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Nécropole à incinérations du bronze récent à Alle-Les Aiges (Jura, Suisse)

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Texte intégral

(1)

CAJ 29

ISBN 978-2-88436-031-9 ISSN 1422-5190

2012

CAJ 29

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Blaise Othenin - Girard

Mustapha Elyaqtine

Iann Gaume

Cahiers d’archéologie jurassienne

Avec des contributions de :

Denis Aubry

Patricia Chiquet

Jean-Pierre Hurni

Marlies Klee

NÉCROPOLE À INCINÉRATIONS

(2)
(3)

Nécropole à incinérations du Bronze récent

à Alle - Les Aiges (Jura, Suisse)

Office de la culture

Société jurassienne d’Emulation

Porrentruy 2012

Blaise Othenin-Girard

Mustapha Elyaqtine

Iann Gaume

Avec des contributions de :

Denis

Aubry

Patricia

Chiquet

Jean-Pierre

Hurni

Marlies

Klee

(4)

La Collection est née de la collaboration de la

Section d’archéologie et paléontologie de l’Office de la culture et du Cercle d’archéologie de la Société jurassienne d’Emulation.

Recherches et rédaction : Edition et diffusion :

Office de la culture Cercle d’archéologie de la

Section d’archéologie et paléontologie Société jurassienne d’Emulation

Hôtel des Halles Rue du Gravier 8

Case postale 64 Case postale 149

CH-2900 Porrentruy 2 CH-2900 Porrentruy 2 Tél. 032 420 84 51 Tél. 032 466 92 57 Fax 032 420 74 99 Fax 032 466 92 04 archeologie@jura.ch sje@bluewin.ch www.jura.ch/sap www.sje.ch (commandes d’ouvrages)

Rédaction, maquette, couverture et mise en pages : Vincent Friedli, Carine Deslex,

Line Petignat Häni, Simon Maître et Marie-Claude Maître-Farine.

© 2012 Office de la culture et Société jurassienne d’Emulation, CH-2900 Porrentruy.

ISBN 978-2-88436-031-9 ISSN 1422-5190

Publié avec le concours du Département de la Formation, de la Culture et des Sports et du Département de l’Environnement et de l’Equipement de la République et Canton du Jura.

Code de citation préconisé :

Othenin-Girard Blaise, Elyaqtine Mustapha, Gaume Iann et al. Nécropole à incinérations du Bronze récent à

Alle - Les Aiges (Jura, Suisse). Office de la culture et Société jurassienne d’Emulation, Porrentruy, 2012,

192 p., 133 fig. (Cahier d’archéologie jurassienne 29).

Le contenu de ce volume a fait l’objet d’une relecture critique (peer review).

Illustrations de la couverture : le fond reproduit le plan de la nécropole à incinérations du Bronze récent et des bâti-ments gallo-romains du site d’Alle-Les Aiges. Prises de vues : tombe 265 à l’apparition et boucle en fil d’or double du dépôt 194. Au dos de l’ouvrage sont représentés une épingle en bronze et le vase ossuaire de la tombe 290.

(5)

Cette monographie, consacrée à la nécropole « Les Aiges » à Alle dans le Jura (Suisse) de l’âge du Bronze récent, était particulièrement attendue par la communauté scientifique. C’est donc une grande satisfaction de la voir paraître aujourd’hui.

La nécropole des Aiges, fouillée de 1999 à 2001 sous la direction de Blaise Othenin-Girard, a livré non seulement onze tombes à incinération, mais également deux dépôts connexes de parures en métal.

Plusieurs points intéressants de cette étude méritent d’être relevés.

La grande variabilité observée dans l’architecture et le mobilier funéraires

Au regard de l’architecture des onze sépultures (dont huit tombes simples et trois doubles), force est de constater la volonté de les distinguer les unes des autres. En effet, certaines sépultures sont en fosse, allongée, de forme rectangulaire, de la taille d’un être humain ; les ossements brûlés ont alors été déposés dans un contenant souple ou en terre libre. D’autres fosses sont circulaires, de diamètre inférieur au mètre ; elles ont livré des urnes funéraires. Le mobilier funéraire également est variable, alliant parure métallique, céramique funéraire et céramique d’accompagnement. Observé à plusieurs reprises à différents moments de la Protohistoire européenne, le bris rituel des objets lors du dépôt funéraire ne fait pas exception dans le site des Aiges comme l’expliquent Blaise Othenin-Girard et Iann Gaume. Ce geste déterminé visant à casser ou à déformer l’objet a été mis en évidence uniquement sur les artefacts métalliques et pas sur les poteries. Cette variabilité notable des structures, des objets et de leur traitement témoigne de la grande diversité de l’expression du sentiment d’appartenance à un groupe culturel singulier et de ses croyances.

Des informations anthropologiques multiples au-delà de la crémation

La couleur des restes osseux, le plus souvent blanche, indique que ceux-ci ont été exposés à une température de crémation élevée, supérieure à 700-800 °C. De plus, la fragmentation est forte. Cependant, l’étude anthropologique menée de manière minutieuse par Mustapha Elyaqtine apporte de nombreux éléments, et dans divers domaines de l’anthropologie. La population enterrée se compose d’un nombre minimum de quatorze individus, dont six enfants ; des lésions pathologiques indiquent la présence de maladies de nature dégénérative comme l’arthrose et l’ostéophytose sur quelques sujets, et la morphologie des enthèses témoigne de l’exercice régulier d’un travail pénible. L’analyse a également relevé que les individus masculins ont été enterrés avec moins de mobilier que les personnages féminins.

Des données ponctuelles non anecdotiques

Les rares ressources alimentaires également calcinées ont pu être analysées. La faune domestique a été identifiée ; il s’agit principalement de suidés et de caprinés. De même, la présence observée quasi systématique de végétaux brûlés complète la liste de ces offrandes alimentaires. Ont été reconnus l’orge vêtu, le blé, l’épeautre, les fèves, les lentilles ainsi que des plantes sauvages adventices. Patricia Chiquet et Marlies Klee estiment que si ces restes alimentaires ont été placés à dessein sur le bûcher, leur présence rare dans l’espace funéraire ne serait pas systématiquement volontaire, mais pourrait y être aléatoire.

L’étude des accumulations charbonneuses dans les tombes, tant dans celles en fosse allongée que dans celles circulaires, a permis l’identification des essences ligneuses utilisées pour la crémation. Une sélection a été faite sur des essences à bon pouvoir calorifique, telles que le sapin blanc, le hêtre, le chêne, et plus rarement l’érable.

Même discrètes et encore peu étudiées, ces données fauniques, botaniques et celles concernant le bois de feu sont des plus intéressantes. Elles permettent en effet de faire le lien avec les données domestiques souvent déconnectées du milieu funéraire. Ces analyses offrent ainsi un premier échelon aux découvertes futures.

L’association intentionnelle « dépôt - sépultures »

Si les dépôts (dont on connaît l’importance dans l’établissement des chronotypologies) et les crémations sont bien connus, les retrouver associés est particulièrement intéressant dans la description des pratiques funéraires qui s’avèrent, dès lors, plus complexes. S’il est vrai que ce rapprochement a déjà été évoqué par certains chercheurs, le site d’Alle - Les Aiges permet de confirmer l’intentionnalité de cette association.

(6)

Le présent ouvrage, le CAJ 29, s’inscrit dans une suite déjà importante de publications centrées sur la seule commune d’Alle éditées par les Cahiers d’archéologie jurassienne. Elles concernent non seulement les habitats, les nécropoles, les voies d’accès, les dépôts, mais également la reconstitution de l’environnement.

En effet, nous pouvons mentionner dans leur ordre de parution :

– le CAJ 7, préparé par Blaise Othenin-Girard, qui livre les données sur le Campaniforme (1997), – le CAJ 9, publié par Laurence-Isaline Stahl Gretsch et Jean Detrey, qui présente le Moustérien du site

de Pré Monsieur (1999),

– le CAJ 10, dont les auteurs Denis Aubry, Michel Guélat, Jean Detrey et Blaise Othenin-Girard relatent l’histoire du dernier cycle glaciaire et les occupations paléolithiques (2000),

– le CAJ 11 qui offre l’analyse d’un habitat de La Tène ancienne menée par Catherine Masserey (2008), – le CAJ 28, édité par Jean-Daniel Demarez et Blaise Othenin-Girard, qui décrit les établissements

ruraux de La Tène et de l’Epoque romaine (2010), Et 2012 offre la publication du présent CAJ 29.

Nul doute que l’archéologie cantonale du Jura s’est donné les moyens de mener à terme l’ensemble de ces monographies, monographies qui restent essentielles tant pour la sauvegarde du patrimoine que pour la recherche dans la discipline qu’est l’archéologie préhistorique.

La publication annoncée de la nécropole du Bronze final de Delémont - En La Pran dans les Cahiers d’archéologie jurassienne complètera les connaissances que nous avons sur les rituels funéraires de la fin de l’âge du Bronze dans le Jura, connaissances déjà développées notamment par le présent ouvrage particulièrement bien documenté du gisement d’Alle - Les Aiges.

Prof. Marie Besse Université de Genève

Section des sciences de la Terre et de l’environnement, Institut Forel Laboratoire d’archéologie préhistorique et anthropologie

(7)

T

abledesmaTières

Préface . . . . 3

Table des maTières . . . . 5

1 inTroducTion (Blaise Othenin-Girard et Denis Aubry) . . . . 9

1.1 Situation géographique (Blaise Othenin-Girard) . . . 9

1.2 Cadre géologique (Denis Aubry) . . . 9

1.2.1 Introduction . . . 9

1.2.2 Localisation et environnement naturel . . . 9

1.2.3 Environnement hydrologique . . . 10

1.2.4 Le climat actuel en Ajoie . . . 10

1.2.5 Le climat et la végétation au Subboréal (âge du Bronze) et au Subatlantique (âge du Fer) . . . 10

1.2.6 Les sols actuels en Ajoie . . . 11

1.2.7 Géologie locale . . . 11

1.2.8 Sédimentation et insertion des vestiges du Bronze final . . . 11

1.2.9 Erosion de la couche 3a . . . 12

1.2.10 Conclusion . . . 12

1.3 Historique des découvertes et des travaux (Blaise Othenin-Girard) . . . 12

1.4 Méthodes et objectifs . . . 14

1.4.1 Préambule . . . 14

1.4.2 Méthodes de fouille. . . 15

1.4.3 Objectifs . . . 15

1.5 Personnel et remerciements . . . 17

2 les sTrucTures (Blaise Othenin-Girard) . . . . 19

2.1 Introduction . . . 19

2.2 Stratigraphie . . . 20

2.3 Etat de conservation . . . 21

2.4 Les tombes . . . 24

2.4.1 Introduction . . . 24

2.4.2 Les tombes à incinération en fosse allongée . . . 25

2.4.2.1 Tombe 265 . . . 25 2.4.2.2 Tombe 249 . . . 28 2.4.2.3 Tombe 250 . . . 32 2.4.2.4 Tombe 198 . . . 34 2.4.2.5 Tombe 278 . . . 36 2.4.2.6 Tombe 282 . . . 39 2.4.2.7 Tombe 189 . . . 42

2.4.3 Les tombes à incinération en fosse circulaire . . . 43

2.4.3.1 Tombe 290 . . . 44

2.4.3.2 Tombe 292 . . . 47

2.4.3.3 Tombe 291 . . . 50

2.4.4 La tombe à fosse indéterminée . . . 52

2.4.4.1 Tombe 226 . . . 52

2.5 Les dépôts de parures métalliques . . . 53

2.5.1 Situation . . . 53

2.5.2 Etat de conservation et influence de l’occupation gallo-romaine . . . 53

2.5.3 Dépôt 190 . . . 53

2.5.4 Dépôt 194 . . . 54

2.5.5 Relations entre les deux dépôts . . . 55

2.5.6 Interprétation et relation avec la nécropole . . . 55

(8)

2.7.1.1 Introduction . . . 58

2.7.1.2 Etat de conservation . . . 59

2.7.1.3 Tombes en fosse allongée . . . 59

2.7.1.4 Tombes en fosse circulaire . . . 60

2.7.2 Les pratiques funéraires dans l’espace régional . . . 61

2.7.2.1 Introduction . . . 61

2.7.2.2 Pratiques funéraires au Bronze moyen . . . 61

2.7.2.3 Pratiques funéraires au Bronze récent (Bz D - Ha A1) . . . 63

3 les défunTs : éTude anThroPologique (Mustapha Elyaqtine) . . . . 79

3.1 Matériel et méthodes . . . 79

3.2 Catalogue des données anthropologiques . . . 79

3.2.1 Tombe 189 . . . 79

3.2.2 Tombe 198 . . . 80

3.2.3 Tombe 226 . . . 80

3.2.4 Tombe 249 . . . 80

3.2.4.1 Le sujet au grand format . . . 81

3.2.4.2 Le sujet au petit format . . . 81

3.2.5 Tombe 250 . . . 82

3.2.6 Tombe 265 . . . 82

3.2.6.1 Le sujet au grand format . . . 82

3.2.6.2 Le sujet au petit format . . . 82

3.2.7 Tombe 278 . . . 83

3.2.7.1 Le sujet au grand format . . . 83

3.2.7.2 Le sujet au petit format . . . 83

3.2.8 Tombe 282 . . . 83

3.2.9 Tombe 290 . . . 83

3.2.9.1 Le sujet au grand format . . . 84

3.2.9.2 Le sujet au petit format . . . 85

3.2.10 Tombe 291 . . . 86

3.2.10.1 Le sujet au grand format . . . 86

3.2.10.2 Le sujet au petit format . . . 86

3.2.11 Tombe 292 . . . 87

3.2.11.1 Le sujet au grand format . . . 87

3.2.11.2 Le sujet au petit format . . . 88

3.3 Le groupe des sujets incinérés . . . 88

3.3.1 Le degré de crémation . . . 88

3.3.2 Eléments de « démographie » . . . 88

3.3.3 Un aspect morphologique . . . 89

3.3.4 Lésions pathologiques . . . 90

3.3.5 Données pondérales . . . 90

3.3.5.1 Poids total d’os déposés dans la tombe . . . 90

3.3.5.2 Taux d’identification . . . 90

3.3.5.3 Représentation relative et répartition des régions anatomiques . . . 91

3.3.5.4 Fraction osseuse contenue dans les résidus de crémation . . . 91

3.4 Le groupe des Aiges dans son contexte anthropologique et funéraire . . . 92

4 les offrandes manufacTurées (Blaise Othenin-Girard et Iann Gaume) . . . . 95

4.1 Introduction (Blaise Othenin-Girard) . . . 95

4.2 La parure métallique et l’ambre . . . 96

4.2.1 Introduction . . . 96

4.2.2 Epingles . . . 97

4.2.2.1 Epingles à collerettes . . . 97

4.2.2.2 Epingle à tête évasée et col côtelé (forme Yonne) . . . 98

4.2.2.3 Epingles à tête évasée et col renflé-décoré . . . 99

4.2.2.4 Epingle à tête de pavot . . . 99

4.2.2.5 Epingle à tête pyramidale . . . 100

(9)

4.2.3 Bracelets . . . 101

4.2.3.1 Bracelets torsadés à extrémités lisses enroulées . . . 101

4.2.3.2 Bracelet côtelé à section en D et tampons terminaux (forme Allendorf) . . . 101

4.2.3.3 Bracelet à section en D, décoré de traits obliques parallèles (Leiterbandverzierung) . . . 102

4.2.4 Crochets de ceinture . . . 102

4.2.4.1 Crochets de ceinture de forme lancéolée . . . 102

4.2.4.2 Crochet de ceinture de forme ovale . . . 104

4.2.5 Appliques circulaires en calotte . . . 104

4.2.6 Anneaux . . . 106

4.2.7 Boucles en fil d’or double . . . 107

4.2.8 Perle tubulaire en métal cuivreux plaquée d’or . . . 107

4.2.9 Perle en ambre . . . 109

4.2.10 Objet à double spirale . . . 110

4.2.11 Rivet de poignard ou de couteau . . . 110

4.3 La céramique (Iann Gaume) . . . 111

4.3.1 La céramique de la nécropole . . . 111 4.3.1.1 Introduction . . . 111 4.3.1.2 Description et comparaisons . . . 112 4.3.1.3 Gobelets . . . 113 4.3.1.4 Ecuelles . . . 114 4.3.1.5 Pots et pichet . . . 115 4.3.1.6 Formes indéterminées . . . 116 4.3.1.7 Datation et interprétation . . . 117

4.3.2 La céramique hors nécropole . . . 118

4.3.2.1 Introduction . . . 118

4.3.2.2 Description et comparaisons . . . 118

4.3.2.3 Datation et interprétation . . . 119

4.3.3 La céramique du Bronze moyen et récent dans le Jura . . . 119

4.3.3.1 Introduction . . . 119

4.3.3.2 Cornol - Mont Terri . . . 120

4.3.3.3 Saint-Brais - Grottes I à III . . . 120

4.3.3.4 Undervelier - Baume Sainte-Colombe . . . 121

4.3.3.5 Delémont - En La Pran . . . 121 4.3.3.6 Porrentruy - La Perche . . . 121 4.3.3.7 Boncourt - Grands’Combes . . . 122 4.3.3.8 Courrendlin - En Solé . . . 125 4.3.3.9 Trouvailles isolées . . . 125 4.3.3.10 Conclusion . . . 126

4.4 Datation et appartenance culturelle (Blaise Othenin-Girard) . . . 126

4.5 Catalogue (Blaise Othenin-Girard et Iann Gaume) . . . 129

5 les resTes de faune (Patricia Chiquet) . . . . 157

5.1 Etat du corpus . . . 157

5.2 Résultats . . . 157

5.3 Discussion . . . 158

5.4 Conclusion . . . 159

6 les macroresTes végéTaux carbonisés (Marlies Klee) . . . . 161

6.1 Introduction . . . 161

6.2 Traitement des échantillons et méthodes d’évaluation . . . 161

6.3 Résultats . . . 161

6.3.1 Effectifs et état de conservation . . . 161

6.4 Discussion . . . 163

6.5 Conclusion . . . 163

7 les essences de bois (Jean-Pierre Hurni et Blaise Othenin-Girard) . . . . 165

7.1 Introduction . . . 165

(10)

7.3.2 Les charbons de la tombe 249 . . . 166

7.3.3 Les charbons de la tombe 265 . . . 166

7.3.4 Les charbons de la tombe 282 . . . 167

7.3.5 Les charbons de la tombe 290 . . . 167

7.3.6 Les charbons de la tombe 291 . . . 167

7.3.7 Les charbons de la tombe 292 . . . 167

7.4 Conclusion . . . 168

Annexe – Résultats des déterminations des essences de bois, par tombe et par échantillon . . . 169

8 synThèse (Blaise Othenin-Girard, Mustapha Elyaqtine et Iann Gaume) . . . . 171

8.1 Introduction . . . 171

8.2 Datations . . . 171

8.3 Pratiques funéraires . . . 171

8.3.1 Du Bronze moyen au Bronze final . . . 171

8.3.2 Configuration des tombes . . . 172

8.3.3 Restes humains incinérés . . . 172

8.3.4 Dotations manufacturées . . . 173

8.3.5 Offrandes alimentaires . . . 173

8.3.6 Résidus de crémation . . . 174

8.3.7 Dépôts connexes . . . 174

8.3.8 Organisation et situation de la nécropole . . . 174

8.4 Céramique au Bronze moyen et récent dans le Jura ; appartenance culturelle du mobilier . . . 174

8.5 Bilan . . . 175 résumé . . . . 177 Zusammenfassung . . . . 178 riassunTo . . . . 179 absTracT . . . . 180 bibliograPhiegénérale . . . . 181

lisTedesillusTraTions . . . . 187

crédiTiconograPhique . . . . 189

(11)

1

i

nTroducTion

(Blaise Othenin-Girard et Denis Aubry)

1.1

Situation géographique

(Blaise Othenin-Girard)

Le site archéologique des Aiges est localisé au sud du village d’Alle, dans le canton suisse du Jura (fig. 1). A 3,5 km vers l’ouest se trouve la ville de Porrentruy, chef-lieu de district du même nom (fig. 2). Cette région, aussi appelée l’Ajoie, s’étend au pied nord de la chaîne jurassienne, dont les sommets culminent

souvent à plus de 1000 m. Etagé entre 370 et 640 m, le territoire montre un relief assez plat, toutefois encore modelé par des plissements résiduels du massif montagneux. C’est à la base de la terminaison orientale d’une petite colline, l’anticlinal du Banné, que s’étendent les vestiges archéologiques d’Alle - Les Aiges, à 470 m d’altitude. Ceux-ci surmontent d’une quin-zaine de mètres une plaine alluviale drainée par la rivière l’Allaine (fig. 3), un cours d’eau qui s’écoule vers l’ouest pour bifurquer ensuite vers le nord-ouest à Porrentruy et se jeter dans le Doubs, en Franche-Comté voisine.

1.2

Cadre géologique

(Denis Aubry)

1.2.1 Introduction

Le cadre naturel (physique, géologique, tectonique, hydrogéo-logique et hydrohydrogéo-logique) du site archéohydrogéo-logique des Aiges, de son environnement immédiat ainsi que de sa région ont été abordés de façon détaillée dans les précédentes publications

relatives aux sites d’Alle 1. C’est pourquoi nous ne présentons

ici qu’un rappel du contexte naturel relatif à Alle - Les Aiges au Bronze final.

1.2.2 Localisation et environnement naturel

Le site des Aiges est localisé dans la partie sud du territoire au relief adouci de l’Ajoie, à la terminaison est de la structure

anti-clinale jurassique modérée du Banné 2 (fig. 9). Cette région,

qui forme une avancée du territoire suisse entre l’Alsace et la Franche-Comté, est constituée de petites plaines de molasse oli-gocènes (Ajoie orientale), de plateaux et de vallons, de combes, de vallées fluviatiles (Allaine, Vendline) et de vallées sèches (Ajoie occidentale). Du point de vue géologique, l’Ajoie

appar-tient au Jura tabulaire et s’étend sur 300 km2. Elle est dominée

par les phénomènes karstiques et son plateau est fortement entrecoupé de failles d’orientation N-S, NE-SO ou NO-SE.

Fig. 1. Situation géographique du site archéologique d’Alle - Les Aiges ( ) dans le canton du Jura, au nord de la chaîne jurassienne. Extrait de l’Atlas de la Suisse 2.0. Reproduit avec l’autorisation de swisstopo (BA12102).

FRANCE PLATEAU SUISSE Bienne Bienne Porrentruy Porrentruy Delémont Delémont 00 20 km20 km N N ALLE ALLE

Fig. 2. Situation régionale du site archéologique d’Alle - Les Aiges en Ajoie. Extrait de SIT-Jura. Reproduit avec l’autorisation de swisstopo (BA12102).

0 1 km

N

Fig. 3. Vue aérienne vers le nord-ouest de la plaine de l’Allaine et situation d’Alle - Les Aiges (1), en terminaison orientale de l’anticlinal du Banné (2).

1 Alle - Noir Bois : Aubry 1997 ; Aubry, Guélat et al. 2000 ; Aubry 2008. Alle - Les Aiges, Pré au Prince 1 et 2 et Sur Noir Bois : Demarez, Othenin-Girard et al. 2010.

2 Diebold et al. 1963 ; Braillard 2006 ; Aubry 2010a.

2

(12)

1.2.3 Environnement hydrologique

Le site des Aiges repose sur les calcaires jurassiques du

Kim-méridgien, affleurant sous faible couverture 3. Il côtoie

direc-tement un vaste dépôt résiduel de marnes silteuses tertiaires

de l’Oligocène 4. Sur ce Tertiaire se sont déposés des sédiments

quaternaires : lœss, graviers, limons d’inondation, colluvions.

surface (fig. 7). Des sondages de prospection ont été effectués en 1986 à Cornol - Pré Genez, situé à quelques centaines de

mètres au sud-est des Aiges 5 et en 1989, à quelques dizaines

de mètres en contrebas à l’est de celui-ci à Alle - Pré au Prince 6.

A Pré Genez, ces creusements de prospection ont traversé une stratigraphie qui a révélé des petits chenaux en méandre, des limons d’inondation et des colluvions au sein desquelles on a retrouvé du mobilier céramique remanié attribué à la période du Bronze final. Il s’agit vraisemblablement des restes d’un habitat dont la contemporanéité avec la nécropole des Aiges, au Bronze récent, n’est toutefois pas assurée. Finalement, il est envisageable que le cimetière des Aiges était implanté au-dessus d’un système hydrologique relativement actif à l’âge du Bronze final dans la plaine de l’Allaine.

1.2.4 Le climat actuel en Ajoie

L’Ajoie apparaît comme une région modérément sèche et est arrosée par des pluies réparties sur l’année (700-1300 mm/an). Elle côtoie la bordure sud-ouest du Fossé rhénan qui est sec (moins de 600 mm/an) et deux territoires humides, l’Arc juras-sien et les Vosges (jusqu’à 2600 mm/an).

1.2.5 Le climat et la végétation au Subboréal (âge du Bronze) et au Subatlantique (âge du Fer)

Aux Aiges, le calage chronologique des tombes situe ces der-nières au début du Bronze final (env. 1350 à 1130 av. J.-C.). Cela correspond à la chronozone du Subboréal. Cette période correspond au développement du hêtre, du sapin, de l’épicéa

et à la chute de l’orme 7. La chronozone du Subboréal est suivie

par celle du Subatlantique qui correspond climatiquement à

une partie moins favorable de l’interglaciaire actuel 8. Un

envi-ronnement plus froid et humide s’installe et cet événement cor-respond à la fin de l’âge du Bronze. Toutefois, des péjorations ponctuelles sont déjà intervenues auparavant au Subboréal,

notamment à l’âge du Bronze moyen 9. La dégradation

clima-tique au début du Subatlanclima-tique est caractérisée par la nette remontée des lacs jurassiens et intervient durant le Premier âge

du Fer (entre 800 et 500 av. J.-C.)10.

Aux Aiges, il est vraisemblable que la dégradation climatique évoquée ci-dessus, couplée à une exploitation agricole des sols, pourraient être la cause de l’érosion de la partie supérieure de la couche 3a, qui a servi au préalable de sol pédologique et archéologique aux utilisateurs de la nécropole au début du Bronze final (chap. 1.2.9).

Le Rhin

L'ill

Lœss

Formations alluviales actuelles Graviers fluviatiles rhénans quaternaires

Jura tabulaire Jura plissé Massifs hercyniens F o r ê t - N o i r e V o s g e s Saint-Ursanne Porrentruy Alle Delémont Laufon La Birse Belfort Altkirch Mulhouse Bâle 10km 0 N

Fig. 4. Carte géologique schématique du sud de l’Alsace et du nord de la chaîne jurassienne avec positionnement d’Alle - Les Aiges. Schéma struc-tural et extension des lœss au nord du Jura plissé (d’après la Carte

tecto-nique de la Suisse au 1 : 500 000 et la Carte géologique de la France au

1 : 1 000 000, édition du BRGM, modifiée). Vendlincourt Levoncourt Alle Cornol Courgenay Cœuve Cœuve Miécourt Fregiécourt Charmoille Charmoille Damphreux Damphreux Bonfol Courtavon Porrentruy Porrentruy

Zones humides associées aux cours d'eau Zones escarpées avec affleurements rocheux

2 km 0

Lœss Alle-Les Aiges

N

Fig. 5. Carte de répartition des lœss et des zones rocheuses ou escarpées. Le site d’Alle - Les Aiges côtoie des zones humides et un réseau hydrogra-phique, associés au soubassement tertiaire.

3 Diebold et al. 1963. 4 Aubry 2010a.

5 Masserey, Pousaz, Guélat et al. 1987.

6 Masserey, Eschenlohr, Othenin-Girard et al. 1990. 7 Gauthier 2001.

8 Magny 1995 ; Gauthier 2004. 9 Magny 1995.

(13)

1.2.6 Les sols actuels en Ajoie

Les sols ajoulots, qu’ils soient forestiers, cultivés ou sous prairie, présentent généralement des caractéristiques les rapprochant des sols bruns lessivés plutôt acides de composition lœssique,

que S. Bruckert et M. Gaiffe 11 nomment « terre minérale en

ambiance acide des sols jurassiens ». 1.2.7 Géologie locale

Le site archéologique des Aiges s’appuie sur les calcaires du Kimméridgien, mais borde un dépôt résiduel de marnes sil-teuses tertiaires de la molasse alsacienne (ou formation UMM)

de l’Oligocène 12. Sur ces deux ensembles se sont déposés des

lœss, des colluvions de lœss et des graviers lœssiques pléisto-cènes, puis finalement des graviers et des colluvions anthropo-gènes holocènes. Ceux qui fréquentaient la nécropole au début de l’âge du Bronze final côtoyaient ainsi une mosaïque de sols plus ou moins humides où dominaient les particules d’ori-gine éolienne à dominante siliceuse (fig. 7). Autour des Aiges, les utilisateurs de la nécropole, sans doute des agriculteurs et des éleveurs, avaient à disposition des terres lœssiques poten-tiellement arables (fig. 7), des sols de prairies sèches sur dalles calcaires et des sols humides, développés sur des colluvions de loess argileux, fixés sur de la molasse tertiaire.

1.2.8 Sédimentation et insertion des vestiges du Bronze final

Le caractère sédimentaire du site archéologique des Aiges est illustré par une couverture de colluvions brunifiées anthropo-gènes charbonneuses qui ont une faible épaisseur, en général proche de 50 cm. Les couches 3a et 3b (fig. 6) représentent en

effet les reliques, les témoins de ce qui reste des anciens sols déposés, puis exploités par l’agriculture antique. Ces deux entités surmontent des dépôts périglaciaires lœssiques du

Pléis-tocène, les couches 4 et 5 13, constituées de colluvions de lœss,

d’altérites de lœss à débris de silex et de lœss altérés soliflués. Les sédiments de cette formation ancienne peuvent s’épaissir dans des dépressions karstiques qui parsèment la zone et les colmater, ce qui a influencé la géométrie propre des colluvions holocènes protohistoriques, qui restent assez horizontales. La colonne stratigraphique CRF32 (fig. 6 et 11) est extraite de la coupe 32 où des prélèvements ont été effectués et soumis à des analyses sédimentologiques, telles la granulométrie, la

géo-chimie et la micromorphologie 14. Les tombes à incinération de

l’âge du Bronze final sont apparues à partir de la partie som-mitale de la couche 3a et leur base reposait dans la couche 3b, voire 4. Le sédiment 3a s’est sans doute déposé à l’âge du Bronze ancien ou moyen. Le niveau 3b comprenait moins de charbons de bois et était difficilement discernable dans le terrain ; il s’est probablement constitué au Néolithique.

A l’ouest du site archéologique, la colonne stratigraphique CRF32 révèle une couche 3a généralement peu épaisse, irré-gulière, parfois totalement arasée. Mieux préservée dans la partie centrale du site plus à l’est, elle comprend de surcroît les constructions gallo-romaines d’un établissement rural (murs

et terrassements en dur, trous de poteau) 15 qui recouvrent

Couche Description des sédiments Charbons et

microcharbons Humus Traits pédologiques(observations sur lame mince) Archéologie et événements sédimentaires Epoque R Silts légèrement argileux brun-gris

à gravillons, graviers et cailloux Limite inférieure nette

Beaucoup de

charbons de bois Présence d’humus Fragments de tuiles Remblais de démolition de fouille Actuelle 2a Base de la couche A1 humique

Matrice sédimentaire identique à R Quelques cailloux calcaires

Nombreux charbons de bois et paillettes de charbons

Présence

d’humus Bioturbations Couche A1 sous remblais Terres cuites et éclats de silex non travaillés

Actuelle 2b Silts très peu argileux brun-jaune

Traces de bioturbations provenant de la couche 2a

Charbons de bois et paillettes de charbons

Présence

d’humus Bioturbations Colluvions charbonneuses remblayées Rares terres cuites Récente 3a Silts un peu argileux très fins, brun

jaune gris, un peu sableux Terre cuite et rognon de silex

Charbons de bois et paillettes de charbons

Présence

d’humus Bioturbations profondes à la base Pores soit vides soit remplis d’argilanes recouvertes de siltanes poussiéreuses

Sol pédologique ancien tronqué * Agriculture postérieure à la mise en place de la colluvion

Deux phases identifiées (agriculture et défrichement). Structures en creux gallo-romaines et Bronze final

Epoque romaine Age du Bronze 3b Silts argileux, un peu sableux

lœssiques de teinte jaune ocre plus claire que 3a Quelques fragments et paillettes de charbons de bois Présence d’un peu d’humus Bioturbé à la base Pores : siltanes poussiéreuses et argilanes limpides Horizon BTg

Sol ancien pédologique enfoui Traces d’agriculture postérieure à la mise en place du sédiment et traces de défrichements anciens

Néolithique

4 Silts argileux lœssiques jaune orangé argileux

Oxydes de fer et de manganèse

Absence de

charbons de bois Absence d’humus Argilanes hyalines microlitées (BT Tardiglaciaire ?) Pores : siltanes poussiéreuses

Quelques fragments de silex remaniés (taillés ?)

Marques protohistoriques d’agriculture

Tardiglaciaire **

5 Silts lœssiques très argileux rubéfiés jaune-rouge

Rognon de silex et éléments calcaires corrodés

Absence de

charbons de bois Absence d’humus Pas d’observation micromorphologique Quelques fragments de silex remaniés (taillés ?) Pléniglaciaire final à Tardiglaciaire**

* Le sommet des structures funéraires du Bronze final apparaît au même niveau que les trous de poteau gallo-romains, soulignant l’érosion subie par la couche 3a après le Bronze final.

** Faciès reconnus à Alle - Noir Bois.

R 3a 4 5 2a 2b 472,50 472,00 3 b BF GR

Fig. 6. Colonne stratigraphique CRF32 et tableau résumant les données sédimentologiques, micromorphologiques et archéologiques des couches relevées et analysées à partir de la coupe 32. (Pour les termes de micromorphologie, se référer au Dictionnaire de Science du sol (Lozet et Mathieu 2002).

CRF32

11 Bruckert et Gaiffe 1985. 12 Affolter et Aubry 2008. 13 Aubry, Guélat et al. 2000. 14 Aubry 2010a.

(14)

seule la partie inférieure de ces tombes en fosse subsistait lors de l’installation des Gallo-Romains aux Aiges.

Après la fin de l’utilisation de la nécropole du Bronze final, une érosion importante s’est produite à l’âge du Fer, avant l’implan-tation gallo-romaine qui a elle-même parfois endommagé des sépultures. Toutefois, les structures des Gallo-Romains, notam-ment de vastes zones terrassées en matériaux solides (moellons calcaires, fragments de tuiles, mortier de chaux) ont aussi offert une protection au-dessus des sépultures protohistoriques, les préservant d’une ultime érosion plus récente.

1.2.9 Erosion de la couche 3a

L’érosion partielle de la couche sédimentaire 3a est surtout liée aux activités humaines, notamment agricoles. Celles-ci ont été suspectées par la micromorphologie entre La Tène ancienne

et la période romaine sur le site voisin d’Alle - Noir Bois 16 et à

Alle - Les Aiges par l’étude stratigraphique 17. L’érosion en

rela-tion avec l’occuparela-tion ancienne des sols à l’âge du Fer a été probablement amplifiée par les ruissellements consécutifs à la dégradation climatique survenue durant le Subatlantique (chap. 1.2.5). Au niveau de la chronosédimentologie, il faut noter une lacune de plus d’un millénaire qui se manifeste dans l’espace par l’existence, au même niveau, d’un fond de tombe à incinération du Bronze final et d’un trou de poteau gallo-romain appartenant à un bâtiment léger, à quelques mètres au

nord de la colonne CRF32 (chap. 2.4.4.1, fig. 15) 18. Cette

imbri-cation souligne bien l’érosion survenue durant l’âge du Fer aux Aiges, une ablation sédimentaire à ne pas confondre avec celle évoquée infra, plus récente.

Bien plus tard en effet (époques moderne et actuelle), on relève des indices nets d’activité anthropique, qui se marquent d’ail-leurs de manière différenciée sur le site. Tout à l’ouest, à l’empla-cement de la colonne CRF32, les constructions gallo-romaines ne comportent pas de terrassements en dur, mais seulement des constructions légères sur poteaux ; là à une époque subactuelle, des cultures d’herbages ou la pratique régulière de la pâture ont eu un effet destructeur modéré sur les vestiges ruraux gallo-romains et sur les structures funéraires du Bronze final. Il en va de même un peu plus à l’est où les aménagements en dur d’époque romaine ont de plus offert une chape protectrice efficace aux sépultures insérées dans les couches 3a et 3b, elles-mêmes bien préservées. Mais davantage à l’est et au nord-est, une autre par-celle agricole a été l’objet de labourages profonds et intensifs qui ont largement arasé les constructions gallo-romaines, parfois intégralement, ainsi que les sépultures du Bronze final ; ces der-nières ne subsistant plus que par un mobilier disséminé. 1.2.10 Conclusion

Il existe peu de sites ouverts du Bronze final en Ajoie. A partir des calages possibles de vestiges dans la stratification colluviée des

ensembles définis à Alle - Noir Bois 19, on peut établir une

inten-sification progressive des phénomènes érosifs durant la Préhis-toire et la ProtohisPréhis-toire. A proximité immédiate, les trouvailles

accentuation de l’action de l’homme sur l’environnement est constatée au Néolithique moyen et final et au Bronze final ; cet impact se marque encore plus au Second âge du Fer, pour s’accélérer aux époques romaines et médiévales. Les traces de défrichements et de pratiques agricoles (traits texturaux observés en lames minces, charbons de bois, soc d’araire à Alle - Noir Bois, etc.) ont pour conséquence une prédominance pro-gressive de l’érosion sur la sédimentation en contexte de ver-sant. On y observe souvent une oblitération partielle ou totale des occupations du Subboréal antérieures au Bronze final, c’est-à-dire celles du Néolithique, du Bronze ancien et moyen. 1.3 Historique des découvertes et des travaux

(Blaise Othenin-Girard)

Aux Aiges, les premières structures de la nécropole à incinéra-tions du Bronze final ont été mises au jour à l’automne 1999, sous des édifices et d’autres aménagements gallo-romains, objets principaux des travaux jusqu’à ce moment.

La fouille archéologique a en fait débuté en avril 1990, à la suite de la découverte d’éléments de constructions gallo-romains dans un champ labouré, survenue au cours d’une prospection pédestre. Cette opération a été menée dans le cadre des sondages archéologiques systématiques effectués dès 1986 sur le tracé de

la future autoroute A16 dans le canton du Jura (fig. 4) 21, sous

l’égide de la Section d’archéologie et paléontologie de l’Office de

la culture 22. Cette voie de communication doit relier

définitive-ment en 2016 le Plateau suisse depuis Bienne jusqu’à Boncourt, village frontalier proche de Delle (Terr. de Belfort, F), en traver-sant le massif jurassien, ses vallées et ses cluses.

En 1999, une première sépulture à incinération fut repérée au contact d’un mur appartenant à un bâtiment gallo-romain en dur dont les fondations avaient oblitéré une partie de cette tombe. Par la suite, ce sont deux dépôts d’objets de bronze et d’or qui furent dégagés.

En 2000 et 2001, en parallèle au décapage de la partie inférieure des vestiges gallo-romains, les fouilleurs mirent au jour dix nou-velles tombes à incinération, ainsi qu’un peu de mobilier céra-mique et métallique, disséminé dans l’aire du chantier.

La fouille du site des Aiges a la particularité de s’être déroulée de manière épisodique, avec des campagnes parfois courtes, répar-ties sur une longue durée, de 1990 à 2001. La raison de cette situa-tion est liée aux aléas des découvertes et à la coordinasitua-tion des

16 Guélat 1997 ; Aubry 2008. 17 Aubry 2010a.

18 Demarez, Othenin-Girard et al. 2010, p. 124, fig. 140, bâtiment D5a, poteau 17.

19 Aubry, Guélat et al. 2000.

20 Demarez, Othenin Girard et al. 2010.

21 Objectifs, méthodes et premiers résultats de la démarche : Schifferdecker 1994 ; Schifferdecker et Stahl Gretsch 1998.

22 De 1986 à 2003 : Section d’archéologie de l’Office du patrimoine historique.

(15)

fouilles archéologiques par rapport à la construction de l’auto-route A16. A la fin de 1990, alors que la fouille des Aiges étaient en cours, le vaste site d’Alle - Noir Bois a été détecté à proximité par des sondages effectués tardivement, peu avant le début des travaux liés à la construction de l’autoroute et au déplacement d’une voie de chemin de fer (fig. 4). Comme le chantier archéo-logique des Aiges était situé sur une zone de dépôt provisoire de matériaux excavés par le génie civil, une négociation menée avec les Ponts et Chaussées s’est conclue pour décider que la surface comprenant les vestiges du site allait être préservée pour une intervention ultérieure, mais que l’essentiel des ressources humaines et financières devait être transféré en priorité sur le chantier de Noir Bois, menacé de destruction imminente.

De ce fait, les surfaces déjà ouvertes ont été nettoyées et recou-vertes d’une protection en 1991 (15 jours) ; les campagnes de fouille n’ont repris aux Aiges qu’en 1998 (4 mois), pour se pour-suivre en 1999 (2,5 mois), 2000 (6 mois) et 2001 (5,5 mois). La durée totale des investigations de terrain se monte à 26,5 mois,

pour une surface fouillée d’environ 2800 m2. Les travaux

consa-crés en particulier au dégagement des structures funéraires du Bronze final se sont étalés de manière discontinue sur 12 mois (de 1999 à 2001), en fonction de la mise au jour de nouvelles tombes (fig. 5), l’effort principal restant consacré à l’achève-ment de la fouille des aménagel’achève-ments ruraux gallo-romains. Il faut ajouter deux mois supplémentaires pour le décapage des ossuaires de deux sépultures, prélevés sur le terrain pour un décapage ultérieur en laboratoire, une opération qui a été réa-lisée en 2004.

En vue de leur publication dans ce volume, la phase d’étude des structures funéraires des Aiges a véritablement débuté en jan-vier 2010. Les trois auteurs principaux se sont impliqués dans ce projet selon une durée variable, car ils étaient liés en parallèle à l’achèvement de projets initiés au préalable.

A côté de la nécropole du Bronze final, l’essentiel des vestiges des Aiges se rapporte aux constructions d’une partie de la

zone rurale d’un établissement gallo-romain 23, actif entre la

fin du Second âge du Fer (50/15 av. J.-C. et l’Antiquité tardive (350 ap. J.-C.); on y constate l’édification et la reconstruction

Fig. 7. Situation topographique des sites et des sondages archéologiques loca-lisés au sud d’Alle, sur les emprises liées à la construction de l’auroroute A16 et au déplacement de la voie ferrée CFF.

1 : Les Aiges ; 2 : Sur Noir Bois ; 3 : Pré au Prince 1 ; 4 : Pré au Prince 2 ; 5 : Noir Bois. 576000 Alle 576500 Courgenay 480 460 576000 252000 251500 1 2 3 4 5 252000 Anticlinal du Banné N 0 250m Autor oute A16 Voie ferrée CFF

Fig. 8. Vue du vase ossuaire de la tombe en fosse circulaire 290 in situ, en

(16)

de bâtiments légers, dédiés à l’habitat et aussi au stockage.

La ferme gallo-romaine est reliée par deux chemins empierrés 24

à une voie établie en contrebas du site dans la plaine de l’Al-laine, un ouvrage qui traversait l’Arc jurassien, reliant Man-deure, Epomanduodurum (Doubs, F) à Studen, Petinesca (BE), via le col du Pierre-Pertuis.

Des portions de fermes 25 et un hameau agricole gaulois 26

(de La Tène ancienne à La Tène finale) ont été repérés sur plu-sieurs sites archéologiques en périphérie des Aiges, où un gre-nier sur poteaux daté de la fin de La Tène finale au début de l’Epoque romaine préfigure ceux qui vont lui succéder jusqu’au

milieu du 4e siècle.

Une industrie lithique abondante a aussi été recueillie dans la surface fouillée, mais en position secondaire. Les carac-téristiques typologiques d’un lot de ce matériel désignent le

Campaniforme (Néolithique final) 27. On relève par ailleurs

des artefacts du Néolithique moyen, du Mésolithique et du

Moustérien (Paléolithique moyen) 28. Il faut savoir que du silex à

l’état naturel se retrouve en abondance dans le substrat calcaire de l’anticlinal du Banné. Facilement accessible, ce matériau y a été extrait et travaillé de manière conséquente à plusieurs époques de la Préhistoire. A proximité des Aiges, on en retrouve des témoignages en particulier sur les sites archéologiques

d’Alle - Noir Bois et d’Alle - Pré Monsieur 29.

1.4

Méthodes et objectifs

1.4.1 Préambule

De la nécropole qui a été en fonction dans l’étape initiale du Bronze final, les fouilleurs ont mis au jour dans l’aire du site archéologique onze sépultures à incinération et deux dépôts connexes d’objets métalliques.

De la fouille à l’étude, l’objectif a été d’aborder de manière adé-quate les structures funéraires des Aiges, afin de répondre au mieux aux questions et problématiques actuelles posées par ce type de vestiges. Ces 30 dernières années, en particulier en France, on a assisté à une intensification et une amélioration progressive des recherches en archéologie de la mort,

notam-ment pour les périodes pré- protohistoriques 30. Le point

cen-tral a été de s’intéresser davantage au défunt mis en terre dans une cavité sépulcrale, avec la mise en œuvre systématique d’une approche anthropologique physique des individus, qu’ils soient inhumés ou incinérés. La structure funéraire devient un gisement à lui seul dont toutes les composantes sont consi-dérées, sans discrimination. Auparavant, se sont souvent les caractéristiques architecturales des sépultures et le mobilier d’accompagnement qu’elles recelaient qui ont été étudiés, au détriment de la connaissance du ou des individus déposés

dans ces structures 31.

Une réflexion s’est déroulée en parallèle pour clarifier la ter-minologie utilisée dans le domaine de l’archéologie funéraire, dans le but d’éviter des confusions et de bien définir ce qui

cessus d’approche des structures funéraires en trois niveaux. Le premier s’attache à l’ensemble des observations de ter-rain et à la taphonomie, le second, à partir des faits constatés, conduit à la reconstitution et à l’enchaînement des gestes, des pratiques qui ont abouti à la constitution du dépôt funéraire. Ici interviennent par exemple les notions de dépôts primaire (cadavre dont les éléments restent en connexion anatomique, placé dans une cavité) et secondaire (les restes d’un corps sont déposés alors que les éléments du squelette ont perdu toute ou en partie leur relation anatomique); c’est le cas en particulier des dépôts d’incinération.

Le troisième niveau, le plus problématique, est celui de l’inter-prétation d’une structure funéraire ; on peut à ce stade lui assi-gner ou non le rôle de sépulture, que cette dernière soit identifiée

par des critères d’intentionnalité ou de contexte funéraire 33.

A ce moment sont aussi traités les thèmes de la pensée religieuse ou symbolique qui motive les pratiques funéraires ainsi que les implications d’ordre sociologique et culturel qui peuvent

être tirées de l’observation de l’ensemble d’une nécropole 34.

A ce titre, on peut mentionner le mode de recrutement des sujets ensevelis dans un cimetière, leur répartition et leur trai-tement en fonction de l’âge ou du sexe. Selon ces derniers cri-tères, l’équipement et la parure mortuaire des défunts ainsi que

leur rang social sont des aspects aussi abordés 35. De manière

plus audacieuse, des propositions concernant le système de transmission du pouvoir ou du patrimoine (matrilinéaire ou patrilinéaire) ont été avancées à partir de l’étude complète de

plusieurs nécropoles du début du Bronze final 36. L’ensemble de

ces démarches vise en fait à une compréhension du monde des

vivants à partir de celui des morts 37.

Un autre aspect important est également abordé par plusieurs

auteurs traitant d’archéologie de la mort 38. Il s’agit du fait que

la sépulture n’exprime qu’un moment du temps funéraire ; on

parle aussi de « temps du cadavre » 39. Le décès d’un sujet dans

une communauté constitue à l’évidence pour ses membres une

24 Demarez, Othenin-Girard et al. 1999.

25 Alle - Pré au Prince 1-2, Sur Noir Bois : Demarez, Othenin-Girard et al. 2010. 26 Alle - Noir Bois : Masserey et al. 2008.

27 A mentionner en plus un tesson de céramique appartenant à un gobelet décoré campaniforme : Othenin-Girard et al. 2001, fig. 22, p. 36. 28 Saltel et al. 2008, p. 102-103.

29 Alle-Noir Bois : Othenin-Girard et al. 1997 (Campaniforme) ; Aubry, Guélat et al. 2000 (Moustérien et Magdalénien) ; Alle - Pré Monsieur : Stahl Gretsch, Detrey et al. 1999 (Moustérien).

30 Leclerc 2005 ; Boulestin et Duday 2005 ; Duday et Masset 1987. 31 Boës 2007.

32 Boulestin et Duday 2005. 33 Ibid.

34 Duday et al. 2000 ; Fischer 1998 ; Elbiali 2000 ; Moinat et David-Elbiali 2003 ; Prouin 2007.

35 Duday et al. 2000. 36 Rottier 2003. 37 Duday et al. 2000.

38 Par exemple Leclerc 1990 ; Depierre et al. 2000 ; Boulestin et Duday 2005 ; Rottier 2003 ; Prouin 2007.

(17)

rupture et le début d’un processus de deuil qui doit aboutir à un retour à la normale, à une phase d’intégration, lorsque le défunt perd peu à peu son identité propre aux yeux de son groupe social, pour rejoindre finalement le monde des morts ou des ancêtres, voire la sphère de l’oubli. Ce passage va être

rythmé par une succession de rites 40, de commémorations et de

manipulations, dont les funérailles n’expriment qu’une étape. L’enjeu pour l’archéologue sera alors de saisir et d’interpréter correctement les manifestations matérielles de ces pratiques funéraires qui ont pu se produire avant et après la mise en terre d’un défunt, pour autant qu’elles soient décelables.

1.4.2 Méthodes de fouille

Les techniques de fouille appliquées sont celles déjà mises en œuvre et éprouvées sur plusieurs nécropoles à incinération

protohistoriques, notamment dans le Midi de la France 41 ou en

Alsace 42. Aux Aiges, elles ont toutefois été quelque peu

adap-tées à l’état de conservation des structures, assez variable, ainsi qu’à l’infrastructure et les moyens disponibles à ce moment. Le dégagement de la plupart des vestiges funéraires s’est effectué in situ. En raison de la fermeture du chantier en saison hivernale et de la difficulté de prélèvement d’objets fragiles, une portion de deux sépultures et la totalité de deux petits dépôts d’objets en métal ont été extraits du terrain pour être finalement décapés en laboratoire (chap. 2.2, 2.3, tombes 249, 265 et dépôts 190, 194). Envisagée dans un premier temps, la possibilité de prélever en bloc les structures et de les fouiller confortablement à l’intérieur a vite été abandonnée. En effet, il était quasiment impossible de délimiter les fosses à l’apparition et c’est souvent vers la base que le contour de la cavité se dessinait. De sur-croît, les limons du substrat sédimentaire étaient parsemés de nombreux nodules et plaquettes de silex naturel, ce qui rendait problématique l’introduction d’une plaque métallique ou d’un autre dispositif sous les structures afin de les soustraire au ter-rain sans les endommager. Les dimensions, le volume et le poids de certaines d’entre elles (surface à l’apparition de 270 x 120 cm pour la tombe 278, p. ex., chap. 2.4.2.5) constituait également un handicap supplémentaire à leur enlèvement du sol.

Chaque structure a été fouillée par des décapages successifs de quelques centimètres, avec une identification des différents dépôts contenus : ossuaire(s) et leurs contenants éventuels, offrandes manufacturées, résidus de crémation et sédiment de remplissage. Dans le cas d’ossuaires étendus, les fouilleurs ont établi un compartimentage sur la surface osseuse ; par quart si celle-ci était circulaire, par carrés ou rectangles dans le cas d’une configuration allongée. Le but était de constater d’éventuels dépôts d’os incinérés différenciés selon les parties anatomiques du corps. Les ossements ont tous été prélevés : de manière indi-viduelle s’ils étaient en bon état ; dans le cas contraire, ils ont été ramassés en vrac avec le sédiment pour un tamisage ulté-rieur sous filet d’eau, jusqu’à une maille de 1 mm. Chaque objet d’offrande, fragmenté ou non, a fait l’objet d’un prélèvement et d’une numérotation par pièce.

Les techniciens de fouille n’ont pas gardé la totalité des résidus de crémation et du sédiment extraits de la fosse funéraire ;

un choix a été fait en fonction de la préservation générale de chacune d’entre elle. Toutefois, ils ont tamisé (maille jusqu’à 1 mm) et trié (à l’œil nu et à la loupe binoculaire, si besoin) tout le matériel conservé.

L’anthropologue, également contributeur de cette publica-tion (chap. 3), a participé au dégagement des structures sur le terrain ou en laboratoire. A côté de ses propres observations, il a pu conseiller les fouilleurs sur les démarches à suivre pour le traitement du matériel osseux. Sa collaboration s’est révélée précieuse car d’une structure funéraire à l’autre, les dépôts des restes humains incinérés révélaient des situations très différentes ainsi qu’une grande variabilité de leur état de conservation.

Les relevés des décapages ont été réalisés à l’échelle 1 : 10 avec pour chacun d’entre eux une couverture photographique géné-rale ou de détail. La perception en coupe de chaque structure se base pour l’essentiel sur une reconstitution graphique à partir des dessins de décapages ; dans quelques cas néanmoins, une coupe transversale a été effectuée sur le terrain de manière par-tielle en périphérie de la fosse, afin d’en préciser la limite. 1.4.3 Objectifs

L’un des objectifs de cette publication est de démontrer que la majorité des structures funéraires d’Alle - Les Aiges, au début du Bronze final, participent du moment précis des funérailles, de l’ensevelissement de défunts incinérés dans une dizaine de sépultures, formant une petite nécropole, sans toutefois que l’aire de crémation des ces sujets ne soit apparue dans l’aire fouillée. Mais il s’agit aussi de comprendre la raison du dépôt d’objets de parure en bronze et en or dans deux petites fosses contiguës en périphérie des tombes.

Dans ce sens, l’étude des structures mêmes (chap. 2.4 et 2.5) a consisté à en définir la configuration et l’architecture. Les fouilleurs ont réalisé une lecture la plus précise possible des cavités funéraires, pour identifier et localiser les différents dépôts et établir la chronologie de leur placement dans la fosse. Ils ont aussi porté une attention particulière aux obser-vations de nature taphonomique, pour évaluer le moment de l’occurrence des perturbations constatées (contemporaines ou postérieures à l’utilisation de la nécropole). La mise en évi-dence d’espaces vides a aussi été recherchée, de même que la présence d’éventuels contenants ou de compartimentages en matériaux organiques; mais il faut savoir que ces derniers, s’ils ne sont pas carbonisés, ne laissent quasiment pas de traces

dans les sédiments du site. Une série de datations 14C a été

réa-lisée sur des charbons de bois issus de plusieurs structures afin d’établir leur situation chronologique absolue et de confronter les résultats avec ceux établis par la typologie des artefacts d’accompagnement.

40 Van Gennep 1981. 41 Duday et al. 2000. 42 Prouin 2007.

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d’individus par tombe, la façon dont les ossements d’un ou de plusieurs sujets ont été répartis dans une fosse sépulcrale et selon quel déroulement, en remontant dans certains cas jusqu’au moment de la crémation. Il est aussi nécessaire de dis-cuter de la question des os surnuméraires et de définir à partir de quels éléments on définit une tombe double ou multiple. La démarche a cherché par ailleurs à estimer l’âge au décès et, dans certains cas, le sexe des défunts, de même qu’à établir des considérations d’ordre morphologique et pathologique. L’ana-lyse présente nécessairement des données chiffrées relatives au poids global, à celui des parties anatomiques et à celui des osse-ments indéterminés des divers individus reconnus. La portée de l’interprétation générale des résultats anthropologiques est à l’évidence tributaire de la relative petite taille de la nécropole et du nombre restreint de sujets identifiés.

Les offrandes manufacturées découvertes dans l’ensemble des fosses funéraires comportent deux catégories principales : près d’une quarantaine d’objets en bronze appartenant à la parure et au costume (chap. 4.2) ainsi qu’une vingtaine de récipients céramiques (chap. 4.3); l’ambre n’y est représenté que de manière anecdotique. Il faut compter en plus quelques vases et artefacts en bronze disséminés sur le site, en dehors des cavités funéraires. La fragmentation de ce matériel a nécessité la défini-tion du nombre minimum d’individus de l’ensemble du corpus. L’approche typologique effectuée, en particulier sur la parure métallique, garde son importance pour obtenir une datation relative des ensembles clos constitués par les fosses sépulcrales. Le mode de répartition, de placement des offrandes dans les tombes a aussi été examiné, afin de déterminer leur position par rapport aux autres composantes de la fosse et de discerner un éventuel comportement homogène dans la manière de dis-poser ces artefacts. D’autres habitudes sont aussi décelables, comme le fait de placer une certaine quantité des bronzes et des vases avec le défunt sur le bûcher ou de briser intentionnelle-ment une partie de ces objets avant leur enfouisseintentionnelle-ment. L’intérêt a porté aussi sur les modalités de choix du mobilier funéraire parmi l’éventail disponible ; le constat est clair pour le métal et les observations faites aux Aiges ne dérogent pas à ce qui a été établi sur d’autres nécropoles au début du Bronze final. Pour la céramique, la situation est moins évidente et il a paru intéressant de comparer l’effectif des Aiges à celui provenant de petits habitats contemporains ou un peu plus anciens, fouillés récemment dans le canton du Jura. Par ailleurs, la question se pose de savoir si les officiants des funérailles composaient un service céramique funéraire typé.

L’attribution culturelle du mobilier métallique et céramique s’est effectuée pour l’essentiel dans l’aire régionale : Plateau suisse et Jura, est de la France et sud de l’Allemagne. Cette tentative se heurte cependant à quelques difficultés lorsqu’il s’agit d’insérer le mobilier des Aiges dans des aires culturelles au début du Bronze final, dissemblables lorsqu’on considère la poterie ou les objets métalliques. Une meilleure connaissance de la céramique funéraire et domestique du Bronze moyen au début du Bronze final en Suisse devrait affiner la perception

dans le canton du Jura, constitue un premier pas allant dans ce sens (chap. 4.3.3).

L’apport désormais indispensable des études anthropologiques des tombes à incinération au Bronze final en particulier laisse apparaître des ossements calcinés de faune ; des morceaux de viande ont sans doute aussi été placés sur le bûcher et se retrouvent ensuite dans la sépulture. Ce cas se manifeste dans plusieurs structures funéraires des Aiges, un phénomène qui mérite un approfondissement : quelles sont les espèces repré-sentées, dans quelle quantité et selon quelle fréquence et mode de dépôt (chap. 5) ? Le tamisage fin des matériaux extraits des fosses funéraires a révélé des restes de semences carbonisées ; il se pose ici la question d’éventuelles offrandes à base de végé-taux lors des funérailles, un aspect qui, pour des raisons de conservation, n’a été évalué que sur deux structures du site ; tou-tefois sur territoire suisse, cette recherche n’en est encore qu’à un stade embryonnaire pour la période concernée (chap. 6). Enfin, la détermination des essences de bois utilisées pour la crémation, réalisée sur le matériel charbonneux issu des tombes, révèle quels arbres ont été choisis par les contempo-rains des défunts (chap. 7). Observe-t-on un choix préférentiel et récurrent parmi les espèces disponibles de l’environnement local, des arbres de petites ou de grandes dimensions ; quel est le pouvoir calorifique des types de bois utilisés ?

L’intégration des résultats issus des diverses approches entre-prises vise avant tout à comprendre le déroulement des pra-tiques effectuées lors de la mise en terre d’individus incinérés au début du Bronze final à Alle. Les structures funéraires, peu nombreuses et pas toujours bien conservées, forment une petite nécropole en usage pendant une période relativement courte ; elles laissent pourtant deviner une diversité dans leur aména-gement, dans leur contenu et sa disposition. Cette complexité s’accroît en comptant les deux dépôts d’objets métalliques péri-phériques, une coutume peut-être à considérer en dehors du temps des funérailles proprement dites.

L’effectif réduit de tombes à Alle et leur état de conservation variable limitent la portée de l’interprétation, surtout en ce qui touche l’organisation spatiale de la nécropole et le domaine de la paléosociologie. A cet effet, il reste problématique de perce-voir les modes de recrutement du cimetière et les comporte-ments relatifs à la dotation des offrandes par rapport au nombre des défunts inhumés dans une sépulture, à leur âge ou à leur sexe. Dans ce sens, il devient nécessaire d’intégrer les données des Aiges aux résultats pluridisciplinaires obtenus sur d’autres nécropoles de l’espace régional, plus riches en structures funé-raires ; c’est notamment le cas en Alsace voisine.

La petite nécropole d’Alle témoigne d’une phase de transition des coutumes funéraires entre celles en vigueur auparavant au Bronze moyen et celles qui vont s’imposer plus tard au Bronze

(19)

final ; un phénomène que l’on peut évaluer tant sur le Plateau suisse que dans l’aire régionale environnante. Les changements sont aussi sensibles dans le domaine du mobilier funéraire céramique ou métallique, que ce soit du point de vue formel et quantitatif.

L’approche pluridisciplinaire tentée sur la nécropole des Aiges, même avec un nombre restreint de sépultures, peut s’avérer profitable afin d’obtenir un éventail de données dépassant les seuls domaines de l’architecture des tombes ou de la typologie des offrandes. Un nombre plus important d’informations dans ce sens devrait permettre une meilleure définition des pratiques funéraires régionales au début du Bronze final et ensuite, à une plus large échelle géographique, aboutir à une perception affinée des aires culturelles de cette période.

1.5

Personnel et remerciements

Ci-dessous sont énumérés les collaborateurs qui ont parti-cipé aux campagnes de fouilles effectuées à Alle - Les Aiges en 1999, 2000 et 2001, années pendant lesquelles les

struc-tures funéraires du Bronze final ont été mises au jour 44.

Les auteurs de cette publication remercient chaleureuse-ment toutes ces personnes pour leur engagechaleureuse-ment et la qua-lité des prestations accomplies. Il s’agit des archéologues et des techniciens de fouille de la Section d’archéologie, ainsi que d’étudiants ou de stagiaires engagés à titre temporaire lors de leurs vacances.

Hugo Amoroso, Pauline Bart, Hugues Brisset, Sylvain Chalverat,

Florence Chavaillon, Laure Chiquet, Cédric Cramatte, Mathilde

Crevoisier, Yannick Dellea, Emmanuelle Evéquoz, Clarisse Froté,

Iann Gaume, Guillaume Gérard, Andreas Iberg, Olivier Jacquat,

Frédéric Lapaire, Stéphane Leuenberger, Béatrice Lovis, Anna

Lüthi, Simon Maître, André Marescot, Ludivine Marquis, Anne Montavon, Ingrid Nicolas, Amalric Oriet, Boris Oriet, Gheorge

Pascal, Lucine Petignat, Line Petignat Haeni, Fanny Porte-nier, Caroline Quiquerez, Frédéric Quiquerez, Olivier Rebetez, Thierry Rebmann, Régine Saucy, Antonin Sauvage, Andrea

Schaer, Laurence-Isaline Stahl Gretsch, Jean-Marie Staubli,

Patrick Willemin, Francine Zanetta.

Florence Chavaillon, Anne Montavon et Antonin Sauvage ont efficacement secondé le responsable de chantier en tant qu’ad-joints, alors que Mustapha Elyaqtine, anthropologue, s’est investi de manière régulière pour conseiller les fouilleurs sur les techniques appropriées à utiliser lors du dégagement des sépultures.

Les rédacteurs se sentent redevables envers les collabora-trices et collaborateurs qui sont intervenus avec efficacité et rigueur dans la phase d’étude et de mise en valeur des vestiges exhumés.

Martine Thiévent a traité un nombre important d’opérations relatives au mobilier et à la documentation archéologique, de même que les tris à la loupe binoculaire de divers matériaux issus du tamisage de sédiments ; dans ces tâches, elle a été assistée de manière ponctuelle par Florence Chavaillon, Claude Girardin, Brigitte Noirat et Caroline Quiquerez.

Pierre Bigler, Laure-Anne Küpfer et Martine Rochat (respon-sable de l’unité préparation-conservation) ont procédé au net-toyage et à la consolidation des objets les plus fragiles, activités impératives avant toute manipulation ultérieure. Bernard Migy a effectué des prises de vues sur le terrain, mais également d’une série d’objets en laboratoire ; il a de surcroît assuré l’en-tretien des appareils et l’archivage de la documentation photo-graphique, qu’elle soit sur supports argentique ou numérique. L’ensemble des dessins informatisés de cette publication sont dus à Line Petignat Haeni, intégrée au bureau de dessin dirigé par Céline Robert-Charrue.

Le bureau d’édition, sous la responsabilité de Vincent Friedli, a réalisé toutes les opérations nécessaires à la parution de cette étude : le traitement final des illustrations, le maquettage et la mise en page, par respectivement Simon Maître, Line Petignat Haeni et Marie-Claude Maître. Carine Deslex et Vincent Friedli ont assuré les ultimes et indispensables corrections ainsi que les relations avec l’imprimeur. Il faut également relever la tra-duction des résumés assumée par Monika Kleiner (allemand), Maruska Federici-Schenardi (italien) et Robert Fellner (anglais). La réalisation de la fouille, l’élaboration des résultats, puis leur présentation dans cet ouvrage n’ont été possibles que grâce à la volonté, à l’engagement déterminant de plusieurs person-nalités et des institutions qu’elles dirigent. La gratitude des auteurs s’adresse ainsi à Elisabeth Baume-Schneider, ministre du Département de la Formation, de la Culture et des Sports, à Michel Hauser, chef de service de l’Office de la culture, à Fran-çois Schifferdecker et Robert Fellner, respectivement ancien et actuel archéologue cantonal et aux autres membres de la direction de la Section d’archéologie et paléontologie A16, Alain Merçay et Wolfgang A. Hug. Des remerciements chaleu-reux vont également à Philippe Receveur, ministre du Départe-ment de l’EnvironneDéparte-ment et de l’EquipeDéparte-ment, à Jean-Philippe Chollet, chef de Service des ponts et chaussées, ainsi qu’à ses collaborateurs de l’A16 Jean-Daniel Ecoeur et Jacques Peti-gnat. Les membres non encore mentionnés de la Commission archéologie et paléontologie A16, soit Valérie Kohler, Guido Lassau, Michel Monbaron, Urs Niffeler ainsi que l’Office fédéral des routes reçoivent également une franche reconnaissance, de même que la Société jurassienne d’Emulation, coéditrice de la série des Cahiers d’archéologie jurassienne.

Enfin, les auteurs témoignent leur gratitude à Marie Besse, pour l’intérêt porté au texte et pour la pertinence de ses avis.

44 Les noms en italique se rapportent aux personnes qui ont fouillé et documenté en particulier les structures funéraires.

(20)
(21)

2

l

essTrucTures

(Blaise Othenin-Girard)

2.1 Introduction

Parmi les treize aménagements qui ont été observés dans l’aire fouillée, on dénombre onze tombes à incinération et deux petits dépôts annexes d’objets en métal (fig. 9). Pour le reste, il faut aussi mentionner du mobilier céramique et métallique disséminé sur le site, dans un état de fragmenta-tion avancé. La compréhension et l’interprétafragmenta-tion correctes

de ces vestiges est tributaire de la perception de leur situa-tion topographique et stratigraphique (chap. 2.2). Il s’agit d’évaluer l’insertion des sépultures dans la sédimentation locale ainsi que de mesurer dans le sol l’impact des activités humaines postérieures, pour l’essentiel au Second âge du Fer et à l’Epoque romaine.

Ceci amène à considérer l’état de conservation des restes de cette petite nécropole d’Alle - Les Aiges au début du Bronze final (chap. 2.3), un aspect important pour des structures funéraires considérées le plus souvent comme des ensembles clos. En effet, le degré de préservation des tombes va déterminer la sûreté des explications relatives à la chronologie de leur construction puis

Coupe 32

Incinération en fosse allongée Incinération en fosse circulaire Incinération très diffuse Dépôt d’objets en bronze et en or 292 265 291 290 226 198 189 250 249 282 278 194 190 576 300 251 800 Bâtiment 1 Bâtiment 2 Bâtiment 3 Coupe 34 N 0 10m

Mur d’édifice gallo-romain Poteau d’édifice gallo-romain

Remblais et aménagements gallo-romains

Fig. 9. Situation des onze tombes à incinération et des deux dépôts du Bronze final, des coupes 32 et 34. En filigrane, situation des bâtiments gallo-romains sur solins, murs ou poteaux et des surfaces terrassées en dur.

Figure

Fig. 2. Situation régionale du site archéologique d’Alle - Les Aiges en Ajoie.
Fig. 5. Carte de répartition des lœss et des zones rocheuses ou escarpées.
Fig. 8. Vue du vase ossuaire de la tombe en fosse circulaire 290 in situ, en
Fig. 12. Tableau exprimant le degré de conservation des structures et du mobilier de la nécropole
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