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Essais sur les dynamiques du marché du travail

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Academic year: 2021

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HAL Id: tel-01879903

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Submitted on 24 Sep 2018

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Idriss Fontaine

To cite this version:

Idriss Fontaine. Essais sur les dynamiques du marché du travail. Economies et finances. Université de la Réunion, 2017. Français. �NNT : 2017LARE0056�. �tel-01879903�

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Facult´e de Droit et d’Economie

Ann´ ee 2017

THESE DE DOCTORAT

Pour l’obtention du grade de Docteur en Sciences Economiques

Pr´ esent´ ee et soutenue publiquement par

Idriss Fontaine

Le 22 Juin 2017

ESSAIS SUR LES DYNAMIQUES DU MARCHE DU TRAVAIL

Sous la direction d’Alexis Parmentier (Pr. Universit´ e de La R´ eunion)

JURY :

Yves Croissant Professeur ` a l’Universit´ e de La R´ eunion

Fran¸cois Langot Professeur ` a l’Universit´ e du Mans (Rapporteur) Philip Merrigan Professeur ` a l’Universit´ e du Qu´ ebec ` a Montr´ eal Nicolas Moreau Professeur ` a l’Universit´ e de La R´ eunion (Pr´ esident) Alexis Parmentier Professeur ` a l’Universit´ e de La R´ eunion

Thepthida Sopraseuth Professeur ` a l’Universit´ e de Cergy-Pontoise

Fabien Tripier Professeur ` a l’Universit´ e d’Evry Val d’Essonne (Rapporteur)

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(4)

auteur.

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Sous plusieurs aspects une th` ese peut s’apparenter ` a un effort purement individuel, et d’une certaine mani` ere cela est vrai. En revanche, sa construction, son rendu final d´ epend (parfois grandement) de l’apport, direct ou indirect, de multiples personnes. Dans mon cas personnel, ces personnes furent nombreuses. C’est pourquoi, en tant que pr´ eambule ` a cette th` ese, je souhaiterais adresser mes remerciements aux personnes qui m’ont soutenu pendant ces quatre ann´ ees. J’esp` ere n’oublier personne. Si c’est le cas je m’excuse par avance pour ma m´ emoire d´ efaillante.

En premier lieu, je souhaiterais remercier la personne sans qui cette th` ese n’aurait jamais pu aboutir, mon directeur de th` ese, le Professeur Alexis Parmentier. Alexis a ´ et´ e un directeur de th` ese formidable et exemplaire durant ces quatre ann´ ees. D’un soutien sans faille, il a toujours cherch´ e ` a m’encourager, mˆ eme dans les moments les plus compliqu´ es, et il y en a eu. Il a ´ egalement ´ et´ e un guide scientifique exceptionnel. Toujours plein de bons conseils, il a souvent en m´ emoire la bonne r´ ef´ erence bibliographique qui permet d’amorcer une recherche de mani` ere plus ´ eclair´ ee. Son attitude a ´ et´ e d’autant plus louable qu’` a aucun moment il n’a cherch´ e ` a imposer une vision unique de r´ eussite en termes de recherche. Alexis constitue pour moi un mod` ele de rigueur et d’humilit´ e, en somme, un mod` ele de chercheur. Merci Alexis, j’esp` ere que nos routes se croiseront ` a nouveau dans les ann´ ees ` a venir.

Je souhaiterais exprimer ma reconnaissance profonde aux Professeurs Fran¸cois Langot et Fabien Tripier de me faire honneur en acceptant d’ˆ etre les rapporteurs de mes travaux.

De mˆ eme, j’exprime tous mes remerciements aux Professeurs Philip Merrigan, Thepthida Sopraseuth, Nicolas Moreau et Yves Croissant d’avoir bien voulu ˆ etre membre de mon jury de th` ese.

Il est impossible de ne pas remercier ici mon laboratoire d’accueil, le Centre d’Economie

et de Management de l’Oc´ ean Indien (CEMOI), ainsi que son directeur adjoint le Professeur

Jean-Fran¸cois Hoarau. J’ai b´ en´ efici´ e ` a de nombreuses reprises du soutien financier du CE-

MOI pour ma participation ` a des conf´ erences sur le territoire m´ etropolitain. Etant donn´ e la

(7)

distance s´ eparant La R´ eunion et la France m´ etropolitaine, ce soutien est incontestablement une cl´ e importante de la publicit´ e de mes travaux. Je remercie ´ egalement l’´ ecole doctorale Sciences Humaines et Sociales, de m’avoir accompagn´ e, l` a aussi financi` erement, dans mes projets de participation ` a des conf´ erences.

Je tiens ´ egalement ` a remercier le Pˆ ole Recherche de l’Universit´ e de La R´ eunion pour la mise en place du dispositif incitatif qui m’a permis de s´ ejourner ` a Paris au deuxi` eme semestre 2015. Cette opportunit´ e m’a ouvert de nombreuses portes, m’a permis de rencontrer de nombreux doctorants et enseignants-chercheurs du Centre d’Economie de la Sorbonne (CES). Par la mˆ eme occasion, je remercie le CES de m’avoir ouvert ses portes et de m’avoir plac´ e dans un environnement de travail dynamique et plus que favorable.

Parce qu’une th` ese est aussi jalonn´ ee de rencontres professionnelles d’exception, pou- vant aboutir ` a des collaborations inattendues, j’exprime ma gratitude ` a Pedro Gomes, Assi- tant Professor ` a l’Universit´ e Carlos III de Madrid. Ce dernier a, tout d’abord, grandement contribu´ e ` a l’´ elaboration de mon premier chapitre de th` ese. Il m’a ensuite propos´ e de colla- borer avec lui sur un projet de recherche. Enfin, ` a l’occasion de la conf´ erence Theories and Methods in Macroeconomics de Mars 2017, qui se tenait ` a Lisbonne, nous avons eu la chance de nous rencontrer en personne. Merci pour ton accueil et ta gentillesse. En esp´ erant que ce premier travail ensemble ouvre la voie ` a d’autres travaux de recherche communs.

Les coll` egues du CEMOI ont ´ egalement eu un rˆ ole important dans l’´ evolution et la construction des chapitres de cette th` ese. Ainsi, je tiens ` a remercier mes coll` egues des (deux) bureaux d’en face, Nicolas Moreau et Yves Croissant, pour nos ´ echanges, toujours fructueux, et leurs suggestions, toujours tr` es int´ eressantes. Un grand merci aussi ` a Michel Paul, pour son aide, ses conseils, son accueil et sa bienveillance. Je remercie ´ egalement Zoulfikar Mehou- moud Issop, Fran¸cois Hermet, Daouda Diakit´ e, Sabine Garabedian, Hatem Smaoui, Freddy Huet, Olivia Ricci, Armel Jacques, Jean-Marc Rizzo, Thierry Brugnon, Stephane Murday et Sylvain Dotti.

Comment ne pas avoir une pens´ ee ici pour mes camarades de route doctorants rencontr´ es

`

a La R´ eunion mais aussi ` a Paris. Merci ` a Alexandra Malala Razafindrabe, Claire Goavec,

Kevin Cerveaux ainsi que Guillaume Breban, mes camarades du d´ ebut, pour leur accueil

et leur bonne humeur. Un ´ enorme merci ` a Justinien Razafindravaosolonirina pour tout, nos

tranches de rigolade mais aussi pour l’entraide que nous avons install´ ee naturellement entre

nous. Un grand merci au furtif, mais non moins efficace, Laurent Didier pour sa disponibilit´ e

et ses conseils toujours avis´ es. Merci aussi ` a Julie pour sa bonne humeur. J’exprime aussi

mes remerciements ` a mon camarade de bureau du dernier semestre Yasser Moullan pour

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ses encouragements, son aide mais aussi pour sa grande jovialit´ e. Enfin, je tiens aussi ` a remercier mes coll` egues du bureau 218 de la Maison des Sciences Economiques de Paris : Elliot Aurissergues, Bertrand Achou, Mehdi Bartal, S´ ebastien Bock, Anastasia Zhutova ainsi que Vincent Boitier. Merci aussi aux camarades rencontr´ es lors des doctoriales, ` a Antoine Lepetit et ` a Emeline Limon.

Je remercie aussi le personnel administratif de la Facult´ e de Droit et d’Economie de l’Uni- versit´ e de La R´ eunion (Isabelle, Fara, Karine, Lucie Lydie, Priscilla, St´ ephanie, V´ eronique, Audrey et Martine), le personnel de l’accueil (Serge, Alain, Nicole et Dominique), sans oublier Jean, pour leur gentillesse et leur sympathie.

Enfin les plus chaleureux remerciements reviennent ` a mes proches et ` a ma famille. Maman

merci po toute sad ou la fait po mwin depuis toujours. Mi con´ e que toute mon travail i par´ e

loin po ou mais c’est grˆ ace a ou si mwin l´ e la jordu. Papa aussi merci, ou la toujour cru que

mwin t capab de faire des grandes choses. Mi esp` ere que ou l´ e fier de mwin jordu. A ma sœur

aussi mi veut dire merci po toute ce que nou la travers´ e ensemble. Vincent l´ e impossible de

pas parle de ou ter la. Merci po toute mon grand cousin. Mi pense aussi ` a mes grands parents

d´ efunts : P´ ep´ e Em´ elius, Grand-M` ere Sissi, Mamie Helena, et Papy Marcelus que la quitte a

nous malheureusement en 2014. Un grand merci aussi ` a tatie Josie qui a su m’´ epauler dans

les moments o` u seulement elle pouvait m’accompagner. Merci aussi ` a ma famille du T´ evelave,

du Plate, de Bretagne, de Bourgogne et d’Aquitaine de m’avoir ouvert leurs bras durant mes

diff´ erents s´ ejours en M´ etropole. Merci ` a marraine, Kevin, Christelle, Armand, Terry, M´ eline,

Lohan, Alexandra, Guillaume, ma tante Christiana, Sylvio, S´ ebastien, Daniella, Parrain,

Sandrine, Florian, ma tante Jacqueline, tonton Gilbert, les cousines, ma tante Th´ er` ese, les

cousins, tonton Andr´ e, ses enfants, Julien. J’exprime aussi ma reconnaissance ` a Jean Ren´ e,

Marl` ene, Christophe ainsi qu’` a Fr´ ed´ eric. Enfin, le plus intense des remerciements revient ` a

celle avec qui, je l’esp` ere, je ferai toute ma vie, celle qui a ´ et´ e ` a mes cˆ ot´ es et qui m’a support´ e

pendant ces quatre longues ann´ ees. Merci ` a ma compagne Estelle. J’esp` ere que nos efforts

paieront.

(9)
(10)

Introduction G´ en´ erale 1

0.1 Les faits stylis´ es . . . . 5

0.1.1 Les indicateurs de stock . . . . 5

0.1.2 Les indicateurs de dynamique : les flux de travailleurs . . . . 6

0.1.3 L’ampleur des fluctuations . . . . 9

0.2 Approche macro´ economique des fluctuations du chˆ omage . . . . 12

0.2.1 De la vision macro´ economique traditionnelle aux fondements mi- cro´ economiques . . . . 12

0.2.2 Le renouveau de la mod´ elisation macro´ economique du chˆ omage : le mod` ele de matching . . . . 13

0.2.3 Un l´ eger d´ etour : la macro´ economie depuis les ann´ ees 1980 . . . . 15

0.2.4 La critique quantitative du mod` ele de matching . . . . 18

0.3 Les apports de cette th` ese . . . . 21

0.3.1 Dynamiques du chˆ omage fran¸cais : une approche consid´ erant les trois ´ etats sur le march´ e du travail . . . . 21

0.3.2 Une analyse conditionnelle des entr´ ees/sorties du chˆ omage fran¸cais . 22 0.3.3 Incertitude et participation au march´ e du travail . . . . 23

0.3.4 L’effet causal de la taille de la famille sur l’offre de travail des m` eres : le cas de La R´ eunion et de la France m´ etropolitaine . . . . 24

1 French Unemployment Dynamics : a “Three State” Approach 27 1.1 Introduction . . . . 27

1.2 Labor market flows in France . . . . 30

1.2.1 Data and main concepts . . . . 30

1.2.2 The raw series . . . . 32

1.2.3 Cyclical properties of flows . . . . 36

1.3 Decomposing unemployment fluctuations . . . . 38

1.3.1 The steady state approach . . . . 38

(11)

1.3.2 Is the steady state approach justified for the French economy ? . . . . 41

1.3.3 Beyond the steady state aprroach . . . . 42

1.4 Unemployment dynamics across sub-groups . . . . 45

1.4.1 Gender . . . . 46

1.4.2 Age . . . . 46

1.4.3 Qualification . . . . 47

1.5 Discussion . . . . 48

1.5.1 The non-participation margin matters . . . . 48

1.5.2 The prevailing role of the job finding . . . . 49

1.5.3 What about economic policies ? . . . . 50

1.6 Conclusion . . . . 50

Appendices . . . . 52

1.A Measuring gross worker flows from the FLFS . . . . 52

1.A.1 Data . . . . 52

1.A.2 Fundamental equations . . . . 52

1.A.3 Temporal aggregation bias . . . . 54

1.B Computing the longitudinal weights . . . . 54

1.C Robustness of the cross correlation to the use of various filters . . . . 58

1.D The non-steady state decomposition : mathematical details . . . . 58

2 The conditional Ins and Outs of French Unemployment 61 2.1 Introduction . . . . 61

2.2 Theoretical framework . . . . 64

2.2.1 Model . . . . 64

2.2.2 Worker flows in the model . . . . 69

2.2.3 The benchmark French calibration . . . . 70

2.2.4 Business cycle properties . . . . 72

2.3 Empirical methology . . . . 73

2.3.1 Data . . . . 73

2.3.2 Bayesian VAR framework . . . . 74

2.3.3 Sign restriction justification . . . . 76

2.4 Results . . . . 78

2.4.1 Empirical impulse responses . . . . 79

2.4.2 Decomposing unemployment fluctuations . . . . 81

2.4.3 Robustness analysis . . . . 82

2.5 Interpreting the evidence . . . . 85

(12)

2.5.1 A French specificity : the job finding matters more . . . . 85

2.5.2 On the Shimer puzzle . . . . 86

2.5.3 Should we model the job separation margin in a matching framework ? 86 2.6 Conclusion . . . . 87

Appendices . . . . 89

2.A Original transition rate series vs TRAMO series . . . . 89

2.B The other shocks of the VAR system . . . . 89

2.B.1 The demand shock . . . . 89

2.B.2 Labor market shocks . . . . 89

2.C Hypothetical impulse responses . . . . 90

2.D Relative contribution in the model . . . . 92

3 Uncertainty and Labor Force Participation 93 3.1 Introduction . . . . 93

3.2 Related litterature . . . . 96

3.2.1 Labor force participation . . . . 96

3.2.2 Uncertainty and the macroeconomy . . . . 98

3.3 The empirical evidence . . . . 100

3.3.1 The baseline VAR . . . . 100

3.3.2 Robustness . . . . 102

3.4 Model economy . . . . 105

3.4.1 The household . . . . 106

3.4.2 The labor market . . . . 108

3.4.3 Intermediate good producers . . . . 108

3.4.4 Wage setting . . . . 110

3.4.5 Retailers and price adjustments . . . . 111

3.4.6 Monetary authority and market clearing . . . . 112

3.4.7 Solution method . . . . 112

3.4.8 Calibration . . . . 114

3.5 Results . . . . 115

3.5.1 Model with price flexibility . . . . 115

3.5.2 Introduction of price stickiness . . . . 118

3.5.3 Sensitivity analysis . . . . 119

3.6 Conclusion . . . . 120

(13)

4 The Causal Effect of Family Size on Mother’s Labor Supply : Evidence

from Reunion Island and Mainland France 123

4.1 Introduction . . . . 123

4.2 Preliminary . . . . 126

4.2.1 Causal impact of fertility and instrumental variable in the literature . 126 4.2.2 The reunionese context . . . . 128

4.3 Empirical methodology . . . . 128

4.3.1 Data and descriptive statistics . . . . 128

4.3.2 Econometrics . . . . 131

4.3.3 What is the effect of treatment measured by the IV model ? . . . . . 132

4.4 Results . . . . 135

4.4.1 First stage results . . . . 137

4.4.2 Second stage results . . . . 140

4.4.3 Discussion . . . . 141

4.4.4 The Rosenzweig and Zhang’s concern . . . . 142

4.5 Other estimates . . . . 144

4.5.1 Controlling for the last birth . . . . 144

4.5.2 Heterogenity across education levels . . . . 145

4.5.3 Is the causal effect homogeneous in France ? . . . . 146

4.6 Concluding remarks . . . . 148

Appendices . . . . 149

4.A Effects of control variables on female participation . . . . 149

4.B Robustness to sample age . . . . 151

Conclusion G´ en´ erale 153

(14)

Comment expliquer les fluctuations des agr´ egats du march´ e du travail tels que, le taux de chˆ omage, le niveau de l’emploi ou encore la participation, le long du cycle ´ economique ? Cette question, aussi ancienne que la macro´ economie elle-mˆ eme, se situe (toujours) au cœur de nombreuses recherches acad´ emiques. Elle a d’autant plus d’int´ erˆ et que les performances du march´ e du travail dans les pays d´ evelopp´ es sont h´ et´ erog` enes et reli´ ees aux institutions r´ egissant son fonctionnement.

L’existence d’un chˆ omage ´ elev´ e et volatil est consid´ er´ ee comme un fl´ eau frappant les

´

economies industrialis´ ees modernes. En effet, l’ensemble des pays d´ evelopp´ es est affect´ e par le chˆ omage, mais, son niveau demeure variable. Selon les statistiques d’Eurostat, le taux de chˆ omage au deuxi` eme trimestre 2016 est de 3,1% au Japon, 4,2% en Allemagne, 4,9% aux Etats-Unis, 6,6% en Su` ede, 8,6% dans l’ensemble de l’Union Europ´ eenne, 9,9% en France, 11,6% en Italie et 19,9% en Espagne. En outre, l’´ evolution du taux de chˆ omage est souvent caract´ eris´ ee par des fluctuations cycliques non-n´ egligeables. Ce fait stylis´ e est illustr´ e par la premi` ere partie du graphique 1. Par exemple, aux Etats-Unis l’´ evolution du chˆ omage suit des phases de hausse, lorsque la conjoncture ´ economique est d´ efavorable, et des phases de baisse, lorsque la conjoncture ´ economique est favorable. Observons ´ egalement que ces diff´ erentes phases semblent intervenir de mani` ere assez r´ eguli` ere.

De telles fluctuations ´ economiques sont-elles d´ esirables ? Dans l’introduction de son cha- pitre pour le Handbook of Monetary Economics, Gal´ı (2010) sugg` ere une r´ eponse n´ egative ` a cette question :

“. . . the rise in unemployment that invariably accompanies all economic downturns is, arguably, one of the main reasons why cyclical fluctuations are generally viewed as undesirable.”

(Jordi Gali (2010), Handbook of Monetary Economics, Chapitre 10, page 488)

D’autres ´ el´ ements plus tangibles viennent confirmer cette intuition. Par le biais d’une enquˆ ete

men´ ee aux Etats-Unis, Shiller (1997) trouve que 70% des interrog´ es pensent qu’il est impor-

tant de pr´ evenir les r´ ecessions. Parmi ces derniers, plus de 80% sont d’accord avec l’id´ ee selon

(15)

laquelle il est pr´ ef´ erable d’avoir un lissage des phases d’expansion et de r´ ecession plutˆ ot que des cycles ´ economiques bien marqu´ es. Dans le mˆ eme ordre d’id´ ee, Wolfers (2003) montre, ` a partir d’une enquˆ ete sur le bien ˆ etre subjectif, que la suppression des fluctuations du chˆ omage augmenterait le bien ˆ etre d’un niveau ´ equivalent ` a une diminution du chˆ omage d’un point de pourcentage par trimestre. De mon point de vue, de simples ´ el´ ements de statistique descrip- tive confirment ´ egalement l’id´ ee que certaines phases des fluctuations cycliques engendrent des coˆ uts support´ es par l’ensemble de la soci´ et´ e. Par exemple, selon les statistiques officielles de l’Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques (INSEE), la part des chˆ omeurs de longue dur´ ee a sensiblement augment´ e depuis environ une d´ ecennie en France.

Le point de d´ epart de cette hausse semble ˆ etre la Grande R´ ecession des ann´ ees 2008-2009.

En effet, le taux de chˆ omage de longue dur´ ee

1

atteignait 2,6% en 2008, soit son plus bas niveau depuis le d´ ebut du XXI` eme si` ecle. Entre 2008 et 2015 ce taux n’a jamais cess´ e de croˆıtre augmentant de 1,7 points de pourcentage. L’augmentation du nombre de chˆ omeurs de longue dur´ ee est probl´ ematique ` a plusieurs ´ egards. En particulier, les chances de retour ` a l’emploi s’amenuisant ` a mesure que la dur´ ee du chˆ omage augmente, elle ´ eloigne une partie de la population du march´ e du travail. Ainsi, l’accentuation des difficult´ es ´ economiques en France, caract´ eris´ ee par une mont´ ee presque ininterrompue du chˆ omage et une augmentation du taux de non-emploi depuis 2008, a eu des r´ epercussions sur le taux de pauvret´ e

2

. Ce dernier a lui aussi augment´ e entre 2008 et 2011 passant de 13% ` a 14,3%. Selon l’INSEE, l’augmentation perceptible de la pauvret´ e “proviendrait principalement de l’augmentation du nombre de chˆ omeurs vivant au-dessous du seuil de pauvret´ e, elle-mˆ eme li´ ee ` a celle du nombre de chˆ omeurs de longue ou tr` es longue dur´ ee ”

3

.

La premi` ere ´ evaluation quantitative formelle du coˆ ut des cycles ´ economiques est due

`

a Lucas (1987). Ce dernier argumente que les cycles ´ economiques peuvent ˆ etre principale- ment assimil´ es ` a un risque de fluctuation de la consommation agr´ eg´ ee, qui, en moyenne est n´ egligeable. Toutefois, ces r´ esultats quantitatifs ont ´ et´ e l’objet de nombreux d´ ebats relatifs aux hypoth` eses de calcul, d’une part, et ` a l’ampleur du coˆ ut en bien-ˆ etre global, d’autre part.

Krusell and Smith (1999) ainsi que Krusell et al. (2009) sugg` erent que les coˆ uts en bien-ˆ etre des cycles ´ economiques ne doivent pas uniquement ˆ etre envisag´ es de mani` ere agr´ eg´ ee puis- qu’une telle approche mettrait en second plan des effets h´ et´ erog` enes sur diff´ erentes partitions de la population. L’id´ ee sous-jacente de leur postulat de d´ epart est que certaines couches de la population, notamment les personnes les plus pauvres et sans emploi, souffriraient plus des

1. Le taux de chˆomage de longue dur´ee est d´efini comme le nombre personnes se d´eclarant au chˆomage depuis plus d’un an divis´e par la population active.

2. Le taux de pauvret´e est d´efini comme la proportion d’individus vivant avec moins de 60% du revenu m´edian.

3. Cf.Durand(2016).

(16)

s´ equences d´ efavorables du cycle. Avec une telle approche, les coˆ uts en bien-ˆ etre des cycles

´

economiques sont d’une ampleur plus importantes que ceux initialement mis en avant par Lu- cas (1987). Les trois papiers que je viens de citer maintiennent, cependant, l’hypoth` ese que les fluctuations ´ economiques n’ont pas d’impact sur le niveau moyen des agr´ egats ´ economiques tels que le taux de chˆ omage ou la consommation. Lorsque cette hypoth` ese est relˆ ach´ ee, Jung and Kuester (2011) trouvent que le niveau moyen du taux de chˆ omage est plus ´ elev´ e dans une ´ economie o` u les cycles existent que dans une ´ economie sans cycles. Hairault et al. (2010) montrent que les frictions qui existent sur le march´ e du travail peuvent induire des coˆ uts en bien-ˆ etre d’une ampleur consid´ erable. Ainsi, l’alternance de phases d’expansion et de r´ ecession r´ eduit le niveau moyen de la consommation et de l’emploi en raison de l’existence d’impor- tantes non-lin´ earit´ es dans l’´ economie. Il apparait ´ egalement de leur analyse que le rˆ ole des flux de travailleurs, mat´ erialis´ es par les probabilit´ es de transition impliquant conjointement le chˆ omage et l’emploi, est singulier. Plus sp´ ecifiquement, les variations du taux de retour ` a l’emploi des chˆ omeurs auraient plus d’impact sur le niveau moyen du chˆ omage, sa volatilit´ e, et par voie de cons´ equence, sur les coˆ uts des cycles ´ economiques.

Un consensus semble ´ emerger des articles cit´ es dans le paragraphe pr´ ec´ edent : lorsque certaines complexit´ es de l’´ economie sont prises en compte, comme l’h´ et´ erog´ en´ eit´ e des agents

´

economiques ou encore l’existence de frictions sur le march´ e du travail, les coˆ uts en bien- ˆ

etre des fluctuations cycliques ne peuvent ˆ etre consid´ er´ es comme n´ egligeables. D’un cˆ ot´ e, les agr´ egats ´ economiques fluctuent de mani` ere intrins` eque en fonction du cycle. De l’autre, son existence peut alt´ erer leur niveau moyen. Ces arguments viennent appuyer, dans une certaine mesure, la n´ ecessit´ e d’une intervention de l’Etat afin de limiter les coˆ uts qui ac- compagnent les s´ equences d´ efavorables du cycle. Se faisant, la vision positive de la mise en

´

evidence des coˆ uts en bien-ˆ etre des fluctuations cycliques est d´ eplac´ ee vers des enjeux plus normatifs. A ce stade, rappelons le caract` ere “non-souhaitable” de l’intervention de l’autorit´ e publique lorsque le march´ e du travail fonctionne selon les r` egles de la concurrence pure et parfaite. En revanche, lorsque le fonctionnement du march´ e du travail est entrav´ e par cer- taines imperfections, comme des frictions de recherche, la politique ´ economique peut avoir des effets d´ esirables sur le fonctionnement de l’´ economie. Dans cette lign´ ee, Hairault et al.

(2010) concluent qu’il est n´ ecessaire de limiter l’influence des fluctuations du taux de retour

`

a l’emploi sur le cycle par l’interm´ ediaire de subventions ` a l’embauche. Une politique de ce genre permettrait d’augmenter le niveau moyen des cr´ eations d’emploi. La question de l’adaptabilit´ e des instruments de lutte contre la mont´ ee du chˆ omage, en p´ eriode de conjonc- ture ´ economique d´ efavorable, a connu des ´ evolutions notoires au cours des derni` eres ann´ ees.

Dans un r´ ecent article, Jung and Kuester (2015) montrent qu’une politique ´ economique op-

timale doit avant tout s’atteler ` a la r´ eduction des fluctuations du chˆ omage notamment au

(17)

cours des p´ eriodes de ralentissement ´ economique. Comparativement ` a la plupart des travaux de cette litt´ erature (Landais et al. (2010), Mitman and Rabinovich (2011), entre autres), ces derniers consid` erent, non pas un seul instrument de politique ´ economique pris isol´ ement, mais plusieurs. Il ressort de leur article que la conjoncture ainsi que les imperfections du march´ e du travail, comme l’existence de frictions de recherche et de rigidit´ es salariales, ont des impli- cations non-n´ egligeables sur la mise en place des modalit´ es de la politique ´ economique. Ainsi, lorsque l’´ economie est frapp´ ee par une r´ ecession, l’autorit´ e publique doit favoriser la cr´ eation d’emploi, en augmentant les subventions ` a l’´ ebauche, et r´ eduire les s´ eparations d’emploi, en augmentant les taxes li´ ees au licenciement. Dans pareil contexte, la variation du niveau de g´ en´ erosit´ e des allocations chˆ omage ne peut avoir qu’une influence de second plan

4

.

Cette th` ese s’inscrit plus dans une d´ emarche positive que normative. Les aspects normatifs sont ´ evoqu´ es dans la plupart des chapitres mais ils ne constituent pas le coeur de la d´ emarche.

L’id´ ee sous-jacente est que, pour mettre en place des politiques ´ economiques adapt´ ees sur le march´ e du travail, il est n´ ecessaire de comprendre son fonctionnement de mani` ere dynamique.

Comme ´ evoqu´ e plus haut, les fluctuations ´ economiques sont une caract´ eristique commune ` a l’ensemble des ´ economies d´ evelopp´ ees et ces derni` eres engendrent des coˆ uts en bien-ˆ etre sup- port´ es par la soci´ et´ e dans son ensemble. Ainsi, il s’agit de comprendre en adoptant ` a la fois une approche appliqu´ ee et th´ eorique, les origines des dynamiques du march´ e du travail.

Pour ce faire, l’attention ne sera pas port´ ee uniquement aux ´ evolutions des variables de stock mais aussi aux dynamiques des flux de travailleurs, qui, par d´ efinition, fa¸connent les varia- tions du taux de chˆ omage. Depuis plus de deux d´ ecennies, les ´ etudes empiriques sur cette th´ ematique se sont multipli´ ees et ont ouverts de nouvelles perspectives concernant l’analyse du march´ e du travail. Elles montrent notamment que le march´ e du travail est caract´ eris´ e par des mouvements importants entre l’emploi et le non-emploi. Les deux premiers chapitres de cette th` ese se situent sur cette lign´ ee de recherche en utilisant des approches diff´ erentes mais compl´ ementaires. Plus sp´ ecifiquement, ils cherchent ` a quantifier les contributions relatives des taux de transition aux variations du taux de chˆ omage.

Un autre des objectifs de cette th` ese est de prendre en compte, autant que faire se peut, les diff´ erentes facettes du non-emploi. Si on se r´ ef` ere aux d´ efinitions du Bureau International du Travail (BIT, par la suite), il correspond ` a la somme des chˆ omeurs et des inactifs. Pour rappel, un individu est consid´ er´ e au chˆ omage d` es lors qu’il est sans-emploi, qu’il recherche ac- tivement un emploi et qu’il est disponible pour prendre possession d’un emploi dans un d´ elai

4. Landais et al. (2010) mettent en avant que les allocations chˆomage doivent augmenter pendant les r´ecessions. Toutefois, comme le souligneJung and Kuester(2015),Landais et al.(2010) ne consid`erent qu’un seul instrument de politique ´economique. Par cons´equent, et par d´efinition, les salaires ne sont pas sensibles aux autres instruments de politique ´economique. En consid´erant, un ´eventail plus large de dispositifs `a disposition de l’Etat,Jung and Kuester(2015) peuvent mettre en ´evidence d’autres m´ecanisme de stabilisation en phase de r´ecession.

(18)

court. Si l’une des deux derni` eres conditions n’est pas respect´ ee, alors l’individu est class´ e inactif

5

. Outre les disparit´ es en termes de d´ efinitions, les deux versants qui forment le non- emploi masquent des ph´ enom` enes ´ economiques diff´ erents. Du cˆ ot´ e du chˆ omage nous avons un ensemble d’individus engag´ es de mani` ere explicite dans un processus de recherche d’emploi.

Du cˆ ot´ e de l’inactivit´ e, nous avons un groupe d’individus qui, pour des raisons inh´ erentes

`

a l’environnement ´ economique, aux opportunit´ es propres, aux consid´ erations familiales, ne portent pas leur offre sur le march´ e du travail. Dans cette optique, le chapitre 1 de la th` ese montre que les entr´ ees/sorties de la population active joue un rˆ ole non-n´ egligeable dans l’ex- plication des variations du chˆ omage en France. Le chapitre 3, quant ` a lui, montre que la prise en compte de l’´ etat d’inactif peut modifier le comportement dynamique de l’´ economie face aux chocs. Enfin, le chapitre 4 ´ etudie avec un angle micro´ economique un des freins potentiels

`

a l’offre de travail des femmes, ` a savoir le nombre d’enfants.

0.1 Les faits stylis´ es

En tant que premi` ere approche, cette section documente un ensemble de faits stylis´ es relatifs ` a l’ampleur des fluctuations des agr´ egats du march´ e du travail pour la France et les Etats-Unis, deux pays ´ etudi´ es au cours des diff´ erents chapitres de cette th` ese.

0.1.1 Les indicateurs de stock

Tout d’abord, comme l’indique le graphique 1, les exp´ eriences en mati` ere d’´ evolution du taux de chˆ omage sont diversifi´ ees. Tandis que le taux de chˆ omage am´ ericain se caract´ erise par des cycles de hausse et de baisse de fr´ equence r´ eguli` ere, le taux de chˆ omage fran¸cais, lui, augmente graduellement sur la p´ eriode 1975-1990. Depuis cette date, ce dernier semble avoir atteint un plancher minimal et n’a jamais diminu´ e en dessous de 6,5%. De mani` ere assez claire, le d´ ebut de la hausse du taux de chˆ omage marque le d´ ebut des p´ eriodes de r´ ecession (caract´ eris´ ees par des zones gris´ ees sur le graphique) aux Etats-Unis. Ce constat semble moins vrai en France. En revanche, la Grande R´ ecession de 2008 enclenche la rupture de tendance conduisant ` a une augmentation du chˆ omage de 2 points en moins d’un an. Sans surprise, les p´ eriodes de r´ ecession sont caract´ eris´ ees par des diminutions du nombre d’employ´ es et des offres d’emplois propos´ ees par les entreprises. Remarquons que ces derni` eres ont diminu´ e d’environ 25% pendant la Grande R´ ecession, passant de 300000 offres au deuxi` eme trimestre

5. Il convient de noter que la fronti`ere entre les deux principaux ´etats du non-emploi demeure floue. En effet, au sein mˆeme de l’inactivit´e il est possible de d´egager un autre groupe d’individus formant le “halo”

autour du chˆomage. Ce halo int`egre des inactifs qui sont disponibles pour prendre un emploi ou qui ne recherchent pas “activement” un emploi.

(19)

1980 1990 2000 2010 4

5 6 7 8 9 10

France

Taux de chômage

1980 1990 2000 2010

4 5 6 7 8 9 10

Etats−Unis

1980 1990 2000 2010

220 230 240 250 260 270

Nombre d'employés

1980 1990 2000 2010

900 1000 1100 1200 1300 1400

2000 2005 2010 2015

180 200 220 240 260 280 300

Ofrres d'emploi

2000 2005 2010 2015

2500 3000 3500 4000 4500 5000 5500

Fig. 1 – Taux de chˆ omage, nombre d’employ´ es et offres d’emplois en France et aux Etats- Unis.

Sources : INSEE pour les s´eries fran¸caises, BLS pour les s´eries am´ericaines

Notes : La premi`ere colonne correspond aux s´eries fran¸caises, la deuxi`eme aux s´eries am´ericaines. Le taux de chˆomage est exprim´e en pourcentage. Le taux de chˆomage est d´efinit conform´ement `a la d´efinition du Bureau International du Travail. Les offres d’emplois en France correspondent aux offres collect´ees par Pˆole Emploi. Les offres d’emplois aux Etats-Unis correspondent aux offres mesur´ees par leJob Openings and Labor Turnover Survey. Ces derni`eres sont disponibles sur une p´eriode plus courte, 1996Q1-2016Q2 et 2001Q1- 2016Q2, respectivement. Le nombre d’employ´es est renseign´e en centaines de milliers et les offres d’emplois en milliers

2008 ` a 230000 au premier trimestre 2009. Ce constat indique qu’au cours de cette p´ eriode le march´ e du travail s’est tendu du point de vue des chercheurs d’emploi. Des ´ evolutions similaires sont perceptibles aux Etats-Unis.

0.1.2 Les indicateurs de dynamique : les flux de travailleurs

L’analyse des faits stylis´ es relatifs ` a la dynamique du march´ e du travail ne doit pas se focaliser uniquement sur les variations nettes de stock. En effet, une telle abstraction peut ˆ

etre trompeuse car elle masque un mouvement perp´ etuel de flux main d’œuvre

6

. Lorsque

6. Les flux d’emploi et de main d’oeuvre font r´ef´erence `a des concepts diff´erents. Par d´efinition, les flux de main d’œuvre sont plus importants car, en plus des entr´ees et des sorties directement reli´ees au processus

(20)

Depuis... Emploi Chˆ omage Inactivit´ e ...Vers

Emploi – 1,8 2,8

Chˆ omage 1,4 – 1,4

Inactivit´ e 3 1,4 –

Tab. 1 – Flux de travailleurs mensuels moyens aux Etats-Unis au cours de la p´ eriode 1996- 2003

Sources :Davis et al.(2006) Graphique 1

Notes: Les flux de travailleurs sont exprim´es en millions. L’origine du flux est donn´ee en colonne, la destination en ligne.

certaines personnes perdent leur emploi pour se retrouver au chˆ omage ou inactif, d’autres en trouvent un en recherchant activement, tandis que d’autres encore, transitent directement de l’inactivit´ e vers l’emploi sans connaitre un ´ episode de chˆ omage. Le tableau 1 r´ esume ces possibilit´ es pour la p´ eriode 1996-2003 aux Etats-Unis. Ainsi, en moyenne mensuelle 12 millions d’individus (soit 7% de la population en ˆ age de travailler) changent de statut sur le march´ e du travail am´ ericain. Les mouvements depuis et vers l’inactivit´ e sont loin d’ˆ etre marginaux puisqu’ils repr´ esentent environ 70% des flux de travailleurs. Remarquons, que de telles statistiques descriptives ne sont pas disponibles pour la France. Le chapitre 1 de cette th` ese aura notamment pour ambition de mesurer les flux de travailleurs avec des donn´ ees fran¸caises.

Mˆ eme si les flux “bruts” de travailleurs ne sont pas directement comparables entre la France et les Etats-Unis, il est possible, depuis l’article de Hairault et al. (2015), d’avoir une mesure des taux de transition entre l’emploi et le chˆ omage en France. Ces derniers correspondent ` a la probabilit´ e qu’a un individu ´ etant au chˆ omage (respectivement en emploi) d’ˆ etre en emploi (respectivement au chˆ omage) ` a la p´ eriode suivante

7

. Le graphique 2 fournit les taux de transition en France et aux Etats-Unis pour la p´ eriode 1990-2010

8

. Une nouvelle fois, le graphique fait apparaitre des disparit´ es importantes entre la France et les Etats-Unis.

En termes de magnitude, les probabilit´ es de transitions sont plus ´ elev´ ees aux Etats-Unis. En moyenne, pour un chˆ omeur la probabilit´ e d’ˆ etre en emploi un mois plus tard s’´ el` eve ` a 26,4%

aux Etats-Unis. La mˆ eme statistique est trois fois moins ´ elev´ ee en France puisqu’elle est de

de cr´eation/destruction des emplois, ils incluent les rotations sur les mˆemes emplois et parfois les transitions depuis et vers la non-participation. Cette th`ese se concentre plus sur l’´etude des flux de main d’œuvre que sur l’´evolution des flux d’emploi.

7. Les p´eriodes correspondent en g´en´eral au mois ou au trimestre.

8. Strictement parlant, les mesures des taux de transition ne sont pas directement comparables entre elles. Les taux de transition en France sont bas´es sur des d´eclarations individuelles. Ceux des Etats-Unis sont calcul´es `a partir duCurrent Population Survey et sont donc conformes aux d´efinitions du BIT. Toutefois, la comparaison reste utile pour fixer des ordres de grandeur.

(21)

1990 1995 2000 2005 2010 1.00

1.05 1.10 1.15 1.20 1.25 1.30 1.35

France

Taux de séparation

1990 1995 2000 2005 2010

1.2 1.4 1.6 1.8

Etats−Unis

1990 1995 2000 2005 2010

6.5 7.0 7.5 8.0 8.5 9.0 9.5

Taux d'accès à l'emploi

1990 1995 2000 2005 2010

20 25 30

Fig. 2 – Taux de retour et taux de s´ eparation de l’emploi en France et aux Etats-Unis.

Sources :Hairault et al.(2015) et calculs de l’auteur pour les donn´ees fran¸caises,Elsby et al.(2015) pour les donn´ees am´ericaines.

Notes : Les transitions report´ees ne concernent que l’emploi et le chˆomage. La premi`ere colonne corres- pond aux donn´ees fran¸caises, la deuxi`eme aux donn´ees am´ericaines. Les taux de transition sont exprim´es en pourcentage. Les s´eries correspondent `a des moyennes trimestrielles de donn´ees mensuelles.

7,5%. S’il est plus facile pour un chˆ omeur am´ ericain de trouver un emploi, il est ´ egalement plus facile pour lui de perdre son emploi lorsqu’il en a un. Cette h´ et´ erog´ en´ eit´ e en mati` ere de transition sur le march´ e du travail a ´ egalement ´ et´ e mise en avant par Elsby et al. (2013). Ces derniers montrent, pour un ´ echantillon de 14 pays de l’OCDE, qu’il est possible de faire le distinguo entre deux groupes de pays. D’un cˆ ot´ e, les pays anglophones et nordiques seraient caract´ eris´ es ` a la fois par des fortes probabilit´ es de retour ` a l’emploi (sup´ erieures ` a 20%) et de s´ eparation de l’emploi (sup´ erieures ` a 1,5%). De l’autre, les pays d’Europe continentale, qu’ils qualifient de scl´ eros´ e, seraient caract´ eris´ es par des faibles taux de retour ` a l’emploi (inf´ erieurs

`

a 10%) et de s´ eparation de l’emploi (compris entre 0,5% et 1%).

Bien que les disparit´ es en termes d’amplitude des taux de transition sont importantes entre la France et les Etats-Unis, il convient de remarquer que le comportement cyclique des s´ eries est proche. Ainsi, les p´ eriodes de r´ ecession sont marqu´ ees par une ´ el´ evation du taux auquel les individus sont s´ epar´ es de leur emploi et une diminution du taux auquel ils acc` edent

`

a l’emploi depuis le chˆ omage. Ces taux de transition entre les diff´ erents ´ etats du march´ e du

(22)

travail sont d’autant plus importants qu’ils fa¸connent les variations des agr´ egats comme le chˆ omage ou l’emploi. Ainsi, un niveau de chˆ omage identique peut refl´ eter des situations diff´ erentes en mati` ere de probabilit´ e de transition. A un moment donn´ e, le taux de chˆ omage peut ˆ etre ´ elev´ e car les s´ eparations de l’emploi sont plus importantes. A l’inverse, un taux de chˆ omage ´ elev´ e peut ´ egalement ˆ etre la cons´ equence d’un processus de retour ` a l’emploi atone mat´ erialis´ e par de faibles taux d’acc` es ` a l’emploi et des dur´ ees de chˆ omage plus longues.

0.1.3 L’ampleur des fluctuations

Pour clore cette section sur les faits stylis´ es, je pr´ esente un ensemble de statistiques des- criptives relatif ` a la volatilit´ e et ` a la corr´ elation des variables du march´ e du travail. Dans le but de mesurer les fluctuations et les co-mouvements des variables du march´ e du travail le long du cycle ´ economique, je proc` ede ` a l’instar de Shimer (2005). En particulier, chaque s´ erie est transform´ ee en logarithme et sa composante tendancielle est extraite ` a l’aide d’un filtre Hodrick-Prescott avec un param` etre de lissage ´ egal ` a 100000. Le tableau 2 consigne les r´ esultats. Tout d’abord, remarquons qu’` a l’exception du niveau de l’emploi, toutes les variables relatives au march´ e du travail sont plus volatiles que le Produit Int´ erieur Brut r´ eel (PIB, dans ce qui suit). Ainsi, en France le taux de chˆ omage et le taux de vacance sont approximativement 5 fois plus volatils que le PIB, alors que, l’indicateur de tension est presque 8 fois plus volatil que ce dernier. L` a aussi, un contraste apparaˆıt lorsqu’on com- pare les ´ ecarts-type des composantes cycliques en France et aux Etats-Unis. Les grandeurs macro´ economiques relatives au march´ e du travail sont bien plus volatiles aux Etats-Unis.

D’une part, le niveau des ´ ecarts-type y est toujours plus ´ elev´ e qu’en France. D’autre part, les volatilit´ es relatives au PIB sont tr` es ´ elev´ ees (cf. ligne 4 du tableau 2). Ainsi, l’´ ecart-type du taux de chˆ omage est 8 fois plus important que celui du PIB. La volatilit´ e de l’indicateur de tension sur le march´ e du travail est encore plus ´ elev´ e puisqu’elle est 20 fois plus importantes que celle PIB.

La deuxi` eme partie du tableau 2 fournit les matrices de corr´ elation pour la France et les

Etats-Unis. Ces derni` eres nous renseignent notamment sur les co-mouvements des variables

prises deux ` a deux. Dans l’ensemble, le sens des corr´ elations est le mˆ eme en France et aux

Etats-Unis. Le taux de chˆ omage et le taux de s´ eparation de l’emploi sont contre-cycliques,

tandis que, les autres agr´ egats du march´ e du travail sont pro-cycliques. Au global, le signe

des corr´ elations est intuitif et corrobore les premiers ´ el´ ements de statistique descriptive mises

en avant au cours des sous-sections pr´ ec´ edentes. Le taux de chˆ omage augmente au moment

des r´ ecessions, tandis que, le taux d’acc` es ` a l’emploi, l’indicateur de tension ou encore les

offres d’emplois diminuent. Des diff´ erences entre les march´ es du travail am´ ericain et fran¸cais

existent, mais ces derni` eres sont moins prononc´ ees qu’auparavant. Notons toutefois que les

(23)

taux de transitions sont moins corr´ el´ es avec les autres variables en France qu’aux Etats-Unis.

Finalement, la corr´ elation entre le taux de chˆ omage et les postes vacants est n´ egative dans

les deux cas, mais, son ampleur varie fortement (proche de l’unit´ e pour le march´ e du travail

am´ ericain contre une valeur avoisinant -0,5 en France).

(24)

F rance Etats-Unis x y E u v θ s f y E u v θ s f σ

x

0,017 0,012 0,091 0,080 0,1 39 0,059 0,065 0,023 0,018 0,190 0,174 0,3 90 0,096 0,114

σx σy

1 0,66 5,20 4,58 7,96 2,98 3,28 1 0,74 8,15 7,45 19,60 4,15 4,91 Matrice de corr ´elation y 1 0,88 -0,78 0,70 0,85 -0,67 0,49 1 0,80 -0,75 0,68 0,74 -0,70 0,79 E – 1 -0,89 0,47 0,79 -0,46 0,44 – 1 -0,86 0,68 0,80 -0,47 0,79 u – – 1 -0,47 0,87 0,27 -0,42 – – 1 -0,93 0,99 0,78 -0,93 v – – – 1 0,84 -0,57 0,56 – – – 1 0,97 -0,86 0,90 θ – – – – 1 -0,45 0,59 – – – – 1 -0,84 0,94 s – – – – – 1 -0,22 – – – – – 1 -0,82 f – – – – – – 1 – – – – – – 1 T a b. 2 – Statistiques descriptiv es sur donn ´ees trimestrielles

Sources:INSEEpourlesdonn´eesfran¸caises,BLSetFREDpourlesdonn´eesam´ericainesetcalculsdel’auteur Notes:y=PIBr´eel,E=nombred’employ´es,u=tauxdechˆomage,v=tauxdevacance,θ=latensionsurlemarch´edutravail,soitleratiov u. Letauxdevacanced’emploiestd´efinitcommev=Offresd’emplois Offresd’emplois+Nombred’employes.Touteslesvariablessontenlogarithmeetont´et´epurg´eesdeleur tendanceparlebiaisd’unfiltreHodrick-Prescottavecunparam`etredelissage´egal`a105.L’horizontemporelcouvrelap´eriode1996Q1-2016Q2pour laFranceet2001Q1-2016Q2pourlesEtats-Unis.Lesrestrictionstemporellessontcontraintesparladisponibilit´edesdonn´eessurlesoffresd’emplois.

(25)

Cette premi` ere section nous a permis de mettre en ´ evidence certaines disparit´ es entre les march´ es du travail de deux pays d´ evelopp´ es : les Etats-Unis et la France. Cependant, il convient de remarquer que, mˆ eme si leur ampleur varie, les fluctuations importantes des agr´ egats comme le taux de chˆ omage ou l’indicateur de tension constituent un trait commun caract´ eristique de ces deux march´ es. Dans le but de comprendre les m´ ecanismes ` a l’origine de ces fluctuations, la litt´ erature macro´ economique a fait appel ` a plusieurs types de mod´ elisation.

La prochaine section retrace, sans pr´ etendre ` a l’exhaustivit´ e, les grandes ´ evolutions th´ eoriques li´ ees ` a la compr´ ehension des dynamiques du march´ e du travail. Nous verrons notamment que, d’un point de vue quantitatif, la r´ eplication de ces fluctuations n’est pas directe.

0.2 Approche macro´ economique des fluctuations du chˆ omage

0.2.1 De la vision macro´ economique traditionnelle aux fondements micro´ economiques

La consid´ eration du chˆ omage dans la mod´ elisation macro´ economique n’a pas toujours ´ et´ e convaincante. La mod´ elisation n´ eoclassique standard, caract´ erisant l’´ economie comme n’´ etant assujettie ` a aucune friction, o` u l’information est parfaite et dans laquelle prix et salaires sont fix´ es de mani` ere concurrentielle par un commissaire-priseur, aboutit ` a l’absence de chˆ omage.

Les premi` eres r´ eponses ` a ces insuffisances sont donn´ ees par la macro´ economie d’inspiration Keyn´ esienne, qui se structure autour de la relation de Philips faisant ´ etat d’une relation n´ egative entre les salaires nominaux et le taux de chˆ omage. Ainsi, en supposant que les prix et les salaires sont rigides ` a court-terme, les mod´ elisation canoniques arrivent ` a g´ en´ erer un chˆ omage qualifi´ e d’involontaire. Malgr´ e cela, ces mod` eles macro´ economiques “traditionnels”

font preuve de certaines insuffisances. Ils restent critiquables sur l’aspect “ad-hoc” de leurs hypoth` eses de d´ epart, ainsi que, sur l’absence totale de fondements micro´ economiques du comportement des agents.

A la recherche de fondements micro´ economiques, Lucas and Rapping (1969) proposent le

mod` ele de substitution intertemporelle de l’offre de travail. Cette th´ eorie constitue le point

de d´ epart des analyses modernes (mod` eles RBC, N´ eo-Keyn´ esiens entre autres) des fluctua-

tions de l’emploi et du chˆ omage. Dans ce type de mod` ele, les individus d´ eterminent ` a chaque

p´ eriode la quantit´ e de temps qu’ils consacrent aux activit´ es r´ emun´ eratrices de travail. L’offre

de travail ´ etant ´ elastique, les heures travaill´ ees fluctuent avec les variations du salaire. D’un

point de vue purement qualitatif le mod` ele de substitution intertemporelle offre un ensemble

de r´ esultats coh´ erents. Cependant, il met en avant d’autres probl´ ematiques li´ ees, notamment,

(26)

`

a l’´ egalit´ e entre le taux marginal de substitution de la consommation au loisir et le produit marginal du travail (qui ne tient pas dans les donn´ ees), et, ` a son incapacit´ e ` a g´ en´ erer du chˆ omage au sens o` u on peut le concevoir empiriquement (cf. Rogerson and Shimer (2011)).

A partir des ann´ ees 1970, l’analyse micro´ economique du march´ e du travail est l’objet d’une litt´ erature abondante. Les mod` eles micro´ economiques d´ evelopp´ es (McCall (1970), Lippman and McCall (1976), Mortensen (1986)) s’affranchissent de certains postulats de la th´ eorie classique. Le march´ e du travail est mod´ elis´ e comme un march´ e caract´ eris´ e par une forte in- certitude au sein duquel les d´ ecisions sont prises de mani` ere d´ ecentralis´ ee. Ainsi, les mod` eles de la prospection d’emploi sont les premiers ` a donner du sens au statut de chˆ omeur, dans le mesure o` u, ce dernier est un individu sans emploi qui consacre du temps ` a la recherche d’un emploi (ce qui nous rapproche des d´ efinitions internationales actuelles). En particulier, dans les premi` eres mod´ elisations (partielles) il est suppos´ e que les chˆ omeurs connaissent la distribution des salaires offertes par les firmes. En revanche, ils ne savent pas pr´ ecis´ ement o` u sont localis´ ees les meilleures propositions de salaire. Lorsque l’individu re¸coit une offre de salaire, il la compare ` a son salaire de r´ eservation

9

. Deux options s’offrent ` a lui : accepter l’offre et prendre l’emploi ou continuer sa prospection. Les propri´ et´ es de statique comparative apportent de nombreux enseignements pertinents, notamment sur l’´ evolution de la dur´ ee des

´

episodes du chˆ omage en fonction de certains param` etres exog` enes du mod` ele (le niveau des allocations chˆ omage, par exemple).

Les versions d’´ equilibre des mod` eles de recherche d’emploi, int´ egrant explicitement le com- portement des demandeurs de travail, constituent une extension naturelle des mod´ elisations partielles. Toutefois, Diamond (1971) met en avant l’existence d’un paradoxe. Dans un mod` ele o` u les firmes et les chˆ omeurs sont homog` enes, il montre que la distribution des salaires offerts se concentre en un seul point : le salaire de r´ eservation. On parle alors de distribution de sa- laire d´ eg´ en´ er´ ee. Plusieurs r´ eponses ont ´ et´ e formul´ ees pour contrer ce paradoxe. Albrecht and Axell (1984) introduisent de l’h´ et´ erog´ en´ eit´ e des agents, tandis que, Burdett and Mortensen (1998) introduisent la possibilit´ e de recherche d’un autre emploi lorsqu’un individu est d´ ej` a en emploi.

0.2.2 Le renouveau de la mod´ elisation macro´ economique du chˆ omage : le mod` ele de matching

Les mod` eles de la prospection d’emploi bien qu’instructifs adoptent principalement une vision micro´ economique du march´ e du travail. En outre, dans leurs versions d’´ equilibre, ces derniers cherchent ` a expliquer la formation des salaires plutˆ ot que les m´ ecanismes ` a l’ori-

9. Le salaire de r´eservation correspond au montant de salaire le plus petit acceptable.

(27)

gine des fluctuations du chˆ omage. L’analyse “macro´ economique” du march´ e du travail s’est construite ` a travers une “synth` ese” des mod` eles de recherche d’emploi combin´ ee des contri- butions fondatrices de Diamond (1981), Mortensen (1982) et Pissarides (1985). L’ensemble de ces travaux a abouti ` a la formulation du mod` ele dominant pour l’´ etude des questions macro´ economiques relatives march´ e du travail : le mod` ele de matching, soit en fran¸cais, le mod` ele d’appariement

10

.

Le mod` ele d’appariement repose sur trois piliers. Le premier est l’existence de frictions de recherche. Au sein du march´ e du travail, l’information circule de mani` ere imparfaite.

Une des cons´ equences directes de cette imperfection de l’information est que les agents ont une m´ econnaissance des opportunit´ es d’´ echange disponibles. Lorsqu’un individu souhaite d´ ecrocher un emploi, ou lorsqu’une entreprise cherche ` a pourvoir un poste vacant, il ou elle doit s’engager dans une activit´ e de recherche. Les deux parties prenantes doivent consacrer du temps, mais aussi des ressources financi` eres, pour acqu´ erir de l’information et nouer une relation d’´ echange (un appariement). Cette imperfection de l’information constitue une ca- ract´ eristique intangible li´ ee ` a l’existence de coˆ uts de collecte d’information, ` a la motivation des travailleurs, ` a la dispersion spatiale des activit´ es ´ economiques etc. Le deuxi` eme pilier du mod` ele est l’existence d’une fonction d’appariement qui d´ etermine, pour un nombre de postes vacants et de chercheurs d’emploi donn´ e, le nombre de rencontres firmes/chˆ omeurs couronn´ e de succ` es par p´ eriode. La fonction d’appariement poss` ede des propri´ et´ es semblables ` a une fonction de production classique pour laquelle “l’output”, le flux des nouvelles embauches, est le produit des efforts de recherche ´ emis par les “inputs”, ` a savoir les chˆ omeurs et les firmes.

Elle promeut un rˆ ole central ` a l’indicateur de tension du march´ e du travail qui correspond au ratio des postes vacants sur le nombre de chercheurs d’emploi. Ainsi, la tension sur le march´ e du travail concr´ etise l’id´ ee que les d´ ecisions d’un groupe (par exemple les firmes) ont des r´ epercussions directes sur l’activit´ e de recherche de l’autre groupe (par exemple, les chˆ omeurs). Si par exemple le nombre de postes vacants augmente pour des raisons exog` enes, alors la probabilit´ e de retour ` a l’emploi s’accroit. Par ailleurs, la fonction d’appariement per- met ´ egalement de mettre en ´ evidence l’existence d’externalit´ es mat´ erialisant les concurrences intra-groupes. En effet, les chˆ omeurs (respectivement les firmes) sont mis en concurrence pour acc´ eder ` a l’´ echange. Plus le nombre de chercheurs d’emploi est important, plus il est difficile pour un chˆ omeur pris individuellement de trouver un emploi. On parle alors d’ef- fets de congestion. Le troisi` eme pilier concerne le mode de fixation des salaires qui, dans le mod` ele d’appariement, correspond ` a une n´ egociation bilat´ erale entre la firme et l’individu.

En g´ en´ eral, le salaire sera le r´ esultat d’un produit de Nash. Chacune des parties compare les gains potentiels qu’elle peut retirer de l’appariement ` a ce qu’elle obtiendrait si elle continuait

10. Pour une description d´etaill´ee voirPissarides (2000).

(28)

son activit´ e de recherche. Ainsi, la cr´ eation d’un appariement est conditionn´ ee ` a l’existence d’un gain ` a l’´ echange sup´ erieur aux opportunit´ es ext´ erieures propres des deux parties. Dans la plupart des cas, la r´ epartition de cette rente est n´ egoci´ ee en fonction du pouvoir respectif des agents.

Le mod` ele de matching a connu un succ` es retentissant au sein de la litt´ erature ´ economique

`

a tel point que ses p` eres fondateurs, ` a savoir Peter Diamond, Dale Mortensen et Christopher Pissarides, ont ´ et´ e r´ ecompens´ es par le prix 2010 en m´ emoire d’Alfred Nobel. Les origines de ce succ` es tiennent dans la relative simplicit´ e du mod` ele de d´ epart o` u les frictions jouent un rˆ ole central sur les march´ es, mais aussi, ` a sa pertinence ` a expliquer les m´ ecanismes qualitatifs conduisant au chˆ omage. Qui plus est, les fondamentaux du mod` ele sont facilement transpo- sables ` a d’autres march´ es tels que celui de la finance, du logement ou encore du mariage.

Appliqu´ e au march´ e du travail, le mod` ele fournit un cadre rigoureux propice ` a l’´ etude des fluctuations du taux de chˆ omage et des flux de travailleurs. Par ailleurs, en attribuant des fondements micro´ economiques ` a l’existence d’un chˆ omage d’´ equilibre frictionnel, il comble certaines des limites des mod´ elisations ant´ erieures. Aussi, il convient de remarquer que la fonction d’appariement combin´ ee ` a la condition d’´ equilibre des flux conf` ere un fondement micro´ economique ` a la coexistence de chˆ omage et d’emplois vacants. En ce sens, le mod` ele d’appariement franchit un palier non-n´ egligeable en donnant une justification th´ eorique ` a la courbe de Beveridge. Une autre cl´ e du succ` es de ce type de mod´ elisation est qu’il offre un cadre privil´ egi´ e pour l’analyse des instruments de la politique ´ economique comme celle rela- tive aux taxes appliqu´ es sur les salaires, ` a l’assurance chˆ omage, aux coˆ uts de licenciement, aux subventions ` a la cr´ eation d’emploi etc.

0.2.3 Un l´ eger d´ etour : la macro´ economie depuis les ann´ ees 1980

Si la consid´ eration du march´ e du travail et du statut de chˆ omeur a ´ evolu´ e depuis les

ann´ ees 1970, la macro´ economie a, quant ` a elle, connu un changement de paradigme ` a partir

des ann´ ees 1980. Port´ ee par les travaux pionniers de macro´ economistes de renom tels que,

Robert Lucas, Finn Kydland ou encore Edward Prescott, cette r´ evolution a fait ´ emerger le

courant dominant de la macro´ economie moderne. Dans un article pionnier, Kydland and Pres-

cott (1982) mettent en avant deux id´ ees nouvelles. La premi` ere est que les cycles ´ economiques

peuvent ˆ etre ´ etudi´ es par le biais d’un mod` ele d’´ equilibre g´ en´ eral dynamique dans lequel

les agents ´ emettent des anticipations rationnelles quant ` a l’avenir. La deuxi` eme est que la

d´ emarche du macro´ economiste doit aller au-del` a d’une simple comparaison qualitative entre

les propri´ et´ es des mod` eles et les faits stylis´ es. Ainsi, ils proposent une d´ emarche empirique

fond´ ee sur des protocoles exp´ erimentaux. Les fondements micro´ economiques des mod` eles ma-

cro´ economiques d’aujourd’hui, la m´ ethode de la calibration ainsi que l’´ etude des fluctuations

(29)

cycliques ` a travers des simulations sont les marqueurs principaux de ces bouleversements m´ ethodologiques. Avec une telle approche, Kydland and Prescott (1982) montrent que les donn´ ees simul´ ees de leur mod` ele reproduisent de mani` ere correcte la volatilit´ e, la persistance et les co-mouvements observ´ es sur donn´ ees am´ ericaines. Leurs r´ esultats sont d’autant plus surprenants qu’ils font abstraction de la politique mon´ etaire et qu’ils consid` erent que les cycles sont gouvern´ es uniquement par un choc de nature r´ eel : le choc technologique. Dans cette mˆ eme lign´ ee, Prescott (1986) indique que, sur la p´ eriode post´ erieure ` a la Seconde Guerre Mondiale, 75% des fluctuations macro´ economiques aux Etats-Unis s’expliquent par les chocs technologiques. L’´ ecole de pens´ ee mettant en avant l’id´ ee que les cycles sont gouvern´ es uni- quement pas des chocs r´ eels et que la monnaie est neutre, est d´ enomm´ ee dans la litt´ erature le courant des cycles r´ eels (ou RBC pour real business cycles ).

L’id´ ee selon laquelle les chocs technologiques sont centraux pour le fa¸connement des cycles

´

economiques est le sujet de nombreuses controverses. Tout d’abord, certains travaux cri- tiquent la mesure de productivit´ e utilis´ ee par Prescott (1986)

11

en avan¸cant qu’elle ne serait pas purement exog` ene (Hall (1988), Evans (1992), Basu (1996)). Ainsi, avec un raffinement de la variable de productivit´ e, il est possible de montrer qu’elle explique une proportion moins importante des fluctuations cycliques. Ensuite, si les macro´ economistes sont, pour la plupart, d’accord sur le fait que les phases d’expansion sont associ´ ees ` a du progr` es technique, l’id´ ee selon laquelle les r´ ecessions seraient engendr´ ees par du recul technologique soul` eve plus de scepticisme. Enfin et non des moindres, dans un article empirique Gali (1999) remet en question l’aptitude des mod` eles de cycles r´ eels ` a g´ en´ erer des r´ eponses pertinentes des heures cons´ ecutivement aux chocs de technologie. Plus sp´ ecifiquement, ce dernier estime un mod` ele VAR structurel dans lequel seuls les chocs technologiques peuvent impacter ` a long terme la productivit´ e du travail. A partir d’un tel cadre empirique, Gali (1999) trouve que, ` a court terme, les heures travaill´ ees diminuent en r´ eponse ` a un choc technologique positif. Ce constat empirique contredit l’une des grandes pr´ edictions des mod` eles de cycles r´ eels faisant ´ etat d’un co-mouvement positif entre la productivit´ e et les heures (King et al. (1988)). Le r´ esultat mis en avant par Gali a, lui aussi, suscit´ e de nombreuses r´ eactions notamment sur sa robustesse

`

a la sp´ ecification de la variable mesurant le volume horaire travaill´ e

12

. Toutefois, le papier de F` eve and Guay (2009) fournit une r´ eponse ` a ces d´ ebats grˆ ace ` a une strat´ egie empirique par- ticuli` ere, en deux temps, englobant le cadre de Gali (1999) et de Christiano et al. (2003). En

11. Plus sp´ecifiquement,Prescott (1986) calcule le total factor productivity (TFP) et le consid`ere comme une source exog`ene de productivit´e.

12. Christiano et al. (2003) trouve que le r´esultat de Gali n’est pas robuste `a une inclusion des heures en niveau. A l’inverse, Basu et al. (2006) et Francis and Ramey (2005) confirment l’existence d’une r´eponse n´egative des heures `a la suite d’un choc de technologie. Ces r´esultats d´ependent clairement de l’existence d’une racine unitaire dans la s´erie des heures travaill´ees. Or, cette derni`ere ne peut ˆetre ni fermement valid´ee, ni fermement rejet´ee.

(30)

effet, ces derniers montrent qu’un choc technologique fait diminuer ` a court terme les heures travaill´ ees. Ce r´ esultat ´ etant insensible ` a la sp´ ecification de la variable d’heures travaill´ ees.

Mˆ eme si ils n’ont pas ´ et´ e initialement construits dans cette optique, les mod` eles N´ eo- Keyn´ esiens

13

(NK) apportent une r´ eponse ` a “l’´ enigme” mise en avant par Gali (1999). Le mod` ele NK canonique reprend en partie la structure auparavant d´ evelopp´ ee par le courant des cycles r´ eels. Ainsi, les deux types de mod´ elisation partagent certaines hypoth` eses de base, ` a savoir celles de l’anticipation rationnelle des agents ´ economiques, du nombre infini d’agents occupant les march´ es, des fondements micro´ economiques. Par ailleurs, la strat´ egie m´ ethodologique est ´ egalement similaire, l’´ economie, mod´ elis´ ee par le biais d’un mod` ele d’´ equilibre g´ en´ eral stochastique, est calibr´ ee et ses r´ eponses aux chocs sont simul´ ees. Toute- fois, les mod` eles NK se distinguent des mod` eles RBC par d’autres postulats non-n´ egligeables.

D’un cˆ ot´ e, l’hypoth` ese de concurrence sur le march´ e des biens est abandonn´ ee au profit d’une concurrence monopolistique. Ainsi, les prix sont fix´ es par des agents priv´ es cherchant ` a maxi- miser leurs objectifs et ne sont plus d´ etermin´ es par un commissaire-priseur Walrasien. De l’autre, les mod` eles NK introduisent des rigidit´ es nominales. Les firmes sont soumises ` a des contraintes sur la fr´ equence d’ajustement de leurs prix. En g´ en´ eral, ces contraintes sont mod´ elis´ ees conform´ ement au sch´ ema de Calvo (1983)

14

. Une des cons´ equences directes des rigidit´ es nominales est que la politique mon´ etaire peut avoir des effets r´ eels ` a court terme.

En effet, comme les prix ne s’ajustent pas ` a court-terme, les modifications du taux d’int´ erˆ et nominal ne sont pas compens´ ees par un changement imm´ ediat et proportionnel du niveau des prix. Une telle mod´ elisation permet de “ressusciter” le canal de la demande. Une augmenta- tion du taux d’int´ erˆ et nominal modifie le comportement de consommation et d’investissement des agents. Les firmes vont ajuster la quantit´ e de biens qu’elles offrent au nouveau niveau de la demande. C’est ce type de m´ ecanisme qui offre des ´ el´ ements de r´ eponse au “puzzle”

de Gali. En effet, un choc technologique am´ eliore la productivit´ e des facteurs de production.

Comme les firmes ne peuvent ajuster librement leurs prix ` a la baisse, elle vont diminuer la quantit´ e d’input (g´ en´ eralement les heures de travail) utilis´ ee dans le processus de produc- tion pour faire face ` a la demande. Par cons´ equent, les mod` eles NK proposent un fondement th´ eorique ` a la diminution des heures travaill´ ees ` a la suite du choc technologique.

En guise de conclusion ` a cette sous-section, remarquons que de nombreux mod` eles de cycles r´ eels adoptent une description rudimentaire du march´ e du travail. Le plus souvent, les firmes se procurent le facteur travail (g´ en´ eralement des heures) sur un march´ e comp´ etitif ne laissant pas de place ` a l’existence de chˆ omage. Qui plus est, et jusqu’` a r´ ecemment, la variable

13. Les d´eveloppements des mod`eles NK canoniques peuvent ˆetre trouv´es dansClarida et al.(1999),Wood- ford(2003) etGali(2008).

14. Une mod´elisation alternative des rigidit´es nominales consiste `a introduire des coˆuts d’ajustement des prix`a la Rottemberg.

(31)

chˆ omage n’´ etait pas non plus pr´ esente dans les mod` eles N´ eo-Keyn´ esiens

15

. Par ailleurs, pour reproduire des fluctuations cycliques en accord avec les observations empiriques, la plupart des mod` eles de cycles r´ eels requiert une ´ elasticit´ e de l’offre de travail tr` es ´ elev´ ee. Or les esti- mations micro-´ econom´ etriques sugg` erent que cette derni` ere est tr` es faible. Une tentative de r´ econciliation consiste ` a introduire un facteur travail indivisible (Hansen (1985))

16

.

0.2.4 La critique quantitative du mod` ele de matching

L’´ enigme de Shimer

Une des extensions naturelle de cette litt´ erature concerne l’int´ egration d’un march´ e du travail frictionnel ` a ces mod` eles macro´ economiques d’´ equilibre g´ en´ eral. Se faisant, l’attention se focalise explicitement sur l’explication des fluctuations cycliques des agr´ egats du march´ e du travail. Compte tenu du succ` es ind´ eniable des mod` eles de matching, une telle d´ emarche semble prometteuse. Pourtant, les premi` eres ´ evaluations quantitatives sont mitig´ ees et remettent en question, du moins partiellement, l’aptitude des mod` eles d’appariement ` a expliquer les dy- namiques du march´ e du travail.

Dans un article largement cit´ e, Shimer (2005) consid` ere une version agr´ eg´ ee du mod` ele de Pissarides (2000) dans laquelle la productivit´ e du travail suit un processus Markovien

17

. Dans ce contexte, il observe que le mod` ele calibr´ e est incapable de reproduire, pour les variables du march´ e du travail, des moments simul´ es d’un ordre de grandeur semblable ` a ceux observ´ es aux Etats-Unis au cours de la p´ eriode 1951-2003. Ainsi, dans le mod` ele les volatilit´ es des emplois vacants, de la tension et du taux d’acc` es ` a l’emploi, sont 10 fois inf´ erieures ` a celles observ´ ees empiriquement. Concernant le taux de chˆ omage, seul un vingti` eme de sa volatilit´ e est reproduite par la simulation du mod` ele

18

. Selon Shimer, le probl` eme ne se cantonne pas uniquement ` a des volatilit´ es atones, les canaux de transmission du choc de productivit´ e se- raient ´ egalement inadapt´ es. A la suite d’un choc de productivit´ e, du fait de la hausse du profit engendr´ ee par un appariement, les firmes ont une incitation ` a ouvrir plus de postes vacants.

Toutes choses ´ egales par ailleurs, la tension sur le march´ e du travail augmente. Comme in- diqu´ e plus haut, le comportement des firmes en mati` ere de recrutement impacte directement l’activit´ e de recherche des agents ` a la quˆ ete d’un emploi. En l’esp` ece, cons´ ecutivement ` a l’aug-

15. La non prise en compte du chˆomage peut ˆetre justifi´ee par le fait que l’explication de ses fluctuations et de ses d´eterminants ne se situait pas au cœur des int´erˆets premiers de ces deux litt´eratures.

16. Les premi`eres prises en compte d’un march´e du travail frictionnel au sein d’un mod`ele de type RBC viennent des travaux deAndolfatto(1996),Merz(1995) etden Haan et al.(2000).

17. Shimer(2005) consid`ere ´egalement une version du mod`ele dans laquelle le taux de s´eparation suit un processus Markovien. Comme les r´esultats quantitatifs de Shimer sont tr`es peu sensibles `a cette inclusion, je ne consid`ere que les implications du choc de productivit´e dans le corps du texte.

18. Cf. les tableaux 1 et 3 deShimer(2005).

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