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Cheminements de l'eau dans un contexte de protection de source d'eau potable

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Academic year: 2021

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Cheminements de l’eau dans un contexte de protection

de source d’eau potable

Mémoire

Françoise Tardif

Maîtrise en génie des eaux - avec mémoire

Maître ès sciences (M. Sc.)

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Cheminements de l’eau dans un contexte de protection

de source d’eau potable

Mémoire

Françoise Tardif

Sous la direction de :

Manuel J. Rodriguez, directeur de recherche

Geneviève Pelletier, codirectrice de recherche

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Résumé

Plusieurs approches réglementaires ont été développées pour assurer la protection des sources d’eau potable. Au Québec, le Règlement sur le prélèvement des eaux et leur protection (RPEP) exige la délimitation d’aires de protection spécifiques à l’intérieur de l’aire d’alimentation des prises d’eau potable. Cette délimitation est basée sur des distances fixes. Certaines activités, qui posent un risque pour la qualité de l’eau, sont restreintes dans ces zones protégées. Cependant, pour les eaux de surface, l’utilisation d’unités de distance n’est pas nécessairement représentative du temps disponible pour réagir face à une contamination puisqu’elle ne considère pas des facteurs tels que le contexte hydrologique, l’occupation du territoire et les cheminements préférentiels de l’eau qui influencent le temps de parcours des polluants. Le temps disponible pour l’intervention correspond à la somme du temps de cheminement (entre le point d’émission et l’arrivée du contaminant dans un cours d’eau à débit permanent) et du temps de parcours en cours d’eau à débit permanent (le transport du contaminant dans un cours d’eau à débit permanent jusqu’à la prise d’eau). L’objectif de ce projet est d’évaluer l’influence du temps de cheminement sur le temps disponible pour réagir. Le cas d’étude est bassin versant de la principale prise d’eau potable de la Ville de Québec. Cinq méthodes d’évaluation du temps de cheminement ont été évaluées, à savoir celle proposée par le RPEP, une évaluation de la longueur de cheminement à vol d’oiseau et selon le réseau de drainage ainsi que l’estimation du temps de cheminement selon la méthode du TR-55 et selon le réseau de drainage. Pour appliquer et comparer ces méthodes, 144 propriétés situées dans l’aire d’alimentation de la prise d’eau à l’étude ont été considérées. Pour ces propriétés, 30 cheminements de l’eau distincts ont été identifiés. Il a été constaté que la méthode d’évaluation des longueurs à vol d’oiseau n’est pas représentative du cheminement potentiel des contaminants. Les méthodes basées sur l’estimation des temps de cheminement présentent des résultats comparables bien qu’il serait pertinent d’appliquer ces méthodes à d’autres bassins versants pour valider les résultats. Les temps de cheminements estimés sont majoritairement situés dans un intervalle entre 0 et 15 min pour les deux méthodes appliquées sur le cas d’étude. Pour la méthode du TR-55 et selon le réseau de drainage, cet intervalle de temps représente le cheminement de 58 % et 64 % des propriétés analysées, respectivement. À partir des résultats obtenus, ce mémoire de recherche conclut que les temps de cheminement, bien qu’ils doivent être considérés dans la protection des sources d’eau potable, représentent une faible proportion du temps disponible comparativement aux temps de parcours en cours d’eau à débit permanent, qui eux

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Table des matières

Résumé ... ii

Table des matières ... iii

Liste des figures ... v

Liste des tableaux ... vi

Liste des abréviations ... vii

Remerciements ... viii

Introduction ... 1

1. Gestion des risques pour la protection des sources : état des connaissances ... 4

1.1. Temps de parcours des contaminants ... 4

1.2. Origine des contaminants ... 6

1.3. Aires de protection des sources d’eau potable ... 7

1.4. Évaluation et délimitation des aires de protection ... 12

2. Objectifs de l’étude ... 15

3. Étude de cas ... 16

3.1. Approche réglementaire du Québec ... 16

3.2. Territoire à l’étude ... 19

3.2.1. Principaux cours d’eau ... 21

3.2.2. Caractéristiques spécifiques de l’aire d’alimentation ... 23

3.2.3. Acteurs du territoire ... 24

3.3. Évaluation des risques sur le territoire ... 26

4. Méthodologie ... 28

4.1. Cheminements de l’eau et des contaminants qu’elle transporte sur le territoire ... 28

4.2. Propriétés analysées ... 29

4.3. Évaluation des cheminements... 31

4.4. Cheminement de l’eau : méthodes de longueurs et de temps de cheminement ... 35

4.4.1. Méthodes associées à des longueurs ... 36

4.4.2. Méthodes associées à l’évaluation du temps de cheminement ... 37

4.5. Les temps de parcours en cours d’eau à débit permanent ... 41

5. Résultats et discussion ... 45

5.1. Les cheminements ... 45

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5.3. Méthodes considérant le temps de cheminement ... 53

5.4. Bilan des méthodes ... 59

5.5. Comparaison des temps de cheminement et des temps de parcours en cours d’eau à débit permanent ... 62

5.6. Méthode simplifiée ... 66

Conclusions ... 69

Perspectives futures ... 72

Bibliographie ... 75

Annexe A – Cheminements observés ... 81

Annexe B – Cheminements associés aux propriétés à risque d’émettre une contamination ... 82

Annexe C – Longueurs de cheminement pour chaque propriété ... 83

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Liste des figures

Figure 1 : Schématisation des parcours de l'eau sur un territoire ... 9 Figure 2 : Impacts de l'urbanisation sur : a) les débits et b) les niveaux d'eau des rivières (MDDEFP et

MAMROT 2014, adapté de Schueler 1987) ... 11 Figure 3: Aire de protection immédiate et intermédiaire pour une prise d'eau dans une rivière (tirée du Guide de réalisation des analyses de la vulnérabilité des sources destinées à l’alimentation en eau potable au Québec [MDDELCC, 2016]) ... 18 Figure 4 : Aires de protection des sources d'eau potable pour une prise d'eau potable située dans une rivière (tirée du Guide de réalisation des analyses de la vulnérabilité des sources destinées à l’alimentation en eau potable au Québec [MDDELCC, 2016]) ... 19 Figure 5 : Localisation de la prise d'eau potable de la Ville de Québec dans la rivière Saint-Charles et son bassin versant ... 20 Figure 6 : Principaux sous-bassins versants du territoire de la prise d'eau de la Ville de Québec dans la rivière Saint-Charles adapté des données de l’APEL ... 22 Figure 7 : Propriétés retenues pour l'analyse des temps de cheminement dans le bassin versant de la prise d'eau potable de la Ville de Québec dans la rivière Saint-Charles ... 31 Figure 8 : Cheminement associé à chaque propriété analysée ... 46 Figure 9 : Distribution du nombre de propriétés analysées pour chaque type de cheminements ... 47 Figure 10 : Exemple d’un regroupement spatial de propriétés analysées dû à l’aménagement du territoire .... 48 Figure 11 : Dispersion des propriétés analysées pour les cheminements 10 et 17 ... 49 Figure 12 : Distribution du nombre de propriétés analysées en fonction de la longueur déterminée selon le réseau de drainage et à vol d’oiseau ... 50 Figure 13 : Temps de cheminement selon la méthode du TR55 pour les 144 propriétés retenues ... 54 Figure 14 : Distribution du nombre de propriétés analysées en fonction du temps de cheminement selon la méthode du TR-55 et selon le réseau de drainage ... 56 Figure 15 : Temps de cheminement selon la méthode 3) du TR55 et 4) selon le réseau de drainage en fonction de la longueur de cheminement pour les 78 propriétés pour lesquelles l’analyse selon le réseau de drainage a pu être réalisée ... 57 Figure 16 : Écart des temps de cheminement selon les deux méthodes d’évaluation en fonction de la longueur de cheminement des 78 propriétés ... 58

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Liste des tableaux

Tableau 1 : Liste des données nécessaires pour déterminer les cheminements ainsi que la provenance de ces

informations ... 33

Tableau 2 : Exemples d’étapes de cheminements et leurs abréviations employées ... 34

Tableau 3 : Méthodes utilisées pour caractériser le cheminement selon leurs catégories ... 36

Tableau 4 : Catégories de vitesses associées à une pente et une résistance à l'écoulement ... 41

Tableau 5: Vitesses minimales, moyennes et maximales pour les derniers tronçons de rivière des sous-bassins versants étudiés ... 41

Tableau 6 : Caractéristiques des sous-bassins versants étudiés par Flavie St-Pierre [2019]... 42

Tableau 7 : Étapes considérées pour l’évaluation des cheminements sur le bassin versant de la prise d’eau potable étudiée ... 45

Tableau 8 : Nombre de propriétés associées au cheminement 10 pour les longueurs de cheminement (m) évaluées avec la méthode à vol d'oiseau et selon le réseau de drainage pour les propriétés associées ... 51

Tableau 9 : Nombre de propriétés selon les longueurs du RPEP et les méthodes à vol d’oiseau, le réseau de drainage et les aires de protection fixées selon le RPEP ... 52

Tableau 10 : Temps de parcours (en heures) en cours d’eau à débit permanent modélisés avec SWAT par Flavie St-Pierre pour les sous-bassins versants du haut de la rivière des Hurons, des rivières Nelson et Jaune et pour le bassin versant de la prise d’eau potable étudiée et selon les scénarios analysés ... 62

Tableau 11 : Temps de cheminement et de parcours en cours d’eau à débit permanent pour des propriétés des sous-bassins versant des rivière Nelson et Jaune et leur occupation du territoire ... 64

Tableau 12 : Longueurs de rivière associées à chaque bassin versant étudié et temps de parcours obtenu avec la méthode simplifiée ... 67

Tableau 13 : Temps obtenus selon la méthode simplifiée développée et la modélisation réalisée par Flavie St-Pierre (scénarios mensuels) pour les bassins versants du haut de la rivière des Hurons, des rivières Nelson et Jaune et du bassin versant de la prise d’eau potable ... 67

Tableau 14 : Cheminements observés sur le bassin versant de la prise d'eau potable étudiée pour les propriétés ciblées ... 81

Tableau 15 : Cheminement (Chem.) associé aux 144 propriétés étudiées ... 82

Tableau 16 : Longueurs de cheminement selon la méthode à vol d'oiseau et selon le réseau de drainage pour toutes les propriétés analysées ... 83

Tableau 17 : Temps de cheminement selon la méthode du TR-55 pour chaque propriété analysée ... 85

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Liste des abréviations

APEL Association pour la protection de l'environnement du lac Saint-Charles et des Marais du Nord (maintenant AGIRO)

CBRSC Conseil de bassin de la rivière Saint-Charles CCME Conseil canadien des ministres de l'environnement CEP Comité fédéral-provincial-territorial sur l'eau potable GWP Partenariat mondial de l'eau

MAMROT Ministère des Affaires Municipales, des Régions et de l'Occupation du Territoire MDDEFP Ministère du Développement durable, de l'Environnement, de la Faune et des Parcs MDDELCC Ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte contre les

Changements Climatiques

MDDEP Ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs MELCC Ministère de l'Environnement et Lutte contre les changements climatiques MRNF Ministère des Ressources naturelles et de la Faune

NRCS Natural Resources Conservation Service OMS Organisation mondiale de la santé PGO Pratique de gestion optimale

RIOB Réseau international des organismes de bassin

ROBVQ Regroupement des organismes de bassins versants du Québec RPEP Règlement sur le prélèvement des eaux et leur protection U.S. EPA United States Environmental Protection Agency

U.S.D.A United States Department of Agriculture

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Remerciements

Je désire prendre le temps de remercier M. Manuel J. Rodriguez, mon directeur de maîtrise, d'avoir su diriger mon projet en prenant en considération mes champs d'intérêt et pour son appui. Il m’a donné l’opportunité de faire un projet qui m’intéresse et de faire partie du programme FONCER – TEDGIEER du CRSNG. Ce programme m’a permis de faire de nombreuses rencontres avec des professionnels et d’autres étudiants et a permis de financer une partie de mon projet de maîtrise. De plus, les judicieux conseils de ma codirectrice, Geneviève Pelletier, m’ont encouragé à me dépasser. Ses interventions pertinentes ont permis d’approfondir le projet et sa portée. Elle m’a aussi permis de me découvrir en tant que jeune professionnelle et a su m’encourager tout au long de mon projet. Merci d’avoir cru en moi et en mes capacités.

Je souhaite remercier les nombreux stagiaires du groupe de recherche qui ont contribué à mon projet : Aurélie Olivier, Benoit Brault, Anthony Bégin-Godbout, Valentin Orsay et Juliette Corrivault-Gascon. Je souhaite également mentionner le soutien de mes collègues de travail et amis tout au long de ma maîtrise. De plus, ma famille m’a particulièrement encouragée au cours des deux dernières années et je leur en suis reconnaissante.

Finalement, je remercie M. Jose Llamas et Mme Constance Gravel pour leur legs testamentaire à la Fondation de l’Université Laval qui a contribué à financer mes études de 2e cycle. Elles ont aussi été possibles financièrement grâce au programme FONCER et à la Chaire de recherche en eau potable de l’Université Laval (CREPUL).

Je suis fière d’avoir mené ce projet à terme et d’avoir acquis de nombreuses connaissances et compétences qui me seront utiles dans mon avenir professionnel et personnel. Merci à tous.

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Introduction

L’eau de surface est une ressource essentielle qui représente 22 % du territoire du Québec et alimente en eau potable près de 70 % de la population [Institut de la statistique du Québec, 2014; MDDELCC, 2018]. La quantité et la qualité de l’eau doivent être gérées de façon concomitante pour assurer sa pérennité [CCME et CEP, 2004; MDDELCC, 2018]. Toutefois, depuis quelques décennies, les pressions anthropiques sur la ressource en eau se sont accentuées, ce qui augmente les défis de gestion. Elles proviennent de plusieurs secteurs d’activités tels que le développement de zones résidentielles et l’urbanisation, la pollution par les déchets, l’agriculture ou encore le rejet d’eaux usées ou de substances chimiques [Gouvernement du Canada, 2015]. De plus, les évènements hydrologiques peuvent également influencer la qualité des eaux de surface et accroître la vulnérabilité des bassins versants face aux évènements de contamination [MDDELCC, 2016; Rose et al., 2000; Schuster et al., 2005]. Dans un contexte où la sécurité de l’approvisionnement en eau est devenue un enjeu important et où le développement du territoire se fait rapidement, l’implantation de stratégies de gestion efficaces de l’eau est primordiale.

Cette gestion est d’autant plus complexe compte tenu des nombreux systèmes permettant d’acheminer l’eau potable de la source aux consommateurs. Cette chaîne est composée de trois grands systèmes : 1) le système d’approvisionnement en eau brute, c’est-à-dire la source d’eau, 2) celui de production et de traitement d’eau potable, et 3) le système de distribution (incluant la plomberie domestique). Afin de préserver la qualité de l’eau et de réduire les risques de contamination tout au long de la chaîne, l’ajout de barrières de protection constitue une stratégie qui est priorisée par plusieurs organismes reconnus. En effet, l’approche à barrières multiples est considérée comme étant la stratégie la plus efficace pour réduire les risques pour la sécurité sanitaire de l’eau potable selon le Conseil canadien des ministres de l’environnement (CCME) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) [CCME et CEP, 2004; OMS, 2017b]. Cette approche préconise la protection de l’eau aux trois niveaux de la chaîne. La protection des sources d’eau potable correspond à la première barrière pour limiter la dégradation de la qualité de l’eau. Elle est un élément fondamental de la gestion de la qualité de l’eau sur un territoire. Les stratégies de protection des sources d’eau potable sont nombreuses. Toutefois, l’OMS privilégie les stratégies basées sur le principe de minimisation des risques de contamination dans les aires d’alimentation des prises d’eau [OMS, 2017a]. La protection des sources permet donc de réduire l’apport de contaminants dans l’eau brute alimentant les usines de traitement. La deuxième

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barrière correspond au système de traitement de l’eau qui vise à enlever les contaminants chimiques et microbiologiques. Selon la qualité de l’eau brute, le type de traitement nécessaire peut varier d’un cas à un autre afin d’atteindre les normes exigées par les autorités gouvernementales [CCME et CEP, 2004; OMS, 2017a]. Finalement, la troisième barrière permet de garantir la qualité de l’eau jusqu’au consommateur grâce à un suivi de la qualité de l’eau potable dans le réseau de distribution [CCME et CEP, 2004; OMS, 2017a; Santé Canada, 2013]. Ainsi, selon les exigences demandées, la qualité de l’eau du réseau de distribution doit être surveillée périodiquement à différents endroits dans le réseau de distribution afin d’assurer une eau de qualité irréprochable à l’ensemble des citoyens. Chaque barrière contribue à pallier les limites des autres barrières afin de minimiser les risques de contamination de l’eau potable de la source au consommateur [CCME et CEP, 2004].

La protection des sources d’eau potable présente de nombreux avantages. Elle permet de maintenir la santé de la population en réduisant les risques de contamination de la source [CCME et CEP, 2004; Gullick, 2019]. Par l’amélioration de la qualité de l’eau brute, elle a aussi pour avantage de réduire les coûts de traitement et de pérenniser les investissements dans les infrastructures municipales de traitement d’eau [MDDEP, 2012]. Par exemple, entre 2001 et 2013, environ 1,5 milliard de dollars ont été investis dans les équipements de captage et de traitement de l’eau potable au Québec [MDDELCC, 2016]. La protection des sources d’eau potable assure la pérennité de ces investissements puisqu’une dégradation de la qualité de l’eau brute pourrait entraîner des besoins supplémentaires en équipements de traitement ou de captage. De plus, la protection des sources d’eau peut contribuer au maintien de la qualité de l’environnement et de la biodiversité ainsi qu’à l’adaptation des municipalités face aux changements climatiques [Abell et al., 2017]. Elle permet également de contribuer au maintien d’une bonne qualité de l’eau grâce à la capacité naturelle d’épuration des bandes riveraines [Ville de Québec, 2010]. Bref, il est très avantageux de protéger la qualité de l’eau destinée à la production et à la distribution d’eau potable.

Afin de bien protéger les sources d’eau potable, il est primordial d’évaluer la vulnérabilité de la source face aux risques de contamination [Trax, 1999; U.S. EPA, 2020b]. La connaissance des sources connues et potentielles de contamination sur le territoire est nécessaire pour réaliser une analyse de risque efficace de la contamination de la source d’eau potable [U.S. EPA, 2020b]. L’évaluation des risques de la source d’eau potable se fait sur le territoire de la prise d’eau, soit son bassin versant. Ce

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mémoire s’intéresse aux méthode de gestion des risques de contamination dans le bassin versant d’une prise d’eau potable au Québec.

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1. Gestion des risques pour la protection des sources : état

des connaissances

Lors de l’élaboration d’une stratégie efficace de gestion des risques sur le territoire d’une prise d’eau, il est avantageux de connaître le temps disponible pour intervenir en cas de contamination en amont de la prise d’eau. La connaissance de ce paramètre permet une meilleure prise de décision par les responsables des usines de traitement, que ce soit pour adapter les opérations en fonction du type de contamination ou encore pour fermer la prise d’eau potable dans le cas d’une contamination très grave [Richard W. Gullick et al., 2004]. Le temps disponible représente, dans ce projet, le temps pour que les autorités soient informées de la contamination et puissent réagir adéquatement.

1.1. Temps de parcours des contaminants

Dans la littérature, le temps de concentration est utilisé pour décrire le temps que met une goutte d’eau pour parcourir la distance entre le point le plus éloigné hydrauliquement et l’exutoire du bassin versant en écoulement de surface [McCuen et al., 1984; Michailidi et al., 2018; Pavlovic et Moglen, 2008]. Il permet, entre autres, d’évaluer la réponse d’un bassin versant face à des évènements hydrologiques, ce qui en fait un paramètre utile pour la modélisation et la conception [Michailidi et al., 2018]. Par exemple, le temps de concentration est nécessaire pour la conception des systèmes de réseau de drainage urbain avec la méthode rationnelle puisqu’il permet d’évaluer l’intensité critique de pluie, en plus d’être employé pour le développement d’hydrographes unitaires [McCuen et al., 1984; Michailidi

et al., 2018]. Le temps de concentration est dépendant de plusieurs facteurs comme les

caractéristiques du bassin versant (superficie, topographie et rugosité de la surface d’écoulement) et le contexte hydrologique [Michailidi et al., 2018; Pavlovic et Moglen, 2008; Sarangi et al., 2006]. Plusieurs méthodes, qui requièrent différents intrants, peuvent être utilisées pour évaluer le temps de concentration d’un bassin versant. McCuen et al. (1984) ont comparé 11 méthodes d’évaluation du temps de concentration et les ont appliquées à 48 bassins versants aux États-Unis ayant différentes caractéristiques (superficie, occupations du territoire, topographie, contexte hydrologique, etc.). Parmi les méthodes retenues, la méthode du Technical Release 55 (TR-55) a été analysée puisqu’elle ne nécessite pas beaucoup d’informations et qu’elle est simple [McCuen et al., 1984]. Elle divise le parcours de l’eau selon trois segments d’écoulement en fonction du ruissellement en surface et en canal [NRCS, 1986]. L’étude réalisé par McCuen et al. (1984)a permis de conclure que les bassins

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du territoire sont mieux représentés par des méthodes permettant de différencier ces paramètres, comme la méthode du TR-55 par la segmentation du parcours d’écoulement.

Dans la littérature, le temps de concentration est souvent divisé en segments distincts soit une première partie correspondant au temps de parcours en ruissellement de surface et le deuxième au temps de parcours en canal [Akan, 1984, 1986; Michailidi et al., 2018; NRCS, 1986]. Cette distinction est dû au fait que les processus qui régissent les principes d’écoulement dans les deux cas sont différents. Les méthodes pour estimer le temps de concentration permettent d’évaluer le temps de parcours en surface (ruissellement et canal). Elles peuvent être théoriques ou appliquées par la modélisation [Akan, 1986; Burcher, 2009; McCuen et al., 1984].

Le contexte hydrologique joue un rôle important face aux paramètres temporels caractérisant un bassin versant [Michailidi et al., 2018]. Michailidi et al. (2018) ont réalisé une étude sur 30 bassins versants situés en Europe (Italie, Grèce et Chypre) possédant différentes caractéristiques (superficie, forme, occupation du territoire et géométrie du réseau hydrographique) afin d’évaluer l’influence de la hauteur d’eau ruisselée sur le temps de concentration. Un modèle réalisé avec un système d’informations géoréférencées a été utilisé pour estimer les temps de concentration. L’étude a permis de conclure que le temps de concentration est plus court lorsque la hauteur d’eau ruisselante est plus importante et ce, pour tous les bassins versants étudiés [Michailidi et al., 2018].

Peu d’études ont été réalisées afin d’évaluer les temps de parcours en surface dans une perspective de protection des sources d’eau potable. De nombreuses études, comme celles de McCuen et al. (1984) et de Michailidi et al. (2018), sont axées sur l’évaluation du temps de concentration en bassins versants possédant différentes caractéristiques. Cela peut s’expliquer par le fait que le temps de concentration ne représente pas le temps disponible pour réagir face à une contamination émise à un point d’émission potentielle d’un polluant. Effectivement, le temps de concentration représente plutôt le plus grand temps possible pour qu’un contaminant se rende à l’exutoire d’un bassin versant d’une prise d’eau potable. En réalité, les points d’émission potentielle des contaminants ne sont pas nécessairement situés au point le plus éloigné de la prise d’eau. De plus, de nombreux paramètres peuvent influencer le temps de transport d’un contaminant vers la prise d’eau potable comme la présence d’un réseau d’égouts pluviaux. Selon le cadre législatif de certaines juridictions en matière de protection des sources d’eau potable, le temps de transport des contaminants peut être utilisé pour

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anthropiques pouvant émettre une pollution nuisible pour la qualité et le traitement de l’eau sont restreintes. La section 1.3 présente la mise en place des aires de protection des sources d’eau potable. La présente étude analyse les temps de parcours des contaminants (cheminement en surface et en cours d’eau à débit permanent) dans un bassin versant d’une prise d’eau potable dans une perspective de protection des sources ce qui la distingue des autres études déjà réalisées.

1.2. Origine des contaminants

Il est également essentiel de différencier le type d’entrée des contaminants en surface dans un cours d’eau, soit ponctuel ou diffus, puisque cette caractéristique influence le cheminement (et par le fait même, le temps de transport) d’un contaminant vers la prise d’eau [Loehr, 1974; MDDEFP et MAMROT, 2014]. Dans le cadre du présent projet, une contamination d’origine ponctuelle réfère à une contamination dont l’origine est un point spécifique et localisable, comme un point de rejet pluvial dans un cours d’eau (point d’entrée spécifique). Une contamination d’origine diffuse, quant à elle, correspond plutôt à une contamination dont l’entrée des polluants dans un cours d’eau se fait sur une zone étendue (non spécifique) comme c’est le cas des pesticides d’origine agricole qui ruissellent sur une surface et qui entrent dans le cours d’eau par le ruissellement sur ses berges. Ces deux exemples démontrent également l’influence de l’aménagement du territoire et des infrastructures urbaines sur la forme d’entrée d’un polluant dans un cours d’eau.

Dans un contexte de protection des sources, l’origine ponctuelle ou diffuse d’une contamination est importante puisqu’elle influence les stratégies de contrôle qui peuvent être mises en place. Effectivement, comme la contamination d’origine ponctuelle est associée à une émission à un point spécifique, les solutions de réduction de contaminants sont plus nombreuses et plus faciles à mettre en place contrairement aux contaminants d’origine diffuse. Les stratégies de protection des sources dans le cas de contaminants d’origine diffuse sont principalement reliées aux pratiques de gestion optimales qui constituent un moyen efficace pour contrôler l’entrée de ce type de polluants dans l’environnement [Srivastava et al., 2002]. L’identification des zones de contamination d’origine diffuse est donc un enjeu important pour la mise en place et la priorisation d’efforts de protection des sources [Buchanan et al., 2013]. La contribution des contaminants d’origine diffuse émis dans un cours d’eau est toutefois plus difficile à évaluer et la mise en place des stratégies pour réduire les impacts de ce

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L’occupation du territoire joue aussi un rôle majeur en ce qui a trait à la caractérisation des polluants (d’origine ponctuelle et diffuse). Par exemple, les activités agricoles sont reconnues comme étant une source importante de pollution diffuse dans un bassin versant [Basnyat et al., 1999]. Basnyat et al. (1999) ont évalué les relations entre l’occupation du territoire, particulièrement les zones végétalisées, agricoles et urbaines et la concentration de nutriments (nitrate et matières en suspension) dans 18 bassins versants. Il a été démontré que la qualité de l’eau est meilleure en présence de zones plus végétalisées (forêts, prairies, etc.) près du cours d’eau par rapport à une occupation du territoire plus anthropique (agriculture, urbanisation, par exemple) [Basnyat et al., 1999]. Selon l’occupation du territoire et l’aménagement des infrastructures en place (réseau d’égout pluvial, par exemple), il est possible de distinguer un polluant selon son caractère diffus ou ponctuel. Il a également été démontré que la mise en place de politiques de gestion des occupations du territoire est avantageuse pour la conservation d’une bonne qualité d’eau à long terme [Delpla et Rodriguez, 2014; Hurley et Mazumder, 2013; U.S. EPA, 1999].

Les travaux de Rousseau et al. (2010) sur le bassin versant de la prise d’eau de la rivière Saint-Charles avaient pour objectif le développement d’une classification du territoire en zones d’intérêts pour la conservation de la ressource en eau. Pour ce qui est de l’occupation du sol, un niveau de risque a été associé aux différentes classes d’occupation du territoire présente dans le bassin versant étudié. Les classes d’occupation du sol caractérisées par un niveau de risque élevé sont notamment : les bâtiments, les sites d’enfouissement, les voies de communications étanches (asphalte) et de gravier [Rousseau et al., 2010]. Selon Haith [1976], l’occupation du territoire pourrait compter pour environ 89 % de la variation des concentrations d’azote et pour 63 % des variations de la moyenne de matières en suspension dans 20 rivières principales de l’état de New York.

1.3. Aires de protection des sources d’eau potable

La protection des sources requiert une bonne connaissance de l’aire d’alimentation de la prise d’eau potable et des activités anthropiques qui y sont présentes puisqu’elles induisent des risques de contamination de l’eau. Le cas de la ville de New York (États-Unis) est un exemple concret de la mise en place d’un plan de protection à long terme pour l’aire d’alimentation des sources d’eau potable. La ville a instauré plusieurs programmes, dont l’acquisition de terrains dans l’aire d’alimentation de trois de ses principales sources d’eau potable. Ainsi, la ville est propriétaire d’une grande partie de l’aire d’alimentation de ses prises d’eau potable ce qui lui accorde une grande capacité de contrôle des

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activités anthropiques dans ces territoires. D’ailleurs, cette stratégie a contribué au maintien de la qualité de l’eau et à réduire les besoins en infrastructures de traitement d’eau. Il est estimé que ces infrastructures auraient coûté entre 6 et 8 milliards pour la construction seulement de l’usine et des conduites d’amenée [Daily et Ellison, 2002; New York City Environmental Protection, 2019]. Il est aussi possible de citer le cas de la ville de Portland au Maine (États-Unis), qui est exempté de l’obligation de filtration de l’eau brute grâce à des stratégies de protection de l’eau provenant du milieu naturel du lac Sebago [CMQ, 2014]. Plus de 200 000 personnes sont alimentées par cette source. La ville évite ainsi des coûts pouvant atteindre entre 20 à 50 millions de dollars pour la construction d’une usine de filtration [CMQ, 2014].

Pour mettre en place de stratégies de protection des sources, comme celle évoqués à New York et à Portland, il est primordial non seulement de bien identifier les activités anthropiques présentes dans l’aire d’alimentation mais aussi d’évaluer les temps de parcours de transport des contaminants entre le lieu de chaque activité et la prise d’eau. Dans l’aire d’alimentation d’une prise d’eau potable, le temps de transport de l’eau et d’un contaminant se décompose en deux temps : un temps de cheminement entre le point d’émission du contaminant et son entrée dans un cours d’eau à débit permanent et un temps de parcours en cours d’eau à débit permanent jusqu’à la prise d’eau potable (équation 1). La Figure 1 schématise ces deux composantes. Elles sont présentées à l’aide d’un exemple de contamination provenant d’une zone industrielle.

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Figure 1 : Schématisation des parcours de l'eau sur un territoire

Plusieurs facteurs influencent les temps de cheminement et de parcours d’un contaminant dans l’aire d’alimentation d’une prise d’eau potable. Dans le cadre du présent projet, nous posons l’hypothèse que le temps de déplacement du contaminant est comparable à celui de l’eau pluviale. La topographie influence les temps de déplacement d’un contaminant transporté de façon gravitaire par l’eau pluviale. En effet, une pente plus abrupte augmente la vitesse d’écoulement et réduit le temps de transport vers la prise d’eau. Elle influence aussi la direction d’écoulement dans les conduites pluviales qui suivent habituellement la pente naturelle du terrain. Le type de sol influence aussi le temps de transport de l’eau selon sa capacité d’infiltration. Le contexte hydrologique a également un impact sur le temps disponible pour intervenir en cas de contamination. Effectivement, lors d’un évènement produisant une importante crue (par exemple, lors de la fonte des neiges ou d’un orage d’été), il est possible qu’un contaminant se déplace rapidement vers la prise d’eau bien que la source de contamination soit localisée loin de la prise d’eau [McCuen et al., 1984].

Finalement, comme les contaminants sur un bassin versant sont principalement acheminés vers les cours d’eau via l’eau de ruissellement qui lessive les surfaces lors de son passage, l’occupation du territoire joue un rôle important dans le parcours des contaminant dans un contexte d’augmentation des activités anthropiques dans l’aire d’alimentation d’une prise d’eau potable. Dans les milieux urbains

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par exemple, la protection des sources d’eau potable est étroitement liée avec la gestion de l’eau pluviale. L’eau qui ruisselle doit être gérée par le réseau de drainage pour assurer la sécurité des citoyens et l’intégrité des infrastructures et des bâtiments. Lorsqu’il est question de l’aire d’alimentation d’une prise d’eau potable, les quantités d’eau de ruissellement et les polluants qu’elle transporte sont un aspect non négligeable de la protection de la source d’eau.

L’imperméabilisation des surfaces associées à l’urbanisation peut être dûe au développement du réseau routier, à la création de stationnements ou à l’augmentation de la surface totale des toits, par exemple. Les sols perméables perdent alors leur capacité d’absorption en devenant imperméables [APEL, 2014b; MDDEFP et MAMROT, 2014]. L’imperméabilisation accroît le volume et les débits d’eau de ruissellement (Figure 2), ce qui entraîne l’érosion des berges et l’apport de polluants rapidement vers les cours d’eau et contribue à la contamination de la source d’eau potable [Hall, 1984; MDDEFP et MAMROT, 2014]. Ce phénomène réduit également les temps de réponse des bassins versants et limite les temps disponibles pour réagir face à une contamination (les pics de débit arrivent plus rapidement à l’exutoire) [Butler et al., 2018; Hall, 1984]. Autrement dit, l’imperméabilisation de l’aire d’alimentation augmente les vitesses de déplacement de l’eau et des polluants entre le point d’émission du polluant et son arrivée à la prise d’eau potable. L’urbanisation et l’imperméabilisation des surfaces ont donc un impact considérable sur le cycle de l’eau d’un bassin versant et sont des aspects importants à considérer dans la mise en place de stratégies de protection des sources d’eau potable.

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Figure 2 : Impacts de l'urbanisation sur : a) les débits et b) les niveaux d'eau des rivières (MDDEFP et MAMROT 2014, adapté de Schueler 1987)

L’eau de ruissellement contribue fortement à la dégradation de la qualité de l’eau des cours d’eau en transportant des polluants tels que des matières en suspension (MES), des métaux lourds, des sels, de l’azote, du phosphore et même des pathogènes [MDDEFP et MAMROT, 2014; U.S. EPA, 1983, 1999]. Dans certains cas, les contaminants ainsi acheminés vers les cours d’eau peuvent menacer la qualité des eaux brutes et compromettre l’efficacité de traitement des usines de production d’eau potable Les eaux provenant des réseaux pluviaux peuvent nuire également à la production de l’eau potable et ultimement poser ainsi un risque pour la santé publique [MDDEFP et MAMROT, 2014; U.S. EPA, 1999]. Par conséquent, l’augmentation des surfaces imperméables et l’urbanisation sont des enjeux de taille au niveau de la gestion de l’eau pluviale et de la protection des sources d’eau potable. La diversité des formes d’occupation du territoire augmente la présence et la variété des contaminants potentiels sur l’aire d’alimentation d’une prise d’eau. La nature des polluants potentiels transportés par l’eau pluviale et les risques qui leur sont associés sont influencés par le type d’occupation du sol puisque certaines activités peuvent émettre des contaminants nuisibles à la qualité de l’eau brute ou

a)

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au traitement de l’eau potable à l’usine [MDDEFP et MAMROT, 2014]. Effectivement, certaines formes d’occupation du territoire peuvent affecter des paramètres critiques de la qualité de l’eau brute en vue de la production d'eau potable tels que la turbidité, la présence de coliformes fécaux, la matière organique, la température, le goût, la couleur et l'odeur [Nathanson, 2008]. Certaines activités (industrielles, agricoles ou urbaines) présentes dans l’aire d’alimentation peuvent être incompatibles puisqu’elles causent un préjudiceà la qualité de l’eau brute. Par exemple, les pesticides ainsi que les contaminants provenant de l’entreposage du fumier et des activités connexes de l’agriculture peuvent avoir un impact considérable sur la qualité de l’eau [MDDEFP et MAMROT, 2014]. Dans un contexte de protection des sources d’eau potable, il est d’autant plus important de connaître les activités anthropiques présentes dans l’aire d’alimentation pour mieux identifier les risques possibles de contamination. Une gestion efficace des risques passe donc par la connaissance du territoire et de la présence des activités incompatibles avec une prise d’eau.

L’évaluation des risques associées aux activités anthropiques requiert leur localisation dans l’aire d’alimentation de la prise d’eau potable. La localisation de ces activités permet de mieux cibler et prioriser les risques qui leurs sont associés. Comme certaines activités sont incompatibles avec une prise d’eau potable à cause des contaminants potentiels qu’elles peuvent émettre, la délimitation des aires de protection dans lesquels des activités nuisibles pour la qualité de l’eau sont restreintes, correspond à une stratégie efficace pour réduire la vulnérabilité de la prise d’eau potable.

1.4. Évaluation et délimitation des aires de protection

Selon les cadres législatifs de la juridiction en place, plusieurs approches sont utilisées en ce qui a trait à la délimitation des aires de protection dans un contexte de protection des sources d’eau potable. La délimitation des aires de protection peut varier selon le type de prise d’eau (prise d’eau en lac, en rivière ou encore lorsqu’elle est soumise à la marée). Dans la présente étude, seules les aires de protection des prises d’eau potable de surface en rivière seront considérées. Celles-ci peuvent être délimitées, entre autres, selon des distances, des temps de parcours ou encore une combinaison de ces méthodes en fonction du cadre réglementaire en vigueur [Prévost et al., 2017; U.S. EPA, 1997]. Aux États-Unis, chaque État doit mettre en place un programme d’évaluation des sources d’eau potable en suivant les lignes directrices de l’Environmental Protection Agency (Source Water

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trois aires de protection sont délimitées par une méthode géographique. Une première aire de protection (zone A) correspond à une zone de 120 m autour de la prise d’eau incluant une bande de 60 m autour de l’affluent. Ensuite, la deuxième zone de protection (zone B) correspond à une distance de 800 m en amont de la prise d’eau à partir de la limite de la zone A. Finalement, la zone C correspond à l’entièreté de l’aire d’alimentation de la prise d’eau à l’exception des zones de protection A et B [Massachusetts Department of Environmental Protection, 2016]. Dans ces zones, aucune restriction générale n’est en vigueur, c’est plutôt du cas par cas si le risque ne peut être géré [Prévost et al., 2017].

Au Canada, puisque la protection des sources est sous juridiction provinciale, il est possible d’observer des approches réglementaires différentes. Par exemple, en Ontario, les aires de protection des sources d’eau potable sont déterminées en fonction de plusieurs méthodes [Government of Ontario, 2017]. D’abord, une première aire de protection rapprochée est définie par un demi-cercle de diamètre de 200 m autour de la prise d’eau (distance fixe) et elle inclut une distance de 10 m en aval de la prise d’eau ainsi qu’une bande riveraine de 120 m. La deuxième aire de protection est fonction du temps de parcours de l’eau [Government of Ontario, 2017]. Cette aire de protection doit être telle que le temps nécessaire pour une goutte d’eau pour se rendre à la prise d'eau est égal ou inférieur à la durée suffisante pour permettre à l'opérateur du système de traitement de réagir face à un déversement ou à un autre évènement qui pourrait nuire à la qualité de l'eau potable [Government of Ontario, 2017]. Dans le cas d’une prise d’eau dans une rivière, ce temps est fixé à 2h [Prévost et al., 2017]. Finalement, l’entièreté de la masse d’eau s’écoulant vers la prise d’eau représente l’aire de protection éloignée. Cette méthode de délimitation des aires permet de prendre en compte l’impact du contexte hydrologique. Cependant, une bonne connaissance du territoire est essentielle nécessitant de nombreuses données qui ne sont pas forcément disponibles pour toutes les prises d’eau. Elle peut aussi être plus complexe à mettre en place puisqu’il est possible que l’occupation existante du territoire induise des conflits quant à la délimitation des zones.

Au Québec, le Règlement sur le prélèvement des eaux et leur protection (RPEP) encadre la protection des sources d’eau potable. Pour les eaux de surface, cette analyse comprend la délimitation de trois aires de protection (immédiate, intermédiaire et éloignée). Cette fragmentation du territoire s’inscrit dans une approche cherchant à identifier les secteurs à l’intérieur desquels les activités anthropiques sont plus susceptibles de poser un risque important pour les prises d’eau potable. Ces aires de

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protection sont déterminées selon un raisonnement géographique en fonction d’une distance fixée à partir de la prise d’eau. Ainsi, différentes activités sont restreintes, voire interdites selon l’aire de protection puisque les contaminants peuvent se retrouver rapidement au site de prélèvement avec une dilution minimale [MDDELCC, 2016]. Les aires de protection incluent également une bande de terre d’une largeur différente variant selon la zone. Cela permet de considérer la protection d’habitats pour la faune ainsi que le caractère filtrant des bandes riveraines. La méthode de délimitation des aires de protection exigée au Québec est détaillée à la section 3.1.

Toutefois, la méthode géographique préconisée au Québec a certains inconvénients car elle ne considère pas les caractéristiques locales distinctes des bassins versants influençant le cycle de l’eau. En effet, l’occupation du territoire, les types de sols et la topographie, qui peuvent influencer le cheminement de l’eau, ne sont pas considérés par cette méthode. De plus, les distances sont employées pour catégoriser les temps de parcours des contaminants sur le territoire selon l’aire de protection dans laquelle les polluants potentiels se retrouvent. Toutefois, les temps de cheminement (temps entre l’émission du contaminant et son entrée dans un cours d’eau à débit permanent) ne sont pas considérés par le RPEP.L’inclusion d’une bande de terre de part et d’autre du cours d’eau est toutefois exigée dans les aires de protection immédiate et intermédiaire, ce qui correspond à une partie du parcours du contaminant. Pour obtenir une meilleure estimation du temps disponible pour intervenir en cas de contamination, il serait utile de considérer le temps de cheminement et le temps de parcours de l’eau.

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2. Objectifs de l’étude

L’objectif principal de ce projet de maîtrise est d’évaluer l’influence du cheminement de l’eau sur le temps disponible pour réagir face à une contamination dans l’aire d’alimentation d’une prise d’eau potable dans un contexte de protection des sources. De cet objectif principal découlent trois objectifs spécifiques.

Le premier objectif spécifique concerne l’élaboration d’une méthodologie d’évaluation du temps disponible (temps de cheminement et temps de parcours en cours d’eau à débit permanent). Le deuxième objectif spécifique est de comparer différentes méthodes de détermination du temps de cheminement (entre le moment d’émission du contaminant et le moment auquel il rejoint un cours d’eau à débit permanent). Finalement, le troisième objectif spécifique consiste à l’évaluation de la contribution du temps de cheminement par rapport au temps disponible. Autrement dit, est-il pertinent de considérer le temps de cheminement dans l’analyse des temps disponibles ?

Ce projet s’inscrit dans une approche globale cherchant à améliorer la compréhension et les connaissances des concepts de génie des eaux par les professionnels d’aménagement du territoire pour ainsi faciliter les échanges entre les différents acteurs dans le domaine de la protection des sources d’eau potable.

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3. Étude de cas

L’approche réglementaire du Québec en matière de protection des sources, plus précisément le RPEP, est le cas considéré de cette étude. L’aire d’alimentation de la prise d’eau potable de la Ville de Québec dans la rivière Saint-Charles est le territoire étudiée pour atteindre les objectifs énoncés. Ce bassin versant constitue un excellent site d’étude puisque la topographie est variée et plusieurs types d’occupation du territoire sont présentes. Ainsi, les cheminements de l’eau et les types de contaminants sont diversifiés.

3.1. Approche réglementaire du Québec

Le gouvernement provincial encadre la gestion de l’eau à l’aide de stratégies, lois, règlements et programmes [MELCC, 2014]. Afin d’assurer la protection de l’eau, de la gérer avec une perspective de développement durable et de protéger la santé publique et celle des écosystèmes, le Gouvernement du Québec a mis en place la Stratégie québécoise de l’eau 2018-2030 (qui fait suite à la Politique nationale de l’eau de 2002) [MDDELCC, 2018]. Cette politique cherche à mieux encadrer la gestion de l’eau de façon intégrée, c’est-à-dire sur la base des bassins versants. Elle encourage l’implication des nombreux acteurs dans le domaine de l’eau afin d’améliorer la coordination des actions [GWP et RIOB, 2009]. Elle suit l’approche par barrières multiples proposée par le gouvernement du Canada et permet la mise en place d’actions limitant les risques de contaminations de l’eau potable entre la source et le consommateur.

Afin d’implanter un nouveau système d’autorisation de prélèvements d’eau sur le territoire québécois et d’améliorer la protection des sources d’eau potable, le gouvernement provincial a mis en place le RPEP en 2014. Ce règlement concerne la protection des sources d’eau potable à des fins de consommation humaine ou de transformation alimentaire pour répondre aux lois sur la qualité de l’environnement et celle affirmant le caractère collectif des ressources hydriques [MELCC, 2019]. Il impose, entre autres, de nouvelles obligations pour les responsables des installations de prélèvement d’eau visées par le RPEP quant à la méthode de protection des sources d’eau potable. Les exploitants doivent notamment réaliser l’analyse de la vulnérabilité de leur site de prélèvement selon les démarches détaillées dans le Guide de réalisation des analyses de vulnérabilité des sources destinées à l’alimentation en eau potable au Québec [MDDELCC, 2016].

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Selon le RPEP, des catégories de prélèvements d’eau sont déterminées en fonction de la population desservie et les zones de protection sont délimitées selon des distances fixes. Les zones de protection sont nommées aire de protection immédiate, aire de protection intermédiaire et aire de protection

éloignée. Puisque les processus d’intrusion de contaminants sont différents dans les sources d’eau

souterraine et de surface, les limites des zones de protection dans ces deux contextes sont distinguées. Pour ce qui est des eaux de surface, les limites des aires de protection sont déterminées en fonction du type de site de prélèvement de l’eau : une prise d’eau se trouvant dans le fleuve Saint-Laurent (soumis à des marées), dans un lac et dans une rivière. Le règlement détaille les activités proscrites en fonction de l’aire de protection pour renforcer la protection des sources d’eau potable. Par exemple, il est interdit d’épandre des déjections animales, du compost de ferme ou des matières résiduelles fertilisantes non certifiées conformes aux normes CAN/BNQ 200, CAN/BNQ 0413-400 ou BNQ 419-090 dans les 100 premiers mètres de la zone de protection intermédiaire pour un site de prélèvement desservant une population de plus de 500 personnes et au moins une résidence [Publications Québec, 2014]. Les gestionnaires de site de prélèvement ont six ans pour délimiter les aires de protection et l’analyse de la vulnérabilité des sources d’eau potable qu’ils exploitent et transmettre un rapport détaillé au ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les Changements Climatiques (MELCC). La date butoir pour le premier rendu est le 1er avril 2021. Ils devront par la suite

mettre à jour ce rapport tous les cinq ans [MDDELCC, 2016].

Pour déterminer les limites de l’aire de protection immédiate pour une prise d’eau de catégorie 1 (site de prélèvement pour le système d’aqueduc d’une municipalité alimentant plus de 500 personnes et au moins une résidence) située dans un cours d’eau autre que le fleuve Saint-Laurent, le RPEP impose une distance de 500 m à l’amont de la prise d’eau et de 50 m à l’aval [Publications Québec, 2014]. Elle inclut les eaux de surface, les portions de tributaires ainsi qu’une bande de terre de 10 m de part et d’autre du cours d’eau calculée à partir de la ligne des hautes eaux. L’aire de protection intermédiaire correspond, quant à elle, à une distance de 10 km en amont et 50 m en aval du site de prélèvement. Elle inclut aussi une bande de terre de 120 m à partir de la ligne des hautes eaux. Pour les portions de tributaires à considérer, la distance doit correspondre à la différence entre la distance totale à considérer et la distance comprise entre l’embouchure du tributaire et le site de prélèvement [MDDELCC, 2016]. La Figure 3 présente une schématisation des aires immédiate et intermédiaire pour une prise d’eau potable dans une rivière.

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Figure 3: Aire de protection immédiate et intermédiaire pour une prise d'eau dans une rivière (tirée du Guide de réalisation des analyses de la vulnérabilité des sources destinées à l’alimentation en eau potable au

Québec [MDDELCC, 2016])

Les activités acceptées dans l’aire de protection immédiate sont plus restreintes puisqu’il est considéré que les contaminants peuvent se retrouver rapidement au site de prélèvement avec une dilution minimale [MDDELCC, 2016]. Il est donc de mise d’insister sur la protection de cette zone en limitant les sources de contaminations possibles. L’aire de protection intermédiaire, quant à elle, correspond à une zone à l’intérieur de laquelle le temps de parcours des contaminants ne permet pas aux responsables des usines de production d’eau potable de réagir adéquatement lors d’une potentielle contamination. De plus, il est considéré que les effluents intermittents et les eaux pluviales d’un fossé ne sont pas assez dilués avant d’arriver au site de prélèvement [MDDELCC, 2016].

Pour ce qui est de l’aire de protection éloignée, celle-ci comprend tout le bassin versant de la prise d’eau potable (l’aire d’alimentation) et inclut la portion protégée par l’aire immédiate en aval de la prise d’eau. Il est considéré que le temps de parcours des contaminants dans cette zone est assez important pour permettre aux responsables d’agir efficacement pour réduire les impacts d’une contamination sur la qualité d’eau. Il est également considéré que la dilution d’un contaminant émis de façon intermittente est suffisante au site de prélèvement [MDDELCC, 2016]. La Figure 4 présente une schématisation des aires de protection immédiate, intermédiaire et éloignée pour une prise d’eau située dans une rivière.

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Figure 4 : Aires de protection des sources d'eau potable pour une prise d'eau potable située dans une rivière (tirée du Guide de réalisation des analyses de la vulnérabilité des sources destinées à l’alimentation en eau

potable au Québec [MDDELCC, 2016])

3.2. Territoire à l’étude

Dans le cadre de ce projet, la prise d’eau potable étudiée est celle se trouvant dans la rivière Saint-Charles sous la responsabilité de la Ville de Québec. Selon les directives du RPEP, cette prise d’eau correspond à un prélèvement de catégorie 1, soit à un système d’approvisionnement en eau potable desservant une population de plus de 500 personnes et au moins une résidence [Publications Québec, 2014]. La population desservie par cette prise d’eau est d’environ 300 000 personnes [APEL, 2014b; Ville de Québec, 2019a]. L’eau prélevée à ce site représente plus de 50 % de l’eau traitée par la Ville de Québec [Ville de Québec, 2019c]. La prise d’eau se situe au nord de la Ville de Québec à 11 km en aval du lac Saint-Charles. La Figure 5 présente la localisation de la prise d’eau potable de la Ville de

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Figure 5 : Localisation de la prise d'eau potable de la Ville de Québec dans la rivière Saint-Charles et son bassin versant

Le bassin versant de cette prise d’eau potable s’étend sur un territoire de 334 km² [CMQ, 2014]. Une particularité de ce bassin versant est la présence du lac Saint-Charles qui fait office de réservoir d’eau brute. Il possède une superficie d’environ 3,6 km² et une forme allongée dans l’axe nord-sud [APEL, 2019b; Brodeur et al., 2009; Légaré, 1998]. Le temps de résidence de l’eau dans le lac est estimé en moyenne à 32 jours [APEL, 2015]. Le niveau d’eau du lac est géré par le barrage Cyrille-Delage, construit initialement en 1934 puis rehaussé en 1948 d’environ 2 m comparativement à son niveau d’origine [Brodeur et al., 2009; R. Tremblay et al., 2001]. Il a été reconstruit en 2013 [Organisme de bassin versant de la Capitale, 2015]. Il permet à la Ville de Québec de moduler le débit provenant du lac en fonction des conditions hydrologiques (étiage et crue) grâce à la présence de vannes de fond pouvant être ajustées par les opérateurs de l’usine de production d’eau potable.

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3.2.1. Principaux cours d’eau

Le bassin versant de la prise d’eau potable étudiée comprend plusieurs cours d’eau tributaires de la rivière Saint-Charles. La rivière des Hurons est celle située plus au nord sur le territoire et elle est le principal affluent du lac Charles avec le lac Delage (81,6 % de l’eau alimentant le lac Saint-Charles proviennent de la rivière des Hurons et 3,7 % du lac Delage) [APEL, 2019c]. Les rivières Nelson, à l’ouest, et Jaune, à l’est, alimentent la rivière Saint-Charles en aval du lac. Les sous-bassins versants de ces cours d’eau sont donc inclus dans celui de la prise d’eau. Le sous-bassin versant de la rivière des Hurons représente environ 39 % de la superficie totale du bassin versant de la prise d’eau tandis que ceux des rivières Nelson et Jaune représentent respectivement 20 % et 24 % [APEL, 2014b]. La prise d’eau est alimentée en terme de débit à 42 % par le lac Saint-Charles, 35 % par la rivière Jaune et 23 % par la rivière Nelson (la rivière des Hurons se déversant dans le lac Saint-Charles) [Roche, 2010]. Il est important de souligner que les contributions des rivières et du lac Saint-Charles peuvent varier en fonction du contexte hydrologique. En période de sécheresse par exemple, le lac Saint-Charles peut contribuer à près de 60 % de débit de l’eau à la prise [Ville de Québec, 2019b].. De nombreux ruisseaux alimentent les rivières du territoire tels que le ruisseau des Eaux Fraîches (affluent de la rivière Saint-Charles), le ruisseau des Valets (affluent de la rivière Jaune) et le ruisseau Savard (affluent de la rivière Nelson). Puisque la rivière Nelson se jette dans la rivière Saint-Charles à une distance d’environ 1 km en amont de la prise d’eau, la qualité de l’eau brute peut être grandement influencée par une contamination provenant du bassin versant de la rivière Nelson [Boulé et al., 2014]. La Figure 6 présente les différents sous-bassins versants de la prise d’eau de la Ville de Québec dans la rivière Saint-Charles.

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Figure 6 : Principaux sous-bassins versants du territoire de la prise d'eau de la Ville de Québec dans la rivière Saint-Charles adapté des données de l’APEL

Étant donné la présence du lac et de son importance quant à l’alimentation de la rivière Saint-Charles, sa qualité d’eau est un élément critique pour le système de traitement de l’usine de production d’eau potable en aval. Effectivement, la qualité de l’eau du lac influence directement les capacités du traitement à l’usine. Selon AGIRO, anciennement l’Association pour la protection de l’environnement du lac Saint-Charles et des marais du Nord (APEL), le lac est actuellement dans un processus d’eutrophisation accéléré, principalement à cause des activités anthropiques sur le territoire [APEL, 2014a]. De plus, la présence de cyanobactéries a été enregistrée à plusieurs reprises et pose un risque récurrent pour la santé publique. Ainsi, le lac Saint-Charles peut être considéré comme une source de contamination potentielle pour la prise d’eau.

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3.2.2. Caractéristiques spécifiques de l’aire d’alimentation

Le bassin versant de la prise d’eau potable étudiée est caractérisé par une occupation du territoire, un type de sol et une topographie qui lui sont propres. Ces paramètres influencent l’écoulement de l’eau et des contaminants sur le territoire. La connaissance de ces paramètres est essentielle pour l’analyse et la compréhension du cheminement de l’eau et de son parcours en rivière.

Dans un premier temps, sur le bassin versant de la prise d’eau potable, l’occupation du territoire est très diversifiée. La majorité du territoire est occupé par un couvert forestier qui représente près de 74,5 % de la superficie du bassin versant de la prise d’eau [Boulé et al., 2014]. Le territoire peut être divisé en deux secteurs distincts : une zone au nord du lac Saint-Charles, principalement forestière et une zone au sud plus urbanisée. À l’amont du lac, quelques activités anthropiques peuvent être considérées comme portant un risque potentiel à la qualité de l’eau potable. Un centre de ski ainsi que la présence de l’autoroute 73 peuvent être considérés comme des activités à risque. Le centre de ski contribue à l’augmentation de la quantité de sédiments se retrouvant dans les cours d’eau [APEL, 2014a]. Pour ce qui est de l’autoroute 73, de nombreuses possibilités de contamination doivent être prises en compte. D’abord, cette infrastructure peut être considérée comme une source de pollution diffuse puisque l’épandage de sels de voirie en hiver est une pratique courante : environ 40 tonnes de sels sont épandues par kilomètre d’autoroute, ce qui augmente la salinité de l’eau des cours d’eau et affecte la qualité des écosystèmes [Mochizuki, 2011]. Puis, en considérant les risques de déversement accidentel, il est possible de classer l’autoroute comme une source ponctuelle de polluants. Il est donc important de tenir compte d’une telle infrastructure lors de l’évaluation des temps de parcours des contaminants entre le point d’émission possible et la prise d’eau. Il est aussi important de considérer les stations d’épuration de Stoneham-et-Tewkesbury et de Lac-Delage qui rejettent leurs effluents dans le lac Saint-Charles. Ces rejets et ceux provenant des systèmes d’assainissement individuel (fosses septiques) apportent des nutriments au lac, principalement de l’azote et du phosphore, qui contribuent à la prolifération des algues et à la dégradation de la qualité de l’eau [APEL, 2014a].

Le territoire de la prise d’eau fait face également à l’augmentation des surfaces imperméables par l’urbanisation, surtout dans le sud du bassin versant. Selon AGIRO, les surfaces imperméables ont augmenté de 6,15 % à 7,70 % entre 2008 et 2013 [2017]. Comme il a été mentionné préalablement, l’occupation du territoire influence aussi les vitesses d’écoulement de l’eau et des contaminants puisque des coefficients de rugosité différents sont associés aux revêtements distincts. Effectivement,

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des surfaces ayant une grande rugosité, par exemple une surface très végétalisée, auront comme impact de ralentir l’écoulement contrairement à une surface plus lisse, comme une rue. La rugosité est représentée par le coefficient de Manning pour des écoulements à surface libre. Les vitesses d’écoulement sont étroitement reliées au temps disponible pour réagir face à une contamination. Étant donné l’évolution du cadre bâti dans le bassin versant à l’étude, il est cohérent d’observer des crues plus importantes favorisées par l’augmentation de la superficie imperméable et des étiages plus intense dû à la diminution de l’infiltration de l’eau dans le sol dans l’aire d’alimentation de la prise d’eau potable [Roche, 2010].

Pour ce qui est du type de sol, selon le Projet d’acquisition de connaissances sur les eaux souterraines sur le territoire de la Communauté métropolitaine de Québec (PACES-CMQ), le contexte hydrostratigraphique est principalement constitué de sable et gravier silteux sur roc sur la majorité du territoire (80 % du territoire) et possède une bonne capacité d’infiltration [St-Pierre, 2019; Talbot-Poulin

et al., 2013]. La typologie du sol influence le cycle de l’eau puisqu’elle affecte la quantité d’eau ruisselée

selon ses différentes propriétés, telles que la capacité d’infiltration et la porosité. Toutefois, bien que la capacité d’infiltration soit bonne, l’épaisseur de sol avant d’atteindre le roc est faible par endroit ce qui réduit la quantité d’eau pouvant être emmagasiné [Roche, 2010].

Un autre aspect influençant les temps de ruissellement et le temps en rivière est la topographie. Dans le cas d’étude, les pentes à l’amont du territoire de la prise d’eau potable (au nord du bassin versant), peuvent être qualifiées comme étant moyennes à fortes et vont jusqu’à 60 % par endroit selon AGIRO [2014b]. Dans le bassin versant de la rivière Nelson, les pentes sont considérées comme étant majoritairement faibles [CBRSC, 2009]. Pour ce qui est des pentes du bassin versant de la rivière Jaune, celles-ci sont généralement importantes et diminuent vers l’aval [APEL, 2014b]. Les pentes à l’amont du lac Saint-Charles sont principalement plus fortes qu’à l’aval.

3.2.3. Acteurs du territoire

De nombreuses parties prenantes provenant de secteurs différents tels que les secteurs industriel, communautaire, autochtone et municipal, sont présentes sur le bassin versant de la prise d’eau potable dans la rivière Saint-Charles. Cela peut contribuer à complexifier l’instauration d’une gestion intégrée du bassin versant de la prise d’eau ainsi que la mise en place de stratégie de protection de la source en raison des possibles divergences entre les d’intérêts de chacun des acteurs [Biswas, 2001]. Dans

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tous les acteurs du bassin versant de la prise d’eau afin de mettre en place des actions concertées et efficaces [MDDEFP, 2012; OMS, 2017a].

Le Gouvernement du Québec a choisi de créer les organismes de bassin versant (OBV) pour favoriser la gestion intégrée des ressources en eau au Québec. Leurs actions sont encadrées par la Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et visant à renforcer leur protection, adoptée en 2009 (L.R.Q c. C-6.2) ; la Stratégie québécoise de l’eau 2018-2030 et le cadre de référence pour les organismes de bassins versants du MELCC [ROBVQ, 2011]. Cette gestion intégrée permet de concilier les intérêts et les besoins des multiples parties prenantes d’un territoire. L’OBV de la Capitale est l’organisme présent sur le territoire à l’étude. Son mandat est d’assurer la pérennité de la ressource en eau et de ses usages sur son territoire en consolidant la concertation des usagers et des gestionnaires et en réalisant des projets pour promouvoir la préservation et la conservation de l’eau [Organisme de bassin versant de la Capitale, 2019].

Il est également important de souligner la présence d’un organisme à but non lucratif sur le territoire à l’étude, AGIRO qui a pour mission la protection et la mise en valeur du bassin versant de la rivière Saint-Charles sur laquelle se situe la prise d’eau. AGIRO est un acteur important dans le bassin versant de la prise d’eau puisqu’il génère énormément d’informations sur son territoire. Par exemple, il a réalisé, en collaboration avec la Ville de Québec, la Diagnose du lac Saint-Charles afin de faire l’état du lac et de ses affluents [APEL, 2019a]. Les connaissances ainsi développées sont utilisées par les gestionnaires du territoire pour la prise de décision. Il est aussi important de souligner que AGIRO s’implique également au niveau de la sensibilisation des citoyens.

Ainsi, par leur implication dans l’amélioration de la connaissance du territoire et par le rassemblement de différents acteurs dans le domaine de l’eau, l’OBV de la Capitale et AGIRO jouent des rôles essentiels à la gestion intégrée et concertée de l’eau au sein du territoire.

La Communauté Métropolitaine de Québec (CMQ) est également un acteur important dans la gestion de l’eau dans le bassin versant étudié. En ce qui concerne la protection des sources d’eau potable, il a, entre autre, mis en vigueur le règlement de contrôle intérimaire visant à limiter les activités dans les bassins versants des prises d'eau du territoire[CMQ, 2019].

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De plus, comme le territoire à l’étude est vaste et que les limites administratives sont indépendantes des limites d’écoulement de l’eau, il est possible de constater la présence de 6 municipalités ainsi que d’une réserve autochtone dans l’aire d’alimentation de la prise d’eau. Il s’agit de la Ville de Québec, Sainte-Brigitte-de-Laval, Stoneham-et-Tewkesbury, Lac-Delage, Lac-Beauport, Saint-Gabriel-de-Valcartier et Shannon et la réserve est celle de Wendake [Brodeur et al., 2009]. Toutefois, seule la Ville de Québec est responsable du site de prélèvement et il est donc de son ressort de réaliser la délimitation des aires de protection et l’analyse de vulnérabilité de la source pour respecter le RPEP.

3.3. Évaluation des risques sur le territoire

Dans le cadre de la démarche de protection des sources, l’évaluation des risques de contamination permet la priorisation des actions pour réduire les menaces à la prise d’eau associées aux activités anthropiques sur le territoire. L’évaluation des risques peut s’avérer une démarche complexe puisque de nombreux paramètres, comme la nature du contaminant, son impact sur la capacité de traitement de l’eau, sa fréquence d’émission et la localisation du point d’émission potentiel, doivent être considérés.

Dans le territoire à l’étude, une analyse de risque associée à la présence de d’activités anthropiques a été réalisée par Ariane Marais en 2018. Dans le cadre de son doctorat, A. Marais a élaboré une méthodologie pour évaluer l’incompatibilité des activités anthropiques avec la prise d’eau potable à l’étude. Elle a établi une démarche de priorisation des propriétés considérées les plus à risque pour l’intégrité de la qualité de l’eau au site de prélèvement. La méthodologie ainsi développée permet d’aider les décideurs à mettre en place des stratégies d’aménagement du territoire et de cibler les endroits où agir promptement pour gérer les risques importants [Marais et al., 2018]. La Ville de Québec avait préalablement sélectionné 265 propriétés selon l’occupation du territoire qui leur était associée (commerciale, forestière, agricole, touristique ou industrielle) dans le bassin versant de la prise d’eau de la rivière Saint-Charles et sur son territoire. À partir de ces 265 propriétés, A. Marais a ensuite obtenu 207 propriétés potentiellement polluantes en fusionnant des propriétés avec les mêmes caractéristiques (surface, activité, etc.). Pour catégoriser les propriétés selon les risques qu’elles posent pour la qualité de l’eau à la prise d’eau, une approche d’analyse multicritères a été utilisée. Les propriétés ont été classées en quartiles selon l’importance du risque qu’elles posent pour la qualité de l’eau brute à la prise d’eau. L’approche développée par A. Marais considère sept critères définis lors

Figure

Figure 1 : Schématisation des parcours de l'eau sur un territoire
Figure 2 : Impacts de l'urbanisation sur : a) les débits et b) les niveaux d'eau des rivières (MDDEFP et MAMROT  2014, adapté de Schueler 1987)
Figure 3: Aire de protection immédiate et intermédiaire pour une prise d'eau dans une rivière (tirée du Guide  de réalisation des analyses de la vulnérabilité des sources destinées à l’alimentation en eau potable au
Figure 4 : Aires de protection des sources d'eau potable pour une prise d'eau potable située dans une rivière  (tirée du Guide de réalisation des analyses de la vulnérabilité des sources destinées à l’alimentation en eau
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