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Jouer pour s’approprier des chants et danses traditionnels (Bénin, Côte-d’Ivoire)

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Cahiers d’ethnomusicologie

Anciennement Cahiers de musiques traditionnelles

 

31 | 2018

Enfants musiciens

Jouer pour s’approprier des chants et danses traditionnels (Bénin, Côte-d’Ivoire)

Francis Corpataux

Édition électronique

URL : http://journals.openedition.org/ethnomusicologie/2988 ISSN : 2235-7688

Éditeur

ADEM - Ateliers d’ethnomusicologie Édition imprimée

Date de publication : 10 décembre 2018 Pagination : 217-232

ISBN : 978-2-88474-478-2 ISSN : 1662-372X Référence électronique

Francis Corpataux, « Jouer pour s’approprier des chants et danses traditionnels (Bénin, Côte- d’Ivoire) », Cahiers d’ethnomusicologie [En ligne], 31 | 2018, mis en ligne le 10 décembre 2020, consulté le 02 avril 2021. URL : http://journals.openedition.org/ethnomusicologie/2988

Article L.111-1 du Code de la propriété intellectuelle.

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Jouer pour s’approprier

des chants et danses traditionnels (Bénin, Côte-d’Ivoire)

Francis Corpataux

L

es enfants et les adolescents sont-ils encore les porteurs et, surtout, les pas- seurs du patrimoine musical hérité de leur communauté ? Telle est la pré- occupation qui anime mon parcours dans l’univers des musiques traditionnelles chantées ou jouées par des enfants et des adolescents.

Autrement dit, quels sont les rapports que les enfants entretiennent avec leur patrimoine ? Est-ce qu’ils le transmettent tel qu’ils le reçoivent ? Est-ce qu’ils le transforment au gré de l’évolution des modes de vie auxquels ils sont confrontés ? Ou encore, est-ce qu’ils le rejettent parce que l’expression de ce patrimoine leur apparaît déconnectée des réalités du présent ?

Lors de mes trois derniers séjours en Côte-d’Ivoire et au Bénin, des chefs de villages, des maires, des maîtres de rituels ont souligné, à plusieurs reprises, une baisse générale d’intérêt pour les modes d’expression musicale traditionnelle et déploraient aussi qu’il ait fallu la présence dans leur village d’un étranger pour rappeler aux membres de la communauté la valeur identitaire de leur patrimoine et l’importance de le perpétuer.

Les pièces enregistrées et filmées en Côte-d’Ivoire et au Bénin, entre 2013 et 2017, nuancent heureusement les propos de ces observateurs locaux, mais ne les démentent pas. Sur le terrain, l’approche consiste à demander aux enfants s’ils connaissent des chants, des pièces instrumentales ou des danses qui sont en rapport avec des événements saisonniers, festifs, rituels, incanta- toires, ludiques auxquels ils participent activement ou comme observateurs. Les commentaires des adultes ou leurs réactions spontanées donnent des indices qui permettent de savoir si l’interprétation des pièces présentées s’inscrit dans la continuité des traditions ou si elle répond à des critères de complaisance ou de commercialisation. Quatre séquences mettent en évidence la transmission d’un patrimoine musical et son appropriation par des enfants.

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214 Cahiers d’ethnomusicologie 31/ 2018

Le premier extrait présente une simulation ludique de la Danse de la panthère jouée spon- tanément par des enfants. Cette danse, inter- prétée généralement par des adultes, s’inscrit dans le cadre de divers événements à caractère festif ou rituel. Son origine provient des Sénoufos du nord de la Côte-d’Ivoire, mais on la retrouve sous différentes formes dans plusieurs ethnies de l’Afrique de l’Ouest. Cette séquence enregistrée à Mankaibly, un village wobé à l’ouest de la Côte-d’Ivoire (mars 2017) montre l’excitation des enfants qui crient, dansent, frappent des mains face à cette panthère qu’ils tentent de provoquer sans aucune autre intention que celle de jouer par imitation des adultes.

Le chant des enfants du monde (Bénin et Côte d’Ivoire), quatre séquences : 1. La Danse de la panthère ; 2. Gbonhéba ; 3. Tibenti ; 4. Edjigame.

Document Francis Corpataux.

Fig. 1. Gbonhéba, jeune femme et fillettes annonçant une naissance. Bedi Goazon (département de Guiglo), Côte d’Ivoire. Photo Francis Corpataux, 2017.

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Une deuxième séquence intitulée Gboheba, terme au double sens d’ac- couchement et de bonheur, présente une jeune femme qui annonce que sa belle-sœur a donné naissance à une fille (Bedi Goazon, village guéré de la Côte- d’Ivoire, avril 2017). Elle interpelle les personnes présentes pour fêter avec elle en chantant et en dansant avec un groupe de fillettes maquillées d’argile blanche, le kaolin. Dans des circonstances de mariages, de naissances, d’accueil de visi- teurs ou d’autres événements heureux, adultes et enfants s’enduisent de kaolin, soit en dessinant des motifs géométriques sur le visage et sur le corps, soit en s’en couvrant sans recherche d’esthétisme. Entre les chants de jubilation, la chan- teuse s’adresse à la population pour décrire le déroulement de la grossesse et de l’accouchement.

Suit une séquence en lien avec les rituels de funérailles. Tibenti est une danse enregistrée en avril 2013 à Koussougou, une communauté otamari de l’Ata- cora au nord du Bénin. Elle est exécutée en défilé lors des funérailles ou pour mani- fester la satisfaction, s’il y a lieu, de la fin des récoltes. Les danseurs portent des accessoires hétéroclites, des masques, des crânes de chèvres ou de bœufs, des tenues vestimentaires extravagantes et inattendues dans ce contexte. Les enfants ont le droit de jouer à reproduire cette danse, mais ils ne sont pas autorisés à faire le tour des tambours s’ils ne sont pas initiés. Un espace proche des percussions est assigné pour que chaque membre du défilé puisse effectuer sa propre danse.

Fig. 2. Tibenti, danse exécutée à la fin d’un deuil ou lors de rituels initiatiques. Koussougou (département d’Atacora), Bénin. Photo Francis Corpataux, 2013.

Fig. 3. Edjigame, chant d’accueil avec danses.

Gandjazoumé (département du Mono), Bénin.

Photo Francis Corpataux, 2015.

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La dernière vidéo, Edjigame (« Je ne veux pas être en retard ») a été réa- lisée à Gandzazoumé dans la province du Mono au Bénin en mars 2015. Elle illustre l’atmosphère que la présence de visiteurs a suscitée dans le village. Les deux fillettes qui ébauchent des pas de danse mettent en évidence l’appren- tissage par imitation des pratiques culturelles dès la petite enfance. La fillette la plus âgée esquisse des mouvements en coordination avec la musique avant d’avancer vers le centre du cercle.

Ces quelques exemples collectés en milieux ruraux assez éloignés des villes et peu affectés par des développements économiques, technologiques ou sociaux démontrent que le transfert par imprégnation est encore présent et fonctionnel, mais la réalité est différente en milieu urbanisé. Là, selon moi, le patrimoine traditionnel s’étiole par oubli ou par rejet ou alors il devient objet de recomposition et d’enseignement académique aux fins de conservation, de folk- lorisation ou de commercialisation.

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