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Coopératives de logement et innovations institutionnelles : la levée de fonds et l'acquisition foncière comme défis de l'habitat coopératif

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Academic year: 2022

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Coopératives de logement et innovations institutionnelles : la levée de fonds et l'acquisition foncière comme défis de l'habitat coopératif

FALCIOLA, Thibaud

Abstract

La question de l'habitat coopératif à Genève connaît un essor important depuis une vingtaine d'année. Le canton en a fait une de ses priorités pour améliorer l'accessibilité au logement.

Les coopératives suscitent un fort intérêt de la population en quête de logements abordables, de qualité de vie urbaine et d'expériences sociales tels que la participation, l'enracinement local ou encore la solidarité. Se positionner en tant qu'acteur du marché immobilier n'ai pas chose aisée. Les coopératives et les collectivités publiques se doivent ainsi d'être innovantes : les premières en trouvant de nouveaux modes de développement de projets, les secondes en repensant le modèle existant. Les mécanismes qui sous-tendent à la création de ces sociétés à but non lucratif sont complexes voire méconnus. Ce travail vise la mise en lumière tant des dispositifs que des dynamiques permettant la levée de fonds et la jouissance d'un terrain pour porter un projet d'habitat coopératif. Il ambitionne également la mise à disposition des éléments-clés pour les développeurs de coopératives afin qu'ils puissent [...]

FALCIOLA, Thibaud. Coopératives de logement et innovations institutionnelles : la levée de fonds et l'acquisition foncière comme défis de l'habitat coopératif. Master : Univ. Genève, 2020

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:145065

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Coopérative Soubeyran, Equilibre - Source RTS

Coopératives de logement et innovations institutionnelles

La levée de fonds et l'acquisition foncière comme défis de l'habitat coopératif

Thibaud Falciola

Mai 2020

Faculté des sciences de la société

Maîtrise universitaire en développement territorial Mention - Aménagement du territoire et urbanisme

Directeur : Prof. Laurent Matthey, Dr. Nicola Cantoreggi Expert : Romain Felli

Mémoire no : 87

Mémoire réalisé dans le cadre du projet INTERREG V DEVCOOP

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RESUME

La question de l’habitat coopératif à Genève connaît un essor important depuis une vingtaine d’année. Le canton en a fait une de ses priorités pour améliorer l’accessibilité au logement. Les coopératives proposent une alternative aux modèles dominants dans le marché immobilier ‘’tra- ditionnel’’, soit la location ou la propriété. Elles suscitent un fort intérêt de la population en quête de logements abordables, de qualité de vie urbaine et d’expériences sociales tels que la participation, l’enracine- ment local ou encore la solidarité.

Se positionner en tant qu’acteur du marché immobilier n’ai pas chose ai- sée. Les coopératives et les collectivités publiques se doivent ainsi d’être innovantes : les premières en trouvant de nouveaux modes de dévelop- pement de projets, les secondes en repensant le modèle existant.

Les mécanismes qui sous-tendent à la création de ces sociétés à but non lucratif sont complexes voire méconnus. Ce travail vise la mise en lu- mière tant des dispositifs que des dynamiques permettant la levée de fonds et la jouissance d’un terrain pour porter un projet d’habitat coo- pératif. Il ambitionne également la mise à disposition des éléments-clés pour les développeurs de coopératives afin qu’ils puissent appréhender les écueils à dépasser et les opportunités à saisir.

Une démarche qualitative est privilégiée afin de répondre aux questions de recherche et aux objectifs fixés. Les matériaux investigués tiennent de la législation et du fonctionnement des mécanismes institutionnels.

Les données récoltées proviennent de lectures diverses et d’entretiens menés avec des acteurs concernés par le développement de ce type d’ha- bitat.

Il ressort de cette étude que de nombreux leviers financiers sont propo- sés tant par les collectivités publiques - fédérale et cantonales - que par des fondations. Il existe des moyens pour accéder au foncier, cependant l’exiguïté du territoire mène à une forte concurrence entre les différents acteurs, qu’ils soient publics ou privés.

Il apparaît que les collectivités publiques acquièrent et conservent leur foncier, le «louant» aux coopératives. Cette orientation contraint le po- tentiel d’émancipation financière de ces dernières, fragilisant leur po-

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l’imbrication de la législation réduit au développement de logements subventionnés avec pour conséquences un appauvrissement de la mixi- té et une territorialisation de la pauvreté. Il est relevé une forte concur- rence entre les coopératives, appelée ‘’coopétition’’, et une carence de synergies entre elles pour mener des projets communs en mutualisant leurs ressources. Leur positionnement d’acteur prépondérant sur le mar- ché immobilier et leur potentiel d’innovation s’en trouvent diminués.

Pour remédier à ces constats, il serait souhaitable notamment d’/de : -

-

Mots-clés : logement coopératif – levée de fonds – acquisition foncière – mécanismes institutionnels et législatifs – accessibilité au logement.

évaluer la législation afin de vérifier la conformité aux buts r e - cherchés, d’investiguer les différents mécanismes pour en amé- liorer la pertinence et la souplesse, de supprimer ou de réécrire les éléments qui ne sont plus en adéquation avec le contexte actuel ;

introduire un statut spécifique pour les coopératives dans la loi afin d’accroître leur visibilité, de clarifier leurs droits, de pro- mouvoir leur rôle et de les inciter à mutualiser leurs ressources.

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REMERCIEMENTS

Mes remerciements vont en premier lieu à Monsieur Laurent MATTHEY et à Monsieur Nicola CANTOREGGI pour leur suivi académique et leur sou- tien en tout instant. Ils m’ont permis de dépasser les doutes lorsqu’ils s’installaient et ce, jusqu’à la dernière minute avant la reddition de ce mémoire. A chacune de nos rencontres, ils m’ont apporté leurs conseils avisés avec bienveillance et humour, ingrédients indispensables à la motivation et à la bonne orientation de ma recherche.

Je remercie toutes les personnes du groupe de recherche-action Interreg DEVCOOP de m’avoir accueilli à leurs séances de travail. Elles ont renfor- cé ma curiosité pour l’habitat coopératif.

Je tiens à exprimer toute ma reconnaissance aux différents informateurs sans lesquels cette recherche n’aurait pas pu être réalisée, en particulier Monsieur Raphaël CONTI qui m’a fortement inspiré pour la suite et Monsieur Romain FELLI pour son expertise lors ma soutenance.

Enfin, je souhaite bien évidemment remercier tous mes proches pour leur indéfectible soutien tout au long de mon parcours académique et plus encore. Mes amis qui ont su réfréner leur envie de m’inviter à sortir tout en le faisant dans les moments où j’en éprouvais le besoin. Merci à mes parents, à ma soeur et à ma compagne pour leurs encouragements, d’avoir toujours été là pour moi et d’avoir posé la question la plus stimu-lante qui soit : « quand est-ce que tu finis ton master ? »

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Ce travail de fin d’études de master en développement territorial MDT s’inscrit dans le cadre du projet de recherche INTERREG DEVCOOP.

Programme visant à promouvoir le développement du modèle de l’habitat coopératif dans le Grand Genève.

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TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION

I. LES COOPERATIVES DE LOGEMENTS A. Histoire

1. Coopératisme en Europe

2. Mouvement coopératif et dates clés en Suisse

B. Monter une coopérative

1. Définitions

2. Etapes de création d’une coopérative

C. Habitat coopératif : typologie

D. Ni simple locataire, ni seul "propriétaire ", mais coopérateur II. PROBLEMATIQUE

A. Moment clé du projet : levée de fonds et acquisition foncière B. Objectifs, questions de recherche et hypothèses

III. METHODOLOGIE

A. Analyse de documents B. Conduite d’entretiens

C. L’inspiration SWOT en vue de recommandations

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IV. LEVEE DE FONDS ET ACCES AU FONCIER A. Les outils financiers au niveau fédéral

1. Centrale d’émission pour la construction de logements CCL

2. Cautionnement de la coopérative de cautionnement hypothécaire cch 3. Fonds de roulement (Fdr) et Fonds de solidarité (Fds)

4. Fondation Solinvest 5 Bilan

B. Le DDP comme outil d’accès au foncier

1. Définitions

2. Les éléments du droit de superficie 3. Recommandations OFL

V. ANALYSE : LES COOPERATIVES DANS LE CADRE GENEVOIS A. Histoire du développement des coopératives à Genève B. Eligibilité aux aides

C. Acteur de projet, mixité sociale et logement social pour demain D. La « coopétition »

E. Anciennes et nouvelles coopératives : vers un partenariat VI. CONCLUSION

A. Retour sur les hypothèses

B. Enseignements et recommandations VII. BIBLIOGRAPHIE

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INTRODUCTION

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Solutionner la pénurie de logement a de tout temps questionné le système en place.

Des innovations sociales et structurelles ont vu le jour, améliorant les conditions des habitants et répondant à cette carence. Sous l’impulsion de mouvements militants revendiquant un droit au logement et des formes de vie en communauté, un nou- veau mode d’habitat a vu le jour : la coopérative.

Les pouvoirs publics ont vu en elle une opportunité de réponse aux enjeux du loge- ment, tels sa qualité et son accessibilité, et aux aspirations d’une partie croissante de la population. Ces dernières sont partagées par les valeurs portées par les coopé- ratives : la solidarité, l’entraide, la gestion démocratique, le but non lucratif, l’enra- cinement local et le vivre ensemble.

La concrétisation de ces postulats nécessite en premier lieu de comprendre comment créer une coopérative. Appréhender les mécanismes qui sous-tendent à son institu- tion est une condition sine qua non pour développer cette forme d’habitat. Ce volet est souvent peu abordé, voire même passé sous silence, car la nature administrative et juridique qu’il revêt peut s’avérer fastidieuse. Elle nécessite persévérance et en- durance pour les porteurs de projets. Les recherches d’innovations en matière d’ar- chitecture, de participation, d’écologie, etc. sont nombreuses et elles sont mises en lumière. Celles portant sur les dispositifs institutionnels sont plus rares, ces derniers sont cependant primordiaux pour asseoir la faisabilité d’un projet.

Entre 1997 et 2002, en inscrivant dans sa législation de nouveaux moyens dédiés au financement et au foncier pour le l’habitat coopératif, la politique du logement opère un tournant décisif à Genève. Les collectivités publiques actent ainsi leur vo- lonté de soutien aux coopératives. Depuis, elles ont réaffirmé cet engagement au tra- vers d’autres lois et mécanismes institutionnels. Nous relevons que la dernière pro- position1 de modification de la loi générale sur les zones de développement (LGZD) du 31 juillet 2007 visait notamment l’amélioration de l’accessibilité aux logements construits par les collectivités publiques pour la classe moyenne. Ce projet de loi est rejeté par le parlement en octobre 2019 au terme de deux années de travaux marqués par les divergences des acteurs concernés (Conseil d’Etat de Genève, 2020).

Le Grand Conseil adopte cependant la proposition d’un groupe de parlementaires visant le maintien de la teneur de l’article examiné tel qu’existant depuis 2007.

1 Répartition des catégories de logements à construire en 3 portions : 1/3 au moins pour les logements d’utilité publique (LUP) destinés aux personnes à revenus modestes ; 1/3 de logements locatifs destinés à la classe moyenne, dont la moitié en principe réalisée par des maîtres d’ouvrage d’utilité publique (MOUP) ; 1/3 solde de logements à construire laissé au libre choix de celui qui les réalise.

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La présente étude traite de la levée de fonds et de l’acquisition foncière comme défi pour le développement des coopératives à Genève ainsi que des innovations amélio- rant la situation existante. Elle a pour buts de déterminer quelles sont les opportu- nités légales dont disposent les acteurs genevois souhaitant développer une coopé- rative de logement ; de définir les leviers et les limites institutionnels et juridiques des outils en place ; de proposer des enseignements et des recommandations afin d’aider à la prise de décision, tant pour les autorités que pour les développeurs de coopératives.

Les buts de ce travail sont notamment de/d’ :

• déterminer quelles sont les opportunités légales dont disposent les acteurs genevois souhaitant développer une coopérative de logement ;

• définir les leviers et les limites institutionnels et juridiques des outils en place ;

• apporter un éclairage sur les dynamiques des coopératives vis-à-vis du marché du logement ;

• proposer des enseignements et des recommandations afin d’aider à la prise de décision, tant pour les autorités que pour les développeurs de

coopératives.

Les objectifs de ce travail ont permis de proposer les questions de recherche sui- vantes :

• Quels sont les dispositifs financiers et fonciers de la politique de logement genevois qui soutiennent efficacement le développement des coopératives de logement ? Lesquels sont défectueux ?

• Quelles sont les dynamiques des coopératives dans l’élaboration d’un projet ?

• Quelles sont les futures innovations structurelles – du point de vue foncier et financier – et fonctionnelles – concernant l’élaboration et la conduite d’un projet – qui permettraient de développer le logement coopératif à Genève ?

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Une démarche qualitative a été privilégiée afin de répondre aux questions de re- cherches et aux objectifs fixés. Les matériaux recherchés tiennent de la législation et du fonctionnement des mécanismes institutionnels. Les données récoltées pro- viennent de littérature spécialisée et d’entretien menés avec des acteurs concernés par le développement de l’habitat coopératif genevois.

Ce document comporte six chapitres. Le premier d’entre eux rappelle l’histoire du mouvement coopératif en Europe et en Suisse, présente l’établissement d’une socié- té coopérative, expose les typologies d’habitat coopératif et aborde l’alternative que propose la troisième voie au marché du logement traditionnel. Le deuxième chapitre détermine les objectifs, les questions de recherches et les hypothèses. Le troisième chapitre aborde la méthodologie utilisée pour la récolte de données. Le quatrième chapitre décrit les outils de financements et d’accès au foncier. Le chapitre suivant examine les processus concernant la mise sur pied des coopératives. Le sixième cha- pitre comprend une conclusion qui répond aux hypothèses énoncées et propose des enseignements ainsi que des recommandations.

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I LES COOPERATIVES DE LOGEMENTS

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A. Histoire

L’origine du mouvement coopératif provient d’abord d’un changement sociétal fort apparu dès la Révolution française : la pensée libérale. Elle prône le rôle fondamen-tal de la responsabilité individuelle et, comme l’explique Olivier Meuwly, propose que « la liberté est un bien qui s’épanouit si chacun sait organiser ses propres af-faires, sans dépendre des autres » (Meuwly, 2012, p. 10).

L’individualisme est ainsi remis en cause et de nouvelles pensées émergent quant au sort des citoyens en difficulté face à cette nouvelle situation.

1. Coopératisme en Europe

Naissent ainsi les idéaux socialistes, communistes et anarchistes dans un contexte social complexe où l’industrialisation des villes expose un ordre social marqué par les inégalités. La croissance démographique et l’insalubrité citadines, poussent de nouveaux courants intellectuels à questionner le mode de vie des individus. Alors que la discipline de l’urbanisme en est à ses premiers balbutiements, le mouvement coopératif prend sa racine dans les aspirations du courant de pensée progressiste à la fin du 18ème siècle. Portée par le mouvement ouvrier, la coopérative tient de dif- férentes aspirations. De Proudhon, en passant par Buchez, jusqu’au mouvement libé- ral souhaitant concilier le primat de la liberté individuelle et le refus de la lutte des classes, la coopération est la forme la plus établie de mutualité au milieu du 19ème siècle (Meuwly, 2012). Dans le texte « La doctrine coopérative », Marcel Boson écrit :

« Le copératisme s’apparente au socialisme en ce qu’il vise comme ce- lui-ci à la transformation de l’ordre économique existant, qui lui apparaît non seulement injuste, mais antiéconomique, c’est-à-dire gros à la fois de gaspillage et de spoliation. Mais il s’en sépare en ce que l’exploité dont il se préoccupe, c’est moins le salarié que le consommateur, et le but qu’il vise, c’est moins l’abolition du salariat que l’abolition du profit, en entendant par là toute majoration sur le coût de production, autrement dit l’établissement du juste prix. La réalisation d’un tel programme consti- tuerait assurément une révolution économique puisqu’elle ferait passer le gouvernement économique des mains des producteurs à celles des consommateurs et enlèverait au capitaliste le commandement de l’indus- trie aussi bien que la perception des profits ; mais révolution qui n’impli- querait aucune coercition, même légale, aucune lutte de classes, puisque le consommateur c’est tout le monde, et qui ne toucherait pas à ce qu’on appelle les fondements de l’ordre social : propriété individuelle, hérédité, intérêt. »

(Boson, 1969, pp. 256-257)

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Théoricien célèbre en Suisse sur le mouvement coopératif, Marcel Boson résume ainsi la vision du coopératisme empreinte de compromis entre les différentes aspi- rations qui ont marqué le 19ème siècle. Cette vision se développe dans un système économique capitaliste, tout en prônant un salaire juste sans profit démesuré («

juste prix »), afin d’éviter tout abus et injustice envers les consommateurs. Ceux-ci verraient le système leur donner un rôle actif par les denrées qu’ils produiraient, et non pas simplement un rôle passif d’acheteur de produits créés par des industries de grande envergure.

Pas encore formalisée, cette nouvelle doctrine prend ses racines dans les travaux de Robert Owen et de Charles Fourier. Le premier est à la base de l’expérience du village ouvrier écossais de New Lanark en Ecosse. Directeur d’une filature entre 1800 et 1825, Owen propose pour cette manufacture un changement drastique dans le mode de vies de personnes. Selon lui, le « caractère humain est formé pour lui et non par lui » (Siméon, 2019, p. 183), c’est pourquoi il souhaite améliorer en profondeur l’environnement direct des ouvriers pour agir à la racine des problèmes. Il prône ain- si une qualité de vie sans pareil à l’époque (moins d’heures de travail, salubrité, pro- gramme d’éducation novateur). Ce succès retentissant lui permet de mettre en place une véritable utopie coopérative en fondant New Harmony aux États-Unis. Malgré l’échec de cette dernière, Owen est considéré comme un des pères de la coopérative de par son questionnement structurel de la société et son engagement pour le bien- être au quotidien par l’entraide. Fourier, quant à lui, est connu pour la conception du Phalanstère, communauté idéale composée de plus de 1’800 sociétaires choisis selon leurs passions et regroupés dans un seul et même bâtiment. Le phalanstère tel que le percevait Fourier n’a jamais vu le jour, mais des projets semblables comme le Familistère de Guise ou encore la Colonie de Condé-sur-Vesgre ont été construits durant le 19ème siècle. Ils sont les prémices de l’habitat partagé. Léo Biétry rap- pelle que le mouvement coopératif a d’abord été porté vers « les coopératives de consommation, organisations autogérées constituées d’ouvriers, puis d’employés, de fonctionnaire et de paysans, dont le but était d’assurer la distribution de biens d’usage courant » (Biétry, 2006, p. 11). On peut ainsi citer la première coopérative de consommation de Rochdale fondée en 1844. Elle est à l’origine de certains principes actuellement utilisés par les coopératives : la liberté d’adhésion et de sortie, une gestion démocratique, un partage des résultats, la limitation de la rémunération des parts sociales. Les premières coopératives de logement naissent en Grande-Bretagne à travers un système d’aide à la construction et à l’accession au logement. En effet, les « Building Societies » sont les premières ébauches des actuelles coopératives de logement.

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2. Mouvement coopératif et dates clés en Suisse

Alors que le fonctionnement social est marqué depuis le Moyen-Âge par la mutuali- té, la Suisse est un terreau fertile de la coopérative selon Meuwly. En citant le théo- ricien suisse Marcel Boson, il explique que le terme allemand Eidgenossenschaft (Confédération) est composé de « Genossenschaft » (coopérative). La construction de la Suisse à travers le temps repose sur un réseau de partenariats et sur le dialogue de ceux qui la composent. Olivier Meuwly écrit que « le fédéralisme et la démocratie di- recte émargent à cette réalité « coopérativiste » : respect des minorités, intervention des associations, solidarité basée sur la participation de tous, mise en commun des moyens d’actions » (Meuwly, 2012, p. 12). Tout semble alors indiquer que la Suisse a pu jouer un rôle de précurseur en termes de coopératisme.

En 1851, la première coopérative suisse recensée se forme à Zurich : la Konzumve- rein. Cette coopérative de consommation prend exemple sur celle de Rochdale et initie le mouvement coopératif en Suisse (Degen, 2019). Les coopératives de lo- gement sont le dernier type coopératif à s’installer dans le paysage suisse. Durant tout le 19ème siècle, la quasi-totalité des promotions immobilières est soutenue par des entreprises privées (Lawson, 2009). En 1892, la première coopérative de logement suisse est fondée à Zurich : la Zürcher Bau- und Spargenossenschaft. Les sociétaires qui la composent ne sont alors pas des ouvriers, comme le laissent pen- ser les origines intellectuelles de ce mouvement, mais des bourgeois souhaitant s’affranchir des créanciers ainsi que des propriétaires et se soustraire durablement le logement à la spéculation (Biétry, 2006). Les membres des coopératives de loge- ment de ce temps prennent comme modèle la cité-jardin, introduite par Ebenezer Howard. Adrien Poullain explique que Howard la conçoit « comme de petites villes gérées et financées par les habitants eux-mêmes » et que « l’idée était de réconcilier ville et campagne en juxtaposant des maisons au cœur d’un grand parc » (Poullain, 2018, p. 31).

Le début de 20ème siècle est difficile pour tout individu souhaitant se loger ; Phi- lippe Thalmann explique que le milieu ouvrier est frappé par une pénurie de loge- ment en 1910, suivie par une campagne de construction massive (20’139 logements dans les 26 plus grandes communes de Suisse entre 1911 et 1914) afin d’y remédier (Thalmann P. , 2019). Le début de la Grande Guerre impacte négativement le marché immobilier suisse. En effet, le recul de la population, l’incertitude générale et la pénurie de capitaux, de matériaux et de main d’œuvre sont des vecteurs qui vont conduire à une pénurie de logements, palliée par une politique de la Confédération basée sur des crédits avantageux à fonds perdus, en subsides de l’aide cantonale et communale (Thalmann P. , 2019). La coopérative de logement est alors plébiscitée par la classe ouvrière, car elle offre un meilleur cadre de vie, permet d’habiter à proximité des villes et est financièrement moins onéreuse. Les catégories les plus basses de la classe moyenne ouvrière fondent les premières coopératives pour et par elles-mêmes. Léo Biétry explique :

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« L’un des exemples les plus spectaculaires remonte à 1916, date à laquelle 15 ou- vriers sans ressources fondèrent l’Allgemeine Baugenossenschaft Zürich (ABZ), deve- nue aujourd’hui la plus grande coopérative d’habitation de Suisse. La stratégie adop- tée pour lancer la société était aussi simple qu’efficace : la part sociale d’entrée était fixée à Fr. 25.–, mais elle pouvait être payée par mensualités de Fr. 0.20. Résultat : fin 1920, la coopérative totalisait 2’000 membres et un capital social de Fr. 45’000.–, 6’000 sociétaires et Fr. 222’000.– de fonds propres trois ans plus tard ! »

(Biétry, 2006, p. 13)

C’est dans ce contexte que naît la première coopérative de logements genevoise:

la Société coopérative d’habitation Genève (SCHG), reconnue encore aujourd’hui comme étant la plus grande de ce canton. Depuis leur apparition dans le Code des obligations en 1912, les coopératives de logement continuent leur essor, notam- ment en 1942 par de nouvelles aides financières accordées par l’État fédéral, qui répond à une baisse des constructions due à la Deuxième Guerre mondiale. Après celle-là, les chiffres démontrent une augmentation des constructions durant la pé- riode 1971-1975 pour répondre à la pénurie de logement commencée à la fin de la guerre et terminée en 1975 (Thalmann P., 2019). Pour le cas des coopératives, les collectivités publiques proposent une mise à disposition de terrains en droit de superficie, le cautionnement ou l’octroi de prêts hypothécaires, et la participation au capital social de certaines coopératives (Lescaze, Hiller, & Frei, 1994). La forte baisse de constructions s’explique par le choc pétrolier de 1973 qui frappe cette branche de plein fouet. Alors que la construction de logements s’essouffle, la génération du baby-boom vient contraindre le marché immobilier du début des années 80 : la demande augmente fortement, tandis que l’offre remonte péniblement, engendrant une nouvelle pénurie.

La Loi fédérale sur le logement du 21 mars 2003 (LOG) marque un tournant dans la manière d’appréhender le développement des coopératives. En Suisse, la condition pour accéder à des aides publiques (Roulin, 2015) est d’être considéré comme « Maître d’ouvrage d’utilité publique » (MOUP), au sens de la LOG :

« Sont réputés organisations œuvrant à la construction de logements d’utilité publique les maîtres d’ouvrage s’occupant de la construction de logements d’utilité publique, leurs organisations faîtières, les centrales d’émissions ainsi que les établissements de cautionnement hypothécaire et d’autres institutions se consacrant à l’encouragement de l’offre de logements à loyers ou à prix modérés. »

LOG Art. 4 al.2

Les coopératives bénéficient d’une politique proactive fédérale marquant un nou- veau départ pour ce mode d’habitat.

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Figure 1 : Construction de logements dans les communes de plus de 10 000 habi- tants 1914-2000

Source : Annuaire statistique de la Suisse

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1. Définitions

Dans l’étude Les coopératives de logements dans le canton de Vaud, Pattaroni et Marmy exposent les différentes notions qui définissent juridiquement en Suisse une coopérative de logement : une société coopérative (1) produit du logement d’utilité publique (2), suit une activité à but non-lucratif (3) et évite la spéculation immobi- lière (4) par un loyer à prix coutant (5) (Pattaroni & Marmy, 2016). Inspiré de Pattaro- ni et Marmy, il convient de bien distinguer et expliquer les notions qu’elle implique.

B. Monter une coopérative

(1) La notion de coopérative : une coopérative a un statut légal dans la constitution suisse et est définie par l’article 828 alinéa 1 du Code des obligations (CO, RS 220) comme un groupement de personnes physiques ou morales, d’un nombre variable, organisées corporativement et poursuivant principalement le but de favoriser ou de garantir, par une action commune, des intérêts économiques déterminés de ses membres. De plus, la société de coopérative doit être inscrite au registre du commerce et disposer de statuts . La coopérative s’étendant à différents domaines d’activité, il convient de souligner qu’elle est majoritairement dédiée aux services financiers, au com- merce de détail et aux activités immobilières (Gachet & Gonin, 2012). Elle doit être composée d’au minimum sept membres.

(2) La notion d’utilité publique : L’article 4, alinéa 2 de la loi fédérale sur le logement du 21 mars 2003 (LOG, RS 842) expose que les coopératives sont des maîtres d’ouvrage pouvant revendiquer le statut d’utilité publique.

A l’alinéa 3, il est en outre précisé qu’est considérée d’utilité publique « toute activité à but non lucratif qui sert à couvrir les besoins en logements à loyer ou à prix modérés ». Pour être reconnues comme maîtres d’ouvrage d’utilité publique, les coopératives doivent inscrire cette notion dans leurs statuts et reconnaître les principes de la Charte des maîtres d’ouvrage d’utilité pu- blique (OFL, 2018)2. Pattaroni et Marmy rappellent que cette charte n’a pas de portée juridique directe et n’implique ni droits ni obligations. Elle met en avant notamment que les maîtres d’ouvrage d’utilité publique doivent construire, maintenir et acquérir de préférence des logements à prix avanta- geux, tout en exigeant un entretien de qualité durable et soucieux des coûts pour une conservation de la valeur de l’immeuble. Il en résulte un calcul des loyers en fonction des coûts et en renonçant à verser des bénéfices. De plus, les MOUP doivent offrir un habitat favorisant la mixité, donc abordable économiquement pour différentes strates sociales. Pour bénéficier d’aides fédérales, une coopérative doit impérativement adhérer à cette charte, puis faire valider ses statuts par le service juridique de l’Office fédéral du loge- ment (OFL).

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(3) La notion d’activité à but non-lucratif : Pour être nommée « à but non-lucratif », une activité doit afficher un caractère désintéressé et ne viser aucun avantage à titre personnel. Si des bénéfices ont été réalisés, ils doivent être réinsérés dans l’organisation afin qu’elle puisse contenter la totalité (ar- ticle 6, alinéa 1, lettre a de la loi fédérale sur le droit des timbres (LT, RS 641.10)). Il est ainsi interdit de reverser un certain pourcentage à qui que ce soit et le capital social ne peut être rémunéré à un taux supérieur à 6 % du capital social versé.

(4) La notion de logement à loyer modéré : la notion de logement est clairement définie par la loi suisse, alors que celle du « logement à loyer modéré » n’est pas juridiquement déterminée et reste sujette à interpréta- tion. Cependant, elle est couramment comprise comme un encouragement à l’offre « pour les ménages à revenu modeste » (article 1 alinéa 1 LOG) ou de logements « destinés aux personnes économiquement ou socialement défa- vorisées » (article 10 LOG) (Spori & Bühlmann, 2010, p. 6). Si la coopérative est reconnue d’utilité publique, les logements qu’elle construit peuvent être considérés comme des « logements d’utilité publique ». Cette notion im- plique que l’accessibilité financière des logements soit assurée durablement, tandis que le « logement à loyer modéré » ne comporte pas de spécification quant à la durabilité. Celui-ci peut impliquer différents statuts légaux selon le contexte qu’il comprend (fédéral, cantonal).

(5) Le principe de loyer à prix coûtant : Les loyers sont calculés sur la base des seuls coûts réellement supportés par le bailleur, à savoir les coûts d’investissement (coût de revient de l’objet et intérêts correspondants) et les coûts d’exploitation (frais d’entretien et de réparation, frais administratifs, etc.). La Charte des maîtres d’ouvrage d’utilité publique en Suisse est à la base de ce calcul, qui fonde les loyers sur les coûts et non sur le taux de vacance du marché immobilier. Pour que les loyers à prix coûtant restent stables dans le temps, l’OFL a fixé, dans son ordonnance du 27 janvier 2004 (RS 842.4), les limites que ce coût ne doit pas dépasser. Les maîtres d’ou- vrage d’utilité publique doivent ainsi respecter cette ordonnance, sans quoi ils n’auront pas accès aux aides fédérales (Spori & Bühlmann, 2010, pp. 6-7).

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2. Étapes de création d’une coopérative

Pour adhérer à une coopérative, plusieurs étapes doivent être réalisées. En repre- nant le slogan de l’Association régionale des maîtres d’ouvrage (ARMOUP)3 « fonder, construire, habiter », nous avons repris ces étapes ci-après. Elles traitent de la forma- lisation d’un groupement coopératif, des moyens permettant la construction et de l’habitation du lieu.

Temps 1 : fonder

- La rédaction des statuts (CO) : elle forme la constitution et les règles de fonctionnement de la coopérative. Les statuts types sont :

a. Nom : les fondateurs peuvent choisir un nom de manière libre. Il doit cependant être indentifiable en tant que coopérative et

distinguable d’entreprises existantes.

b. But : cet article définit brièvement les objectifs poursuivis par la coopérative.

c. Utilité publique : ce point reprend celui discuté plus haut.

d. Fonds propres : les coopérateurs contribuent au capital par un système de parts sociales ; la hauteur de leur montant est librement fixée.

e. Société à but non-lucratif : les statuts doivent fixer le taux de rémunération des parts sociales et prévoir où seront renvoyés les excédents en cas de dissolution de la coopérative.

f. Conseil d’administration et assemblée générale : l’assemblée générale (AG) est l’organe décisionnel de la coopérative et le conseil d’administration regroupe les personnes l’administrant.

g. Organes de révision : ils peuvent être externes ou internes à la coopérative et s’engagent à s’assurer de son bon fonctionnement.

Au niveau romand, l’ARMOUP est un interlocuteur de premier ordre qui permet de récolter des informations, de développer des contacts et d’échanger avec des professionnels du développe- ment des coopératives. Cette association compte 230 membres actifs, qui gèrent un parc immo- bilier de 26’000 logements en Suisse romande.

L’association faîtière Coopérative d’habitation Suisse est une des structures les plus importantes (si ce n’est la plus importante) pour le développement de la coopérative. Elle répertorie les de- mandes d’aides financières. Pour prétendre aux aides fédérales, il est nécessaire d’adhérer à l’AR- MOUP et à Coopérative d’habitation Suisse.

(22)

21

.

- L’assemblée constitutive : Suite à la rédaction des statuts, l’assemblée constitutive doit regrouper au minimum 7 personnes détentrices de parts sociales et remplir les éléments suivants :

o Invitation : tous les points utiles à l’ordre du jour de l’assemblée constitutive doivent être mentionnés dans l’invitation et le projet des statuts doit figurer dans les annexes.

o Rapport de fondation : il n’est indispensable qu’en cas de

mesure précise souhaitée par la coopérative (p. ex. l’acquisition d’un immeuble).

o Procès-verbal : le procès-verbal doit comporter le traitement et l’approbation du projet des statuts, les élections des organes, le siège social de la coopérative.

- L’inscription au Registre du Commerce (RC) : elle est la formalisation administrative de la coopérative ; l’ARMOUP invite à produire les documents suivants :

o Procès-verbal de l’assemblée constitutive dûment signé, statuts dûment signés.

o Déclaration individuelle d’acceptation des élus du conseil

d’administration, déclaration du siège social, déclaration Stampa, déclaration Lex Friedrich.

o Signatures.

La part sociale : tandis que les sociétés anonymes proposent des actions librement cessibles sur un marché organisé, la société coopérative fonctionne par parts sociales. Elles ont différents rôles pour la coopérative :

- La part sociale est l’acte qui fait d’une personne un membre de la coopérative ; - Ce qui confère, en principe, au coopérateur un droit de vote concernant les décisions

collectives (à minima l’assemblée générale) qu’il habite ou non les logements de la coopérative ;

- Dans le deuxième cas, elle donne accès à une liste d’attente pour un futur logement ; - La part sociale est proportionnée par la surface, le prix du logement et, dans certains

cas, la situation personnelle du coopérateur ;

- Les parts sociales sont la base des fonds propres de la coopérative ;

- Lorsqu’une personne souhaite quitter une coopérative, elle a l’obligation de revendre les parts sociales de son logement au prix où elle les a acquises, afin d’éviter

toute spéculation.

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Temps 2 : construire

- La levée de fonds et les financements : la coopérative n’ayant souvent que peu de fonds propres, il est possible de recourir à des aides financières émanant des instances publiques.

- L’acquisition de terrain : il s’agit du moment où une opération foncière est réalisée, que ce soit pour une parcelle, un immeuble ou des appartements.

Le Droit distinct et permanent de superficie (DDP), communément appelé droit de superficie, est un moyen légal de jouir d’un terrain appartenant au domaine public. L’Office fédéral du logement (OFL) le définit comme :

« Le droit de superficie est un contrat conclu entre deux parties qui répartit les rap- ports de propriété du bien-fonds pour une durée limitée entre terrain et bâtiment. Ce faisant, le superficiant (propriétaire foncier) confère au superficiaire le droit d’ériger et de conserver au-dessus ou au-dessous du sol un immeuble.

Le droit de superficie permet donc d’utiliser pour ses propres intérêts le terrain, dont on n’est pas directement propriétaire, pendant une durée longue mais néanmoins limitée. En contrepartie, on conviendra en règle générale d’une rente du droit de su- perficie. Pour sa garantie, le propriétaire foncier peut requérir l’inscription d’un droit de gage légal du titulaire du droit de superficie pour un montant maximal de généra- lement trois rendements annuels. »

(Office fédéral du logement OFL, 2017)

- Le projet – le permis de construire : le projet doit être conforme au Plan localisé de quartier (PLQ) en force ou si, tel n’est pas le cas, la coopérative doit proposer un PLQ qui doit être accepté par les autorités compétentes et dépasser de possibles recours. Il convient ensuite de faire une demande de permis de construire à l’institution concernée.

- La réalisation : le permis de construire délivré, la construction peut commencer.

Temps 3 : habiter

- L’exploitation : les coopérateurs peuvent investir les lieux du projet.

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23

Après avoir traité les étapes qui permettent de créer un logement coopératif, nous allons aborder les différentes formes que cet habitat peut revêtir. La coopérative d’habitation et la coopérative d’habitants, appelée aussi coopérative participative d’habitation, sont les deux modèles principalement rencontrés.

Pattaroni et Marmy relèvent que ces deux modèles ne se différencient pas légale- ment en Suisse. Cependant, les auteurs établissent une typologie de coopératives selon différents critères présentés ci-après et exposent :

« L’idée générale est que les coopératives d’habitation sont fondées sur un modèle traditionnel où un groupe d’acteurs professionnels – sans but lucratif – qui œuvre à fournir des logements de qualité à un prix abordable aux membres de la coopéra- tive, voire aux ‘’simples’’ locataires. Les coopératives d’habitation seraient en général anciennes, grandes, et peu, voire pas, participatives. Au contraire, les coopératives d’habitants seraient plus récentes (émergeant après la Seconde Guerre mondiale et surtout à partir des années 60) et prendraient la forme typique d’un petit groupe d’habitants se constituant en coopérative pour construire – ou rénover – leur lieu d’ha- bitation. Elles seraient plus petites et plus participatives. »

(Pattaroni & Marmy, 2016, p. 39)

Bien qu’apportant un premier élément de réponse, les auteurs de cette analyse jugent insuffisante la portée de ces résultats, car marqués de modèles contrastés.

Ces modèles sont caractérisés par des différences dans trois données : le niveau de contribution financière, la taille de la coopérative et le niveau d’implication des habitants. Cette dernière donnée réfère par exemple au niveau de participation ou encore au statut de l’habitant, c’est-à-dire au fait qu’il soit membre de la coopérative ou simple locataire. A partir de données récoltées sur des coopératives de logement dans le canton de Vaud, Pattaroni et Marmy esquissent trois catégories à partir de deux critères : le statut des habitants et leur contribution financière.

Figure 2 : Typologie de coopérative en fonction du statut des habitants et de la contribution financière, Pattaroni et Marmy, Les coopératives de logement dans le canton de Vaud p.39

C. Habitat coopératif : typologie

Figure 2 : Typologie des coopératives en fonction du statut des habitants et de leur contribution financières

Source : Pattaroni et Marmy, 2016

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De ces trois catégories, les deux auteurs tirent trois types d’habitat partagé : 1. Les coopératives « sociales » : ce type de coopérative comporte des

habitants n’étant pas membres de la coopérative, n’ayant pas payé une part social pour ce logement et, donc, ne pouvant pas voter dans la cadre des décisions communes de la coopérative. Pattaroni et Marmy expliquent que

« ce modèle de coopérative tend à réduire la coopérative à sa fonction de productrice de logements » (Pattaroni & Marmy, 2016, p.40) et ajoutent que la grande majorité de ces coopératives ne demandent aucune

contribution financière.

2. Les coopératives d’habitation : tous les habitants sont membres de la coopérative et, dans la plupart des cas, contribuent financièrement aux fonds propres de la structure. La coopérative cherche ainsi à permettre à chacun d’être inclus dans le processus participatif tout en garantissant une bonne accessibilité financière.

3. Les coopératives d’habitants : le troisième type est exclusivement composé de coopérateurs, chacun apportant une contribution financière élevée. Il se élevée. Il se rapproche du modèle de petite coopérative, marquée par une forte dimension d’égalité et par une forte inclusion de leurs membres.

Cette catégorie est essentiellement constituée de coopératives relativement jeunes.

Figure 3 : Contribution financière en fonction du statut des habitants, Pattaroni et Marmy, Les coopératives de logement dans le canton de Vaud p. 40

Figure 3 : Contribution financière en fonction du statut des habitants

Source : Pattaroni et Marmy, 2016

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25

Bien qu’elles soient recensées dans le canton de Vaud, ces trois catégories per- mettent de remarquer une certaine distribution dans le parc immobilier. De par leur ancienneté notamment, les coopératives « sociales » et les coopératives d’habitation sont en nombre plus important que les coopératives d’habitants.

Luca Pattaroni et Vanessa Marmy approfondissent leurs propos en évaluant dans le temps les buts inscrits dans les statuts des coopératives. L’hypothèse émise est que

« les nouvelles coopératives ont des buts qui vont au-delà de la seule production de logements à bas coûts et intègrent des objectifs relatifs à la participation ou encore à la protection de l’environnement » (Pattaroni & Marmy, 2016, p. 41). En plus d’être créatrice de logements abordables, la coopérative propose aussi un système partici- patif qui joue un rôle dans le fonctionnement du développement urbain. Les deux points d’analyse sont alors :

1. Les buts jugés classiques reprennent les notions (3), (4) et (5) exposées lors de notre définition de la coopérative.

2. Les buts jugés innovants sont les buts additionnels aux buts classiques. Ils sont souvent relatifs « aux questions de la participation, à la

qualité des relations sociales ou encore au rôle de la coopérative dans le développement de l’urbain » (Pattaroni & Marmy, 2016, p. 41). Ils

ambitionnent souvent la mixité, la solidarité, la responsabilité sociale, les échanges entre habitants ou encore l’autogestion.

Figure 4 : Évolution historique des buts inscrits dans les statuts des coopératives, Pattaroni et Marmy, Les coopératives de logement dans le canton de Vaud p. 41

Figure 4 : Evolution historique des buts inscrits dans les statuts des coopératives

Source : Pattaroni et Marmy, 2016

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La Figure 4 démontre que les coopératives les plus récentes, bien que moins nom- breuses en termes de capacité de logement, fixent davantage de buts innovants que leurs aînées. De plus, ce constat croisé avec l’échelle liée à la participation a permis de relever que plus les coopératives étaient jeunes, et donc innovantes, plus elles étaient inclusives et participatives. Pattaroni et Marmy écrivent :

« Ces deux constats – le fait que les coopératives ayant des buts innovants sont à la fois jeunes et ont un niveau de participation élevé – incitent à penser qu’il y a une vraie transformation d’une partie des coopératives de logements qui s’opère. C’est en effet une nouvelle génération de coopératives qui porte en elle des objectifs qui vont au-delà de la production de logements et qui applique réellement ces objectifs à tra- vers la mise en place d’une organisation sociale des individus ainsi que des espaces qui invitent à la participation. »

(Pattaroni & Marmy, 2016, p. 42)

Les auteurs suggèrent ainsi qu’un quatrième type de coopérative de logement est envisageable : la coopérative d’innovation. Elle est présentée comme ayant un socle participatif fort, mais surtout comme exposant par ailleurs de nombreux buts dépas- sant le simple objectif de production de logements. De ces constats, ils tirent une analyse factorielle par ancienneté-taille-participation. Pattaroni et Marmy observent que les anciennes coopératives sont, pour la plupart d’entre elles, moins participa- tives et de taille plus importante. Les jeunes coopératives, dites primo-coopératives, sont plus participatives et plus petites. Ils relèvent cependant que Zurich et Genève comptent des formes de coopératives innovantes, avec à la fois un niveau de partici- pation élevé et une taille relativement importante.

La question de l’habitat partagé et de ses typologies est en outre plus complexe qu’un simple rapport binaire. En analysant les données de taille, de niveau de par- ticipation des habitants, de contribution financière aux fonds propres et d’objectifs collectifs, Pattaroni et Marmy finalisent leur typologie en distinguant quatre types de logement coopératif :

- La coopérative d’habitation - La coopérative d’habitant - La coopérative « sociale » - La coopérative d’ « innovation »

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27

Les différences structurelles entre la PPE et la coopérative sont un pas de plus pour identifier et comprendre la troisième voie4. La coopérative de logement diffère du logement traditionnel en certains points. Comme présenté ultérieurement, la ques- tion des rapports ‘’public vs privé’’ et ‘’habitat en location vs habitat en propriété’’

est plus complexe que dans l’ancien paradigme. Ce dernier est composé d’un marché immobilier qui offre deux alternatives : la première est un logement détenu par les instances publiques et destiné à être loué à des personnes souvent en difficulté financière, la deuxième est un logement détenu par des privés et destiné soit à être habité par le détenteur directement (habitat en propriété), soit à être loué à des personnes extérieures (habitat en location).

4 Troisième voie : « les coopératives se conçoivent comme la troisième voie entre propriétaire et locataire » (voir : https://www.

domainepublic.ch/articles/16750 )

Propriété par étage (PPE) et coopératives : très en vogue, la PPE est un nouvel instrument d’ac- cession au logement. Il est important de la mettre en perspective avec la coopérative. Lors de la remise sur le marché d’un logement, Roulin rappelle que la PPE se revend au prix du marché et que ce système entretient donc la spéculation (Roulin, 2015). Sujet parfois à amalgame, il semble bon de définir la PPE et de discerner les différences qu’elle présente avec la coopérative.

La PPE est une copropriété, ce qui signifie que plusieurs personnes sont propriétaires d’une cer- taine partie d’une habitation. A la différence du coopérateur, le copropriétaire est doté « d’un droit exclusif qui s’applique d’abord à son logement, mais éventuellement aussi à une autre pièce, par exemple un atelier. Ce droit exclusif permet au propriétaire de faire plus ou moins ce qu’il veut : il peut aménager l’intérieur du logement à sa guise, le vendre ou le grever d’hypothèque » (Brandani, 2019). Le coopérateur ne jouit pas d’une telle liberté, car c’est bien la coopérative qui détient les logements, alors que dans le cas d’une PPE, le copropriétaire, comme son nom l’in- dique, détient son logement. Brandani poursuit et explique que « la propriété par étage ne trans- fère pas de propriété particulière aux propriétaires pour leur locaux. Avec ou sans propriétaire par étage, le bâtiment entier avec tous les logements et autres pièces qu’il comprend est la propriété de tous les copropriétaires » (Brandani, 2019). Les éléments du bien immobilier sont définis soit comme bien commun (sol, murs, entrées, …), soit comme bien exclusif (caves individuelles, local de bricolage privé) ou de jouissance exclusive (bancs de jardin, places de parc exclusivement à tous les copropriétaires).

Il existe des points convergents dans ces deux modes d’habiter, notamment la question du par- tage de certains espaces, de la concertation entre habitants quant au devenir de ceux-ci, et du coût du logement. Dans le cas de la PPE, les parties communes appartiennent à tous et les co- propriétaires débattent ensemble sur ces lieux. Le prix de l’habitat est aussi bien moindre que le marché traditionnel par le fait que les coûts sont divisés par tous les copropriétaires ; pour la coopérative, les coopérateurs se concertent pour discuter de l’habitat dans lequel ils vivent et pour prendre des décisions quant au fonctionnement de la coopérative.

D. Ni simple locataire, ni seul "propriétaire"

mais coopérateur

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Le rapport ‘’public vs privé’’ expose la différence quant à la détention du logement:

la troisième voie sort quant à elle de la binarité du logement ‘’traditionnel’’. En ef- fet, une instance publique ou privée peut mettre à disposition un terrain pour une coopérative, ses coopérateurs devant respecter les notions énoncées précédemment selon Marmy et Pattaroni, ce qui a comme conséquence de sortir du marché immobi- lier spéculatif basé sur la concurrence entre privés. La coopérative peut être le maître d’ouvrage de son logement, permettant ainsi une certaine autonomie et une impli- cation nouvelle des individus dans le développement du logement. Elle n’en est pas pour autant détenue ou pilotée par le public. Le rapport Construction de logements : la troisième voie rappelle que les coopératives de logement ne sont pas des loge- ments sociaux5 et que la majorité d’entre elles exercent leurs activités sans aucun soutien public ; certaines aides financières publiques peuvent être demandées au début des projets et la santé financière de celle-ci rime souvent avec ancienneté (Coopérative d’habitation Suisse & Wohnen Schweiz, 2019).

La coopérative propose aussi une alternative dans le cas de l’antagonisme entre ha- bitat en location et en propriété. Le rapport conflictuel entre valeur d’usage et valeur d’échange n’existe plus dans une coopérative : tout coopérateur est locataire et fait partie d’un collectif qui est détenteur d’un terrain.

5 « Seuls sont réputés «logements sociaux» ceux dont les loyers sont abaissés par les pouvoirs publics de manière ciblée et qui sont exclusivement loués à des ménages remplissant des règles clairement définies en matière de revenu, de fortune et d’occupation. » (Coopérative d’habitation Suisse & Wohnen Schweiz, 2019, p. 16)

Figure 5 :Alternative structurelle proposée par la troisième voie

Source : Production personnelle

(30)

II PROBLEMATIQUE

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L’alternative structurelle que propose la coopérative comporte deux opportunités : la première se rapporte à une nouvelle expérience sociétale et communautaire. La littérature met ainsi en avant les bienfaits qu’elle offre notamment au niveau social (renforcement du lien social, mixité intergénérationnelle et socioprofessionnelle, etc.), politique (gestion démocratique de l’habitat, responsabilisation des habitants, etc.) et environnemental (utilisation de matériaux locaux, performance énergétique des bâtiments, etc.). La seconde consiste en une occasion de proposer des logements à un prix bien moindre que ceux poursuivant une logique de marché. Si elle est ju- dicieusement établie, une politique favorisant ce type de logement lutte activement contre la flambée des prix de l’immobilier.

Si les bienfaits que la coopérative peut apporter à la société sont importants, le temps qui s’écoule entre sa création et l’habitation effective du logement est généralement long, car de nombreuses contraintes interfèrent dans la conduite du processus. Deux obstacles souvent cités sont susceptibles d’entraver la réalisation du projet.

Ces deux points coïncident avec les étapes, précédemment abordées, de la levée de fonds et de l’acquisition de terrain ou de DDP. Ils représentent un moment charnière de la réalisation du projet en ce sens qu’ils peuvent nécessiter beaucoup de temps et d’énergie. Chacune de ces deux étapes comportent des moyens légaux permettant d’aider les coopératives à parvenir à la demande d’autorisation. Cette dernière n’est pas à négliger, mais elle implique un champ d’étude moins large et moins intéres- sant que celui lié aux points cités précédemment pour notre cas d’étude.

A. Moment clé du projet : levée de fonds et acquisition foncière

Le premier est relatif aux méthodes de financement. A elles seules, les parts sociales ne suffisent pas à soutenir financièrement le poids des différentes étapes de création d’une coopérative. S’il existe des aides au financement, les modalités pour en bénéficier sont sou- vent complexes ou méconnues (Pattaroni, Kaufmann, & Rabinovich, 2009). La difficulté de consentir à des aides bancaires et autres ap- puis financiers complexifie le projet ; or, sans celles-ci, la réalisation des avant-projets est parfois impossible car trop coûteuse (Pattaroni

& Marmy, 2016).

L’accès au foncier est le second point qui pose nombre de problèmes aux coopératives (Pattaroni, Kaufmann, & Rabinovich, 2009). Outre les restrictions légales imposées par la Confédération en termes de surfaces d’assolement6 qui mettent en concurrence encore plus d’acteurs pour accéder au logement, les coopératives sont souvent confrontées pour l’obtention d’un terrain à des promoteurs privés qui disposent de capacités financières bien plus élevées (Roulin, 2015).

(32)

31

Ce travail ambitionne de mettre en lumière les logiques opérationnelles auxquelles peuvent avoir recours les coopératives à Genève. Il aborde également leurs dyna- miques face au marché de l’immobilier. Les processus de levée de fonds et d’accès au foncier en sont le fil rouge.

Définir et comprendre les dispositifs institutionnels est primordial pour identifier les forces et faiblesses du cas d’étude. Ce point sera abordé au chapitre IV. L’étude analysera les entretiens conduits auprès de différents acteurs concernés par le loge- ment coopératif. L’analyse permettra notamment d’identifier les contraintes et les opportunités du contexte genevois au chapitre V. Les recommandations seront pré- sentées dans la conclusion.

Ce travail vise à accompagner concrètement toute personne souhaitant développer le logement coopératif. Il poursuit une double finalité, à savoir pédagogique et opé- rationnelle. Dans une perspective d’accession à des aides financières et à du foncier, les quatre objectifs de ce travail sont de/d’ :

• déterminer quelles sont les opportunités légales dont disposent les acteurs genevois souhaitant développer une coopérative de logement ;

• définir les leviers et les limites institutionnels et juridiques des outils en place ;

• apporter un éclairage sur les dynamiques des coopératives vis-à-vis du marché du logement ;

• proposer des enseignements et des recommandations afin d’aider à la prise de décision, tant pour les autorités que pour les développeurs de

coopératives.

Les objectifs de ce travail ont permis de proposer les questions de recherche sui- vantes :

• Quels sont les dispositifs financiers et fonciers de la politique de logement genevois qui soutiennent efficacement le développement des coopératives de logement ? Lesquels sont défectueux ?

• Quelles sont les dynamiques des coopératives dans l’élaboration d’un projet ?

• Quelles sont les futures innovations structurelles – du point de vue foncier et financier – et fonctionnelles – concernant l’élaboration et la conduite d’un projet – qui permettraient de développer le logement coopératif à Genève ?

B. Objectifs, questions de recherche et hypothèses

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A partir des données qui ont déjà été récoltées, des hypothèses ont émergé :

• Hypothèse 1 : étant fortement lié à la loi de promotion de logement social, le modèle coopératif peut devenir un nouveau prisme pour le logement social de demain.

• Hypothèse 2 : le foncier étant une denrée rare, les coopératives se retrouvent souvent en concurrence pour l’accession des terrains ce qui impacte négativement leur développement à Genève.

• Hypothèse 3 : les anciennes coopératives du canton sont très peu visibles dans les nouvelles promotions immobilières alors même qu’elles peuvent jouir d’un avoir foncier et financier important ; ce manque de visibilité est un frein aux potentielles synergies entre ces coopératives et celles plus récentes.

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III METHODOLOGIE

(35)

Afin de pouvoir répondre au mieux aux questions de recherche et aux objectifs fixés, ce travail s’attache à reconstituer le point de vue de potentiels développeurs de coo- pératives en tentant de comprendre les opportunités légales qu’ils peuvent mobi- liser ou celles qui, au contraire, entravent leur action. Il aborde le cadre juridique et institutionnel relatif à la promotion de coopératives et en analyse les principaux aspects. Le déroulement de cette recherche est articulé autour de la collecte de don- nées et de leur analyse. Deux démarches ont été retenues pour récolter les informa- tions : l’analyse documentaire et la conduite d’entretiens.

La méthode de recherche de cette étude est avant tout qualitative (Maxwell, 1999).

Comprendre la finalité d’un phénomène passe par la description des événements, des structures et des processus qui le constituent. Cette approche présente comme atouts de :

- permettre une compréhension au cas par cas du champ investigué ; - révéler les jeux d’influences que chaque item engendre entre eux ; - cerner le(s) processus qui découle(nt) d’événements et d’actions ; - déployer des explications causales selon le(s) processus.

Tout au long de ce travail, la recherche est menée de manière itérative. Cette méthode repose sur des boucles de rétroactions, tant à l’intérieur d’une étape qu’entre elles.

Cette étude est donc continuellement modifiée et améliorée par les deux démarches de récolte de données. En effet, chacune complète et enrichit l’autre. Elles ont été retenues pour la souplesse qu’elles offrent à l’enquêteur. Les avancées ne dépendent pas de contraintes temporelles ou séquentielles. D’une part, le chercheur n’est pas tenu d’effectuer ses observations de manière continue et ponctuelle, comme tel se- rait par exemple le cas dans le suivi du développement d’une plante. D’autre part, chaque étape est indépendante et n’est, par conséquent, pas conditionnée par la validation d’une autre. Ces démarches amènent à questionner le champ d’investiga- tion et à appréhender la recherche.

(36)

35

Au fur et à mesure de l’avancement de l’étude, la documentation s’est enrichie et spécialisée. A l’image d’un entonnoir, la récolte de documents est partie d’une idée globale pour arriver à des questionnements spécifiques. Elle a été menée en deux temps :

- Le premier, après une recherche relativement large, est marqué par le choix minutieux de textes permettant d’orienter la recherche, non plus seulement vers des thématiques, mais aussi vers des matériaux afin de formuler une problématique et des hypothèses. Le corpus est notamment constitué :

Ces documents mettent en lumière la politique du logement en Suisse et son déve- loppement futur (1), présentent la législation (2), des données quantitatives illus- trant l’état de l’habitat sur le territoire suisse et plus spécifiquement genevois (3).

Ils permettent au chercheur de situer la coopérative dans son environnement, de comprendre son potentiel d’action dans l’immobilier et d’observer son interaction avec les différents acteurs du logement.

A. Analyse de documents

o de rapports produits par les instances publiques (Rapport d’activité 2018 du Conseil d’État de Genève portant sur la mise en place de la loi LUP, Rapport Genève 2050 de l’État de Genève, Mémento

statistique de la Suisse 2018 émis par l’Office fédéral de la statistique-OFS, L’habitat en Suisse 2006 de l’Office fédéral du logement-OFL, Dialogue en matière de politique du logement entre la Confédération, les cantons et les villes 2016 OFL, etc.) ;

o de recherches menées par des instituts privés (Construction de logement : la troisième voie 2013 de Coopérative d’habitation Suisse, Communiqué de presse sur l’activité des logements coopératifs 2016 ARMOUP, Promouvoir la construction de logements d’utilité publique 2010 VLP-ASPAN, etc.) ;

o de publications scientifiques (Entre sclérose et renouvellement 2015 de Blaise Roulin, Les coopératives de logements dans le canton de Vaud 2016 de Pattaroni et Marmy, Les coopératives d’habitation comme alternative au marché immobilier ? 2012 de Melaine Laesslé, etc.) ;

o d’articles de journaux spécialisés en urbanisme (publications des re vues Habitation et Tracés, etc.).

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Extraits (1)

« Le groupe de travail suggère au Conseil fédéral de continuer dans la voie de l’en- couragement à la construction de logements d’utilité publique dans laquelle il s’est engagé et de renforcer les instruments qui ont fait leurs preuves. Il recommande par- ticulièrement au Conseil fédéral de poursuivre le déploiement au cours des années à venir, à l’aide de crédits supplémentaires, du fonds de roulement qui est important pour le secteur d’utilité publique. »

(Office fédéral du logement, 2016, p. 3)

« Dans les régions où les maîtres d’ouvrage d’utilité publique sont rares, comme dans les cantons de Genève et de Vaud, il est possible de se fonder, parallèlement à l’activi- té d’investisseur d’utilité publique, sur le concept des ‘’logements d’utilité publique’’.

Ceux-ci ne sont pas définis par le type d’investisseur, mais notamment par le prix de l’offre (‘’loyers abordables’’), qui est défini sur une longue durée pour certaines zones et types de logement. »

(Office fédéral du logement, 2016, p. 21)

Extrait (2)

« La notion d’utilité publique : Dans le domaine de la construction, les coopératives sont des maîtres d’ouvrage pouvant revendiquer le statut d’utilité publique. Au niveau fédéral, cette notion est définie à l’article 4, alinéa 3 de la Loi fédérale sur le logement du 21 mars 2003 (LOG, RS 842). »

(Pattaroni & Marmy, 2016, p. 12)

Extrait (3)

Figure 6 : Type de propriétaire des logements de locataires

(38)

37

- Dans le deuxième temps, les lectures ont visé à comprendre encore plus finement les différents rouages qui constituent les mécanismes étudiés dans le but de vérifier les hypothèses. Les sources utilisées sont des

rapports étatiques, des textes de lois, des archives de montages financiers ou encore des communiqués de presse d’instances publiques ou privées. La bibliographie comporte entre autres :

Ces sources présentent les outils institutionnels financiers et fonciers mis en place par la Confédération et l’État de Genève (4), les textes de lois qui s’y réfèrent (5) ainsi que les conditions pour les activer (6). Le chercheur mobilise ces sources pour faire, d’une part, l’état des lieux des forces et des faiblesses desdits outils. D’autre part, ces références lui permettent d’en analyser la mécanique afin d’identifier les opportunités et les menaces de l’impact sur le développement du logement coopé- ratif.

o des textes de loi (OLOG, LOG, LGZD, LUP, LGL, etc.)

o des rapports spécialisés (Le droit de superficie sous la loupe 2017 de l’OFL , Coopératives partenaires du territoire 2015 du GCHG, Arrêté fédéral relatif à un crédit-cadre destiné à augmenter la dotation du fonds de roulement en faveur de la construction de logements d’utilité publique 2017 OFL, Rapport annuel 2019 Fondation fonds de solidarité ARMOUP, Rapport d’activité 2019 FPLC, Rapport sur les résultats de la consultation concernant un arrêté fédéral relatif à un crédit-cadre destiné à augmenter la dotation du fonds de roulement en faveur de la construction de logements d’utilité publique 2017 OFL, etc.)

o des directives spécifiques (Critères pour l’octroi et le versement de parts d’emprunts ccl version 2015, Règlement pour la procédure à suivre pour l’obtention d’un cautionnement cch 2015, etc.)

o des sites web recensant les outils financiers (ARMOUP, OFL, État de Genève, etc.).

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