tumeurs, et qui les distinguent de tous
les autres néoplasmes, sauf les polypes naso-pharyngiens qui
ont plus d'un point commun avec eux : c'est que leur évolu¬
tion paraîtjusqu'à un certain point liée à la santé générale.
Ainsi on observe parfois une diminution de la tumeur pen¬
dant les maladies générales. Braùn, Gliiari et Spœth attri¬
buent surtout ceteffetau choléra. Il est possible
qu'il
s'agissetout simplement là de modifications dans le degré de la con¬
gestion ou de l'œdème, sans qu'il y ait de réels changements
dans les parties constitutives de la tumeur.11 est parfaitement démontré, quoi qu'en dise Lawson Tait, qu'en règle géné¬
rale les fibromyomes cessent de croître à partir de la méno¬
pause, et que souventils diminuent avec l'utérus. C'est là un fait de très haute importance sur lequel est basée une mé¬
thode thérapeutique. Il y a certainement des exceptions à
cette règle. On voit, en effet, des fibromyomes qui continuent
— 15 —
à croître après la cessation des règles, niais cela s'observe
surtoutlorsque la tumeur a subi certaines dégénérescences:
ou bien, comme Gusserow, lorsqu'elle tire ses principaux
moyens de nutrition, ses vaisseaux, non pas de l'appareil génital, mais des organes voisins au moyen d'adhérences
secondaires. »
Pendantla gestation, les fibromyomes subissent, en môme temps que l'utérus, un accroissement énorme. Mais après la parturition, ils deviennent comme l'utérus lui-même le siège
de phénomènes d'involution, et diminuent. Cette régression qu'ona attribuée àune métamorphose graisseuse est quelque¬
fois telle que la tumeur diminuebeaucoup plus qu'elle n'avait augmenté, et finalement se trouve plus petite qu'elle n'était
avant la conception. Elle peutmême disparaître. On observe quelquefois aussi après l'accouchement ou l'avortement, soit
la suppuration et la putréfaction, soit l'élimination sponta¬
née des fibromyomes.
Nous n'insisterons pas sur les diverses modifications
pathologiques que peuvent subir les fibromes : tantôt ils sont atteints de dégénérescence graisseuse, et dans ce cas, d'après Wirchow, si leur volume ne diminue pas, leur accroissement
se trouverait tout au moins arrêté, tantôt de calcification ou mêmed'ossification. Nous remarqueronscependantque dans
le premier cas le processus pathologique atteint surtout le tissu musculaire; dans le second, nous voyons presque tou¬
jours les cristaux de phosphate, de carbonate ou de sulfate de chaux s'incruster dans letissu conjonctif.
Dans ces diverses sortes de dégénérescence, le fibrome s'atrophie. Il peut arriverquelquefois qu'il se ramollisse par le fait de l'atrophie des fibres musculaires, de la dissociation et de la résorption du tissu conjonctif:il se forme alors des petites lacunes, « les geodes de Gruveilliier », remplies d'un liquide jauneclair, se coagulant parfois spontanémentaucon¬
tact de l'air. À ce moment la tumeurest nettement fluctuante etil semblerait quela ponction dûten évacuer immédiatement lecontenu; mais il arrivesouvent quele tissu utérin est formé
— 16 —
de geodes, absolument indépendantes
les
unesdes
autres ;il
faudrait donc pour obtenir un résultat satisfaisant les ponc¬
tionner toutes successivement. Il est vrai qu'à un degré plus avancé, dans lemême processus pathologique, les parois des petites cavités finissentpar se
résorber
et quel'on
setrouvealors en présence de poches assez vastes pour que,
si l'on
en peutévacuer le contenu, le volume de
la
tumeur se trouvesensiblement diminué
Nous devons signalerqu'en cette dernièreoccurrenceil peut parfois se produire à l'intérieur des
geodes,
parsuite de la
désagrégation des vaisseaux qui s'y rencontrent,des hémor¬
ragies parfoisconsidérables.
Au point devue deleur structure intime, les geodes sont
de
simples trous sansparoi propre,creusés dans le tissudufibro-
myome, limités parle tissu propre de la tumeur,
c'est-à-dire
pardes fibres conjonctives et des fibres
musculaires.
Kœberlé, Klebs, Léopold et Fehling ont observé que cer¬
taines d'entre elles sont des vaisseaux lymphatiques dilatés ; il serait résulté de cette constatation deux sortes de cysto-
fibromes : l'une due àl'œdème et auramollissement, l'autre à des dilatations lymphatiques; mais,vu les nombreux rapports qui existent entre les vaisseaux lymphatiques et les
lacunes
du tissu conjonctif, cette division semble
superflue.
Dans la variété de tumeurs pourvues de vaisseaux san¬
guins, c'est-à-dire dans celles constituées plus
particulière¬
mentpar des fibres musculaires lisses, et qui se trouvent en rapport plus intime avec le tissu utérin, on rencontre
des
modifications de cesvaisseaux (augmentation des vaisseaux
en nombre et en volume) qui ont fait comparer le tissu néo- plasique àcelui descorps caverneux : d'où la
dénomination
de fibromyomes caverneux ou télangiectasiques.
Les fibromyomes peuvent être le siège de phénomènes inflammatoires, et dans la plupartdes cas c'est par la capsule
celluleuse enveloppant latumeur que débute la suppuration,
bien qu'on ait pu l'observer (Cruveilhier) commençant au centre. On conçoit dès lors qu'àla suite de la disparition de
— 17 —
la coque celluleuse qui l'enveloppe le fibrome, se trouvant
libre dans la cavité utérine, tende à s'éliminer et il se produit
en quelque sorte accouchement.
Une dernière transformation quepuissent subir lestumeurs
que nous étudions, est celle de tumeurs bénignesen tumeurs malignes. Malgré les observations des divers auteurs, nous pensons avec Duplayet Reclus que l'on a pris la coexistence
d'un fibrome et d'un carcinome pour une seule et même tumeur, et ce d'autant plus qu'il est difficile de transformer
un néoplasme fibro-conjonctif en néoplasme épithélial.
Modifications de l'utérus.
Il est nécessaire de dire quelques mots des modifications
que subit l'utérus fibromateux qui est atteint dans son tissu
musculaire et dans sontissu muqueux. Le premier subit une
hypertrophie telle que Guyon l'a désignée du nom de gros¬
sesse fibreuse ; le second est également altéré : on constate des phénomènes de métrite glandulaire hypertroppique et hyperplasique : dans les espaces où la muqueuse est en
rapport plus ou moins direct avec la tumeur, Curatolo a constatéqu'ontrouvesurtout des lésions d'endométriteinters¬
titielle avec destruction des glandes.
Rapports des fibromes avec l'utérus.
Tous les fibromes prennent naissance dans le tissu muscu¬
laire de l'utérus; les uns, à tous les degrés de leur évolution
en demeurent enveloppés, on les désigne sous le nom d'in¬
terstitiels; d'autres, nés dans les parties périphériques du parenchyme musculaire, s'en énucléenttrès rapidement.
On désigne ces derniers, suivant leur situation, sous la dénomination de sous-muqueux interstitiels et sous-périto-
néaux.
Lesfibromes sous-muqueuxet interstitiels nous intéressent tout particulièrement ; les premiers en effet, qu'ils soient ou
E.
— 18 —
non pédicules, provoquentune
dilatation
etunehypertrophie
de la matrice telles que la vessie etlerectum sont souvent comprimés ; les seconds, qu'ils soient situés
dans la paroi
antérieure ou dans la postérieure, ou même dans les parois
latérales de l'utérus, peuvent se trouver en contact avec les
anses intestinales et les comprimer plus oumoins.
Quant aux fibromes sous-péritonéaux, ils sont presque
toujours situés hors du bassin, et, sauf le cas où ils attei¬
gnent un volume extraordinaire, ne compriment pas
suffi¬
samment les viscères avec lesquels ils se trouvent en con¬
tact pour occasionner des accidents graves.
Ilpourrait se faire cependant qu'ils se forment en face des
culs-de-sacs péritonéaux antérieur ou postérieur, et que dans
le premier cas ils donnent lieu à des phénomènes d'étran¬
glement interne en agissantsur les anses d'intestin grêle qui
souvent y sont contenues; dans le second, ils peuvent com¬
primer le rectum.
CHAPITRE II
De l'Obstruction intestinale.
Considérations générales.
L'obstruction intestinale peut être produite par des causes bien diverses : la plupart du temps ce sont des obstacles mé¬
caniques qui entravent le cours des matières fécales. J.-J.
Peyrot les a divisés en quatre classes :
1° Les vices de position d'une partie du tube intestinal :
invaginations, volvuluset torsions, coudures.
2° Les compressions, qui peuvent être étroites : brides, diverticules, anneaux accidentels, hernies internes ; ou lar¬
ges : tumeurs diverses, adhérences par une surface étendue.
3° Les obturations : corps étrangers, polypes, masses féca¬
les durcies, etc.
4° Les rétrécissements : rétrécissements proprement dits,
etcancers de la paroi intestinale.
L'obstruction par compression présente seule un intérêt pour nous. D'après Duplay et Reclus :
« Dans les compressionslarges, l'occlusion intestinale peut
succéder à l'aplatissement de l'intestin par toutes sortes de
tumeurs abdominales, utérines, ovariques, mésentériques, biliaires, pancréatiques : quelquefois, c'est un organe hyper¬
trophié, comme la rate, ou déplacé, comme l'utérus ou le rein, qui détermine l'arrêt des matières.
» On trouve dans la science plusieurs cas d'occlusion à la suite de grossesses extra-utérines. Maygrier en cite quatre
— 20 —
observations : un cas d'obstruction
du rectum causée
parla
présence d'un sac
fœtal dans le cul-de-sac de Douglas, et trois
casd'occlusion produits par les
lithopédions
: unde Pletzer,
dans lequel la grossesse
datait de quinze mois ; un de Hor-
nung, dans
lequel la
grossessedatait de dix ans ; un d'Œttin-
ger, dans
lequel la
grossessedatait de seize ans. Ce dernier
cas fut laparotomisé par
Bouilly
quej'assistais dans cette
opération ; une
grande longueur d'intestin grêle adhérait au
lithopédion ; il
existait manifestement de la péritonite qui
avait été la cause des phénomènes
d'occlusion. A côté de
ces compressions ondoit signaler tous les cas d'adhérences
étendues immobilisant et déviant
l'intestin,
enle fixant soit
à la paroi, soit à
l'un des
organesabdominaux, soit à une
tumeur quelconque.
» Il est rare que la
seule adhérence suffise à expliquer
l'occlusion, de même que pour
les compressions étendues
c'est le plus souvent une
poussée de péritonite surajoutée
qui occasionne
l'arrêt des matières.
»(Duplay et Reclus,
Traité de Chirurgie, t. VI,p. 446).
Considérations cliniques.
Formeàigue.—Bienque leplus
ordinairement, lorsqu'elle
reconnaît pour cause une tumeur
fibreuse de l'utérus, h obs¬
truction intestinale n'alfecte pas la
forme aiguë, il peut
arriver parfois qu'un
étranglement interne survienne chez une
femme depuis longtemps
atteinte de fibrome
;comme il est
de toute nécessité d'intervenirdans ce cas
le plus rapidement
possible, nous
dirons
enquelques mots les symptômes de
l'occlusion intestinale à forme aiguë.
C'est souvent par une douleur
extrêmement vive
en un point quelconquede l'abdomen
ques'annonce la maladie ;
cette douleur estintermittente et
coïncide
avecles contrac¬
tions péristaltiques et
antipéristaltiques de l'intestin. Il
peut arriver
qu'elle siège toujours
aumême point, et elle
devient alors un adjuvant précieux pour
diagnostiquer la
— 21 —
partie précise de l'intestin
dans laquelle siège l'obstacle. Sur¬
viennent ensuite les vomissements qui, alimentaires au début, sont ensuite muqueux, puisbilieux et
enfin fécaloïdes.
Ce symptôme est trèsinconstant en ce sens que
chez
cer¬tains malades on apu le constater dans toute son
intensité.,
c'est-à-dire ne pouvant être calmé par aucun
médicament,
alors que chez d'autres, tantôt il n'apparaît que
tardivement,
tantôt après être survenu une ou deux fois au
début de la
maladie, il disparaît pour ne plus revenir.
Les manifestations générales, bien que parfois
lentes
à paraître, n'en sont pas moins ordinairementaccentuées
: «Le
visage pâlit et s'altère, les traits se tirent, les yeux
s'exca-
vent, le nez s'amincit et s'effile ; le pouls devient petit et fréquent ; la température reste normale ou s'abaisse. La cons¬
tipation est complète soit dès le début, soit après une ou deux évacuations ; l'émission des gaz par l'anus fait absolu¬
ment défaut. Le ventre, souvent rétracté aupremier moment,
se ballonne après vingt-quatreou trente-six heures. Les phé¬
nomènes de dépression s'accentuent; l'angoisse est inexpri¬
mable, le pouls est misérable, la voix s'éteint ; aux vomis¬
sements s'ajoute un hoquetpersistant ; le corps se couvre de
sueurs froides, l'hypothermie est extrême et le malade succombe, en conservant, le plus souvent, son intelligence
intacte jusqu'à la fin. » (Duplay et Reclus.)
Forme chronique. — C'est la forme chronique qu'affecte
surtoutl'obstruction intestinale causée par les fibromes ; elle
se présente alors avec des symptômes lents et insidieux : Au début : « Lenteur des digestions, flatulence, constipa¬
tion persistant plusieurs jourset se terminantpar une débâcle
suivie d'une amélioration temporaire. Peu à peu, la durée
des périodes de constipation augmente; le ventre tend à se ballonner et l'occlusion semble complète. Cependant, une médication purgative amène encore une débâcle. Finalement,
les accidents se renouvellent,résistent à toute thérapeutique
et l'occlusion est constituée. » (Duplayet Reclus.)
Ilest à remarquer que dans la forme chronique les symp-
— 22 -
tomes sont sensiblement les mêmes que dans la formeaiguë,
mais se trouvent très atténués. C'est ainsi que la douleur
esthabituellement peu marquée, neparaissant
qu'à des inter¬
valles plus ou moins éloignés, sous
forme de coliques; la
constipation n'estque relative et ne
dure
quequelques jours
au boutdesquels survient une débâcle ;
l'émission de
gaz parl'anus est constante lorsque l'obstacle siège sur le gros intestin; leresserrement progressif du passage se traduit par des modifications dans la forme des matières fécales, qui peuvent être aplaties, rubanées,
effilées
ouovillées.
On n'observe de ballonnementquelorsque survientl'occlu¬
sionintestinale aiguë; il en est de même pour
les vomisse¬
ments et les symptômes généraux.
En somme, la forme chronique est caractérisée par la
succession de deux ordres d'accidents : des symptômes de
diminution progressive du calibre
de l'intestin,
etdes
symp¬tômes d'arrêt complet des matières; les premiers
précèdent
d'ordinaire l'apparition des seconds. Il
existe, néanmoins,
un certain nombre de variétés intermédiaires à la forme aiguë et àla forme
chronique,
etil n'est
pas rare quedes
malades, après avoir présenté, pendantun
certain
temps,des
symptômes de sténose progressive,soient pris tout à
coupdes accidents les plus aigus; c'est ce qui arrive lorsque
dans
un rétrécissement ou dansun cancers'engage un corps étran¬
ger, ou bien lorsque chez un
malade atteint de constipation
chronique avec amas stercoraux, vient s'ajouter un spasme
ou une paralysie des tuniques intestinales. Dans
d'autres
circonstances, l'obstruction chronique ne s'est révélée que par des phénomènes insignifiants, quand les
malades sont
pris brusquement d'occlusion aiguë; oncomprend
quele
diagnostic offre alors les plus grandesdifficultés.
Habituellement, cependant, l'occlusion chronique affecte
des symptômes plutôt bénins, eton peut lui
attribuer
commecausesles plus fréquentes : les rétrécissements cancéreux ou
simples, l'invagination chronique, les
compressions larges
par organes
abdominaux hypertrophiés
oudéplacés,
partumeurs; les flexions anormales, les adhérences étendues,
résultant d'inflammations chroniques dupéritoine, les obs¬
tructions par polypes, corps étrangers, etc., mais surtout par matières fécales accumulées.
CHAPITRE III
Diagnostic et Pronostic.
Nous ne pouvons discuter ici tous les symptômes qui accompagnent l'obstruction intestinale ou les fibromes, nous
nous bornerons à faire observer que chaque fois que chez
une femme présentantles divers phénomènes (vomissements,
rétention des matières fécales et des gaz, hypothermie, etc.) qui dénotent l'occlusion, et que d'autre part, on trouvera
chez cette malade une tumeur fibreuse utérine, 011 sera en droit de penser que cette tumeur peut être la cause des acci¬
dents.
Pour confirmer le diagnostic, on aura recours autoucher et
au palper, et mieux, aux deux procédés réunis; on acquerra ainsi une notion exacte de la situation, du volume, de la
mobilité de la tumeur et des organes avec lesquels elle se trouve en connexion.
De même qu'un fibrome peut être confondu avec toute
autre tumeur de l'utérus, ou encore avec une grossesse, l'oc¬
clusion intestinale peut simuler une péritonite, une hernie étranglée, ou uneaffection quelconque de l'intestin.
On devra rechercher dans révolution du fibrome, ordinai¬
rement très longueet surtout sans grand retentissement sur
l'organisme, le principal symptôme qui le différencie des
autres tumeurs.
Quantàl'occlusion, l'absence complète de matières fécales
etde gaz en constitue le principal élément de diagnostic.
- 26 —
Le pronostic est nécessairement variable, et
ici
encoreil
nous fautdistinguer la forme aiguë et la forme
chronique de
l'obstruction.
Dans le premier cas, indépendamment de
l'affection elle-
même, on doit encore considérer la gravité de l'intervention chirurgicale.
Il est fréquent, en effet, que l'on soit
obligé d'opérer d'ur¬
gence une malade très
affaiblie déjà, chez laquelle les phéno¬
mènes aigus se sont déclarés depuis un temps trop
long
pourassurerle succès, quelles que soient les
précautions prises
par le chirurgien.
Si, au contraire, la tumeur ne donne lieu qu'à de la cons¬
tipation chronique, il peut se faire que
la malade
nesoit
pas gravement atteinte dans son étatde santé générale
;elle
possède alors toutes les chances pour être
guérie
parl abla-
tion deson fibrome.
CHAPITRE IV
OBSERVATIONS
Nous n'avons purecueillir malheureusement qu'untrèspetit
nombre d'observations; il est rare, en effet, que le fibrome
utérin produise de l'obstruction aiguë; mais en revanche,
presque toutesles malades atteintes de fibrome sont sujettes
àla constipation ; cette constipation peut être tellement opi¬
niâtre qu'elle nécessite l'ablation de la tumeur.
Dans le premier cas que nous rapportons, il s'agit d'obs¬
truction aiguë ayant nécessité la laparotomie; il semble,
comme le fait remarquer M. le Dr Ghavannaz, que les acci¬
dents dans le casparticulier auraient eu quelque rapport avec
une proéminence exagérée de l'angle sacro-vertébral. La
mortde la malade a été causée par un envahissement de la
trachée à la suite de vomissements fécaloïdes.
La seconde observation traite d'un cas analogue dans lequel
toute interventionopératoire a été refusée par la malade et sa
famille.
Nous citons ensuite deux cas d'obstruction chronique qui, à certains moments, ont présenté cependant des phases aiguës.
Observation I
(Due à l'obligeance de M. le Dr Chavannaz.)
Occlusion intestinale par fibrome utérin. Laparotomie. Mort.
Ils'agit d'une femmede quarante-neuf ans auprès de laquelle nous sommes appelé par notre très distingué collègue, M. le Dr Durand, le
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4 septembre1901. La malade nousracontequ'elle n'a jamais eu
d'acci¬
dents morbides graves; elle a mené à bien quatre grossesses. Dans ces
derniers temps, la santés'est maintenue bonne, sans diminution d'ap¬
pétit, sans constipation opiniâtre, mais le ventre a un peu grossi.
Les accidents semblent avoir débutéle 27 août au soir.
À cette date,elle ressent dans l'abdomen quelque chose d'indéfinis¬
sable, « comme si le ventrese démolissait », mais sans douleurs, ni
vomissement. Lanuit estpénible.
Lelendemain, 28 août,M. Durand constatela présence d'une tumeur hypogastrique qui lui semble devoir être rattachée à l'utérus; les
culs-
de-sac vaginaux sont libres. Les règles, toujours régulières, datent
d'une dizaine dejours; ellesontété suivies d'unepetite reprise de l'écou¬
lement sanguin pendant quatre jours. Il y a unelégère élévation de
température. Le thermomètre marque 38°. Le traitement consiste en
lavements, rhubarbe etapplication de glacesurl'abdomen.
Le 1erseptembre, apparaissentdes vomissements; il ya suppression
des gazet des matières; la malade rend les lavements qui sont admi¬
nistrés; pourtant le lendemain, 2 septembre, elle évacue quelques
petites matières fécales, rondesetsèches.
Nous sommes appelé le 4 septembre, à quatre heures du soir. Le
ventre est très ballonné, plus particulièrement dans la région péri-
ombilicale. Alapercussion, matité dans les flancs etdansla région hypo-
gastrique. La malade éprouve des douleurs très vives dans tout
le
ventre. Il n'y apas dehoquets, mais desvomissements fécaloïdes exis¬
tentdepuis deuxjours. La maladene rend nigaznimatièresparl'anus,
malgré une limonade purgativeprise le matin même.
Au toucher vaginal, col petit, non induré; il n'y a rien dans les
culs-de-sac, et l'utérus, autant qu'on en peut juger, est légèrement
mobilisable.
Le faciès estgrippé,le pouls est à 104, la température à 37°2; il n'y
a rien àl'auscultation du poumon. Le toucher rectal ne décèle aucun effacement du rectum.
La maladeesttransportée à l'hôpital et nous intervenons d'urgence
le soir même, à huit heures et demie, malgré une aggravation très
nette dessymptômes, et malgréen particulierla faiblesse etlafréquence
du pouls qui estpassé à 120.
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En raison de la gravité extrême de la situation, nous sommes décidé
àpratiquer un anus contre nature, sans nous attarder à unerecherche approfondie de lacause de l'occlusion.
Anesthésie obtenue dès les premières inhalations de chloroforme. Une injection de sérum est faite dès le début de l'anesthésie et continue pendant toute la durée de l'opération.
Incision dans la fosse iliaque droite, parallèlement à l'arcade de Fallope; il s'écoule unecertaine quantité de sérosité sanguinolente. Le
caecum est découvert et reconnu, il estcomplètement llasque. Le doigt
sent aussitôt la partie adjacente de l'iléon; cetteanseestflasque, très diminuée de volume, ayantà peinela grosseurdu petit doigt. L'incision
est agrandie sur le pubis, de manière àpouvoir suivre l'intestin grêle
versle petit bassin dans lequel il semble plonger. On constate alors que l'ansegrêle terminale passe en arrière d'une tumeurdure qui fait corps avec l'utérus.
L'anse grêle est réunie à la tumeur par des adhérences fibrineuses faciles à détacher; elle est comprimée entrela face postérieure de la
tumeur et l'angle sacro-vertébral. Dans la face comprimée, l'intestin
est trèsfortement congestionné, mais il n'estle siège d'aucun processus de mortification. Au-dessus de la partie comprimée, l'intestin grêle reprend brusquement son aspect normal, sauf qu'ilest àce niveauet au-dessuségalement trèsfortementdistendu.
En raison de l'état très précaire de la malade, nous pensonsqu'il est utile de pouvoir amener uneévacuation rapide du contenu intestinal ; aussinouspassons une broche à travers le mésentèreet nous amenons audehors l'anse de l'intestingrêle qui confine à la portion antérieure¬
mentcomprimée. Nous fermons rapidement la brèche abdominale par
une sutureen masse au fil d'argent. A ce moment, la malade estprise
de vomissement; elle rejette unequantité énorme de matières fécaloïdes qui, malheureusement, pénètrent en partie dans la trachée; il y a
brusquement arrêt de la respiration et du pouls, et la mort arrive immédiatement, malgrétousnos efforts.
A 1autopsie, nous netrouvons aucune altération de la continuité de l'intestin. Aucune tumeur desestuniques. On voit nettement la partie qui était comprimée par la tumeur, ellecommence à environ 40 centi¬
mètres de1abouchementau csecum, etla teinte rougeâtre serencontre
sur unelongueur d'environ 20centimètres.