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Syndrome de Lyell induit par l’Allopurinol : à propos d’un cas

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Revue Marocaine de Rhumatologie

CAS CLINIQUE

Résumé

L’allopurinol est le traitement de première intention de la goutte, mais il comporte également le risque d’effets secondaires graves. La nécrolyse épidermique toxique (NET) est l’une des réactions cutanées sévères potentiellement mortelles liées au mauvais usage de cette molécule. Nous rapportons le cas d’une femme de 60 ans qui a développé un Syndrome de Lyell après ingestion d’allopurinol.

MOTS CLÉS

:

Syndrome de Lyell ; Allopurinol;

Goutte.

Abstract

Allopurinol is the first-line treatment for gout, but it also carries the risk of serious side effects.

the toxic epidermal necrolysis is one of the potentially fatal serious skin reactions linked to the misuse of this molecule. We report the case of a 60-year-old woman who developed Lyell Syndrome after ingestion of allopurinol.

KEY WORDS : Lyell syndrome; allopurinol;

Gout.

Correspondance à adresser à : Dr. L. Taoubane Email : drtaoubanelaila@gmail.com

Disponible en ligne sur www.smr.ma

Syndrome de Lyell induit par l’Allopurinol : à propos d’un cas

Allopurinol-induced Lyell syndrome : a case report

Laila Taoubane, Najlae El Ouardi, Siham Sadni, Abdellah El Maghraoui, Lahsen Achemlal

Service de Rhumatologie, Hôpital Militaire d’Instruction Mohamed V, Rabat - Maroc.

Rev Mar Rhum 2020; 51:76-9 DOI: 10.24398/A.367.2020;

L’allopurinol est un médicament hypouricémiant de première intention chez les patients goutteux. Or, c’est l’un des premiers pourvoyeurs de toxidermies parfois mortelles (0,1 % de toxidermies graves), telles que les syndromes de Lyell, de Stevens-Johnson et de DRESS syndrome.

Le syndrome de Lyell ou nécrose épidermique toxique (NET) se caractérise cliniquement par l’apparition brutale d’un syndrome pseudo-grippal suivi d’une éruption maculopapuleuse, avec cloques et décollement cutané (signe Nikolsky positif)[1], précédés par une inflammation de la muqueuse, des paupières, des conjonctives, de la cavité buccale, et des organes génitaux. Il peut engager le pronostic vital, en raison du risque d’une défaillance multi systémique, avec la survenue des infections voir une septicémie[2][3]. Nous rapportons le cas d’une patiente ayant développé un syndrome de Lyell après avoir consommé de l’allopurinol pendant trois semaines.

OBSERVATION

Nous rapportons le cas d’une patiente âgée de 60 ans ayant comme antécédent une hypertension artérielle sous inhibiteur de l’enzyme de conversion, et un diabète type II sous insulinothérapie, et chez qui une hyperuricémie (100mg/l) a été découverte lors d’un bilan systémique, pour laquelle la patiente a été mise sous allopurinol 300 mg/j. Trois semaines plus tard, la patiente a présenté une symptomatologie faite par l’installation de lésions cutanées éruptives érythémateuses intéressant au début le visage et la partie supérieure du tronc puis elle s’est généralisée, avec gêne respiratoire. A l’admission au service de réanimation, l’examen clinique a trouvé une patiente consciente, une tension artérielle à 140/68 mmHg, une fréquence cardiaque à 73 batt/min, fébrile à 39 °C, polypnéique avec une fréquence respiratoire à 28 cycles/min. L’examen cutané a trouvé des lésions maculaires et maculopapuleuses érythémateuses se

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recouvrant de vésicules évoluant vers la nécrolyse et le décollement épidermique, de tailles variables, siégeant au niveau du visage, du dos et des membres inférieurs qui s’étendent jusqu’aux plantes des pieds avec signe de Nikolski positif (Figure 1 et 2).; l’évaluation de la surface cutanée brûlée (SCB) était de 45%. L’examen des muqueuses a trouvé une gingivo-stomatite.

Le bilan initial a écarté une infection, il comportait une numération formule sanguine ,et un ionogramme sanguin, un bilan de coagulation, un dosage de la C protéine réactive (CRP) et de l’ albuminémie, ainsi que des prélèvements bactériologiques cutanés et des hémocultures, et une radiographie pulmonaire. Le syndrome NET d’origine médicamenteuse semblait le diagnostic le plus probable et l’allopurinol le coupable probable. Tous les médicaments ont été interrompus, avec mise en condition de la patiente : un apport hydro électrolytique ainsi qu’un apport en albumine maintenant la pression veineuse centrale entre 5 et 8 mmHg. Une alimentation entérale a été débutée et une prévention de la maladie thromboembolique a été réalisée par héparinothérapie 0,4 ml/24 h, une corticothérapie, une surveillance de la glycémie avec insulinothérapie en fonction de la glycémie capillaire, une prévention de l’ulcère de stress par l’Oméprazole 40 mg/24 h et des soins cutanés ont été réalisés. L’ évolution a été favorable.

DISCUSSION

L’allopurinol est un inhibiteur de la xanthine oxydase, mis sur le marché il y a 40 ans pour le traitement de l’hyperuricémie symptomatique et l’un des principaux médicaments pourvoyeurs de toxidermies graves telles que le syndrome de Lyell, de Stevens-Johnson et de syndrome DRESS. La relation entre une mauvaise adaptation de la posologie en cas d’insuffisance rénale et une prescription dans l’hyperuricémie asymptomatique et l’apparition de ces toxidermies est bien établi.

Le syndrome de Lyell appelé aussi nécrolyse épidermique toxique est une réaction cutanéomuqueuse grave, souvent induite par certains médicaments, notamment l’allopurinol. McInnes et al. ont rapporté que 1,8%

d’un échantillon de patients sous allopurinol ont présenté un effet indésirable avec 1 patient sur 260 avait une réaction sévère (0,4%).[4] Le mécanisme est partiellement élucidé; cependant, les données existantes soutiennent la coexistence de trois mécanismes: les facteurs immunologiques, la prédisposition génétique et l’accumulation du médicament.

Facteurs immunologiques

La pathogenèse de la NET implique des processus immunologiques, en rapport avec une vascularite Figure 1 : Lésions cutanées associant bulles flasques et nécrose

épidermique.

Figure 2 : Lésions cutanées associant bulles flasques et nécrose épidermique réalisant un décollement en «linge mouillé» typique au niveau du dos.

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généralisée induite par une réaction de type III, caractérisée par la formation de complexes immuns qui précipitent dans l’endothélium vasculaire et conduisent à l’activation du complément et au développement des réactions inflammatoires en endo et en péri- artériolaire, ainsi le dépôt d’immunoglobulines (lg) G et le composant complémentaire C3 dans la membrane basale glomérulaire aboutit à une néphrite interstitielle, une vascularite généralisée et une artérite. En outre, D’autres preuves suggérant une étiologie humorale liées à des concentrations élevées d’IgE, le deuxième groupe de réactions immunologiques à médiation cellulaire ou de type IV (hypersensibilité retardée) impliquant des lymphocytes, soutenu par le test de désensibilisation, cette dernière risque d’engager le pronostic vital.[5] [6]

Prédisposition génétique

Roujeau et al. ont signalé une sensibilité accrue au développement de la nécrolyse épidermique toxique chez certaines personnes, probablement liée à l’antigène leucocytaire humain-B12. Les travaux génétiques ont permis d’établir un lien entre les groupes HLA et certains médicaments dans le syndrome de Lyell vue la forte association au sein de l’ethnie chinoise Han entre HLA-B*5801 et allopurinol. Enfin, il est possible qu’une infection virale ou un autre déficit antigénique déclenche une réponse immunologique anormale dirigée contre les propres antigènes de l’hôte. [7][8]

Accumulation d’allopurinol

L’oxypurinol est le métabolite direct de l’allopurinol ainsi responsable de la plupart des actions pharmacologiques, sa concentration sérique est fortement corrélée à la fonction rénale. L’accumulation d’allopurinol, liée soit à une surcharge ou une insuffisance rénale, est considérée comme un facteur de risque pour le développement de la NET [9][10]. Le tableau clinique du syndrome de Lyell est caractérisé par une éruption cutanée généralisée avec des macules érythémateuses, une fièvre, une leucocytose avec éosinophilie, voire une insuffisance rénale et hépatique avec notion de traitement par l’allopurinol. Sa prise en charge doit être instaurée en urgence dans une unité spécialisée et si une atteinte de la surface corporelle>

20% dans un service des brûlées. Les patients doivent être informés des éventuels effets indésirables du médicament et informés de l’arrêt de l’agent dès qu’ils surviennent

[11]. Un traitement symptomatique se base sur une réanimation cardio-vasculaire avec soins locaux pour éviter les complications (une décompensation systémique ou une infection), ainsi que la corticothérapie générale qui reste le principal traitement de fond. Les autres traitements immunosuppresseurs (cyclophosphamide, ciclosporine, anti-TNF) et les fortes doses d’immunoglobulines n’ont pas prouvé leurs efficacités.[12]

L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) [13] a élaboré les règles de bon usage de l’allopurinol :

• Ne pas instaurer de traitement en cas d’hyperuricémie asymptomatique,

• L’augmentation progressive de la posologie d’allopurinol lors de son instauration et ce chez tous les patients quelle que soit leur fonction rénale,

• Adapter la posologie usuelle en fonction de l’uricémie qui doit être régulièrement contrôlée,

• Connaître et informer les patients du risque de survenue de réactions cutanées graves,

• Informer les patients de la nécessité d’arrêter immédiatement le traitement par allopurinol en cas de toxidermie.

CONCLUSION

L’allopurinol est un médicament pourvoyeur potentiel de toxidermies graves. son indication doit être réfléchie et fondée sur les recommandations de bonne pratique. La reconnaissance rapide d’une lésion cutanée ou muqueuse non autrement expliquée dans les jours ou semaines suivant l’initiation de l’allopurinol doit être suivie de son arrêt immédiat et d’une consultation dans un hôpital afin de réduire la morbidité et la mortalité chez les patients.

CONFLIT D’INTÉRÊT

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflit d’intérêt.

RÉFÉRENCES

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2. J. ESTEVES, A. BAPTISTA, F. RODRIGO, et M. GOMES, « Dermatologia, 2e Edição, Fundação Calouste Gulbenkian /

», Lisb. 1992 1413 1417.

3. ROOK et WILKINSON, « Textbook of Dermatology, 8th

L. Taoubane, et al.

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6. M. Ridley, J. Mathews, et M. Seitz, « Desensitisation to allopurinol », Ann. Rheum. Dis., vol. 46, no 11, p. 875-876, nov. 1987, doi: 10.1136/ard.46.11.875-b.

7. T. N. Huynh et J. Revuz, « Genetic Susceptibility to », p. 3.

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