LA MONTRE SE R’ MONTE
ET
LES
AIGUILLES MARCHENT
pabis.
—
iMPiivEiuel.foitaut-dàyyl,hub dubac,30.NOUVELLE BIBLIOTHÈQUE DRAMATIQUE
LA MONTRE SE R’MONTE
ET
LES AIGUILLES MARCHENT
COMÉDIE EN UN ACTE, MÊLÉE DE CHANT
PAH
M. HENRY DE KOCK
Représentéepourlapremièrefois,surleThéâtreDéjaset,le6octobre1867
PARIS
LIBRAIRIE INTERNATIONALE
16,BOULEVARD MONTMARTRE
O
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!i J>xjf
,eû
A. LACROIX,
VERBOECKHOVEN
&C«,ÉDITEURS
ABruxelles,àLeipzigetàLieourne1867
Tou»dioll»derc|>roducùuu elde l'aducUuu léieru».
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PERSONNAGES
OCTAVEGINGUET,rentier MM.
CALONNIER
CORNÉLIE GROSCAILLOU,sasœur...
JEANNETTE,domestiquedeGinguet...
DEUX
VOIXDaubray.
Ricard.
Paer.
H.Desmont.
LA MONTRE SE R’MONTE
ET
LES AIGUILLES MARCHENT
Unpetitsalon.Table,chaises,fauteuils.Cheminée.Defaceune fenêtre.Unpiano àdroite.Porteslatérales.
SCÈNE PREMIÈRE
JEANNETTE,seule.
JEANNETTE,àlacantonade, àlaportede gauche.
Soyeztranquille,monsieur, personnene vous déran- geraiJe
me
feraiscouperparmorceauxplutôtque de laisserentrer quelqu’undans votre cabinet!(Fermantla porteetvenantenscène.)Couperparmorceaux!...Leplus souventque jeme
feraiscouper...leboutdunezseule- ment!...Mais ya de cesbêtisesqui fontplaisiraux maîtres,qu’est-ceque ça coûte delesleurdire?...Quandmonsieurtravaille,fautpasqu’unemouchevole autour delui...unemanie!...
On
ne vous dérangera pas, là!...grosbougon!...'Bougon...oui...quelquefois, maisleplussouvent aimable...bon...gentil! Aussi, je6
LA MONTRE
SER'MONTE
l’aimebien, allez,mon
maître!,..Ah!... je l’aime trop peut-être!...Une
domestique...unepaysanne...il ne peut avoirque dol’amitiépour moi,lui!Etilena,ça, j’en suissûre!Sanslui,je garderais encorelesvaches!C!estque çayest...j’gardais lesvaches dans
mon
vil- lage...àTromblaine... près Nancy...et c’estpasgai c’métier-là!... M. Ginguet estvenu par hasardau pays...ilya cinqans deça...ilm’a rencontrée...je pleurais...parce quema
tante m’avaitbattue...çaluia faitdelapeine àc’-t’-homme... par bonté, par pure bonté,ilest alléchezma
tanteluioffrirdeme
pren- dreà sonservice... puis... (Prêtantl’oreille.)Ah!maisje crois qu’ilvientparici,monsieur! Jeme
sauve!... je vous conteraitout àl’heure pourquoi, bienque j’aimemon
maître,je le déteste aussi...oh!maislàje ledé- teste... (Essuyant une larme.)à enpleurer!...(Elle sortparladroite.Ginguetentrevivement parlagauche;
ilesten robe de chambreetenpantoufles.Iltientuneplumeà lamain.)•
SCÈNE
IIGINGUET,
seul.GINGUET.
Où
ai-jefourrémon
calepin?Une
penséesublime quej’y ainotée hier endînantetquiferaittrès-bien dansmon
travailsurla situationdesbêtes en France...carje suis
membre
delaSociétédesAmis
desBêtes;secrétaire-rapporteur... Ilyaséance demain...j’ai
mon
rapportàfaire...etàlaveilledefairemon
rap- port...Oh!jenelaratepas!...quandj’aiune pensée sublime... crac...surmon
calepin! sinon,çafilerait,ça s’oublierait...et...(Tout enparlant,ilcherchepartout.)Sa-ET
LESAIGUILLES MARCHENT
7 pristi!je Taraispourtant posé quelque partici!Etl'in- spirationquime
venait...Ah!j’avaisdéjàécritquatre lignesd’unseul jet!...(Regardant surlepiano.) Ilétaitsur lepiano...Jeannettel’aura jetéderrièreen épousse- tant!... (Se mettant par terre pourregarder derrièrele piano.)Juste!Oh!cesbonnes...riende sacré pour leur plumeau!...(Ouvrant soncalepin.)Ma
pensée...oùestma
pensée? Ah!...(Lisant.)«
L’homme
quifaitdu mal aux bêtesn’estpas digne del’estimedeschiens... (Se repre- nant.)dessiens.»Deschiensneseraitpasmal non plus...mais dessiensvaut mieux. Maintenant, je re- tourne confectionnermon
rapport...Jen’aipas trop de temps...(Regardantàlapendule.)Dixheures... etdedeux àtrois,j’attendsunevisite...(Souriant.)Une
visite...Enfin,j’attendsunevisite, quoi...ça ne vous regarde pas!
(ilrentrevivement à gauche. Jeannettereparaîtrentrant doucement parladroite.)
SCÈNE
IIIJEANNETTE,seule.
JEANNETTE.
C’étaitsonportefeuille,sur quoiqu’ilgribouilletout cequiluipasseparla tête, qu’ilcherchait.Tiens! tant mieux!Je neluienferaijamaisassez,à cemonstre-• là!...Concevez-vousqu’ilsongeàsemarier!...
Mon
Dieu, oui!... Monsieur n’estpas heureux avec un amourdepetitebonnecomme
moi...ilfaut qu’il se flanquelacordeaucou!... (Tirant unelettrede sa poche.) C’estdanscette lettre,quej’aipincée sur son bureau, quej’ailuça! Ilnese défiepas parce que, lorsqueje suisentrée chezlui,jenelisaisque dans l’imprimé...DigitizedbyGoogle
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LA MONTRE
SER’MONTE
Maisjem’ai appris àlireaussidansl’écriture...Ça serttoujoursd’étresavante...Ah!maisc’estque ça neme
va pas àmoiqu’ilsemarie!Air;duJoueur de Fldle.
Depuisquej’suisà sonservice Pourlui plair’ j’aimistoutenjeu Encuisine j’étais novice, Jesuisdev’nueun cordonbleu.
Jecouds, je blanchis et je frotte, Et trouvez-en beaucoupcomm’inoi...
Monsieurest frileux,j’lui tricote Desbas d’ lain’pourqu'il n’aitpasfroid; •
Et malgrétousmessoins,le gueux...
Ah!mais non, pourun’ seul*personne, J’veuxbien, oui, jeveuxbienêtr’bonne, Je neveux pasl’êtrepour deux.
(S’asseyant.)
Lav’ià,cette lettre...(Lisant.) «
A
monsieurre,mon- sieutre Octave Ginguet, rentier, boulevard Saint- Denis,n«6. » (Parlé.)Monsieurre Octave Ginguet, c’estmon
maître.(Lisant.)«Monsieurre,lesquelques motsque vous m’avez adressés hier chezmadame
Bal- laumur,»(Parlé.)Madame
Ballaumurc’estunevieille parente àluichez quiilvaprendrelethé touslesjeu- dis...(Lisant.) «m’ontdonnéàréfléchir.Je neserais pas éloignée deme
remarier...«(Parlé.)De
serema- rier... il paraîtqu’ellel’a déjà été, mariée, cette damel...Une
veuve! Pouah!...(Lisant.)«Sil’hommeà quijeconfieraisdenouveaumon
existenceétaitun.galanthomme.»(Parlé.)Yojez-vousça!ilfautqu’on soiegalantavecelle...c’estpasassezdel’épouser!...
(Lisant.) «
Du
reste,suivant votredésir,j’aurail’avan- tagede vousfaireunepetite visite,demain, dedeuxà trois...*>(Parlé.)Demain,c’estaujourd’hui.Lalettre estdatéed'hier.(Lisant.) «encompagniedemon
frère, M.Calonnier,qui,comme
ilvousl’a dit,agrande envie defairepartiedelaSociétédont vousêtesunsiremar-ET
LESAICftJILLESMARCHENT
9 quable représentant.•>(Parlé.)LaSociétédesAmisdes Bêtes.Ilsdoivent avoir delabesognedanscetteso- ciété-là! (Lisant.)«A
demaindonc, monsieur. Nous causerons. Recevez, enattendant, l’assurancedemes meilleurs sentiments.**(Parlé.)Sesmeilleurs... alors elleen a qui ne sont pasbons.(Lisant.) «Signé:Cornélie Groscaillou.»(Parlé.)Groscaillou...s’il estpermis de courtiserunefemme
qui s’appellecomme
unquartier...etunvilainquartierencore!...Maisqu’est-ceque je pourrais donc bienfairepourempêcher monsieurde recevoirla Groscaillou!...L’empêcherdelarecevoir...
non...impossible!...mais,pendantqu’elleseralàdu moins...
LA.VOIXDEGINGUET,dans soncabinet.
Ah!c’esttropfort,sapristi!C'esttropfort!
JEANNETTE,se levant.
» Encore lui!...
mon
Dieu! Est-ce qu’ilse serait aperçu...(Ellefourre la lettredanssapocheetse retireaufond.)
SCÈNE
IV JEANNETTE, GINGUET.(Ginguetarriveportant son buvardetuneécritoire; ila saplume derrière l’oreille.)
GINGUET.
Onn’apas idée deça!...
Mon
voisin etma
voisine quisemettent à danseretàchanterdansleurchambre à coucher!...Oh!je lesentendaiscomme
s’ilseussent étédansmon
cabinet!...Onbâtitsidrôlementlesmai- sons aujourd’hui... des murailles en carton... c’estl.
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la montre
sert’monte
moinscher! Élaborez doncuneœuvre sérieuseavec desgens qui sautentetqui beuglent àcôtéde vous!(Mettantlebuvardetl’écritoiresurlatable.)Je
m
enVais m’installer là...j’yserai peut-etre plust^quille.(ApercevantJeannette.)Hein!...Jeannette!...
Qu
est-ce que tufaisdansle salon, toi?JEANNETTE,troublée.
Monsieur...
GINGUET.
Ne
savez- vouspas,Jeannette, que lorsquejetra- vaille, jenepuis sentirpersonne auprès demoi....JEANNETTE.
Maisje n’étaispas près de vous, monsieur...puisque vousétiez là etmoiici.
ginguet.
Mais maintenantje suisici...puisquemesvoisins
me
chassent delà...par conséquent...JEANNETTE.
Etpuis...ilm’avaitsemblé...Est-ce que vous ne toussiezpas tout àl’heure,monsieur?
GINGUET.
Tousser?Oùavez-vousprisque je toussasse? Je ne tousse jamais, moi!
Un
coffredefercouléenbronze..Des rhumesde cerveau, jamais depoitrine!
JEANNETTE.
Enfin...
GINGUET,s’emportant.
Enfin,quandjeveuxêtre seul, je veuxêtreseul!
C’estclair, ce
me
semble... etjetrouvetrès-sin- gulier...ET
LESAIGUILLES MARCHENT
IL JEANNETTE.Ilsuffit,monsieur, ons’enval...Jesuisencorefière- mentgodichede m’inquiéter pourêtresibien reçue!
GINGUET.
Qu’est-cequec’est?
JEANNETTE.
Rien!...(Apart.)
Ah
Itu esgracieuxcomme
ça,toi...c’est bon!...
Air:duPré-aux-Clercs, Contre moi,n’vousfâchez pas!
Monsieur,ce n’estpaslapeine.
A
macuisin',si j’vousgSne, Jem’enretourn’dece pas.GINGUET.
Lorsqueje travaille,ilmefaut Lesilence!Unrienm’indispose Unrien m’agace...
JEANNETTE,àpart.
Attends!bientôt, Jet’agao’raipour quelquechose.
ENSEMBLE.
GINGUET.
^
Contreell’jenemefàch’ pas,»
Vraiment,ce n’estpaslapeine.
Maisjeveuxquandell’megôno Qu’elle s’éloigneà grandspas.
JEANNETTE.
.Contremoi,n’vousfâchez pas!
Monsieur,etc.,etc.
(Alafindel'ensemble,Jeannetteest sortie.)
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LA MONTRE
SER’MONTE
SCÈNE V GINGUET,
seul.GINGUET.
Cette pauvre Jeannette!... Jel’aibousculée...Oh!
jel’aibousculée!...Unegentillepetitefille...sage...
honnête...etdévouée...Oh!dévouée!...Jedisaistout h l’heure quejenetoussaisjamais... je t'en fiche!... j’ai tousséau contraire
comme
unbœuf, l’annéedernière...Une
fluxiondepoitrinequiafaillime
mettre aumau- solée...Ah!sans Jeannette,quim’a soignécomme
son pot-au-feu,jedescendaisau mausolée!...Aussi, j’avais songé...unmoment... pourlarécompenser...à...Pour- quoipas?...Ilya des exemples... des masses d’exemples de maîtres qui ontrécompensé leurs servantes de leurdévouementenles épousant...àcommencerpar J. -J. Rousseau... le philosophede Genève. Etce qu’afaitunphilosophe...deGenève...unphilosophe...de Paris peut bienle...Maisnon...non...sérieusement, un
homme
quia amasséunejoliefortunedanslesbou- chons...—
j’étaisdansles bouchons, autrefois... les bouchons deliège...—
ne peut pas épouserune petite fille...quin’aque desqualitéspour dot! Lafortune appellela fortune,l’eauvaà la rivière...c’estconnu, cela...Donc...simadame
Cornélie Groscaillouycon- sent... Elle esttrès-bienaussi,madame
Groscaillou...unebelleblonde... des-cheveux!...oh! quelsche- veux!...etvingtmillelivresde rentesindépendam- mentde tantde cheveux!... Vingtetvingt,çafait quarante... Eh!eh!c’estpourlecoupalors qu’il
me
seraitpermis de devenir président dela sociétédes
Amis
desBêtes!...Président!Quels honneurs,quelleET
LESAIGUILLES MARCHENT
13 gloirecemotne renferme-t-il pas!...En
attendant, terminonsmon
rapport...Onestbienici...très-bien...paslemoindrebruit!
(Icil’onentendpendantune à deux secondes, àdroiteaudehors, unbruit stridentsemblable àceluid’unesciequiopéreraitsur unepierre.)
GINGUET,avecunmouvementnerveux des deux bras etdesmuscles dela face,regardant son papier.
Où
enétais-je?...Parbleu!toujoursauxquatre pre- mièreslignes quej’avaisécritesdejet...Ah!sansla polkade mesvoisins, le jeteût continué!(Lebruit se renouvelle;Ginguetestreprisde sonmouvementnerveux.)Ah
ça!mais,qu’est-cequej’aidonc?... (Lebruitcesse.)Où est
ma
plume?... Voicima
plume...(Lebruitrecommenceet avecluiletressautement de Ginguet. Selevantsubitement.)Ah!ce quej’ai...jele sais,cequej’ai!... (Criant.) Jean- nette!... (Lebruit se faitentendreencore.Ginguets’agiteune quatrièmefois.Hurlant!)Jeannette!... Jeannette!...
SCÈNE
VI GINGUET,JEANNETTE.JEANNETTE,accourant,un moulin àcaféàlamain.
Voilà,monsieur...
GINGUET,d’untonconcentré.
Jeannette...qu’est-ceque vousfaites?
JEANNETTE.
Cequeje fais? Mais...vouslevoyez bien!jemouds votrecafé...
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14
LA MONTRE
SER’MONTE
. GINGUET,marchant, àelle,d’unevoixmenaçante Ah!vous moulezmon
café!...JEANNETTE,reculant.
Ah
!mon
Dieu,monsieur, mais vous m’effrayez avec votregrossevoixetvos gros yeux!...Ah!oui...par- don!...jeme
rappelleà cette heure...lebruitde ce moulin...GINGUET.
Cebruit... cebruitsans
nom me
faitmal...vousle savez... ilme
donne un tic... unticdans tousles muscles... dans touslesmembres... Aussi yousai-je défendudeleproduire...ce bruit...Aussi vousai-je défendu de vousservirjamais docemoulin...Etvous vous enservez,malheureuse!...(Ilasaisi lemouliuet s’élance vers la fenêtre.)
JEANNETTE,le retenant.
Arrêtez,monsieur!...Je nem’enservirai plus,je 'vous lepromets!...mais nelejetez pas!...Vaut mieux
levendre, voyons!
GINGUET.
Cette parole sensée a sauvécemoulin, Jeannette...
comme
lerepentir empreintsurtes traitsaramené l’indulgencedansmon
âme. Va,mon
enfant... etsou- viens-toi,unefoispourtoutes,que lorsque ton maître travaille...l’agrément desesrepasmême
net’autorise pointà troubler son repos parles sons d’un odieux instrument.J’aidit...JEANNETTE.
Etj’aientendu, monsieur.Etjem’envas remettre l’odieuxinstrument dans soncoin...(Apart.)C’est égal, àl’occasion...ilpeutservir encore!...
(Elle sort.)
ET LES
AIGUILLES MARCHENT
15SCÈNE VII
GINGUET,seul.GINGUET,aupublic.
Étrange,n’est-ce pas,quelegrincement d’une mani- velle aitunetelleinfluencesurlesystème nerveux?...
Maisj’aitoujoursété
comme
ça!...A
sixansj’aifait unejaunisse,parce qu’onavaitvoulu m’obliger à râper du sucre!...(Serasseyant.)Voyons, relisonsceci pour nousremettredansleton....UNEVOIX, audehors.
La montreser’monteet les aiguillesmarchent.
GINGUET,lisant.
«Chargéde signalerlesprincipales actionsméri- toiresdesAmisdesBêtes pendantlàpériode qui vient des’écouler, c’estavecune vivesatisfaction,chersamis etconfrères,quejemetslamainàlaplumepour vous dire... »(Parlé.)La mainàlaplume... dit-onmettrela mainàlaplumeoumettrelaplumeàlamain?.,.Je saisbienqu’onditmettrelamain àlapâteetqu’on neditpasmettrelapâteà...
LA VOIX.
La montreser’monteet les aiguillesmarchent...
GINGUET.
La montrese...(Regardantducôtédelafenêtre.)
Ah
h Maisiln’estpas amusant,cemonsieur, avecsamontre et ses aiguilles!...Oùdiable est-il?Sousma
fenêtre, sansdoute...(Selevantetsoulevant lerideau.) Oui... leDigitizedbyGoogle
16
LA MONTRE
SER’MONTE
voilà,son horlogeriesurle bras, appuyé contrela portecochère!...Est-cequ’ilcompteresteràcetteplace toutelajournée!Certainement,c’estfortagréablede demeureràl’entre-sol,maisquandundecesdamnés marchands...
lavoix.
La montreser’monteet les aiguillesmarchent.
GINGUET, aveccolère.
Ah!c’estencorepisque ladanseetlemoulin!...
Jevaisordonnerà ce drôle...(S'arrêtantprès d’ouvrirla fenêtre.)Ordonner!Est-ce àun amides bêtesàsemon- trersi roideenversun
homme
quin’aque sonpetit métierpourvivre!...Allonsdonc!Air:d'Aristippt.
N’imitons pascesgensd’humeurbizarre Qui,pourunchien,tendres,affectueux, Sesoucientpeu
—
lachosen’estpasrare!—
Tandis qu’Azors'empiffreàquimieux mieux, Qu’unpâleenfantmeure de faimprèsd’eux.
Pauvres honteux, à vos douleurssecrètes Ilappartientquel’ontendelamain.
Bref,s’ilestbiende protégerlesbêtes,
*Iln’estpas mald'assisterson prochain.
LAVOIX.
La montreser’monteet lesaiguillesmarchent.
GINGUET,ouvrantla fenêtre.
Prenons-le par la douceur!... (Sepenchantparla fenêtre.)
Mon
ami... hé!mon
ami... oui... vous...vous n’auriezpaslacomplaisanced’allercriervotremar- chandiseunpeuplus loin?LAvoix.
Quoi?
ET LES AIGUILLES MARCHENT
17 GINGUET.Ilnem’apas entendu...ilal’oreilledure,cethor- loger pourl’enfance.(Parlafenêtre.)Je vousdis,
mon
ami, que vous m’obligeriezenallant criervotremar- chandise plusloin,comprenez-vous?LAvoix.
Leboulevardestà toutlemonde.;.Desnavets!
GINGUET.
Comment,desnavets!...Pardon,
mon
ami,c’estjus- tementparce quelavoiepublique appartient à toutlemonde
qu’ellen’appartient à personne...lavoix.
La montreser’monteet les aiguillesmarchent.
GINGUET.
Ilpersiste!...
Ahl
ilpersiste!...(Commefrappéd’une idée.)Ah!...(Parlafenêtre.)Sijeréclame de vouscet acte d’urbanité,mon
ami,c’estparce quej’aiunenfant maladechezmoi...lavoix.
Asseyez-vous dessus!
GINGUET,aveccolère.
Qu’e3t-ccquec’est! Comment, impertinent, vous osez...
(Bruitderiresaudehors.) GINGUET,fermantvite lafenêtre.
Ah
!Etla foulequis’amasse souslafenêtreetquirit enme
montrant au doigt!... Ah!...Je comprends CharlesIX
tirantduhaut de son balcon surleshugue- nots!..DigitizedbyGoogle
18
LA MONTRE
SER’MONTE
SCÈNE
VIIIGINGUET,JEANNETTE.
JEANNETTE,entrant vivement.
Qu’est-cequ’ilyadonc,monsieur? Vousfaitesla conversationparlesfenêtresaveclesgens du boule- vard,maintenant!Je rentrais d’chercher des corni- chons...Jevousaivu deloin gesticuler...
GINGUET.
Jeannette,l’universconspire contremoi...
JEANNETTE.
Bah!...
A
cause?LAVOIX,en dehors.
La montreser’monteet les aiguillesmarchent.
GINGUET.
Tu
l’entends, jenele luifaispasdire1...Etles aiguilles marchent!JEANNETTE.
Eh
bien!c’estun marchandde joujoux; après?GINGUET.
Après!...Après,Jeannette!
Tu
nocomprendspas que l’éternel et monotone refrain dece misérable m’énerve... m’horripile!...comme
le bruit de ton moulintout à l’heure.JEANNETTE.
Dame,monsieur, c’estvexant...mais, que voulez- vous? faut que toutlemondevivel
ET
LESAIGUILLES MARCHENT
19 GINGUET.Je n’envoispaslanécessité.
JEANNETTE.
Aprèsça...c’marchandn’estpasunTurc,peut-être.' GINGUET.
Non...sic’étaitunTurc,ilvendrait desdattes...et ilvend des montres...
JEANNETTE.
Eh
bien... achetez-luiendeuxoutrois...etpeut- être...GINGUET.
Ah
!...Une
idéequineseraitpasvenueàunhomme
d’esprit estvenue à unesimplefilledeschamps!...
Bizarreriesdelanature!(Tirantdel’argentde sa poche.) Tiens, Jeannette; ça coûte dix sous,jecrois, ces machines?
JEANNETTE. "
Quellesmachines?
GINGUET.
Eh
! ce que ce négociant appelle des montres!Achète-lui ensix...Aprèscela,s’ilnevapasdans une autrepatriedébiterses bibelots,ilfautdésespérerdu cœur humain!
JEANNETTE.
Pourtroisfrancsde montres...c’estconvenu,
mon-
sieur! (Apart.) Ali! ça t’ennuie de l’entendre, cet homme!...
Tu
n’espasaubout, alors!...Tiens!Onme
chagrine,moije taquine.(Elle sortparla droite.)
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LA MONTRE
SER’MONTE
SCÈNE
IX G1NGUET,puisJEANNETTE.GINGUET,seul.
Ils’éloignera!Oh!ils’éloignera!...Six montres...
d’uncoup!...Troiseussentsuffi,peut-être.
lavoix.
La montreser’monteet les aiguillesmarchent!
ginguet.
La montre du cygne... maintenant, il m’émeut agréablement,ce cri!
Un
heureux... sanscompterceux queje feraiaveccesbijoux!D’abordlepetitgarçon de laportière à quij’endonneraiune...danssix mois...poursesétrennes.
JEANNETTE,rentrant,portantlesmontres.
Voilà,monsieur...
GINGUET.
Donne,Jeannette...(Prenantlesmontres.)Etqu’a-til dit?
JEANNETTE.
Le marchand?Oh!ila sauté dejoie...
GINGUET.
Ila sauté...Ah! c’estbon desavoirqu’onafait sauterunhomme...dejoie...parcequesic’étaitparla fenêtre...
ET
LESAIGUILLES MARCHENT
21 JEANNETTE,àpart.En
v’ià une drôle...ilestde Tromblaine,comme
moi,cemarchand...unpetitcousinàma
tante...Jean Dupiquet...Ilétaitfrotteur... lefrottagen’allàit pas...ilS’estmis dansla bijouterie.
GINGUET,regardantlesmontres.
Très-ingénieux,ce jouet!... C’est quevraimentla montre seremonte etlesaiguilles marchent...les aiguillesnemarchent
même
quependant qu’onremonte lamontre...Mais,mon
Dieu!une personne qui aurait letempsetdela patience,n’est-ce pas, etquivoudrait savoir l’heureavecça...ensuivant, laclefen main, minute à minute,unehorloge!...Dame!
Etilyaune chaîneensus...En
veux-tu une, Jeannette?JEANNETTE.
Unechaîne?
GINGUET.
Etune montre...Oh! quandje faisdes cadeaux, moi, jeneles faispasà demi...
JEANNETTE.
J’accepte,monsieur.J’aiunfilleulau pays,je la lui enverrai.
GINGUET,luidonnant une montre.
Tiens... etcen’estpas troppayerleserviceque tu m’as rendu.
JEANNETTE.
Monsieurestbien honnête.
LAVOIX,audehors.
La montreser’monteet les aiguillesmarchent.
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2a
LA MONTRE
SER’MONTE
GINGUET,bondissant.Hein!
Quoidonc?
Il
y
estencore? Qui ça?JEANNETTE.
GINGUET.
JEANNETTE.
GINGUET.
Maislemarchand!
jeannette.
Maisoui,monsieur...ilyestencore...
GINGUET.
Comment, en échange de
mon
folachat,iln’apas consenti...JEANNETTE.
À
s’en allercrierplusloin,non!Ilditquelaplace esttropbonnepourqu’illalâchepoursixmontres,et que ça en vaut du moinsdeuxdouzaines!GINGUET.,
Deuxdouzaines!...Etqu’est-ce qu’ilveutquej’en fassedesesdeuxdouzaines,lebourreau?
jeannette.
Ça,ilne
me
l’apasdit.GINGUET,exaspéré.
Maisc’estunguet-apens!Etpenserqu’iln’ya pas deloispour protégerlaFrance contre detelsabus!
Ah!de quoi s’occupent donc nos députés!(Avecrage.)
Eh
bien,non!non!...Je neme
courberaipas souslesET
LESAIGUILLES MARCHENT
93 exigences de ceBréguet àl’oscopette!...Malgrélai,jo travaillerai!... Malgré lui, soutenu par une noble pensée,jepoursuivraima
noble missiont..(ils’assoitetprendsaplume.) LAVOIX, plusfort.
I
#
La montreser’monteet les aiguillesmarchent.
GINGUET,bondissant.
Ah!...Iln’estpaspossible...ilaunporte-voix,main- tenant...
JEANNETTE.
C’estvrai qu’sonorganese développe...Lesmurs on tremblent!
GINGUET,quiécrivait,jetant laplumeavecdésespoir.
Ah!jenepeuxpas... jenepeuxpas!(Regardant snr sonpapier.)Qu’ai-jedoncécritlà,justeciel!
lavoix.
La montreser'monteet les aiguillesmarchentî
GINGUET.
Jel’aiécrit!...Oh!jel’aiécrit!... (Selevant;avecrési- gnation.)
Eh
bien,si...jeme
courbe,jem’incline,je m’humilie! Périssema
fortune,mais quemon
devoir de secrétaire-rapporteurs’accomplisse!Nousdisons...unedouzaine,Jeannette?
JEANNETTE.
Deusses, monsieur;vingt-quatre montres...Ah!mais les sixque vous avez achetées compteront dedans...
c’estconvenu.
GINGUET,avecironie.
En
vérité!...Il daigneracompterlessixdanslesDigitizedbyGoogle
24
LA MONTRE
SER’MONTE
vingt-quatre,lechenapan1...Enfin, quide vingt-quatre apayésix, reste...JEANNETTE.
C’estpasdifficile...dix-huit!...à cinquante centimes, net,neuffrancs.
. '
GINGUET,
Net, neuffrancs!...
Me
<donnera-t-ill’escompte,au moins? J’yaidroit.Quandon achète engros...JEANNETTE.
Jeleluidemanderai.
GINGUET.
Non!...
Ne
le lui demandepas, Jeannette’...On
nedoitriendevoiraucrime...quelemalheur.Tiens...etvole!
(illuidonne del’argent.) JEANNETTE.
Jevole,monsieur.
LAVOIX.
La montreser’monteet les aiguillesmarchent!
GINGUET,tombant sur unechaise,tandisque Jeannette sortvivement parladroite.
Ah!...Est-cetadernière douleur,martyr?Martyr, est-ce tadernière torture?
ET
LESAIGUILLESMARCHENT
25SCÈNÉ X
GINGUET,puisJEANNETTE.
GINGUET,seul.
C’estdola faiblessse,n'est-ce pas?...maisjevous l’aidit:l’organismetrès-impressionnable...J’aurais esssayédelutter...crac...une cordequi sedétendait là...(Ilsetouchelefront.)Ah!papal...Cheval debois!...
Journaldusoir!...
Pommade
àlavanille!...Je devenais imbécile, niplus nimoins!...(Écoutant.)Ilsetait...Le sacrificeestconsommé!...Letigreassouvis’enfuitavec sa proie!... Douzefrancsdemontresd’enfants, com- mentvais-jeécouler cela?JEANNETTE,rentrant,uncartonàlamain.
Voilàladouzaineet demie, monsieur... dansun carton... Oh! il m’a donné un carton par-dessus le marché,cebrave homme!...Simonsieur veutles compter...
GINGUET,avec horreur.
Lescompter!...(So reprenant.)
Tu
lesascomptées,toi?JEANNETTE.
Pardi!
GINGUET.
Eh
bien! çasuffit.Et, cettefois... ilestparti?J’en suisquitte?JEANNETTE.
Ohlilest parti... (Apart.)Maistun’en espasquitte!
»
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26
LA MONTRE
SER’MONTE
GINGUET,s’asseyantàlatable.Jerespire!...Posececartonquelquepart, petite, et laisse-moi!... (La tête dans les mains.) L’inspiration reviendra-t-elle,monDieu!Après detelles secousses...
(Coup de sonnette àdroite.Sautant sur sonfauteuil.)Qu’est-CO quec’estqueça,encore?... Allons,cours ouvrir!(Jean- nettesort.)Ilest ditqu’onne
me
laisserapas en repos aujourd’hui!...Oh!unelettre,unjournal.JEANNETTE,rentrant.
Monsieur, c’est unedame etun monsieur.,, v’ià leurs carte3...
GINGUET.
Une
dame
etunmonsieur... (Jetantlesyeuxsurles cartes.)CornélieGroscaillou...M. Calonnier... (Se levant et regardantà la pendule.)En
effet... deuxheures et quart...Au
milieude tousces tracas,jeneme
suispas aperçuquele temps marchait, moi!... Fais entrer ici,Jeannette, tandis queje vais revêtirunetenue plus convenable... (En se dirigeant vers lagauche, àpart.)Chère Cornélie!...Exacte
commme
le soleil! C’est égal,avec toutça,silesaiguillesmarchent,mon
dis- coursnemarcheguère,lui!...Bah!L’amourd’abord, letravail ensuite!...(ildisparaîtparlagauche )
JEANNETTE.
Ah! c’estlaGroscaillou!...
Oh
! mais,nousverrons voir!...Elle n’estpas encoresafemme!...(Allantà la portededroite.Alacantonade.)Sivous voulezprendrela peinede passer parici,monsieur,madame^ET LES AIGUILLES
MARCHENT
27SCÈNE XI
JEANNETTE,madameGROSCAILLOU, CALONNIER.
MADAME
GUOSCAILI.OU, toilettedebourgeoiseexcentrique, cheveuxbouclésengrappes surlestempes; entrantsuiviede Calonnier.Voyons,
mon
frère...C’estinsupportable!...Vous dormiez en omnibus, à présent vousdormezdanscette antichambre!CALONNIER,l’airendormi. Chancelant.
Mais,
ma
sœur, cen’estpasma
fauteITusaisque lorsqueje n’aipasdormimeshuitheuresd’affilédansma
nuit,jenesuisbon àriendelà journée...,et,toute cettenuit, je n’aipasfermél’œiluneminuteàcauso d’unesourisquis’étaitlogéedansmon
boisdelit!JEANNETTE,àpart,regardantmadameGroscaillou.
Etc’est cette petite coifféeen chienfouquej'aurais pour maîtresse!...leplussouvent!
MADAME
GROSCAILLOU,s’asseyant;à Jeannette.Votre maîtren’estpaslà,labonne?
JEANNETTE.
Non, madame... Monsieurétaiten robe de chambre...
ilpassequelque chose do plus proprepour recevoir madame.
28
LA MONTRE
SER’MONTE MADAME
GBOSCAILLOU,lui faisantsignedese retirer.C’est bon... allez!
JEANNETTE,àpart.
Ah!on gêne madame!...
(Elle sort.)
SCÈNE XII
LESMÊMES,moinsJEANNETTE.MADAME
GROSCAELLOU.Cettedomestique al’airimpertinent,n’est-ce pas votreavis,
mon
frère?...•CALONNIEE,quicommençait à s’endormir sur sachaise.
Hein!...Ladomestique?...Qu’est-cequ’elleafait, ladomestique?...
MADAME
GBOSCAILLOU,regardant autourd’elle.M. Ginguetesttrès-bienlogé!...
CALONNIEE,luttantcontrelesommeil.
Très-bienlogé!...
MADAME
GROSCAILLOU,allantàla fenêtre.La vuesurleboulevard...au premier...Ildoiten avoircher deloyer...
CALONNIEE, mêmejeuque(levant.
Cherdeloyer!
ET
LES AIGUILLESMARCHENT
29MADAME
GROSCAILLOU,regardantlepiano.Un
beaupiano...(Elle l’ouvre.)d’Érard... ceci estpeut- êtreduluxepourunhomme
quin’estpasmusicien...CALONNIKR,idem.
Pas musicien.
MADAME
GROSCAILLOU.Aprèscela...je saisbienque,touten n’étant pas musicien...soi-même... onsedoitàceux qu’onreçoit...
et qui le sont, eux...
CALONNTER,idem.
Sonteux...'
MADAME
GROSCAILLOU,semirant danslaglaceen arrangeant sescheveux.Etpuisil peutsurgirdecesévénements!...Alors, sincèrement, Théophile...
mon
union avecM. Ginguet ne vouscontrarieraitpas trop?CALONNIER,qui s’endort toutàfait.
Trop?
MADAME
GROSCAILLOU,seretournant aveccolère.Théophile... Théophile!...
CALONNIER,seréveillantensursaut.
Ma
sœur!...MADAME
GROSCAILLOU.Levez-vous...jevous ordonne de vouslever,Théo- phile...puisquevous no pouvez vousasseoirsansyous assoupir...
s.
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30 LA.
MONTRE
SER’MONTE
CALONNIER,selevant.Mais, tusaisbien, Cornélie...
(La porte de gauches’ouvre.Ginguetparait.)
MADAME
GKQSCAILLOU.Silence!...
SCÈNE
XIIILesMêmes, GINGUET.
GINGUET,saluant;ilesten habit noiretenbottes vernies.
Excusez-moi de grâce,
madame
etmonsieur... mais, touten attendant votrecharmantevisite...plongéque j’étaisdansuntravailimportant...MADAME
GROSCAILLOU,Maisalors,monsieur,sinous vousavons dérangé, c’està nous de nousexcuser...
GINGUET.
Oh!madame!...Ilya decespersonnesquivousdé- rangent sans vous déranger...etaucontraire... qui vous arrangent en vous dérangeant...
MADAME
OROSCAILLOU,souriant.Tropaimable!...
CALONNIER,chancelant.
Tropaimable!...
GINGUET.
Maisqu’a donc M.Calonnier?...Ilsemblesouffrant...
ET
LESAIGUILLES MARCHENT
31 CALOMNIER.Non,
mon
ami... non... jenesouffre pas...absolu- ment... maisvoilà...ma
sœurlesaitbien...Quandje n’aipasdormimeshuit heuresd'affilédansma
nuit, jenesuisbon àriendelajournéo, moi...GINGUET.
Etvous n’avez pas dormivotre comptantlànuit dernière?
CALONNIEH.
Jen’aipasdormiunquart d'heure! Figurez-vous quej’avaisunesourisdans
mon
boisdelit.GINGUET.
Unesouris!... etcommentdiables’était-ellefourrée là!...
CALONN1ER.
Demandez-lc-lui! Cesaffreusesbêtesne respectent rien!
GINGUET.
Oh!affreuses!...N’exagéronspas!Lasouris n’a rien d’affreux...
MADAME
GBOSCAILLOU,souriant.Mon
frèreoublie,monsieur,que chezlesecrétaire delaSociété desAmis
desBêtes,iln’estpasbienséant dediredumal...même
d’unesouris.GINGUET.
Oh!permettez,madame...bienqu’ami desbêtes,je nelesdéfends pastoutes, etsurtout jene défends point cellesqui sont désagréables...
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32
LA MONTRE
SER’MONTE
CALONNIER.
A
labonneheure!...Parbleu!...Moiaussij’aimeles bêtes...à preuve quejeveuxentrer dans votreSociété, Ginguet; maisilya bêteetbête,quediable!... et quand unecoquinedesourisa l’audace de troublermon
repos....
MADAME
GROSOAILLOU.Assez,
mon
frère!.. Nousnesommespas venus chez M. Ginguet uniquementpourl’entretenird’unesouris...GINGUET.
Ilestcertainqu’ilyadessujetsde conversation plusséduisants...plus...séduisants,je neretirepas
mon
mot. Mais asseyez-vous donc,belledame...vous restezdebout., etvousaussi,cherM.Calonnier.. CALONNIER.
Je nedemandepas mieux.
(ils’assiedàdroite.MadameGroscaillouàgauche près dela table.)
MADAME
GROSCAILLOU,regardantles papiers.Et cetravail dans lequel vous étiez plongé, le voici?
GINGUET.
Oui,madame...
mon
rapportaucomité...MADAME
GROSCAILLOU,prenantlepapier.Une
belle écriture!...GINGUET.
Hum!...
Une
anglaisecourante... Quandje veux m’appliquer... mais pourunbrouillon...ET LES AIGUILLES
MARCHENT
33MADAME
GROSCAILLOU.Est-il indiscretdelire?
GINGUET.
Indiscret...de votrepartiAllonsdonc!Seulement, cen’estpastrès-avancéencore...parceque...(Apart.)
'Jenepeuxpasluidire lepourquoidu parceque... elle semoquerait demoi...
MADAME
GROSCAILLOU,quialu.On
ne peutmieuxtourné!...Un
style clair, concis...GINGUET.
Oh!le style... c’est
ma
continuellepréoccupation,le style,madame!...MADAME
GROSCAILLOU.Çase voit.Tenez,
mon
frère,à votre tour!(Ellese tourne vers Calonnier pourluidonnerlepapieret s’aperçoit qu’il dort.)Ah!mon
Dieu!...maisils’estendormi!... (Vou- lantse lever.)Mon
frère!...GINGUET,l’arrêtant.
Ne
réveillonspaslefrèrequidort,madame!Victime des cascades d’nnesouris,M.Calonnierserattrape sur sa nuit... laissons-le se rattraper...MADAME
GROSCAILLOU,baissantlesyeux.Mais...
GINGUET.
Mais...de quoi votrepudeurs’alarmerait-elle?
Air:Elsije nesuispaslà.
Seuleavec moi, chez moi,madame, Derougirvousauriez le droit;
Si,dans undouxélandel’âme, J'osaisvous toucherrienqu’undoigt.
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34
LA MONTRE
SER’MONTE
Maisprèsdo vous un gardienveille...
Je veuxdire:nn gardien sommeillo!
Et puisquevotre frère estlà,
j
^
Quidonc de nousdeux médira?i
MADAME
GROSCAILLOU.En
vérité,monsieur... vous avez des façonsde voua exprimer...GINGUET.
Qui voqs déplaisent?
MADAME
QROSCAILLOU.Jenedispascela!...
GINGUET.
Ahîsivous neledites pas...c’estque vous nele pensez pasnonplus,j’espère!... Ettenez,madame, puisquevousm’yautorisez...par votretaciteassenti- ment...j’oseraireprendre,aupointoù nous l’avons laissé,legracieux entretien auquel nous nouslivrions avant-hier,chez
madame
Ballauraur,entreunetasse de théetunebiscotte...MADAME
GROSCAILLOU,lesyeuxbaissés.Monsieur...
GINGUET.
Vousêtesveuve,madame...etvousêtes belle...Je suisgarçon,moi... et je suis...ouplutôt jene suis pas...tout àfait hideux...Suis-jehideux, voyons?
MADAME
GROSCAILLOU,lesyeuxbaissés.Maisjene trouvepas,monsieur!
GINGUET.
Eh
bien,madame...sinoscœurssympathisentdéjà...ET
LESAIGUILLES MARCHENT
35 extérieurement... pourquoine sympathiseraient-ils pas aussiintérieurement?...MADAME
GBOSCAILLOU,émue.Monsieur!...
GINGUET.
L’amour... ce dieucharmant...sourità quil’invo que...Et quandl’amoursourit...
SECONDEvoix
,au dehors.
La
montreser'monteet les aiguillesmarchentl...GINGUET,bondissant.
Hein!..,
MADAME
GBOSCAILLOU,étonnée.Qu’avez-vous, monsieur? . *
GINGUET,àpart.
IlestrevenuI
MADAME
GBOSCAILLOU.Maisqu’avez-vousdonc?...
GINGUET.
Rien...madame...si...pardon!...malgrémoi...une douleursubite...dans...danslegrasdelajambe...
MADAME
GBOSCAILLOU.Une
crampe!... oh!jeconnaisça...SECONDEVOIX.
La montreser’monteet les aiguillesmarchent.
GINGUET,ilpart.
• Ah! maisnon...Cen’estplus lemême!... L’autfe étaitunténoi*,celui-là estunbarytdn.
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36
LA MONTRE
SER’MONTE MADAME
GROSCAILLOU.
Vousdites?...
GINGDET,àpart.
C’estune conspiration...laconspiration des montres Ilya eulaconspiration despoudres... voilà laconspi- rationdes montres!...Lepremiera ditau second:« Il
y
a là-hautunjobard qui en achète deuxdouzaines d’uncoup... j’aimesdouzefrancs...vachercherles tiens...»Etainsidesuitejusqu’à extinction demar- chands!... J’auraibeaulescouvrird’or,lesmiséra- bles...quandiln’yen auraplus,ilyen auraencore...comme
lesbrioches delarue delaLune!...(Avec déses- poir.)Oh
!...MADAME
GROSCAILLQU,se levant.Votre douleur augmente, monsieur?
G1NGÜET.
Oui,madame...
ma
douleuraugmente untantinet!...maisçanefaitrien...où enétions-nous?... (apart.)
Oh
!cettefois,jo lutterai...j’ail’amour pour moi.(Haut.)Où en étions-nous,s’ilvousplaît?...
MADAME
GROSCAILLOU.Maisjenesais...sivoussouffrez...ilvaudrait peut- êtremieux...(Allantau piano.)Ilestbon, votre piano?
GINGUET,avecrage.
Excellent, madame!...Six octavesetdemi... garanti cinqans...Vousvoulezl’essayer... essayez-le...(apart.) Tandis que j’entendrailepiano,jen’entendraipas...
lavoix.
La montreser’monteet les aiguillesmarchent.
ET
LESMOUILLES MARCHENT
.17GINGUET,avecrage.
Ah
!criedonc plutôt:Mesdouzefranc....scélérat!ilm'fautmesdouzefrancs!...
MADAME
GROSCAILLOU,ouvrantlecartonaux montresqui est surlepiano.Tiens! vous avezachetédeses babiolesàccmar- chand!,.. Quellefantaisie!...
GINGUET.
J’en aiacheté quelques-unes...Oui..11estbonde fairealler lecommerce.
MADAME
GROSCAILLOU,riant.Quelques-unes!...Maisil yenaune cargaison là- dedans!...
GINGUET.
Une
cargaison estlemot... Jecomptefréterpro- chainement unnavire...ungrosnavire...pour porter cesbijouxaux sauvages del’Océanie.Les sauvagesn’ont généralement pas de montres...je leurenoffre...des montres pourrire...maispuisqu’ilsne connaissent pas cellespour debon...n’est-cepas?Usme
donnentdes lingotsd'oren échange... Pas tropbête...Ah!ah!...pas tropbête!...
MADAME
GROSCAILLOU,àpart..Ah
ça! mais... est-ce qu’ildevientfou!...GINGUET.
Maisoù en étions-nous?...
Ah
!...vous vousdisposiez àme
jouer quelquechose,madame...Jouezdonc!...MADAME
GROSCAILLOU,àpart,ensouriant.L’effet d'unpremiertête-à-tête...soyons indulgente.
9
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3b
LA MONTRE
RE RMONTE
LAVOIX.La montreser’monteet lesaiguillesmarchent.
MADAME
GROSCAILLOU,feuilletantdelamusique.Ilestassommant,cethomme,avecses cris!...
• •
GINGUET.
Assommant... mais,non...
A
lalongue...ons’yfait...
(Apart.)
On
s’yfait...danslatombe.MADAME
GROSCAILLOU.Ah!IlBacio...toujoursjolie,cette valse...
tGINGUET.
Oui!...Voyons, chèreCornélie... ce Bacio... ce petit Bacio!...
MADAME
GROSCAILLOU,avecpudeur Monsieur!...GINGUET.
CepetitBacio surlepiano...Oh!jeneledemande encoreque surlepiano!
MADAME
GROSCAILLOU,semettantau piano.Voustournerezlesfeuillets?...
GINGUET
Jelestournerai!... n’ayezpaspeur! Oh!j’aiune réputation danslemondepour tournerlesfeuillets!...
unmiel!...(Regardant Calonnier qui continue de dormir.)Et leCalonnierquerienneréveille!Heureux-Calonnier!
(Ici l’on entend, àdroite, lebraitdumoulin àcafé.Gingue bondit,saisipar uu accès de sonticnerveux).
Ah
!...lemoulin maintenant!...lemoulin quis’enmêle!...KT LES
AIGUILLES MARCHENT
39MADAME
GROSCAILLOU,au piano.Allons,Monsieur!...
GINGUET.
Madame?,..(Bruitdumoulin.) Aïe!...Coquine de Jean- nette!...Iln’est paspossible...elles’entend avecles marchandsde montres!...
MADAME
GROSCAILLOU.Lefeuillet!...Lefeuillet!...
GUINGUKT.
Ah!oui!Je n’y étaisplus!...(Apart.)Non,jen’y suis plus du tout,même... (Touchant sonfront.)Case vide...
Oh
!çasevide!..MADAME
GROSCAILLOU,s’arrêtant.Maisc’estuneplaisanterie,monsieur...
' GINGUET.
Une
plaisanterie...moi,plaisanter!... jen’enaipas envie, jevous jure!...Ah!lefeuillet...je tourne...je tourne!(En disantcosmots,ils’estapprochédu piano.Acemoment,en même tempsque lebruitdumoulin,la voixrépète: «La montreser’monteet lesaiguillesmarchent».Prisd’unenou- velle crispation,Ginguet,en étendantlamainverslamusique, accrocheaveclebouton desamanchetteune des grappes de cheveux demadameGroscaillouqu’il enlève.)
MADAME
GROSCAILLOU,avecuncridécoléré.Ah!...
OINGUET.
Jeu’aipas bien tourné?
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10
LA MONTRE
SER’MONTE MADAME
GBOSCAILLOU.Ehl monsieur...ils’agitbien...Après votremanche.
après votremanche!
GINGUET.
Tiens! descheveux!...Des cheveuxfrisés qui
me
poussentauxmains!Comme
àNabuchodonosor!...MADAME GR030AILL0U,lesluiprenant vivement.
Mescheveux que vous avezarrachés...
comme
un brutal...comme
un maladroit que vousêtes...GINGUET.
C’est que c’estvrai... cesontlesvôtres...Ah!..
dame!s’ilsne tenaient pasplusqueça,nonplus.
MADAME
GBOSCAILLOU.A
lamaladresse,vous joignezl’insolence,monsieur!Il suffit... (Courantà Calouuier.)Réveillez-vous,
mon
frère...Nouspartons.. .
CALONN1ER,seréveillant.
iïoin...l’omnibus verse!...
G1NGUET.
.Madame...Cen’estpasuneraisonparceque...jene retirepas
ma
proposition,madame, parce que,chez vous,l’arts’est associéàlanature...Je vous trouve toujoursbelle etaimable,madame.MADAME
GItOSCATLLOU.Et moi,jevous trouvelaidetbête,monsieur.
GINGUET.
Oh!
ET LES
AIGUILLES MARCHENT
41MADAME
GROSCAILLOU.Etje neseraijamais votre femme!Non!jamais!
jamais! jamais!
GINGÜET.
Comme
chezlesmontagnardsécossais!...MADAME
GROSCAILLOU.Plait-il?...
GINGUET.
»
Unecitation... c’étaitunecitation!
MADAME
GROSCAILLOU,à Calonnivr.Allons,
mon
frère,votrebras...CALONNIER.
A
vosordres,ma
sœur...(Bas à Ginguet.)Ques’est-il donc passé durantmon
petitsomme?...LAVOIX,enmêmetemps que lebruitdu moulin.
La montreser’monteet les aiguillesmarchent!
GINGUET,au comble del’exaltationnerveuse.
Ah!...cequis’estpassé..demandez-leà cet
homme
quicrie...demandez-le àcemoulinqui grince, cequi s’estpassé,ilsvousledirontmieuxquemoi!...Ah!ah!ah!...
MADAME
GROSCAILLOU, aveccolère.Ah
!...Ilraille maintenant enme
faisantdesgri- maces!...C’enesttrop!Tenez, monsieur,voilàcom- mentUne Groscaillousevenge des impertinents de votre espèce!...(Elle luidonne unsoufflet.)
GINGUET, setenantlajouo.
Bigle!...
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•12
LA MONTRE
SER
.MONTE MADAME
GEOSCAILLOU.Air:Ilu quil'avucnce.
Etvoilàcommeune femme Quise sentducœur Suitpunir un railleur. (Ois.)
GINGt'ET.
AL! c’esttrès-joli,madame, C'étaitmieux encor
En mefrappantmoins fort. «
MADAME
GROSCAILLOU.Quandonm’outrage, Gareà marage,
A
mafureur.ENSEMBLE.
Etvoilàcommeunefemme, Etc.
(Alafindel'ensemble,madameOroscaillouetCaloimier sont sortisvivementparladroite.Ginguetesttombéabrutisurun fauteuil.
SCÈNE XIV ET DERNIÈRE.
GUINGUET,puis JEANNETTE.
G1NGURT,seul.
» Souffleté!...souffleté!...
mon
discoursquin’estpasfuit...lemoulin... une rupture avec
madame
Gros- caillou.. deuxdouzaines de montres pourles sau- vages!... (Selevant.)A.h!çayest!Lacordeestdéten-KT
LESAIGUILLES MARCHENT
43 due... elle est complètement détendue,la corde!(Chantant.)
Tralala la Tra lala la Quelestdonccetair?
(Parlé.) Cetair... c’estlerefrainde ce misérable...
sous
ma
fenêtre...vous savez?...Oh!...Cerefrain...(Chantant.)
La montr’quitourne etsesaiguillesqu’onr’monte M'ontrendufou!...
(Parlé.)Fou!fou!fou!...je suisfou!...Quiest-cequi veut
me
conduire à Cbarenton? Jepayelavoiture!JEANNETTE,entrantencourant parladroite.
Ali!monsieur! monsieur!...
G INGUET.
Jeannette!...C’est toiquitecharges de m’escorter, petite?
JEANNETTE.
C’estmoiqui,pour vous débarrasser decesméchants marchandsquivous tourmentaient, viens deprierun sergent devilledeleurordonner departir.
G INGUET(jvec joie).
Etilssontpartis?
JEANNETTE.
Ilssontpartis!...
GINGUET.
Iln’enreviendraplus? JEANNETTE.
Iln’enreviendraplus!...Ah!bien!Quandlesergent
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44 L.\
MONTRE
SER’MONTE
devillea apprisqu’ils’agissaitdu repos dusecrétaire de Y
Ami
desbêtes, fallaitvoircomme
ila enlevé nos horlogers!...GINGl'ET, avecélan.
Jeannette...tu assauvétonmaître,noblefille,tul’as sauvétoutsimplement!(Sereprenant.)Ah!mais,le
mou
lin... pourtant... pourquoi faisais-tuencore allerle moulin?
JEANNETTE,d'unton naïf.
Lemoulin?...Moi!Parexemple! mai3jel’aivendu,
ilyauneheure, àunrétameur...lemoulin...mon- sieur.. trois francsdixsous...(Tirantdel’argentde sa poche.)Apreuve quev’iàl’argent.
G1NGUET,àpart.
Elleavaitvendule moulin...etjecroyaisencore l’entendre!...Ah!...l’aliénationmarchait!...ellemar- chait, l’aliénation!..(Haut.)
Eh
bien...pourterécom- penser, Jeannette...JEANNETTE.
Pour
me
récompenser, monsieur?...GINGUET,àpart.
Une
femme
quime
soufflette,merci! J’enaiassez, delaGroscaillou!...Etpuis sescheveuxquine sont pas ses cheveux. Qu'est-ce quime
prouvequesesrentes sontsesrentes?...jeannette.
Pour
me
récompenser, monsieur?GINGUET,àpart,regardant Jeannette.
Au
moins... sicelle-làn'apasderentes, ellea desET
LËSAIGUILLES MARCHENT
45 cheveux!...Sans compterle reste... (Haut.)Jet’épouse, Jeannette...JEaNN ETTE,avecjoie.
Ah!...
GINGUET.
Si ça tefaitplaisir,cependant!
JEANNETTE, mêmeintonation Oh!...
GINGUET,àpart.
Un
:ah!etun:oh! quime
suffisent!Çaluifait plaisir!Bah!...Lesroisépousaient bien desbergères...unancienmarchanddebouchons peut bien épouser sa bonne!...
JEANNETTE,àpart,montrantlamontre de 50centimesque Ginguetluia donnée.
Lejour de
ma
noce...voilà lamontrequejeporte- rai...Iln'yen a pas deplus bellepourmoiaumonde.GINGUET,aupublic.
Aie:Des anguillesetdesJeunesfilles.
Jebais lebrnit,je lo confesse Pargoftt,parétat...Mais,vraiment, Ilenestunquimecaresse L’oreilleon nepeutplusgaiement.
Permottez-'vousquejevousmontre Quelestcebruit?... Faitescommeça...
(Ilimiteune personne qui applaudit)
Etjevous jure quenotr’montre, Remontéeainsi, marchera.
FIN.
1*A1Ü9.
—
IMP.L.POUPAKT-l>AV\L,BCEDU UAC,30.d’ invent:
3 3^3
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