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La clause joyriding de l'assurance familiale: un intérêt plus limité qu'il n'y paraît

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(1)

ASSURANCE

R

.C

. VIE

PRIVÉE

La clause joyriding de l’assurance familiale :

un intérêt plus limité qu’il n’y paraît 

L’article 6, 1°, in ine de l’arrêté royal déterminant les conditions minimales de garantie de l’assurance R.C. vie privée impose la couverture des « dommages causés par des assurés qui conduisent un véhicule automoteur ou à rails sans avoir l’âge léga-lement requis pour ce faire, à l’insu de leurs parents, des personnes qui les ont sous leur garde et du détenteur du véhicule ». Connue sous l’anglicisme joyriding, la clause contractuelle reprenant cette disposition n’est pas toujours d’application aisée.

Introduction

Il n’est pas rare qu’un accident de la circulation soit causé par un conducteur qui, en raison de

son âge, n’est pas autorisé à conduire1. Dans un

tel cas de igure, le jeune intrépide se retrouve en principe dépourvu de couverture. Il s’expose soit à une action récursoire de l’assureur R.C. auto sur la base de l’article 25, 3, b du contrat

type automobile2, soit au recours subrogatoire

du Fonds commun de garantie belge, si le véhi-cule n’est pas assuré ou si l’assureur auto a vala-blement refusé d’intervenir en invoquant un vol du véhicule. Conscient de ce risque au moment de déinir les conditions minimales des polices

d’assurance R.C. vie privée3, le législateur belge

l’a expressément pris en compte dans la rédac-tion de l’article 6, 1°. Dans un premier temps, les assureurs familiaux sont autorisés à exclure

de leur garantie4 « les dommages découlant

de la responsabilité civile extracontractuelle soumise à une assurance légalement rendue

obligatoire », ce qu’ils font tous dans la pratique5.

C’est l’assurance automobile qui est surtout

visée6, comme le conirment, dans un second

temps, la suite de l’article et donc la clause qui nous intéresse, sorte d’exception à la possibilité d’exclusion.

Après un aperçu des conditions générales de l’assurance familiale (I), nous rappelons les conditions propres à la clause joyriding (II) ainsi que les dommages couverts (III). Nous analysons plus en profondeur les possibilités de mise en œuvre de la clause, en distinguant chacun des intervenants d’un accident de la circulation qui aurait un intérêt à s’adresser à l’assureur fami-lial (IV). Nous terminons par les possibilités de recours de ce dernier (V).

I. Conditions générales de

l’assurance familiale

Parce qu’elles sont susceptibles de poser quelques problèmes en cette matière, les condi-tions générales de la couverture R.C. vie privée méritent qu’on y revienne brièvement. Rappelons tout d’abord que l’objet de cette assu-rance se limite à la responsabilité extracontrac-tuelle résultant des articles 1382 à 1386bis du Code civil et des dispositions analogues de droit

étranger (article 1er de l’arrêté royal). C’est dès

lors à tort que l’application de la clause joyri-ding sera envisagée en cas d’action récursoire de l’assureur R.C. auto. Que cette action soit dirigée contre le preneur d’assurance ou le conducteur, sa nature contractuelle ne peut donner lieu à une intervention de l’assureur R.C. vie privée : l’appeler en garantie dans ce cadre devrait être théoriquement inopérant. Nous y reviendrons. Ensuite, sont seuls visés les accidents de la vie privée, à l’exclusion de ceux survenant dans un contexte professionnel. Il a par exemple été jugé que cette condition n’était pas remplie en présence d’un jeune garçon de 13 ans qui avait blessé mortellement un enfant en conduisant un tracteur, alors qu’il aidait ses parents dans le cadre de leur exploitation agricole (situation

assez fréquente)7. On pourrait néanmoins

discu-ter de la solution, car au moins un des assurés, en l’occurrence le ils aidant, n’intervenait pas dans le cadre de son activité professionnelle, mais donnait simplement un coup de main à

ses parents8.

Enin, le conducteur bénéicie de la qualité d’as-suré pour autant qu’il vive au foyer du preneur d’assurance (article 3, 2°). Il ne perd pas cette qualité s’il loge en dehors de cette résidence principale pour les besoins de ses études ou s’il s’en éloigne temporairement (participation à un stage ou un camp scout, par exemple). Des questions se posent en cas de divorce ou de séparation de corps des parents, lorsque celui

1 Pour une analyse plus globale de cette situation, A. CATALDO, « Le joyriding

ou la conduite d’un véhicule par un mineur à l’insu de ses parents », in Mineur fautif, mineur victime - Éléments de responsabilité et d’assurance, Limal, Anthemis, 2015, pp. 77-104. 2 Arrêté royal du 14 décembre 1992

relatif au contrat type d’assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs, M.B., 3 février 1993, ci-après « le contrat type ».

3 Arrêté royal du 12 janvier 1984 déterminant les conditions minimales de garantie des contrats d’assurance couvrant la responsabilité civile extra-contractuelle relative à la vie privée, M.B., 31 janvier 1984, ci-après « l’arrêté royal ».

4 À la diférence des dispositions du contrat type d’assurance automobile (Cass., 5 mars 2010, J.L.M.B., 2011, p. 2063), la jurisprudence n’établit aucune présomption d’applicabilité de ces clauses en faveur de l’assureur familial : celui-ci doit démontrer que la cause d’exclusion visée est bien mentionnée dans le contrat. 5 J. NICODÈME, « L’assurance R.C. familiale

devant le tribunal de la jeunesse », Pli jur., mars 2013, p. 36.

6 L’exclusion est rencontrée dès qu’existe l’obligation d’assurance, indiférem-ment de la souscription efective d’une couverture R.C. auto. Cela peut parfois poser question, mais l’enjeu est considérablement réduit depuis que la garantie auto a été étendue aux sinistres survenus sur les terrains privés, B. DUBUISSON, « L’assurance des

risques du mineur », J.D.J., 1997, p. 383, note 12.

7 Gand, 24 novembre 2005, NjW, 2007, p. 274, note I. BOONE ; Bull. ass., 2007,

p. 354.

8 D’ailleurs, « plusieurs compagnies étendent (…) leur garantie aux dommages qui seraient causés par des assurés mineurs à des tiers à l’occasion de services fournis, même à titre onéreux et de manière habituelle »,

(2)

qui héberge l’enfant responsable n’a pas sous-crit d’assurance familiale. Si l’enfant éloigné du foyer du parent preneur d’assurance bénéicie

généralement d’une extension de garantie9, des

questions peuvent se poser lorsqu’il cause un dommage à un bien (par exemple, le véhicule) appartenant à l’autre parent qui, lui, n’a plus la qualité d’assuré. On mesure en efet les risques

de collusion10.

II. Conditions propres à la

clause

La clause joyriding pourra jouer si l’assuré prouve la réunion des conditions suivantes :

A. Un conducteur engageant sa

responsabilité

Pour que la garantie s’applique, il faut que l’as-suré engage sa responsabilité (extracontrac-tuelle) en tant que conducteur. On renverra à l’importante jurisprudence ayant précisé cette

dernière notion11. Pour éviter bon nombre de

discussions, les contrats s’écartent parfois du libellé de l’arrêté royal et visent le jeune qui « déplace, manœuvre ou conduit » le véhicule,

ce qui doit être approuvé12.

L’indemnisation de la victime sur le seul fonde-ment de l’article 29bis de la loi du 21 novembre 1989 n’entre donc pas dans le champ d’applica-tion de la clause joyriding ; celle-ci n’a pas pour efet de transformer l’assureur R.C. vie privée en

un assureur automobile au sens de cette loi13.

Qui dit responsabilité dit réunion des conditions propres à engager celle-ci. À cet égard, se pose la question de l’application – délicate – de la théorie de l’alternative légitime, lorsque la faute reprochée au conducteur consiste dans le non-respect de l’âge minimum requis pour conduire. D’après cette théorie, il s’agit, pour apprécier la causalité d’un sinistre, de remplacer (et non d’éliminer) l’acte fautif par le comportement licite attendu. L’auteur de la faute n’est alors tenu que des conséquences qui ne se seraient pas produites en adoptant le bon comporte-ment, sans modiier les autres circonstances

concrètes du sinistre14. Les accidents de la

cir-culation constituent un domaine d’application privilégié de l’alternative légitime et la Cour de cassation a déjà été amenée à se prononcer sur le transport d’un passager avant l’âge autorisé. S’il est établi que le fait du transport du passager et l’inexpérience du conducteur n’ont eu aucune inluence sur l’accident, le lien causal ne devrait

pas être retenu15. La clause joyriding n’aurait alors

pas de raison d’être mobilisée.

B. Un conducteur n’ayant pas atteint

l’âge minimum requis pour conduire

L’assuré ne doit pas avoir atteint l’âge minimum requis pour conduire le véhicule avec lequel il cause l’accident. La situation ne correspond donc pas à toutes les hypothèses où l’assureur auto est susceptible d’exercer une action ré-cursoire en raison du non-respect des « condi-tions légales ou réglementaires pour pouvoir conduire » (article 25, 3, b), du contrat type). Si, tout en ayant atteint l’âge légal, le conducteur ne dispose d’aucun permis, la garantie de l’assureur familial ne peut être recherchée.

Nous reprenons ci-dessous l’âge auquel les principales catégories de véhicules deviennent

accessibles16 (à noter que le fait de « gonler » la

puissance du véhicule peut avoir pour efet de

le faire basculer de catégorie17) :

16 ans cyclomoteur de classe A ou B,

sans passager

16 ans tracteur agricole et forestier

de moins de 20 tonnes

17 ans formation autobus, autocars,

poids lourds

17 ans véhicule de catégorie B dans le cadre

d’une licence d’apprentissage

18 ans véhicule B, cyclomoteur avec passager

et moto de catégorie A1 (notamment) 20 ans moto de catégorie A2

21 ans véhicule et train de véhicules

MMA > 7,5 tonnes (en principe)

C. L’ignorance des personnes visées

Tout l’enjeu de la clause étudiée est de démon-trer que le conducteur n’avait pas été autorisé à conduire. L’emprunt du véhicule doit avoir lieu à l’insu de certaines personnes, à savoir les parents de l’assuré, les autres personnes qui l’avaient éventuellement sous leur garde (instituteur, grands-parents, baby-sitter…) et le détenteur du véhicule.

Si le jeune titulaire d’un permis passe le volant de son véhicule à un ami qui n’est pas en âge de conduire, ou si un père invite son ils mineur à déplacer le véhicule familial de quelques mètres,

il ne s’agit normalement pas de joyriding18.

V. CALLEWAERT, « L’assurance R.C. vie

privée : questions choisies à propos d’une indispensable assurance facultative », in La responsabilité civile des parents, Bruxelles, la Charte, 2006, p. 65, no 6.

9 Celle-ci est parfois subordonnée à des conditions propres à démontrer la persistance d’un lien étroit avec le preneur (lien de parenté, absence de ressources propres de l’enfant, célibat, etc.) ou est parfois accordée de plein droit pendant toute la durée de la minorité (J. NICODÈME, op. cit., p. 35).

10 V. CALLEWAERT, op. cit., p. 70, nos 13-14.

11 Voy. not. B. DUBUISSON, « Le passager

impétueux qui devient conducteur… deux fois puni », obs. sous Cass., 7 septembre 2015, J.L.M.B., 2015, pp. 2004-2008. L’auteur distingue l’appréciation de la notion dans le régime des usagers faibles, qui requiert d’imprégner une direction au véhicule en en ayant la pleine maîtrise, et au sens de l’article 3, § 1er, de la loi du 21 novembre 1989,

pour lequel la maîtrise du véhicule n’implique aucun élément de volonté (voy. les exemples et références cités, spéc. pp. 2005-2006).

12 V. CALLEWAERT, op. cit., p. 86, no 42.

13 N. DENOËL, « Les assurances de la

responsabilité privée », in Responsa-bilités - Traité théorique et pratique, titre VII, livre 71, Diegem, Kluwer, 1999, p. 48 ; P. COLSON, « L’assureur

R.C. vie privée peut-il être tenu sur la base de l’article 29bis de la loi du 21 novembre 1989 ? », obs. sous Civ. Mons, 9 avril 2008, J.L.M.B., 2011, pp. 2079 à 2082.

14 Voy. l’étude de R. JAFFERALI,

« L’alterna-tive légitime dans l’appréciation du lien causal », in Droit de la responsabi-lité - Questions choisies, CUP, vol. 157, Bruxelles, Larcier, 2015, p. 97. 15 Cass., 10 juin 2003, Pas., 2003, no 341 ;

Cass., 26 novembre 2011, R.G. no P.08.1009.F. ; R. JAFFERALI, op. cit.,

p. 141, no 33. En matière contractuelle,

le principe de l’application de bonne foi des conventions peut aboutir à la même solution, voy. Th. PAPART et

B. CEULEMANS, Vade-mecum du tribunal

de police, Waterloo, Kluwer, 2013, p. 273 (à propos de l’action récursoire de l’assureur auto, voy. infra). 16 Article 8.2 de l’arrêté royal du

1er décembre 1975 portant règlement

général sur la police de la circulation routière et de l’usage de la voie publique, M.B., 9 décembre 1975. 17 Th. PAPART, « Le jeune devant le

tribunal de police », in Responsabilités autour et alentours du mineur, Limal, Anthemis, 2011, p. 133.

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Notons qu’une clause qui ne se référerait qu’à l’ignorance dans le chef d’une des personnes visées par l’arrêté royal, ou, par exemple, du pro-priétaire du véhicule, serait parfaitement valable, l’assureur consentant par là une extension de

garantie par rapport aux conditions minimales19.

Si, comme nous allons le voir, la clause joyri-ding présente surtout un intérêt en cas de vol (d’usage) du véhicule, il importe de ne pas assi-miler totalement les deux notions. La condition de soustraction frauduleuse propre au vol n’est en efet pas toujours remplie. Le cas d’un mineur qui se voit conier les clés du véhicule familial et outrepasse ses prérogatives en en proitant pour faire un tour a ainsi fait l’objet d’apprécia-tions divergentes sur le plan de la qualiication

pénale20. En revanche, il est plus aisé d’y voir un

cas de joyriding, couvert par l’assurance R.C. vie privée : en étendant de sa propre initiative son périmètre de mouvement, le conducteur agit

bien à l’insu de ses parents21, sans pour autant

avoir soustrait le véhicule contre leur gré. La distinction entre l’examen du vol et du joy-riding découle de ce que l’arrêté se réfère à la conduite du véhicule : dès le moment où celle-ci a lieu dans des celle-circonstances inconnues des catégories de personnes visées, il semble que la clause doive jouer. En d’autres termes, l’examen ne se limite pas au moment où et aux conditions dans lesquelles l’assuré s’est emparé du véhicule. Lorsque le jeune est propriétaire du véhicule qu’il conduit (par exemple, transport d’un pas-sager sur son cyclomoteur avant 18 ans), faut-il considérer que la clause est inapplicable, le conducteur étant le détenteur du véhicule ? L’hypothèse clairement énoncée et délimitée par la disposition contractuelle (conduite à l’insu

du détenteur) n'est en efet pas rencontrée22. La

clause joyriding est d’ailleurs une exception au principe de l’exclusion des dommages causés par un véhicule automoteur et devrait, comme

telle, être de stricte interprétation23. Malgré tout,

sans doute pour des raisons d’opportunité, une partie de la doctrine et de la jurisprudence in-terprète diféremment l’arrêté royal, estimant plus raisonnable que la notion de détenteur renvoie à une autre personne que le conduc-teur. « Sinon, il faudrait admettre que le jeune se donne toujours une autorisation à lui-même et

que la clause ne trouve jamais à s’appliquer »24.

Il nous semble pourtant que la notion juridique de détenteur (qui doit être comprise au sens de

la R.C. vie privée, et non de la R.C. auto25) vise

en réalité le détenteur légitime du véhicule. À première vue, on ne voit pas qui d’autre que le propriétaire revêt cette qualité lorsqu’il s’agit

d’un mineur transportant un passager sur son scooter.

Voici un exemple de clause igurant dans les conditions générales d’une police Ethias : « En ce qui concerne les véhicules terrestres automoteurs ou sur rails soumis à une assurance légalement rendue obligatoire, la garantie n’est acquise que pour les dommages causés aux tiers par les assurés lorsqu’ils conduisent un tel véhi-cule sans avoir l’âge légalement requis pour ce faire et à l’insu de leurs parents ou des personnes qui les ont sous leur garde ».

On constate que la référence au détenteur est évacuée, ainsi que le débat susceptible d’en dé-couler : une extension de garantie est consentie par rapport au texte de l’article 6, 1°.

III. Dommages couverts

Au terme de l’article 5 de l’arrêté royal, les dom-mages tant corporels que matériels sont cou-verts par l’assurance R.C. vie privée.

Cependant, la garantie ne devrait pas permettre la prise en charge des dégâts au véhicule em-prunté, puisque l’article 6, 7°, prévoit que les dommages causés aux biens meubles qu’un assuré a sous sa garde peuvent être exclus. Or, juridiquement, le conducteur doit être consi-déré comme le gardien du véhicule. Ce n’était pourtant pas l’avis de l’Oice de contrôle des

assurances26. Du coup, les assureurs règlent en

général expressément la question dans leurs

polices27. Par exemple, pour reprendre la clause

issue de la police Ethias :

« La réparation des dommages occasionnés au véhicule utilisé dans ces conditions est égale-ment garantie pour autant qu’il appartienne à un tiers et que l’utilisation se soit faite à son insu ». La solution ne fait par contre aucun doute lorsque le véhicule appartient à un autre assuré en R.C. vie privée, notamment un parent. Les dommages, matériels ou corporels, causés au preneur d’assurance et aux personnes qui vivent à son foyer sont en efet exclus par l’article 6, 3°. On veut éviter les collusions frauduleuses, mais la question demeure délicate face aux dom-mages causés aux biens de l’ex-conjoint non

assuré (supra)28.

19 Ex. Liège, 17 janvier 2003, Bull. ass., 2003, p. 554.

20 Mons, 7 mars 1996, R.G.A.R., 1996, no 12695 ; Bruxelles, 24 décembre

1996, R.G.A.R., 1996, no 13057 ; Pol.

Liège, 4 septembre 2006, C.R.A., 2007, p. 247 ; Pol. Bruxelles, 26 octobre 2007, C.R.A., 2007, p. 144 ; Corr. Charleroi, 25 janvier 2008, Bull. ass., 2009, p. 45 ; Civ. Liège, 16 juin 2008, C.R.A., 2008, p. 419 ; Corr. Audenarde, 19 juin 2009, C.R.A., 2010, p. 195 ; Civ. Liège, 1er juin

2012, C.R.A., 2012, p. 302 ; Corr. Liège, 29 avril 2013, J.L.M.B., 2014, p. 113. 21 Dans le même sens, Civ. Liège, 1er juin

1990, Pas., 1991, III, p. 18, cité par V. CALLEWAERT, op. cit., no 42.

22 Liège, 17 janvier 2003, précité, p. 555, note H. ULRICHTS. En ce sens,

B. DUBUISSON, « L’assurance des risques

du mineur », op. cit., p. 395. 23 Encore une fois, il ne nous semble en

revanche pas correct de motiver cette exclusion en considérant qu’il ne peut y aller de joyriding en l’absence de vol (voy. Pol. Bruges, 18 avril 2002, R.W., 2003-2004, p. 878).

24 N. DENOËL, op. cit., p. 48 ; V. CALLEWAERT,

op. cit., no 42 ; J.-P. LEGRAND, « Votre

question - Notre réponse », For. ass., 2007, p. 103 ; Bruxelles, 23 avril 2001, R.G.A.R., 2002, no 13598.

25 Le détenteur est donc celui qui a la maîtrise juridique du véhicule (Gand, 3 mai 2004, J.J.P., 2004, p. 284) ; A. RONDAO ALFACE et Ch. VERDURE, « La

notion de détenteur en assurance R.C. auto », For. ass., 2014, no 143, p. 71.

26 Aujourd’hui intégré dans la FSMA. 27 N. DENOËL, op. cit., p. 49. Une telle

clause prévoyant une couverture du véhicule ne saurait toutefois primer sur l’exclusion générale de la respon-sabilité contractuelle (Gand, 4 mars 2010, Bull. ass., 2011, p. 52 : il s’agissait en l’espèce de dégâts matériels à un véhicule propriété de la société du père du conducteur). Pour un exemple d’exclusion, Civ. Mons, 9 avril 2008, J.L.M.B., 2011, p. 2077.

28 V. CALLEWAERT, op. cit., p. 70, nos 13-14,

qui suggère de modiier l’arrêté royal du 12 janvier 1984 en permettant l’exclusion des dommages matériels causés par un enfant mineur à l’un de ses parents, lorsque ceux-ci sont séparés ou divorcés.

(4)

IV. Mise en œuvre de la clause

A. Par la victime

La victime d’un dommage causé par un conduc-teur assuré en R.C. familiale peut exercer une

action directe contre cet assureur29. Ce droit

propre est simplement réduit à concurrence de la franchise que les assureurs familiaux ne manquent pas de prévoir dans leurs contrats. Dans la pratique, la victime d’un accident de la circulation est plus facilement au courant de l’existence et de l’identité de l’assureur auto du véhicule emprunté, que ce soit par les mentions du constat ou par la lecture du dossier répressif. C’est généralement contre cet assureur qu’elle dirige son action. Elle a d’autant moins d’inté-rêt à une interpellation de l’assureur familial qu’aucune franchise ne peut lui être opposée par l’assureur auto. Interroger de manière complète le responsable sur ses couvertures d’assurance permettra toutefois d’attirer son attention et d’éviter de multiplier les appels en garantie dans le cadre d’une éventuelle action en justice, ce qui

ne ferait que retarder l’issue du litige30.

B. Par le F.C.G.B.

Si l’assureur R.C. auto est inexistant ou a pu décli-ner toute garantie en établissant la réalité d’un vol, c’est le Fonds commun de garantie belge qui est amené à indemniser intégralement la victime

en cas de défaut du responsable31. Subrogé dans

les droits de la personne lésée, le Fonds peut

alors se retourner contre l’assureur familial32,

soit directement, soit à l’occasion de l’appel en garantie de cet assureur par le conducteur ou ses civilement responsables.

Si le Fonds a connaissance de l’existence d’une assurance vie privée dès avant l’indemnisation des victimes et que les conditions de la clause sont réunies, ne pourrait-il pas refuser tout bonnement son intervention ? Une première

lecture de l’article 19bis-11, § 1er, 4° de la loi du

21 novembre 1989 laisse penser que seule

l’as-surance automobile est concernée33. Ne faut-il

pas toutefois considérer que « la responsabilité civile à laquelle le véhicule peut donner lieu » est, pour le cas précis du joyriding, bel et bien couverte par une autre assurance?

Quoi qu’il en soit, c’est bien dans l’hypothèse d’un vol avéré du véhicule et d’un recours subro-gatoire du Fonds que la clause joyriding présente le plus d’intérêt, l’assuré étant alors valablement couvert (sous réserve de la franchise). De là à dire

que l’intérêt de la clause est limité à ce seul cas de igure, il n’y a qu’un pas...

C. Par l’assureur R.C. auto

En général, la victime du joyriding agit contre l’assureur R.C. auto, qu’elle puisse imputer une faute au conducteur ou qu’elle invoque sa qua-lité d’usager faible. L’assureur automobile peut-il ensuite s’adresser à l’assureur R.C. vie privée de son assuré ou de ses proches ?

1. Absence de droit propre

Signalons d’abord que la réunion des conditions de la clause joyriding n’induit aucune situation

de concours entre ces deux assurances34. S’il

a été contraint d’intervenir en vertu de

l’inop-posabilité des exceptions35, l’assureur

automo-bile n’en a pas pour autant accepté de couvrir le risque d’une conduite sans permis. Le contrat type qui prévoit expressément cette hypothèse de recours en est la preuve. Au terme de la clause joyriding, le risque est par contre bien couvert par l’assureur familial.

Cependant, l’assureur auto peut diicilement être assimilé à une personne lésée du seul fait qu’il est amené à exposer des débours en faveur d’une victime : il ne dispose donc d’aucun droit propre fondé sur l’article 150 de la loi relative

aux assurances36. Un autre fondement doit être

trouvé à son action, compte tenu des limites de l’action récursoire qui lui est normalement ouverte contre son assuré.

2. Intérêt limité de l’action récursoire

Cette action, fondée sur l’article 25, 3, b), du contrat type, permet à l’assureur automobile de se retourner contre le preneur d’assurance ou contre l’assuré conducteur qui ne respecte pas les conditions pour pouvoir conduire (à condition que ce dernier ne se soit pas rendu coupable d’un vol, auquel cas il ne peut être considéré comme assuré en vertu de l’article 3,

§ 1er, de la loi du 21 novembre 1989, et aucune

action contractuelle n’est envisageable contre

lui37). Ce recours est aujourd’hui largement

ad-mis comme étant automatique, en ce sens que le lien causal entre le manquement contractuel (le défaut de permis) et l’accident ne doit pas

être prouvé, sous réserve de l’abus de droit38.

Il faut toutefois relativiser l’intérêt pratique d’un recours exercé contre un jeune conducteur, pour d’évidentes raisons de solvabilité. Quant au recours contre les parents preneurs d’assu-rance, ceux-ci conservent, au terme du dernier alinéa de l’article 25, 3, la possibilité d’échapper à l’action récursoire en prouvant que la conduite

29 Article 150 de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances. 30 On peut déplorer que l’échange

de cette information repose en in de compte sur le bon vouloir des parties. Le problème est certes moins prégnant en cas d’accident de la route (vu la présence des assureurs auto ou du Fonds), mais la victime est souvent dépourvue lorsqu’il s’agit de savoir si le fautif est couvert par une assurance familiale, et si elle peut dès lors s’adresser à un débiteur solvable. Le problème est le même pour le conseil d’un jeune, qui n’aurait pas directement accès à l’information détenue par les parents. De la même façon qu’une recherche auprès du F.C.G.B. permet d’identiier l’assureur auto d’un véhicule, une solution serait de conier à un organisme neutre, tel le Fonds d’indemnisation des victimes d’actes intentionnels de violence, une mission de centralisation des don-nées et d’information des personnes intéressées. Mais ceci dépasse notre propos.

31 Article 19bis-11, § 1er, 4°, de la loi du

21 novembre 1989 relative à l’assu-rance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs. 32 Article 19bis-14, § 1er, de la loi du

21 novembre 1989.

33 Notamment au vu du renvoi à l’exclu-sion légalement permise du vol. 34 V. CALLEWAERT, op. cit., no 44 ; Ph. DE

THYSEBAERT, « Concours d’assurances :

conditions et solutions », For. ass., 2007, p. 41. Cela est conirmé par la Convention « Article 99 » d’Assuralia, disponible sur www.assuralia.be. 35 De mise dans les assurances

obliga-toires (article 151 de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances). 36 V. CALLEWAERT, op. cit., no 44.

37 Cass., 7 juin 2012, R.G. no C.11.0034,

Pas., 2012, I, p. 1314. Dans pareille hypothèse, c’est en qualité de garant d’une autre personne, valablement assurée, que l’assureur auto a dû indemniser la victime. 38 Cass., 19 juin 2009, C.R.A., 2009,

p. 375 ; Cass., 13 septembre 2012, R.G.A.R., 2012, no 14931 ; voy.

A. CATALDO, op. cit., pp. 88-90 et les

références citées. On tiendra compte désormais du libellé de l’article 152 de la loi relative aux assurances, qui limite le recours « à concurrence de la part de responsabilité incombant personnellement » aux assurés, et on renverra à ce qui a été dit supra à propos de l’alternative légitime.

(5)

a eu lieu à leur insu ou à l’encontre de leurs instructions… ce qui correspond justement à l’hypothèse du joyriding.

Quel que soit le cas de igure, l’action récursoire est de toute façon plafonnée par l’article 24 du

même contrat type39, sans compter l’exigence

de notiication préalable de l’intention d’exer-cer le recours dès la connaissance des faits le fondant (article 152 de la loi relative aux assu-rances) : à défaut de respecter cette condition dans les formes et les délais retenus par la

juris-prudence40, l’assureur automobile sera forclos.

Toutes ces raisons doivent l’inciter à rechercher une autre voie qui, idéalement, lui permettrait d’avoir pour interlocuteur un débiteur solvable, en la personne de l’assureur R.C. vie privée.

3. Subrogation dans les droits de l’assuré ou du tiers lésé

Par déinition, un assureur ne peut exercer d’ac-tion subrogatoire contre son propre assuré ; à défaut, le principe même de l’assurance serait méconnu. Il peut en revanche se retourner contre tout tiers (co)responsable. Dans l’hypo-thèse où, malgré un vol d’usage, l’assureur R.C. auto a été contraint d’intervenir en qualité de

garant des parents assurés41, il faut néanmoins

tenir compte de l’article 95, alinéa 4, de la loi relative aux assurances : « Sauf en cas de mal-veillance, l’assureur n’a aucun recours contre les descendants, les ascendants, le conjoint ou les alliés en ligne directe de l’assuré, ni contre les personnes vivant à son foyer, ses hôtes et les membres de son personnel domestique. (…) ». En principe, aucun recours subrogatoire n’est donc ouvert contre le conducteur responsable de l’accident s’il s’agit de l’enfant d’un assuré. L’alinéa 5 réintroduit cependant cette possibilité d’action « dans la mesure où leur responsabilité [celle des personnes visées à l’alinéa 4] est efec-tivement garantie par un contrat d’assurance », tel une assurance R.C. vie privée. Dans ce cas, l’assureur automobile est à nouveau autorisé à exercer le recours dont les parents disposent

théoriquement contre leur enfant fautif42. L’appel

en garantie qui ne manquerait pas d’être formé ensuite ou, plus logiquement, l’action directe qui peut être exercée contre l’assureur familial, témoignent alors de l’intérêt de la clause joy-riding pour l’assureur auto. Elle lui permet de retrouver un débiteur solvable, tout en évitant le régime strict de l’action récursoire.

Lorsqu’aucun vol du véhicule n’est à l’origine de la situation de joyriding, une action subroga-toire ne peut en revanche pas être envisagée. Le conducteur est en efet assuré en R.C. auto, ce

qui empêche de se retourner contre lui autre-ment que par la voie contractuelle. Quant à une action contre les parents, quand bien même ceux-ci seraient tiers au contrat d’assurance auto et engageraient leur responsabilité pour autrui, on ne voit pas de quel recours l’enfant fautif dis-poserait contre eux, que l’assureur subrogé serait autorisé à exercer.

À s’en tenir au libellé de l’article 95, la subroga-tion de l’assureur doit en efet s’envisager « dans les droits et actions de l’assuré », et non de la personne lésée comme c’est le cas pour le Fonds commun. Mais sans compter sur une éven-tuelle subrogation conventionnelle, toujours possible, d’autres justiications au recours ont été décrites par la doctrine, comme celle tirée

de l’article 1251, 3°, du Code civil43 : l’assureur

auto étant, par l’action directe que la victime est en droit d’exercer contre lui, l’un des débiteurs de l’indemnité, il serait subrogé dans les droits de cette victime contre les autres débiteurs de l’indemnité, au rang desquels igure l’assureur R.C. vie privée tenu de couvrir le joyriding. Ce fondement permettrait donc en toute hypothèse à l’assureur R.C. auto de se retourner contre l’assureur R.C. vie privée après avoir indemnisé le tiers lésé.

Les choses sont plus simples dans le cadre du régime d’indemnisation des usagers faibles,

puisque l’article 29bis, § 4, alinéa 1er, fait

expli-citement référence à une subrogation dans les droits de la victime contre les tiers responsables en droit commun. Encore faut-il, comme déjà exposé, que le conducteur engage sa responsa-bilité de droit commun dans l’accident.

D. Par l’assuré

1. Clause inopérante en cas d’action récursoire

En leur qualité d’assurés R.C. auto, l’auteur d’un joyriding et ses parents s’exposent, on l’a dit, à une action récursoire. En parcourant les conditions générales de leur police vie privée, ils auront alors naturellement tendance à vou-loir appeler en garantie leur assureur familial. Sans succès.

Certains auteurs ont écrit qu’il entre « dans l’objet et le champ d’application de l’assurance R.C. familiale de garantir l’assuré des réclama-tions qui lui sont adressées par un autre assureur,

dans le cadre d’une action récursoire »44. Ils nous

semblent perdre de vue que l’objet de cette as-surance est avant tout limité à la couverture de la responsabilité extracontractuelle, alors que la nature contractuelle de l’action récursoire

39 Le recours s’exerce intégralement si les sommes formant l’objet du recours n’excèdent pas globalement 10.411,53 EUR. Il ne s’exerce qu’à concurrence de la moitié desdites sommes lorsqu’elles excèdent 10.411,53 euros avec un minimum de 10.411,53 EUR et un maximum de 30.986,69 EUR.

40 Ainsi, lorsque le recours est dirigé contre un assuré mineur, la notiication doit être adressée aux parents en leur qualité de représentants légaux de l’enfant ; B. CEULEMANS et J. TINANT,

« L’ac-tion récursoire : petit tour d’horizon », in Les recours de l’assureur, Louvain-la-Neuve, Anthemis, 2009, p. 42. 41 Cass., 10 septembre 1991, Justel

no F-19910910-10, Pas., 1992, I, p. 19.

42 Cass., 20 janvier 2000, R.G.A.R., 2001, no 13427 ; P. VAN OMMESLAGHE, Traité de

droit civil, t. II, Les obligations, Bruxelles, Bruylant, 2013, pp. 1343-1345, no 905.

43 J.-L. FAGNART, Traité pratique de droit

commercial, t. III, « Droit privé des assu-rances terrestres », 2e éd., Waterloo,

Kluwer, 2011, pp. 381 et 382. Voy. aussi J. WILDEMEERSCH et J. LOLY, « La

subroga-tion de l’assureur », in Les recours de l’assureur, Louvain-la-Neuve, Anthemis, 2009, p. 63 ; Th. MALENGREAU, « Le recours

subrogatoire de l’assureur fondé sur l’article 41 de la loi du 25 juin 1992 et la délicate limite du tiers respon-sable », obs. sous Cass., 5 novembre 2012, J.L.M.B., 2014, p. 843. 44 B. DUBUISSON, « Action récursoire de

l’assureur automobile contre les parents du mineur, auteur de l’acci-dent », obs. sous Liège, 6 février 1996, J.T., 1996, p. 526. Voy. aussi L. DONNET,

« L’action récursoire dans presque tous ses états », R.G.A.R., 2012, no 14839 ;

Th. PAPART, op. cit., p. 135 ; Cass., 21 mai

1993, Bull. ass., 1995, p. 126, note N. DENOËL.

(6)

n’est plus contestée45. Nous pensons donc que

l’assureur R.C. vie privée pourrait, dans ce cadre,

valablement refuser sa garantie46.

La conséquence est à relativiser en ce qui concerne les parents, car l’exception au recours découlant de l’article 25, 3°, dernier alinéa, du contrat type fait double emploi avec la clause

joyriding47 : soit ils ne prouvent pas que la

conduite a eu lieu contre leurs instructions ou à leur insu, auquel cas la couverture R.C. vie privée n’aurait pu davantage être mobilisée ; soit cette preuve est rapportée, et dans ce cas la clause est superlue, vu l’échec de l’action récursoire. Mais le conducteur ne dispose, pour sa part, d’aucune échappatoire. De son point de vue, il vaudrait mieux, paradoxalement, soutenir la thèse du vol, pour faire obstacle à l’action récursoire (puisque celle-ci ne peut être dirigée que contre un

as-suré, ce que n’est plus alors le conducteur)48

Une fois de plus, le cas du mineur transportant un passager permet de mesurer l’incidence du « trou » de garantie ainsi révélé : après avoir in-demnisé les victimes, l’assureur auto exerce une action récursoire contre le conducteur, sans que celui-ci ne puisse s’y opposer et sans qu’il puisse invoquer le bénéice de sa protection vie privée.

2. Appel en garantie dans les autres cas de igure

L’appel en garantie de l’assureur R.C. vie privée en cas d’action subrogatoire du Fonds est inale-ment le seul cas où la clause présente un intérêt du point de vue de l’assuré. Cet intérêt est pra-tiquement limité aux situations où l’auteur du joyriding s’est rendu coupable du vol du véhicule d’une personne n’engageant aucune responsabi-lité dans l’accident. Et vu la propension, en juris-prudence, à retenir la responsabilité des parents du fait de leur enfant, il sera rare que l’assureur auto puisse décliner sa garantie et que le Fonds soit par conséquent amené à intervenir, en cas d’emprunt du véhicule familial par un mineur. Nous avons vu qu’en application de l’article 95, alinéa 5, de la loi du 4 avril 2014, les ascendants ou descendants d’un assuré automobile pou-vaient encore faire l’objet d’une action subroga-toire. Puisque pareil recours n’est possible que dans « la mesure où la responsabilité (…) est garantie » par l’existence d’une assurance fami-liale, il s’agira toujours d’une opération blanche dans le chef de l’assuré, dont le patrimoine ne sera pas touché (pas même à concurrence de la franchise). Plus encore, « les inconvénients psy-chologiques sont absents, le recours s’exerçant contre un autre assureur par la voie de l’action

directe »49.

V. Recours de l’assureur R.C. vie privée

L’assureur R.C. vie privée étant précisément tenu de couvrir le risque étudié, la simple survenance de celui-ci ne peut fonder un quelconque re-cours contre ses assurés, que ce soit le conduc-teur lui-même ou ses parents. Seul un recours subrogatoire (contributoire) est envisageable en présence de tiers coresponsables.

Le joyriding peut toutefois survenir dans des cir-constances de déchéance de la garantie familiale, justiiant un recours contre le conducteur auteur

d’un de ces manquements contractuels50. On

peut ainsi envisager une action récursoire pour un des motifs de faute lourde énumérés aux conditions générales du contrat (article 6, 6°, de l’arrêté royal) : au rang de ceux-ci, l’ivresse n’est sans doute pas un cas d’école, vu le contexte dans lequel est susceptible de se produire un emprunt non autorisé de véhicule (sortie entre amis, soirée, transgression de l’interdit…). Citons également les dommages résultant de paris ou déis, souvent exclus contractuellement. Dans tous ces cas de igure, malgré l’opposabilité de principe des exceptions dans les assurances facultatives, l’assureur est tenu d’intervenir comme garant des parents civilement respon-sables ; la déchéance de garantie est en efet

per-sonnelle à l’auteur du manquement51. Le recours

est ensuite possible contre l’assuré fautif, pour autant qu’il ait atteint l’« âge du discernement » (en général cet âge est contractuellement ixé à 16 ans, parfois 18), dans les limites inancières

prévues à l’article 752.

Conclusion

Si un assuré en R.C. vie privée cause un accident alors qu’il conduit un véhicule sans avoir l’âge requis, le dommage qui en découle est norma-lement couvert, pour autant que les parents, les personnes qui avaient le jeune sous leur garde et le détenteur juridique du véhicule (la condition relative à cette dernière personne est discutée) aient ignoré cette conduite.

Le caractère obligatoire de l’assurance R.C. auto limite toutefois la pertinence de la clause joy-riding. Si certains assimilent cet anglicisme au vol d’usage, c’est en raison de la seule situation dans laquelle, en déinitive, la clause présente un véritable intérêt pour l’assuré : celle du vol du véhicule d’une personne n’engageant en rien sa responsabilité dans l’accident. Le Fonds commun amené à intervenir ne manquera pas d’exercer son action subrogatoire, et la clause pourra jouer pleinement son rôle.

45 B. DUBUISSON et V. CALLEWAERT, « Les

recours de l’assureur après indemnisa-tion », in La loi sur le contrat d’assurance terrestre - Bilan et perspectives après 20 années d’application, Bruxelles, Bruylant, 2012, p. 187.

46 Pol. Charleroi, 26 juin 2007, inédit, R.G. no 04A407.

47 V. CALLEWAERT, op. cit., no 39 ; B. DEWIT et

C. VAN GHELUWE, « L’action récursoire en

assurance R.C. auto », in L’assurance R.C. auto - Les 25 ans de la loi du 21 novembre 1989, Limal, Anthemis, 2014, p. 199.

48 A. CATALDO, op. cit, p. 104.

49 M. FONTAINE, Droit des assurances, 3e éd.,

Bruxelles, Larcier, 2006, p. 366, no 590.

50 Sur la nature récursoire ou subro-gatoire du recours, D. D’HARVENG, « Le

recours de l’assureur R.C. vie privée en cas de faute intentionnelle du mineur : la in de la controverse ? », in Mineur fautif, mineur victime, op. cit., pp. 105-130.

51 Cass., 25 mars 2003, R.D.C., 2003 p. 669 ; Cass., 4 juin 2012, R.G.A.R., 2013, no 15030.

52 « Lorsque les dépenses nettes ne sont pas supérieures à 11.000 EUR, la subrogation ou le recours peut s’exercer intégralement ; lorsque les dépenses nettes sont supérieures à 11.000 EUR, ce dernier montant est augmenté de la moitié des sommes dépassant 11.000 EUR. La subrogation ou le recours s’élève à un montant maximum de 31.000 EUR ». On notera que la formulation est diférente de celle de l’article 24 du contrat type automobile.

(7)

Ce ne sera pas le cas lorsque c’est l’assureur auto-mobile qui doit indemniser les victimes : d’une part, le caractère contractuel de l’action récur-soire qui s’ensuivrait empêche en principe l’appel en garantie de l’assureur R.C. familiale ; d’autre part, l’assureur auto ne peut envisager un recours subrogatoire que dans la mesure où, précisément, la responsabilité des tiers visés (ascendants ou descendants non assurés) est couverte par un contrat d’assurance. Si la clause sortira alors ses efets, c’est uniquement au bénéice de l’assureur R.C. auto.

La présente contribution avait pour but de confronter les intérêts en présence avec les solutions qu’ofre cette disposition particulière de

l’assurance familiale. Pour réduire au maximum les trous de garantie, les intervenants d’un accident de la circulation seront bien inspirés d’échanger un maximum d’informations avant de s’engager dans une procédure judiciaire. La pratique tend en efet à montrer que les assureurs R.C. vie privée acceptent assez facilement la prise en charge lorsque les conditions de leurs polices sont réunies. Mais encore faut-il avoir connaissance de leur existence et les interpeller en temps utile. À défaut, l’appel en garantie formé dans le cadre d’une procédure ultérieure pourrait échouer, indemnités de procédure à la clé.

Andrea CATALDO

Assistant à l’Université de Namur Avocat au barreau de Namur

Règlement (UE) 2016/679 du Parlement euro-péen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abro-geant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données) (J.O.U.E., L 119 du 4 mai 2016)

Ce règlement, qui est entré en vigueur le 25 mai 2016, sera applicable à compter du 25 mai 2018, remplacera à cette date la loi belge du 8 décembre 1992 sur la protection de la vie privée et abrogera la directive 95/46/CE.

Arrêté royal du 27 avril 2016 modiiant l’arrêté royal du 3 août 2007 concernant la prévention et la réparation des dommages environnemen-taux lors de la mise sur le marché d’organismes génétiquement modiiés ou de produits en contenant (M.B., 13 mai 2016)

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Avis no 37 du 22 avril 2016 de la Commission

des pensions complémentaires – Introduction de nouvelles dispositions telles que visées par l’article 27, § 4 (de la LPC) dans des règlements

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jan-vier 2016 ou instaurés à partir du 1er janvier 2016

Cet avis unanime, consultable sur le site de la FSMA, considère que la possibilité d’instaurer des dispositions dérogatoires à l’interdiction de prévoir des encouragements à la sortie ou à l’anticipation d’une mise à la retraite avant l’âge légal, pour les personnes qui atteindront 55 ans au 31 décembre 2016, peut être réservée aussi bien dans des nouveaux règlements de pension que

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