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Le trésor de la cathédrale de Rouen de l'époque mérovingienne aux premières années du XIIIè siècle

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Texte intégral

(1)

aux premières années du XIIIe siècle

p ar Jacques LE MAHO

I

l ne faut guère com pter sur le petit nom ­b re d 'o b je ts p ré c ie u x c o n se rv é s au ­ jo u rd 'h u i d a n s l'ég lise N otre-D am e de Rouen p o u r nous renseigner su r l'histoire des origines d u trésor de la cathédrale. De toute la période qui s'é te n d d e la fondation de cette église a u g ra n d in cen d ie de 1200, deu x té­ moins seulem ent o n t survécu, la châsse dite de saint Sever dans ses parties les plus anciennes (1189-1199), et la célèbre reliu re d u « Livre d 'iv o ire » actuellem ent conservé à la Biblio­ thèque m unicipale1. Exécuté vers le Ve siècle, ce d y p tiq u e o rn é d e m otifs paléochrétiens forme a u jo u rd 'h u i la couverture d 'u n m anus­ crit de la seconde m oitié d u XIe siècle conte­ nan t entre autres les biographies des archevê­ ques. Il est signalé p o u r la prem ière fois dans u n inventaire d e la bibliothèque d u chapitre au d éb u t d u XIIe siècle. La h au te antiquité de cet objet ne co n stitu e p a s p o u r a u ta n t une preuve de son appartenance aux collections de la cathédrale a v an t la p ério d e des incursions Vikings2, les ivoires paléochrétiens ay an t en­ core b eauco u p circulé ju sq u 'a u x XIe e t XIIe siècles. Son iconographie apostolique (les

ima-1 Bibl. Mun. d e R ouen, Y 27.

2 D. G aborit-C hopin n 'e x d u t cependant pas l'éventualité que ce d y p tiq u e ait p u « orner la reliure d 'u n m anuscrit au tem ps d e saint O uen o u d e ses su ccesseu rs im m éd iats » (Les

trésors de Neustrie du VIIe au IXe siècle d'après les sources écrites : orfèvrerie et sculpture sur ivoire, dan s La Neustrie, colloqu e histo­

rique international, Beihefte der Francia 1 6 /2 ,1 9 8 9 , p. 267).

ges de saint Pierre et de sain t Paul) p o u rrait faire penser p ar exemple au cadeau d 'u n e am­ b assad e ro m ain e - il y en eu t p lu sie u rs à Rouen après la visite de l'apocrisiaire Léon en 9913, - m ais bien d 'au tres origines sont possi­ bles. O n a fait re m a rq u e r que le style de l'œ u v re te n d ra it à la rattach er p lu tô t au do­ m ain e d e la G aule m éridionale q u 'au x p ro ­ ductions du m onde oriental4.

L 'essen tiel des in fo rm atio n s, com m e p o u r to u t trésor d'église de haute époque, est p a r conséquent à rechercher dans les sources écrites, principalem ent dans les sources narra­ tives, les dons d'objets précieux étan t le plus souvent d'origine testam entaire et ne figurant pas dans les actes courants. M alheureusem ent d an s le cas de N otre-D am e de Rouen, ces té­ m oignages sont dispersés et de v aleur inégale. O n dispose p o u r le h a u t M oyen Âge de quel­ ques indications dans les textes hagiographi­ ques comme la Vie de saint A nsbert (VIIIe siè­ cle) et la seconde Vie de saint O uen (première m o itié d u IXe siècle). Les h isto rie n s de l'é p o q u e ducale, com m e D u d o n de

Saint-3M. Fauroux, Recueil des actes des ducs de Normandie (911-

1066), dan s Mém. de la Soc. des A nt. de Norm., XXXVI, 1961, p. 22,

n° 15.

4 Cf. D. Gaborit-C hopin Ivoires du Moyen Âge, Fribourg, 1977, p. 27 et pl. 26 ; J. P. Caillet, L'ivoire et l'os, dans Naissance

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Q u en tin a u to u r des années 1020 ou O rderic Vital au début d u XIIe siècle, m entionnent aus­ si à l'occasion tel ou tel objet d u trésor, n o ­

tam m ent lorsqu'il illustre u n événem ent m ar­ q u a n t de l'h isto ire d u d u ché : dans le m ilieu d es le ttré s q u i a v a ie n t e u l'o cc a sio n de l'a p p ro c h e r (D u d o n et O rd eric v ire n t sû re ­ m en t tous deux de leu rs p ro p res yeux certai­ nes pièces d u trésor), il sem ble que l'o n ait assez tôt pris conscience de l'intérêt historique de cette collection. À ces textes il faut joindre q u elq u es pro cès v erb au x d e « visites » des reliques, rédigés lors de chaque ouverture de châsse ou d e re liq u a ire s, n o ta m m e n t lors d 'u n e translation, et destinés à confirm er d e­

v an t divers tém oins q ue to u t avait été trouvé en ordre. Le docu m en t m ajeur p o u r l'histoire d u tréso r de R ouen a v an t 1200 d em eu re ce­ p e n d an t sans conteste l'in v en taire établi sous l'ép isc o p at d e G au tier de C outances (1184- 1192).

Ce texte, le p lus ancien inventaire de tré­ sor de N orm andie avec ceux d u Bec-Hellouin et d u p rie u ré Saint-G abriel d an s le Bessin5, nous donne la liste des objets précieux conser­ vés à la cathédrale, celle des ornem ents qui

fu ren t tro u v és d an s la chapelle d e l'a rc h e ­ vêque R otrou après le décès d e ce d ern ier en 11846, et aussi p o u r m ém oire celle des pièces refondues au titre d e l'aid e financière consen­ tie p ar l'Église de R ouen à la m aison ducale. Il

5 J.-M. B ouvris, Les orfèvres en Normandie au XIe siècle, dan s Aspects de la société et de l'économie dans la Normandie médié­

vale (X'-X1I1' siècles), so u s la direction d e L. M usset, Cahier des Annales de Normandie n° 22,1988, p. 161.

6 L'édition la p lu s récente d e ce texte est celle d e Charles d e Linas, Le trésor et la bibliothèque de l'église métropolitaine de

Rouen au XII* siècle, dan s Revue de l ’A rt chrétien, IV, 1886, p. 6.

n e contient q u 'u n m in im u m d'élém ents des­ criptifs. L 'estim ation de la v aleur m archande, fondé sur le poids de m étal précieux chiffré en marcs d 'arg en t ou en livres angevines (la q u a­ lité artistique n 'en tre évidem m ent pas en ligne d e com pte), n 'e s t d o n n é e q ue d an s le cas d'objets p récéd em m en t dépecés et refondus. P o u r le reste, les ré d a c te u rs se co n ten tent d 'in d iqu er la n atu re d e l'objet et les m atériaux en tran t dans sa com position (or, argent, v er­ meil, cuivre, ém aux, ivoire, perles, pierres p ré­ cieuses). L 'h isto riq u e des pièces n 'e s t nulle p a rt évoqué, sau f p o u r qu elq ues donations récentes qui é taien t encore to u tes d ans les m émoires et p o u r les œ uvres aliénées dans les décennies an térieu res au p ro fit de la m aison ducale.

Tel est ra p id e m e n t esquissé l'éventail des sources disponibles. O n vo it to u t de suite q u 'il fau t se résig n er d 'av a n c e à ignorer la

n atu re et le nom bre, m êm e approxim atif, des pièces d'orfèvrerie ay an t a p p arten u à l'église

m étropolitaine de la N o rm an d ie avant la fin d u XIIe siècle. Il reste cep en dan t la possibilité d'entrevoir, à travers les bribes d'inform ation

fournies p a r les textes, les m écanism es qui conditionnèrent la vie de ce trésor. Aux a p ­ p orts qui perm irent à celui-ci de se renouveler

e t de s 'a c c ro ître a u c o u rs d e s siècles, s'o p p o sen t en effet divers facteurs économ i­ ques et politiques qui, en sens contraire, p ro ­ v o q u èren t d an s le m êm e tem p s l'érosion d u capital de m étal précieux th ésau risé dans la cathédrale.

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Les donations.

Les p lu s anciennes d o n atio n s attestées sont celles des évêques d u h a u t M oyen Âge. On ignore su r quelle source s 'a p p u ie Farin, éru d it d u XVIIe siècle, p o u r affirm er que Ri- culphe (c. 872- 875) avait contribué à enrichir la cathédrale en « ornem ents »7. O n ne sait pas d av an tag e si l'év êq u e A n sb ert (684-690), qui avait fait réaliser p a r des artistes « v enus de diverses provinces » u n som ptueux baldaquin d'or, d 'a rg e n t et d e pierres précieuses p o u r le tom beau d e sain t O uen, d an s l'église Saint- Pierre, av ait aussi eu le tem ps d e m ettre p en ­ dan t son b ref épiscopat l'a rt de ces orfèvres au service de la cathédrale8. Plus sûre en rev an ­ che est la m en tio n dans la deuxièm e Vie de sain t O u e n d 'u n le c tu s d 'o rfè v re rie que l'évêque sain t O uen ( t 684) avait fait réaliser en l'h o n n e u r de N otre-D am e. C et objet était encore visible d ans la cathédrale au d éb u t d u IXe siècle, époque à laquelle fu t rédigée la se­ conde version de la Vita Audoenf. Il fau t en­ suite descendre ju sq u 'a u XIe siècle p o u r tro u ­ ver de n o u v e au x tém o ig n ag es d u m écénat épiscopal. G uillaum e Bonne-Ame (1079-1110), à qui ses co m tem p o rain s v o u a ie n t u n e im ­ m e n s e r e c o n n a i s s a n c e p o u r a v o ir « g ran d em en t enrichi l'église m étropolitaine de to u tes sortes d 'o rn e m en ts nécessaires au culte div in », com m anda un e nouvelle châsse p o u r les reliques de saint Rom ain, patron de la

7 F. Farin, La Normandie chrétienne, 1659, p. 147.

8 Vita S. Ansberti, Monumenta Germaniae Historica, Scrip-

tores, V, p. 632-633.

9 Acta Sanctorum, A u g., IV, p. 819. Sur les lectus, voir la note d e N . Gauthier, Rouen pendant le haut M oyen Âge (650-850), dans La Neustrie. Les pays au nord de la Loire de 650 à 850, Beihefte

der Francia, 1 6 /2 , p. 12, n ote 47.

ville, après leu r tran slatio n de l'église Saint- G odard dans la cathédrale à la fin du XIe siè­ cle10. O rd e ric V ital, q u i e u t sans d o u te l'occasion d e voir cet objet d ans la cathédrale lors de son o rd in ation en 1107, précise qu'il était com posé d 'o r, d 'arg en t et de pierres pré­ cieuses. L'archevêque R otrou le fit refondre en 1179 et exécuter u ne châsse plus petite en af­ fectant le su rp lu s d e m étal précieux au fonds destiné à l'alim entation des pauvres. À la fin d u XIIe siècle, l'inventaire d u trésor mentionne égalem ent u n évangéliaire orné d 'u n e reliure d 'a rg e n t et « une croix n eu v e d 'arg en t doré, r e h a u s s é e d e p i e r r e r i e s », d o n s d e l'archevêque Rotrou (1164-1184).

L 'ap p o rt du m écénat princier n'ap p araît dans les sources écrites q u 'à l'époque ducale. A u d é b u t d u XIe siècle, o n m o n trait dans l'église N otre-D am e u ne pièce d e tissu pré­ cieux (pallium) que l'o n disait avoir été offerte p ar Richard Ier dans les prem ières années de sa gu erre contre T h ib au d de C hartres (c. 960- 966), le jeune duc, à la veille de ce conflit qui s 'a n n o n ç a it co m m e la p re m iè re g ra n d e épreuve de son règne, a y an t recom m andé le duché à la protection d e la V ierge11. La reine Em ma, fille de Richard Ier, veuve d'Ethelred II roi d e W essex, rem ariée à K nut le G rand en 1016, fit don à son frère Robert, archevêque de R o u e n , d 'u n g r a n d p s a u ti e r d é c o ré d 'en lu m in u res12. B o h é m o n d , p r i n c e

” Orderic Vital, Histoire ecclésiasique, 1. V, c. IV, éd. A. Le Prévost, 1840, t. H, p. 313-314 ; Acta Sanctorum, Oct., XI, p. 82.

11 D u d on d e Saint Q uentin, De moribus et actis primorum

Normanniae ducum, éd. J. Lair, d an s Mém. de la Soc. des A nt. de Norm., XXm, Caen, 1865.

12 Orderic Vital, Histoire ecclésiastique, éd. M. Chibnall, 2, p. 42. C 'est p eu t-être la m êm e o rig in e q u 'il faut assign er au

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d'A ntioche, ven u en France en 1106 avec dans ses bagages une grande quantité de reliques et de soieries orientales, ne d u t pas oublier la cathédrale lors de son passage à Rouen à la fin d u m ois d 'a v ril ; la tra d itio n a ttrib u e à ce prince ou à u n m em bre de sa suite l'offrande de reliques m ariales13. H en ri Ier Beauclerc (+ 1135) légua a u ch ap itre u ne couronne d 'o r, objet qui fut estim é à tren te m arcs d'argen t, et deux candélabres en verm eil14. Les inventaires d u XIIe siècle et de 1555 conservent les traces de l'offrande de deu x candélabres en pierre p ar l'im pératrice M athilde ( t 1167) et d 'u n don de la reine A liénor ( t 1204)1S. C 'est sans doute aussi un do n royal qui p e rm it de financer la p lu s g ra n d e p a rtie d u m o n u m e n t d 'o r et d 'a rg e n t d an s lequel fu t d ép o sé le cœ ur de R ich ard -C œ u r-d e-L io n , m o rt au siège de Châlus en 119916.

Ces indications éparses, q u 'u n e enquête p lu s a p p ro fo n d ie p e rm e ttra it san s d o u te d 'éto ffer, ne d o n n e n t c ertain e m e n t q u 'u n e

célèbre pontifical anglo-saxon , décoré d'enlum inu res d e l'école d e W inchester, que l'inventaire d e la bib liothèqu e du XIIe siècle d é s ig n e co m m e le bénédictionnaire de l'archevêque Robert (B.M. Rouen, M s 369 (Y 7) ; b ib liograp h ie dan s Le trésor de la

cathédrale de Rouen, catalogu e d e l'e x p o sitio n d u M u sée d es

A n tiq u ités d e la Seine-M aritim e, R ou en , 1993, p. 73, n° 54). Charles de Linas a fourni d 'assez bon s argum ents en faveur de l'appartenance d e ce bénédictionnaire à Robert d'Evreux, arche­ vêq u e de Rouen, p lu tôt qu'à Robert de Jum ièges, archevêque de Canterbury {art. cit., p. 4, note 7)

13 Orderic Vital, Histoire ecclésiastique, éd. M. Chibnall, t. VI, p. 69 ; D om P om m eraye, H istoire de l'église cathédrale de

Rouen, Rouen, 1686, p. 73.

14Ch. d e Linas, Le trésor..., p. 6.

15 E. Lescroart-Cazenave, Histoire du trésor, du XVI' siècle

au X X ' siècle, dan s Le trésor de la Cathédrale de Rouen, Rouen,

M usée d es A ntiquités d e la Seine-M aritim e, 1993, p. 23.

16 A. D eville, Tombeaux de la cathédrale de Rouen, troi­ sièm e édition, Paris, 1881, p. 33.

faible idée de la contribution réelle de la fa­ mille princière p en d an t p rès de trois siècles à l'ac c ro isse m e n t d u tré so r de N otre-D am e. L'abbatiale de Saint-O uen de Rouen, de nom ­ breux sanctuaires no rm an d s, m ais aussi p lu ­ sieurs églises étrangères reçu ren t de celle-ci des présents d 'u n e v aleu r souvent considéra­ ble17, et il est p eu probable q ue la cathédrale de R ouen n 'a it p as profité d e sem blables a tten ­ tions : église d u couronnem ent, elle était aussi le lieu de sép u ltu re de plu sieu rs m em bres de la dynastie ducale, et l'o n y célébrait réguliè­ rem ent des cérém onies destinées à sacraliser les actes d u prince, n o tam m en t à chaque en­ trée de celui-ci dans sa capitale18. Il est possible que l'o n ait conservé p e n d a n t quelque tem ps d ans cette église, com m e à la Trinité de Fé- cam p, au Bec-Hellouin et à Saint-Étienne de C aen19, d iv ers regalia (insignes d u pouvoir). C 'est, pensons-nous, le sens q u 'il faut donner au term e de corona p ar lequel l'inventaire d u XIIe siècle désigne l'objet d 'o r légué p ar H enri Ier à la cath éd rale en 1135. D eux couronnes ducales en or, signalées com m e ayant été p o r­ tées p a r H e n ri Ier, so n t m en tio n n ées d an s l'in v en taire d u Bec 20. D 'au tres pièces étaient d 'in té rêt p lu s anecdotique et de m oindre v a­ leur, m ais, conservées de génération en

géné-17 L. M usset, Le mécénat des princes normands au XI' siècle, d an s Artistes, artisans et production artistique au Moyen Âge, sou s la dir. de X. Barrai yA ltet, 2, Paris, 1987, p. 121-133.

18 O n trouve dan s l'ouvrage d e D u d on d e Saint-Q uentin et dans les Gesta Normannorum ducum d e G uillaum e d e Jum ieges (éd. J. Marx, 1914) diverses évocation s d e ces entrées prind ères au XIe siècle. D an s le s circon stan ces les p lu s so len n e lles, le clergé allait au -d evan t d u d u c avec les reliques et accom pagnait ensu ite le cortège jusqu'à la cathédrale.

19L. M usset, Le mécénat..., p. 123-132.

20 C h a n o in e P oree, H istoire de l'abbaye du Bec, rééd. Bruxelles 1 9 8 0 ,1 .1, p.650.

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ration, elles contribuèrent à entretenir pen d an t longtem ps la légende de la dynastie. Telle était p a r exem ple la « ch asu b le » de G uillaum e Longue Epée, q u 'u n e trad itio n rapportée pour la prem ière fois p ar D u d o n de Saint-Q uentin associe à l'h isto ire d e la restau ratio n de Ju- mièges vers 94021. Entrée à un e date inconnue dans le tréso r de N otre-D am e (s'agit-il d 'u n tissu retro u v é lors d 'u n e des translations du tom beau ?), elle figure encore dans l'inventaire du XVIe siècle22.

O n englobera dans une troisièm e catégo­ rie tous les autres d o nateurs, laïques ou ecclé­ siastiques. P our les prem iers, le dons à l'église revêtaient o rd in airem en t la form e d 'u n e d é­ volution de biens fonciers ou de rentes en ar­ gent, et les rares p erso n n ag es de h a u t rang p o sséd an t u n p a trim o in e d'o b jets précieux réservaient généralem ent ceux-ci au trésor de leur sanctuaire fam ilial, le p lu s sou v en t une collégiale ou une abbaye ru ra le 23. O n ne sait à quel m om ent les R ouennais ayant exprim é la volonté d 'ê tre in h u m és d an s l'église N otre- Dame p rire n t l'h a b itu d e de faire u n legs de bijoux personnels ou d 'o rn e m en ts au trésor po u r leurs frais de sép u ltu res et les dépenses des messes obituaires. C ette pratique, qui de­ viendra courante à la fin d u M oyen Âge, au point de constituer de loin la plus im portante source d 'enrichissem ent d u tréso r24, explique

21 D u d o n d e Saint-Q uentin, De moribus et a ctis..., éd. J. Lair, p. 200.

22 E. Lescroart-Cazenave, art. cit., p. 23.

23 L. M usset, A -t-il existé en Normandie au XIe siècle une

aristocratie d'argent ?, dans Annales de Normandie, IX, 1959, p. 285-

299.

24 A. D e v ille , Tombeaux de la cathédrale de Rouen, troi­ sièm e édition, Paris, 1881, p. 117 et suiv.

sans d o u te la m ention au XIIe siècle de p lu ­ sieurs dignitaires d u chapitre de la cathédrale ou d e leurs proches ay an t réservé p a r testa­ m ent tel ou tel objet de leur chapelle privée à N otre-D am e d e R ouen. Le d o y en Geoffroy (1148-1175) avait offert u n bassin d 'u n e valeur d e trois m arcs ; Amicus, le trésorier, u n évan- g é lia ire c o m p o rta n t u n e re liu re o rn ée d 'ém a u x ; R obert d u N eu fb o urg , d o yen du chapitre, une écuelle d 'a rg e n t en com plém ent d 'u n objet sim ilaire d o n n é p a r son père Ro­ bert. C 'est aussi au d on d 'u n chanoine de la cathédrale, D rogon de T rubleville, que l'on d o it l'actuelle châsse d e sain t Sever, réalisée p o u r ses p arties les plus anciennes entre 1189 et 119925. O n ne sait quelle fu t l'im portance des dons apportés p ar les pèlerins. Rouen était dès les environs de Tan Mil u ne ville cosmopolite, fréquentée p a r des voyageurs issus de toutes les contrées de l'E urope occidentale, m ais il ne sem ble pas p o u r au tan t que la cathédrale ait jam ais été u n gran d centre de pèlerinage, en d é p it des efforts déployés p a r son clergé de­ p u is le Xe siècle p o u r lu tte r contre la p ro p a­ gande développée p ar l'abbaye de Saint-Ouen au to u r de ses propres reliques26.

A u-delà de cette som m e de gestes indi­ v iduels, il faut tenir com pte enfin plus large­ m e n t d es contextes p o litico -éco n o m iq u es, ceux-ci ayant été plus d 'u n e fois propices à un enrichissem ent d u trésor. La N orm andie

con-25 A. D eville, Notice sur la châsse de saint Sever, dans Mém.

de la Soc. des Ant. de Norm., 10 (1836), p. 340-68. Sur D rogon de

T rubleville, v o ir D. Spear, Les chanoines de Rouen pendant la

période ducale, dans Annales de Normandie, m ai 1991, p. 151.

26 L. M usset, Recherches sur les pèlerins et les pèlerinages en

Normandie jusqu'à la première croisade, dan s Annales de Normandie,

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n u t ainsi vers la fin d u règne de Richard Ier (t 996) et sous le p rin cip at de R ichard II (996- 1025) u n afflux de m étaux précieux sans p ré­ cédent, ré su ltan t d e l'a p p o rt des b u tin s Vi­ kings, d u développem ent des activités du po rt de R ouen et de son o u v ertu re à l'espace éco­ nom ique anglo-scandinave27. La conquête de l'A n g leterre a u ra it ég alem en t pro v o qu é, au d ire des ch ro n iq u eu rs, le tra n sfe rt vers les églises d u duché d 'u n e qu an tité considérable de pallia et de pièces d 'o rfè v re rie prélevés dans les trésors anglais28.

Les causes d'érosion du trésor

U n trésor d'Église au M oyen Âge n'était, to u te dim ension sacrée m ise à p art, q u 'u n e im m o b ilisa tio n d e c a p ita u x so u s form e d 'ob jets d 'a rt. Q u an d ils le jug eaien t néces­ saire, les d éten teu rs d e ce fonds n 'h ésitaien t pas u n seul in stan t à p u iser d ans celui-ci la quantité d 'o r et d 'arg en t correspondant à leurs besoins en liquidités.

C ette p ratiq u e est attestée à R ouen dès l'é p o q u e carolingienne. La Vie de l'év êq u e A nsbert ( t 684), écrite au VIIIe siècle, insiste lo n g u em en t su r le caractère aum ô n ier de ce

27 L. M usset, A -t-il existé en Normandie au XIe siècle une

aristocratie d'argent ?, loc. cit.

28 L. M usset, Le mécénat des princes norm ands..., p. 127- 128. N o u s serions tenté d 'y voir l'origin e d u célèbre coffret de M ortain, objet qu e l'on s'accorde à considérer com m e fabriqué dan s le nord ou le nord est d e l'A ngleterre entre le m ilieu du VIIe et la fin d u VHP siècle. L 'hyp othèse d'u ne œ u vre introduite en N eu strie au hau t M oyen  ge, et m iraculeu sem en t conservée d e p u is l'ép oq u e carolingien ne, n o u s sem b le p eu probable (v. tou tefois u n e interprétation différente d e M. M. G authier, Le

coffret de Mortain (Manche), dan s La Neustrie. Les pays au nord de la Loire de 650 à 850, Beïhefte der Francia, 1 6 /2 ,1 9 8 9 , p. 295-6).

p rélat et elle raconte que lors d 'u n e disette ayant provoqué u n afflux de populations af­ famées aux p o rtes de la cathédrale, A nsbert était allé dans le trésor choisir des vases p ré­ cieux p o u r envoyer ces objets à la fonte29. Le cas n 'a sûrem ent rien d'exceptionnel. Réguliè­ rem ent, les années de m auvaise récolte furent ponctuées p e n d an t plu sieu rs siècles de m igra­ tions de foules p a y sa n n e s v ers la cité de Rouen - le phénom ène est évoqué dans la Vie de saint H u gues de R ouen à la fin d u IXe siè­ cle30, dans les M iracles d e sain t W ulfran en 105331 - et le surcroît de bouches à no u rrir né­ cessitait so u v en t le recours aux réserves d u trésor, les ressources ord in aires de l'aum o- nerie ne suffisant plus. C 'e st encore le m otif qui fut invoqué en 1179 p a r l'archevêque Ro- tro u p o u r faire fondre la châsse de saint Ro­ m ain et p o u r la rem p lacer p a r u n reliquaire p lus petit*2.

Les faits de guerre et les dom m ages n a ­ turels fu ren t un e au tre cause d e disparition d'objets précieux. Le ra id viking d u m ois de m ai 841 su r la ville de R ouen, prem ière atta­ que menée contre un e cité d u m onde carolin­ gien, p rit les autorités d e court et il est proba­ ble q u'aucune disposition sérieuse n 'av ait été p rise p o u r m ettre les v aleu rs m obilières en lieu sûr, comm e on en p rit l'h ab itu d e au cours des années suivantes d ans les régions les plus

29 Vita S. A nsberti..., p. 629.

30 J. Van der Straeten, Vie inédite de saint Hugues, évêque

de Rouen, dans Analecta Bollandiana, p. 87,1969, p. 254.

31 Inventio et Miracula Sancti Vulfranni, éd. J. Laporte, dan s Soc. de l’Hist. de Norm., XTV, 1938, p. 56.

32 Gallia Christiana, XI, col. 12. Par su ite d 'u n e erreur de lecture, la n ou velle châsse a été so u v en t qualifiée d'augustiorem (plus belle) ; il faut év id em m en t lire angustiorem.

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exposées. La p e rte sèche qu i en résu lta est p eu t-être u ne des raisons de l'absence d 'u n véritable prog ram m e de reconstruction dans la seconde m oitié d u IXe siècle33, car il n 'y a aucune raison de p en ser que les événem ents aient provoqué dans le m êm e tem ps u n effon­ d re m e n t d u re v e n u d es d o m ain es ru ra u x constituant les ressources ordinaires des égli­ ses rouennaises. Les p ertes occasionnées p ar des causes naturelles, m êm e si les tém oigna­ ges contem porains ont quelquefois tendance à exagérer leur gravité, ne sont pas n o n p lus à négliger. Si les dégâts provoqués p ar la foudre dans la croisée d u tra n sep t en 1116 ne sem ­ blent pas avoir été très im po rtan ts34, l'incendie de l'église N otre-D am e en 1200 ré d u isit en cendres la totalité des « o rn em en ts et des li­ vres » d u sanctuaire, c'est-à-dire, selon toute probabilité, les arm oires liturgiques, les lus­ tres, les tentures et le décor scénique d u grand crucifix face à la nef, décor que l'in v en taire rédigé p e u d 'an n ées a v an t cette catastrophe décrivait comm e une pièce m aîtresse d u trésor de la cathédrale35.

Le recours au fonds d u trésor p o u r sub­ venir aux dépenses extra-budgétaires apparaît de m anière particulièrem ent évidente dans les aides exceptionnelles consenties aux pouvoirs publics. Les im p ô ts levés p a r l'e m p e re u r Charles le C hauve su r les cités de la Francia

occidentalis à partir des années 860 p o u r payer

les rançons exigées p a r les N o rm an d s su p p o ­

33 V oir notre ouvrage à paraître sur Rouen et les Vikings.

De la cité carolingienne à la ville normande.

34 Ph. Labbe, Novae bibliothecae m ss librorum prima pars

chronologica et historica, Paris, 1657, p. 367.

36 Normanniae nova chronica, éd. A. C heruel, Mém. Soc.

Ant. Norm., VIII, 2e série, p. 15.

sent des ponctions considérables dans les ré­ serves des établissem ents ecclésiastiques, et l'Église de R ouen, su r laquelle reposait alors to u t entier le destin de la cité, d u t être large­ m ent m ise à co n trib u tio n 36. L'octroi d 'aid es extraordinaires à l'É tat était encore courant au XIT siècle, e t les com m issaires chargés de l'estim ation d u trésor de N otre-D am e dans les années 1184-1192 en tin rent un décom pte pré­ cis : à H enri II, p o u r soutenir les dépenses de la guerre contre Etienne de Blois entre 1151 et 1153, avaient été donnés 23 m arcs d 'o r prove­ nan t d 'u n d ev an t d 'au te l, u ne reliure d 'o r et de pierres précieuses, deux g ran d s candéla­ bres d 'a rg e n t d 'u n e v aleu r de 30 marcs. D u­ ra n t son règ n e (1154-1189), les chanoines avaient restitué à H enri II une couronne d 'o r léguée p ar son père H enri 1er Beauclerc à la cathédrale en 113537. Pour aider le roi dans la guerre contre son pro p re fils H enri le Jeune au cours d u siège de Rouen (1174), ils prélevèrent dans les collections de l'église u n calice d 'o r de 6 marcs, 17 m arcs d 'o r d u devant d'autel, deux b assins d 'a r g e n t de 8 m arcs, u n e écuelle d 'arg en t, u n e reliu re d 'a rg e n t évaluée à 40 livres an g ev ines38. À la fin d u XIIe siècle, l'église de R o u en v ersa encore 300 m arcs d 'a rg e n t p o u r le p aiem en t de la rançon de Richard-Cœur-de-Lion39.

Les p e rte s d u e s à d es déto u rn em en ts frauduleux sont naturellem ent beaucoup plus difficiles à évaluer. Q u an d l'archevêque était

35 A. d 'H a en en s, Les invasions normandes, une catastro­

phe ?, Paris, 1970, p. 40^ 3 .

37 Ch. d e Linas, op. cit., p. 7. 36 Ch. d e Linas, op. cit., p. 6.

æ D om P om m eraye, H istoire de l'église cathédrale de

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soupçonné d 'u se r d u patrim oine de la cathé­ drale au profit d 'in térêts p rivés ou à des fins politiques, u ne des accusations couram m ent portées contre lui était d 'a v o ir puisé dans les ornem ents de l'église. Le fait est de toutes époques. À la fin d u sixièm e siècle, l'évêque Prétextât était déjà accusé de com plot contre le roi C hilpéric p o u r avoir d istrib u é des objets précieux au to u r de lui, d ans le b u t de nuire au souverain40. Beaucoup p lu s tard, on prononce­ ra u n e ch arg e id e n tiq u e à l'e n c o n tre de l'archevêque M auger (1037-1054), adversaire de G uillaum e le Bâtard lors des troubles de la m inorité d u duc. A u d ire de G uillaum e de Poitiers, l'arch ev êq u e de R ouen av ait été si prodigue envers son entourage que « la cathé­ drale avait fini p a r être p resq u e entièrem ent dépo u illée d e ses o rn em en ts et de son tré­ sor » ; l'a u te u r sem ble re p re n d re ici u n des motifs d'accusation qui fu ren t prononcés con­ tre M auger au concile de Lisieux, et qui am e­ nèrent la destitution de l'archevêque en 105541. Il ne fait pas de d o u te que la p lu p a rt des œ u ­ vres d é to u rn é es étaien t d éfin itiv em en t p e r­ dues p o u r la cathédrale. Q uand, constitués de m atériaux précieux, ils n 'é ta ie n t pas aussitôt refo n d u s p a r leu rs n o u v e au x p ro p riétaires, leur destin a d û être so u v en t sim ilaire à celui du g ran d p sau tier que la reine Emma, épouse du roi d'A ngleterre Ethelred II puis de K nut le G rand, avait do nné à son frère Robert, arche­ vêque d e Rouen. Passé en tre les m ains d 'u n des fils de R obert, G u illau m e, p u is de la fem m e de ce d ern ier, H ed v ise, il finit p ar

40 G régoire d e Tours, Histoire des Francs, 1. V, XVIII, tra­ duction R. Latouche, 1963, p. 271.

41 G uillaum e d e Poitiers, Gesta Willelmi Regis, éd. R. Fo- reville, Paris, 1952.

aboutir dans la bibliothèque de Saint-Evroult42. Q uelle q u 'a it été l'im p o rtan ce réelle d e ces aliénations - et la rem arq u e est valable aussi p o u r le p atrim o in e foncier - on p e u t cepen­ d a n t su p p o ser qu'elles concernaient su rto u t les biens a p p arten a n t à la m anse épiscopale, c'est-à-dire à la chapelle de l'archevêque, qui seule était sous son contrôle d irect43. N om bre de pièces d u trésor de cette chapelle furent au d e m eu ran t d istribuées p o u r des m otifs con­ form es à la m ission qui était celle d u prem ier re p ré se n ta n t ecclésiastique d e la province. Entre 1010 et 1017, l'archevêque Robert fit don d 'u n m an teau liturgique (appelé dorsale dans le texte) à u n abbé de Saint-Riquier en Picar­ die. En 1027, le m êm e offrit aux m oines de Saint-W andrille u n pallium d e tissu p o u rp re destiné à recouvrir les reliques de saint W ul- fran44. Plus tard, l'archevêque M aurille (1054- 1067) re m e ttra à H e rlu in , fo n d a te u r de l'ab b ay e d u Bec, deu x cheveux d e la Vierge enferm és d an s u n g ran d phy lactère orn é de pierres précieuses45. N u l d o u te que les archi­ ves des m onastères no rm an d s recèlent encore de nom breux tém oignages d e sem blables do ­ nations.

A u total, le d estin des objets d u trésor a p p a ra ît co m m e so u m is à to u te s so rte s d'aléas. Si quelques uns d 'en tre eux

bénéficiè-42 Orderic Vital, Histoire ecclésiastique, éd. M. Chibnall, 2, p. 42.

43 C harles d e Linas a justem ent fait observer qu 'au m i­ lieu d u XIIe siècle, le chapitre d e R ou en d isp o sa it d 'u n e indé­ pend ance p resq u e com p lète à l'égard d e l'archevêque p o u r la g estion du trésor (op. cit., p. 6, note 1).

44 Inventio et Miracula Sancti Vulfranni, éd . J. Laporte, p. 44.

45 C h a n o in e P orée, H istoire de l'abbaye du Bec, rééd. Bruxelles, 1 9 8 0 ,1 .1, p. 653.

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rent d 'u n e longévité rem arquable compte tenu de leur richesse en m étal précieux - c'est le cas d u lectus offert p a r sain t O uen (641-684), œ u ­ vre qui, sem ble-t-il, était encore intacte vers 820 - d 'a u tre s ne firen t q u 'u n bref passage dans les collections rouennaises. A u XIIe siècle, certains objets com m e la coupelle d 'a rg e n t donnée p a r R obert d e N eu fb o u rg ne furent guère conservés p lus d 'u n e vingtaine d'années avant d 'être envoyés à la fonte. Il arrivait, en­ fin, que des œ uvres d e g ran d e qualité term i­ nent leur carrière d ans u n lent dépeçage : celui du parem ent d 'o r d u m aître autel du ra plus de vingt ans.

Le trésor de Notre-Dame à la fin du XIIe siè­ cle.

L'inventaire dressé d ans les années 1184- 1192 dénom bre u n p e u p lu s de cent quatre- vingts objets dans la collection d u chapitre et de v in g t d an s la chapelle d e l'arch ev êq u e, chapier no n com pris46. Ces objets peuvent être classés en plusieurs catégories : les châsses et les reliquaires, les objets destinés au service cultuel, les ornem ents de l'église, les reliures précieuses, divers objets d 'a rt à caractère p ro ­ fane.

Sur les q u ato rze châsses que possède la cathédrale à la fin d u XIIe siècle, une seule est explicitem ent identifiée dans l'inventaire, celle qui abrite des reliques de saint Romain. O rigi­ nellem ent conservées dans l'église suburbaine d e S a in t-G o d a rd (a n c ie n n e église Saint-

Romain), les reliques d u saint patron de la ville

avaient été transférées d ans la cathédrale p ar

46 Ch. de Linas, op. cit., p. 1 à 10.

l'arch ev êq u e G uillaum e Bonne-A m e (1079- 1110). Cette translation, d o n t on avait tout fait p o u r qu'elle restât gravée d an s la m émoire des R ouennais - G uillaum e in stitu a p o u r la cir­ constance u ne procession annuelle des reli­ ques dans la ville - , trouve son origine dans la rivalité déjà ancienne qui o p p o sait la cathé­ drale à l'abbaye de Saint-Ouen. L'archevêque G uillaum e Bonne-Ame (1079-1110) fit réaliser p o u r ces ossem ents u ne châsse d 'u n e grande richesse47. La q u an tité d 'o r utilisée p o u r sa fabrication était telle que l'archevêque Rotrou p u t en prélever une large p artie u n siècle plus tard et refaire une châsse d e m oindres dim en­ sions qu i restait m algré to u t la p lu s im por­ tan te de la collection rouennaise d ans les an­ nées 1180 : l'in v en taire m entionne u n revête­ m en t de plaques d 'o r avec u ne crête de ver­ meil et des piliers de cuivre doré surm ontés de boules de cristal48. C 'est cette châsse qui était levée p ar le prisonnier lors de la cérémonie de la « fierte de Saint-Romain », d o n t les prem iè­ res attestations datent de la fin d u XIIe siècle49. La célébrité de la châsse d e saint Rom ain ne d ate pas p o u r au tan t de son entrée dans le tréso r d e la cathédrale. A v an t la fin d u XIe siècle, on conservait déjà dans l'actuelle église Saint-G odard une fierte de saint-Romain, dont le co n ten u fu t au th entifié p a r l'archevêque Robert en 103650. Le clergé la sortait à chaque gran d e occasion : p o u r u ne prestatio n de ser­

47 Orderic Vital, Histoire ecclésiastique, éd. M. Chibnall, t. 3, p. 23-24.

48 Ch. d e Linas, op. cit., p. 10.

49 J. Loth, La cathédrale de Rouen, son histoire, sa descrip­

tion, Rouen, 1879, p. 281.

33 Arch, d e la Sne-M m e, G 3666. Edition Ch. d e Beaure- paire, Notice sur les anciens reliquaires de la cathédrale de Rouen, dans Bull. Comm. des Antiq. de la Seine Inf., t. V, 1879-1881, p. 54.

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m en t p a r le duc R obert le M agnifique vers 102851, p o u r accom pagner la procession des reliques d e sain t W u lfran d a n s la ville en 105352, et vraisem blablem ent lors de la p lu p art des « entrées » ducales à Rouen. On p e u t su p ­ p o ser que la châsse réalisée su r l'o rd re de G uillaum e Bonne-A m e à la fin d u XIe siècle était, au m oins en partie, une descendante de cet objet.

Les treize autres châsses, en m atériaux de m oindre v aleu r - leurs placages sont tous de cuivre d o ré o u de verm eil - sont toutes anonym es su r la liste d u XIIe siècle. Dans le lot devait au m oins figurer la châsse contenant les reliques de sain t Sever évêque d'A vranches, reliques qui av aien t été tran sp o rtées d u Co- tentin ju sq u 'à R ouen entre 945 e t 996, officiel­ lem ent p o u r les m ettre à l'ab ri des incursions bretonnes et parce que le diocèse d'A vranches, alors sans évêque, était provisoirem ent placé sous l'a d m in is tra tio n d irecte d u siège de R ouen53. Le duc R ichard 1er joua u n rôle de prem ier p lan dans cette translation en faisant autoriser p ar son conseil l'installation des reli­ ques dans la cathédrale54. Soucieux de red o n ­ n er de l'éclat à l'église N otre-D am e, lieu de sépulture de son père et de son grand-père, où il fit réaliser à ses p ro p res frais des ag ran d is­ sem ents co nsid érab les55, R ichard Ier a p p o rta sans d o u te sa c o n trib u tio n p e rso n n e lle à

51M. Fauroux, Recueil des actes..., n° 67, p. 203.

2 Inventio et M iracula..., éd. J. Laporte, p. 57.

53 D om J. Laporte, L'abbaye du M ont-Saint-M ichel aux X ‘

et XI' siècles, dan s Millénaire monastique du M ont-Saint-Michel, t.

1, Histoire et vie monastique, Paris, 1967, p. 53-58.

51 M. Fauroux, Recueil des actes..., p. 23, n° 16, note 19. 55 D u d on d e Saint-Q uentin, De moribus et a c tis..., éd. J. Lair, p. 290.

l'exécution d 'u n e châsse digne de ces nouvel­ les reliques, comme il le fit p o u r les reliques de sain t G o dard d ans le u r lieu d 'ex il à Saint- M édard de Soissons56, et à R ouen m êm e po u r la châsse de saint O uen, objet d o n t il confia l'em bellissem ent à u n orfèvre d u palais57. En­ tre 1189 et 1199, D rogon de Trubleville, cha­ noine de la cathédrale, fit refaire une nouvelle châsse p o u r les reliques de sain t Sever ; c'est celle qui subsiste a u jo u rd 'h u i (largem ent re­ m aniée), d ans les collections d u M usée des A n tiq u ités de la Seine-M aritim e. Parm i le groupe de reliques ap p ortées de l'A vranchin dans le courant d u Xe siècle, il fau t égalem ent citer celles de saint Senier, d ont la présence est a tte sté e d a n s l'é g lis e N o tre -D a m e sous l'épiscopat de Robert d 'E v reu x (989-1037), et peut-être celles de sain t A ndré, p a tro n de la cathédrale d'A vranches58. Les au tre s châsses m entionnées dans l'in v en taire éch ap p en t en revanche à tout essai d'identification.

D ans la catégorie d es reliq u aires, on tro uv e comme d 'h a b itu d e les objets les plus variés. Beaucoup d 'e n tre eux étaien t de d i­ m ensions très modestes. L 'inventaire énum ère des lots d e cinq bourses (sachets en tissu p ré ­ cieux), n eu f pyxides (petites boîtes cylindri­ ques), onze coffrets do n t quatre argentés, neuf petites croix, trois croix de taille m oyenne, une p etite croix pectorale en or avec sa chaîne,

56 L. M usset, Le mécénat des princes norm ands..., p. 122, n ote 8.

57 Translatio secunda S. Audoeni, Acta Sanctorum, Aug. IV, p. 824.

æ D om P om m eraye, H istoire de l'église cathédrale de

Rouen, Rouen, 1686, p. 82. A u XVe siècle, il existait encore un e

châsse de saint Senier, qu alifiée d'« antiqu e » en 1437 (Ch. de Beaurepaire, « N otice... », p. 48).

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quatre phylactères (petits reliquaires de forme aplatie, so u v en t m u n is d 'u n cristal). La p lu ­ p a rt de ces objets sont décrits com m e conte­ n an t des ossem ents, identifiés p a r une in s­ cription gravée su r le boîtier ou tracée sur une bandelette de parchem in (signate), m ais il est aussi fait m ention de deux flacons de verre ad

ponendas reliquias, c'est-à-dire p rév u s p our le

tran spo rt de reliques. Q uatre reliquaires plus im p o rtan ts ont d ro it chacun à u n article sp é­ cial. Le « bras » de saint A ndré, orné d 'u n p la ­ cage d e verm eil reh au ssé de p ierres précieu­ ses, la croix-reliquaire de la chapelle archiépis­ copale, en or et p ierres précieuses avec une croix p lu s petite fixée par-dessus et contenant u n fragm en t de la v raie C roix, u n e cassette d'ivoire contenant la côte de saint Laurent, u n coffret d it « de N otre-D am e » reco u v ert de plaques d e verm eil. H faut préciser à propos de ce d ern ier objet que selon u ne version a n ­ cienne d e la Vita Romani, la cathédrale possé­ dait déjà des reliques de N otre-D am e au Xe siècle59. Ces reliques m ariales servirent à doter u n certain nom bre d e sanctuaires no rm an d s dédiés à la Vierge, telle l'ab b atiale du Bec- H ellouin, et les liens nom breux qui existaient entre la ville de R ouen et l'O rien t60 perm irent de les renouveler à plusieurs reprises. A u d é ­ b u t d u XIIe siècle, l'église de R ouen reçut deux cheveux de la Vierge rem is p a r le patriarche d'A ntioche à u n m em bre de la suite d u prince Bohémond61. La cath éd rale d e R ouen ne fu t

59 E. Vacandard, Vie de saint Ouen évêque de Rouen (641-

684), étude d'histoire mérovingienne, Paris, 1902, p. 358.

60 L. M usset, Rouen Trêves et l’O rient au début du XIe siè­

cle : saint Syméon de Syracuse, dan s Annuaire des cinq départements de la Normandie, CXLI, 1983, p. 149-154.

61 D on ation de M aurille à H erlou in d u Bec : Chanoine Poree, Histoire de l'abbaye du Bec, t. 1, E vreux, 1901, p. 650.

Do-cependant jamais considérée comme un grand sanctuaire marial. O n ne connaît aucun recueil de « m iracles » de N otre-D am e de Rouen, et les rares récits d u genre conservés dans la tra ­ dition rouennaise d u XF et d u XIIe siècle ne concernent que le cercle restreint des clercs du chapitre62. D 'au tre p art, l'in v en taire ne m en­ tionne aucune « im age » de la Vierge parm i les objets d u trésor (à l'exception de celle placée sur la po u tre d u crucifix), et le coffret conte­ n ant les reliques m ariales au XIIe siècle semble à prem ière v ue bien m odeste en com paraison de ce q u 'a lla it d ev en ir la châsse de N otre- Dame à la fin d u M oyen Âge.

Le m obilier litu rg iq u e p ro p rem en t dit, c'est-à-dire l'ensem ble des objets utilisés pour la célébration d u culte, était, selon la coutum e, constitué p resq u e u n iq u e m e n t d e m atières précieuses. La p lu p a rt de ces pièces sont donc comptabilisées dans l'inventaire d u trésor. La chapelle de l'archevêque était dotée d 'u n ca­ lice d 'o r avec sa patèn e, la cathédrale d 'u n calice d 'o r avec u ne p atèn e de verm eil et de sept autres calices de verm eil. O n conservait égalem ent dans l'u n ou l'a u tre lieu u n autel portatif en agate avec un e m o nture d'argent, deux autres autels p ortatifs d o n t u n ciselé et doré d it de « saint R om ain », et u n quatrièm e décrit com m e une « table d 'a rg e n t avec des reliques » ; trois boîtes à hosties respective­ m ent en or, en arg en t et en ivoire, u n ciboire

nation d e cheveu x d e la V ierge à N otre-D am e d e R ouen : Dom Pom m eraye, Histoire de l’église cathédrale de Rouen, Rouen, 1686, p. 73.

a J. F oum ee, Le culte populaire et l'iconographie des saints

en Normandie. La Sainte Vierge, t. 2, fasc. 1, Les miracles de Notre- Dame aux X le et X lle siècles, dan s Cahiers Léopold Delisle, t. XXIX,

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de verm eil ciselé su rm o n té d 'u n e colom be (réserve d u Très-Saint-Sacrem ent) ; u n réci­ p ie n t p o u r le S a in t-C h rêm e , a rg e n té à l'in té rie u r (sacrem en t de la confirm ation) ; deux vases d 'a rg e n t p o u r l'hu ile et le chrêm e et u n e salière (sacrem ent d u baptêm e) ; deux balsam aires en verre, un autre en cristal ; trois flacons d 'a rg e n t p o u r l'eau bénite ; un grand assortim ent de bassins, de vases, de coupes et d'écuelles en argent ; six encensoirs dont un en verm eil, trois d 'arg en t, deux de cuivre avec leurs chaînes et u n anneau en argent, une n a ­ v ette en onyx et deux navettes en argent. On ajoutera à cette liste u n lot de croix proces­ sionnelles c o m p re n a n t d eu x g ran d es croix d 'o r et d'arg en t, u ne croix de verm eil reh au s­ sée de pierres précieuses q u 'av a it fait réaliser l'archevêque R otrou (1164-1184), et trois croix p lu s petites d e cuivre. D ivers accessoires de toilette liturgique ou de p a ru re figurent éga­ lem ent su r la liste : cinq peignes d'ivoire, six épingles d 'o r rehaussées de pierreries, u n an ­ n eau épiscopal en or et deux autres anneaux d 'o r sertis de p ierres précieuses, u ne m itre décorée de perles fines.

P arm i les objets p récieu x d estin és à l'o rn e m en tatio n d u san ctu aire, il fau t m en­ tio n n er en p rem ier lieu, bien que déjà large­ m en t dém antelé à la fin d u XIIe siècle, u n ex­ ceptionnel d e v a n t d 'a u te l en or. Cette pièce d'orfèvrerie, qui ornait sans d o u te l'autel m a­ jeur de la cathédrale au tem ps de M aurille ( t

1067) ou d 'u n de ses successeurs im m édiats, fu t déposée a v an t le m ilieu d u XIIe siècle et son m étal servit à financer à deux reprises des aides au duc H enri II entre 1151 et 1174. À la fin d u XIIe siècle, l'église N otre-D am e était

éclairée p a r u n grand nom bre de lum inaires. U ne couronne en verm eil p e n d ait au-dessus d u m aître-au tel, cantonnée de deu x au tres couronnes de cuivre doré rehaussé de pierres précieuses. D evant l'autel étaient placés quatre candélabres d 'a rg e n t63 ; à l'en trée d u chœ ur, u n g ra n d candélabre de cuivre do ré à sep t branches, im itation d u chandelier de Jéru sa ­ lem ; et en divers endroits sept autres candéla­ bres do n t u n entièrem ent doré, cinq en argent e t le sep tièm e en ivoire scu lpté avec un e m o n tu re d 'arg en t. A u-dessus d e l'en trée d u chœ ur, face au peuple, s'élevait u n gran d cru­ cifix can to n n é de deux statu es reco u v ertes d 'arg en t. La prem ière m ention d e ce crucifix, d ans les Annales de Rouen, est de 111664. Ce que l'in v en taire de la fin d u XIIe siècle d it d e ses dispositions laisse en ten d re que la croix était encadrée p a r des statues de la Vierge et de saint Jean, com position classique, qui était déjà celle d u crucifix de la cathédrale de C anterbu­ ry au tem ps de Lanfranc (1070-1089)65.

Les arm oires de la sacristie, la chapelle d e l'archevêque et la bibliothèque du chapitre de R ouen contenaient un im p o rtan t fonds de livres d o n t l'inventaire le p lus ancien qui nous soit p arv en u d ate d u d éb u t d u XIIe siècle66. À

° C ette d isp osition était sans dou te assez antérieure à la fin d u XIIe siècle. En 1124, G uillau m e d e Roum are fit u n d on p ou r la cire d es cierges placés ante magnum altare (B.M. Rouen, Y 44, f° 31 r°).

“ Ph. Labbe, Novae bibliothecae mss librorum prima pars

chronologica et historica, Paris, 1657, p. 367.

® Chronica Gervasii pars prima, dan s : Historical works of

Gervase o f Canrebury, éd. W. Stubbs, Rerum britannicarum medii aevi scriptores, n° 7 3 ,1 .1 (1879), p. 3 et suiv.

66 A b bé Saas, Notice des m anuscrits de la bibliothèque de

l'église métropolitaine de Rouen, Rouen, 1746, p. 88 ; abbé P. Lan-

glois, Recherches sur les bibliothèques des archevêques et du chapitre

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l'ex ceptio n d u « livre d 'iv o ire » m en tio nn é plus haut, les seuls ouvrages ornés de reliures précieuses étaient des livres liturgiques, évan- géliaires, psautiers et épistoliers. L'inventaire d u trésor énum ère onze de ces reliures, sans com pter les deux qui avaient été fondues res­ pectivem ent entre 1151 et 1153 et en 1174. Les p lus rem arquables p a ra isse n t avoir été trois grandes reliures d 'o r et de pierres précieuses citées parm i les collections d e l'église N otre- Dame. O n n o tera aussi à titre de curiosité la m ention d 'u n e reliure ornée d 'ém au x lim o u ­ sins, don d 'Amicus, trésorier d u chapitre.

Com m e tous les trésors d'église, la col­ lection rouennaise com p ren ait égalem ent un certain nom bre d'objets profanes, souvent de gran d prix, p ro v en an t de cadeaux officiels ou de legs d iv ers en fav eu r d e la cath éd rale : deux œ ufs d 'au tru ch e fixés su r des m ontures de verm eil, u n e série d e pièces d'échec en cristal, u n flacon en cristal de roche avec une chaîne de verm eil e t u n e m o n tu re sertie de pierres précieuses, u n vase en verre contenant des inclusions décoratives en form e d e p a s­ tilles (probablem ent d 'o rig in e antique67), un olifant d'ivoire orné de m ontures d'argent.

Jacques LE MAHO C entre national de la recherche scientifique

67 La description d e l'objet év o q u e un type de vase à d é ­

cor de cabochons rapportés, caractéristique d es productions de Trêves au IVe siècle (exem ples hauts-N orm ands dans G. Senne- quier, Verrerie d'époque romaine, Collections des Musées départe­

mentaux de Seine-Maritime, Rouen 1985, p. 65, n° 41, et M. Remy-

W atte, Collections gallo-romaines du musée municipal de Fécamp, Fécamp, 1987, p. 40, n° 137).

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