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FAUCHÉS EN PLEINE GLOIRE

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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FAUCHÉS EN PLEINE GLOIRE

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Du même auteur

LES TRIOMPHES DE L'ÂGE, Éditions Stock.

ITINÉRAIRES, Éditions l'Atelier.

DE LA PETITE REINE AU CHEVALET. (Prix Paul Guth, 1992), Éditions N.E.L.

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Robert Griffon

Fauchés en pleine gloire

100 destins célèbres

Stock

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Editions du Club France Loisirs, Paris avec l'autorisation des Editions Stock

ISBN : 2-7242-8270-1

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La Bibliothèque nationale nous a présenté une exposition sur « Le printemps des génies. » Il s'agissait d'évoquer les grands esprits, les fortes personnalités qui se sont affirmées dans leur jeune âge, pressés peut-être par le destin de dire très vite ce qu'ils avaient à dire. Une exposition sur les « morts trop tôt ».

Robert Griffon a eu l'idée de reprendre le thème pour en faire un livre.

Travail qui frappe par sa diversité, car on s'aperçoit vite que les grandes figures disparues entre trente et quarante ans sont légion, et ont souvent bien peu en commun. Néron et Claude François, le Christ et des chanteuses de rock... L'âge de la disparition est-il vraiment un critère valable à lui tout seul ?

Mais l'hétérogénéité peut devenir un attrait. Et le lecteur lira ce livre comme on regarde une collection de tableaux, de portraits, de gravures de personnages étonnants ou émouvants. Robert Griffon est un peintre.

Jean-François DENIAU de l'Académie française

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Nous tenons particulièrement à remercier toux ceux qui ont bien voulu nous aider à l'élaboration de cet ouvrage :

Gilles LAMBERT, Emmanuel SCHWARTZENBERG, Jacques DHAUSSY, Yann LE PICHON, Jacques AUGENDRE, Alain RIVIÈRE, Pierre MEZINSKI, Georges SARZOTTI, Jeannine JOUANDIN, Francis LECOUVREUR, Jean-Claude LACHENAL, Paul CALLENS, Philippe AUGE, Stéphane QUESSARD, AQUALONG à Bourges, Luc VARENNE, Ferdi- nand PROUTEAU, Jean FAVIÈRE, Jean-Yves RIBAULT, Maurice MARQUET, Patrice EUVRARD.

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Toutes les époques possèdent leurs célébrités, leurs héros légendaires, leurs génies précoces. Certains étonnent par leur audace, d'autres par leurs capacités prodigieuses dans l'art, les sciences ou le sport. Leur réputation fait tache d'huile et leur épopée, source d'espérance, sert de modèle à ceux qui éprouvent les mêmes passions.

Pour quelques-uns, la popularité est venue par les chemins curieux des hasards de la vie, à leur naissance ou par leur mariage, alors que la plupart ont forgé seuls leur destin. Beaucoup, dès leur jeunesse, ont respiré le parfum de la gloire et entendu les trompettes de la renommée, pour certains la consécration sera tardive ou même posthume.

Tous ceux qui sont présentés ici, n'ont pas laissé à la vie le temps de les user. Ils disparurent avant quarante ans, frontière doublement symbolique pour les anciens : d'une part la colonne brisée des nécropoles qui signifiait la jeunesse du disparu, et d'autre part l'âge canonique reconnu par l'Église.

Ces héros forment les maillons d'une chaîne ininterrompue. Représen- tatifs de leur époque, ils racontent à leur façon et par leur éclat l'histoire des hommes. Les leçons qu'ils donnent ont souvent valeur exemplaire, laissant toutefois planer l'interrogation : leurs destinées n'ont-elles pas un goût d'ina- chevé?

Comme toute sélection, le choix des biographies, volontairement anec- dotiques, peut sembler arbitraire. Mais la liste a essayé d'obtenir un harmonieux équilibre entre le présent et le passé ainsi qu'entre les différents domaines où le talent de ces immortels s'est exercé.

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Biographies classées par thèmes

Rois et reines

Aménophis IV 136

Atahualpa 143

Astrid 77

Anne Boleyn 68

Charles VIII 53

Cléopâtre 310

Dagobert 224

Henri III 271

Louis XVI 290

Napoléon II ... 27

Néron 99

Politiques

Lucrèce Borgia 315

Buckingham 227

Georges Danton 160

Che Guevara 331

Patrice Lumumba 210

Evita Peron 146

Maximilien Robespierre 241

Militaires

Alexandre le Grand 118

Louise de Bettignies 300 François de Charette 122

Francis Garnier 163

Georges Guynemer 30

Lazare Hoche 71

Vercingétorix ... 43

Écrivains

Anne Frank 13

Robert Brasillach 207

Emily Brontë 90

Cyrano de Bergerac 231

Alain-Fournier 56

Alfred Jarry 166

Katherine Mansfield 169

Alexandre Pouchkine 280

Raymond Radiguet 24

Boris Vian 327

Simone Weil ... 172

Poètes

Guillaume Apollinaire 297 Guillaume Du Bellay 187

Lord Byron 244

André Chénier 105

Garcia Lorca 303

Arthur Rimbaud 287

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Peintres

Frédéric Bazille 65

Le Caravage 274

Théodore Géricault 125

Amadeo Modigliani 197

Raphaël 268

Georges Seurat 111

Henri Toulouse-Lautrec 254

Vincent Van Gogh 283

Antoine Watteau 237

Musique

Daniel Balavoine 157

Georges Bizet 251

Frédéric Chopin 321

Claude François 337

George Gershwin 307

Janis Joplin 62

Jimi Hendrix 59

Bob Marley 265

Wolfgang Amadeus Mozart 191

Charlie Parker 175

Henry Purcell 234

Otis Redding 50

Franz Schubert 108

Aventures

René Caillié 293

Philippe de Dieuleveult 181

Youri Gagarine 153

Louis Mandrin 84

Jean Mermoz 203

Charles Nungesser 200

Sports

Hélène Boucher 47

Jean Bouin Marcel Cerdan 149 40 Jim Clark Alain Colas 129 217

Roland Garros 93

Ayrton Senna 178

Suzanne Lenglen 324

Manolete 97

Tom Simpson 81

Sciences et Religion

Xavier Bichat 87

Bernadette Soubirous 194

Sadi Carnot 248

Évariste Galois 21

Jeanne d'Arc 16

Jésus 139

Martin Luther King 334

Blaise Pascal 317

Pic de la Mirandole 102

Thérèse de l'Enfant-Jésus 33

Spectacles

James Dean 36

Patrick Dewaere 221

Adrienne Lecouvreur 277

Bruce Lee 133

Thierry Le Luron 184

Jane Mansfield 213

Marilyn Monroe 261

Gérard Philipe 257

Rudolph Valentino 115

Jean Vigo 74

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A n n e F r a n k

19 2 9 — 19 4 5

Un journal pour l'éternité

A

la fin de la dernière guerre, la lecture du journal de cette jeune fille, rédigé pendant qu'elle était cachée à Amsterdam avec sa famille lors de l'occupation nazie, fit pleurer le monde entier. Cette émouvante confession révéla la souffrance et l'angoisse des familles juives, dont beaucoup périrent tragiquement dans l'horreur des camps de concentration.

Anne Frank naît à Francfort-sur-le-Main le 12 juin 1929, deux ans après sa sœur Margot. Son père, Otto, a épousé en 1925 Edith Hollander, originaire d'Aix-la-Chapelle, descendante d'une vieille famille israélite de banquiers et d'hommes d'affaires.

À Amsterdam, M. Frank dirige la succursale de Travies, petite société de produits alimentaires dont le siège est à Cologne. Comme de nombreux Juifs allemands, il s'est réfugié en Hollande en 1933, au moment où Hitler accédait au pouvoir. Il vend avec bonheur aux ménagères des ingrédients à base de pectine, et des recettes pour fabriquer des confitures. Plus tard, un associé, van Daan, lui fera distribuer des épices.

L'année suivant son arrivée, Anne fréquente le jardin d'enfants de l'école Montessori, où elle apprend le néerlandais. On la trouve sage, obéissante, et fort curieuse.

En 1938, deux de ses oncles maternels quittent l'Allemagne pour gagner les USA, peu de temps avant la « Nuit de cristal » du 10 novembre 1938, au cours de laquelle nombre de magasins israélites sont détruits, sur un fond d'incendie et de scènes de violence.

Anne a neuf ans. Petite et mince, ses grands yeux gris-vert toujours en éveil, elle porte des robes imprimées ornées d'un col blanc. Une barrette divise ses cheveux courts séparés par une raie. Gaie et espiègle, elle aime jouer au

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théâtre à l'école, et imiter le cri du chat. Cependant, comme toute la famille, elle suit, tourmentée la situation outre-Rhin.

La Travies se développe, et s'installe en janvier 1940 dans un quartier d'entrepôts, au 263, Prinsengracht, dans une vieille maison à pignon en briques rouges.

Le 10 mai 1940, l'Allemagne lance sa grande offensive. La Hollande est rapidement envahie et la famille royale se réfugie en Angleterre. Avec inquié- tude, Anne et tous les siens voient les soldats allemands chaque jour. Mais ce n'est qu'à partir de l'hiver, après le recensement, que les brimades commencent pour se transformer peu à peu en persécutions.

Interdiction de monter dans un tramway, de conduire une voiture, de sortir après huit heures du soir, d'aller dans un lieu public de divertissement, de pratiquer le sport. En septembre Margot et Anne doivent quitter leur école, pour se rendre dans un lycée juif.

Papa Frank change les statuts de sa société en décembre 1941, et nomme des amis chrétiens aux postes officiels. Au printemps 1942, tous les citoyens d'origine juive doivent porter une étoile jaune à six branches, à la hauteur du cœur. Ils doivent également rendre leur poste de radio et leur bicyclette, moyen de transport privilégié des Hollandais.

Le 24 juin 1942, Anne décide d'écrire son journal sur un cahier. Elle s'invente une amie, Ketty. Le 8 juillet, Margot, âgée de seize ans, est convoquée pour travailler en Allemagne. Devant le péril, son père décide alors que les familles Frank et van Daan, soit en tout sept personnes, doivent disparaître aussitôt. Depuis longtemps, il a rempli une vaste cachette située à l'arrière inoccupé de ses entrepôts, au premier et second étages, de vivres, linge, meubles, livres scolaires, ustensiles ménagers. Pour déjouer les recherches et donner l'impression d'un départ précipité, les Frank laissent leur logement en désordre. Chacun, vêtu avec excès, emporte le maximum d'habits. À l'aube, sous une pluie battante complice, ils gagnent leur confortable refuge, baptisé l'Annexe, à l'entrée habilement masquée par une bibliothèque pivotante.

Au mur de sa chambre, Anne épingle la photo de ses vedettes préfé- rées : Garbo, Ray Milland, Ginger Rogers, ainsi que des illustrations découpées dans des magazines.

Les van Daan, accompagnés de leur fils Peter, s'installent le surlende- main. Désormais, tous les sept se réunissent à chaque repas. Le silence est de rigueur, car l'immeuble, comme les autres alentour, est occupé pendant les heures de travail.

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Miep Gies, Kraler et Koophuis, employés et amis de M. Frank, qui travaillent en bas, assureront l'intendance, et leur visite est un des grands moments de la journée.

Entre deux lectures, Anne, dans son journal, raconte régulièrement, avec détail et finesse la vie de cette communauté réunie par la clandestinité. À treize ans, tour à tour enfant et adulte, elle met à jour, lucide, les petitesses et les grandeurs de ses voisins qui souvent s'affrontent et se querellent. La répartition des tâches, ainsi que l'accès des toilettes provoquent souvent des heurts. Alors l'atmosphère devient lourde.

En novembre 1942, un ami dentiste, Dussel, vient prendre place dans le groupe. Les émotions ne manquent pas en 1943. Un jour, on apprend que l'immeuble a un nouveau propriétaire, heureusement peu curieux. Des cambrio- leurs, une nuit, forcent une porte d'entrée. Le bombardement régulier de la RAF sur Amsterdam suscite l'effroi des huit occupants. Néanmoins, ils sont tous en bonne santé grâce à une bonne alimentation due aux relations de la Travies et au marché noir. 1944 arrive. La radio anglaise écoutée chaque jour avec ferveur, annonce le recul général des armées allemandes au grand plaisir des clandestins.

Anne, maintenant devenue femme, tombe amoureuse de Peter van Daan, alors qu'elle est souvent en conflit avec Mme van Daan et sa mère. Parfois, elle descend avec Margot retrouver Miep qui les attend pour qu'elles l'aident à terminer du travail en retard. L'annonce du débarquement, le 6 juin 1944, provoque une explosion d'enthousiasme, et quelques jours après, Anne fête joyeusement son quinzième anniversaire.

Mais le 4 août 1944, sur dénonciation, la Feldpolizei fait irruption dans l'annexe, et embarque tous les occupants, ainsi que Kraler et Koophuis, après avoir fouillé et pillé l'abri. Miep Gies, par hasard peut récupérer le journal d'Anne. Les prisonniers partent aussitôt dans des camps de concentration, soit un mois avant l'arrivée des armées alliées en Hollande.

Le 3 juin 1945, tout de suite après la fin de la guerre, M. Frank réapparaît amaigri, rescapé d'Auschwitz. Seul survivant avec Kraler et Koo- phuis, il ne sait pas encore que ses filles sont mortes en mars au camp de Bergen Belsen.

C'est sur l'insistance de tous ses proches qu'il finira par consentir à faire éditer le journal d'Anne Frank. Ce récit connaîtra un succès fabuleux, et on en tirera une pièce et un film.

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J e a n n e d' A r c

1412 — 143 1 On a brûlé une sainte

L

e martyre de la plus grande héroïne française, brûlée vive à dix-neuf ans, a contribué grandement à l'éclosion du sentiment national alors pratiquement inconnu. Le caractère surnaturel de la brève mission de la Pucelle d'Orléans, rarement contesté, surpasse sa bravoure et sa dévotion pourtant exceptionnelles. Son sacrifice continue d'inspirer écrivains et cinéastes du monde entier, mais l'Église attendra près de cinq siècles pour l'admettre parmi ses saints.

Jeanne d'Arc naît le 6 janvier 1412, dernière de trois frères et une sœur, sur les bords de la Meuse à Domrémy, dans le Barrois, entre la Champagne et la Lorraine. Son père, Jacques, cultive un petit bien qui lui procure une certaine aisance. Comme les filles de son village, elle coud, file, vaque aux besognes du ménage et parfois garde les moutons. Elle aime jouer, chanter et danser les jours de fêtes du village. Pieuse et dévote, elle ne sait ni lire ni écrire. Plus tard, elle apprendra tout juste à tracer son nom.

Alors qu'elle a treize ans, l'archange saint Michel, puis sainte Catherine et sainte Marguerite lui apparaissent à différentes reprises. Tous lui ordonnent de se rendre en France, pour bouter les « Godons » — Anglais — hors du royaume afin de faire sacrer le roi à Reims. Les visions s'échelonneront sur cinq ans. D'abord effrayée, puis réticente, la jeune fille va suivre son oncle à Vaucouleurs auprès du représentant de Charles VII, le sire Robert de Baudri- court. Ce chevalier, au début inflexible, lui établit une lettre de recommandation, et lui fournit un cheval, une épée et des habits d'homme.

Accompagnée de six cavaliers, elle parvient au château royal de Chinon, après un périlleux voyage de douze jours à travers des régions tourmentées.

Toute la partie du royaume située au nord de la Loire se trouve aux mains des

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Anglais ou des Bourguignons. Rapidement, malgré le faste de la grande salle d'audience, elle reconnaît parmi les trois cents chevaliers de la Cour le dauphin Charles, pourtant dissimulé dans son entourage. Toujours méfiant et indécis, celui-ci, surnommé le petit roi de Bourges, fils de la dépravée Isabeau de Bavière et du roi fou Charles VI, se trouve subjugué par la Pucelle. Ne vient-elle pas l'assurer du secours divin, et lui redonner la confiance dont il a tant besoin ? Mais les docteurs en théologie doivent d'abord contrôler la foi de cette belle damoiselle de dix-huit ans, grande, à la voix douce et pénétrante. Afin de s'assurer qu'il n'y a pas quelques diableries cachées, la belle-mère du roi, Yolande d'Aragon - qui soutiendra Jeanne par la suite - vérifie la pureté virginale de l'inspirée dont les paroles prophétiques commencent à se répandre.

Pour soutenir Jeanne sa fille, Isabelle Romée rejoint au pèlerinage célèbre du Puy-en-Velay deux cent mille fidèles réunis afin d'obtenir l'aide et la grâce de la Vierge Marie.

Finalement admise malgré les réserves de La Trémoille, favori du souverain, Jeanne d'Arc reçoit à Tours son armure blanche, son étendard fleurdelisé, son cheval noir et surtout l'épée de sainte Catherine aux cinq petites croix gravées, miraculeusement trouvée selon ses indications dans un vieux coffre, près de l'autel d'une chapelle.

Elle arrive aux portes d'Orléans, avec son armée, ses frères Jean et Pierre. Ses capitaines Xaintrailles, La Hire, et Gilles de Retz — qui deviendra plus tard tragiquement Barbe-Bleue pendu à trente-six ans —, tous méfiants à l'égard de son inexpérience, redoutent son prestige.

Elle dicte une lettre pour les Anglais qui assiègent la ville, leur enjoi- gnant de déguerpir aussitôt.

Orléans réclame la libératrice; le pain commence à manquer. Si ce bastion tombe, les portes du Berry sont ouvertes et c'en sera fait du royaume.

Galvanisés par la détermination quasi divine de Jeanne, blessée d'une flèche à l'épaule, les soldats français, aidés par Dunois le Bâtard chargé de défendre la ville, terrassent sur la Loire l'ennemi pourtant supérieur en nombre. Le 8 mai 1429, la place est délivrée. Spontanément, une longue procession s'organise vers les églises de la ville. Charles d'Orléans, le prince poète, offre une livrée d'honneur à Jeanne. Reconnaissants, les Orléanais continuent de nos jours à célébrer cette délivrance.

Sous le commandement du beau duc d'Alençon, Jeanne s'empare, le 12 juin, de Jargeau et fait prisonnier le duc de Suffolk. Elle prend le pont de Meung le 15, occupe Beaugency le 17.

Enfin, le 18, l'armée anglaise écrasée à Patay, se rend avec son chef, le duc Talbot.

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Jusqu'alors divisée et réservée, l'Église de France (sous l'impulsion de Gerson et de Gélu, archevêque d'Embrun) prend parti pour la Pucelle.

Ses victoires tiennent du prodige. Tout le monde reconnaît une puis- sance surnaturelle, confortant ainsi la position du roi et la nécessité de le faire sacrer à Reims.

Mais, pour y parvenir, il faut se frayer un chemin. Partie de Gien le 29 juin, l'héroïne fait capituler l'armée anglo-bourguignonne à Troyes le 10 juil- let, à Châlons-sur-Marne le 14 et à Reims le 16.

Le couronnement, fixé pour le lendemain, dure cinq heures. Suivi du maréchal de Boussac et de l'amiral de Culant, l'abbé de Saint-Remi, revêtu d'une chape de drap d'or, remet la sainte ampoule, remplie du saint chrême, à l'archevêque Regnaut de Chartres, pour l'onction royale. (Selon la légende, l'huile sainte aurait été apportée par les anges au moment du baptême de Clovis.)

Si la reine est absente, les parents de Jeanne assistent à la fastueuse cérémonie animée par les sonneries de trompettes, bruyantes à faire éclater les voûtes de l'édifice.

Dès lors, la Pucelle cesse d'appeler Charles « Gentil Dauphin », pour lui dire : « Noble Prince, la volonté de Dieu est accomplie. Vous êtes maintenant le vrai roi de France. »

Elle obtient l'exemption perpétuelle des impôts pour Domrémy.

La mission de Jeanne d'Arc paraît terminée. Le prestige du roi s'affirme malgré les intrigues de La Trémoille, qui recherche la négociation avec les Bourguignons. Leur chef, Philippe le Bon, père de Charles le Téméraire, ne promet-il pas de prendre Paris ?

Partant de Saint-Denis, l'attaque de la capitale échoue, malgré la bravoure de la Pucelle, blessée à la cuisse devant la porte Saint-Honoré. Irrésolu, le roi hésite à donner un second assaut qui aurait dû être victorieux.

Il bat en retraite vers la Loire pour arriver à Gien le 22 juin. Jeanne accompagne ensuite Charles VII à Bourges, pour un séjour chez une dame d'honneur de la reine, Marguerite La Thouroulde, avant de repartir de nouveau en lutte. Saint-Pierre-le-Moûtier est occupé en novembre, mais elle échoue devant La Charité-sur-Loire, ce qui ternit le prestige de l'héroïne. Pour la remercier de ses services, le roi l'anoblit de même que sa parenté.

Utilisant les divisions, Philippe le Bon repart en guerre en direction de Compiègne. Le gouverneur Guillaume de Flavy, jaloux et ambitieux, va trahir la jeune fille déjà arrivée dans la place. Le 23 mai 1430, lors d'un assaut, un archer picard taillé en hercule — de la compagnie de Lionel de Wandonne — la capture.

Il la saisit par les bords de sa huque rouge et la désarçonne.

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On la livre à Jean de Luxembourg, qui la fait emprisonner successive- ment dans deux forteresses du Nord. Sera-t-elle ainsi discréditée aux yeux des Français ? Pour la première fois, un homme lui manque d'égards et désire badiner avec elle. Une tentative d'évasion se solde par une blessure. En décembre, après avoir été vendue dix mille écus d'or - prélevés en Normandie par un impôt spécial - au duc de Bedford, frère de Henri V, elle est enchaînée au château de Rouen. Depuis son départ de Vaucouleurs, elle a parcouru à cheval cinq mille kilomètres.

Le roi, lâche et ingrat, à la merci des intrigues de ses conseillers dans son château de Mehun-sur-Yèvre, près de Bourges, ne fait pas le moindre geste pour essayer de la sauver.

L'évêque de Beauvais, Pierre Cauchon, à la solde des Anglais, entre- prend contre elle un procès d'hérésie, l'accusant de sorcellerie et de dévergon- dage, lui reprochant aussi de s'être habillée en homme. L'instruction menée sur place, sans avocat, se passe du 9 janvier au 26 mars 1431. C'est là qu'elle répond à la question : « Êtes-vous en état de grâce ? — Si je n'y suis, Dieu m'y mette, et si j'y suis Dieu m'y garde. »

Présentée au tribunal le 28 mars, l'accusée se débat avec autant d'habi- leté que de simplicité dans un long et fastidieux procès. Condamnée au feu, comme relapse, apostate et idolâtre, Jeanne monte à dix-neuf ans sur le bûcher, le 30 mai 1431, sur la place du Vieux-Marché à Rouen. Courageuse, elle périt dans les flammes, en criant six fois le nom de Jésus, et l'exécuteur, subitement affolé s'écrie : « Nous avons brûlé une sainte. »

Ordre est donné rapidement de jeter ses cendres à la Seine, afin d'éviter qu'il y ait des reliques, que les assistants en larmes étaient prêts à recueillir.

Mais contrairement à l'espérance de ses bourreaux le supplice, loin d'effacer la mission divine, la consacre.

Atteint tardivement par le remords et stimulé par la défaite totale des Anglais dans cette guerre de Cent Ans, Charles VII milite pour la révision du procès. En 1456, après de longues tractations avec le souverain pontife, la réhabilitation devient officielle, les accusations ayant toutes été réfutées point par point. Des fêtes grandioses vont se dérouler un peu partout. Isabelle Romée, la mère de la Pucelle, participe à celles d'Orléans, avant de s'éteindre deux ans plus tard, tout près, dans le village de Sandillon.

Les siècles suivants oublient l'héroïne et sa postérité. Jeanne d'Arc ne sera béatifiée qu'en 1909 et canonisée en 1920. Sa fête religieuse a lieu chaque année le 8 mai.

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Évariste Galois 18 11― 183 2

L'inconnue du dernier soir

s i une invraisemblable malchance n'avait pas poursuivi sans relâche ce mathématicien pendant sa brève existence, il serait devenu probablement une des plus grandes figures scientifiques du XIX siècle.

Son père est maître de pension à la naissance d'Évariste, le 25 octobre 1811, à Bourg-la-Reine. Prodigieusement doué, l'enfant entre comme boursier à l'âge de douze ans au collège royal Louis-le-Grand. Il y sera pensionnaire jusqu'en 1829.

Esprit turbulent et curieux, il passe des journées à lire. En parcourant d'un trait la Géométrie d'Adrien Marie Le Gendre (1752-1833), il se sent naturelle- ment attiré par les mathématiques. Aussitôt il se met à étudier les travaux de Louis Lagrange (1736-1813). Cet astronome et mathématicien venait de laisser une œuvre considérable : il avait été président de la commission du système des poids et mesures sous la Constituante en 1790. En mars 1827, à quinze ans, Évariste obtient le premier prix de mathématiques au concours général et un accessit de grec.

Suivant les habitudes de cette époque, il fait sa rhétorique en même temps que la deuxième année de mathématiques préparatoires.

En 1828, il se présente au concours d'entrée à l'École polytechnique mais échoue.

Son père est maire de Bourg-la-Reine; à la suite d'une scandaleuse campagne de dénigrement, il se suicide, ce qui affecte profondément Évariste.

Ce drame influencera la suite de sa vie sans doute d'une façon définitive. Il devient irritable et contestataire.

À la fin de l'année, il présente à l'Académie des sciences un rapport par l'intermédiaire du baron Augustin Cauchy, mathématicien en renom. Il s'agit

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des premières études sur les équations algébriques de premier degré. Mal- heureusement, Cauchy perd le manuscrit.

Peu après, Galois échoue de nouveau à Polytechnique. On a raconté qu'au cours de cet examen, Galois aurait lancé un torchon à la tête de l'examina- teur. Il s'agit sans doute d'une légende. Un témoin, Bertrand, rapporte que cet examinateur très réputé avait mis au point un procédé d'interrogation fort subtil consistant à poser des questions toujours très faciles et à juger le candidat sur les nuances de ses réactions; celles d'Évariste se sont assurément révélées sans nuances.

En octobre 1829, il est admis à l'École préparatoire, nom de l'École normale supérieure sous Charles X.

Bachelier ès lettres et ès sciences en décembre, il présente à nouveau un important mémoire sur les conditions pour qu'une équation soit résoluble par radicaux. Toujours enthousiaste, il le transmet à l'Académie des sciences, au baron Joseph Fourier, mathématicien célèbre membre de l'Académie française, afin de postuler au Grand Prix de mathématiques.

Hélas, Fourier meurt sans l'avoir lu et le dossier est égaré. Le prix est décerné à l'Allemand Carl Jacobi et à titre posthume à Niels Abel, jeune Norvégien talentueux qui découvrit les équations portant son nom et mort prématurément à l'âge de vingt-sept ans.

La révolution de Juillet éclate : insurrection des Parisiens contre Charles X. Provoquée par les ordonnances de Polignac, elle aboutit, après deux jours de luttes dans la capitale, à l'avènement de Louis-Philippe. Cauchy, un des rares membres de l'Académie à comprendre le jeune chercheur, quitte la France.

Galois se lie à des étudiants républicains et entre dans l'artillerie de la Garde nationale. Le directeur de l'École normale n'apprécie pas la prise de position politique de son élève avec les factions les plus actives du parti démocratique, et le met à la porte le 4 janvier 1831.

Évariste ouvre un cours de mathématiques à la librairie Caillot, rue de la Sorbonne.

Le 17 janvier, il remet un troisième mémoire à l'Institut : Sur la résolution générale des équations, œuvre véritablement géniale. Malchance, le rapporteur Poisson, après avoir tenté de la lire, la renvoie comme incompréhensible!

Dans un banquet, en mai 1831, Galois porte un toast à Louis-Philippe, un poignard à la main. On l'arrête le 10 mai, mais on l'acquitte le 15 juin. Ce révolutionnaire est à nouveau arrêté le 14 juillet à la tête d'un petit groupe d'étudiants républicains, pour port d'armes et d'uniforme d'une unité interdite.

Détenu à Sainte-Pélagie, il est condamné le 23 octobre à six mois de prison ferme, puis transféré à La Force, par mesure disciplinaire, fin janvier 1832. Une

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épidémie de choléra menace alors Paris. On le transfère dans une maison de santé où il peut reprendre ses travaux.

En prison, il exprime sa rancœur dans plusieurs lettres. Cette succession d'avatars survenus à ses dossiers, toujours mystérieusement disparus, est incompréhensible. Impertinent, il évoque Zoïle, sophiste grec dénonçant quatre siècles avant Jésus-Christ les absurdités et les contradictions d'Homère. Ce rapprochement hardi paraît lui convenir.

À sa libération, nouvelle désillusion : le pauvre voit la fin de son amour malheureux avec une demoiselle Stéphanie.

En retrouvant la liberté, il est provoqué en duel, au pistolet, dans des circonstances mal définies. On a parlé de provocations policières mais aussi, au contraire, du complot d'amis politiques devenus soupçonneux quant à la fidélité de Galois. Il ne se fait aucune illusion et sait qu'il va mourir. La veille de l'affrontement, il rédige son testament mathématique dans sa fameuse lettre à Auguste Chevalier, son ami, auquel il témoigne de son affection.

Lucide, il résume à grands traits sa théorie des équations algébriques, ainsi que des résultats sur les intégrales abéliennes. Ses recherches sont sans doute les plus fécondes jamais réalisées en algèbre. Le grand mathématicien Riemann le proclamera vingt-cinq ans plus tard.

Le 30 au matin, Galois se rend courageusement près de l'étang de la Glacière. On le retrouve vers six heures du soir, abandonné par ses témoins, mortellement atteint. Le 31 mai 1832, à dix heures du matin, il expire à l'hôpital Cochin, âgé de vingt ans.

En septembre, la lettre à Chevalier est publiée intégralement dans la Revue encyclopédique. Son frère et Auguste Chevalier se battront pendant des années pour réhabiliter sa mémoire, et, après bien des réserves, l'Académie des sciences finira par admettre, mais longtemps après, le génie d'Évariste Galois, qu'elle avait traité avec tant de légèreté.

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R a y m o n d R a d i g u e t

1 9 0 3 ― 1 9 2 3

Le diable au corps

L

a Première Guerre mondiale vient de se terminer. Après quatre ans d'horreur, le monde devenu euphorique ne demande qu'à s'étourdir et oublier.

Partout c'est la fête, notamment au Bœuf-sur-le-toit, cabaret réputé des Champs- Elysées, animé par les pianistes Wiener et Doucet. Endroit à la mode, il est le lieu de rencontre des artistes, des écrivains et des élégantes. Les musiciens Francis Poulenc et Georges Auric retrouvent le poète Max Jacob et Jean Cocteau accompagné d'un jeune ami : Raymond Radiguet. Cet adolescent, comme un météore, bouleversera le monde des lettres pour disparaître à vingt ans, fauché en pleine gloire.

Il naît le 18 juin 1903 à Saint-Maur-des-Fossés. Son père est dessinateur humoristique dans un journal. L'enfant se révèle tout de suite vif et remuant. À quatre ans, désireux d'imiter son papa, il oblige la bonne à prendre le train, à la gare du pays, pour aller « faire l'homme ». À l'école communale, deux ans plus tard, à la distribution des prix, le gamin provoque des remous sur la répartition des couronnes de laurier. Déjà la lecture le passionne et l'absorbe des heures entières. Lorsqu'il atteint onze ans, il exige d'entrer au lycée. « Obtiens d'abord une bourse », rétorque le père. Avec ardeur et obstination, Raymond se met à l'étude, et réussit à boucler le programme de deux années en une seule.

Admis au lycée Saint-Charles, il passe pour un élève médiocre. « Quel malheur qu'il ne travaille pas, il pourrait faire ce qu'il voudrait ; c'est un cancre », déclare le proviseur.

Poète à quatorze ans, journaliste comme son père à quinze ans, il se lie au Montmartre artistique, puis au Montparnasse des surréalistes, fréquentant aussi les peintres Picasso et Modigliani.

La première fois que Raymond se rend seul chez Cocteau, rue d'Anjou,

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la femme de chambre vient prévenir : « Il y a dans l'antichambre un enfant avec une canne. »

L'horizon littéraire est en pleine transformation. La guerre a tué Péguy, Alain-Fournier, Louis Pergaud, Apollinaire par suite de blessure, et bien d'autres. Les vieilles gloires disparaissent. Proust en 1922, Barrès, Pierre Loti en 1923 ; Anatole France suivra bientôt. Par ailleurs, de nouveaux prix voient le jour. La chasse aux jeunes bat son plein chez les éditeurs. L'un d'entre eux, Bernard Grasset, est très lié avec Jean Cocteau, dandy chéri de la haute bourgeoisie parisienne, déjà célèbre pour ses œuvres teintées de scandale. Le poète lui vante un jeune écrivain de talent, auteur d'un roman très prometteur qu'il vient d'achever.

Alléché, Grasset demande à rencontrer rapidement le prodige. Ce sera long. Finalement, le 3 mars 1922, Radiguet se rend dans l'austère bureau de l'éditeur rue des Saint-Pères, accompagné de son mentor qui se met à lire quelques pages choisies au préalable du Diable au corps. Le jeune homme, intimidé, debout dans un coin, fait figure de candidat devant un examinateur.

Grasset, ébloui par tant de facilité dans l'écriture, flaire le chef-d'œuvre et propose sans attendre à l'écrivain un contrat de 1 500 francs mensuels pendant deux ans « à valoir », avec un acompte immédiat de 4 500 francs.

Cependant, le texte devra être travaillé et quelque peu modifié. Ray- mond, déjà en pourparlers avec Laffite, craint un litige. « Qu'importe j'en fais mon affaire », répond l'éditeur.

L'auteur accepte et se met au travail, lentement, d'autant qu'il a en chantier un nouveau roman, Le Bal du comte d'Orgel. Cependant Jean Cocteau promène partout son protégé. Le romancier François Mauriac, à la critique corrosive, remarquera « son air de chouette dressée immobile et aveugle ».

On voit les deux amants ensemble, au théâtre lors des générales, au cinéma, au music-hall. Ils visitent les ateliers de peinture et assistent aux vernissages. Brasseries, restaurants, guinguettes jalonnent le tourbillon de leurs plaisirs.

Fin janvier 1923, Radiguet remet la version définitive du Diable au corps.

Alors commence une extraordinaire publicité fondée sur le jeune âge de l'auteur.

Ainsi, on annonce aux actualités du Gaumont : « Le plus jeune romancier de France vient de sortir son premier roman. »

Le livre raconte la liaison d'un lycéen avec une femme dont le mari est au front. On va jusqu'à suggérer qu'il s'agit probablement d'un récit auto- biographique. L'audace publicitaire de Grasset choque la presse, peu habituée à ce battage. Le public, toutefois, réserve bon accueil à l'ouvrage, attiré peut-être autant par la controverse que par la pureté du style et la finesse de l'étude

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psychologique des personnages. Référence est faite à Mme de la Fayette et à Choderlos de Laclos. On s'étonne qu'un garçon de cet âge puisse avoir l'expé- rience d'un homme de quarante ans.

L'œuvre obtient le Prix du Nouveau Monde. Aussitôt, l'association des Écrivains anciens combattants crie à l'imposture, tant la situation décrite lui semble outrageante.

Grasset désire publier les poèmes Les Joues en feu. Depuis longtemps, Radiguet est engagé avec Kra. L'éditeur rachète à ce dernier les droits pour douze cents francs.

La lente maturation du Bal du comte d'Orgel se prolonge. Radiguet exécute les modifications encore exigées par Grasset, lorsqu'il reçoit convocation du conseil de révision. L'éditeur s'offre de l'y conduire. Peut-être espère-t-il agir sur l'agent de recrutement? Raymond est déclaré bon pour le service. L'éditeur écrit au général de la subdivision de Paris pour demander un sursis. Il l'obtient jusqu'à fin décembre. Le livre pourra donc être terminé à temps. Peine perdue.

Radiguet décède à Paris, le 12 décembre 1923, de la fièvre typhoïde, vers cinq heures du matin, pratiquement seul, après d'affreuses souffrances.

Cocteau corrige pieusement les épreuves, et l'ouvrage paraît en 1924. La mort prématurée de l'auteur fait office de réclame. Certains critiques, friands d'esclandres, ne craignent pas d'écrire : « C'est du Cocteau », provoquant d'énormes polémiques. Grasset riposte vertement, ce qui va provoquer bien des troubles dans le milieu des lettres. On ira jusqu'à parler de duel. Dans le Bal du comte d'Orgel, on retrouve, accentuées, les qualités de maîtrise et de lucidité du premier roman, qui renouait avec le classique.

Ce retour aux traditions fait monter le tirage qui approche les cent mille, Grasset dira cent vingt mille dans sa publicité, comme il avait annoncé quatre cent mille au lieu de deux cent mille pour le grand succès Maria Chapdelaine, de Louis Hémon. Avec le temps, les critiques s'assagirent. Ils n'avaient plus peur de dire du bien de l'auteur, puisqu'il était mort.

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Napoléon II

V rs 1807, l'empereur Napoléon I finit par se rendre à l'évidence : Joséphine ne pourra jamais lui donner d'enfant. Doutant de ses propres facultés de procréer, il est fou de joie quand Marie Walewska, sa maîtresse polonaise, lui apprend qu'elle est enceinte. Obsédé par le problème de sa descendance, il se cherche une épouse de haute lignée, qui légitimera sa position. Influencé par Metternich et Fouché, il choisit Marie-Louise d'Autriche, descendante des Habsbourg, âgée de dix-neuf ans. Le mariage a lieu le 1 avril 1810.

« C'est un ventre que j'épouse », avoue Napoléon qui espère à l'avenir bénéficier de la neutralité autrichienne.

L'impératrice éprouve les premières douleurs le 19 mars 1811, pendant que son mari prend un bain brûlant, selon ses habitudes. L'accoucheur Dubois hésite. « Je vais être obligé d'utiliser les fers », dit-il, inquiet, réclamant la présence de Corvisart, premier médecin de la Cour. « La nature n'a pas deux lois, s'exclame l'empereur irrité, traitez-la comme une boutiquière de la rue Saint-Denis. »

Le lendemain matin, à 8 h 20, Napoléon, François, Charles Joseph jette son premier cri. On le trempe dans une baignoire d'eau tiède, avant de lui souffler quelques gouttes d'eau de vie dans la bouche. C'est le petit-neveu de Louis XVI et de Marie-Antoinette, descendant aussi de Henri IV et Louis XIV. Il reçoit le titre de Roi de Rome, héritier de l'Empire.

Jamais un bébé ne sera plus choyé. Entouré d'un luxe inouï, il est baptisé le 9 juin à Notre-Dame, par le cardinal Fesch, son grand-oncle paternel, devant une foule plutôt froide.

Enthousiasmé, Napoléon dira à Duroc : « J'aurai été Philippe, il sera

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Alexandre. » Il est si fier de son fils, qu'un jour, à Bagatelle, il le présente discrètement, accompagné de sa gouvernante Mme de Montesquiou, à José- phine.

L'empereur adore jouer avec le bambin, au contraire de Marie-Louise, plus amante que mère, qui ne témoigne au prince qu'une affection mesurée, et abandonne à l'étiquette le soin de son éducation. Néanmoins, elle le fait peindre par Isabey et par Aimée Thibault, assis sur un mouton : miniature que Napoléon gardera toujours jusqu'à Sainte-Hélène.

L'altesse en maillot, insouciante, grandit sans problème, venant parfois troubler le Conseil des ministres.

Cependant Metternich, fort de l'appui des Anglais, tire les ficelles et noue de nouvelles alliances, à la grande colère de l'empereur qui doit affronter l'armée de son beau-père François. Le 25 janvier 1814, Napoléon, en quittant sa femme que cette guerre chagrine, regarde dormir le petit Roi aux mèches blondes. Il ne le reverra jamais plus.

L'invasion ennemie contraint le prince à se retirer avec sa mère au sud de la Loire. Puis Marie-Louise se rend à Rambouillet où elle retrouve son père François qui murmure, ému, en voyant l'Aiglon : « Mon sang coule dans ses veines. » Lorsque Napoléon part en exil, le Roi de Rome — devenu Prince de Parme — s'installe avec sa mère au château de Schoenbrunn, accompagné toujours de Mme de Montesquiou et de Marchand, dont le fils servira Napo- léon I à Sainte-Hélène jusqu'à la fin.

Afin que sa fille n'aille pas rejoindre son mari à l'île d'Elbe, François, machiavélique, place auprès d'elle un chevalier d'honneur, le général Neipperg, qui deviendra vite l'amant de Marie-Louise. (Elle l'épousera même après la mort de Napoléon.)

Sitôt connu le retour de Napoléon I les Autrichiens, inquiets, séquestrent le petit Roi à Vienne, à la Hofburg, et renvoient à Paris tout le personnel français. Après Waterloo et la seconde abdication du « Petit Caporal » en faveur de son fils, âgé de quatre ans, celui-ci est théoriquement reconnu empereur sous le nom de Napoléon II, le 23 juin 1815, par les chambres des Cent Jours. Mais l'enfant ne reviendra jamais en France. Il connaîtra l'existence dorée mais fastidieuse d'un dauphin autrichien ; son précepteur, le comte de Dietrich- stein, a pour mission de le couper de toutes ses racines françaises.

Par ses origines célèbres, le jeune prince inquiète toutes les cours d'Europe. Quand, le 11 juin 1817, le duché de Parme est donné en souveraineté à Marie-Louise, la clause de réversibilité dont bénéficie son fils — maintenant duc de Reichstadt — est rapidement annulée à la demande de Louis XVIII, qui a peur de voir régner un Bonaparte en Italie. La mort de Napoléon I son père,

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attriste pour longtemps l'enfant, âgé de dix ans. Désormais, les passions bonapartistes toujours fort tenaces vont se trouver cristallisées sur lui, et le parti libéral en France s'indigne du sort du jeune « prisonnier » de la Gloriette, de plus en plus abandonné par sa mère.

Bon cavalier, il peut conduire avec dextérité une voiture à quatre chevaux. Le grand jeune homme blond aux yeux bleus brille dans les bals de Vienne, et séduit les jeunes princesses éblouies par son élégance.

Peu à peu, le duc de Reichstadt, que l'on appelle maintenant familière- ment Franz, découvre l'épopée de Napoléon, à la lecture des récents ouvrages d'histoire et lors des visites du maréchal Marmont. Subjugué, il va concevoir un véritable culte pour son père.

Nommé capitaine de chasseurs tyroliens, il prend plaisir à exécuter des manœuvres avec ses soldats, malgré sa santé de plus en plus délicate. En juillet 1830, au moment où Charles X est renversé en France, il devient chef de bataillon, portant un magnifique uniforme blanc. Des appels de tous bords arrivent pour que le fils du grand empereur soit installé sur le trône. Vu l'instabilité politique, il aurait probablement réussi s'il avait pu se présenter à Strasbourg, convaincu, un drapeau tricolore à la main.

On songe sérieusement à lui pour un trône en Pologne ou en Belgique, mais Metternich, qui a déjà utilisé le nom du prince comme moyen de pression auprès de Louis-Philippe, ne veut pas remettre en cause les principes de la Sainte-Alliance. L'Aiglon ne pourra jamais rien faire. Sa santé se dégrade, il maigrit. Lors d'une parade, il prend froid, et s'éteint à vingt et un ans, le 22 juillet 1832, emporté par la phtisie et non par un empoisonnement comme le bruit en courut.

Le 15 décembre 1940, cent ans jour pour jour après le retour des cendres de Napoléon de Sainte-Hélène, Hitler rendit le cercueil du Roi de Rome à la France afin que le Prince reposât aux Invalides, auprès de son père.

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Georges Guynemer

Chevalier du ciel

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mai 1917 : les hostilités font rage dans l'Aisne, sur le chemin des Dames. L'escadrille des Cigognes participe à la grande offensive. À bord de son Spad, un aviateur en vareuse noire, casque de cuir, abat en une minute deux avions ennemis; dans l'après-midi, il récidive et réussit à nouveau le doublé, portant le total de ses victoires à quarante-deux. L'« as des as », le capitaine Guynemer, à vingt-deux ans, vient de réaliser l'un des plus grands exploits de la guerre.

Né la veille de Noël 1894, Georges est issu d'une petite noblesse provinciale : son père Paul, ancien officier sorti de Saint-Cyr, ainsi que Diane sa mère, femme élégante, cultivent honneur et tradition. Le garçon et ses deux sœurs aînées, Yvonne et Odette, passent leurs jeunes années dans le château des grands-parents maternels près de Caen. Georges, déjà de santé fragile, devient écolier, aidé d'une gouvernante allemande. A quatre ans il se met au violon, musicien comme son grand-père qui jouait du piano avec Liszt. L'enfance se passe entre le château de grand-papa Guynemer et Compiègne, où il entre comme externe au collège.

À douze ans, l'élève poursuit ses études au collège Stanislas, où il se révèle intelligent mais dissipé. Après son bac obtenu avec mention, un baptême de l'air lui permet d'affirmer à son père : « Je veux devenir aviateur. » Il prépare le concours d'entrée à l'École polytechnique quand survient la guerre, le 3 août 1914.

Georges n'a qu'un désir : s'engager. Mais les majors trouvent trop maigre ce grand garçon de quarante-huit kilos, au teint cireux. Désespéré, il remue ciel et terre, épaulé par son père. En vain. L'obstiné va supplier un officier d'aviation de Pau : « Je ferai n'importe quoi, même cirer des bottes ». Mais la

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médecine refuse encore. À la troisième visite, le « feu sacré » convainc finale- ment le capitaine Bemard-Thièry, et, le 23 novembre, Guynemer devient plus ou moins légalement, élève mécanicien. Au bout d'un mois, il demande à devenir élève pilote. On a grand besoin d'aviateurs. Comme il a été sérieux et appliqué, satisfaction lui est donnée en février 1915.

Enthousiaste, il commence alors son apprentissage, en compagnie du boxeur Georges Carpentier, d'un fils Rothschild et de Tarascon, l'instructeur à la jambe de bois. Guynemer parvient à faire des vrilles après seulement deux mois de pilotage. Affecté à Avord, il y décroche son brevet militaire le 26 avril 1915. Son rêve se réalise. Il arrive au front dans la future escadrille des Cigognes, et se fait tout de suite remarquer par ses bris de matériel, qu'on lui pardonne eu égard à son courage et à sa pugnacité. Le 19 juillet, accompagné d'un mitrailleur, il abat son premier avion ennemi, revient tout excité, et, le lendemain, le voilà devenu sergent, décoré de la médaille militaire.

Sa technique de vol et de combat s'améliore tous les jours, sur les conseils du fameux et impétueux Védrines (qui gagnera le pari d'atterrir sur le toit des Galeries Lafayette). On le charge d'une mission périlleuse : déposer et aller rechercher des agents secrets en territoire ennemi. Il réussit grâce à son incroyable sang-froid et renouvelle dans la pénombre cette opération délicate, malgré un orage intense.

En décembre 1915, à bord de son Nieuport Vieux Charles, Georges abat trois autres avions, ce qui lui vaut d'être nommé chevalier de la Légion d'honneur, le jour de ses vingt et un ans.

Deux autres appareils s'ajoutent à son tableau de chasse, les 3 et 5 février 1916. Il passe sous-lieutenant. Mais, le 6 mars 1916, la mort le frôle ; son avion, ses vêtements et ceux de son observateur sont criblés de balles. Sa riposte ne tarde pas et, le 12 mars, il descend un biplace. On le cite à l'ordre de l'Armée quand, le 28 mars, il signe sa huitième victoire. Sa méthode paraît simple : « Je pratique le vol classique, et n'ai recours aux acrobaties qu'en dernier ressort. Je reste accroché à mon rival et quand je le tiens, je ne le laisse pas filer. » En réalité, ce méticuleux soigne particulièrement armes et munitions, ne tolère l'aide de personne. Un jour à Paris, chez le fabricant d'avion Spad qu'il était venu conseiller, le hasard lui fait rencontrer Yvonne Printemps. Ils sont du même âge.

Courtisée par Sacha Guitry, la chanteuse est aussi belle que séduisante. Guyne- mer a le regard brillant et triomphateur de ces nouveaux archanges auréolés de gloire. Pendant huit à dix mois, l'hôtel Édouard-VII abritera de temps en temps leurs amours. Le héros lui offre une tortue d'écaille ambrée, et ce souvenir, vrai talisman, restera toujours accroché dans la loge de l'artiste.

Dans les airs, Guynemer continue d'accumuler les triomphes. Ses chefs

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doivent le gendarmer pour qu'il se repose, quand sa santé délicate le laisse à bout de force ou lorsqu'il revient blessé (il le sera six fois). Il dépasse parfois la mesure, comme ce jour où il vole pendant cinq heures et demie, sur trois appareils successifs, après trois atterrissages forcés.

« J'ai beau être veinard, l'ennemi m'a descendu sept fois. » Le pilote oublie-t-il sa mésaventure du 23 septembre 1916, quand, touché par l'artillerie antiaérienne amie, il a été retiré inanimé de son avion (qu'il appelle sa mitrail- leuse volante). Un vrai miracle!

Ses exploits deviennent légendaires. Tout le pays et l'armée suivent ses aventures, et les grands de l'époque, des rois aux généraux, viennent le congra- tuler.

Promu capitaine, il reçoit, le 11 juin 1917, la croix d'officier de la Légion d'honneur, et prend le 4 septembre le commandement de l'escadrille après sa cinquante-troisième victoire officielle, nombre très inférieur à la réalité, le système des homologations étant très rigide.

Le 11 septembre, il décolle du terrain de Saint-Pol-sur-Mer par une belle matinée brumeuse pour patrouiller vers la Belgique. Le sous-lieutenant Bozon- Verduraz, qui le précède, va manœuvrer afin d'attirer et semer les huit avions ennemis qui apparaissent dans le soleil à l'horizon. Guynemer, déjà aux prises avec un biplace ennemi à 3 200 mètres d'altitude, s'éloigne dans le ciel des Flandres et son équipier ne s'en inquiète pas outre mesure. Cependant ce dernier, revenu au camp, s'étonne de l'absence du Vieux Charles.

Confiante, toute la base espère le retour du retardataire, aux pouvoirs rappelant ceux des dieux de la mythologie. Longue sera l'attente.

Le chevalier invincible ne reviendra plus jamais. Les Allemands re- trouvent son corps, ainsi que l'appareil abattu par un aviateur que Fonck (l'as aux soixante-quinze victoires) descend vingt jours après. Mais un fort bombarde- ment efface les traces du preux de légende que toute la France consternée pleurera longtemps. La devise de Guynemer emporté à vingt-deux ans, Faire face est celle de l'École de l'air, et son nom est gravé sur les murs du Panthéon.

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S a i n t e T h é r è s e

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R

arement famille fut autant touchée par la grâce que celle des Martin. Louis, le père, horloger-bijoutier, avait envisagé une existence monas- tique ; Zélie, la mère, dentellière, aspirait à une vie religieuse. Répondant à un irrésistible appel, Thérèse devint carmélite à quinze ans; ses quatre sœurs prirent toutes le voile également. Sa mission continuera après sa mort, son livre Histoire d'une âme, traduit en trente-cinq langues, édité en millions d'exem- plaires, transmettra son message aux quatre coins de la terre.

Née à Alençon le 2 janvier 1873, Thérèse est la neuvième enfant d'un foyer bourgeois et cossu. Quatre sont morts en bas âge. Elle se trouve précédée de Marie, née en 1860 et qui sera sa marraine, de Pauline née en 1861, de Léonie en 1863, et de Céline en 1869.

Après un an passé chez une nourrice dans la campagne normande, elle retrouve la chaude ambiance chrétienne de la maison. Elle préfère sa sœur Pauline, qui sera son idéal et sa mère spirituelle quand la maman décède, emportée par un cancer en 1877.

Les Martin quittent alors Alençon pour Lisieux. Ils habitent aux Buis- sonnets, auprès de M. Guérin, frère de Zélie. Marie prend en main l'organisa- tion du ménage, tandis que Pauline s'occupe des deux petites, plus spécialement de Thérèse qui doit subir la sévérité de sa marraine. Le père implore parfois pour qu'on ne supprime pas les promenades lorsque les leçons laissent à désirer. Pas de compliments non plus, qui pourraient pousser à la vanité.

A Lisieux, la famille se resserre autour des Guérin. M. Martin se plonge dans la solitude. Thérèse, timide, douce et sensible à l'excès, apprécie les plaisirs du jardin : les fleurs, les animaux familiers, une pie, un épagneul, une linotte et même un agneau d'un jour.

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En septembre 1881, elle est mise à l'école de l'Abbaye comme demi- pensionnaire, sans se douter que Pauline va bientôt se décider à entrer au Carmel. Quand elle l'apprend en juillet 1882, elle s'écrie : « C'était comme si un glaive s'enfonçait dans mon cœur. » Mais elle découvre aussi, et immédiate- ment, qu'elle veut se diriger dans cette voie.

En décembre 1882, sa santé se dégrade, elle est victime d'une névrose infantile qui durera longtemps. Désemparée, elle voit coup sur coup Léonie entrer chez les Clarisses le 7 octobre 1886, et Marie au Carmel la semaine suivante. L'ardente atmosphère des Buissonnets, indispensable à sa vie, est en train de disparaître. Mais peu à peu, mûrie par la prière et par une grande foi qui équilibre sa personnalité, elle réussit à vaincre son hypersensibilité.

L'année 1887 est merveilleuse : Thérèse s'épanouit. Elle lit intensément.

Son goût de savoir est insatiable. Elle se sent de plus en plus la vocation d'intercéder pour les pécheurs. Au mois de juillet, elle est frappée dans son imagination par une image de crucifié. Événement fortuit qui fait naître en elle le besoin d'imiter l'amour miséricordieux de Jésus auprès des hommes, même les plus vils et les plus abandonnés. C'est alors que Pranzani, criminel condamné à mort, réclame in extremis le crucifix au pied de l'échafaud, et l'embrasse par deux fois avant de mourir. Thérèse reconnaît là que sa prière a été exaucée.

Du mois de mai 1887 au mois de janvier 1888, elle se bat pour entrer au Carmel. Son père a été facile à convaincre. Son oncle Guérin a opposé plus de résistance. Elle doit affronter les autorités ecclésiastiques : mgr Hugonin, évêque de Bayeux, et jusqu'au pape Léon XIII,qu'elle rencontre lors d'un pèlerinage à Rome le 20 novembre. Sa vocation est enfin reconnue, et elle entre au Carmel le 9 avril 1888. Elle n'a que quinze ans.

Postulante, puis novice, elle fait profession le 8 septembre 1890 : sauver les âmes et prier pour les prêtres, tel sera son but. La vie au Carmel est orientée selon les règles de Thérèse d'Avila sa fondatrice. Du lever, à 4 h 45, jusqu'au coucher à 22 h 30, le temps se divise en six heures et demie pour la prière (deux heures d'oraison et quatre heures et demie pour la messe et l'office choral) une demi-heure de lecture spirituelle, cinq heures pour le travail, deux heures de récréation communautaire, quarante-cinq minutes pour les repas en commun, en silence, accompagnés d'une lecture à haute voix, une heure de temps libre.

Sous la férule d'une prieure brusque et dominatrice, Thérèse se coule dans ce programme auquel elle sera très fidèle, malgré la « sécheresse » de sa vie d'oraison. En 1891, lors d'une retraite, le père Prou va bien la comprendre : « Il me lança en pleines voiles sur les flots de la confiance et de l'amour qui m'attiraient si fort, mais sur lesquels je n'osais m'avancer. »

Elle se torture pour la santé de son père, à demi aliéné, qui meurt en

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juillet 1894. En septembre, Céline entre au Carmel à son tour, apportant un carnet sur lequel elle a transcrit des passages de la Bible. Au cours de l'automne, Thérèse inventorie ces carnets. Elle y puise des textes décisifs, en raison de leur simplicité angélique, qui sont la base de sa spiritualité connue sous le nom de sa

« petite voie ».

À la demande de la nouvelle prieure, mère Agnès, elle écrit en 1895 ses souvenirs d'enfance. Le 9 juin, au cours de son action de grâces, elle s'offre en victime d'holocauste à l'amour miséricordieux de Dieu. Dans la nuit du Vendredi saint, elle subit sa première hémoptysie et, le lendemain, entre dans les plus épaisses ténèbres. Cette dernière période de sa vie sera l'occasion d'éprouver sa

« petite voie ». Elle souffre physiquement et spirituellement, mais à aucun moment sa confiance, son abandon à la volonté de Dieu ne sont pris en défaut.

Elle demeure en communion avec Dieu dans le Christ et sous l'action de l'Esprit.

En 1897, l'état de la malade s'aggrave. La tuberculose fait son chemin.

Néanmoins, elle continue d'écrire. Elle définit un nouveau message, en propo- sant à l'Église une recherche humble pour aller à la rencontre des hommes.

Thérèse quête l'infini de l'amour miséricordieux dans les actes les plus petits de la vie; elle vit un amour extraordinaire dans les choses ordinaires.

Le 30 juillet elle reçoit l'extrême-onction, et, le 30 septembre à 19 h 30, à . vingt-quatre ans, rend le dernier soupir dans une extase d'amour. Selon son expression, elle « entre dans la vie ». Elle qui a expérimenté la communion des saints, elle sait que sa mission commence : faire aimer Jésus. Elle sait aussi qu'elle sera de tous les combats jusqu'à la fin du monde.

Béatifiée en 1923, canonisée en 1925, sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus est adoptée par Pie XI comme la patronne de son pontificat et celle des mission- naires. Depuis les cérémonies du centenaire en 1973, Lisieux attire chaque année une foule encore plus nombreuse de pèlerins.

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D'Alexandre le Grand à Thierry le Luron, de Van Gogh à James Dean, d'Ayrton Senna à Claude François, voici cent personnages hors du commun qui ont tous disparu avant quarante ans. Bourré d'anecdotes, cet ouvrage, riche d'informations insolites, émouvantes, captivantes, nous rend tous ces héros plus familiers. Une manière attrayante de nous présenter ces hommes et ces femmes d'horizons variés qui, à travers les époques, se sont illustrés dans les activités les plus diverses.

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