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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Les bibliothèques scientifiques sont-elles encore utiles ?

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Academic year: 2021

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LES BIBLIOTHEQUES SCIENTIFIQUES

SONT-ELLES ENCORE UTILES?

Roger VIOVY

LIRESPT, Université Paris 7

MOTS-CLES: LIVRES - BIBLIOTHEQUES - CULTURE SCIENTIFIQUE.

RESUME:Lelivre scientifique est une donnée indispensable de la pensée et de la culture scientifique. Faceà la médiatisation les bibliothèques scientifiques doivent se transformer.

SUMMARY : The scientific book is a data necessarily linked to the scientific thought and culture. At a result of mediatisation, scientific libraries must to evolve.

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1. INTRODUCTION

Les problèmes d'information et de communication ont connu depuis quelques décennies de profondes transformations, et ces mutations ont bien entendu des répercussions sur la fabrication et l'utilisation des ouvrages scientifiques.

Face à une société fortement médiatisée nous somme submergés par une masse d'informations considérable, même dans des domaines où on ne le souhaiterait pas. Ces informations faites grâce à des méthodes à impact psychologique important (la "pub" ou les campagnes contre le SIDA sont là pour nous donner quelques exemples d'une tel "martelage psychologique") sont enregistrées on pourrait dire de gré ou de force. Elles encombrent notre mémoire qui se sature par de l'inutile ou de l'accessoire. Il devient extrêmement difficile de "filtrer".

Je me limiterai dans cette réflexion au cas du livre scientifique en excluant les revues et les manuels scolaires dont le rôle sera examiné par ailleurs au cours de ces journées.

Quel est donc aujourd'hui le rôle du livre scientifique? Force nous est de constater que d'une point de vue général le rôle du livre diminue. Face au nombre d'informations liées à la fois au développement des moyens de communication et au fait que tout événement est aujourd'hui répercuté à l'échelle de la planète, le livre scientifique est de moins en moins utilisé. Trois éléments principaux s'ajoutent aux remarques ci-dessus pour accélérer le phénomène:

- on n'a plus le temps de lire

- l'information du livre est figée et se périme très vite

- l'information dont on a besoin est souvent noyée dans des parties inutiles, d'où perte de temps, encombrement dela mémoire, et recherche systématique d'informations épuisées.

Faceà cette situation, la question de l'utilité des bibliothèques scientifiques doit être posée.

2. LA SITUAnON ACTUELLE

Les bibliothèques présentent leurs fonds sous forme de catalogues généralement accessibles sous fonne informatisée. Ces catalogues sont très souvent classés par noms d'auteurs, par grandes rubriques (pour la chimie par exemple, chimie organique ou chimie industrielle). Si la majorité des articles de revues sont souvent référencés par mots clés, c'est rarement le cas pour les livres scientifiques.

Il est très difficile de trouver des analyses succinctes des ouvrages indiquant le niveau de lecture et l'orientation des contenus. On doit feuilleter l'ouvrage et être entraîné à la lecture rapide si l'on veut se faire une idée du contenu.

Le lecteur se présentant dans une bibliothèque cherchant des informations sur un sujet donné correspondantà son niveau de culture doit passer beaucoup de temps pour trouver ce qu'il cherche et généralement prend le premier ouvrage qu'il trouve et qui n'est pas forcément le mieux adapté. D'autre part, partant du principe que les données scientifiques se périment vite, le lecteur recherche parmi les ouvrages les plus récents ce qui fait que, contrairement aux bibliothèques littéraires, les fonds anciens sont pratiquement morts.

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Les analyses d'ouvrages existent pounant ou ont existé. Lors du lancement d'un ouvrage, l'éditeur et/ou des groupes intéressés, sociétés, organismes de documentation (commeleCNRS) font une analyse de l'ouvrage, mais l'information se perd vite, elle est rarement répercutée au niveau des bibliothèques.

Enfin, dernière remarque: si des ouvrages de mises au point sur un sujet scientifique de pointe sont nombreuses, il en existe très peu de niveau intermédiaire, je dirais "pour un adulte cultivé" avec une bonne bibliographie permettant de s'orienter. Quant aux ouvrages de bonne vulgarisation scientifique, ils sont extrêmement rares. Le genre est considéré comme mineur par les auteurs (ni rentable intellectuellement, ni fmancièrement) par les éditeurs. TI faut reconnaître que rien n'est fait pour favoriser la culture scientifique. Cequi se passe au niveau media pour la langue français ne pourrait-il être fait pour la science?

3. QUEL PEUT ETRE LE RDLE DES LIVRES SCIENTIFIQUES?

Il n'est pas possible d'être exhaustif dans ce domaine mais je pense qu'il est nécessaire d'examiner quelques lignes directrices englobant les principaux domaines d'utilisation des ouvrages scientifiques. 3.1. Pour un spécialiste de recherche développement (chercheur, ingénieur...)

la documentation scientifique de son domaine lui est essentiellement fournie par les revues, l'utilisation de l'information devant être de plus en plus rapide. Cependant, il y a des domaines où le recours à des ouvrages scientifiques reste indispensable avec l'évolution divergente des domaines scientifiques, une mise au point s'avère souvent indispensable; les domaines de recherche et les méthodes utilisées doivent être changées souvent. La recherche ou la mise au point de nouveaux thèmes ou de nouvelles méthodes nécessitent toujours le recours à des ouvrages de référence, la bibliographie par articles de revue étant trop disparate pour se faire une idée raisonnable du domaine et en général les articles sont peu explicites sur les bases nécessaires et sur les méthodes expérimentales.

3.2. Pour ce que l'on pourrait appeler "l'adulte cultivé"

Pour le technicien, enseignant, et peut-être le journaliste scientifique, l'ouvrage scientifique devrait être la base de la culture. Cela nécessite des ouvrages adaptésàcet objectif, et d'autre part une miseàla portée du lecteur de l'information souvent très dispersée qui existe. Pour ce dernier point, il est souvent nécessaire de le faire dans des délais assez brefs pour répondreàune demande d'actualité.

3.3. Pour le grand public

Enfin, il reste un domaine très vaste sur lequel il existe très peu de chose, c'est la culture scientifique du grand public. Un grand effort doit être fait dans ce domaine.

En ayant mis en évidence les principales raisons d'être d'un ouvrage scientifique, on peut essayer de voir quelles devraient être les mutations nécessaires en dégageant pour chaque partie concernée: auteur, lecteur, communauté scientifique, bibliothèques, les principaux rôles des ouvrages.

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4. LES PRINCIPALES PARTIES CONCERNEES 4.1. L'auteur

Pourquoi écrit-on un ouvrage scientifique? En dehors de l'intérêt financier qui est très évident pour les manuels, beaucoup moins pour les ouvrages scientifiques que l'on peut appeler de référence. C'est généralement la nécessité de faire le point sur une question qui amène l'auteuràécrire. Pour des raisons professionnelles,ilpossède sur un sujet donné des connaissances assez larges. L'écriture de l'ouvrage lui pennet de faire le point sur ses connaissances et de les mettre à jour.

TI existe une autre motivation plus rare mais très intéressante, c'est la "gageure" vis- à- vis d'un sujet plus éloigné des préoccupations professionnelles mais pour lequel l'auteur trouve qu'il y a un "manque". Je citerai trois exemples:

- un ouvrage de géologie assez ancien mais qui a fait date, écrit par un spécialiste des reptiles;

- plus récemment l'ouvrage de Molécule la merveilleuse écrit par un spécialiste non satisfait de la façon dont on enseignait sa spécialité;

- enfm l'ouvrage de G. GUINIER sur la structure de la matière qui correspond dans un autre domaine aux mêmes préoccupations.

Mais ces exemples restent rares. Peu de scientifiques de renom écrivent pour l'information du grand public. Contrairement aux pays anglo-saxons, la vulgarisation scientifique est considérée comme un genre mineur qui, comme je l'ai déjà dit, ne rapporte riennifmancièrementniscientifiquement à celui qui l'écrit. En ces temps où la "pub" est reine il serait temps de lancer une campagne pour écrire des ouvrages d'infonnation et de formation du grand public et d'inciter le public à développer une culture scientifique d'une pauvreté extraordinaire dans le monde technologique où nous vivons.

4.2. Pou r le lecteur

Nous avons déjà esquissé plus haut les raisons qui amènent un lecteur dans une bibliothèque scientifique. Très généralement, c'est pour l'instant la nécessité de trouver des réponses à un sujet précis, très souvent à caractère professionnel. Beaucoup plus rarement, c'est la recherche d'un ou des ouvrages d'un auteur déterminé. En cela, il y a une opposition pratiquement totale avec la pratique d'une bibliothèquelittéraire.

De nouveaux besoins se font ou devraient se faire jour. Ce sont les recherches de données pratiques concernant les mutations technologiques et les événements scientifiques récents : problèmes d'environnement, d'utilisation de nouvelles technologies...

On conçoit que les catalogues de bibliothèques présentés par noms d'auteurs n'ont que peu d'intérêt pour la majorité des lecteurs potentiels.

4.3. Pour la communauté scientifique

Les bibliothèques constituent le dépôt de la pensée scientifique et non seulement des résultats consignés dans les articles de revues. Dans les ouvrages écritsilya toujours une intégration des données, une structuration de la pensée qui enrichissent considérablement les données brutes. Même si l'on peut regretter que les préfaces ne donnent plus comme au temps deBOVASSEune idée - même défonnée - sur la vie de la communauté scientifique, les ouvrages donnent une idée sur l'état de la science à un moment donné, avec ses écoles et ses marottes.

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5. QUELLES MODIFICATIONS APPORTER AUX BIBLIOTHEQUES ?

D'après l'analyse ci-dessus on voit que le lecteur va être amené à ouvrir les différents ouvrages dans les rayons (à condition qu'il y ait accès) pour rechercher le ou les livres répondantàla question qu'il se pose. La méthode est intéressante car elle ouvre en général des perspectives, elle permet au lecteur assidu de connaître le fond, mais elle est très coûteuse en temps et en dehors de l'utilisation fréquente d'une bibliothèque un peu spécialisée, elle est inapplicable pour les grandes bibliothèques générales.

Quelles solutions apporter? 11 est bien évident que sur un sujet aussi vaste il n'y a pas de solutions miracles et qu'il faut travailler par améliorations successives.

a.La cote de chaque ouvrage devrait comporter un signe indiquant le niveau d'approche. Par exemple:

*

tous publics

**

public ayant des notions de base

*

*

*

spécialiste

Ceci limite la perte de temps puisque le lecteur connaît le niveau d'approche de la question.

b.Une analyse immédiate (environ 112 page) scientifique et non critique doit être faite au moment de la mise en service de l'ouvrage. L'analyse doit comporter sinon des mots-clé tout au moins la référenceàdes classifications scientifiques retenuesparla bibliothèque.

c La classification en grands thèmes généralement retenue doit être maintenue, mais aujourd'hui la science évolue, la nature des différents domaines se modifie et surtout les frontières sont très floues. Chaque ouvrage devrait donc être référencé pour chaque chapitre concerné. Un "fantôme" comportant l'analyse pourrait être placé dans les rayons.

d La constitution des dossiers concernant des événements marquants de l'actualité scientifique serait extrêmement profitable. Ces dossiers pourraient comprendre, articles de presse et de revue, ouvrages concernant le sujet.

e.Bien entendu l'informatisation de l'information est indispensable.

f Enfin, essayer de diffuser au maximum l'information, dans les revues scientifiques ou par les canaux des medias nationaux ou régionaux. Des expositions devraient permettre de "lancer" des informations sur l'actualité ou des modifications importantes de la présentation.

6. CONCLUSION

L'analyse ci-dessus est loin d'être exhaustive.Les points que je voudrais signaler dans la conclusion sont les suivants:

-Les bibliothèques scientifiques constituent le dépôt d'une pensée scientifique non ponctuelle ayant intégré et épuré un grand nombre de connaissances scientifiques.

- Elles doivent opérer une mutation pour rendre mieux accessible l'information et surtout la diffuser. Nous essayons en ce moment avec la mediathèque de la Villette quelques améliorations dans le sens indiqué plus haut pour la chimie.

- On manque cruellement d'une littérature scientifique pouvant serviràdévelopper la culture scientifique du public.

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