HAL Id: jpa-00208109
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Submitted on 1 Jan 1973
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Étude de la structure du sélénium liquide par diffraction de neutrons
G. Tourand
To cite this version:
G. Tourand. Étude de la structure du sélénium liquide par diffraction de neutrons. Journal de
Physique, 1973, 34 (10), pp.937-942. �10.1051/jphys:019730034010093700�. �jpa-00208109�
ÉTUDE DE LA STRUCTURE DU SÉLÉNIUM LIQUIDE
PAR DIFFRACTION DE NEUTRONS
G.TOURAND
Service de
Physique
du Solide et de RésonanceMagnétique,
Centre d’Etudes Nucléaires deSaclay,
BP n°
2,
91190Gif-sur-Yvette,
France(Reçu
le 25 avril1973,
révisé le14 juin 1973)
Résumé. 2014 Le facteur de structure du sélénium
liquide
a été déterminé par diffraction de neu- trons à troistempératures
différentes(258, 358, 460 °C).
On a obtenu par transformation de Fourier la fonction de distribution depaire g(r)
et calculé le nombre de coordinance pour chacune de cestempératures. L’interprétation
de cesexpériences
met en évidence unepremière phase
caractérisée par la
compétition
entre deux structures «antagonistes » (chaînes
~anneaux)
etune seconde
phase (haute température) plus
semblable à celle du cristaltrigonal.
Abstract. 2014 The structure factor of
liquid
selenium has been determined at three different temperatures(258,
358,460 °C) by
neutron diffraction.Using
the Fourier transformtechnique,
the
pair
distribution functiong(r)
and the coordination number at each temperature are deter- mined. The results show the existence of twophases.
The first one(at
lowtemperatures)
is charac-terized
by
thecompetition
between twoantagonistic
structures(chains
~rings),
whereas thehigh
temperaturephase
exhibits as structure more similar to that of atrigonal crystal.
Classification
Physics Abstracts
7.126
1. Introduction. - Le sélénium existe à l’état solide sous de nombreuses formes
allotropiques
etparmi
celles-ci les formesamorphes
ont faitl’objet
de travaux considérables.
Néanmoins,
la structurede ces dernières est assez mal
comprise
parcequ’elle dépend
des conditions depréparation (trempe,
éva-poration, dépôt chimique) qui
sont difficiles à repro- duire d’une manière fidèle. D’un autre côté laphase liquide
de Se est unephase
désordonnéeparfaitement
bien définie du
point
de vuethermodynamique,
et onpeut
étudier son désordre structural en fonction d’unparamètre
facilement mesurable(la température).
Dans le travail
présenté ici,
nous avons mesuré le facteur de structureS(k)
du séléniumliquide
à258,
358 et 460OC ;
nous en avons déduit par trans-formation de
Fourier,
la fonction de corrélation depaire g(r),
et les nombres de coordinance corres-pondant
auxpremiers,
seconds voisins... Nos résul-tats
peuvent
se résumer de la manière suivante :- d’un
point
de vuepurement
local : les liaisons covalentes sont très peu affectées par le désordrethermique ;
- les liaisons de Van der Waals entre unités cova-
lentes
(chaînes
ouanneaux)
sontaffaiblies,
mais subsistent engrande partie ;
elles assurent la corré-lation de ces unités structurales covalentes
(et
la cohésion duliquide) ;
- le désordre structural à courte distance est dominé par la
compétition
entre chaînes et anneaux.2. Facteur de structure et fonction de corrélation.
- Dans un
précédent
article[1] auquel
nous emprun-tons les notations utilisées
ici,
nous avons montrécomment était défini le facteur de structure
S(k)
d’un
liquide
etquelles
étaient sespropriétés.
Nous
rappellerons simplement
la relationclassique
de transformée de Fourier soit :
où po est la densité moyenne du
liquide
à la tem-pérature T,
p, est la densitéatomique
à la distance r d’un atome de référence. Dans cetteexpression
k = 4
n/ À. sin 0, 0
étantl’angle
deBragg
et lalongueur
d’onde durayonnement
utilisé.La
description complète
de la structure d’unfluide à n
particules
nécessite enprincipe
la connais-sance des distributions
spatiales
des nparticules
les unes par
rapport
aux autres. La corrélationstatistique
entre lespositions
des nparticules
estreprésentée
par une fonction de distribution :Cette fonction donne la densité de
probabilité
pour que laparticule
1 soit en r 1 et laparticule n
en rn.Si l’on considère un
liquide simple (argon,
métauxliquides
usuels[2])
les forces entre atomes sont à peuprès
centrales etdépendent
peu desangles respectifs
des liaisons.
L’énergie potentielle
den’importe quel
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/jphys:019730034010093700
938
groupe d’atomes peut être
décomposée
en une sommed’interactions entre
paires
d’atomes. De la même manière moyennant certainesapproximations
lescorrélations entre
plusieurs
atomespeuvent
êtredécomposées
etexprimées
en fonction de cor- rélation depaire g(r 1, r2)
que l’on sait mesurerexpérimentalement.
Pour les
liquides
localementanisotropes, liquides
à liaisons covalentes ou
hydrogénées,
lespotentiels
d’interaction à 3
particules dépendent
essentiellement desangles
de liaisons. Ladécomposition
desénergies potentielles
enpotentiels
depaire
n’estplus possible.
On
peut
néanmoins construire un modèle de la struc- ture locale duliquide
en utilisant à la fois la distri- bution depaire g(r)
et d’autres informations concer- nant la nature des liaisons oul’arrangement
desatomes dans le
liquide.
Parexemple
dansSe,
desexpériences
de dissolution sélectivepermettent
deséparer
chaînes et anneaux queg(r)
seul nepermet
dedistinguer
que très difficilement.3.
Dispositif expérimental.
- Nous avons utiliséle
dispositif classique
d’un desspectromètres
duréacteur EL 3 à
Saclay
dont le faisceau de neutronsmonochromatique
a unelongueur
d’onde  =1,132 Â.
La
partie chauffage
HFprécédemment
décrite[3]
ne convenait
qu’imparfaitement
au nouveau domaine detempérature qu’il
était nécessaired’explorer (de
latempérature
ambiante à1 000 °C).
D’autrepart,
cette installation nepeut
être utilisée dans lecas des isolants comme le sélénium. Nous avons ainsi réalisé un four à effet
joule
en vanadiumcapable
de
répondre
auxexigences
de la diffraction des neu-trons par des
liquides
isolants. L’utilisation d’un telmatériau,
absorbant peu les neutrons et dont la section efficace de diffusion cohérente estpratique-
ment
nulle,
diminue considérablement lacomplexité
des corrections. Au niveau du
porte-échantillon
cescorrections sont faites par différence entre creuset
plein
et creuset vide(aux températures respectives)
en tenant
compte
des facteursd’absorption.
Les échantillons de sélénium de
pureté 99,999 5 %
utilisés pour ces
expériences
sont de formecylindrique
et de dimensions : diamètre 10 mm, hauteur 45 mm.
Chaque
échantillondégazé
sous un videdynamique
de
10-’ mm.Hg jusqu’à
unetempérature proche
de la
fusion,
est ensuite scellé sous vide dans uncreuset en silice.
La
température
est mesurée pour toutes cesexpé-
riences par
thermocouple
chromel-alumel dont on a vérifiél’étalonnage.
Larégulation
PID utiliséeest désormais
classique
dans cetype
demontage.
Cependant
nous avons pu vérifier que lesgradients
de
température
radiaux sontnégligeables
et que lesgradients longitudinaux,
dans les cas lesplus défavorables,
sont inférieurs ouégaux
à0,5°C.
Enfin le fait de travailler en tube scellé nous a
permis
de réaliser ces
expériences
à volume constant.4. Résultats obtenus. - Pour trois valeurs de la
température : 258,
358 et 460OC,
nous avons déterminé lespectre
de diffusion du séléniumdepuis
20 = 10 05’jusqu’à
20 = 116° soitpour k
variant de0,10 Â-1
à
9,4 A-1.
Cette dernière valeur dekmax
est sufh-samment élevée pour
fournir,
comme nous l’avons montrée dans uneprécédente
étude[1],
une courbeg(r)
correcte au moins pour des valeurs de r > 2Á.
A toutes ces
températures
les mesures ont été faitesavec un pas de 15’ d’arc soit
quatre comptages
pardegré (et
une durée descomptages
suffisante pour obtenir une bonneprécision statistique).
L’utilisation del’appareillage
mentionnéplus
haut nous apermis
par ailleurs d’améliorer sensiblement la
précision
des mesures sur
S(k).
Nous avons déterminé ainsi la fonction
S(k) puis
à
partir
de celle-ci la fonction de distribution depaire g(r).
Lafigure
1 montre les variations du facteur de structureS(k)
à 258 °C. Pour unliquide
normal[4]
FIG. 1. - Facteur de structure S(k) du sélénium liquide à
258 °C. Pour un liquide normal [4], S(k) présente un pic très marqué à k = 2 7r/di où dl est le rayon de la première sphère de coordination. Le fait que S(k) ne se comporte pas ainsi dans le sélénium prouve que le potentiel d’interaction est
« anormal ». Ceci s’explique par la présence de liaisons cova-
lentes.
S(k) présente
unpic
trèsmarqué
à k = 2n/dl,
oùdl
est le rayon de lapremière sphère
de coordination.Le fait que
S(k)
ne secomporte
pas ainsi dans le séléniumliquide
prouve que lepotentiel
d’interactionest « anormal ». Ceci
s’explique
par laprésence
deliaisons covalentes. La
figure
2représente
la fonctiong(r)
à cette mêmetempérature.
Il nous fautsignaler
que
l’analyse
de Fourier nous conduit encore à des valeursnégatives
deg(r)
pour r 2À (effet
decoupure),
mais pour ces faibles distances les atomesne
peuvent
évidemment pass’interpénétrer.
Le pre- mier maximum de densitéatomique
est ensuitemieux défini et se situe à r, =
2,35 Á.
Le secondextrémum à
3,83 Á
estséparé
dupremier
par un« trou » relativement
important
que nous retrouvonsd’ailleurs à
plus
hautetempérature.
Nous avons
représenté figures
3 et 4 les fonctionsg(r) respectivement
à 358 et 460 °C. Le tableau 1TABLEAU 1
Valeurs
numériques
de lafonction g(r)
FIG. 2. - Fonction de distribution de paire g(r) pour le sélé-
nium liquide à 258 °C. La position du premier pic est identique
à celle des liaisons covalentes dans le solide. Le second pic contient à la fois des haisons covalentes et des liaisons de Van
der Waals.
FIG. 3. - Variation de la fonction g(r) à 358 °C.
FIG. 4.
2014 Variation
de la fonction g(r) à 460 °C.regroupe pour chacune des
températures
les valeursnumériques
de la fonctiong(r).
Les valeurs desdeux
premiers
nombres de coordinance sont données dans le tableau II.Pour toutes ces
expériences
le nombre de coordinance est déterminé parl’expression :
où r min a été défini comme nous l’avons montré dans l’étude sur le tellure
liquide [1].
TABLEAU Il Nombre de coordinance
5.
Interprétation.
- 5. 1 CONFIGURATION DES LIAI- SONS DANS LE SÉLÉNIUM. - Laconfiguration
électro-nique
d’un atome isolé de Se est 4S2
4p4.
Dansl’état
condensé,
la nature des liaisons est déterminée par ledegré d’hybridation
des orbitales s et p. Pour Sel’hybridation
est assezforte,
parce que les niveauxs et p sont relativement
proches.
Enconséquence chaque
atome forme 2 orbitaleshybrides
liantesavec un électron sur
chacune,
les 4 électrons restantsoccupant
des orbitales non liantes. La combinaison des orbitales liantes des atomes de séléniumproduit
un
système
linéaire deliaisons ; chaque
atome étantlié par une liaison covalente à chacun de ses 2 voisins
(Fig. 5).
Les orbitales non liantesparticipent
à desliaisons
faibles,
dutype
Van der Waals.Au 1 er ordre
(plus proches voisins),
cesystème
de liaisons est défini par 2paramètres :
lalongueur
d’uneliaison covalente
(d, = 2,37 Â),
etl’angle
de 2 liai-sons consécutives
(a
=103,1°).
Pourchanger
d’unemanière
appréciable
lalongueur
d’une liaison oul’angle
de 2 liaisonsconsécutives,
il fautdépenser
une
énergie comparable
àl’énergie
deliaison, qui
estEcor =
44kcal/mole [5].
Cetteénergie
estbeaucoup plus
élevée que lesénergies thermiques
usuelles. Pourcette raison l’élément structural de
base,
c’est-à-dire940
FIG. 5. - Liaisons successives en position « trans » dans
l’état condensé - chaînes du sélénium trigonal.
FIG. 6. - La nature des liaisons covalentes détermine les
caractéristiques du triangle formé par deux liaisons successives.
La structure à courte distance dépend aussi des orientations
respectives de 3 liaisons consécutives, par exemple de l’angle diédral fl entre a et c. Pour une chaîne hélicoïdale tous les
angles 6 sont égaux et voisins de a (liaisons en position « trans »)
car la chaîne se répète tous les 3 atomes. Pour un anneau Seg les angles p sont alternés.
le
triangle
formé par 2 liaisons consécutives(Fig. 6)
est très stable
thermiquement ;
en fait on le retrouveà
quelques
variantesprès
dans toutes les formes de sélénium : cristallin[6], amorphe [7]
etliquide [8].
Ainsi la nature des liaisons covalentes entre 2 atomes successifs dans Se
compte
tenu del’angle diédral fl impose
une structure linéaire. Si on veut décrire cettestructure avec
plus
deprécision (types
dechaînes, présence
ou nond’anneaux)
on doit faire intervenirles interactions entre atomes liés
plus
indirectement :- Dans une chaîne les
positions respectives
d’atomes 1 ers et 2es voisins ne
dépendent
que de lalongueur
des chaînes et del’angle
des liaisons cova-lentes. Mais
les positions respectives
d’atomes 3es voisinsdépendent
aussi de la valeur del’angle
dié-dral
fi,
c’est-à-dire des orientationsrespectives
de3 liaisons successives
(Fig. 5).
Les barrières depotentiel qui
fixent laposition d’équilibre
de cetangle
sontde l’ordre de 2 à 3
kcal/mole [5].
- Entre chaînes dans le
cristal,
pour un atomedonné,
les seconds voisinsqui
sont situés sur deschaînes distinctes
(atomes
nonhomologues
de l’atomede référence
(Fig. 5))
sont au nombre de 4 à unedistance
d2 = 3,44 Á.
Les liaisonscorrespondantes
sont du
type
Van der Waals. Leurénergie
est nette-ment
plus
faible que celle des liaisons covalentes(environ
3 foisplus faibles,
si on se base sur lesfréquences
de vibrations[9]),
c’est-à-dire de l’ordre de 15kcal/mole.
- En
principe,
lepotentiel
associé auxangles
tend à favoriser la
configuration
« cis » pour lesliaisons, plutôt
que laconfiguration
« trans », c’est-à-dire des anneauxplutôt
que des chaînes(Fig.
5 et7). Cependant
dans lecristal, l’empilement
des chaînes est
plus
favorable que celui des anneaux, dupoint
de vue des attractions de Van der Waals.FIG. 7. - Liaisons successives en position « cis » dans l’état condensé - anneau du sélénium monoclinique.
La
compétition
entre ces deux effets estresponsable
de l’existence de
plusieurs
formes cristallines de sélé- nium :monoclinique
= anneaux,trigonal
= chaînes.Il se trouve que la forme
trigonale (chaînes)
al’énergie
la
plus
basse maisl’enthalpie
de la transformationmonoclinique --> trigonal
estfaible,
de l’ordre de0,5 kcal/mole [10].
Il est tentant despéculer
de lamême manière sur la structure du sélénium
liquide
et
d’imaginer
que son évolution entempérature
estdominée par la
compétition
entre cespotentiels
et le désordre
thermique.
Mais les informationsprécises
sur la structure de Seliquide (ou amorphe)
sont encore rares. En dissolvant sélectivement dans
CS,
les anneauxSe8 qui
sontprésents
dansl’amorphe (obtenu
partrempe
duliquide), Briegleb [11]-[12]
obtient les concentrations suivantes :
Ces concentrations sont évidemment très
approxi-
matives et il n’est pas évident que la fraction soluble contienne exclusivement des anneaux
Se8 ;
deplus
elles
supposent
unetrempe
trèsrapide
parrapport
àl’échange
réversible anneaux = chaînes. Elles donnent néanmoins un ordre degrandeur
utile et onpeut
remarquer d’autrepart
que ces mesures suivent à peuprès
une loi enC/(1 - C)
expU/kB
T avecU
0,13
eV 3kcal/mole,
valeurqui
est trèsproche
de la chaleur de transformationtrigonal
H
monoclinique.
On
peut
mettre en évidenceséparément,
dans unamorphe
obtenu partrempe,
lesfréquences
de vibra-tion des chaînes et des anneaux
[13],
on obtient ainsiune concentration de 30 à 50
%
pour les anneaux.Ce résultat a été
précisé
par desexpériences
d’ad-dition d’éléments
iso-électroniques
comme S etTe, qui
forment des anneaux mixtes depréférence
à deschaînes mixtes
[14].
Les mesures de viscosité et l’étude
cinétique
decristallisation sont aussi en accord avec une
descrip-
tion du Se
liquide
où les concentrations d’anneaux et de chaînes sont du même ordre degrandeur [15].
Les déterminations directes de la structure par diffraction de rayons X ou de neutrons
[7], [16]
(et également
les travaux de J. Moscinski et al.[17]
dont nous venons d’avoir
connaissance)
donnentdes informations intéressantes mais
qu’il
estparfois
nécessaire
d’analyser
avec soin. Eneffet,
elles donnentune information radiale
qu’il
est très difficile d’inter-préter
au-delà de la 1 resphère
de coordination d’un atome(parce qu’il
y atrop
d’atomes différents dont les distances sontvoisines).
En
résumé,
si on rassemble toutes les données surle sélénium
amorphe,
lacompétition
entre chaîneset anneaux,
qui
dans le cristal favorise les chaînes parrapport
aux anneaux, semblejouer
en sens inversedans le
liquide :
les anneaux sontplus
stables à bassetempérature,
et les chaînes à hautetempérature.
Ceci
implique
que dans leliquide
les chaînes ont à la fois uneénergie plus
élevée que celle des anneaux(par exemple
par affaiblissement des liaisons de Van der Waals et par désorientation desangles diédraux).
Ainsi lathermodynamique
del’équilibre
anneaux chaînes
suggère
que les chaînes du sélé- niumliquide
sont trèsdésorganisées.
Nous allons maintenant discuter la manière dont nos résultatsprécisent
ou infirment cettedescription.
5.2 INTERPRÉTATION DES MESURES DE
g(r).
-On
peut séparer grossièrement
l’information contenue dansg(r)
en troisparties :
lepremier pic (liaisons
covalentes
seules),
le 2epic (deux
liaisons covalenteset
approximativement
4 liaisons dutype
Van derWaals),
et enfin les atomes situés sur des chaînes voisines au-delà de lapremière sphère
de coordination.a)
lerpic :
la stabilité de laposition
et de l’aire dupremier pic indiquent
que les 2 liaisons covalentes formées parchaque
atome sont très peu affectéespar le désordre
thermique.
Notons que le nombre de coordinance obtenud’après
l’aire dupic (n1 - 2,1)
est très
proche
de la valeurthéorique (ni
1 =2).
Cecisuggère
que lespics
deg(r)
ne sontpratiquement
pas
élargis
par notretechnique
de mesure(transformation
deFourier).
b)
2epic :
dans le solide(cristal trigonal)
les seconds voisins au nombre de 4 sont situés sur des chaînes distinctes à la distanced2
=3,44 A (Fig. 5),
ils sontliés à l’atome de référence par des liaisons de Van der Waals. Viennent ensuite 2 atomes à la distance
d3 = 3,69 A (seconds
voisins covalents dans la mêmechaîne).
L’ensemble de ces atomes à des dis- tances relativement semblablesexplique
laprésence
d’un
pic
à3,55 À
dans la fonction de distribution radiale obtenue parplusieurs
auteurs[7]-[16].
Dansle
liquide,
cepic
se trouve au-delà de3,69 A
etcontient
approximativement
le même nombre de voisins(n2 = 6).
Comme les liaisons covalentesdemeurent
inchangées,
il faut admettre que les liai-sons de Van der Waals sont considérablement allon-
gées (typiquement
à 258 °C de3,44 A
à3,83 A
sion tient
compte
del’asymétrie
dupic).
Cet allon-gement peut s’expliquer
de deux manières. Pour lesanneaux, on sait que les liaisons de Van der Waals
sont
faibles,
et il n’est passurprenant qu’elles
soientnettement
plus longues
que les liaisons entre chaînes du cristaltrigonal.
Eneffet, déjà
àtempérature
ambiantedans le cas des anneaux
(cristal monoclinique)
lesseconds
voisins,
suivant l’atome choisi pourorigine,
se situent à une distance
d2 comprise
entre3,48
et3,70 A (distances intermoléculaires),
alors que lestroisièmes voisins se situent à une distance
d3 = 3,72 A [6] (distance intramoléculaire).
Pour leschaînes,
il faut admettrequ’elles
sont très désor- données les unes parrapport
aux autres(si
elles étaientordonnées,
les distances entre chaînes seraientcomparables
à celles du cristaltrigonal).
Une
explication
de cephénomène
estsuggérée
par le
déplacement
de laposition
dupic : quand
on
augmente
latempérature,
lepic
serapproche
desa
position
dans le cristaltrigonal.
En mêmetemps,
si onaccepte
le modèle del’équilibre
anneaux chaînes décrit
plus
haut(5.1)
la concen-tration en anneaux est diminuée d’un facteur 2
(en passant
de 260 à460 °C) [11]-[12].
Cecisuggère
que les anneaux sont en
partie responsables
de l’al-longement
des distances entre chaînes. Parexemple
à 260 °C la concentration en anneaux est de l’ordre de 35
% ;
il est clairqu’il
est très dificile pour leschaînes de
s’empiler
correctement car les anneauxdésorganisent complètement
leurarrangement.
A 460 °C la concentration en anneaux est de l’ordre de 20% [11 ],
il est alorsplus
facile pour despetits
groupes de chaînes de
s’arranger
localement sans êtretrop perturbées
par les anneaux.c)
Les autrespics
deg(r) apparaissent
seulementà haute
température.
Apriori
il semble très surpre- nant que despics apparaissent
etgrandissent
dans942
g(r) quand
latempérature croît ;
pour unliquide
normal on s’attend
plutôt
à uneaugmentation géné-
rale du désordre se traduisant par une diminution de la hauteur des
pics
deg(r) [4].
Là encorel’expli-
cation la
plus
vraisemblable est basée sur laprésence
de 2 structures dans le sélénium
liquide.
A bassetempérature
les anneauxdésorganisent complètement
le réseau des
chaînes ;
il est alors difficile d’observerun ordre à courte distance
(les
atomes situés surune même chaîne ou un même anneau contribuent peu, au-delà de la lre
sphère
de coordination àg(r),
car ils sont
trop
peunombreux) (Fig.
5 et7).
A
plus
hautetempérature,
la concentrationdécroît,
il est alors
plus
facile pour les chaînes des’organiser
et certaines distances
peuvent
êtreobservées,
parexemple
lepic
à4,51 A
estproche
de la distanceentre chaînes dans le cristal
trigonal (Fig. 5).
D’autrepart,
il est clairqu’à
cette dernièretempérature
nousassistions au dédoublement
(distances d2 et d3)
dusecond
pic
deg(r)
ce quepréfigure
lepetit pic
à3,04 A.
6. Conclusion. - Les mesures de
g(r) prises
iso-lément
prouvent
que lesystème
de liaisons cova- lentes du sélénium solide reste intact dans leliquide,
mais elles ne
permettent
pas de décidercomplètement quelle
est la structure à courte distance duliquide.
Cependant
si onprend
encompte
les données connuessur
l’équilibre
anneaux #chaînes,
onpeut
se basersur
g(r)
pour étudier la manière dont cetéquilibre
affecte la structure à courte distance du
liquide.
En
particulier
onpeut expliquer
le faitsurprenant
que la structure du
liquide
semble mieux définieet
plus
semblable à celle du cristaltrigonal
à hautetempérature qu’à
bassetempérature.
Eneffet,
laprésence
à bassetempérature
de 2 structures « anta-gonistes » (chaînes
etanneaux) désorganise
trèssubstantiellement l’ordre à courte distance du
liquide.
Remerciements. - L’auteur remercie vivement le Pr. Friedel
qui
a suivi de trèsprès
ce travail et leDr Cabane pour un fructueux
échange
de corres-pondance quant
àl’interprétation
de cesexpériences.
Bibliographie
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