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Arbitrage et propriété intellectuelle

DE WERRA, Jacques

DE WERRA, Jacques. Arbitrage et propriété intellectuelle. In: Cecchi Dimeglio, Paola/Brenneur, Beatrice. Manuel interdisciplinaire des modes amiables de résolution des conflits = Interdisciplinary Handbook of Dispute Resolution. Bruxelles : Larcier, 2015. p. 1105-1127, 1285-1290

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:75466

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Arbitrage et propriété intellectuelle

Jacques

De

W

erra

*

Résumé

Les difficultés susceptibles de surgir dans le cadre de litiges ju- diciaires internationaux de propriété intellectuelle et les avantages propres à l’arbitrage commercial international (en particulier la confi- dentialité et la facilité d’exécution globale des sentences arbitrales) font que l’arbitrage s’est profilé comme un mode apprécié de résolution des litiges internationaux de propriété intellectuelle . L’utilisation efficace de l’arbitrage suppose néanmoins d’identifier et de saisir les particularités des litiges de propriété intellectuelle, afin de relever les défis que pose la conduite d’arbitrages dans ce domaine .

Mots-clés : propriétéintellectuelle, arbitrage.

Introduction

Dans la société de la connaissance et de l’image, l’avantage compéti- tif des entreprises provient très souvent de leurs actifs intangibles, que visent à protéger le droit de la propriété intellectuelle . C’est en effet es- sentiellement par leur technologie innovante (qu’elle soit brevetée ou protégée par le droit des secrets d’affaires) et/ou par leur marque dis- tinctive que les entreprises se démarquent de leurs concurrents (ou sou- haitent et tentent le faire) 1 . Dans cette perspective, la défense efficace des

* Jacques de Werra est professeur à la Faculté de droit de l’Université de Genève .

1 Comme en témoigne de manière éloquente le litige global opposant les groupes Apple et Samsung devant les tribunaux du monde entier, voy . le site « Apple vs . Samsung: the complete lawsuit timeline » accessible à : http://www .theverge .com/

apple/2011/11/2/2533472/apple-vs-samsung .

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droits de propriété intellectuelle constitue une question essentielle non seulement pour les entreprises, mais également pour nombre d’États dont de larges pans de l’industrie nationale (qu’il s’agisse d’industries pharmaceutiques ou des médias) dépendent d’une protection effective du droit de la propriété intellectuelle .

La globalisation des activités économiques entraîne par ailleurs une intensification des transactions transfrontières qui a pour effet de pro- voquer une circulation accrue des actifs intangibles, ceux-ci s’affran- chissant complètement des frontières nationales et des continents 2, ce qui ouvre assurément de nouvelles et prometteuses perspectives de dé- veloppement commercial, mais n’est pas sans créer de nouveaux risques et défis .

Au vu de l’importance ainsi prise par les actifs intangibles et par le droit de la propriété intellectuelle dans la vie des affaires et dans les transactions commerciales internationales, il n’est pas surprenant de constater l’intensification des litiges internationaux relevant (au moins partiellement) du droit de la propriété intellectuelle, qu’il s’agisse de li- tiges commerciaux éclatant entre des entreprises privées ou de conflits mettant en cause des États 3 . Cette tendance se reflète aussi en matière d’arbitrage commercial international 4, où l’on constate une croissance importance des arbitrages internationaux soulevant des questions, sou- vent complexes, de droit de la propriété intellectuelle 5 .

2 Comme le fait Internet, qui permet la transmission immédiate et mondiale d’actifs intangibles généralement protégés par le droit de la propriété intellectuelle .

3 La présente contribution ne traitera pas la question de la propriété intellectuelle dans le contexte de l’arbitrage d’investissement et selon le mécanisme de règlement des dif- férends de l’O .M .C . en dépit de l’intérêt et de l’actualité de celle-ci, comme en témoigne l’affaire ICSID initiée par le groupe Philip Morris contre l’Uruguay (Philip Morris Pro- ducts S.A. (Switzerland) and Abal Hermanos S.A. (Uruguay) c. Oriental Republic of Uruguay, ICSID Case No . ARB/10/7) concernant l’introduction du « plain packaging » en matière d’emballages de cigarettes et le litige initié par l’Ukraine contre l’Australie à l’O .M .C . (DS 434-Australia – Certain Measures Concerning Trademarks and Other Plain Packaging Requirements Applicable to Tobacco Products and Packaging) ; sur cette question, voy . Alemanno et Bonadio .

4 La présente contribution n’a pas pour objectif de présenter la thématique de l’arbitrage en droit de la propriété intellectuelle sous l’angle d’un droit national particulier, mais au contraire d’en faire une analyse dans une perspective comparatiste (dans les limites que permet le format du présent ouvrage) .

5 Ce qu’exprime le Panorama I .C .C . de la propriété intellectuelle, 11e éd ., 2012, de la Chambre de commerce internationale (C .C .I .), p . 63 (accessible à : http://www.iccwbo.

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Elle se confirme également par les mesures prises par certaines au- torités étatiques afin de favoriser le recours à l’arbitrage en matière de propriété intellectuelle à l’image de ce qui a récemment été fait en droit français (Bruguière et Gillet, 2011) 6, ce dans le but de confirmer que

« l’arbitrage est possible dans tous les types de litiges de propriété in- tellectuelle » 7 . Preuve en est enfin l’impressionnant nombre de publica- tions récentes consacrées à ce thème (De Werra, 2013, 2012 ; Deming Liu, 2012 ; Halket, 2012 ; Rohn et Groz, 2012 ; Cook et Garcia, 2010 ; Hanotiau, 2010 ; Martin et Derek Mason, 2011 ; Chiariny-Daudet, 2006 ; Smith et al., 2006 ; Liniger, 2002 ; Holzner, 2001 ; C .C .I ., 1998 ; IRPI, 1994) 8 . En somme, l’arbitrage est en pleine expansion dans le domaine de la propriété intellectuelle . Cette tendance s’inscrit au demeurant dans

org/Data/Documents/Intellectual-property/IP-Roadmap/IP-Roadmap-2012_French/) confirmant le nombre croissant d’arbitrages portant principalement sur des questions de propriété intellectuelle soumis à la C .C .I . ; on le constate aussi, en dépit de la confiden- tialité de principe des procédures d’arbitrage, dans le cadre des procédures judiciaires par lesquelles des sentences arbitrales sont contestées devant des tribunaux étatiques, voy . p . ex . en Australie : Larkden Pty Limited v. Lloyd Energy Systems Pty Limited, Su- preme Court of New South Wales, [2011] NSWSC 268 ; au Canada : Coastal Contacts v. Elastic Path Software Inc ., Supreme Court of British Columbia, 2013 BCSC 133 ; aux États-Unis : Sanofi-Aventis Deutschland GmbH v. Genentech, Inc. et Biogen Idec Inc., case no . 12-1454 (Fed . Cir ., 10 mai 2013) ; Timegate Studios, Inc. v. Southpeak interactive LLC et al., case no . 12-2056 (United States Court of Appeals for the Fifth Circuit, 9 avril 2013) ; en Inde : Ministry of Sound International Ltd v. M/S Indus Renaissance Partners Entertainment Pvt Ltd., High Court of Delhi, 7 janvier 2009, accessible à : http://www . indiankanoon .org/doc/1992362/ .

6 Code de la propriété intellectuelle (« CPI »), art . L . 331-1, al . 4 (droit d’auteur) ; art . L . 615-17, al . 2 (brevets), art . L . 716-4 (marques), art . L . 521-3-1, al . 2 (dessins et modèles), art . L . 623-31, al . 3 (obtentions végétales) et art . L . 722-8, al . 2 (indications géographiques) ; pour une analyse de la portée de ces dispositions, voy . Bruguière et Gillet .

7 Proposition de loi – simplification et amélioration de la qualité du droit/amendement présenté par MM . Béteille et Yung, Commission des lois, Sénat, 29 septembre 2010, accessible à : http://www.senat.fr/amendements/commissions/2009-2010/130/Amdt_

COM-3.html.

8 On signalera en particulier les ouvrages de Cook et Garcia ; ainsi que les récents articles de Hanotiau ; Deming Liu ; Martin et Derek Mason ; Rohn et Groz ; de Werra . Il est important de noter que la présente contribution se fonde sur les deux articles précités (de Werra, 2013, 2012) . Il va toutefois de soi que ces récentes pu- blications ne doivent pas occulter le fait que la thématique n’est pas nouvelle, comme en témoignent d’autres plus anciennes, cf . par ex . IRPI ; voy . aussi Chiariny-Daudet ; N . Holzner ; Liniger ; Smith et al. Voy . aussi le Rapport final de la Commission de l’arbitrage international de la C .C .I ., spéc . p . 38 .

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un mouvement plus large qui tend à promouvoir l’utilisation de modes alternatifs de règlement des conflits en droit de la propriété intellec- tuelle . En témoignent les récents lancements de services de médiation par l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, des- sins et modèles) 9 en Europe, et par les offices de la propriété intellectuelle brésilien 10 et singapourien 11, ainsi que la création à venir d’un centre d’arbitrage et de médiation (ayant son siège à Ljubljana et à Lisbonne) dans l’Accord européen relatif à une juridiction unifiée du brevet 12 .

Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce phénomène, notamment la confidentialité et la flexibilité de la procédure arbitrale, l’expertise des arbitres et l’exécution facilitée des sentences arbitrales sur le plan inter- national 13, ceux-ci contribuant assurément à rendre attractif ce mode alternatif de résolution des différends . En outre, la création de tribu- naux de propriété intellectuelle spécialisés (en particulier dans le do- maine des brevets) peut paradoxalement aussi conduire à favoriser le développement de l’arbitrage : même si ces tribunaux ont été créés dans le but d’améliorer l’efficacité des juridictions étatiques, leur compétence limitée peut parfois porter préjudice à leur utilité (Chiariny-Daudet, 2011) 14 . De plus, les difficultés de la protection judiciaire et d’applica- tion des règles ordinaires du droit international privé dans l’environ- nement des réseaux numériques où les violations de droit de propriété

9 L’Office offrant des services de médiation depuis l’automne 2011, voy . http://oami.

europa.eu/ows/rw/pages/CTM/regProcess/mediation.fr.do.

10 En coopération avec le Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI, voy . http://

www .wipo .int/amc/en/center/specific-sectors/inpibr/ .

11 En coopération avec le Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI, voy . http://

www .wipo .int/amc/en/center/specific-sectors/ipos/mediation/ .

12 Art . 35 de l’Accord, document 16351/12 du 11 janvier 2013, l’Accord étant ou- vert à la signature par les États membres le 19 février 2013 (art . 84) ; le texte de l’ac- cord est accessible à : http://eur-lex .europa .eu/LexUriServ/LexUriServ .do?uri=O- J:C:2013:175:0001:0040:FR:PDF .

13 Grâce à la Convention pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères (New York, 10 juin 1958) .

14 Voy . Cour de cassation du 7 juin 2011 . L’arrêt concerne un contrat de licence de brevet et de savoir-faire (n° 10-19 .030, Chlorotech Sarl) ; pour un commentaire, voy . Chiari- ny-Daudet, spéc . p . 24 . Des difficultés comparables peuvent surgir dans les États dans lesquels les litiges contractuels sont soumis à des tribunaux différents que ceux relevant du droit de la propriété intellectuelle (par exemple États-Unis et Canada), ce qui peut donner lieu à des litiges : pour un exemple, voy . Severe Records, LLC v . Rich, 658 F .3d 571 (6th Cir . 2011) .

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intellectuelle se multiplient ont favorisé la mise en œuvre de méthodes alternatives de règlement des différends . Qu’il suffise de rappeler ici le succès phénoménal de l’Uniform Domain Name Dispute Resolution Po- licy (UDRP) qui a été créé en 1999 pour gérer les litiges entre les titu- laires de marques (connues) et les titulaires de noms de domaine . En outre, les risques d’atomisation des procédures judiciaires portant sur la validité des droits de propriété industrielle enregistrés dans différents États – ces procédures devant en principe être conduites dans chacun des États dans lesquels les droits ont été enregistrés 15 –, rendent éga- lement attractif le recours à l’arbitrage dès lors que ce dernier permet précisément de purger le litige devant une seule autorité 16 .

15 Comme l’exige l’art . 22, point 4, du règlement 44/2001/CE du Conseil du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des déci- sions en matière civile et commerciale (J.O., 2001, L 12, p . 1) . On note que la règle sera maintenue (même si déplacée à l’art . 24, ch . 4) dans le nouveau règlement (refondu) 1215/2012 du Parlement et du Conseil du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commer- ciale (J.O., 2012, L-351, p . 1) qui sera applicable à partir du 10 janvier 2015 (art . 81) ; la jurisprudence récente de la C .J .U .E . tend toutefois à réduire la portée de l’art . 22, point 4, dès lors qu’elle expose que la compétence exclusive fondée sur cette disposition ne fait pas obstacle à la compétence extra-territoriale des tribunaux saisis dans le cadre de me- sures provisoires (art . 31 du règlement) : arrêt de la C .J .U .E . du 12 juillet 2012, Solvay SA c . Honeywell Fluorine Products Europe BV et al . (aff . C-616/2010) . On notera toutefois que le dogme de la compétence exclusive en matière de litiges de propriété intellectuelle est remis en question dans la doctrine récente, voy . Ubertazzi .

16 Tout comme le fait une clause de prorogation de for ; voy . par ex . l’arrêt rendu dans l’affaire Fairchild Semiconductors Corp. v. Third Dimension Semiconductor (United States District of Maine, 12 décembre 2008) ; voy . aussi les réflexions de Justice Laddie dans l’affaire Celltech R & D Ltd v Medimmune Inc [2004] EWHC 1522 (Pat) (confirmé en appel par Celltech R & D Ltd v. Medimmune Inc. [2004] EWCA Civ 1331) : « § 24 To have all issues of infringement determined by one court gives rise to a greater chance of consistency . It will in many cases reduce the amount of litigation involved and it will mean that only one court, and perhaps in some cases only one judge, need be educated so as to understand the patented technology involved . § 25 [ . . .] Although it is not stric- tly necessary to do so, one can see that it makes good commercial sense for the parties to have agreed that rather than have the issue of infringement determined in up to 24 different countries where MedImmune may sell its products, all the issues of infringe- ment should be determined in one court which could effectively become a specialist in determining that issue ») .

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Afin de se concentrer sur les volets essentiels de la thématique 17, la présente contribution analysera les questions de l’arbitrabilité objective des litiges de propriété intellectuelle (section 1), de la portée de la com- pétence du tribunal arbitral en matière de litiges de propriété intellec- tuelle (section 2), du droit applicable (section 3), des mesures provision- nelles (section 4) et des sanctions non-patrimoniales (section 5) .

Section 1. Arbitrabilité

L’arbitrabilité objective, soit la question de savoir si des causes sont

« susceptibles d’être tranchées par la voie de l’arbitrage, c’est-à-dire l’ar- bitrabilité ratione materiae » 18, constitue une question essentielle en matière de propriété intellectuelle qui doit être examinée à la lumière des droits pertinents (Cook et Garcia, 2010 ; Hanotiau, 2010 ; Perret, 2004 : 229, C .C .I ., 1998 : 38) 19 . En fonction des règles applicables, la question pourra être examinée à la lumière de la loi d’arbitrage de l’État du siège (de l’arbitrage) . Tel est le cas lorsque la norme constitue une règle matérielle, comme c’est par exemple le cas en droit suisse de l’arbi- trage international (Poudret et Besson, 2002 : 301) 20 .

Sans pouvoir traiter dans le détail de cette question complexe et dont la réponse varie en fonction des juridictions 21, l’on peut constater

17 Pour une discussion plus approfondie, voy . les ouvrages de Cook et Garcia ; Halket ainsi que l’article de Rohn et Groz, op. cit., spéc . p . 656.

18 Arrêt du Tribunal fédéral suisse du 17 avril 2013, 4A_515/2012, considérant 4.1 .

19 Cette question fait l’objet de très nombreuses réflexions doctrinales qui ne peuvent être toutes citées ici, voy . par . ex . Cook et Garcia, op. cit., spéc . pp . 49 et s ; Hanotiau, op. cit., spéc . p . 155 ; Perret ; C .C .I .

20 L’art . 177, al . 1, de la loi fédérale suisse sur le droit international privé prévoit que

« Toute cause de nature patrimoniale peut faire l’objet d’un arbitrage », le critère du caractère patrimonial constituant une norme matérielle qui ne suppose pas de renvoi à un droit étranger . Voy . ATF 118 II 353 c . 3a . Voy . Poudret et Besson . Le droit étran- ger pourrait toutefois exceptionnellement devoir être pris en compte par un tribunal arbitral siégeant en Suisse si ce dernier impose que certains litiges soient soumis aux tribunaux étatiques et que cette soumission soit considérée comme d’ordre public en Suisse (sous l’angle de l’art . 190, al . 2, let . e LDIP en vertu duquel une sentence arbitrale est attaquable – devant le Tribunal fédéral suisse – si elle est « incompatible avec l’ordre public »), voy . l’arrêt du Tribunal fédéral suisse du 18 mars 2013, 4A_388/2012 .

21 Certains États admettent très largement l’arbitrabilité des litiges de propriété intellec- tuelle, comme les États-Unis (ceci résultant directement de la loi en matière de brevets d’invention pour ce qui concerne les litiges relatifs à la violation et la validité de brevets en vertu de 35 U .S .C . § 294) et la Suisse où ceci a été confirmé dans une prise de position

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que l’arbitrabilité objective des litiges de propriété intellectuelle tend à être admise de plus en plus largement . La notion d’ordre public qui constitue souvent la limite de l’arbitrabilité d’un litige 22 ne devrait en effet pas être interprétée extensivement s’agissant de litiges de propriété intellectuelle (Kreindler et Tevini, 2012) 23, comme l’a récemment retenu la Cour suprême du Canada saisie d’un litige en matière de droit moral (droit de paternité) 24 .

Cette décision a donné l’occasion aux juges canadiens de se pronon- cer sur l’arbitrabilité objective des litiges concernant les droits moraux (en l’occurrence le droit de paternité) en application de l’article 2639 du Code civil du Québec qui prévoit expressément que les litiges portant sur l’état des personnes ou sur toutes autres questions qui intéressent l’ordre public ne sont pas arbitrables . Selon la Cour, la notion d’ordre public doit être interprétée à la lumière du but de l’arbitrage : « [l]’inter- prétation et l’application de cette notion dans le domaine de l’arbitrage conventionnel doivent alors prendre en compte la politique législative qui accepte cette forme de règlement des différends et qui entend même en favoriser le développement . Pour cette raison, afin de préserver l’au- tonomie décisionnelle de l’institution arbitrale, il importe d’éviter un emploi extensif de ce concept par les tribunaux judiciaires . Un tel re- cours étendu à l’ordre public dans le domaine de l’arbitrage mettrait en danger cette autonomie, contrairement à des orientations législatives claires et à la politique juridique qui s’en dégage » 25 .

Concernant la question de savoir si les droits moraux font partie de l’ordre public, la Cour a indiqué que, bien que ceux-ci ne soient pas aliénables, l’auteur peut renoncer à les exercer . La Cour a ensuite noté

officielle datant de 1975, R.S.P.I., 1976, p . 36 ; voy . l’analyse de droit comparé faite par Hanotiau, op. cit., pp . 162 et s .

22 Voy . art . 2060 du Code civil français .

23 Le rapport à l’assemblée nationale à l’appui des récentes modifications du droit fran- çais confirme ce risque d’« interprétations maximalistes » de l’ordre public (« [d]ans le silence des textes applicables aux autres litiges portant sur la propriété intellectuelle, la référence aux « matières qui intéressent l’ordre public » figurant à l’article 2060 du C . civ . [réf . omise], susceptible d’interprétations maximalistes, fait peser une incertitude sur la possibilité de recourir à l’arbitrage »), accessible à http://www .assemblee-nationale . fr/13/rapports/r3112 .asp#P327_57340 ; pour une discussion de l’ordre public dans le contexte des litiges de propriété intellectuelle, voy . Kreindler et Tevini, spéc . p . 437 .

24 Desputeaux c. Éditions Chouette (1987) Inc ., 2003 CSC 17, [2003] 1 RCS 178, § 54, accessible à : http://scc.lexum.org/fr/2003/2003csc17/2003csc17.html.

25 § 52 .

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que « la législation québécoise reconnaît la légitimité des transactions sur le droit d’auteur et la validité du recours à l’arbitrage pour régler les différends survenus à leur sujet . En effet, à l’article 37 de la loi sur le sta- tut professionnel des artistes, le législateur a expressément prévu que, sauf renonciation expresse, tout litige sur l’interprétation d’un contrat entre un artiste et un diffuseur doit être soumis à un arbitre » 26 . Sur cette base, puisque les « contrats signés entre les artistes et les diffuseurs contiennent systématiquement des stipulations relatives aux droits d’au- teur, [la Cour a conclu qu’il] serait paradoxal que le législateur considère les questions concernant les droits d’auteur comme soustraites à l’arbi- trage parce que d’ordre public, d’une part, et que, d’autre part, il privilégie ce mode de règlement des différends dans l’éventualité de conflits rela- tifs à l’interprétation et à l’application des contrats qui régissent l’exer- cice de ce droit entre les artistes et les diffuseurs » 27 . La Cour a ainsi jugé que les litiges impliquant des droits moraux ne dépassent pas, à raison de leur objet, la compétence des arbitres et ne sont donc pas contraires à l’ordre public . Selon la Cour, il serait contradictoire d’interpréter la notion d’ordre public de façon trop large dans le but de limiter l’arbi- trabilité des litiges . Cette approche confirme en substance la confiance qui doit être accordée aux tribunaux arbitraux . Dans ce cadre, une Cour américaine a jugé que « [t]here is no reason to think that arbitrators are more likely to err in copyright cases than state or federal judges are » 28 .

On peut ainsi considérer que les litiges en matière de propriété intel- lectuelle sont largement arbitrables 29 . On constate d’ailleurs en pratique que la question de l’arbitrabilité se pose très rarement dans les arbitrages de propriété intellectuelle 30 . La question de l’arbitrabilité ne se posera d’ailleurs pas lorsque la sentence arbitrale n’est pas destinée à déployer des effets envers les tiers (et n’a donc pas d’effet erga omnes), le pouvoir des arbitres n’étant pas problématique dans une telle hypothèse, ce qui a été récemment admis par la jurisprudence française 31 . On notera à cet égard que l’Accord européen relatif à une juridiction unifiée du brevet

26 § 59 .

27 § 59 .

28 Saturday Evening Post v. Rumbleseat Press, Inc., 816 F . 2d 1191, 1198 (7th Cir . 1987) .

29 Cook et Garcia, op. cit., spéc . p . 76 ; Hanotiau, op. cit., spéc . pp . 165 et s .

30 Rohn et Groz, op. cit., spéc . p . 653 .

31 C .A ., Paris, 1re ch ., 28 février 2008, Liv Hidravlika DOO c. SA Diebolt, Rev. arb., 1/2009, p . 168, avec note Azzi ; Caron : J.C.P. E, mai 2008, vol . 189, p . 25, 1582 .

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prévoit expressément qu’« un brevet ne peut pas être annulé ou limité dans le cadre d’une procédure de médiation ou d’arbitrage » 32 .

On relèvera en outre que les parties sont en mesure de définir et de limiter le pouvoir des arbitres dans la clause compromissoire, ce afin de réduire voire d’écarter le risque de violation de l’ordre public (notam- ment dans l’État où la sentence devra être reconnue et exécutée) (Certil- man et Lutzker, 2012) 33, par exemple en précisant que le tribunal arbitral n’a pas le pouvoir de se prononcer sur la validité ou l’invalidité d’un titre de propriété intellectuelle avec effet erga omnes 34 . De même, les par- ties concernées, par exemple une preneuse de licence dans le cadre d’un contrat de licence de brevet qui souhaiterait échapper au paiement de redevances au motif que le brevet faisant l’objet de la licence ne serait pas valable, pourra prendre la conclusion dans le cadre de la procédure arbitrale que le brevet soit déclaré nul en concluant toutefois expressé- ment que la sentence (qui par hypothèse constaterait la nullité du bre- vet et libérerait ainsi le preneur de son obligation de paiement) n’aurait qu’un effet inter partes (Calame et Aebi, 2012) 35 .

Cette approche libérale reflète le fait que les droits de propriété in- tellectuelle, et plus généralement les biens immatériels, sont devenus des actifs importants dans la vie des affaires sur lesquels les parties sont

32 Art . 35, al . 2 .

33 Voy . Certilman et Lutzker, spéc . p . 80 et p . 95 .

34 Cook et Garcia, op. cit., spéc . p . 136 ; voy . la clause compromissoire proposée en Annexe V du Rapport final de la Commission de l’arbitrage international de la C .C .I . sur les litiges en matière de propriété intellectuelle et l’arbitrage : Bulletin de la Cour inter- nationale d’arbitrage de la C .C .I ., vol . 9, n° 1, 1998, pp . 72 et s . : « In the event that deter- mination of this dispute necessitates consideration by the Tribunal of any issue relevant to the validity, enforceability or infringement of any [intellectual property right] of any party with respect to another party, the Tribunal shall have the authority to consider all such issues and to express a view with respect to all such issues . It is expressly agreed that the Tribunal shall not have authority to declare any such [intellectual property right] valid or not valid, enforceable or not enforceable or infringed or not infringed, provided, however, that the Tribunal may render an opinion to the parties as to whether in the Tribunal’s view a court or other government agency of competent jurisdiction would uphold the validity, enforceability or infringement of any such [intellectual pro- perty right] . The Tribunal shall specify [may state] the Tribunal’s reasons underlying any such opinion . However, neither the opinion nor the statement of reasons by the Tribunal shall be regarded by any party as a declaration of validity or invalidity, enforceability or unenforceability, or infringement or non-infringement of any such [intellectual property right] » .

35 Voy . Calame et Aebi, spéc . p . 530 et pp . 548 et s .

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libres de disposer et peuvent ainsi faire l’objet de transactions de sorte qu’ils sont arbitrables (Mantakou, 2009) .

§1. Portée de la compétence du tribunal arbitral en matière de litiges de propriété intellectuelle

L’arbitrage est une « créature contractuelle » (« arbitration is a crea- ture of contract » 36) . Aussi fondamental et bien connu que soit ce prin- cipe en droit de l’arbitrage, force est de constater qu’il peut parfois poser des difficultés dans le cadre d’arbitrages de propriété intellectuelle parce que ceux-ci soulèvent régulièrement des questions qui ne se limitent pas à la seule violation du contrat concerné (par exemple, contrat de licence, contrat de recherche et développement, contrat de transfert de techno- logie, ou contrat de joint-venture) . Des questions relatives à la violation des droits de propriété intellectuelle, à leur validité ou à leur titularité seront en effet susceptibles de surgir dans le cadre de tels litiges . Il en va ainsi en matière de contrats de transfert de technologie lorsqu’une partie contractante fait usage des secrets d’affaires qui lui ont été di- vulgués dans le cadre du contrat, dès lors que les prétentions résultant de la violation des secrets d’affaires ne découlent pas nécessairement de la violation du contrat concerné, mais peuvent être qualifiées d’ex- tra-contractuelles (et ainsi résulter de la violation du droit de la concur- rence déloyale) 37 . Tel peut également être le cas lorsqu’un preneur de licence dépasse le cadre de l’autorisation d’usage du droit de propriété intellectuelle qui lui a été concédée (par le contrat de licence concerné), ce qui donne lieu à des prétentions de nature délictuelle et pas seule- ment contractuelle .

Ces situations créent alors le risque que ces prétentions (non-contrac- tuelles) sortent du champ de la clause compromissoire, ce qui exclu- rait alors la compétence du tribunal arbitral pour trancher celles-ci 38 .

36 Steelworkers v. American Mfg. Co., 363 U .S . 564, 570 (1960) .

37 Voy . par ex . l’affaire américaine Tracer Research Corp. v. National Environment Ser- vices Company, 42 F .3d 1292 (9th Cir . 2004) .

38 Même si cela n’est pas nécessairement problématique selon certains droits, p . ex . en droit français (Bruguière et Gillet, op. cit., n° 17), tel n’est pas nécessairement le cas dans d’autres juridictions/sous d’autres droits applicables ; la jurisprudence anglaise a également adopté une approche assez libérale, voy . l’arrêt de la House of Lords, Pre- mium Nafta v. Fili Shipping Company Ltd, [2007] UKHL 40 (dans lequel Lord Hoff- mann expose (§ 13: « [i]n my opinion the construction of an arbitration clause should

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L’importance pratique de ce risque est significative dès lors que, si le tribunal arbitral devait admettre à tort sa compétence, la sentence qu’il rendrait risquera de ne pas être exécutée, en vertu des règles de la Convention de New York 39 . Il est ainsi indispensable que la clause com- promissoire couvre tout l’« univers des litiges » (« universe of disputes » (Friedland, 2000 : 47)) potentiels entre les parties . La pratique enseigne cependant que de nombreuses clauses compromissoires sont patholo- giques en ce qu’elles sont formulées de manière trop étroite pour s’ap- pliquer aux litiges relatifs à la propriété intellectuelle (soit aux moyens relatifs à la violation 40 ou à la validité/nullité des droits de propriété in- tellectuelle en question), et ne couvrent ainsi que les litiges contractuels (Peukert, 2005) 41 .

Sur le plan du principe, il serait utile que toutes les prétentions non-contractuelles qui ont un lien avec le contrat puissent être sou- mises à la compétence du tribunal arbitral (cette question restant sujette aux principes d’interprétation applicables dans le cas d’espèce) 42 . Ceci

start from the assumption that the parties, as rational businessmen, are likely to have intended any dispute arising out of the relationship into which they have entered or purported to enter to be decided by the same tribunal . The clause should be construed in accordance with this presumption unless the language makes it clear that certain questions were intended to be excluded from the arbitrator’s jurisdiction ») .

39 Art . 5, al . 1, c) .

40 Voy, à titre d’exemple, l’interprétation de la portée de la clause compromissoire faite dans Rhône-Poulenc Spécialités Chimiques v. SCM Corporation, 769 F2d 1569 (Fed . Cir . 1985) dont le contenu était : « 8 .3 Any controversy or claim arising out of or relating to this Agreement or the breach thereof, shall, unless amicably adjusted otherwise, be settled by arbitration in Florida in accordance with the rules of the International Cham- ber of Commerce [ . . .] » qui a été interprétée largement par la Cour (« [a]lthough the dispute involves claim interpretation, it arises out of the agreement . The agreement li- censed SCM to use the chemical process of claim 2 and sell the product in exchange for royalty payments, which depended completely upon whether SCM was operating within or outside the scope of claim 2 . We hold that the determination of the scope and infringement of the ‘485 patent are the quintessence of the agreement and that the par- ties intended such central determinations to be included within the scope of its broad arbitration clause . The district court’s holding to the contrary is clear error ») ; voy . aussi Federal-Mogul Corp. and Felt Products MFG. Co. v. Elrigklinger AG, Civ . No . 01-5797 (HAA), 1er novembre 2004 (Dist . New Jersey) .

41 La question se pose en termes similaires en matière de rédaction de clauses de proro- gation de for, voy . Peukert, spéc . p . 51 .

42 C’est ce qui est suggéré, pour les clauses de prorogation de for (la question s’y posant en des termes similiaires) dans les Principes CLIP (Principles on Conflict of Laws in Intellectual Property, CLIP Principles, accessibles à http://www.cl-ip.eu/en/pub/home.

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est particulièrement important dès lors que la pratique confirme qu’il peut être difficile, suivant les circonstances, de distinguer si un compor- tement donné (par exemple, le non-paiement d’une redevance par un preneur de licence) constitue une violation du contrat (de licence) et/ou une violation du droit de propriété intellectuelle sur lequel une licence d’utilisation a été concédée (Gomulkiewicz, 2013) 43 . Le tribunal arbi- tral devrait aussi avoir la compétence de se prononcer sur ces questions sans devoir se limiter aux seules prétentions relatives à la violation du contrat 44 .

Cela ne vaut bien entendu que si les parties n’ont pas contractuelle- ment désiré séparer les litiges contractuels de ceux relatifs aux droits de propriété intellectuelle litigieux, ce qui prend alors la forme de clauses hybrides (Jakhian et Henry, 2011) 45 . Par de telles clauses, les parties à un contrat relatif à la propriété intellectuelle peuvent opter pour une

« bifurcation » des compétences en décidant ainsi (par exemple) de sou- mettre à un tribunal étatique (qu’ils désignent) leurs litiges relevant des droits de propriété intellectuelle, et à un tribunal arbitral leurs litiges relevant du contrat qui les lient .

Aussi attractives que puissent paraître de telles clauses de prime abord, l’actualité judiciaire récente démontre les difficultés de leur mise en œuvre . Dans un litige opposant le géant informatique Oracle à une société suisse (Myriad Group AG) concernant un contrat de licence de logiciel, la clause de résolution des litiges prévoyait précisément une telle séparation des pouvoirs juridictionnels entre les juridictions étatiques se voyant conférer une compétence exclusive (notamment)

cfm) : art . 2:301 : « If the parties have agreed that a court or the courts of a State are to have jurisdiction to settle any disputes which have arisen or which may arise in connec- tion with a particular legal relationship, that court or those courts shall have jurisdiction to decide on all contractual and non-contractual obligations and all other claims arising from that legal relationship unless the parties express an intent to restrict the court’s jurisdiction » (italique ajouté) .

43 Voy . par ex ., MDY Industries v. Blizzard Entertainment, 629 F .3d 929 (9th Cir . 2010) ; pour une discussion, voy . Gomulkiewicz, spéc . p . 76 .

44 Sentence C .C .I . 6097, Bulletin de la Cour internationale d’arbitrage de la C .C .I ., oc- tobre 1993, p . 80 .

45 À ce sujet, voy . Jakhian et Henry, spéc . 701. De telles clauses sont généralement considérées comme valables en conformité du principe de la liberté contractuelle, voy.

p. ex. l’arrêt du Tribunal fédéral suisse du 17 avril 2013, 4A_515/2012, considérant 5.2 (confirmant qu’une clause compromissoire peut exclure certains types de litiges de son champ d’application) .

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pour les litiges relatifs aux droits de propriété intellectuelle des parties contractantes, alors que les autres litiges résultant de la concession de la licence d’utilisation sur les produits informatiques concernés devaient être soumis à un tribunal arbitral (dans le cadre d’une procédure admi- nistrée par l’American Arbitration Association (AAA), l’arbitrage étant soumis aux règles d’arbitrage de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (C .N .U .D .C .I .)) 46 . Comme cela pouvait être attendu (et craint) au vu de la formulation d’une telle clause qui ne permet pas de délimiter avec précision les compétences respectives des instances concernées, des procédures parallèles ont été initiées par les parties : une procédure judiciaire lancée par Oracle devant un tribunal étatique en Californie (le United States District Court for the Northern District of California) en violation de ses droits de propriété intellec- tuelle (soit le droit d’auteur et le droit des marques), puis une procédure arbitrale ouverte par Myriad Group AG devant l’AAA (soit l’Internatio- nal Center for Dispute Resolution (ICDR) qui constitue la division de l’AAA qui est en charge de la gestion des litiges internationaux) .

Par arrêt du 17 janvier 2012, le District court californien précité a tranché qu’il lui appartenait de décider de la portée de la clause com- promissoire 47, il a ainsi formellement interdit à Myriad Group AG de poursuivre son action devant le tribunal arbitral jusqu’à ce que la ques- tion de la portée de la clause compromissoire soit tranchée, paralysant ainsi la procédure arbitrale et rendant ainsi inefficace le mécanisme de règlement des différends élaboré par les parties dans le contrat . Cet arrêt vient d’être renversé en appel par la Cour d’appel du 9e Circuit, qui a, au contraire, décidé qu’il revenait au tribunal arbitral de se prononcer sur la portée de la clause compromissoire et de déterminer ainsi si le litige re- levait ou non de sa compétence 48, en se fondant sur la volonté des parties

46 La partie pertinente de la clause compromissoire était rédigée comme suit : « Any dis- pute arising out of or relating to this License shall be finally settled by arbitration as set out herein, except that either party may bring any action, in a court of competent jurisdiction (which jurisdiction shall be exclusive), with respect to any dispute relating to such par- ty’s Intellectual Property Rights or with respect to Your compliance with the TCK license […] » ; voy . l’arrêt rendu par le District Court le 17 janvier 2012 (accessible à : < http://docs.

justia.com/cases/federal/district-courts/california/candce/4:2010cv05604/235529/69/ >) .

47 Dans son arrêt du 17 janvier 2012 .

48 Arrêt du 26 juillet 2013 du United States Court of Appeal for the 9th Circuit, case no 11-17186 (accessible à : http://law .justia .com/cases/federal/appellate-courts/ca9/11- 17186/11-17186-2013-07-26 .html) .

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résultant de leur choix des règles d’arbitrage de la Commission des Na- tions Unies pour le droit commercial international (C .N .U .D .C .I .) .

Au-delà des spécificités et des finesses du droit américain que cette affaire laisse percevoir, la leçon qu’il faut en tirer est assurément celle de la prudence face à l’usage de clauses hybrides, étant relevé que la question dépendra ultimement de l’interprétation de la clause compro- missoire qui devra être opérée à la lumière du droit applicable à celle-ci par les autorités qui ont compétence pour ce faire 49 . Recommandation est ainsi faite de formuler largement les clauses d’arbitrage 50 . En effet, les parties « doivent garder à l’esprit que, malgré une rédaction attentive de la clause, la question de savoir si tel ou tel litige doit ou non être sou- mis à arbitrage peut donner lieu à des débats préliminaires . Une même demande peut soulever des questions qui entrent dans le champ de la convention d’arbitrage et d’autres qui en sont exclues . […] un litige por- tant sur la titularité ou la validité d’un droit de propriété intellectuelle né d’un contrat de licence peut aussi porter sur des questions de défaut de paiement, d’inexécution contractuelle ou autre, ce qui peut donner lieu à d’inextricables problèmes de compétence dans des cas où certains litiges ont été exclus de l’arbitrage » 51 .

L’affaire Oracle v. Myriad démontre d’ailleurs qu’on ne pourra pas se fier aveuglément au fait qu’une juridiction donnée est favorable à l’arbi- trage des litiges de propriété intellectuelle pour en conclure trop hâtive- ment que les tribunaux de cet État reconnaîtront largement la compé- tence des tribunaux arbitraux pour trancher tout litige . En effet, même si le droit américain est très libéral en ce qu’il autorise largement l’arbitrage des litiges de propriété intellectuelle 52 et offre plus fondamentalement

49 L’art . 1465 du C .P .C . prévoit que le tribunal arbitral est seul compétent pour statuer sur les contestations relatives à son pouvoir juridictionnel .

50 Voy . les lignes directrices de l’IBA pour la rédaction de clauses d’arbitrage internatio- nal (accessibles à : http://www.ibanet.org/Publications/publications_IBA_guides_and_

free_materials.aspx#drafting ) : « Ligne Directrice 3 : Sauf circonstances particulières, les parties ne doivent pas tenter de limiter le champ des litiges soumis à l’arbitrage, mais doivent le définir largement » (ce document relevant toutefois la situation particulière des litiges de propriété intellectuelle) ; pour un exemple jurisprudentiel récent des dif- ficultés posées par une clause compromissoire trop étroitement rédigée, voy . l’arrêt de la High Court (Commercial Court) Lombard North Central plc and another v. GATX Corporation [2012] EWHC 1067 (Comm) .

51 Lignes directrices de l’IBA (commentaire 16 concernant la Ligne Directrice 3) .

52 35 U .S .C . § 294 (en matière de brevets d’invention) ; Hanotiau, op. cit., spéc . pp . 168 et s .

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un environnement réglementaire propice à l’arbitrage, il n’en reste pas moins que les tribunaux américains peuvent conserver une compétence pour se prononcer sur la portée d’une clause compromissoire, comme en témoigne cette affaire (même si la compétence du tribunal arbitral a finalement été reconnue par la Cour d’appel) .

La délicate délimitation des pouvoirs respectifs des tribunaux arbi- traux et étatiques ne survient pas seulement en présence de clauses hy- brides, dès lors qu’elle est susceptible de se poser pour toute procédure arbitrale (Fernández Rozas, 2001 : 9) . L’actualité récente fournit d’autres exemples de ces difficultés 53, qui ne relèvent d’ailleurs pas seulement du droit de la propriété intellectuelle 54 . Force est de mentionner ici le litige très médiatisé (aussi parce qu’il concerne les énergies vertes) opposant le groupe américain AMSC à la société chinoise Sinovel Wind Power (qui en était sa cliente principale) dans lequel AMSC reproche des violations de droit de la propriété intellectuelle et des manquements contractuels à son ancien partenaire chinois dans un contexte d’espionnage industriel, dans lequel l’interprétation de la portée des clauses compromissoires figurant dans les contrats conclus entre ces sociétés appartient désor- mais à la Cour suprême chinoise (Hook, 2012 ; Johnson, 2012) 55 . Cette dernière va être amenée à déterminer si les procédures judiciaires inten- tées par AMSC devant différents tribunaux chinois fondées sur la vio- lation du droit d’auteur tombent dans le champ de ces clauses . AMSC fait valoir dans ce cadre que les litiges de propriété intellectuelle ne sont pas couverts par ces clauses, contrairement à Sinovel Wind Power qui a soulevé l’exception d’incompétence des tribunaux chinois en se préva- lant des clauses compromissoires contenues dans les contrats conclus avec AMSC 56 . Cette affaire démontre elle aussi avec force la nécessité de prêter une attention accrue à la formulation de la portée des clauses

53 Voy . l’arrêt indien rendu par la High Court of Delhi le 7 janvier 2009, Ministry of Sound International Ltd v. M/S Indus Renaissance Partners Entertainment Pvt Ltd. (litige relatif à un contrat de licence) accessible à : http://www .indiankanoon .org/doc/1992362/ .

54 Voy . l’arrêt Lombard North Central plc and another v. GATX Corporation (précité) .

55 L’affaire a été plaidée devant la Cour suprême (fin octobre 2012) .

56 Communiqué de presse de AMSC du 10 avril 2012 (accessible à : http://ir.amsc.com/

releasedetail.cfm?ReleaseID=662919) : « Pursuant to AMSC’s contracts with Sinovel, AMSC has turned to the Beijing Arbitration Commission to resolve its contractual dis- putes . However, AMSC’s Hainan case is purely a copyright infringement dispute rather than a contractual matter . As such, it is independent of the contracts and belongs within the civil court system » .

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compromissoires dans des contrats qui ont une composante de proprié- té intellectuelle .

Il pourra ainsi être avisé de se référer aux clauses compromis- soires standards qui sont mises à disposition par des organismes re- connus de  résolution des litiges (comme le Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI) et prévoient expressément que les prétentions extra-contractuelles des parties sont couvertes par la clause compro- missoire proposée 57 .

§2. Droit applicable

Un avantage de l’arbitrage réside dans le choix large laissé aux parties de déterminer le droit qui sera applicable au litige 58 . L’intérêt de n’appliquer qu’un seul droit pour résoudre un litige international peut être illustré en prenant l’exemple d’accords globaux de coexis- tence de marques, qui prévoient que les marques des parties au contrat coexistent et qui précisent l’étendue matérielle et géographique (poten- tiellement mondiale) de l’utilisation desdites marques . Certains de ces accords concèdent ainsi à une partie contractante le droit de déposer une marque et de l’utiliser sous réserve que cette marque ne crée pas un risque de confusion avec la marque prioritaire de l’autre partie 59 . Dans un tel cas, et à défaut d’une élection de droit, la question du risque de confusion, qui est une question classique de droit des marques, sera soumise au droit de chaque État dans lequel la violation supposée de la marque prioritaire aurait lieu (menant ainsi à une multiplication des

57 Voy . la clause compromissoire recommandée par le Centre d’arbitrage et de média- tion de l’O .M .P .I . (accessible à : http://www.wipo.int/amc/fr/clauses/#4) : « Tout litige, controverse ou réclamation découlant du présent contrat et de toute modification ul- térieure du présent contrat, ou s’y rapportant, et ayant trait notamment mais non ex- clusivement à sa formation, sa validité, ses effets obligatoires, son interprétation, son exécution, sa violation ou sa résolution, de même que toute réclamation extra-contrac- tuelle, sera soumis, pour règlement définitif, à arbitrage conformément au Règlement d’arbitrage de l’OMPI . [ . . .] » (italique ajouté) .

58 Voy . par ex . art . 1511 du C .P .C . ; art . 187, al . 1, de la loi suisse sur le droit international privé du 18 décembre 1987 .

59 La durée des accords de coexistence qui sont destinés à régler de manière définitive les relations entre les parties provoque fréquemment des litiges en raison de l’évolution des usages des marques par les parties au fil du temps, voy . par exemple l’affaire embléma- tique jugée par la High Court of England and Wales, Apple Corps. Limited v. Apple Com- puter, Inc. [2006] EWHC 996 (Ch) ; voy . aussi la décision de la Court of Appeal of England and Wales dans l’aff . Omega SA v. Omega Engineering Inc. [2011] EWCA Civ . 645 .

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droits applicables) . Cela impliquerait que, même si un accord internatio- nal de coexistence de marque était régi par un droit choisi par les parties (par exemple, le droit suisse), l’existence d’un risque de confusion pour- rait, en fonction de l’interprétation de la clause contractuelle pertinente, quand même être régie par plusieurs droits, soit celui de chaque État où la violation de la marque est réputée avoir eu lieu . Dans le cadre d’un arbitrage international, les parties devraient être en mesure de décider que toutes les questions (contractuelles et non contractuelles) soient ré- gies par un seul droit . Elles pourraient ainsi valablement choisir un droit neutre (par exemple le droit suisse, soit la loi suisse sur la protection des marques et des indications de provenance) pour juger du risque de confusion dans l’arbitrage, évitant ainsi les coûts et autres inconvénients qui résulteraient de l’application de toutes les lois des États pertinents 60 et aboutirait probablement à des résultats contradictoires, en dépit de l’harmonisation du droit international de la propriété intellectuelle (par- ticulièrement grâce à l’accord sur les ADPIC) .

L’élection de droit peut également couvrir les questions portant sur la validité des droits de propriété intellectuelle . En tous les cas lorsque la sentence du tribunal arbitral n’a qu’un effet inter partes, les parties de- vraient en effet pouvoir valablement décider que la question de la vali- dité d’un droit de propriété industrielle, tel qu’un brevet d’invention (qui serait délivré dans de nombreux pays), soit réglée en application d’une seule loi des brevets et non en application de toutes les lois nationales des brevets potentiellement divergentes 61 . Cette question laisse par conséquent une place importante à la créativité des rédacteurs et né- gociateurs du contrat ou, à défaut de clause contractuelle, aux conseils et aux parties dans le cadre de la procédure arbitrale . À cet égard, il faut être conscient qu’une clause d’élection de droit portant sur la seule détermination du droit applicable au contrat et ne couvrant ainsi pas les questions non-contractuelles ne sera pas suffisante 62, la portée de

60 Pour d’autres exemples, voy . Cook et Garcia, op. cit., spéc . p . 87 .

61 Voy . Cook et Garcia, op. cit., spéc . p . 93 sq . ; Rohn et Groz, spéc . op. cit., p . 655 .

62 Par exemple, la clause compromissoire standard proposée par la London Court of International Arbitration (LCIA) qui prévoit « […] The governing law of the contract shall be the substantive law of […] », accessible à : http://www .lcia .org/Dispute_Resolu- tion_Services/LCIA_Recommended_Clauses .aspx .

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la clause d’élection de droit devant être formulée plus largement 63 . On peut ainsi souhaiter que la portée de la clause d’élection de droit reflète celle de la clause compromissoire 64 : les parties peuvent avoir intérêt à faire en sorte que toutes les prétentions qui entrent dans le champ de la clause compromissoire soient régies par le droit qu’elles ont choisi .

Il est important de souligner que cette flexibilité dans la détermina- tion du droit applicable en arbitrage n’existe généralement pas lorsque le litige est porté devant les tribunaux ordinaires . C’est notamment le cas au sein de l’Union européenne où l’article 8 du règlement 864/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 sur la loi ap- plicable aux obligations non contractuelles (Rome II) prévoit que « [l]

a loi applicable à une obligation non contractuelle résultant d’une at- teinte à un droit de propriété intellectuelle est celle du pays pour lequel la protection est revendiquée » (art . 8, § 1), cette règle étant impérative (art . 8, § 3) 65 . Il apparaît ainsi que la liberté de choisir le droit appli- cable peut constituer un avantage de l’arbitrage dès lors qu’elle permet d’éviter l’approche fragmentée qui résulterait de l’application parallèle de plusieurs droits nationaux de la propriété intellectuelle dans un li- tige ayant des ramifications multiterritoriales . Cette liberté requiert que les parties et leurs conseils soient conscients de cette problématique et l’analysent en fonction des intérêts qui sont en jeu et des spécificités de l’opération contractuelle visée . On relèvera dans ce contexte que les par- ties pourraient souhaiter ne pas choisir d’appliquer un droit unique mais de conserver plutôt l’application parallèle de différents droits nationaux dans la procédure arbitrale ce afin d’éviter, dans un souci de répartition des risques, que le sort entier du litige dépende de l’application d’un seul droit national, en dépit des frais générés par une telle application paral- lèle de droits nationaux .

63 La clause compromissoire standard du Centre d’arbitrage et de médiation de l’O .M .P .I . prévoit à cet égard : « Il sera statué sur le litige, la controverse ou la réclamation confor- mément au droit […] » .

64 Voy . Cook et Garcia, op. cit., spéc . p . 130 .

65 On doit considérer à cet égard qu’un tribunal arbitral siégeant dans l’Union euro- péenne ne sera pas tenu d’appliquer l’art . 8 (Cook/Garcia, op. cit., p . 94), même si l’application des règlements Rome I et Rome II par des tribunaux arbitraux est débat- tue en doctrine : B . Yüksel, « The Relevance of the Rome I Regulation to International Commercial Arbitration in The European Union », Journal of Private International Law, vol . 7, n° 1, avril 2011, p . 149 ; Rohn et Groz, op. cit., spéc . p . 655 qui laissent la question ouverte .

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Section 2. Mesures provisionelles et sanctions non- patrimoniales

§1. Mesures provisionnelles

Vu la nécessité de pouvoir réagir très rapidement en cas de violation de droits de propriété intellectuelle, la possibilité d’obtenir des mesures provisionnelles joue un rôle fondamental dans les litiges de propriété intellectuelle 66, tout particulièrement dans les situations où il existe un risque d’atteinte à la réputation de la partie lésée (qui provoque un risque de dommage irréparable) 67 . Dans de telles circonstances, il est critique de s’assurer que des mesures provisionnelles puissent être ob- tenues auprès des tribunaux étatiques qui pourront souvent offrir un soutien précieux à la partie lésée 68 . Dans ce contexte, il faut noter que dans le cadre de litiges relatifs à des contrats de licence, la partie lésée susceptible d’obtenir des mesures provisionnelles n’est pas seulement le donneur de licence 69, mais aussi le preneur de licence 70 .

La soumission d’un litige à l’arbitrage n’empêche en tout état pas l’une des parties de requérir des mesures provisionnelles auprès d’un tribunal étatique, notamment celui de l’endroit où le dommage a eu lieu ou risqué de se produire 71 . Il ressort toutefois de la jurisprudence

66 Cook et Garcia, op. cit., spéc . p . 221 ; Rohn et Groz, op. cit., spéc . p . 656 .

67 Pour un exemple, voy . l’arrêt du Tribunal fédéral suisse (ATF 136 III 200) rendu sur recours contre une ordonnance rendue par un arbitre dans le cadre d’un arbitrage O .M .P .I . ayant ordonné le transfert d’un stock de produits du preneur de licence au donneur de li- cence en raison de la liquidation à vil prix de ce stock par le preneur qui portait atteinte à la marque et à la réputation du donneur de licence ; pour un commentaire, voy . J . de Werra,

« Liquidation d’un contrat de licence de marque et mesures provisionnelles : quelques ob- servations à la lumière de l’ATF 136 III 200 », sic! 2010, p . 662 (accessible à : https://www . sic-online .ch/fileadmin/user_upload/Sic-Online/2010/documents/662 .pdf) .

68 Aussi parce qu’une ordonnance de mesures provisionnelles qui serait rendue par un tribunal arbitral ne sera pas obligatoirement exécutoire, dès lors que le tribunal arbitral n’a pas de pouvoir de contrainte/de coercition, au contraire d’un juge étatique, cf . Rohn et Groz, op. cit., p . 658 .

69 Voy . Performance Unlimited, Inc. v. Questar Publishers, Inc ., 52 F .3d 1373 (6th Cir . 1995) .

70 Voy . Fairchild Semiconductors Corp. v. Third Dimension Semiconductor (D . Maine, 12 décembre 2008) .

71 Ceci est clarifié dans les règles d’arbitrage de l’O .M .P .I . (http://www .wipo .int/amc/

en/arbitration/rules/) comme suit (art . 46 d) : « A request addressed by a party to a judi- cial authority for interim measures or for security for the claim or counter-claim, or for the implementation of any such measures or orders granted by the Tribunal, shall not

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que certains tribunaux étatiques adoptent une approche restrictive de la question 72, ce qui n’a pas lieu d’être puisqu’en principe la requête de mesures provisionnelles auprès des tribunaux ordinaires n’est pas in- compatible avec la soumission du litige à l’arbitrage 73 .

Une requête de mesures provisionnelles auprès du tribunal arbi- tral peut néanmoins être délicate au début de la procédure d’arbitrage, notamment durant la période qui précède la constitution du tribunal arbitral 74 . Les règles d’arbitrage peuvent prévoir des solutions visant à obtenir une (ré)action rapide du tribunal arbitral (p . ex . en prévoyant la nomination d’un arbitre d’urgence (« emergency arbitrator »)) 75 . Ce besoin d’action rapide en matière de litiges internationaux de propriété intellectuelle devrait également être pris en considération lorsque les parties envisagent de soumettre à l’arbitrage les litiges résultant d’un contrat portant sur un droit de propriété intellectuelle et, dans cette hy- pothèse, doivent faire le choix des règles d’arbitrage applicables 76 .

be deemed incompatible with the Arbitration Agreement, or deemed to be a waiver of that Agreement » .

72 Voy . Simula Inc. v. Autoliv Inc ., (175 F .3d 716, 9th Cir . 1999) : « Because the district court correctly concluded that all of Simula’s claims were arbitrable and the ICC arbitral tribunal is authorized to grant the equivalent of an injunction pendente lite, it would have been inappropriate for the district court to grant preliminary injunctive relief . The- refore, we affirm the district court’s denial of preliminary injunctive relief » ; voy . cepen- dant In re Faiveley Transport Malmo AB, 522 F . Supp . 2d 639 (S .D .N .Y . 2007) (décidant que la clause compromissoire : « [a]ny dispute arising out of or in connection with this agreement shall be finally settled by arbitration without recourse to the courts » n’em- pêchait pas de requérir des mesures provisionnelles auprès des tribunaux new-yorkais) .

73 Sauer-Getriebe KG v. White Hydraulics, Inc ., 715 F .2d 348 (7th Cir . 1983) .

74 Certaines réglementations prévoient que si le tribunal arbitral n’est pas constitué, les tribunaux étatiques ont le pouvoir de rendre des mesures provisoires (cf . p . ex . art . 1449, al . 1, du Code de procédure civile français : « L’existence d’une convention d’arbitrage ne fait pas obstacle, tant que le tribunal arbitral n’est pas constitué, à ce qu’une partie sai- sisse une juridiction de l’État aux fins d’obtenir une mesure d’instruction ou une mesure provisoire ou conservatoire ») .

75 Voy . l’art . 29 du règlement d’arbitrage C .C .I . (adopté au 1er janvier 2012) . Sur la ques- tion, Rohn et Groz, op. cit., spéc . p . 657 .

76 Voy . le Panorama I .C .C . de la propriété intellectuelle (11e édition, 2012), op. cit., spéc . pp . 63 et s ., qui expose que les « les parties devraient envisager de choisir des règles d’ar- bitrage permettant au tribunal arbitral d’accorder des mesures provisoires, mais aussi des mesures d’urgence avant même la constitution du tribunal (voy . par exemple les règles d’ICC de 2012 relatives aux tribunaux d’urgence) » .

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§2. Sanctions non-patrimoniales (non-monetary remedies) Les jugements des tribunaux étatiques et les sentences arbitrales rendues en matière de litiges de propriété intellectuelle ne se limitent souvent pas à la simple condamnation en paiement de dommages-in- térêts, en réparation du préjudice patrimonial qui a été subi suite à la violation du droit de propriété intellectuelle litigieux . En effet, les litiges de propriété intellectuelle comportent fréquemment d’autres sanctions d’ordre non-patrimonial (non-monetary remedies) (Schneider et Knoll, 2011 : 179) 77, et ce pas uniquement sous la forme de mesures provision- nelles (comme discuté ci-dessus), mais également dans les décisions rendues sur le fond du litige . Ce type de sanctions peut par exemple consister en une injonction interdisant à une partie d’utiliser un secret d’affaires 78 . À ce titre, on peut constater que certains tribunaux arbitraux bénéficient d’une certaine flexibilité qui leur permet de rendre une sen- tence adaptée aux circonstances du litige en cause (ce qui n’implique pas qu’ils jouissent d’un pouvoir de statuer ex aequo et bono ou en « amiable compositeur », ce qu’ils peuvent faire uniquement lorsque cela est ex- pressément prévu) 79 . Afin d’éviter les incertitudes, la compétence de rendre de telles sentences devrait idéalement faire l’objet d’une men- tion expresse dans la clause compromissoire (Ramos Munoz, 2011) 80 . La pratique donne certains exemples dans lesquels des tribunaux arbitraux

77 Voy . particulièrement le chapitre 12, spéc . p . 179 (présentant des affaires soumises au centre d’arbitrage et de médiation de l’O .M .P .I .) .

78 Voy . le communiqué de presse de la société Faiveley du 15 juillet 2010 « Faiveley Transport headquarters announced the confirmation and enforcement in US of the arbitration award in favour of its subsidiary Faiveley Transport Malmö AB against Wabtec Corporation (U .S .A .) », accessible à : http://www .faiveleytransport .com/news/

faiveley-transport-headquarters-announced-confirmation-and-enforcement-us-arbi- tration-award-fav (« By the ICC Award, Wabtec is permanently enjoined from any use of Faiveley’s manufacturing drawings and related documentation, with the exception of the limited use for the supply of products under contracts of Wabtec entered into before the termination of the license agreement . The Order entered by the U .S . District Court confirms the ICC Award ») ; ce litige a donné lieu à plusieurs décisions rendues par des tribunaux américains, voy . notamment Faiveley Transport Malmö AB v. Wabtec Corp., 559 F .3d 110 (2d 2009) .

79 Voy, par ex ., l’art . 21, al . 3, du règlement d’arbitrage C .C .I .

80 Pour un contre-exemple, voy . Decca Music Group Limited v. Michael Jagger, Keith Ri- chards, Charles Watts, High Court Chancery Division, Case No HC 04 C00863, June 11, 2004, dans lequel le pouvoir du tribunal arbitral avait été contractuellement limité ; pour une analyse de cette affaire, voy . Ramos Munoz, spéc . p . 101 .

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