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Développement de la relation entre la mémoire de travail et la complexité syntaxique chez l'enfant de 5 à 12 ans

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Academic year: 2022

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Master

Reference

Développement de la relation entre la mémoire de travail et la complexité syntaxique chez l'enfant de 5 à 12 ans

DUPLOYER, Aurore

Abstract

Au cours du développement langagier, l'enfant acquiert dans un premier temps les structures syntaxiques considérées comme les moins complexes. La complexité syntaxique se définit selon le nombre et la nature des opérations syntaxiques effectuées au sein d'un énoncé. Afin de rendre compte des difficultés précoces à produire des énoncés complexes, Jakubowicz (2007) a proposé son « Hypothèse de Complexité Computationnelle ». Pour cette chercheuse, les enfants présentant un développement langagier typique ou atypique présentent tous un système syntaxique intact. Les difficultés face à la complexité syntaxique rencontrées au cours du développement seraient dues à des limitations au niveau de facteurs externes au langage et plus particulièrement à des limitations au niveau de la mémoire de travail. Ainsi, pour Jakubowicz, les capacités restreintes de la mémoire de travail chez le jeune enfant limiteraient directement ses capacités syntaxiques. Le but de notre travail est de préciser les relations entre la mémoire de travail et la complexité syntaxique au cours du développement. Plus [...]

DUPLOYER, Aurore. Développement de la relation entre la mémoire de travail et la complexité syntaxique chez l'enfant de 5 à 12 ans. Master : Univ. Genève, 2011

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:17591

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R ECHERCHE DE M AITRISE EN L OGOPEDIE

D EVELOPPEMENT DE LA RELATION ENTRE LA

MEMOIRE DE TRAVAIL ET LA COMPLEXITE SYNTAXIQUE CHEZ L ’ ENFANT DE 5 A 12 ANS

Août 2011 



 


Mémoire effectué par Aurore Duployer 



 
 


Sous la direction du Professeur Ulrich Hans Frauenfelder et du Docteur Hélène Delage Jury: Professeur Ulrich Hans Frauenfelder, Professeur Julie Franck et Docteur Hélène Delage 



 
 


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Remerciements

Je voudrais remercier en tout premier lieu le Professeur Ulrich Hans Frauenfelder pour l’encadrement de cette recherche et pour ses précieux conseils et remarques, et plus particulièrement le Docteur Hélène Delage pour sa grande disponibilité, son aide et ses encouragements constants. Ce fut une collaboration très enrichissante et je vous en remercie sincèrement.

Je remercie également Mme Daniela Gabriel Mounir et Mme Nathalie Pross qui nous ont généreusement prêté le matériel pour certaines tâches.

Je remercie les directeurs et directrices d’écoles qui nous ont ouvert leurs portes pour tester les enfants, et bien entendu, les enfants et leurs parents qui nous ont permis de mener à bien cette étude.

Je remercie le Professeur Ulrich Hans Frauenfelder, le Professeur Julie Franck et le Docteur Hélène Delage de faire preuve de disponibilité en acceptant de faire partie de mon jury.

Je remercie Marie Cruz qui nous a permis d’utiliser, à titre comparatif, les données issues de son travail récoltées auprès d’une population adulte.

Enfin, je remercie chaleureusement Géraldine Abos et Marie Varlet, mes deux « camarades » de mémoire, qui ont toujours été présentes et disponibles et avec qui ce fut toujours un immense plaisir de collaborer.

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RESUME

Au cours du développement langagier, l’enfant acquiert dans un premier temps les structures syntaxiques considérées comme les moins complexes. La complexité syntaxique se définit selon le nombre et la nature des opérations syntaxiques effectuées au sein d’un énoncé. Afin de rendre compte des difficultés précoces à produire des énoncés complexes, Jakubowicz (2007) a proposé son « Hypothèse de Complexité Computationnelle ». Pour cette chercheuse, les enfants présentant un développement langagier typique ou atypique présentent tous un système syntaxique intact. Les difficultés face à la complexité syntaxique rencontrées au cours du développement seraient dues à des limitations au niveau de facteurs externes au langage et plus particulièrement à des limitations au niveau de la mémoire de travail. Ainsi, pour Jakubowicz, les capacités restreintes de la mémoire de travail chez le jeune enfant limiteraient directement ses capacités syntaxiques. Le but de notre travail est de préciser les relations entre la mémoire de travail et la complexité syntaxique au cours du développement. Plus précisément, nous cherchons à trouver une relation prédictive entre ces deux domaines cognitifs. En effet, suivant Jakubowicz, les compétences en mémoire de travail prédiraient les performances syntaxiques chez l’enfant. Pour ce faire nous avons évalué les performances en mémoire de travail et en complexité syntaxique de 48 enfants âgés de 5 à 12 ans. Les compétences de la boucle phonologique de nos sujets ont été appréhendées à l’aide d’épreuves d’empans simples, tandis que des tâches d’empans complexes ont été utilisées pour tester spécifiquement la mémoire de travail. Les habiletés syntaxiques des enfants ont été évaluées en compréhension et en répétition. Un recueil de langage spontané a également été récolté afin d’évaluer la production syntaxique de nos sujets. Nos résultats montrent une nette augmentation des performances de la boucle phonologique, de la mémoire de travail, ainsi que des compétences syntaxiques avec l’âge.

Un lien fort entre la mémoire de travail et la complexité syntaxique a également été mis en évidence au sein de nos analyses corrélationnelles. Plus précisément, nos analyses de régression multiple confirment que les capacités de mémoire de travail prédisent les performances syntaxiques au cours du développement. L’hypothèse de Jakubowicz semble donc confirmée à l’éclairage de nos résultats.

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TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION………...………. 5

1.PARTIE THEORIQUE……… 6

1.1 La mémoire de travail………. 6

1.1.1 Modèles de la mémoire de travail……… 6

1.1.2 Distinction terminologique……….. 9

1.1.3 Empans simples et complexes : évaluation……….. 10

1.1.4 Empans simples et complexes : développement………... 12

1.2 La complexité syntaxique………... 13

1.2.1 Définition de la complexité syntaxique……… 14

1.2.2 Compétences syntaxiques : évaluation………. 17

1.2.3 Compétences syntaxiques : développement………. 18

1.3 Lien entre la mémoire de travail et le développement linguistique chez l’enfant…... 19

1.3.1 Hypothèse de la Complexité Computationnelle de Jakubowicz……… 19

1.3.2 Etudes portant sur le lien entre MdT et développement linguistique chez l’enfant…….. 20

1.4 Problématique et hypothèse théorique……….. 24

2.PARTIE EXPERIMENTALE……….... 25

2.1 Participants……….. 25

2.2 Matériel et procédure………. 25

2.2.1 Procédure générale………. 25

2.2.2 Mémoire………. 26

2.2.3 Complexité syntaxique……… 29

2.2.4 Raisonnement non-verbal………... 34

2.3 Variables……….. 35

2.4 Analyses statistiques……… 36

2.5 Hypothèses opérationnelles……… 37

3.RESULTATS……….. 39

3.1 Variables contrôlées……… 39

3.2 Hypothèse 1 : Augmentation des performances en mémoire de travail avec l’âge…... 39

3.3 Hypothèse 2: Augmentation des performances syntaxiques avec l’âge………. 42

3.4 Hypothèse 3 : Lien entre la mémoire de travail et la complexité syntaxique………… 45

4.DISCUSSION………. 52

4.1 Hypothèse 1 : Augmentation des performances en mémoire de travail avec l’âge…... 53

4.2 Hypothèse 2: Augmentation des performances syntaxiques avec l’âge………. 56

4.3 Hypothèse 3 : Lien entre la mémoire de travail et la complexité syntaxique………… 57

4.4 Perspectives……….. 61

BIBLIOGRAPHIE………... 63

LISTE DES ANNEXES……… 69

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INTRODUCTION

Le développement de la syntaxe chez l’enfant est directement dépendant de la complexité des structures à acquérir. En effet, ce sont les structures syntaxiques les moins complexes qui vont apparaître dans un premier temps chez l’enfant. En grandissant, les enfants vont par la suite utiliser des constructions de plus en plus complexes. Selon Jakubowicz (2007), la complexité syntaxique se définit selon le nombre et la nature des opérations effectuées au sein d’un énoncé. Ainsi, plus une phrase sera additionnée de mots et de déplacements, plus elle sera considérée comme complexe. Cette même chercheuse a proposé son « Hypothèse de Complexité Computationnelle » afin de rendre compte des difficultés rencontrées face à cette complexité par des enfants atteints d’un trouble spécifique d’acquisition du langage (TSL), ainsi que par les jeunes enfants en pleine acquisition du langage oral. Jakubowicz postule que plus une phrase sera complexe, plus elle va demander un traitement important. Pour elle, tous les enfants, qu’ils présentent ou non un développement langagier typique, n’ont aucun déficit de leur système syntaxique. Les difficultés rencontrées face à la complexité syntaxique seraient reliées non pas à la faculté de langage, mais aux limitations de facteurs externes interagissant avec le langage, et notamment à des limitations de la mémoire de travail. Ainsi, le jeune enfant aurait plus de difficulté à produire des constructions syntaxiques complexes du fait d’une limitation initiale de sa mémoire de travail. Le but de notre recherche est d’établir qu’il existe effectivement un lien entre la mémoire de travail et la complexité syntaxique au cours du développement. Plus précisément, nous allons chercher à prouver que les compétences en mémoire de travail chez l’enfant vont prédire ses capacités syntaxiques en production, en compréhension et en répétition. Dans la première partie de notre travail, nous allons définir les concepts de mémoire de travail et de complexité syntaxique et présenter la littérature actuelle sur les relations entre ces deux domaines cognitifs. Nous présenterons dans un second temps notre méthodologie en nous attachant à décrire précisément chaque tâche utilisée. Viendront ensuite nos résultats et analyses et enfin la discussion de ces résultats à la lumière de nos hypothèses.


 


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1. PARTIE THEORIQUE

« La mémoire humaine est un système permettant le stockage et la récupération de l’information, laquelle information est naturellement transmise par nos sens » (Baddeley, 1993). Un être humain est capable de stocker une information quelques fractions de seconde comme de stocker un souvenir durant toute sa vie. Ces différentes durées de stockage sont prises en charge par différentes mémoires. La mémoire humaine est donc multiple et est divisée en trois composants principaux : la mémoire à court terme, la mémoire à long terme et la mémoire sensorielle. Le terme de « mémoire de travail » est apparu avec le modèle d’Atkinson et Shiffrin en 1968 et a progressivement permis d’affiner la notion de mémoire à court terme. Concernant la mémoire de travail, ces auteurs avançaient l’importance à la fois d’un stockage et d’un traitement à court terme de l’information lors de tâches cognitives complexes, telles que l’apprentissage ou le raisonnement (Baddeley, 1993).

Au sein de cette première partie, nous allons tout d’abord définir la mémoire de travail et présenter les différents modèles théoriques qui nous ont intéressés au sein de cette recherche. Nous aborderons dans un second temps la thématique de la complexité syntaxique.

Enfin, l’accent sera mis sur certaines études qui ont permis de mettre en évidence la relation entre la mémoire de travail et les compétences langagières au cours du développement.

1.1 LA MEMOIRE DE TRAVAIL

La mémoire de travail est un système de maintien temporaire et de manipulation de l’information, à capacité limitée. Elle est nécessaire à la réalisation de tâches cognitives complexes, telles que l’apprentissage, le raisonnement, la résolution de problème ou bien encore la compréhension (Baddeley, 2003).

1.1.1 Modèles de la mémoire de travail

De nombreux modèles tentent, à l’heure actuelle, d’expliquer le fonctionnement de la mémoire de travail. Les conceptions unitaires, notamment le modèle de Cowan (2005) ou celui d’Engle (2004), postulent que la mémoire de travail serait un système unique, faisant partie de la mémoire à long terme (Barouillet & Camos, 2007). Majerus (2008), quant à lui, définit la mémoire à court terme verbale comme une activation temporaire des représentations langagières, accompagnée d’un système spécifique de stockage et de traitement des informations sérielles. Dans le cadre de notre recherche, nous avons choisi de

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nous baser sur le modèle de Baddeley et Hitch (1986), étant le plus influent et le plus utilisé dans la recherche actuellement (Gaonac’h & Fradet, 2003 ; Zebib, 2009). De nombreuses données en neuro-imagerie et neuropsychologie soutiennent la composition en systèmes multiples de ce modèle (Baddeley, 2003). De plus, les épreuves utilisées en neuropsychologie, comme celles utilisées dans notre présente recherche, permettant d’évaluer la mémoire de travail sont, pour la plupart, basées sur le modèle de Baddeley et Hitch (1986).

Modèle de la mémoire de travail de Baddeley et Hitch

Baddeley et Hitch (1986) se sont basés sur les situations de doubles tâches pour construire leur modèle. Une double tâche correspond à deux tâches faites simultanément : une tâche de mémorisation et une tâche cognitive (raisonnement, compréhension, etc.). Ces auteurs ont observé que les capacités des sujets à effectuer la tâche cognitive chutaient lorsque le nombre d’items à mémoriser approchait la limite mnésique (7±2), alors que les capacités à la même tâche cognitive restaient intactes quand le nombre d’items était inférieur.

Ils ont ainsi déterminé que les capacités de stockage de la mémoire de travail sont fixes, et que, lorsque le nombre d’informations à retenir dépasse ces capacités (lors d’une double tâche), une partie des capacités normalement utilisée pour la tâche cognitive va prendre en charge le stockage (Baddeley, 1974 In Gaonac’h & Larigauderie, 2000 ; Baddeley, 1993).

Ces auteurs proposent alors un modèle à composants multiples qui géreraient à la fois le stockage et le traitement des informations. Le modèle de Baddeley et Hitch est donc constitué de plusieurs systèmes : la boucle phonologique, le calepin visuo-spatial, l’administrateur central et le buffer épisodique (Baddeley, 2003 ; Barouillet & Camos, 2007), comme présenté en figure 1.

La boucle phonologique est composée d’un stock phonologique, responsable du stockage de l’information verbale, à capacité limitée. Elle contient également un mécanisme de répétition articulatoire qui permet de maintenir la trace phonologique en mémoire pendant un laps de temps plus important. Le calepin visuo-spatial est, quant à lui, responsable du stockage et du rafraîchissement de l’information visuelle et spatiale. Son fonctionnement est le même que celui de la boucle phonologique. Le système principal du modèle de Baddeley et Hitch est l’administrateur central. Ce système a quatre fonctions principales :

- la coordination de l’activité des deux systèmes esclaves (boucle phonologique et calepin visuo-spatial), ainsi que la répartition des ressources disponibles entre stockage et traitement ;

- la sélection des stimuli importants et l’inhibition des stimuli non-pertinents ;

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- la récupération et la manipulation des informations en mémoire à long terme ;

- la gestion de ressources attentionnelles, afin d’inhiber les automatismes dans certaines situations, comme par exemple diriger son regard dans la direction inverse à celle d’un avertisseur (Gaonac’h & Larigauderie, 2000 ; Zebib, 2009).

Finalement, Baddeley a rajouté en 2000 le buffer épisodique dans son modèle de base. Ce système de stockage temporaire à capacité limitée est capable d’intégrer des informations de différentes sources (mémoire à long terme, boucle phonologique, calepin visuo-spatial) et de différents types. Il permet de faire l’interface entre la boucle phonologique et le calepin visuo-spatial. Il est également contrôlé par l’administrateur central, qui récupère régulièrement des informations au sein de ce buffer.

Figure 1 : Modèle de Baddeley et Hitch

Modèle de la mémoire à court terme verbale de Majerus

Nous nous sommes également penchés sur la théorie de Majerus (2008) qui propose une distinction intéressante au niveau du type d’informations stockées en mémoire à court terme (MCT) verbale. Cet auteur distingue d’une part l’information « item », qui correspond aux caractéristiques phonologiques et sémantiques des stimuli à mémoriser, et d’autre part

ADMINISTRATEUR
CENTRAL
 Système
de
contrôle
attentionnel


BOUCLE
PHONOLOGIQUEModalité
auditivo‐

verbale


CALEPIN
VISUOSPATIALModalité
visuo‐spatiale


BUFFER
EPISODIQUE

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l’information « ordre sériel », qui correspond à l’ordre séquentiel dans lequel les différents stimuli d’une liste sont présentés. Ces deux types d’informations sont indépendantes et peuvent être dissociées au travers de tâches spécifiques. Par exemple, en ce qui concerne les informations « item », une tâche de répétition différée de pseudo-mots peut être utilisée, où ce sont essentiellement les informations phonologiques qu’il est important de mémoriser, l’ordre séquentiel étant minimisé si les pseudo-mots sont relativement courts (Majerus, 2008). Un exemple de tâche qui peut être effectuée pour mesurer, au contraire, les capacités de rétention de l’ordre sériel uniquement est « la course des animaux ». Dans cette tâche, l’enfant entend une série de noms d’animaux. Il va ensuite recevoir des cartes sur lesquelles sont représentés les animaux en question. L’enfant va devoir les remettre dans l’ordre de présentation qu’il vient d’entendre (Majerus, 2008). Cette tâche optimise la rétention de l’information sérielle et le sujet n’a pas à mémoriser l’information item, puisque les noms d’animaux sont fournis. Selon Majerus (2008), cette épreuve mesure de manière plus « pure » la mémoire à court terme verbale, puisqu’elle ne ferait pas entrer en jeu les représentations langagières, mais uniquement le système spécialisé dans la rétention de l’ordre sériel. Ainsi, les informations « ordre sériel » sont plus indépendantes du langage que les informations

« ordre item » puisqu’aucune caractéristique phonologique ou sémantique ne doit être restituée.

1.1.2 Distinction terminologique

Selon le modèle de Baddeley et Hitch (1986), la boucle phonologique et le calepin visuo-spatial sont deux structures uniquement dédiées au stockage à court terme de l’information. Elles peuvent contenir un nombre limité d’informations qui déclinent rapidement si aucun processus de contrôle, tel que la répétition, n’est effectué afin de les maintenir. Dès lors qu’un traitement ou une manipulation va s’additionner au stockage, on parlera alors de mémoire de travail. Un traitement et un stockage vont alors faire intervenir non seulement le système de stockage (boucle phonologique ou calepin visuo-spatial), mais également l’administrateur central, qui va gérer à la fois le traitement et le stockage de l’information.

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Clarification terminologique :

Nous précisons ici les termes suivants, afin que leur utilisation soit claire tout au long de ce travail.

1. La mémoire de travail (MdT) comporte plusieurs composants : l’administrateur central, la boucle phonologique, le calepin visuo-spatial et le buffer épisodique. Au sein de ce travail, lorsque nous parlerons de MdT, il s’agira uniquement de l’association de l’administrateur central et de la boucle phonologique. En effet, n’abordant jamais la composante visuo- spatiale au cours de notre recherche, nous nous permettons d’utiliser ce terme général pour désigner l’association de ces deux systèmes (MdT = administrateur central + boucle phonologique).

3. La boucle phonologique (BP) correspond au système de maintien à court terme de l’information verbale dans le modèle de Baddeley et Hitch (1986). Cette composante fait partie de la MdT, mais peut être évaluée isolément, sans faire intervenir les autres systèmes du modèle.

La boucle phonologique est composée, comme expliqué précédemment, à la fois d’un stock phonologique, ainsi que d’un mécanisme de répétition articulatoire permettant un plus long maintien des items au sein de cette boucle. La BP fait partie intégrante de la mémoire de travail. Cependant, elle peut être évaluée de manière isolée, sans faire intervenir les autres composants du modèle de Baddeley et Hitch (1986), à l’aide de tâches dites d’empans simples impliquant uniquement un stockage. La mémoire de travail est quant à elle évaluée à l’aide de doubles tâches, nécessitant à la fois un stockage et un traitement des informations mémorisées. Les épreuves évaluant la MdT sont appelées des tâches d’empans complexes.

Ainsi lors de l’évaluation de la MdT (= administrateur central et BP), un traitement va s’additionner au stockage, tandis que lors de l’évaluation de la BP, il ne s’agit que de stockage (Barouillet et Camos, 2007 ; Zebib, 2009).

1.1.3 Empans simples et complexes : évaluation

Comme dit précédemment, les tâches d’empans simples évaluent la capacité des systèmes de maintien à court terme de l’information. Ces épreuves consistent à « maintenir passivement l’information et la reproduire de façon non transformée » (Gaonac’h &

Larigauderie, 2000). Selon le modèle de Baddeley et Hitch (1986), c’est la boucle phonologique qui est dédiée au stockage passif de l’information verbale. Notre recherche

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s’intéressant exclusivement à la BP, nous n’allons pas développer l’évaluation et le développement du calepin visuo-spatial.

La BP est donc évaluée par des tâches d’empans simples verbaux qui font intervenir à la fois le stock phonologique et le mécanisme de répétition articulatoire (Gaonac’h &

Larigauderie, 2000 ; Zebib, 2009). Il s’agit en général de la présentation d’une liste de chiffres, de lettres ou de mots de longueur croissante à répéter immédiatement après l’examinateur (Barouillet, Lépine & Camos, 2005). Dans une étude de Gathercole, Pickering, Ambridge & Wearing (2004), les performances de la BP ont été évaluées justement à l’aide de tâches d’empans simples verbaux. Ils ont utilisé le rappel de chiffres, le rappel de mots et le rappel de pseudo-mots, afin d’appréhender les capacités de stockage de la BP chez des enfants âgés de 4 à 15 ans.

Pour évaluer les capacités de la mémoire de travail, il s’agit d’effectuer des tâches qui nécessitent un « maintien d’informations pendant la réalisation d’une activité cognitive complexe temporellement limitée » (Gaonac’h & Larigauderie, 2000). Au sein du modèle de Baddeley et Hitch (1986), les tâches d’empans complexes verbaux testent les capacités à la fois de l’administrateur central et de la boucle phonologique (Gaonac’h & Larigauderie, 2000 ; Zebib, 2009). Elles sont jugées plus difficiles que les tâches d’empans simples et leurs résultats sont en général inférieurs de deux items par rapport aux empans simples (Barouillet

& Camos, 2007). Le « listening span » est un exemple de tâche d’empan complexe verbal fréquemment utilisée (Gathercole & al., 2004 ; Pross, Gaonac’h & Gaux, 2008 ; Seigneuric &

Megherbi, 2008) pour rendre compte des capacités de la mémoire de travail. Le sujet entend une séquence de plusieurs phrases (de deux à cinq) qui lui sont lues. Après chaque phrase, l’enfant doit effectuer un jugement sémantique et répondre « vrai » ou « faux » au sens de la phrase. Il doit simultanément retenir le dernier mot de chaque phrase. A la fin d’une séquence, le sujet doit restituer dans l’ordre les derniers mots des phrases. Cette tâche fait donc appel à la fois au stockage d’informations verbales et au traitement sémantique des phrases entendues. La tâche d’empan de chiffres envers est également considérée comme une tâche de MdT car il s’agit d’effectuer un maintien des chiffres en mémoire et une activité mentale sur ces mêmes chiffres. Le « counting span » et le « running span » sont également des épreuves d’empans complexes qui seront présentées en détail en section 2.2.2.2, p. 28-29.

Dans le but d’un maximum de clarté, le tableau I présente les tâches utilisées au sein de ce travail en précisant quel composant mnésique elles évaluent et donc si elles sont considérées comme des épreuves d’empans simples ou complexes.

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Tableau I : Tâches d’empans simples et complexes

Boucle phonologique MdT (= administrateur central + BP) Empan de chiffres

endroit ✓

Course des animaux ✓

Tâches d’empans

simples

(stockage) Répétition de

pseudo-mots ✓

Empan de chiffres

envers ✓

Counting span ✓

Tâches d’empans complexes (stockage +

traitement) Running span ✓

1.1.4 Empans simples et complexes : développement

Considérons maintenant le développement de la boucle phonologique, ainsi que de la mémoire de travail. Gathercole et al. ont recherché, dans leur étude de 2004, d’éventuels changements des capacités de chaque composant de la mémoire de travail chez des enfants tout-venant âgés de 4 à 15 ans. Les résultats montrent une augmentation progressive et linéaire de la capacité de chaque sous-système de la mémoire de travail de 4 à 15 ans. Dans leur étude de 2008, Pross et al. ont également investigué l’évolution développementale des différents composants du modèle de Baddeley chez des enfants tout-venant âgés de 8 à 10 ans. Les résultats indiquent que les empans simples (empan de mots et empan de pseudo- mots) et complexes verbaux (listening span et running span) augmentent significativement entre 8 et 10 ans. Seigneuric, de Guibert, Megherbi, Potier et Picard (2008) ont également montré une augmentation linéaire des performances à l’épreuve de « listening span » (évaluant la MdT) chez des enfants âgés de 8 à 10 ans, tout comme Towse, Hitch et Hutton (1998) qui ont montré une augmentation des performances à l’épreuve du « counting span » (évaluant également la MdT) chez des enfants âgés de 6 à 10 ans.

Selon la revue de littérature de Barouillet et Camos (2007), les empans simples verbaux augmentent quantitativement avec l’âge, principalement de 2 à 9 ans. L’empan moyen est de deux items à 2 ans et augmente progressivement pour arriver à six items à 9 ans. A l’âge de 11-12 ans, les enfants devraient avoir atteint un niveau adulte concernant les empans simples évaluant la boucle phonologique (Gaonac’h & Fradet, 2003). Poncelet et

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Van de Linden (2003) ont montré, au travers d’une épreuve de répétition de pseudo-mots, que les performances de la BP augmentent de manière particulièrement importante entre 4 et 6 ans. Il n’y a pas de véritable consensus entre les auteurs en ce qui concerne l’âge auquel la BP atteindrait sa maturation finale. Toutefois, il semblerait qu’il y ait relativement peu d’évolution après l’âge de 9-10 ans et que l’augmentation principale des performances se passe donc avant l’adolescence (Gaonac’h & Fradet, 2003 ; Barouillet & Camos, 2007).

Avant l’âge de 7 ans, la BP serait réduite au stock phonologique et ne comprendrait pas de mécanisme de répétition articulatoire (Gathercole & Hitch, 1993 ; Gathercole et al., 2004).

L’augmentation des empans simples après 7 ans pourrait être due à l’apparition de ce mécanisme qui permettrait de maintenir plus d’informations au sein de la BP (Zebib, 2009).

L’évolution des empans complexes se montre beaucoup plus lente que celle des empans simples. Le développement des empans complexes débute vers l’âge de 6 ans pour se prolonger pendant l’adolescence, ce qui indique que les mécanismes responsables de la réussite aux tâches d’empans complexes se développent plus tardivement que le système de maintien à court terme de l’information (Barouillet & Camos, 2007). Siegel a montré, dans son étude de 1994, que les performances en mémoire de travail augmentaient de manière importante de 6 à 15 ans. Aux alentours de 10 ans, la BP commence à être plus spécialisée et mieux développée. Les enfants vont ainsi pouvoir libérer l’administrateur central de sa fonction de stockage, et ainsi mieux en bénéficier pour le traitement (Pross et al., 2008).

1.2 LA COMPLEXITE SYNTAXIQUE

Le but précis de notre recherche est d’établir qu’un lien existe entre la mémoire de travail et la complexité syntaxique. Avant d’aborder la thématique de la relation entre ces deux domaines cognitifs, nous allons nous intéresser à définir la syntaxe et plus particulièrement la complexité syntaxique.

La syntaxe se définit comme « les relations qui existent entre les unités linguistiques et les règles qui président à l’ordre des mots et à la construction des phrases dans une langue » (dictionnaire Petit Robert, 2007). Plusieurs théories linguistiques s’intéressant à la syntaxe se basent sur la perspective chomskyenne. Suivant la théorie avancée par Chomsky, les êtres humains sont dotés à la naissance d’un bagage génétique, la Grammaire Universelle, qui contiendrait un ensemble de principes et de paramètres régissant la syntaxe des différentes langues. Les principes seraient universaux et communs à l’ensemble des langues existantes, tandis que les paramètres seraient fixés chez le jeune enfant à partir de

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l’expérience linguistique. Selon Chomsky, la connaissance d’une langue est le résultat des paramètres fixés au cours du développement (Jakubowicz, 2003 ; Chomsky, 2005).

1.2.1 Définition de la complexité syntaxique

Notre travail se base sur la théorie de Jakubowicz (2007) qui propose une définition de la complexité syntaxique. Sa théorie avait pour but premier d’expliquer les difficultés langagières rencontrées par les enfants présentant un trouble spécifique du langage (TSL).

Cependant, elle permet également de rendre compte des limitations présentes dans le langage oral des jeunes enfants. Selon cette chercheuse, la complexité syntaxique se définit selon le nombre et la nature des opérations syntaxiques effectuées pour produire une phrase. Ce critère de complexité va être développé dans le point suivant. Nous allons également nous attarder sur l’enchâssement, et plus spécifiquement la profondeur de l’enchâssement qui augmente également la complexité d’un énoncé (Hamann, Tuller, Monjauze, Delage &

Henry, 2007 ; Jakubowicz & Tuller, 2008 ; Delage, Monjauze, Hamann & Tuller, 2008).

Le nombre et la nature des opérations syntaxiques

Selon Jakubowicz (2007 ; Jakubowicz & Tuller, 2008), la complexité syntaxique augmente avec le nombre et la nature des opérations syntaxiques effectuées au sein d’une phrase. Cette chercheuse a proposé une « métrique de complexité dérivationnelle » pour rendre compte de l’augmentation de la complexité syntaxique :

A. Fusionner un constituant α n fois donne lieu à une dérivation moins complexe que fusionner un constituant α (n+1) fois.

B. La fusion interne de α donne lieu à une dérivation moins complexe que la fusion interne de α + β.

Une fusion correspond au regroupement d’éléments lexicaux pour former des syntagmes.

Une fusion est donc un assemblage d’éléments grammaticaux qui peut correspondre par exemple au regroupement d’un déterminant et d’un nom pour former un syntagme nominal ou bien encore le regroupement d’un syntagme nominal et d’un syntagme verbal pour engendrer une phrase. Jakubowicz avance donc que, plus il y aura de fusions, c’est-à-dire plus il y aura d’assemblages d’éléments lexicaux, plus l’énoncé sera considéré comme complexe. La fusion interne correspond quant à elle aux déplacements, aux mouvements, que

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subissent les éléments lexicaux. Ces déplacements sont des opérations syntaxiques effectuées à partir de la structure profonde de la phrase, c’est-à-dire à partir de l’ordre canonique des différents constituants d’une phrase. La complexité syntaxique va donc augmenter avec le nombre de déplacements d’éléments lexicaux au sein d’un énoncé. Ce phénomène de déplacement peut être illustré par la formation des questions en français (Strik, 2007 ; Jakubowicz et Tuller, 2008 ; Jakubowicz & Strik, 2008), ce qu’illustrent les exemples suivants :

[1] Tu pousses qui ?

La question [1] n’implique aucun déplacement et est considérée de ce fait comme simple.

Tous les éléments sont dans leur position canonique. La structure profonde de la phrase (sujet-verbe-objet) n’a pas été modifiée.

[2] Qui tu pousses ____ ?


Dans l’exemple [2], le mot interrogatif a effectué un déplacement dans la partie gauche de la phrase. Cette question implique donc un mouvement. Elle sera ainsi considérée comme plus complexe que la question [1] qui ne comportait aucun déplacement. La structure profonde de la phrase a subi ici une modification en surface.

[3] Qui pousses-tu ___ ___ ?


 


La question [3] comporte non seulement un déplacement du mot interrogatif, mais également une inversion sujet-verbe, qui constitue un deuxième mouvement. Cette phrase est plus complexe que les questions précédentes [1] et [2], car elle comprend un nombre plus important de déplacements. Son niveau de complexité syntaxique est donc supérieur.

En synthèse, la complexité syntaxique va augmenter avec le nombre d’assemblages d’éléments lexicaux et le nombre de déplacements effectués au sein d’un énoncé (Jakubowicz, 2007 ; Jakubowicz & Tuller, 2008 ; Jakubowicz & Strik, 2008).

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L’enchâssement

Un déterminant fondamental de la complexité syntaxique est l’enchâssement, et notamment la profondeur de cet enchâssement (Hamann et al., 2007 ; Jakubowicz & Tuller, 2008 ; Delage et al., 2008). Un enchâssement, c’est-à-dire une subordination, entraîne une augmentation des assemblages d’éléments lexicaux et de déplacements dans la phrase. En effet, si une phrase comprend une subordonnée, un certain nombre de mots (subordonnant, verbe de la proposition subordonnée, etc.) vont s’additionner à la proposition initiale. Une subordonnée peut également amener des déplacements, comme dans le cas des relatives par exemple. Ainsi, une phrase contenant un enchâssement, comme en [5], va être plus complexe qu’une phrase sans enchâssement comme dans l’exemple [4]. De plus, une phrase peut également contenir un enchâssement profond, c’est-à-dire une subordonnée enchâssée à l’intérieur d’une autre subordonnée, comme en [6]. Lors d’un enchâssement profond, le nombre de mots et de déplacements va encore augmenter. Ainsi, les phrases avec des enchâssements plus profonds seront considérées comme encore plus complexes.

[4] [5]


 
 

 
 [6] 



 


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1.2.2 Compétences syntaxiques : évaluation

Les compétences syntaxiques peuvent être appréhendées de différentes manières chez l’enfant. De nombreux tests utilisés en logopédie, notamment le BILO (Khomsi, Khomsi, Pasquet & Parbeau-Cueno, 2007), le L2MA (Chevrie-Muller, Simon & Fournier, 1997) ou encore l’ECOSSE (Lecocq, 1996), permettent d’évaluer les capacités des enfants à produire ou comprendre des énoncés de différents niveaux de complexité syntaxique. D’autres méthodes sont aussi possibles afin d’évaluer ce type de compétences. Jakubowicz et Strik, dans leur étude de 2008, ont utilisé une tâche de production induite dans laquelle les sujets devaient poser des questions à un robot. Elles ont ainsi pu observer la production ou non de déplacements au sein des questions produites par des enfants tout-venant âgés de 3 à 6 ans.

Tuller (2011) a également utilisé une tâche de production induite de questions afin d’établir le niveau de complexité syntaxique des questions produites par des enfants avec TSL ou bien encore avec autisme.

Les tests logopédiques cités précédemment permettent également d’évaluer la production, la compréhension et la répétition de phrases contenant des subordonnées. Un autre outil efficace permettant de mesurer la production de subordonnées, ainsi que leur profondeur d’enchâssement, est l’analyse du langage spontané, comme l’ont fait Hamann et al. (2007), Monjauze (2007) ou encore Delage (2008). Une analyse d’un échantillon de langage spontané à l’aide du logiciel CLAN (CHAT) permet d’effectuer différentes mesures permettant d’appréhender, entre autres, le taux de subordination et le taux d’enchâssement profond. Le taux de subordination se calcule selon le nombre de propositions subordonnées par rapport au nombre total d’énoncés verbaux, tandis que le taux d’enchâssement profond correspond au nombre de subordonnées enchâssées dans une autre subordonnée par rapport au nombre d’énoncés verbaux (Delage, 2008). L’exemple [7], issu des données récoltées en langage spontané par Delage (2008), est un exemple d’énoncé (contenant cinq propositions subordonnées) à partir duquel différentes mesures de complexité syntaxique vont pouvoir être calculées. L’avantage certain d’un tel type de recueil est que le sujet n’est jamais contraint dans sa production et que son langage est récolté dans un contexte réellement naturel.

[7] *ALE: non on lit [PR] rien mais c' est [CO] qu' <il fallait> [/] i(l) fallait [SUB1] en amener [SUB2] pour qu' elle les fasse [SUB3] photocopier [SUB4] des animaux pour faire [SUB5] des animaux imaginaires.

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1.2.3 Compétences syntaxiques : développement

Selon Jakubowicz et Tuller (2008), les enfants les plus jeunes, de 3-4 ans, ont une nette tendance à éviter les structures les plus complexes. Ils produisent des énoncés avec moins de mouvements syntaxiques et privilégient ainsi les structures les plus

« économiques » au niveau langagier. Effectivement, les déplacements dans la phrase restent très coûteux pour les enfants les plus jeunes. Au cours du développement, ce sont donc les structures de phrases les moins complexes qui sont acquises dans un premier temps. En grandissant, les enfants vont ensuite utiliser des constructions demandant un calcul syntaxique de plus en plus complexe. Strik (2007) a étudié le développement des déplacements dans les énoncés à l’aide de la formation de questions chez des enfants âgés de 3, 4 et 6 ans. Les résultats montrent que les enfants dès 3 ans sont capables de produire des questions avec déplacement du mot interrogatif (« Où tu vas ? »). Cependant, ils en produisent moins que les enfants plus âgés (de 4 et 6 ans), et ont une tendance plus forte à garder une position canonique (dite « in situ ») du mot interrogatif (« Tu vas où ? »).

Concernant les questions comprenant deux déplacements (« Où vas-tu ? »), Strik (2007) indique une augmentation de leur production de 3 ans jusqu’à l’âge adulte. Les enfants les plus jeunes en utilisent toutefois très peu, privilégiant ainsi un niveau de complexité moindre, tandis que les adultes produisent majoritairement ce type de questions plus complexes à deux déplacements. Tuller (2011) a quant à elle étudié les déplacements dans la production de questions en comparant différentes populations d’enfants présentant soit un développement langagier typique, soit atypique (TSL et troubles autistiques). Ses résultats montrent que les enfants avec TSL produisent plus de questions sans déplacement que toutes les autres populations confondues. Les enfants atteints de troubles autistiques ont également tendance à éviter les déplacements comparativement aux enfants tout-venant. Enfin, les enfants tout- venant âgés de 6 ans produisent plus de questions avec déplacements que les autres populations.

Concernant le développement de la production de l’enchâssement, Delage et al., dans leur étude de 2008, ont montré, à travers une analyse de langage spontané, que le taux d’enchâssement augmentait de manière progressive entre 6 et 11 ans chez des enfants tout- venant. Monjauze (2007) a quant à elle observé une augmentation du taux d’enchâssement profond avec l’âge chez des sujets tout-venant (14 ans > 11 ans > 8 ans). Hamann et al.

(2007) ont étudié la langage spontané d’enfants avec TSL et ces derniers produisent moins de subordonnées et plus d’erreurs dans les phrases contenant un enchâssement que les enfants au développement langagier normal. Monjauze (2007) a également étudié la production de

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l’enchâssement chez des enfants atteints d’épilepsie âgés de 7 à 16 ans. Ces enfants produisent moins d’enchâssement profond, à âge équivalent, que des sujets tout-venant.

1.3 LIEN ENTRE LA MEMOIRE DE TRAVAIL ET LE DEVELOPPEMENT LINGUISTIQUE CHEZ LENFANT

1.3.1 Hypothèse de la Complexité Computationnelle de Jakubowicz

L’hypothèse principale de notre recherche s’appuie directement sur l’Hypothèse de Complexité Computationnelle avancée par Jakubowicz (2007 ; Jakubowicz & Tuller, 2008).

Selon cette hypothèse, les difficultés de production des structures syntaxiques complexes chez les jeunes enfants découleraient de la complexité du calcul syntaxique, c’est-à-dire que plus une phrase serait complexe, plus elle demanderait un traitement important. Jakubowicz postule que tous les enfants, qu’ils aient un développement langagier typique ou atypique, ont une Grammaire Universelle intacte et n’ont donc aucun déficit de leur système syntaxique.

Les difficultés qu’ils peuvent rencontrer au niveau de la production des énoncés complexes n’auraient donc aucun lien avec leur faculté de langage. Ainsi, le jeune enfant n’aurait pas une limitation au niveau de son « appareillage syntaxique », mais plutôt au niveau des facteurs de performances qui interagissent avec le langage et qui sont nécessaires à la computation syntaxique. Parmi ces facteurs interagissant avec le développement linguistique de l’enfant, nous trouvons la mémoire de travail (Jakubowicz, 2007 ; Jakubowicz & Tuller, 2008). Ainsi, le jeune enfant serait contraint à une limitation de traitement au niveau de sa mémoire de travail, ce qui perturberait directement la production de structures langagières plus complexes. Le jeune enfant va ainsi éviter la complexité syntaxique à cause de ses capacités en mémoire de travail limitées. La complexité placerait en quelque sorte « un fardeau », une surcharge sur la mémoire de travail. Notre mémoire de travail serait donc extrêmement sensible à la complexité du calcul syntaxique. Cette limitation disparaîtrait avec la maturation normale de la MdT et resterait présente dans le développement atypique du langage, et plus précisément chez les enfants avec TSL (Jakubowicz, 2007).

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1.3.2 Etudes portant sur le lien entre mémoire de travail et développement linguistique chez l’enfant

Il a été montré dans la littérature scientifique que la boucle phonologique avait un lien certain avec l’acquisition du vocabulaire chez l’enfant. Baddeley (Gathercole, Willis, Emslie

& Baddeley, 1992, In Baddeley 2003) a investigué le rôle joué par la BP sur le vocabulaire en réception d’enfants âgés de 4 et 5 ans. Les performances de la BP ont été appréhendées à l’aide d’une épreuve de répétition de pseudo-mots. Les corrélations trouvées indiquaient clairement une association entre les compétences de la BP et la taille du vocabulaire réceptif.

Le même auteur a trouvé des résultats identiques à plusieurs reprises chez des enfants âgés de 4 à 13 ans (Baddeley et al., 1998, In Baddeley, 2003). De plus, Majerus, Poncelet, Greffe et Van der Linden (2006) ont montré que les performances en mémoire à court terme étaient liées au développement du vocabulaire chez des enfants âgés de 4 à 6 ans.

Plusieurs études ont également investigué les liens entre la boucle phonologique, la mémoire de travail et les capacités syntaxiques chez les enfants. Nous allons dans cette section en résumer certaines afin de mettre en évidence les liens déjà identifiés entre la mémoire de travail et le développement syntaxique au cours de l’enfance. Nous allons également aborder le lien entre ces domaines cognitifs chez l’enfant présentant un développement langagier atypique ainsi que chez l’adulte.

Dans leur étude de 1995, Adams et Gathercole ont étudié les relations entre la boucle phonologique et le développement langagier chez des enfants tout-venant âgés de 3 ans. Les auteurs ont réparti ces enfants en deux groupes distincts suivant leur performance à une tâche de répétition de pseudo-mots : 19 enfants avec de bonnes capacités de la boucle phonologique et 19 autres avec de moins bonnes performances. Un échantillon de langage spontané a été transcrit pour chaque sujet. A partir de cette transcription, différentes mesures ont été calculées, telles que la diversité du vocabulaire (nombre de mots différents utilisés), la longueur moyenne d’énoncés et la complexité des phrases produites (énoncés contenant un verbe, énoncés sans verbe, nombre de questions/négations/relatives). Les corrélations indiquent clairement que les enfants dotés d’une boucle phonologique plus performante utilisent un vocabulaire plus diversifié et produisent des phrases plus longues et plus complexes que les enfants avec une BP moins performante. Les auteurs ont ainsi pu établir un lien certain entre la production lexicale et syntaxique et les capacités de la BP chez des enfants âgés de 3 ans. Les mêmes auteurs ont répliqué ces résultats en 2000 chez des enfants âgés de 4-5 ans et ont donc à nouveau montré que les enfants présentant une meilleure BP

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produisaient plus de mots variés, des phrases plus longues et des constructions syntaxiques plus complexes.

Montgomery, Magimairaj & O’Malley (2008) ont investigué la contribution de la mémoire de travail à la compréhension orale d’énoncés complexes chez des enfants tout- venant âgés de 6 à 12 ans. Une tâche de répétition de pseudo-mots a été administrée afin d’évaluer les capacités de la BP des sujets. Une tâche de « listening span » a été utilisée afin d’appréhender les capacités de MdT. Enfin, la compréhension syntaxique a été testée à l’aide d’une épreuve de désignation d’images à partir d’énoncés oraux simples et complexes1. Les analyses de corrélations indiquent qu’il y a un lien entre la compréhension de phrases complexes et la MdT. Cependant, aucune corrélation entre la BP et la compréhension syntaxique n’a été trouvée. Une analyse de régression montre que la MdT explique 30% de la variance de la compréhension syntaxique. Il semblerait donc que la compréhension de phrases complexes chez les enfants âgés de 6 à 12 ans soit en partie expliquée par les performances en mémoire de travail.

Montgomery et Evans (2009) ont également investigué les relations entre mémoire de travail et compréhension de phrases complexes, mais cette fois-ci chez des sujets avec TSL âgés de 6 à 12 ans, appariés en âge avec des enfants au développement langagier typique et également appariés en niveau langagier et mnésique avec d’autres enfants tout-venant. Les auteurs ont choisi de faire passer à leurs sujets une tâche de répétition de pseudo-mots, une adaptation de l’épreuve du « listening span », ainsi qu’une épreuve de désignation d’images à partir d’énoncés oraux simples et complexes. Leur hypothèse principale était que les difficultés de MdT chez les enfants atteints d’un TSL seraient associées à leur difficulté de compréhension de phrases complexes. Les résultats indiquent en effet qu’il existe des corrélations entre les performances de la MdT et la compréhension des phrases complexes chez les enfants avec TSL. Par contre, aucune corrélation entre la BP et la compréhension syntaxique n’a été trouvée. Les auteurs précisent toutefois que l’absence de corrélation entre la BP et la complexité syntaxique ne veut pas dire qu’il n’y a aucun lien entre ces deux domaines.

Willis et Gathercole (2001) ont quant à eux investigué le lien entre la boucle phonologique et la capacité de répéter des phrases complexes. Ils ont évalué la BP d’enfants 







1Montgomery et al. (2008, 2009) ont considéré comme complexes les structures suivantes : les passives (p.ex :

« The baby was kissed by the baby. »), les phrases contenant un pronom réfléchi (p.ex : « Daffy Duck says Bugs Bunny is hugging himself. »), les phrases contenant un pronom objet (p.ex : « Bugs Bunny says Daffy Duck is hugging him. »). Ces mêmes auteurs ont considéré comme simples les structures respectant l’ordre canonique des constituants de la phrase, c’est-à-dire des phrases n’impliquant aucun mouvement (p.ex : « The little boy kissed the happy little girl. »).

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âgés de 4-5 ans à l’aide d’une épreuve de répétition de pseudo-mots, ainsi que d’une tâche d’empan de chiffres endroit. Leurs résultats indiquent que les sujets ayant des capacités plus faibles au niveau de la BP répètent significativement moins de phrases complexes de manière correcte par rapport aux enfants ayant de bonnes performances en BP. La répétition de phrases complexes serait donc directement liée à de bonnes capacités de la BP.

Les liens entre mémoire de travail et compréhension écrite sont également à l’heure actuelle bien établis. Seigneuric et Megherbi (2008) ont investigué les liens entre les performances en mémoire de travail (évaluées à l’aide de l’épreuve du « listening span ») et les capacités de traitement des pronoms par écrit chez des enfants âgés de 9 et 10 ans. Les résultats confirment que les enfants ayant une MdT plus performante effectuent un traitement des pronoms par écrit plus précis et plus rapide que les sujets présentant une MdT plus faible.

Dans une autre étude, Seigneuric et al. (2008) ont mis en évidence des corrélations significatives entre les capacités de la mémoire de travail (évaluées à nouveau à l’aide du

« listening span ») et la compréhension de l’écrit chez des enfants tout-venant âgés de 8 à 10 ans. De plus, au travers d’une analyse de régression multiple, la compétence en MdT ressort comme un prédicteur significatif de la compréhension de l’écrit chez les enfants. Il semblerait donc que « la capacité à traiter et à maintenir en mémoire des informations joue un rôle central dans l’acquisition de la compréhension de l’écrit chez des enfants tout-venant » (Seigneuric et al, 2008). Siegel (1994) a, quant à elle, montré que des enfants atteints d’un trouble de la lecture présentent de moins bonnes capacités en BP et en MdT que des enfants tout-venant, et ce tout au long du développement (de 6 à 20 ans).

Gathercole et Baddeley (1989 In Baddeley 2003) se sont également intéressés à la relation entre la BP et le langage oral chez des enfants présentant un développement langagier atypique (TSL). Les enfants atteints d’un TSL ont de moins bonnes performances en répétition de pseudo-mots que les enfants tout-venant appariés en âge ou en niveau langagier. Ainsi, Baddeley suggère que les troubles langagiers seraient dus à un déficit de la boucle phonologique. De même, Parisse et Mollier (2008) ont montré que des enfants avec un TSL âgés de 6 à 12 ans présentent une BP significativement plus faible que des enfants tout-venant d’âge équivalent. Danahy, Windsor et Kohnert (2007) ont quant à eux évalué la MdT d’enfants touchés d’un TSL, ainsi que d’enfants tout-venant âgés de 7 à 13 ans à l’aide de l’épreuve du « counting span » (présentée en section 2.2.2.2) qui évalue précisément donc les compétences de l’administrateur central et de la BP. Leurs résultats indiquent clairement que les enfants présentant un trouble du langage obtiennent des résultats au counting span plus faibles que les enfants au développement typique. Ces auteurs affirment que la mémoire

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de travail est un domaine généralement déficitaire chez les enfants avec un TSL et qu’il est nécessaire d’évaluer ce domaine pour diagnostiquer un tel trouble.

Le lien entre mémoire de travail et complexité syntaxique a également été investigué chez des adultes. Gimenes, Rigalleau & Gaonac’h (2007) ont étudié plus spécifiquement le rôle des ressources de mémoire de travail dans la compréhension de phrases à double enchâssement chez 24 adultes. Selon eux, une phrase contenant plusieurs propositions enchâssées placerait un « coût excessif en mémoire de travail » (Gimenes et al., 2007). En effet, la MdT permettrait de maintenir les éléments syntaxiques de l’énoncé jusqu’à l’accès au sens final. La compréhension serait donc plus difficile si les ressources de MdT sont limitées ou occupées. Les auteurs postulent également que cette compréhension serait d’autant plus difficile si l’information à retenir est très similaire aux énoncés à traiter. Dans leur étude, les sujets devaient mémoriser une liste de mots (nombres de mots à retenir variant de 3 à 12), tout en jugeant simultanément la compréhensibilité d’une série de phrases lues.

Les mots à mémoriser étaient soit très similaires aux mots des phrases lues, soit différents. Le nombre de mots non correctement rappelés, les scores de compréhensibilité, ainsi que les temps de lecture des phrases ont été récoltés. Les résultats indiquent que le rappel de mots est moins bon lorsque les mots à mémoriser sont identiques aux mots de la phrase. Ce résultat est d’autant plus fort si les phrases sont complexes. Ainsi, chez l’adulte, si la mémoire de travail est trop « chargée », elle n’est plus disponible pour traiter des énoncés syntaxiquement complexes. La BP semble également jouer un rôle important pour l’acquisition d’une seconde langue chez l’adulte. Un patient atteint d’un important trouble de la BP (Baddeley, Papagno et Vallar, 1988 In Baddeley, 2003) a montré une incapacité à apprendre de nouveaux mots dans une langue étrangère. La boucle phonologique serait donc indispensable à l’acquisition de vocabulaire dans une langue seconde chez l’adulte.

La plupart des études présentées précédemment ont donc prouvé qu’il y avait un lien certain entre la mémoire de travail et la faculté de langage, que ce soit au niveau lexical ou syntaxique. Les résultats de Montgomery et al. (2008, 2009) confirment que la mémoire de travail explique une part importante des performances en compréhension d’énoncés complexes chez les enfants. Une relation prédictive semble donc exister entre ces deux domaines, du moins en compréhension. Cependant, aucune étude, à l’heure actuelle, n’a investigué les liens prédictifs entre la mémoire de travail et les compétences en production syntaxique. De plus, aucune étude n’a cherché à prouver que la boucle phonologique pouvait aussi prédire les capacités syntaxiques chez l’enfant.

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1.4 PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESE THEORIQUE

Notre présente recherche vise à préciser les relations entre les capacités de mémoire de travail et le développement de la complexité syntaxique du langage oral chez l’enfant tout- venant. Nous allons tenter de démontrer les liens entre ces deux composants cognitifs au cours du développement. Notre hypothèse théorique principale postule donc qu’il existe une relation prédictive entre les capacités de mémoire de travail et la maîtrise des structures syntaxiques complexes. Plus précisément, nous avançons, suivant Jakubowicz, que les capacités en mémoire de travail vont directement prédire les performances en complexité syntaxique chez l’enfant. L’enfant plus âgé possédant une mémoire de travail plus développée et donc plus performante pourra utiliser et comprendre plus d’énoncés syntaxiquement complexes qu’un enfant plus jeune avec une mémoire de travail encore immature.

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2. PARTIE EXPERIMENTALE

2.1 PARTICIPANTS

Notre échantillon est composé de 48 enfants âgés de 5;2 ans à 12;9 ans (âge moyen = 9;0 ans ; écart-type = 2;4 ans). Nous avons constitué trois groupes d’âge distincts, détaillés dans le tableau II ci-dessous.

Tableau II : Données des groupes expérimentaux

Groupes d’âge Nombre Âge moyen

(ans;mois) Ecart-type

(ans;mois) Sexe

5-6 ans : « 5-6 » 16 6;0 0;5 9 F et 7 G

8-9 ans : « 8-9 » 16 9;1 0;5 8 F et 8 G

11-12 ans : « 11-12 » 16 11;10 0;6 8 F et 8 G

(F= filles ; G= garçons)

Tous les sujets sont de langue maternelle française, monolingues et n’ayant jamais eu de suivi en logopédie. 32 enfants suisses ont été testés dans deux écoles ordinaires de Genève et 16 enfants français ont été testés soit à domicile, soit au sein d’une école de la région Rhône-Alpes. La catégorie socio-professionnelle des parents a été relevée, dans la mesure du possible, pour chacun des participants.

A titre indicatif, nous présentons également des données récoltées auprès d’adultes par Cruz (2011) aux mêmes tâches expérimentales que notre présente recherche.

L’échantillon est composé de 20 adultes (18 femmes et 2 hommes) francophones monolingues ne présentant pas de troubles langagiers et n’ayant jamais eu de suivi logopédique ultérieur (âge moyen = 20;7 ans ; écart-type = 1;8 ans). Ces données d’adultes vont nous permettre, en comparaison avec celles des enfants, d’établir s’il y a encore une évolution développementale des performances entre l’âge de 11-12 ans et l’âge adulte ou si les enfants âgés de 11-12 ans atteignent déjà un niveau plafond pour certaines tâches.

2.2 MATERIEL ET PROCEDURE

2.2.1 Procédure générale

Nous avons utilisé des épreuves issues de tests standardisés utilisés en Psychologie et en Logopédie, d’autres utilisées antérieurement pour des recherches et d’autres encore que nous avons créées spécifiquement pour ce travail. Cinq épreuves nous ont permis de tester la

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mémoire, trois épreuves les compétences syntaxiques et une le raisonnement non-verbal.

Nous avons donc administré un total de neuf épreuves sur une durée d’environ une heure.

Certaines épreuves étant particulièrement coûteuses sur le plan cognitif (par exemple le counting span), nous avons veillé à les alterner avec des épreuves jugées à priori moins fatigantes (par exemple la répétition de phrases). Les enfants les plus jeunes (5-6 ans) ont été vus sur deux sessions d’une demi-heure. La passation était individuelle. Lors des 32 passations en Suisse, selon les normes du Département de l’Instruction Publique, deux expérimentatrices étaient présentes avec l’enfant. L’une interagissait plus directement avec l’enfant en lui faisant passer les épreuves tandis que la seconde privilégiait la prise de notes et la gestion du matériel. Les 16 passations qui se sont déroulées en France, que ce soit à domicile ou au sein de l’école, ont été gérées par une seule expérimentatrice. Le protocole de passation entier est présenté en Annexe I.

2.2.2 Mémoire

Nous allons maintenant présenter les épreuves utilisées afin d’évaluer la boucle phonologique et la mémoire de travail lors de nos passations. Nous nous sommes basés sur le modèle à composants multiples de Baddeley et Hitch (1986) (cf section 1.1.1), ainsi que sur la distinction entre tâches d’empans simples et d’empans complexes (cf section 1.1.3) pour sélectionner les épreuves.

2.2.2.1 EMPANS SIMPLES

Empan de chiffres endroit

Afin d’évaluer les capacités de la boucle phonologique, nous avons utilisé l’épreuve d’empan verbal endroit tirée du WISC IV (Weschler, 2005). Dans cette tâche, l’expérimentatrice énonce des séquences de chiffres de longueur croissante (de deux à neuf chiffres) que le sujet doit répéter immédiatement et dans l’ordre. L’épreuve est arrêtée dès que l’enfant échoue à deux items de même longueur (par exemple s’il n’arrive pas à répéter correctement cinq chiffres dans l’ordre lors des deux essais). On obtient un score global qui correspond au nombre de séries correctement restituées.

Empan de mots : mémoire sérielle

Cette épreuve, appelée « la course des animaux », est adaptée directement des travaux de Majerus et al. (2006 ; Majerus, 2008). Elle évalue le système spécialisé de la mémoire à court terme verbale qui retient spécifiquement l’ordre séquentiel des items (cf section 1.1.1).

(28)

Le matériel utilisé comprend un casque audio, un ordinateur portable, ainsi qu’un podium en carton et sept cartes représentant chacune un animal [cf Annexe II]. Des séquences de noms d’animaux monosyllabiques et familiers (chien, chat, loup, ours, lion, coq et singe) sont présentées auditivement. L’expérimentatrice raconte à l’enfant que les animaux vont participer à une course et qu’il devra classer les animaux selon leur ordre d’arrivée. On s’assure que les enfants connaissent bien tous les animaux, et qu’ils ont compris comment les placer sur le podium. Deux exemples sont effectués avec l’enfant pour s’assurer de sa compréhension. Premièrement, l’enfant entend la séquence dans le casque. On lui donne ensuite les cartes qu’il doit placer sur le podium. La première série est composée de trois séquences, ou courses, auxquelles deux animaux participent. Puis le nombre d’animaux augmente progressivement jusqu’à sept. L’épreuve s’arrête lorsque l’enfant échoue sur deux séries de même longueur. Nous obtenons comme score le nombre total d’animaux rappelés dans le bon ordre.

Répétition de pseudo-mots

Lors de tâches d’empans simples verbaux, les représentations lexicales des items en mémoire à long terme jouent un rôle important. En effet, elles permettent de reconstituer les items dégradés au sein de la boucle phonologique lors du rappel. Pour contrer cet effet et ne pas évaluer les représentations en mémoire à long terme, une tâche de répétition de pseudo- mots peut être utilisée. Ainsi, les connaissances en mémoire à long terme ne sont pas prises en compte (Poncelet & Van der Linden, 2003 ; Barouillet & Camos, 2007). Nous avons donc choisi l’épreuve de répétition de pseudo-mots tirée de la BELEC (Mousty, Leybaert, Alegria, Content, & Morais, 1994) qui permet de mesurer les capacités de la BP. L'épreuve est préenregistrée et se compose de deux listes de pseudo-mots qui diffèrent par leur complexité phonologique. La première liste comprend des pseudo-mots contenant chacun des syllabes de type consonne-voyelle (CV) comme dans les exemples [8] et [9], tandis que la deuxième liste comprend des pseudo-mots contenant des syllabes de type consonne-consonne-voyelle (CCV) comme en [10] et [11] [cf Annexe I pour la totalité des items]. Chaque liste comprend cinq séries de quatre items, soit 40 items au total. La longueur des items croît d'une série à l'autre (d’une à cinq syllabes). L’enfant écoute le pseudo-mot au casque et le répète immédiatement. Les productions sont enregistrées à l’aide d’un enregistreur numérique.

[8] Bisyllabique CV : sévu

[9] Quadrisyllabique CV : nidoujusé [10] Trisyllabique CCV : kragrinblan

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