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H
È
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S
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En vue de l'obtention du
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E
Délivré par l'Université Toulouse III - Paul Sabatier Discipline ou spécialité : Nanophysique
JURY
J-M. Broto Professeur, UPS, Toulouse, Président
C. Chappert Directeur de recherche CNRS, IEF, Orsay, Rapporteur O. Klein Ingénieur CEA Saclay, SPEC, Gif-Sur-Yvette, Rapporteur
S. Dubourg Ingénieur CEA Le Ripault, LMMO, Monts J-F. Bobo Directeur de recherche CNRS, LNMH-ONERA, Toulouse
F. Boust Ingénieur, DEMR-ONERA, Palaiseau
Ecole doctorale : Sciences de la Matière
Unité de recherche : Laboratoire de NanoMagnétisme pour l'Hyperfréquence (CNRS/CEMES - ONERA/DEMR)
Directeur(s) de Thèse : J-F Bobo Rapporteurs : C. Chappert, O. Klein
Présentée et soutenue par Maxime LAVAL Le 04 décembre 2008
Titre :
Observation et modélisation de micro et nanostructures magnétiques excitées par microondes
THESE
pr´esent´ee en vue de l’obtention du
DOCTORAT
de l’universit´e Paul Sabatier Toulouse 3 Sp´ecialit´e : Nanophysique
Pr´esent´ee et soutenue par
Maxime Laval
Observation et mod´
elisation du
comportement de micro et
nanostructures magn´
etiques excit´
ees
par microondes en vue d’une
application capteur.
Date de soutenance : 4 d´
ecembre 2008
Pr´esident J-M. Broto Professeur, UPS, Toulouse
Rapporteurs C. Chappert Directeur de recherche CNRS, IEF, Orsay O. Klein Ing´enieur CEA Saclay, SPEC, Gif-Sur-Yvette Examinateur S. Dubourg Ing´enieur CEA Le Ripault, LMMO, Monts
Directeurs J-F. Bobo Directeur de recherche CNRS, LNMH-ONERA, Toulouse F. Boust Ing´enieur, DEMR-ONERA, Palaiseau
3
Remerciements
Cette th`
ese est le fruit dˇ
Sune collaboration entre le Laboratoire de
Nanoma-gn´
etisme pour l’Hyperfr´
equence (LNMH) et le D´
epartement Electro-Magn´
etisme
et Radar (DEMR) de l’ONERA. Je remercie donc l’ensemble des personnes
ayant contribu´
e `
a la d´
efinition et au soutien de ce projet, Emmanuel
Rosen-cher, Florent Christophe, Jean-Philippe Parmentier.
Je tiens `
a remercier mon directeur de th`
ese Jean-Fran¸cois Bobo de sa patience,
de sa disponibilit´
e pour r´
epondre `
a mes demandes sur ce sujet totalement
nou-veau et de l’accueil chaleureux qu’il m’a r´
eserv´
e au sein du LNMH. Lors de
mon arriv´
ee, Ulrike L¨
uders faisait ´
egalement partie de l’´
equipe, je la remercie
de sa bonne humeur et de son soutien. Je remercie son successeur, Jean-Jacques
Bonnefois qui m’a apport´
e une aide pr´
ecieuse durant les quelques mois qu’il a
pass´
es au LNMH. Un grand merci `
a Isabelle Seguy et Pierre-Emmanuel Cau
pour les moments de discussions essentiels au bon d´
eroulement dˇ
Sune th`
ese.
Je tiens particuli`
erement `
a remercier Fabrice Boust pour son soutien moral
et scientifique qui a ´
et´
e d’un grand secours dans les moments difficiles. Merci
`
a Fran¸cois Issac, pour tout le savoir-faire qu’il a partag´
e avec moi ainsi que sa
disponibilit´
e malgr´
e un emploi du temps plus que charg´
e. Je remercie le groupe
NanoMat du CEMES pour le prˆ
et de mat´
eriel et la sympathie de ses membres.
Je souhaite ´
egalement remercier les personnalit´
es qui ont accept´
e de faire partie
de mon jury, Jean-Marc Broto, Olivier Klein, Claude Chappert et S´
ebastien
Dubourg.
Pour terminer, je tiens `
a remercier tout mes amis et ma famille qui m’ont
soutenu durant ces trois ans.
Un grand merci `
a tous...
Sommaire
I
Introduction g´
en´
erale
11
II
Contexte scientifique
15
1 Le magn´etisme des couches minces 17
1.1 Les ´energies du magn´etisme . . . 17
1.1.1 Energie d’´´ echange et temp´erature de Curie . . . 17
1.1.2 Energie dipolaire . . . .´ 18
1.1.3 Energie d’anisotropie magn´´ eto-cristalline . . . 20
1.1.3.1 Anisotropie uniaxiale . . . 20
1.1.3.2 Anisotropie cubique . . . 20
1.1.3.3 Cas des films minces de N iF e . . . 21
1.1.4 Energie Zeeman . . . .´ 21
1.2 Les domaines magn´etiques . . . 21
1.2.1 Les parois de domaines . . . 22
1.3 Les m´ecanismes de retournement de l’aimantation . . . 24
1.3.1 Le mod`ele Stoner-Wohlfarth (S&W ) . . . 24
1.3.2 Champ de nucl´eation et retournement non-uniforme . . . 25
1.3.3 Le retournement pr´ecessionnel . . . 26
1.4 La dynamique de l’aimantation . . . 27
1.4.1 Equation Landau-Lifshitz-Gilbert (LLG) . . . 27
1.4.2 Susceptibilit´e et r´esonance ferromagn´etique . . . 27
1.4.2.1 Susceptibilit´e . . . 27
1.4.2.2 R´esonance ferromagn´etique . . . 28
1.4.3 Mode uniforme . . . 29
1.4.4 Effet non-lin´eaire . . . 29
1.5 Les couches minces et micro/nanostructures . . . 30
2 La probl´ematique capteur de champ magn´etique 33 2.1 Les capteurs de champ magn´etiques . . . 34
2.2 Principe de fonctionnement . . . 35
2.2.1 Principe de fonctionnement . . . 35
2.2.2 Processus de d´etection . . . 36
2.3 Contribution de ce travail de th`ese `a la probl´ematique capteur . . . 37 5
III
M´
ethodes exp´
erimentales et caract´
erisation
39
3 Techniques d’´elaboration 41
3.1 Croissance de couches minces par pulv´erisation cathodique . . . 41
3.1.1 Le principe de fonctionnement . . . 41
3.1.2 Les bˆatis de pulv´erisation . . . 42
3.1.3 Les couches r´ealis´ees . . . 43
3.2 Photolithographie . . . 44
3.2.1 Le principe . . . 44
3.2.2 Nos ´echantillons . . . 45
4 Mesures magn´etiques statiques 47 4.1 Mesures magn´eto-optiques . . . 47
4.1.1 L’effet Kerr magn´eto-optique . . . 47
4.1.1.1 G´eom´etrie de l’effet Kerr . . . 48
4.1.1.2 Formalisme de J ones . . . 48
4.1.1.3 Rotation et ellipticit´e . . . 49
4.1.2 Le banc de mesure . . . 50
4.1.3 Les mesures . . . 51
4.2 Le microscope `a effet Kerr . . . 52
4.2.1 Le microscope . . . 53
4.2.2 Le contraste magn´eto-optique . . . 54
4.2.2.1 D´efinition du contraste . . . 56
4.3 PPMS-VSM . . . 56
4.3.1 Le PPMS . . . 56
4.3.2 Mesure de l’aimantation `a saturation . . . 56
5 Mesures magn´etiques dynamiques 59 5.1 Perm´eam´etrie . . . 59
5.1.1 Le principe . . . 59
5.1.2 Les mesures . . . 60
5.2 Cellule microondes magn´eto-optique (CMMO) . . . 63
5.2.1 G´en´eration de micro-ondes . . . 63
5.2.2 L’´echauffement . . . 64
IV
Synth`
ese des r´
esultats et discussions
67
6 Le mod`ele macrospin 71 6.1 Cadre des simulations . . . 726.1.1 Les champs en pr´esence . . . 72
6.1.2 Les ´energies du syst`eme . . . 72
6.2 R´esultats obtenus pour le macrospin . . . 73
6.2.1 Caract´erisation . . . 74
6.2.1.1 Analyse statique . . . 74
SOMMAIRE 7
6.2.2 Retournement de l’aimantation assist´e par microondes . . . 77
6.2.2.1 Protocole . . . 77
6.2.2.2 Cartographies de HC,rf . . . 77
6.2.2.3 Vitesse de retournement de l’aimantation . . . 82
7 Micromagn´etisme 85 7.1 Pr´esentation . . . 85
7.2 Les choix num´eriques de OOMMF . . . 85
7.2.1 Les termes num´eriques . . . 85
7.2.2 Evolution temporelle . . . 87
7.3 Calculs statiques - ´Etats d’´equilibres . . . 87
7.3.1 Introduction . . . 87
7.3.2 Configuration num´erique . . . 87
7.3.3 Etat d’´´ equilibre des structures. . . 88
7.3.4 Champs coercitifs . . . 89
7.4 Calculs dynamiques . . . 90
7.4.1 Calcul de la perm´eabilit´e magn´etique . . . 91
7.4.2 Influence d’une excitation sur le champ coercitif . . . 92
7.4.2.1 Protocole . . . 92
7.4.2.2 Rectangle 1024×256 nm2 . . . . 92
7.4.2.3 Rectangle 1024×128 nm2 . . . 93
7.5 Vitesse de retournement de l’aimantation . . . 94
8 R´esultats exp´erimentaux 99 8.1 D´esaimantation par impulsions submicroseconde . . . 99
8.1.1 Proc´edure exp´erimentale . . . 100
8.1.2 R´esultats et discussions . . . 101
8.1.2.1 Le carr´e de 100 × 100 µm2 . . . 101
8.1.2.2 Les rectangles . . . 103
8.2 Retournement assist´e par microondes . . . 104
8.2.1 Proc´edure exp´erimentale . . . 104
8.2.2 Cartographies du champ coercitif . . . 105
8.2.2.1 R´eseau de plot 8/20 . . . 106
8.2.2.2 R´eseau de plot 8/10 . . . 107
8.2.3 Conclusion . . . 108
9 Discussion 111 9.1 Confrontation des approches . . . 111
9.1.1 Les grandeurs statiques . . . 111
9.1.2 Les grandeurs dynamiques . . . 112
9.1.3 Bilan . . . 112
V
Conclusion g´
en´
erale
115
Bibliographie 119
VI
Annexes
125
A Couches P t/Co/P t/IrM n 127
A.1 Introduction . . . 127
A.2 Proc´edure exp´erimentale . . . 127
A.3 R´esultats . . . 128
A.4 Conclusion . . . 129
B Traitement du d´ecalage sub-pixel 135 B.1 Introduction . . . 135
B.2 M´ethode de d´etermination du d´ecalage . . . 136
B.3 M´ethode de soustraction . . . 136
SOMMAIRE 9
R´
esum´
e de la th`
ese
Ces derni`eres d´ecennies, l’´etude de micro et nanostructures magn´etiques a connu une forte progression, notamment grˆace la magn´etor´esistance g´eante d´ecouverte par Albert Fert (1988). Les applications de pr´edilections de ce domaine du magn´etisme sont principalement les capteurs magn´etiques et le stockage sur support magn´etique. Or ce travail ne s’inscrit pas dans cette ligne, mais dans un domaine nouveau et peu explor´e qui est celui de la m´etrologie du champ magn´etique hyperfr´equence de forte puissance dans les applications microondes et radar. Dans cette th`ese, nous avons ´etudi´e l’interaction qui peut exister entre une excitation hyperfr´equence et un syst`eme magn´etique micro/nano-structur´e. Ce travail se d´ecompose en une partie th´ eo-rique appuy´ee par la simulation et une partie exp´erimentale allant de l’´elaboration `a l’´etude des structures magn´etiques.
Afin d’approcher le comportement d’une structure magn´etique soumise `a une excitation mi-croonde, nous avons proc´ed´e `a des mod´elisations num´eriques. La premi`ere s’appuie sur le mod`ele du macrospin g´en´eralement utilis´e pour l’´etude du comportement de structures de tr`es petites tailles (la dizaine de nanom`etres). Nous avons poursuivi nos mod´elisations en utilisant le code de micro-magn´etisme bien connu OOMMF pour simuler des structures d’une taille avoisinant le microm`etre. Contrairement au mod`ele macrospin, ce code tient compte de l’existence et de l’apparition de parois lors du retournement de l’aimantation. Dans les deux cas, l’excitation hyperfr´equence de forte puissance provoque deux effets : une r´eduction du champ coercitif et la diminution de la fr´equence de r´esonance.
La partie exp´erimentale a consist´e `a l’´elaboration de diff´erentes structures magn´etiques de tailles microm´etriques, puis leur caract´erisation statique et fr´equentielle afin de s´electionner les plus aptes `a r´epondre `a une excitation hyperfr´equence donn´ee. L’´etude de ces structures en pr´esence d’une excitation par des m´ethodes magn´eto-optiques a montr´e des comportements proches de ce que montrent les simulations bien que les ordres de grandeur diff`erent en g´en´eral.
Les diff´erents r´esultats montrent clairement qu’une excitation hyperfr´equence modifie le com-portement des structures magn´etiques et qu’il est possible d’utiliser une telle excitation pour retourner l’aimantation des ces mˆemes structures dans des conditions particuli`eres. Cependant, l’effet de l’excitation est fortement d´ependant de l’orientation spatiale des champs en pr´esence et rend la quantification de l’excitation difficile. De plus, les m´ethodes magn´eto-optiques de lecture de l’information magn´etique sont peu adapt´ees `a une utilisation `a grande ´echelle. Des travaux compl´ementaires sont n´ecessaires avant d’envisager une application `a la m´etrologie hyperfr´equence.
Premi`
ere partie
Introduction g´
en´
erale
13
Cette th`ese, en physique et nanophysique, est orient´ee vers l’´electromagn´etisme, le microma-gn´etisme et plus largement sur la mod´elisation, l’´elaboration et l’´etude de micro et nanostruc-tures magn´etiques. Ce domaine du nanomagn´etisme, coupl´e `a celui de la spintronique, a connu de rapides progr`es durant les deux derni`eres d´ecennies avec notamment la d´ecouverte de la magn´etor´esistance g´eante et les effets de filtrage de spin [1, 2]. Le domaine traditionnel d’appli-cations des micro et nanostructures magn´etiques est celui des capteurs magn´etiques (capteurs de position, de flux...) et des technologies de stockage de donn´ees sur support magn´etiques (disques durs, tˆetes de lecture, m´emoires monolithiques MRAM...).
Or ce travail ne s’inscrit pas dans cette ligne, mais dans un domaine nouveau et peu explor´e qui est celui de la m´etrologie du champ magn´etique hyperfr´equence dans les applications mi-croondes et radar.
Cette th`ese a ´et´e r´ealis´ee au LNMH, Laboratoire de Nano Magn´etisme pour l’Hyperfr´equence, nouveau laboratoire fond´e en 2004-2005 sur le partenariat entre une ´equipe de chercheurs CNRS experts en magn´etisme, couches minces, multicouches et nanostructures magn´etiques, et les chercheurs du DEMR (D´epartement d’Electromagn´etisme et Radar) de l’ONERA `a Toulouse. Le DEMR est sp´ecialis´e, entre autres dans la m´etrologie microondes et la mod´elisation de sys-t`emes complexes (cellules d’avion, autres v´ehicules, syst`emes embarqu´es...) en vue de solutions CEM (Compatibilit´e Electro Magn´etique).
L’objectif initial de la th`ese entre dans le domaine de la CEM. A l’heure actuelle, avec la multiplication des syst`emes de communication sans fils, de surveillance de l’espace et la d´ emo-cratisation de dispositifs communicants en tous genres, nous assistons `a une invasion incessante des ondes ´electromagn´etiques (ondes EM) dans notre environnement (certains parlent mˆeme de pollution ´electromagn´etique de notre plan`ete). Les interf´erences entre ondes, les agressions de certains composants sensibles, peuvent provoquer des d´efaillances pour certains ´equipements. L’ensemble des ph´enom`enes et probl`emes li´es `a l’interaction entre les ondes EM et les dispositifs ´
electroniques est regroup´e sous l’appellation de Compatibili´e Electromagn´etique ou CEM. Les probl`emes de CEM sont devenus un enjeu majeur dans un grand nombre de secteurs d’activit´es, allant des t´el´ecommunications aux moyens de transport, terrestres ou a´erospatiaux.
L’une des tˆaches principales des ´etudes CEM consiste `a mod´eliser et mesurer l’intensit´e des ondes ´electromagn´etiques en tout point d’une structure. Le DEMR a acquis depuis plusieurs ann´ees une expertise reconnue en la mati`ere. Du point de vue exp´erimental, l’ONERA a d´ eve-lopp´e et brevet´e une technique originale et performante de cartographie d’intensit´e EM bas´ee sur le couplage entre un film l´eg`erement conducteur et une onde EM. Cette technique, appel´ee EMIR (Electro Magn´etique et Infra Rouge) [3], consiste `a mesurer par thermographie infra-rouge (donc sans contact), l’´echauffement par effet Joule d’une membrane polym`ere m´etallis´ee plac´ee dans la zone `a ´etudier en CEM. La r´esolution en temp´erature d’EMIR atteint quelques mK, et permet donc de mesurer des champs ´electriques de quelques dizaines de V/m. Avec la cr´eation du LNMH, l’id´ee de d´evelopper une technique optique de mesure de la composante magn´etique de l’onde EM a ´et´e avanc´ee. La technique `a d´evelopper serait donc compl´ementaire d’EMIR et permettrait d’estimer l’intensit´e du champ magn´etique hyperfr´equence au voisinage des surfaces (lorsqu’une onde EM atteint une surface m´etallique, comme un fuselage, la com-posante magn´etique devient pr´epond´erante, du fait des courants de surface g´en´er´es).
Le LNMH ´etant sp´ecialis´e dans l’´etude de propri´et´es magn´etiques par des m´ethodes magn´ eto-optiques (effet Kerr), il a ´et´e envisag´e de d´evelopper un capteur bas´e sur cet effet. D’un point de vue applicatif, cette th`ese vise donc `a s’assurer de la validit´e du concept d’un tel capteur.
Le travail de th`ese a donc adopt´e la d´emarche suivante :
– Tout d’abord, d’un point de vue fondamental, la mod´elisation de syst`emes magn´etiques prototypes, soumis `a des excitations microondes, est pr´esent´ee. Elle permet de mieux cerner les grandeurs mises en jeu et le comportement de syst`emes r´eels.
– Dans un second temps, des r´eseaux d’´el´ements magn´etiques ´elabor´es par techniques de d´epˆot et photolithographie sont pr´esent´es et ´etudi´es dans le mˆeme contexte que les simu-lations.
Il est `a noter que l’approche est ici multi-´echelles, en effet, les moyens de mod´elisation num´erique micromagn´etique disponibles `a ce jour sont incapables de mod´eliser le comportement de gros objets (typiquement quelques dizaines `a quelques centaines de microns de cˆot´e), alors que les moyens technologiques mis `a notre disposition ne permettent pas, eux, d’´elaborer et d’´etudier des syst`emes submicroniques.
La structure de ce manuscrit se d´ecompose donc en trois grandes parties. La premi`ere partie est introductive, avec une pr´esentation du contexte g´en´eral et des formalismes utilis´es. La seconde partie d´etaille les outils scientifiques utilis´es pour ce travail, `a la fois en mod´elisation et exp´erience. La quatri`eme partie est consacr´ee `a l’expos´e des r´esultats et `a leur discussion.
Deuxi`
eme partie
Contexte scientifique
Chapitre 1
Le magn´
etisme des couches minces
Les propri´et´es des mat´eriaux magn´etiques font l’objet d’´etudes depuis plusieurs si`ecles. Au d´epart ´etudi´es dans leur ´etat massif, ces mat´eriaux se sont progressivement vus d´eclin´es sous diverses g´eom´etries. L’arriv´ee de nouveaux proc´ed´es de fabrication a permis l’apparition des couches minces puis ultra-minces (quelques couches atomiques), puis la structuration d’´el´ e-ments discrets aujourd’hui `a l’´echelle nanom´etrique. Les nouvelles propri´et´es ainsi r´ev´el´ees sont toujours l’objet d’´etudes approfondies et ont apport´e de nombreuses applications. Ces d´ ecou-vertes, par exemple la magn´eto-r´esistance g´eante [1] ou spintronique, sont `a l’origine de l’essor des technologies de stockage de donn´ees li´ees au magn´etisme. L’enjeu principal de ces recherches repose sur la miniaturisation et la rapidit´e de ces dispositifs.
Nous allons donc dans ce chapitre rappeler les diff´erentes ´energies, le comportement dynamique et les m´ecanismes de retournement de l’aimantation des mat´eriaux magn´etiques. Un int´erˆet plus particulier sera port´e aux couches minces micro ou nanostructur´ees qui sont le principal objet des travaux pr´esent´es dans ce manuscrit.
1.1
Les ´
energies du magn´
etisme
1.1.1
Energie d’´
´
echange et temp´
erature de Curie
Nous savons aujourd’hui que l’´energie d’´echange a une origine microscopique et trouve son explication dans la m´ecanique quantique. Cette ´energie est responsable de l’ordre magn´etique pr´esent dans les mat´eriaux et explique l’aimantation spontan´ee des mat´eriaux dit ferromagn´ e-tiques. Les premiers travaux apportant une explication satisfaisante de ce comportement furent men´es par Weiss en 1907 [4]. Il part de l’hypoth`ese selon laquelle il existe au sein de la mati`ere une interaction provoquant un alignement des diff´erents moments magn´etiques qu’il repr´esente par un « champ mol´eculaire ». Ce mod`ele lui permet de retrouver les propri´et´es essentielles des ferromagn´etiques.
C’est en 1928, qu’Heisenberg montre que cette interaction `a une origine quantique. Elle s’ex-plique par le principe d’exclusion de Pauli et est de nature coulombienne [5]. Sans entrer dans
les d´etails, il suffit d’admettre l’existence d’une force proportionnelle `a ~Si. ~Sj visant `a aligner le
spin de deux atomes ou ions voisins. L’´energie d’´echange s’exprime donc :
Eech = − i6=j
X
i,j
JijS~i. ~Sj (1.1)
o`u Jij est l’´energie d’´echange et peut prendre une valeur :
– positive : les spins s’alignent parall`element, nous sommes en pr´esence d’un mat´eriau fer-romagn´etique.
– n´egative : les spins s’ordonnent de fa¸cons anti-parall`ele, il en r´esulte les mat´eriaux ferri-magn´etiques et antiferromagn´etiques.
Il est important de rappeler que cette interaction est de tr`es courte port´ee et est n´egligeable au-del`a de deux `a trois distances interatomiques.
L’ordre magn´etique pr´esent dans les mat´eriaux ferromagn´etiques entre directement en concur-rence avec l’agitation thermique. Il existe donc une temp´erature TC, dite de Curie, au-del`a de
laquelle l’effet de la temp´erature devient plus important que l’ordre impos´e par l’interaction d’´echange (figure1.1). Le mat´eriau perd son aimantation et devient paramagn´etique. Ainsi l’ai-mantation est maximale pour une temp´erature de 0 K. La loi de Curie donne l’´evolution de la susceptibilit´e magn´etique en fonction de la temp´erature :
χ = M
H =
C T − TC
(1.2) o`u M est l’aimantation induite par le champ H et C est la constante de Curie relative au mat´eriau consid´er´e.
1.1.2
Energie dipolaire
´
Lorsqu’un ´echantillon est plong´e dans un champ ext´erieur ou qu’il pr´esente une aimantation uniforme, il se comporte comme un « dipˆole magn´etique » 1 (figure 1.2), par analogie avec
l’´electrostatique. Ce dipole est `a l’origine d’un champ dit d´emagn´etisant ou dipolaire, pr´esent `
a l’int´erieur du mat´eriau, not´e ~HD et oppos´e `a l’aimantation. Il s’´ecrit :
~
Hd = − ˆN . ~M . (1.3)
o`u ˆN est le tenseur de coefficients d´emagn´etisants sans dimensions. La cons´equence directe de l’existence de ~HD est que le champ interne d’un mat´eriau s’´ecrit alors :
~
Hint= ~Hext+ ~Hd= ~Hext− ˆN . ~M . (1.4)
La densit´e d’´energie dipolaire associ´ee `a ~Hd s’´ecrit :
ed= −
µ0
2 M . ~~ Hd. (1.5)
1Ceci est vrai dans le cas d’une observation `a une grande distance de l’´echantillon. Seul les ´echantillons
1.1. LES ´ENERGIES DU MAGN ´ETISME 19
Fig. 1.1 – Repr´esentation de la loi de Curie-Weiss pour diff´erents mat´eriaux `a base de fer.
et porte aussi le nom d’´energie d´emagn´etisante. Dans le cas d’un ellipso¨ıde uniform´ement ai-mant´e, le champ d´emagn´etisant est uniforme sur l’ensemble de la particule. ˆN peut alors ˆetre exprim´e par une tenseur diagonal [6] et s’´ecrit :
ˆ N = Nx 0 0 0 Ny 0 0 0 Nz (1.6)
La valeur des coefficients d´emagn´etisants d´epend de la forme g´eom´etrique de l’´echantillon et la relation Nx+ Ny+ Nz = 1 doit ˆetre v´erifi´ee. Dans le cas d’un film mince de dimension infinie,
nous aurons Nx = Ny = 0 et donc Nz = 1 et l’´energie devient alors :
ed = −
µ0
2 M
2
Scos2θ , (1.7)
o`u θ est l’angle entre ~Hd et ~M . Avec cet exemple, il est facile de comprendre pourquoi cette
anisotropie est aussi appel´e anisotropie de forme dans ce type de configuration. En effet, c’est elle qui favorise l’alignement de l’aimantation avec l’axe le plus long de l’´echantillon puisque le champ d´emagn´etisant est maximum selon les faibles dimensions.
Fig. 1.2 – Aimantation et champ d´emagn´etisant d’un ellipso¨ıde uniform´ement aimant´e.
1.1.3
Energie d’anisotropie magn´
´
eto-cristalline
L’anisotropie magn´eto-cristalline a principalement pour origine le couplage spin-orbite2, c’est
`
a dire une liaison entre la sym´etrie des orbitales ´electroniques portant le moment magn´etique et la structure cristallographique. L’aimantation sera donc plus facile `a aligner suivant certains axes du r´eseau cristallin. Un terme ´energ´etique permet de repr´esenter cette d´ependance angulaire. Les ´energies magn´eto-cristallines sont toujours ´ecrites sous leur forme ph´enom´enologique, en s´eries de puissance en fonction de la sym´etries du cristal. La valeur des coefficients est obtenue par l’exp´erience. Nous observons principalement deux cas.
1.1.3.1 Anisotropie uniaxiale
Cette anisotropie se retrouve dans les cristaux hexagonaux (Co), le long de l’axe c. L’expres-sion de cette ´energie est :
eu = −K1cos2θ + K2cos4θ = −K1m2z+ K2m4z (1.8)
o`u θ est l’angle entre l’axe c et la direction de l’aimantation, mz est la composante selon
l’axe z (parall`ele `a l’axe c) du vecteur ~m = M~
| ~M | et K1 et K2 sont les coefficients d’anisotropie
d´ependant de la temp´erature. Les valeurs de ces coefficients sont tir´ees de l’exp´erience. Il est possible d’exprimer Eu `a des ordres plus ´elev´es, mais dans la plupart des cas mˆeme K2 est
n´egligeable. Le tableau 1.1 pr´esente quelques valeurs de coefficients d’anisotropie.
1.1.3.2 Anisotropie cubique
Dans le cas de cristaux cubiques (F e, N i), les axes x, y, et z ´etant choisis le long des axes du cristal, l’expression de l’´energie est la suivante :
ec = K1(m2xm 2 y+ m 2 ym 2 z+ m 2 zm 2 x) + K2m2xm 2 ym 2 z (1.9)
o`u K1 et K2 sont toujours les coefficients d’anisotropie (tableau 1.1) d´ependant de la temp´
era-ture et mx, my et mz les composantes du vecteur ~m = ~ M | ~M |.
2Ceci est vraie dans le cas d’une sym´etrie cubique. Pour des r´eseau non-cubique, cette anisotropie a aussi
1.2. LES DOMAINES MAGN ´ETIQUES 21
Fe (cc) Co (hcp) Ni (cfc) N i80F e20 N i85F e15
K1(J.m−3) 4,81×106 4,12×107 -5,48×105 0 -1,5×103
K2(J.m−3) 1,2 ×104 1,43×107 -2,47×105 -1,5×103 -1,5×103
Tab. 1.1 – Coefficients d’anisotropie magn´eto-cristalline du fer du cobalt et du nickel massifs `
a temp´erature ambiante [7, 8].
1.1.3.3 Cas des films minces de N iF e
Les films minces pr´esentent une anisotropie de forme induite (voir 1.1.2). L’´etude de cet effet ´
etait particuli`erement populaire dans les ann´ees cinquante et soixante alors que bon nombre d’exp´eriences portaient sur la r´ealisation de couches minces, en particulier avec des alliages `a base de N i et F e. Il fut alors d´ecouvert que lorsqu’un film ´etait d´epos´e en pr´esence d’un fort champ magn´etique ou avec un angle entre le flux incident et le substrat, une anisotropie de la forme de l’´equation 1.8 apparaissait. En revanche, l’origine de cette anisotropie uniaxiale reste encore floue [9, 10].
De plus, ces alliages ont la particularit´e d’ˆetre polycristallins, c’est `a dire compos´es d’une assembl´ee de plusieurs petits cristaux dont les axes sont orient´es al´eatoirement. Ces cristaux pr´esentent une anisotropie cubique dont l’axe facile est lui aussi orient´e al´eatoirement. L’aniso-tropie al´eatoire due `a la morphologie polycrystalline porte le nom de « ripple ». Cette structure montre une variation locale de l’aimantation des domaines magn´etiques autour de l’axe facile principal de la couche [11]. Pourtant, les alliages N iF e poss`edent une anisotropie uniaxiale lorsqu’ils sont pr´epar´es dans certaines conditions de laminage ou de croissance sous champ magn´etique.
1.1.4
Energie Zeeman
´
Elle repr´esente l’interaction entre le champ ext´erieur appliqu´e ~Hext et l’aimantation du
ma-t´eriau. Son expression volumique est :
eZ = −µ0M . ~~ Hext (1.10)
Il s’agit donc de l’interaction qui tend `a aligner l’aimantation avec le champ ext´erieur.
1.2
Les domaines magn´
etiques
La fa¸con la plus simple de comprendre ce que sont les domaines magn´etiques est de les ob-server directement (figure 1.3). D’une fa¸con plus g´en´erale, un domaine magn´etique est d´efini comme ´etant une r´egion `a l’int´erieur d’un mat´eriau magn´etique pr´esentant une aimantation uniforme. Un mat´eriau pr´esente g´en´eralement une multitude de domaines avec diverses orien-tations.
qui a ´et´e sous-estim´e pendant longtemps. La minimisation de l’´energie dipolaire se fait alors par la cr´eation de domaines. C’est la mise en ´evidence des sauts de l’aimantation qui permet de comprendre l’existence du d´eplacement d’une paroi entre deux domaines d’aimantation oppos´ee [12, 13, 14]. Bloch ´etudie th´eoriquement la structure de ces parois [15] et montre que la fronti`ere entre deux domaines ´el´ementaires n’est pas une transition brutale mais au contraire s’´etend sur une certaine ´epaisseur. Mais il faudra attendre 1935 avec les travaux de Landau et Lifshitz [16] pour comprendre l’origine des domaines observ´es. Ils montrent alors qu’une structure en domaines est plus rentable en ´energie qu’un ´etat uniform´ement aimant´e, notamment grˆace aux domaines de fermeture.
Fig. 1.3 – Images de domaines magn´etiques r´ealis´ees par m´ethodes magn´eto-optiques par le Leibniz Institute for Solid State and Materials Research Dresden.
1.2.1
Les parois de domaines
Les trois contributions principales `a l’´energie totale qui conduisent `a l’existence de structures multidomaines sont :
– l’´energie d’´echange qui tend `a aligner deux spins voisins,
– l’´energie d’anisotropie cristalline qui tend tend `a aligner l’aimantation sur les directions cristallographiques,
– l’´energie dipolaire d´ependante de la g´eom´etrie de l’´echantillon.
La largeur des parois ainsi que leur ´energie sont d´efinies par la comp´etition entre l’´energie d’´echange et l’´energie magn´eto-cristalline. La taille des domaines est fix´ee par l’´energie magn´ e-tostatique qui diminue avec l’apparition de domaines et l’´energie de parois proportionnelle au nombre de domaines.
Les parois `a 180◦ s´eparent deux domaines de direction oppos´ee, ce sont les plus simples. Leur largeur est WL = πpA/K et leur ´energie γL= 4
√
AK avec A la constante d’´echange et K la constante d’anisotropie. Il s’agit l`a de premi`eres approximations. La largeur des parois pr´esente diff´erentes d´efinitions r´esultant des diff´erents modes de rotation de l’aimantation dans la paroi. La relation donn´ee pr´ec´edemment correspond `a une variation uniforme de l’angle entre deux moments de l’aimantation, c’est le mod`ele de Lilley[17].
1.2. LES DOMAINES MAGN ´ETIQUES 23
Fig. 1.4 – a. Parois de Bloch ; b. Parois de N´eel ; c. Configuration en domaine de fermeture.
Fig. 1.5 – Paroi `a 180◦ pr´esentant une structure « cross − tie ».
– Les parois de Bloch apparaissent dans les mat´eriaux massifs ainsi que dans les couches minces pr´esentant une ´epaisseur minimale (environ 90 nm pour du Permalloy). Elles cor-respondent `a une rotation dans laquelle l’´energie est minimis´ee en ´evitant de cr´eer des charges magn´etiques. Ceci impose une rotation de l’aimantation perpendiculaire `a la nor-male de la paroi (figure 1.4.a).
– Les parois de N´eel n’apparaissent que dans les films minces de tr`es faible ´epaisseur (figure 1.4.b). Leur existence est li´ee `a l’augmentation de l’´energie d´emagn´etisante cr´e´ee par les parois de Bloch lorsque l’´epaisseur du film est comparable `a celle de la paroi. La structure propos´ee par N´eel [18] est alors plus rentable ´energ´etiquement.
En fait la r´ealit´e est moins contrast´ee, notamment dans les couches minces, les parois comportent une partie de type Bloch `a coeur et un partie de type N´eel en surface. Par ailleurs, pour des ´
epaisseurs situ´ees entre 35 et 90 nm, il apparaˆıt une structure interm´ediaire appel´e « cross − tie ». Il s’agit d’une parois de N´eel entrecoup´ees de ligne de Bloch (figure 1.5).
Il existe aussi aussi des parois `a 90◦ pr´esentes lors de l’application d’un champ perpendicu-laire `a l’axe facile ou dans le cas des domaines de fermeture se formant pour canaliser les lignes de champ `a l’int´erieur d’un cristal (figure 1.4.c). De plus, des anisotropies cubique ou planaire peuvent engendrer de parois avec des angles divers. Par exemple, des parois `a 109◦ sont ob-servables dans le nickel. Il est possible de trouver des informations d´etaill´ees sur les diff´erentes parois de domaines dans l’ouvrage de Hubert et Sch¨afer [19].
1.3
Les m´
ecanismes de retournement de l’aimantation
Le retournement de l’aimantation est un domaine tr`es ´etudi´e, notamment avec l’essort des technologies de stockage sur support magn´etique. Pourtant, les m´ecanismes mis en jeu lors du retournement sont vari´es et complexes.
1.3.1
Le mod`
ele Stoner-Wohlfarth (S&W )
Ce mod`ele simple mais performant et instructif est bas´e sur une rotation coh´erente de l’ai-mantation [20]. Il s’applique donc `a des syst`emes de faible taille dans lesquels l’aimantation est maintenue uniforme par l’´energie d’´echange. L’´energie d’´echange est alors consid´er´ee comme constante et n’entre pas en compte pour la minimisation de l’´energie totale. Cette derni`ere, dans le cas d’un syst`eme `a anisotropie uniaxiale, est donn´ee par :
etot(θ) = Kusin2θ − µ0HextMScos(θ − φ) (1.11)
o`u K est la constante d’anisotropie, θ l’angle entre l’axe d’anisotropie et l’aimantation et φ l’angle entre l’axe d’anisotropie le champ appliqu´e. Il est alors int´eressant de regarder l’allure des courbes d’´energie en fonction de l’angle θ et de Hext (figure 1.6). Nous voyons que lorsque le
champ ext´erieur est nul, il y a deux minima de mˆeme ´energie pour les angles θ = 0 et θ = ±π qui correspondent `a deux directions oppos´ees de l’aimantation. La position de notre syst`eme dans l’un des ces minima d´epend alors de son histoire magn´etique, c’est l’origine de l’hyst´er´esis. Le champ ext´erieur modifie les courbes d’´energie. Lorsqu’un champ ext´erieur suffisamment grand est appliqu´e il n’existe alors plus qu’un seul minimum dont la direction tend `a s’aligner avec la direction de Hext. Le champ d’anisotropie, HK, est le champ pour lequel un des minima d’´energie
disparaˆıt quand le champ ext´erieur est appliqu´e selon la direction de facile aimantation (φ = 0 ou ±π). Sa valeur est :
HK =
2Ku
µ0MS
(1.12) Une d´efinition plus g´en´erale pour d´ecrire le retournement `a l’aide du mod`ele S&W est celle du champ de retournement Hr. Ce champ de retournement peut ˆetre interpr´et´e comme le
champ coercitif HC d´ependant de la direction du champ ext´erieur. C’est la champ pour lequel
l’aimantation se retourne irr´eversiblement quel que soit l’angle φ avec lequel le champ ext´erieur est appliqu´e.
Hr(φ) =
HK
(sin2/3φ + cos2/3φ)3/2 (1.13)
Le trac´e de Hr(φ) (figure 1.7) donne une figure g´eom´etrique appel´ee astro¨ıde auquel sont
asso-ci´ees diff´erentes formes de cycles d’hyst´er´esis.
Le mod`ele S&W permet de tracer les cycles d’hyst´er´esis tr`es proches de ceux observ´es dans des cas r´eels bien que les m´ecanismes r´eels soit tr`es diff´erents. Il est donc tr`es utile pour la compr´ehension de syst`emes en premi`ere approximation.
1.3. LES M ´ECANISMES DE RETOURNEMENT DE L’AIMANTATION 25
1.3.2
Champ de nucl´
eation et retournement non-uniforme
Supposons un mat´eriau ferromagn´etique plong´e dans un champ magn´etique suffisamment grand pour le saturer. Ce champ d´ecroˆıt lentement afin d’´eviter tout effet dynamique. Le paysage ´
energ´etique ´evolue mais le retournement n’a pas lieu. Le champ de nucl´eation Hnest le champ le
plus faible qu’il soit possible d’atteindre avant le retournement. Il peut ˆetre n´ecessaire pour cela de d´epasser le champ nul et de faire croˆıtre le champ dans la direction oppos´ee `a l’aimantation. En effet, l’´etat magn´etique d’un syst`eme n’est pas forc´ement celui de plus faible ´energie car le ou les ´etats de plus faible ´energie ne sont pas toujours accessibles comme nous avons pu le voir pour le mod`ele S&W (voir figure 1.6). Le champ de nucl´eation est toujours inf´erieur ou ´egal au champ coercitif puisque HC est g´en´eralement d´efini comme le champ pour lequel l’aimantation
du syst`eme est nulle. Dans le cas de S&W , Hn et HC sont ´egaux puisque l’aimantation se
retourne instantan´ement. En r´ealit´e, cela n’arrive jamais car le processus de retournement est plus ou moins ´etal´e dans le temps.
Brown posa le premier le probl`eme de la nucl´eation [21, 22, 23]. Il trouva alors deux solutions `
a ce probl`eme qui d´ecrivent le retournement pour des sph`eres, des ellipso¨ıdes ou des cylindres. 1. La rotation coh´erente qui est d´ecrite par le mod`ele S&W dans lequel l’aimantation tourne
avec le mˆeme angle sur tout le syst`eme.
2. Le « curling » (aimantation enroul´ee), qui correspond `a un ´etat en spirale de l’aimantation pendant le retournement.
Ces modes de retournement se produisent pour des ´echelles diff´erentes et sont li´es `a la comp´ e-titions qui existe entre les ´energies d’´echange, dipolaire et d’anisotropie cristalline. Le premier apparaˆıt pour les petites tailles o`u l’´energie d’´echange domine, et le second pour les tailles plus importantes o`u l’´energie dipolaire devient plus forte. Un autre mode, dit « buckling » appa-raˆıt dans le cas particulier du cylindre infini. L’ouvrage d’Aharoni contient des informations d´etaill´ees sur ces diff´erents points [24].
Fig. 1.6 – A gauche, l’´energie totale d’un syst`eme en fonction de l’angle ϕ de l’aimantation avec l’axe facile et un angle θ de 60◦. La configuration g´eom´etrie du syst`eme est donn´ee sur le sch´ema de droite.
Fig. 1.7 – Astro¨ıde de S&W et les diff´erentes formes de cycles d’hyst´er´esis s’y rattachant.
Dans les syst`emes r´eels et de grandes tailles, les deux processus fondamentaux du retourne-ment sont la nucl´eation et la propagation de parois. La nucl´eation est un ph´enom`ene complexe et tr`es d´ependant des d´efauts structuraux du mat´eriau observ´es qui repr´esentent des centres de nucl´eation privil´egi´es. Les domaines ainsi cr´e´es s’agrandissent par une propagation des parois de domaines.
1.3.3
Le retournement pr´
ecessionnel
Le retournement est g´en´eralement obtenu par l’application d’un champ magn´etique oppos´e `a l’aimantation d’une structure. Il s’agit d’un processus lent gouvern´e essentiellement par le terme d’amortissement de l’´equation LL alors que le terme pr´ecessionnel joue un rˆole moins important compte tenu de la colin´earit´e entre l’aimantation et le champ appliqu´e. Le retournement pr´ eces-sionnel consiste justement `a maximiser le rˆole du premier terme de l’´equation Landau-Lifshitz 1.14 en utilisant un champ perpendiculaire `a l’aimantation entraˆınant de larges oscillations des spins. C’est en 1956 que Kikuchi [25] a l’id´ee de cette m´ethode afin de minimiser le temps de retournement. Le proc´ed´e est aujourd’hui tr`es ´etudi´e avec l’essort du stockage magn´etique o`u un retournement ultra-rapide de l’aimantation est n´ecessaire [26, 27, 28, 29, 30, 31].
Dans ce mode de retournement, l’excitation perpendiculaire `a l’aimantation provoque une pr´ecession des spins qui peut conduire `a de multiples retournements. L’´etat de stabilisation du syst`eme est alors fortement d´ependant des propri´et´es de l’excitation. En effet, il est possible de supprimer la pr´ecession en ajustant la dur´ee de l’excitation du champ avec la p´eriode de pr´ecession [27, 31]. Les m´ethodes permettent d’obtenir des temps de retournement largement subnanoseconde.
1.4. LA DYNAMIQUE DE L’AIMANTATION 27
1.4
La dynamique de l’aimantation
1.4.1
Equation Landau-Lifshitz-Gilbert (LLG)
La dynamique de l’aimantation pour un macrospin est d´ecrite par l’´equation de Landau-Lifshitz [16] : d ~M dt = −µ0¯γ( ~M × ~Hef f) − µ0¯γα MS ~ M × ( ~M × ~Hef f) (1.14)
Elle est reformul´ee ensuite par Gilbert [32] sous la forme : d ~M dt = −µ0γ( ~M × ~Hef f) + α MS ~ M × d ~M dt ! (1.15) o`u γ = g2me
e est le facteur gyromagn´etique en A.m
−1.s−1, γ = (1 + α2)¯γ, α le facteur
d’amortis-sement sans dimensions, ~M l’aimantation en A.m−1, MS l’aimantation `a saturation en A.m−1
et ~Hef f = µ10∂ ~∂FM le champ magn´etique effectif en A.m−1 avec F l’´energie libre. Ces deux
formu-lations sont analytiquement ´equivalentes et conservent la norme, MS, de l’aimantation, mais
nous utiliserons pr´ef´erentiellement la premi`ere puisqu’elle sera utilis´ee plus tard pour les calculs num´eriques.
Le premier terme de cette ´equation est le terme pr´ecessionnel. Il traduit le mouvement de rotation de l’aimantation autour sa position d’´equilibre. Cette rotation est provoqu´ee par une perturbation du champ magn´etique `a l’int´erieur du mat´eriau qui ´ecarte les spins de leur posi-tion d’´equilibre et entrent en pr´ecession. Le second terme de l’´equation LL d´ecrit quant-`a-lui l’amortissement. Ce terme est purement ph´enom´enologique. En effet, l’amplitude des oscilla-tions d’un spin d´ecroissent dans le temps afin de permettre `a l’aimantation de rejoindre la position d’´equilibre. Sans ce terme l’aimantation tournerait ind´efiniment. De plus, cette ´ equa-tion est non-lin´eaire mˆeme si l’on n´eglige l’amortissement, en effet ~M est d´ej`a contenu dans
~
Hef f (champ d´emagn´etisant, champ d’´echange, ...) et ne pr´esente pas de solution g´en´erale.
1.4.2
Susceptibilit´
e et r´
esonance ferromagn´
etique
1.4.2.1 Susceptibilit´e
La susceptibilit´e en r´egime lin´eaire est d´efinie par la relation :
ˆ
χ = ∂ ~M ∂ ~Hext
, (1.16)
o`u ˆχ est le tenseur de susceptibilit´e du mat´eriau en question. Parfois, nous utiliserons la per-m´eabilit´e ˆµ de perm´eabilit´e relative :
ˆ
µ = 1 + ˆχ . (1.17)
Fig. 1.8 – a. Mouvement pr´ecessionnel de l’aimantation autour du champ effectif. b. Rotation de l’aimantation excit´ee par microondes autour du champ effectif.
1.4.2.2 R´esonance ferromagn´etique
Soit un syst`eme magn´etique uniform´ement aimant´e ´equivalent `a un spin unique. A l’´equilibre, son aimantation est d´efinie par ~Meq. Ce spin est soumis `a une excitation harmonique de faible
amplitude ~h(t) = ~heiωt (figure 1.8.b). Nous recherchons alors les solutions harmoniques de
l’´equation LL d’un spin oscillant autour de sa position d’´equilibre. Nous injectons un champ oscillant de faible amplitude pour exciter l’aimantation. Nous avons donc les solutions suivantes :
~
m(t) = ~meiωt (1.18)
Nous pouvons alors d´ecomposer l’aimantation et le champ magn´etique en un terme statique et un terme dynamique. La condition d’´equilibre s’´ecrit ~Meq// ~HDC et la conservation de la norme
impose ~Meq⊥ ~m. Il est alors possible de mettre l’´equation LL sous forme tensorielle :
hy hz = 1 fM f0 if −if f0 my mz (1.19) avec f0 = −−γµ2π0HDC, fM = −−γµ2π0MS et f = 2πω. Le tenseur de susceptibilit´e nous est alors
donn´e en inversant la relation 1.19 : hy hz = χP my mz (1.20) o`u χP, le tenseur de susceptibilit´e de Polder s’exprime :
χP = 1 fM χ −iκ iκ χ (1.21) avec χ = f0fM f2 0−f2 et κ = f fM f2 0−f2
. A la fr´equence de r´esonance f0, le tenseur de Polder diverge. En
effet, cette matrice d´ecrit un syst`eme sans frottement et uniquement d´ependant du champ HDC.
La divergence de la matrice entre en contradiction avec l’approximation des petits signaux, mais ce probl`eme est corrig´e par l’introduction de l’amortissement.
1.4. LA DYNAMIQUE DE L’AIMANTATION 29
1.4.3
Mode uniforme
Dans le mode uniforme, l’ensemble des spins de l’´echantillon pr´ecessent en phase. La figure 1.9 donne une repr´esentation typique des parties r´eelles et imaginaires de la perm´eabilit´e avec le pic d’absorption et l’annulation de la phase pour ω0. Dans un ´echantillon de forme ellipso¨ıdale,
la fr´equence de r´esonance du mode uniforme est donn´ee par la formule de Kittel [33] : wuni = γ q (Hext− 4π(Nz− Nx)MS)(Hext− 4π(Nz− Ny)MS)) (1.22) Ω0 0 Ω0 0 Fréquence Perm é abilit é Ð' Ð''
Fig. 1.9 – Parties r´eelle et imaginaire de la perm´eabilit´e d’un mat´eriau ferromagn´etique ex-cit´e dans son mode uniforme. La fr´equence de r´esonance ω0 correspond `a un maximum de
d’absorption.
1.4.4
Effet non-lin´
eaire
Jusqu’a pr´esent, nous nous sommes int´eress´es `a des excitations avec de petits signaux, nous amenant `a lin´eariser l’´equation LL. Dans le cadre de cette th`ese nous serons amen´es `a travailler avec des signaux microondes de forte amplitude entraˆınant des comportements non-lin´eaires. Bien que le but ne soit pas d’´etudier en profondeur ces effets, il sera tout de mˆeme important de pouvoir les reconnaˆıtre lorsqu’ils se produiront. Les effet non-lin´eaires sont nombreux et nous ne citerons que ceux qui ont ´et´e observ´es :
– L’effet de repliement de la raie de r´esonance. Il s’explique simplement par une forte aug-mentation de l’angle de pr´ecession qui implique une modification du champ d´emagn´etisant et donc du champ effectif. Il s’en suit une modification de la fr´equence de r´esonance qui d´epend du mode de r´esonance. Cet effet `a ´et´e pr´evu par Anderson et Suhl [34] et observ´e par Weiss [35].
– La saturation de la composante transverse, observ´ee exp´erimentalement par Damon [36]. – L’absorption secondaire et la g´en´eration de sous-harmoniques [37].
30 CHAPITRE 1. LE MAGN ´ETISME DES COUCHES MINCES
Ces deux derniers points ont ´et´e expliqu´es et unifi´es par Suhl [38]. Il s’agit en r´ealit´e du couplage non-lin´eaire du mode de pr´ecession uniforme avec d’autres modes d’ondes de spin. La figure 1.10 montre l’effet de repliement de la raie principale de r´esonance ainsi que que la saturation `
a forte puissance microonde.
0.6 0.8 1.0 1.2 1.4 1.6 1.8 2.0 0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0 FréquenceHGHzL My MS
Fig. 1.10 – Repliement de la raie de r´esonance du mode uniforme observ´e avec le mod`ele macrospin pour une amplitude croissante de l’excitation. La saturation de la raie apparaˆıt lorsque l’amplitude des oscillations est maximale avec un angle de pr´ecession de 90◦.
1.5
Les couches minces et micro/nanostructures
Les couches minces magn´etiques font aujourd’hui l’objet de nombreuses recherches et ce depuis l’apparition du stockage magn´etique il y a une centaine d’ann´ees. Les m´emoires ma-gn´etiques (MRAM) et les disques durs repr´esentent le plus grand secteur d’application de cette technologie. Du point de vue des m´edia d’enregistrement, les deux principaux enjeux sont l’augmentation de la densit´e de stockage et la diminution du temps de lecture/´ecriture d’une in-formation sur le support. Ces d´efis sont la source des nombreux travaux portant sur les couches minces.
La densit´e de stockage d´epend de la taille d’un bit dont l’instabilit´e est pr´evue en-dessous d’une certaine taille. En effet, l’´energie ∆E n´ecessaire au retournement de l’aimantation dans un volume V est ∆E = K1V . Le temps caract´eristique de retournement de l’aimantation est
τ = τ0e ∆E
kB T avec τ0 une constante de temps d´ependant de plusieurs param`etres (anisotropie, temp´erature, amortissement, ...), T la temp´erature et kBla constante de Boltzmann. Le d´
evelop-pement s’oriente alors vers des mat´eriaux pr´esentant des anisotropies importantes. Cependant, le champ d’´ecriture ´etant limit´e, une anisotropie trop forte est `a proscrire. Pour terminer, un processus fiable de lecture est assur´e par un bon rapport signal sur bruit (S/B) qui d´epend essentiellement de la taille du bit. La combinaison de ces trois limitations est connue sous le nom de limite paramagn´etique [39, 40, 41]. La limite a ´et´e historiquement estim´ee en 1997 par
1.5. LES COUCHES MINCES ET MICRO/NANOSTRUCTURES 31
Charap `a 40 Gb/pouces2 [42].
Actuellement, la technologie utilis´ee dans les disques dur est l’enregistrement perpendicu-laire3, qui correspond `a une aimantation hors du plan des couches [43, 44]. Elle permettrait
d’atteindre des densit´e de l’ordre du T b/pouces2 [45]. Elle `a succ´ed´e `a l’enregistrement longitu-dinal (aimantation dans le plan des couches) utilisant un couplage antiferromagn´etique [46, 47].
Plusieurs technologies sont envisag´ees pour l’avenir :
– L’enregistrement thermo-magn´etique dans lequel un ´echauffement local de la couche ma-gn´etique doit permettre de diminuer le champ coercitif et donc d’utiliser des mat´eriaux `a tr`es forte anisotropie [48].
– Une autre piste visant `a diminuer le champ coercitif est le retournement assist´e par mi-croondes. Il a ´et´e d´emontr´e que l’application d’une excitation hyperfr´equence de forte amplitude permet de r´eduire significativement le champ coercitif [49, 50, 51, 52, 53, 54, 55]. – L’utilisation de supports nanostructur´es permettrait d’am´eliorer le bruit de transition entre deux bits et d’augmenter la stabilit´e thermique. Elle est cependant tr`es d´ependante des techniques de lithographie [56, 57, 58, 48] et la synchronisation n´ecessaire pour la lecture et l’´ecriture des donn´ees repr´esente un s´erieux challenge.
– L’enregistrement avec un axe d’anisotropie inclin´e qui permet de retourner l’aimantation pour un champ plus faible que le champ coercitif. Le principal probl`eme de cette technique est sa grande sensibilit´e `a toute distribution du champ de retournement qui entraˆıne un faible rapport signal sur bruit. Une solution est d’utiliser des champs obliques mais ces derniers provoquent l’effacement des bits voisins[59]. [60, 61].
Les diff´erentes m´ethodes utilis´ees et envisag´ees pour optimiser les temps de retournement ont d´ej`a ´et´e ´evoqu´ees dans la section 1.3.3. De plus, les mˆemes efforts sont d´eploy´es pour les tˆetes de lecture/´ecriture [62]. Pour les MRAM, des strat´egies similaires sont entreprises avec en plus l’emploi de retournement par injection de courants polaris´es en spin [63].
Chapitre 2
La probl´
ematique capteur de champ
magn´
etique
Les microondes de forte puissance sont utilis´ee dans les Radars (RAdio Detection And Ran-ging signifiant « d´etection et estimation de la distance par ondes radio ») et les armes `a ´energie dirig´ee. Les sources de forte puissance ´equipant de tel dispositifs ont des puissances typiques proches du M W pour les radars et jusqu’au GW pour les armes [64, 65]. Leur fr´equence de fonctionnement est aux alentours du GHz. A titre d’exemple, les microondes de forte puissance peuvent se trouver sur des Radars longue port´ee ou des g´en´erateurs d’impulsion ´electromagn´ e-tiques pour la destruction de dispositifs ´electroniques. Ce type de signal peut perturber de fa¸con volontaire ou involontaire le fonctionnement d’appareils ´electroniques divers et il est important de connaˆıtre les effets de tels champs, par exemple sur les bˆatiments d’un a´eroport. La d´etection de la composante magn´etique de tels signaux passe alors par une connaissance des ordres de grandeurs mis en jeu.
Pour obtenir un signal de forte puissance, l’´emission continu est souvent remplac´ee par un fonctionnement en r´egime impulsionnel afin de concentrer l’´energie. Pour les sources qui nous int´eressent, ces impulsions sont proches de la microseconde. De plus, tout dispositif d’´emission d’onde utilise une antenne. Cette derni`ere `a un rˆole important puisqu’elle d´efinit la propagation spatiale de l’onde. Cette propri´et´e est le gain de l’antenne qui est g´en´eralement exprim´ee en dB et varie typiquement de 20 `a 40 dB.
Afin d’´etablir la sensibilit´e que doit atteindre notre capteur, il est important de connaˆıtre l’ordre de grandeur du champ magn´etique cr´e´e par des microondes de forte puissance au ni-veau de la cible (quelle quelle soit). Si Pe la puissance ´emise, G le gain de l’antenne, le flux de
puissance re¸cu Sr (en W.m−2) `a une distance donn´ee d s’´ecrit :
Sr =
GPi
4πd2 . (2.1)
Dans le cas d’une onde plane, ce mˆeme flux re¸cu est reli´e au champ magn´etique par le vecteur de Poynting, ce qui nous donne :
Sr= Z0H2,
o`u Z0 =
qµ 0
0 ≈ 120π Ω est l’imp´edance du vide. Ainsi, nous avons par exemple pour Pi = 1 M W et g = 30 dB :
– pour d = 100 m alors H ≈ 4, 6 A.m−1 ≈ 0, 58 Oe ou µ0H ≈ 0, 058 mT ,
– pour d = 10 m alors H ≈ 460 A.m−1 ≈ 5, 8 Oe ou µ0H ≈ 0, 58 mT .
2.1
Les capteurs de champ magn´
etiques
Il existe une grande vari´et´e de capteurs de champ magn´etique. Ils pr´esentent tous des carac-t´eristiques diff´erentes, les pr´edisposant `a un ´eventail particulier d’utilisation [66, 67]. Le tableau 2.1 donne une liste non-exhaustive des principaux capteurs de champ magn´etique.
La premi`ere limitation des capteurs de champ magn´etique existant est leur bande passante qui ne d´epasse que rarement le M Hz. Ceux qui fonctionnent dans le domaine du GHz sont g´en´eralement ´etudi´es pour d´etecter des signaux de faible amplitude. Les capteurs bas´es sur la GMR (Magn´eto-R´esistance G´eante) pr´esentent des caract´eristiques int´eressante dans le do-maine fr´equentiel et sont l’objet de recherche pour des applications aux tˆetes de lectures [68].
Deuxi`emement, un grand nombre de ces capteurs sont utilis´es pour des mesures ponctuelles et d´epourvues de r´esolution spatiale. Une des m´ethodes utilis´ees pour transformer un capteur ponctuel en cartographe est de cr´eer une assembl´ee de capteurs ponctuels pour obtenir une r´esolution spatiale ou une s´electivit´e directionnelle [69, 70, 71].
Les capteurs `a base de technologie magn´eto-optique semblent donc parfaitement indiqu´es. Ils peuvent travailler `a hautes fr´equences grˆace `a un temps de r´eponse tr`es faible, ils supportent des champs de forte intensit´e (plusieurs T ) et la fabrication d’assembl´ees est facilit´ee par leur faible complexit´e. Voyons maintenant plus en d´etails comment pourrait fonctionner un tel capteur.
Fig. 2.1 – Fonctionnement sch´ematique d’un Radar avec son antenne d’´emission-r´eception. Dans le cadre de la d´etection de microondes de forte puissance, c’est le signal au niveau de la cible qui est int´eressant.
2.2. PRINCIPE DE FONCTIONNEMENT 35
Technologie de Etendue de mesure Bande passante
capteur magn´etique (mT ) (Hz)
Bobine `a induction 10−10 - 106 10−1 - 106 Flux-Gate 10−4 - 0, 5 0 - 104 Pompage Optique 0,01 - 0,1 0 - 5 SQUID 10−9 - 0,1 0 - 5 Effet Hall 0,1 - 3 × 10−4 0 - 108 GMR 10−5 - 103 0 - 109 Magn´eto-Optique 0,01 - 103 0 - 109
Tab. 2.1 – Technologie des principaux capteurs de champ magn´etique avec leur sensibilit´e et leur fr´equences de fonctionnement [66].
2.2
Principe de fonctionnement
2.2.1
Principe de fonctionnement
Tout d’abord, voici les principaux crit`eres1auxquels la d´etection et la cartographie d’intensit´e
d’un champ hyper-fr´equence au moyen de couches minces magn´eto-optiques doit satisfaire : 1. mesure vectorielle du champ magn´etique, c’est `a dire une sensibilit´e `a toutes les directions
du champ dans l’espace,
2. un faible temps de r´eponse (inf´erieur `a la µs) afin de d´etecter les impulsions de courtes dur´ees,
3. une r´esolution spatiale adapt´ee `a la longueur d’onde des signaux d´etect´es,
4. une intrusion la plus faible possible pour ´eviter au maximum les discontinuit´es dans la propagation du signal.
La figure 2.2 montre le sch´ema d’un capteur imagin´e pour d´etecter un signal hyper-fr´equence et respectant l’ensemble des crit`eres pr´ec´edents. Il est constitu´e d’une assembl´ee de particules magn´etiques regroup´ees en cellules. Chaque cellule constitue un d´etecteur ponctuel et chaque particule d’une cellule pr´esente des propri´et´es uniques.
– La sensibilit´e `a l’amplitude du signal hyper-fr´equence sera fix´ee par les propri´et´es magn´ e-tiques qui sont gouvern´ees par le type de mat´eriaux et la g´eom´etrie utilis´es. Il est donc possible d’imaginer une s´erie de particules se retournant pour diff´erentes amplitudes de champ.
– La sensibilit´e vectorielle est assur´ee par l’orientation de l’axe facile des particules qu’il est possible de choisir durant les processus de fabrication ou en utilisant des multicouches. – La r´esolution spatiale sera impos´ee par la taille d’une cellule et la r´esolution en amplitude
par le nombre d’´el´ements par cellule. Un compromis sera donc n´ecessaire. Sachant qu’un signal microondes d’une fr´equence de 1 GHz (respectivement 10 GHz) aura, dans l’air, une longueur d’onde de 30 cm (3 cm) et en tenant compte du crit`ere de Rayleigh, une 1Il y a ´egalement d’autres facteurs : la fiabilit´e, vitesse. . . que nous ne traiterons pas en premi`ere approche.
Fig. 2.2 – Sch´ema de principe du capteur. Le capteur complet est une assembl´ee de cellules autonomes, elles-mˆeme constitu´ees d’un r´eseau d’´el´ements magn´etiques microm´etriques. Une cellule permet en un point donn´e de r´ecolter les informations sur la direction et l’amplitude du champ grˆace aux diff´erents ´el´ements magn´etiques.
cellule de 1 cm apporte un large panel d’utilisation. Si maintenant nous supposons que la taille moyenne d’un ´el´ement sera de 1 × 104µm2 (en voyant tr`es large), nous obtiendrons
des cellules contenant une centaine d’´el´ements. Donc en tenant compte des trois directions de l’espace, l’information sur l’amplitude pourra ˆetre mesur´e sur une trentaine de niveaux, ces derniers pouvant ˆetre organis´es de diff´erentes fa¸cons.
– L’intrusion du capteur sera essentiellement d´ependante de l’´epaisseur des ´el´ements magn´ e-tiques, du taux de remplissage des cellules ainsi que du substrat qui peut avantageusement ˆetre une membrane polym`ere comme dans le cas de la technologie EMIR [3].
2.2.2
Processus de d´
etection
La lecture du capteur se faisant par une m´ethode magn´eto-optique diff´er´ee, il est n´ecessaire de modifier la configuration des domaines magn´etiques des ´el´ements d´etecteurs de fa¸cons irr´ e-versible. De plus la lecture sera d’autant plus facile que le changement de configuration cr´eera un contraste magn´eto-optique important. Dans cette logique, nous allons pr´esenter bri`evement quelques processus applicables `a la d´etection de microondes.
Comme expos´e dans la section 1.3.1, les ´etats stables d’un syst`eme magn´etique sont impos´es par des barri`eres d’´energie. Ces derni`eres peuvent ˆetre modifi´ees grˆace `a un apport ´energ´ e-tique (magn´etique, calorifique, ´electrique, contrainte m´ecanique...). L’id´eal est alors d’avoir un syst`eme magn´etique pr´esentant deux ´etats stables de niveau diff´erent. Nous donnons ici trois syst`emes susceptible de montrer un changement d’´etat sous l’influence d’une perturbation
mi-2.3. CONTRIBUTION DE CE TRAVAIL DE TH `ESE `A LA PROBL ´EMATIQUE CAPTEUR37
croonde.
– Un syst`eme magn´etique (figure 2.3.a) avec un axe de facile aimantation est mis dans un ´etat satur´e. Il poss`ede dans cet ´etat une ´energie E1 s´epar´e de l’´etat d´esaimant´e d’´energie E2 par
une barri`ere d’´energie. Une excitation microonde qui perturbe l’aimantation du syst`eme peut permettre de franchir la barri`ere et d’aboutir `a la d´esaimantation du syst`eme dans lequel l’aimantation totale est nulle.
– Un syst`eme pr´esentant une g´eom´etrie asym´etrique peut pr´esenter deux niveaux d’´energie diff´erents suivant la direction de l’aimantation. La figure 2.3.b montre l’exemple d’une croix dont l’axe suivant la branche la plus large poss`ede une ´energie E1 inf´erieure `a celle
celle de l’autre branche d’´energie E2. La hauteur de la barri`ere d’´energie d´ependra des
propri´et´es g´eom´etriques et intrins`eques du syst`eme. Une excitation microonde va permettre un basculement de l’aimantation soit un rotation de 90◦ de cette derni`ere.
– Le dernier cas, pr´esent´e sur la figure 2.3.c se diff´erencie des deux autres par l’intervention d’un champ statique ext´erieur. En effet, en l’absence de ce champ, les deux ´etats qui nous int´eressent ont une ´energie ´equivalente, E1 = E2. C’est l’introduction d’un champ ext´erieur
statique qui permet de disym´etriser le syst`eme. L’effet de ce champ est double. D’une part, il modifie les niveaux d’´energie avec E10 > E20, et d’autre part, il permet de diminuer la hauteur de la barri`ere `a franchir. Ceci est valable si le champ est oppos´e `a la direction de l’aimantation. S’il est dans le mˆeme sens, nous observerons aussi un d´eplacement des niveaux d’´energie mais nous aurons E10 < E20 et la barri`ere sera plus haute du point de vue de E10. L’amplitude du champ statique joue directement sur la hauteur des niveaux d’´energie. Une excitation microonde va permettre un retournement de l’aimantation soit une rotation de 180◦ de celle-ci.
2.3
Contribution de ce travail de th`
ese `
a la probl´
ema-tique capteur
Il est clair que le d´eveloppement de solutions alternatives de cartographie du champ magn´ e-tique hyperfr´equence, telles les propositions pr´esent´ees ci-dessus, n´ecessite un d´eveloppement en recherche et d´eveloppement assez long. Le pr´esent travail de th`ese vise approfondir la connais-sance des propri´et´es magn´etiques (champ de retournement, sensibilit´e `a une excitation mi-croondes...) de micro-´el´ements lithographi´es. La contribution de cette th`ese au d´eveloppement d’un capteur se r´esume donc `a une pr´e-´etude amont. L’´etude du basculement de l’aimanta-tion et de la d´etection d’une excitation hors plan ont fait l’objet de travaux pr´eliminaires peu encourageants et ont donc ´et´e laiss´es de cot´e pour des raisons explicit´ees en annexes (A). La contribution de cette th`ese au d´eveloppement d’un capteur se r´esume donc `a une exploration de la physique d’un syst`eme `a aimantation planaire, comme ceci est d´evelopp´e dans les chapitres suivants.
Fig. 2.3 – Repr´esentation sch´ematique des trois processus de modification de l’aimantation d’un syst`eme sous l’influence d’une excitation microonde.
Troisi`
eme partie
M´
ethodes exp´
erimentales et
caract´
erisation
Chapitre 3
Techniques d’´
elaboration
3.1
Croissance de couches minces par pulv´
erisation
ca-thodique
3.1.1
Le principe de fonctionnement
La r´ealisation de couches minces a ´et´e faite par pulv´erisation cathodique (figure 3.1). Cette technique consiste `a introduire un gaz neutre, ici de l’argon, `a l’int´erieur d’une enceinte sous vide afin de cr´eer un plasma luminescent. Le pompage se poursuit durant tout le temps du d´epˆot pour assurer un contrˆole actif de l’atmosph`ere, le tout se fait `a temp´erature ambiante. La formation du plasma, entraˆın´ee par l’application d’une tension `a la cathode, induit un bom-bardement ionique (Ar+) de la cible constitu´ee du mat´eriau `a d´eposer. Les atomes arrach´es `a la cible se d´eposent alors `a la surface du substrat pour former la couche mince.
Les couches ont majoritairement ´et´e d´epos´ees en fonctionnement DC. Un potentiel n´ ega-tif est appliqu´e `a la cathode, le substrat joue donc le rˆole d’anode. Il s’agit du principe de fonctionnement le plus simple, mais il n´ecessite des pressions de fonctionnement ´elev´ees. Nos sources DC sont en fait des magn´etrons (champ magn´etique appliqu´e au niveau de la cible) et peuvent donc fonctionner `a plus basse pression. Le magn´etron DC ne permet pas le d´epˆot de mat´eriaux isolants. Ces derniers peuvent ˆetre d´epos´es par la m´ethode rf qui consiste `a appli-quer un potentiel alternatif haute fr´equence (environ 13 M Hz) sur la cathode. Lors du d´epˆot de mat´eriaux isolants, la grande mobilit´e des ´electrons permet de d´echarger la cible durant l’alternance positive du champ ´electrique. Si la mobilit´e des ´electrons ´etait plus faible que celle des ions alors la cible se chargerait positivement, les ions ne pourraient plus frapper la surface et l’arrachement des atomes n’aurait plus lieu.
Fig. 3.1 – Sch´ema de principe de la pulv´erisation cathodique.
3.1.2
Les bˆ
atis de pulv´
erisation
Trois bˆatis de pulv´erisation sont disponibles pour r´ealiser des couches. Deux d’entre eux ont ´
et´e con¸cus et assembl´es au LNMH, le troisi`eme est un bˆati commercial du groupe P LASSY S et se trouve au CEMES. Chacune de ces enceintes a ses avantages.
Le bˆati P LASSY S est id´eal pour l’´elaboration d’´echantillons multicouches puisqu’il poss`ede cinq cibles diff´erentes (dont deux face-`a-face). Son enti`ere automatisation ainsi que son porte-´
echantillon tournant lors des d´epˆots en font un outil pr´ecis et simple d’utilisation, mais son acc`es partag´e avec les membres du CEMES repr´esente une contrainte dans l’organisation de la fabrication des couches.
Le premier bˆati N iF e a ´et´e con¸cu par le LNMH au d´ebut de cette th`ese (figure 3.2). Assembl´e `
a partir d’un bˆati pr´e-existant, de nombreuses modifications ont vu le jour au fil du temps. Pour commencer, la cloche de verre a ´et´e remplac´ee par un couvercle muni d’un porte-´echantillon, permettant ainsi l’ajout d’un sas pour charger les substrats. Ce remplacement permet de gagner un temps pr´ecieux en ´evitant la remise `a l’air de l’ensemble du bˆati lors du changement de substrat. L’enceinte principale reste dans un vide d’environ 5 × 10−8 T orr. Trois magn´etrons (deux aliment´es en DC, l’autre en rf ) ont ´et´e mont´es, chacun muni d’un cache command´e par un programme informatique. Nous sommes donc en mesure de fabriquer des multicouches `a partir de trois mat´eriaux diff´erents. Il ´etait impossible avant cela de r´ealiser de telles couches puisque le changement de cible imposait une remise `a l’air de l’´echantillon et donc une d´egradation de sa surface. La r´ealisation d’une multicouche dans ces conditions conduit forc´ement une interface de tr`es mauvaise qualit´e entre les diff´erents mat´eriaux. En dernier lieu, deux entr´ees de gaz suppl´ementaires ont fait leur apparition, autorisant ainsi les d´epˆots dans une atmosph`ere active