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Submitted on 20 Dec 2021
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Diagnostic étiologique de l’hypertension pulmonaire : une cause de diagnostic difficile
P. Rigaud, J. Traclet, V. Cottin
To cite this version:
P. Rigaud, J. Traclet, V. Cottin. Diagnostic étiologique de l’hypertension pulmonaire : une cause de diagnostic difficile. Revue des Maladies Respiratoires, Elsevier Masson, 2019, 36, pp.350 - 354.
�10.1016/j.rmr.2018.11.004�. �hal-03486085�
Rmr180073 Fascicule vert Cas cliniques
Diagnostic étiologique de l’hypertension pulmonaire : une cause de diagnostic difficile.
Etiological diagnosis of pulmonary hypertension: a cause of diagnostic difficulty.
P Rigaud 1, J Traclet 1, V Cottin 1,2
1Centre national de référence des maladies pulmonaires rares, centre de compétence de l’hypertension pulmonaire, Service de pneumologie de Louis Pradel, groupement hospitalier est, hospices civils de Lyon,
2Université Claude Bernard Lyon 1
Titre court :
Hypertension pulmonaire et schistosomiase
Auteur-correspondant : Pr Vincent COTTIN (PU-PH)
Service de pneumologie de Louis Pradel, groupement hospitalier est, hospices civils de Lyon 59 Boulevard PINEL
69677 Bron cedex
Tel Secrétariat : 04 27 85 77 00 Fax : 04 72 35 76 53
Email : vincent.cottin@chu-lyon.fr
Reçu le : 05.04.18 Accepté le : 10.09.18
Déclaration de liens d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts
Version of Record: https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0761842518309999 Manuscript_2523aeb09c111e95d629bed4dfd524f0
Résumé :
Introduction : L’hypertension artérielle pulmonaire associée à une schistosomiase fait partie du groupe 1 de la classification de l’hypertension pulmonaire et doit être évoquée chez tout patient ayant une hypertension pulmonaire et revenant d’une zone endémique.
Observation : Un patient âgé de 17 ans est hospitalisé pour la découverte d’une hypertension pulmonaire lors d’un bilan initial d’une cirrhose virale par hépatite B avec hypertension portale. Le bilan initial a retenu comme diagnostic celui d’une hypertension porto-pulmonaire secondaire à la cirrhose virale B. L’état du patient s’est aggravé sur le plan hépatique et hémodynamique, et il a bénéficié d’un traitement par epoprostenol intraveineux permettant secondairement la réalisation d’une transplantation hépatique. Au décours, l’epoprostenol a pu être arrêté. L’examen histologique de l’explant hépatique a mis en évidence de façon inattendue une schistosomiase floride en plus de l’atteinte virale B.
Conclusion : Le diagnostic d’une hypertension artérielle pulmonaire associée à une schistosomiase peut être difficile. Il est nécessaire de répéter les examens sérologiques, et parfois de recourir à la biopsie rectale. Le traitement de l’hypertension artérielle pulmonaire associée à une schistosomiase repose sur le traitement spécifique et un traitement anti- parasitaire.
Mots clés :Hypertension pulmonaire, Hypertension artérielle pulmonaire, Schistosomiase, Hypertension portale, Transplantation hépatique
Diagnostic étiologique de l’hypertension pulmonaire : une cause de diagnostic difficile
Etiological diagnosis of pulmonary hypertension: a cause of diagnostic difficulty.
Summary
Introduction: Schistosomiasis associated pulmonary arterial hypertension belongs to group 1 of the pulmonary hypertension classification and should be considered in any patient with pulmonary hypertension returning from an endemic area.
Case report: A 17-year-old patient was hospitalized for pulmonary hypertension detected during the initial assessment of viral hepatitis B-related cirrhosis with portal hypertension.
The initial assessment established the diagnosis of pulmonary hypertension secondary to viral hepatitis B-cirrhosis. The patient’s hepatic and haemodynamic condition deteriorated, and he was treated with intravenous epoprostenol. This allowed subsequent performance of a liver transplantation. Epoprostenol could then be discontinued. Unexpectedly, histology of the liver explant revealed florid schistosomiasis in addition to hepatitis B viral cirrhosis.
Conclusion: The diagnosis of pulmonary arterial hypertension associated with schistosomiasis may be difficult. It is necessary to repeat the serological studies and, sometimes, to obtain a rectal biopsy. The treatment of pulmonary arterial hypertension associated with schistosomiasis is based on specific therapies and anti-parasitic treatment.
Key words: pulmonary hypertension, schistosomiasis, portal hypertension, pulmonary arterial hypertension, liver transplantation.
INTRODUCTION :
L’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) associée à une schistosomiase fait partie du groupe 1 de la classification de l’hypertension pulmonaire (HTP)[1]. Elle doit être évoquée de façon systématique lors de la découverte d’une HTP chez un patient revenant d’un séjour en zone endémique. Ce cas clinique retrace l’évolution d’une HTAP associée à une schistosomiase, dont le diagnostic a été difficile malgré la suspicion initiale.
OBSERVATION :
Un patient âgé de 17 ans a été hospitalisé pour une suspicion d’HTP découverte suite à la mise en évidence d’une cirrhose virale B avec hypertension portale. Il n’avait pas d’antécédent notable ni de traitement au long cours. Il était originaire du Mali et vivait en France depuis 1 an.
Le bilan initial a mis en évidence une hypertension porto-pulmonaire avec un cathétérisme cardiaque mesurant les pressions artérielles pulmonaires systolique, moyenne et diastolique à 72, 29 et 42mmHg, la pression artérielle pulmonaire occluse à 9mmHg, les résistances artérielles pulmonaires étaient calculées à 7,7 UW, l’index cardiaque était de 2,7 L/mn/m².
Les sérologies hépatite C et VIH étaient négatives. La scintigraphie de ventilation et perfusion a écarté une cause thromboembolique. L’examen parasitologique des urines et la sérologie de la schistosomiase étaient négatifs. La prise en charge initiale a consisté en un traitement combiné séquentiel par tadalafil puis ambrisentan permettant une amélioration clinique et hémodynamique la première année. L’évolution a ensuite été défavorable sur le plan hépatique malgré un traitement anti-viral par entecavir et a nécessité une inscription sur liste de transplantation hépatique en raison d’hématémèses non contrôlées par ligature de varices œsophagiennes. A ce stade, la situation hémodynamique du patient était insuffisamment contrôlée pour la réalisation d’une transplantation hépatique, et un traitement par époprostenol
par voie intra-veineuse a donc été introduit. Cette prise en charge a permis d’obtenir des critères hémodynamiques rendant possible la transplantation hépatique, qui s’est alors déroulée sans complication, et au décours de laquelle le traitement par époprostenol a été arrêté (Tableau 1). Cependant, l’examen de l’explant hépatique a mis en évidence, en dehors des lésions de cirrhose secondaire à une hépatite B (Figure 1A), une schistosomiase floride à Schistosoma mansoni avec portite à éosinophiles, non fibreuse (Figure 1B). Un traitement anti-parasitaire par praziquantel a été débuté.
DISCUSSION :
L’HTAP associée à une schistosomiase est rare dans les pays occidentaux, mais elle représente la troisième cause d’HTAP dans les zones endémiques, après les HTAP idiopathiques et les HTAP associées à une connectivite [2]. La schistosomiase est une atteinte parasitaire secondaire à Schistosoma dont les trois espèces dominantes sont S. mansoni, S.
japonicum et S. haematobium. L’HTAP associée à une schistosomiase apparaît dans les suites
d’une schistosomiase hépato-splénique en général secondaire à S. mansoni. Les œufs, très immunogènes, entraînent un fibrose péri-portale responsable d’une hypertension portale [3].
La physiopathologie de cette HTAP pourrait s’expliquer par analogie avec l’hypertension porto-pulmonaire. Il existe d’ailleurs des caractéristiques hémodynamiques communes, avec notamment l’absence de réversibilité au NO [4]. D’autres hypothèses ont été proposées [3] : les shunts porto-systémiques permettraient la migration des œufs au sein de la vascularisation pulmonaire où se développeraient des granulomes intravasculaires responsables d’une élévation des résistances pulmonaires [5]. Le gène BMPR 2, impliqué dans 80% des formes familiales d’HTAP et 25% des formes sporadiques, favoriserait le remodelage vasculaire hépatique et ainsi la migration des œufs au niveau pulmonaire dans des modèles animaux [6].
Par ailleurs, il a été montré une élévation de médiateurs inflammatoires comparable à celle de
l’HTAP idiopathique (interleukine(IL)-1, IL-4, IL-13, interféron γ, transforming growth factor β) évoquant un mécanisme inflammatoire systémique [3]. Enfin la prévalence d’une
schistosomiase parmi les patients ayant une HTP thrombo-embolique chronique n’est pas plus importante que dans la population générale dans les pays endémiques, ce qui est en défaveur d’un mécanisme embolique [7].
Sans traitement, le pronostic de l’HTAP associée à une schistosomiase est proche de celui de l’HTAP idiopathique traitée, avec une survie de 82% à 3 ans [4].Le traitement se calque sur celui de l’HTAP idiopathique bien qu’il ne repose que sur des études rétrospectives de faible effectif [8, 9, 10], et sur le traitement anti parasitaire dont l’efficacité n’a été démontré que dans des modèles animaux [11].
Le diagnostic doit être évoqué chez tout patient présentant une HTAP et étant en provenance ou ayant séjourné en zone endémique de schistosomiase (Afrique sub-saharienne, Amérique du sud notamment).
Dans ce cas, le diagnostic a été évoqué mais n’a pas été confirmé lors du bilan initial. D’une part, il est difficile d’obtenir une preuve parasitologique de la schistosomiase, en raison de l’excrétion inconstante des œufs dans les selles et les urines, et de la sensibilité imparfaite des examens sérologiques. Il est ainsi préconisé de combiner plusieurs tests sérologiques pour améliorer leur sensibilité [12], et de proposer une biopsie rectale en cas de forte suspicion diagnostique. D’autre part, la présence d’une hépatite virale B permettait d’expliquer le tableau initial et n’incitait pas à une recherche exhaustive de schistosomiase. Il existe cependant une forte prévalence des co-infections schistosomiase-virus de l’hépatite B (VHB) dans les zones endémiques [13]. Enfin cette observation montre la possibilité d’une évolution favorable après transplantation hépatique d’une hypertension pulmonaire associée à une schistosomiase, comme cela a pu être constaté dans l’hypertension porto-pulmonaire [14].
Conclusion : Une schistosomiase doit être systématiquement recherchée en présence d’une hypertension pulmonaire chez un patient revenant d’une zone d’endémie. Il faut prendre en compte lors du bilan initial de l’HTP la forte prévalence des co-infections schistosomiase- VHB et de la difficulté diagnostique d’une schistosomiase chronique.
Remerciements : Les auteurs remercient le Dr. Lara Chalabreysse et le Dr. Brigitte Bancel pour leur expertise anatomopathologique (centre de pathologie Est, Hospices Civils de Lyon).
Références
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14 Savale L, Sattler C, Coilly A, Conti F, Renard S, Francoz C, et al. Long-term outcome in liver transplantation candidates with portopulmonary hypertension. Hepatology 2017;65:1683–92.
Légende des figures Figure 1A (x10) :
Cirrhose constituée associée à un nodule d’hyperplasie nodulaire focale (→)
Figure 1B (x100) :
Granulome épithélioïde et giganto-cellulaire autour d’un œuf de Schistosoma mansoni
Tableau 1. Evolution clinique et hémodynamique sous traitement
NYHA : Dyspnée, TM6 : Test de marche 6 minutes en mètres parcourus, PAP S/d/Moy : Pressions artérielles pulmonaires systolique/diastolique/moyenne en mmHg. PAPO : Pression artérielle pulmonaire occluse en mmHg; RAP : Résistances artérielles pulmonaires en unités Wood ; IC : index cardiaque en L/min/m². HTAP : hypertension artérielle pulmonaire.
Traitement NYHA TM6
(m)
POD (mmHg)
PAP (S/d/Moy)
(mmHg)
PAPO (mmHg)
RAP (UW)
IC (L/min/m²)
10/2014 Aucun (bilan initial) II 600 5 72/29/42 9 7,7 2,7
06/2015 Tadalafil 40mg
Ambrisentan 5mg II 600 8 56/19/31 10 4,2 3,4
02/2016
Tadalafil 40mg
Ambrisentan 5mg II 640 7 64/27/40 11 4,9 3,6
Inscription sur liste de transplantation hépatique avec une contre-indication temporaire secondaire à l’HTAP et introduction de l’époprosténol
07/2016
Tadalafil 40mg Ambrisentan 5mg
Epoprostenol 20ng/kg/min
II 680 6 58/23/36 9 3,9 4,2
Levée de la contre-indication temporaire secondaire à l’HTAP
09/2016 Transplantation hépatique
03/2017 Tadalafil 40mg
Ambrisentan 5mg I 600 7 56/13/27 10 3,5 3